M. le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Blanc, auteur de la question n° 513, adressée à M. le ministre de la santé et de la prévention.
M. Jean-Baptiste Blanc. À Carpentras, dans le Vaucluse, la partie service public du pôle santé public-privé va devoir fermer la nuit dès le 3 avril prochain, et peut-être définitivement, deux de ses unités, les urgences et la maternité, en raison de l’application de la loi du 26 avril 2021 visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification, dite loi Rist.
L’intensification, ces dernières années, du recours à l’intérim médical a conduit à une surenchère en matière de rémunération. Outre l’impact financier dans les budgets des établissements de ce système, les plannings de garde sont aujourd’hui très dépendants de ces médecins. À Carpentras, ceux-ci représentent 40 % des praticiens et un quart des contrats, et ne souhaitent pas poursuivre leur mission au tarif imposé de 1 170 euros brut par mission de vingt-quatre heures, préférant se diriger vers les établissements privés.
Les hôpitaux se retrouvent donc, à quinze jours de l’application de la loi Rist, dans une situation insoluble. Monter un planning était déjà un casse-tête avant cette fermeture, mais le faire en avril, sans intérimaire, est une mission impossible pour les chefs de service. Tous les services – accueil des urgences et service mobile d’urgence et de réanimation (Smur), gynéco-obstétrique, anesthésie-réanimation, pédiatrie, médecine et gériatrie – sont désorganisés.
À ce jour, les habitants du Comtat Venaissin, 90 000 personnes hors saison touristique, 200 000 en été, sont systématiquement dirigés vers le centre hospitalier d’Avignon, qui est déjà submergé.
Aujourd’hui, c’est Carpentras qui est fortement impacté, mais qu’en sera-t-il demain à Cavaillon, à Apt, à Orange ou à Vaison-la-Romaine ? L’ARS se dit pleinement mobilisée pour éviter un scénario catastrophe, mais quels sont ses moyens pour agir à court terme ?
L’heure n’est plus aux discussions autour de la revalorisation des salaires des praticiens hospitaliers, qui aurait dû être réalisée il y a bien longtemps, non plus qu’aux débats sur le numerus clausus : il faut trouver des médecins avant le 3 avril.
Toute l’offre de soins dans le Vaucluse, où ces hôpitaux de proximité jouent un rôle primordial, est désorganisée par la mise en œuvre de la loi Rist. La proximité constitue pourtant un enjeu majeur d’efficacité de la médecine d’urgence, avec la connaissance du terrain et des acteurs concernés, gage de chance pour les patients.
Madame la ministre, les praticiens hospitaliers, les infirmiers, les pompiers, les médecins, les Carpentrassiens, tout simplement, et, au-delà, les Vauclusiens, attendent des garanties de l’État. Le 3 avril au soir, chaque Vauclusien aura-t-il encore accès à un service d’urgence en moins de trente minutes de chez lui ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée auprès du ministre de la santé et de la prévention, chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé. Monsieur le sénateur, vous évoquez les dispositions relatives à la régulation de l’intérim.
Concernant l’application de la loi Rist, garantir à chacun de nos concitoyens des soins adaptés et accessibles localement constitue une priorité pour le ministère de la santé. Notre politique vise à lutter non pas contre l’intérim, qui peut parfois apporter une solution à certaines situations de tension conjoncturelle en ressources humaines, mais contre ses dérives, qui mettent en péril l’équilibre de notre système de santé.
Ce système représente un poids financier majeur pour l’hôpital public, avec certaines rémunérations pouvant atteindre 6 000 euros pour vingt-quatre heures. Nous n’acceptons pas que l’argent des Français serve à entretenir ce type d’abus, qui correspondent à autant de moyens en moins pour revaloriser les carrières hospitalières. Ces situations engendrent une profonde iniquité vis-à-vis des praticiens qui s’investissent durablement à l’hôpital.
