M. Philippe Mouiller. C’est une honte !
M. Jean-Raymond Hugonet. C’est scandaleux !
M. Thomas Dossus. … et des gaz lacrymogènes ont été envoyés sur des blessés. Vous mentez, comme vous avez menti ici lors du fiasco du Stade de France.
Quel est ce pays où, après avoir mis deux manifestants dans le coma, toute la chaîne de commandement ne s’interroge pas sur la méthode de maintien de l’ordre ? Quel est ce pays où, après un tel fiasco, un ministre peut continuer de mentir à répétition et dissoudre un collectif d’opposants politiques ? (Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées des groupes SER et CRCE. – Huées sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
M. Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur et des outre-mer. Monsieur le sénateur Dossus, je ne suis pas sûr d’avoir bien compris la question. (M. Bruno Sido s’esclaffe.)
Certes, il y avait un peu de bruit, mais il me semble que vous tentiez de faire un distinguo entre la gauche et le gauchisme…
Quoi qu’il en soit, je regrette que des parlementaires revendiquent d’aller dans une manifestation illégale. (Vifs applaudissements prolongés sur les travées des groupes Les Républicains, UC, RDSE, RDPI et INDEP.) Ce faisant, ils ne respectent pas eux-mêmes la loi de la République.
Je regrette que des parlementaires puissent être aux côtés de ceux qui jettent des cocktails Molotov sur des gendarmes. (Mêmes mouvements.)
M. Daniel Breuiller. C’est faux !
M. Gérald Darmanin, ministre. Je regrette que ces parlementaires n’aient pu constater, comme j’en ai eu l’occasion moi-même, les attaques dont ont été victimes les gendarmes, dont certains ont reçu de l’acide sur les pieds.
Je regrette, monsieur le sénateur, que vous n’ayez pas entendu les deux conférences de presse organisées par Mme la préfète avant la manifestation, qui était interdite depuis le 17 mars, ni même celle du procureur de la République.
Manifestement, vous vous êtes assis sur tout cela : sur les violences contre nos gendarmes, sur l’interdiction de manifester, sur les conférences de presse de la préfète de la République et du procureur de la République.
M. Bruno Sido. On est d’accord !
M. Gérald Darmanin, ministre. Je regrette par ailleurs que vous relayiez ici, de nouveau, des fake news.
Non, monsieur le sénateur, les secours n’ont pas été empêchés par les forces de l’ordre. (Protestations sur les travées du groupe GEST.) C’est le Samu des Deux-Sèvres qui le dit lui-même. Écoutez-le. Je sais que cela vous ferait plaisir de penser que les gendarmes souhaitent la mort des gens, mais tel n’est pas le cas. C’est le médecin du GIGN, monsieur le sénateur, qui a fendu la foule, alors qu’il était harcelé par ceux qui étaient, manifestement, vos camarades d’un jour… (M. Thomas Dossus fait un signe de dénégation.)
Vous pouvez hocher la tête, mais c’est tout à fait scandaleux ! Les gendarmes ont même dû faire demi-tour sous une pluie de pavés et de cocktails Molotov, alors qu’ils allaient secourir un manifestant. Voilà la vérité, monsieur le sénateur. (Vifs applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, RDSE, INDEP et RDPI.)
Moi aussi, je veux avoir une pensée pour toutes les personnes blessées, particulièrement pour celles qui luttent pour la vie. L’enquête judiciaire fera apparaître la vérité, et je suis prêt, avec toute mon administration, à coopérer entièrement avec elle. J’ai dit au président de la commission des lois du Sénat, comme à celui de l’Assemblée nationale, que j’étais à sa disposition pour répondre à vos questions.
M. le président. Il faut conclure !
M. Gérald Darmanin, ministre. En revanche, il y a une chose que je ne ferai jamais : cracher, comme vous, sur la tête des agents des forces de l’ordre. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, RDSE, INDEP et RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Thomas Dossus, pour la réplique.
M. Thomas Dossus. J’assume évidemment ma présence à Sainte-Soline, comme ma mission de contrôle du Gouvernement. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Jean-Baptiste Lemoyne fait un geste d’agacement.)
Vous ne pourrez pas organiser une manifestation à huis clos. Vous ne pourrez pas éborgner à huis clos ! (Huées sur les travées des groupes Les Républicains et UC, où des sénateurs frappent leur pupitre.)
M. Jacques Grosperrin. C’est honteux !
M. Thomas Dossus. Vous êtes le ministre d’un pays dont le président ne peut plus sortir de son palais. Vous êtes le ministre d’un gouvernement qui ne peut plus présenter un seul texte devant le Parlement… (Les huées redoublent et couvrent la voix de l’orateur.)
M. le président. Il faut conclure !
M. Thomas Dossus. Vous êtes le ministre d’un pays bloqué, fracturé par votre autoritarisme…
M. le président. C’est terminé ! (M. le président coupe le micro de l’orateur.)
violences contre les élus
M. le président. La parole est à Mme Laurence Garnier, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Laurence Garnier. Ma question s’adresse à M. Olivier Véran, ministre chargé du renouveau démocratique.
Monsieur le ministre, les violences contre les maires et les élus ont augmenté de 47 % en 2021 et, de nouveau, de 32 % en 2022. En deux ans, elles ont donc presque doublé.
Il s’agit d’insultes et d’agressions, mais aussi, désormais, d’actes criminels. La semaine dernière, la voiture et la maison du maire de Saint-Brevin-les-Pins, en Loire-Atlantique, ont été touchées par un incendie volontaire.
Mme Laurence Rossignol. Ça, c’est l’extrême droite !
Mme Laurence Garnier. Monsieur le ministre, seuls leurs auteurs sont responsables de ces violences.
Cependant, les élus locaux payent aujourd’hui un climat de défiance que vous avez contribué à aggraver. Je rappelle que, en 2018, l’actuel ministre de l’intérieur avait publié la liste des maires augmentant la taxe d’habitation. S’est ensuivie la campagne de dénigrement #BalanceTonMaire, orchestrée par les militants de votre mouvement politique.
Vous semblez aujourd’hui avoir pris la mesure de la situation. Les derniers textes de loi adoptés vont dans le bon sens, mais le remède court après le mal. De nombreuses plaintes restent classées sans suite et les agressions se poursuivent, souvent dans la plus grande impunité.
Monsieur le ministre, avant de vous lancer dans le renouveau démocratique dont vous êtes chargé, comment envisagez-vous de protéger ceux qui font vivre notre République au quotidien dans les 35 000 communes de France ? (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC. – MM. Henri Cabanel et Daniel Salmon applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement.
M. Olivier Véran, ministre délégué auprès de la Première ministre, chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement. Madame la sénatrice Laurence Garnier, je vous remercie de m’interpeller en tant que ministre délégué chargé du renouveau démocratique au sujet des violences dont sont victimes, de plus en plus souvent, les élus de la République.
Je partage votre émotion et votre colère face à des actes de violence qui s’aggravent et qui deviennent de plus en plus nombreux.
En revanche, nous avons une divergence sur le diagnostic, madame la sénatrice. En effet, l’histoire contemporaine française, ou l’histoire occidentale en général, nous apprend que les élus sont pris pour cibles par les populations en colère depuis déjà une vingtaine d’années, même s’il est vrai que ce phénomène tend à s’accroître. On peut y voir plusieurs explications.
Il y a tout d’abord une sorte de continuum entre la violence anonyme et sans conséquence des réseaux sociaux et la violence qui s’exprime dans la rue ou lors de conseils municipaux.
On peut aussi identifier un continuum entre la violence qui s’exprime parfois au sein même de la maison du peuple, c’est-à-dire du Parlement – je parle essentiellement de l’Assemblée nationale, en particulier ces dernières semaines –, et la violence qui peut s’exprimer dans la rue.
Nous devons faire figure d’exemples. Nous devons faire bloc pour montrer aux Français que, si nous pouvons avoir des divergences idéologiques profondes, si nous pouvons être en désaccord total sur certaines lois et certaines mesures, nous ne perdons en aucun cas le respect de l’autre ni l’estime pour l’autre.
Madame la sénatrice, il se trouve que j’ai contacté, quelques heures après les incendies dont il a été victime, le maire de Saint-Brevin-les-Pins, Yannick Morez, parce que j’ai été particulièrement touché par les attaques qu’il a subies. L’enquête fera toute la lumière sur cette affaire, mais il semblerait qu’il ait d’abord été victime d’injures et de menaces de mort, avant que son domicile et ses deux voitures ne soient dégradées et incendiées,…
Mme Laurence Rossignol. Par qui ?