La loi prévoit déjà depuis 2016 un plafonnement des rémunérations à 1 170 euros brut par vingt-quatre heures, mais elle n’est pas appliquée, et les infractions n’ont cessé de se développer. La loi Rist prévoit donc la mise en place de contrôles pour la faire respecter.
Plusieurs fois reportée, l’échéance retenue pour le démarrage de ce dispositif est le 3 avril 2023. Il est de la responsabilité du ministère de la santé et de la prévention de faire appliquer la loi votée par les représentants de la Nation et d’œuvrer à la reconstitution des collectifs de travail dans les hôpitaux.
Face aux difficultés transitoires que nous avons anticipées, les ARS travaillent avec le réseau des finances publiques et les établissements pour mobiliser tous les acteurs, publics comme privés, afin de maintenir la continuité des soins. Des solutions alternatives sont étudiées au cas par cas dans chaque territoire, en fonction du contexte local, dans une logique de solidarité territoriale.
Les collectivités et les élus locaux sont des maillons essentiels de la réussite des politiques de santé. Une organisation dédiée a ainsi été mise en place au sein du ministère pour identifier les situations particulièrement signalées par les élus. Nous étudierons, en lien avec les ARS et leurs délégations territoriales, toutes les situations de blocage qui nécessitent une attention ou une intervention particulière.
Pour Carpentras, depuis plusieurs années, le centre hospitalier fait appel à des vacations médicales pour compléter les tableaux de garde et assurer la continuité des activités d’urgences, de maternité, mais également de médecine.
La mise en œuvre de la loi Rist constitue un changement important, qui impose de revoir les rémunérations des médecins vacataires. Le centre hospitalier met déjà régulièrement en œuvre des plans de continuité des activités lors de certaines périodes de tension, notamment durant les congés d’été et de fin d’année.
Des leviers en termes de ressources humaines vont être mobilisés, par autorisation du directeur général de l’ARS : augmentation de la prime de solidarité territoriale et recours à l’emploi contractuel au titre de difficultés particulières de recrutement ou d’exercice pour une activité nécessaire à l’offre pour les territoires. Enfin, des adaptations organisationnelles devront être envisagées.
situation de la maison de retraite des communes de cabannes et noves
M. le président. La parole est à M. Stéphane Le Rudulier, auteur de la question n° 469, adressée à M. le ministre des solidarités, de l’autonomie et des personnes handicapées.
M. Stéphane Le Rudulier. Madame la ministre, le dialogue entre l’exécutif et les élus locaux semble être toujours aussi compliqué, ce que je regrette profondément. Le couple maire-préfet, vanté par le Président de la République en novembre dernier au salon des maires et des collectivités locales (SMCL), apparaît comme peu opérant dans les faits.
La fermeture, plus ou moins arbitraire, et sans aucune concertation des élus locaux, de l’établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) intercommunal de la Durance, situé dans les Bouches-du-Rhône, et plus précisément sur le site de Cabannes, en apporte une nouvelle illustration.
Je ne souhaite pas ici contester le fond de la décision, mais bien sa forme, c’est-à-dire le manque de considération envers les élus locaux, le personnel de santé et, surtout, les pensionnaires qui a présidé à ce processus. Le maire de la commune a ainsi appris cette fermeture le 16 novembre dernier, par communication orale du directeur. Depuis ce jour, force est de constater qu’aucune communication officielle de l’ARS ne l’a confirmée.
Néanmoins, nous sommes placés devant le fait accompli, puisque la totalité des résidents de la maison de retraite ont d’ores et déjà été transférés sur un autre site d’accueil.
Au-delà du choc psychologique, pour ces résidents, la commune de Cabannes, propriétaire du bâti dorénavant inoccupé, a la lourde responsabilité de proposer un projet de réaffectation de cette structure, sans accompagnement de l’État et sans une quelconque indemnité de compensation, faute d’avoir été impliquée dans la décision.
De surcroît, cette petite commune de 4 400 habitants est frappée de plein fouet depuis plusieurs années par la désertification des services publics. Après la perte de son bureau de poste en 2020, cette décision unilatérale s’apparente pour elle à une double peine.