M. Olivier Véran, ministre délégué. … au seul motif qu’il avait accepté la demande de l’État d’accueillir dans sa commune un centre d’accueil pour les réfugiés, comme c’est son rôle.
Mme Laurence Rossignol. Qui a fait cela ?
M. Olivier Véran, ministre délégué. Madame la sénatrice Laurence Rossignol, cette fois, c’est probablement l’extrême droite.
Mme Laurence Rossignol. Dites-le, alors !
M. Olivier Véran, ministre délégué. Mais l’ennemi de la République, c’est l’extrême, c’est la radicalité, qu’elle soit de gauche ou de droite.
L’ultradroite et l’ultragauche sont deux ennemis que nous devons combattre. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)
Vous ne verrez jamais d’ambiguïté ni d’ambivalence chez nous. Vous ne verrez jamais de « oui, mais » lorsqu’il s’agit de condamner des violences. Retirez le « mais » après le « oui » avant de nous donner des leçons, madame la sénatrice ! (Protestations sur les travées du groupe SER.)
Madame Garnier, nous devons faire un travail pédagogique pour expliquer aux populations qu’elles doivent respecter les élus.
M. le président. Il faut conclure !
M. Olivier Véran, ministre délégué. Ils font partie de la vie de la Nation. S’attaquer à un maire, c’est s’attaquer à la République, et celle-ci protégera toujours les siens.
Mme Laurence Rossignol. Il faut se calmer, monsieur le ministre !
M. le président. La parole est à Mme Laurence Garnier, pour la réplique.
Mme Laurence Garnier. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse.
Nous constatons tous que les Français votent de moins en moins, tandis que les élus se font agresser de plus en plus. Nous devons tous ensemble surmonter cette crise démocratique que nous traversons. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
doctrine de maintien de l’ordre (II)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – Mme Monique de Marco applaudit également.)
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
Tout le monde ici condamne les violences (Non ! sur les travées du groupe Les Républicains.), d’où qu’elles viennent et quelles qu’en soient les victimes, que ce soit les manifestants ou les forces de l’ordre, dont nous saluons encore l’engagement. C’est pourquoi les faits commis par la brigade de répression de l’action violente motorisée (Brav-M) la semaine dernière, à Paris, sont inacceptables.
Je reprends quelques témoignages.
Valentin, 19 ans : « Je suis projeté au sol, et une moto me roule sur la jambe gauche, occasionnant un hématome de 56 centimètres. »
Souleymane, 23 ans, s’est vu répondre : « T’as tellement de chance d’être assis là. Je te jure que je te pétais les jambes au sens propre. Je peux te dire qu’on en a cassé, des coudes et des gueules. »
Salomé, 22 ans, a entendu les mots suivants : « Ta vie ne tient qu’à un fil. Je vois la peur dans ton regard, et j’aime ça ! »
Enfin, Paul Boyer, journaliste, 25 ans, a été frappé au visage avec une matraque, sans un mot, par un agent de la Brav-M. Diagnostic : traumatisme crânien et fracture de la main gauche.
M. Philippe Pemezec. Vous entendez ce que vous avez envie d’entendre !
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Monsieur le ministre, vous engagez-vous ici, aujourd’hui, à adresser à l’ensemble des forces de l’ordre la lettre du 29 mai 1968 de Maurice Grimaud, alors préfet de police de Paris ? (M. Philippe Pemezec s’exclame.)
Je vous en livre un extrait : « Nous n’avons pas le droit de passer sous silence les excès dans l’emploi de la force. Frapper un manifestant à terre, c’est se frapper soi-même en apparaissant sous un jour qui atteint toute la fonction policière. Vous devez faire une guerre impitoyable à tous ceux qui, par leurs actes inconsidérés, accréditeraient l’image déplaisante que l’on cherche à donner de nous. » (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
M. Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur et des outre-mer. Madame la sénatrice de La Gontrie, qu’il y ait, comme dans toutes les professions, des policiers et des gendarmes qui ne respectent pas les valeurs, le droit ou la déontologie, c’est une évidence.
D’ailleurs, j’en ai sanctionné plus que vous lorsque vous étiez aux responsabilités. Sous le quinquennat de François Hollande, il y a eu en effet des moments marqués par des manifestations difficiles ; je pense à l’examen de la loi Travail de Mme El Khomri. Et vous avez rencontré des difficultés de maintien de l’ordre ; je pense au barrage de Sivens, dont j’entends peu parler dans les interventions du groupe socialiste. (Exclamations sur les travées du groupe SER.)
Oui, madame la sénatrice, j’ai sanctionné des policiers et gendarmes, parfois en leur retirant l’uniforme, car j’estime qu’ils doivent être exemplaires.
M. Hussein Bourgi. Ce n’est pas la question !
M. Gérald Darmanin, ministre. En revanche, je ne serai jamais comme vous dans la démagogie, madame la sénatrice.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. En quoi est-ce de la démagogie que de citer Maurice Grimaud ?
M. Gérald Darmanin, ministre. La démagogie consiste à mettre sur le même plan les « violences » de la police et les violences des casseurs. Quand on vous écoute, on a l’impression que ces manifestations sont un conflit opposant des personnes qui méritent une égalité de traitement. Or, pour nous, il n’y a pas de signe « égal ».
Le parti socialiste a oublié Clemenceau. Le parti socialiste a oublié M. Cazeneuve. Le parti socialiste a oublié M. Badinter. (Protestations sur les travées du groupe SER.)
M. Mickaël Vallet. Nous voulons oublier M. Dussopt !
M. Gérald Darmanin, ministre. Je n’irai pas jusqu’à vous rappeler que vous avez mis en place un schéma de maintien de l’ordre que nous avons été obligés de corriger pour qu’il soit validé par le Conseil d’État.
Madame la sénatrice, devant vos « oui, mais », je ne puis m’empêcher de penser à ma grand-mère, qui était femme de mineur et qui disait que, quand il y a un « oui, mais »…
M. Hussein Bourgi. Mme de La Gontrie n’a pas dit cela ! Écoutez la question !
M. Gérald Darmanin, ministre. Bien sûr, monsieur le sénateur ! Nous avons tous compris que la Nupes avait beaucoup de mal à soutenir les forces de l’ordre. L’opinion publique commence à le voir.
Les policiers ne veulent pas de « oui, mais ». Ou plutôt, leur « oui » s’adresse à l’exigence que nous avons pour eux et leur « mais » exprime une demande de soutien, parce que ce sont des femmes et des hommes, fort mal payés malheureusement, qui protègent nos concitoyens et qui permettent à chacun de manifester dans de bonnes conditions, comme ils l’ont encore montré hier.
Madame la sénatrice, je le répète, je suis prêt à répondre plus longuement devant la commission des lois de votre assemblée, quand son président me le demandera. Mais le procès que vous intentez aux policiers de la République n’est pas digne d’un grand parti de gouvernement comme le vôtre. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP, ainsi que des travées des groupes UC et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour la réplique.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Monsieur Darmanin, être ministre de l’intérieur, ce n’est pas seulement être le ministre de la police. Vous êtes chargé de la paix civile. Vous devez non seulement défendre les policiers et les gendarmes, mais aussi veiller au respect de l’État de droit. C’est ce que les Français attendent : le respect de l’ordre, mais dans la justice !
Puisque vous vous référez à de grands ministres de l’intérieur de gauche, permettez-moi de citer Pierre Joxe, avec lequel j’ai eu l’honneur de travailler. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.) Plan quinquennal de modernisation de la police, création de la direction de la formation, instauration du code de déontologie,…
M. le président. Il faut conclure !
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. … Déclaration des droits de l’homme affichée dans les commissariats : voilà ce qu’il a fait et voilà le modèle que vous devriez suivre ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
position de la commission européenne sur le nucléaire
M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour le groupe Les Républicains.
M. Daniel Gremillet. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, les négociations européennes sont totalement défavorables à l’énergie nucléaire. C’est grave !
Cette énergie n’a été intégrée à la taxonomie verte qu’au prix de conditions drastiques. Pour preuve, les autorisations délivrées après 2040-2045 en sont exclues, de même que les activités de maintenance et du cycle. Aujourd’hui, la directive EnR III et le règlement Industrie à zéro émission l’excluent également. Et la réforme du marché de l’électricité est toujours en attente !
C’est un non-sens pour le climat, car cette énergie n’émet que 6 grammes de CO2 par kilowattheure, selon une étude de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe).
C’est un non-sens pour l’industrie, car la moitié des États membres disposent d’un parc nucléaire, et un quart d’entre eux envisagent de nouveaux réacteurs.
C’est enfin un manque cruel de crédibilité, car il est illusoire de décarboner 75 % de l’hydrogène dans l’industrie ou 5 % dans les transports sans source nucléaire.
Le Gouvernement n’a pas conduit une politique à la hauteur des enjeux. C’est une faute ! Il aurait fallu négocier plus précocement, plus fortement, pour parvenir à un compromis admissible.
Je rappelle d’ailleurs que le Sénat a tiré le signal d’alarme depuis longtemps, au travers de sa résolution de décembre 2021 sur la taxonomie verte et de celle de mars 2022 sur le paquet Ajustement à l’objectif 55. Le Sénat avait aussi adressé une alerte dans son rapport transpartisan de juillet dernier.
Monsieur le ministre de l’industrie, que compte faire le Gouvernement pour obtenir enfin satisfaction auprès de ses partenaires européens ? Y a-t-il encore un couple franco-allemand ?
Mme Sophie Primas. Non !
M. Daniel Gremillet. Il faut garantir à l’énergie et à l’hydrogène nucléaires une complète neutralité technologique. Il y va de notre souveraineté énergétique et de nos engagements climatiques. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Marie-Noëlle Lienemann et M. Mickaël Vallet applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé de l’industrie.
M. Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l’industrie. Monsieur le sénateur Gremillet, je voudrais tout d’abord vous remercier de votre engagement sur le sujet depuis de longues années.
Vous avez fait référence à certaines résolutions adoptées par le Sénat, mais, plus récemment, vous avez été aussi rapporteur du projet de loi présenté par le Gouvernement pour accélérer la mise en œuvre des projets nucléaires. Ce texte a été voté par plus de neuf sénateurs sur dix et par 75 % des députés, ce qui montre que l’union nationale est aujourd’hui de mise derrière le nucléaire. Cela n’a pas toujours été le cas.
Cette union nationale nous permet de porter haut la voix de la France en Europe et de négocier, avec difficulté, vous l’avez dit, l’engagement de l’Europe pour reconnaître le nucléaire comme une des sources d’énergie de l’avenir.
La France ne fait pas tout, toute seule, en Europe : nous sommes vingt-sept ! La ministre de la transition énergétique était à Bruxelles hier et se trouve à Berlin aujourd’hui pour continuer ces négociations. C’est la raison pour laquelle c’est moi qui vous réponds.
Mme Agnès Pannier-Runacher était hier avec ce que l’on appelle l’« alliance du nucléaire », soit onze pays qui, en Europe, défendent le nucléaire comme une source d’avenir et qui sont aujourd’hui associés avec la France. Nous sommes prêts à bloquer avec eux un certain nombre de discussions pour nous assurer que le nucléaire fera partie du futur.
Vous avez parlé du couple franco-allemand. Je dirai que nous dansons un tango un peu difficile avec notre partenaire. Les Allemands ont la conviction que l’hydrogène de demain sera importé et renouvelable, quand nous sommes convaincus que l’hydrogène de demain sera produit en France et nucléaire. Nous devons trouver un compromis, car nous avons besoin d’énormément d’hydrogène pour décarboner l’industrie. Nous allons continuer à travailler dans ce sens.
Pour conclure, je remercie sincèrement le Sénat et l’Assemblée nationale de soutenir le Gouvernement dans ce combat. Il est difficile, mais nous allons le gagner. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour la réplique.
M. Daniel Gremillet. Monsieur le ministre, aujourd’hui, la France souffre, en pleine crise énergétique. Les familles, les collectivités et les entreprises sont touchées.
Nous sommes face au défi de l’emploi dans cette filière. Nous ne réussirons dans le nucléaire que si nous intéressons des jeunes, mais ceux-ci sont dans le doute.
Monsieur le ministre, l’article 194 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne stipule que chaque État membre a le droit de choisir son mix énergétique. (Mme Marie-Noëlle Lienemann applaudit.) Aujourd’hui, la France est bafouée ! Elle n’est plus respectée dans ses choix stratégiques pour son avenir. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
blocage des universités
M. le président. La parole est à M. Jean Hingray, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Jean Hingray. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s’adresse à Mme la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche.
Depuis le début du mouvement social hostile à la réforme des retraites, des dizaines d’universités et de lycées ont été paralysés. Même la faculté d’Assas, pourtant réputée la plus conservatrice de France, a été bloquée, et cela pour la première fois de son histoire.
M. Jacques Fernique. Tout de même !
M. Jean Hingray. Votre gouvernement aura incontestablement réussi quelque chose avec cette douloureuse réforme : faire pâlir d’envie Dany le rouge ! (Mme Esther Benbassa s’exclame.)
La grève, le blocage et la manifestation sont presque devenus des rites initiatiques dans notre pays. Chaque génération veut sa grande mobilisation. Chaque génération veut son mai 1968. (Sourires sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)
Cependant, derrière ces manifestations se cachent la précarité et le mal-être des étudiants. C’est pourquoi, madame la ministre, mes interrogations sont multiples.
Que comptez-vous faire pour empêcher une minorité de bloquer la majorité ? Que comptez-vous faire pour que les examens se déroulent dans de bonnes conditions ? Que comptez-vous faire pour les étudiants qui attendent des mesures concrètes, afin d’améliorer leur quotidien ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche.
Mme Sylvie Retailleau, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le sénateur Jean Hingray, effectivement, une partie des universités sont bloquées aujourd’hui. Cela concerne quelques dizaines d’établissements sur les deux cents universités et écoles que compte notre pays. Certains campus sont plus touchés que d’autres, au-delà des jours de manifestation nationale.
L’université est un lieu d’émancipation et d’échanges, mais aussi de confrontation des idées. Si les jeunes n’exprimaient pas leurs idées, je pense que l’on craindrait pour notre démocratie.
Pour autant, le blocage, même temporaire, qui empêche les étudiants d’accéder à leurs salles d’étude, n’est pas acceptable. Il faut savoir, d’ailleurs, que cette pratique n’est pas du seul fait des étudiants. Et je salue au passage la gestion de ces blocages par les recteurs, les préfets et les présidents d’université.
J’en viens plus précisément à vos différentes questions. Vous avez raison, les étudiants discutent de bien des choses, et leurs revendications portent en particulier sur la précarité et leurs conditions d’étude.
C’est l’occasion pour moi de vous annoncer que, au terme des concertations que nous menons depuis le 7 octobre, aux niveaux national et territorial, avec l’ensemble des acteurs, le Gouvernement, suivant la feuille de route du Président de la République, a décidé de débloquer un demi-milliard d’euros pour répondre aux problématiques de la vie étudiante, notamment la gestion des bourses, dès la rentrée de 2023, mais aussi la pérennisation du repas à un euro pour tous les boursiers et tous les étudiants précaires. D’autres mesures intéresseront encore la vie étudiante.
Le Gouvernement, sous l’autorité de Mme la Première ministre, travaille pour offrir de bonnes conditions d’étude à tous nos étudiants, et cela dès la rentrée de 2023. Ces mesures ont un caractère historique, avec une augmentation d’environ 20 % des bourses et une amélioration notable des conditions de vie de nos étudiants. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Jean Hingray, pour la réplique.
M. Jean Hingray. Madame la ministre, je pense que cette annonce réjouira toutes les travées du Sénat, puisque nous demandons l’augmentation des bourses depuis longtemps.
Dans une semaine, je défendrai, avec mon collègue et ami Pierre-Antoine Levi, une proposition de loi sur les repas étudiants à tarif modéré dans les zones rurales, les zones de montagne et les petites villes.
Nous espérons que notre dispositif de conventionnement avec les centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires (Crous) pourra être intégré dans ces 500 millions d’euros. En tout cas, madame la ministre, nous sommes très heureux de ces annonces qui, je l’espère, contribueront à atténuer la précarité et le mal-être étudiant. Même si l’on peut toujours espérer plus, il faut se réjouir aujourd’hui de cette bonne nouvelle. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
blocage des ports de pêche