Madame la ministre, pouvez-vous confirmer de manière officielle la fermeture du site de Cabannes de l’Ehpad intercommunal ? Si oui, êtes-vous en mesure de proposer un plan d’accompagnement et de soutien aux élus locaux quant à la future destination de ces bâtiments ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée auprès du ministre de la santé et de la prévention, chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé. Monsieur le sénateur, la situation de la maison de retraite publique intercommunale des communes de Cabannes et Noves est bien connue des équipes du ministère des solidarités, de l’autonomie et des personnes handicapées, qui la suivent depuis de nombreux mois.
Je sais, à ce titre, que des échanges ont lieu régulièrement au niveau local avec l’ARS. Le directeur départemental des Bouches-du-Rhône avait ainsi adressé, en date du 19 janvier 2023, un courrier à M. Gilles Mourgues, maire de Cabannes, rappelant que les difficultés de l’établissement n’étaient ni récentes ni conjoncturelles et ouvrant sur une proposition de rencontre.
Déjà concerné par des enjeux en termes d’attractivité, mais aussi par une dégradation financière inquiétante ces derniers mois, l’établissement avait vu sa situation s’aggraver à l’automne dernier, lorsque des fournisseurs avaient fait savoir qu’ils bloquaient les comptes et refusaient de livrer les commandes.
Au-delà des mesures d’urgence prises, une réflexion structurelle était donc nécessaire, portant notamment sur la question du double site, une caractéristique ancienne de l’établissement.
Plusieurs pistes ont été étudiées. Le 21 février, un conseil d’administration a eu lieu sur site, avec des représentants de l’ARS et du conseil départemental. Deux délibérations ont été adoptées, l’une concernant le transfert des lits du site de Cabannes vers celui de Noves, l’autre le projet d’évolution de l’offre de prise en charge par la transformation d’un pôle d’activités et de soins adaptés (Pasa) de jour en Pasa de nuit sur le site de Noves, et la création d’un centre de ressources territorial couvrant en priorité la commune de Cabannes.
À ce jour, les résidents du site de Cabannes ont été transférés vers les Ehpad environnants, dont celui de Noves, en priorité. Un accompagnement personnalisé de chacun des résidents avait très tôt été mis en place, avec la nomination d’un psychologue pour faciliter cette orientation. Le personnel titulaire a par ailleurs été entièrement repris par le site de Noves.
Je sais que l’agence régionale de santé reste pleinement mobilisée sur ce dossier et qu’elle est particulièrement attentive au suivi de ses conséquences pour la commune de Cabannes, les résidents, les familles et les professionnels.
défense du pluralisme associatif dans le secteur sanitaire et social
M. le président. La parole est à M. Denis Bouad, auteur de la question n° 443, transmise à M. le ministre des solidarités, de l’autonomie et des personnes handicapées.
M. Denis Bouad. Les associations du secteur sanitaire et social sont des acteurs essentiels dans nos territoires. Leur action en matière d’insertion, d’hébergement ou d’accompagnement social est indispensable pour aider les plus fragiles. La qualité de leur travail, en partenariat étroit avec les élus locaux, a d’ailleurs été unanimement saluée au moment de la crise du covid-19.
Cependant, ce secteur est marqué depuis plusieurs années par la forte expansion de grands groupes, qui ont leur siège en zone urbaine et dont le champ d’action s’étend sur l’ensemble du territoire national.
Cette transformation du paysage associatif s’explique en grande partie par la logique de prestation qui détermine désormais les relations entre les pouvoirs publics et les associations. Les appels à projets et à manifestation d’intérêt se multiplient depuis plusieurs années ; s’ils ont un objectif légitime de rationalisation des dépenses publiques, on peut néanmoins s’inquiéter de la concurrence qu’ils imposent aux associations intermédiaires, lesquelles constituent pourtant des acteurs de proximité essentiels dans la vie de nos territoires.
Ces dernières créent de l’emploi localement, elles ont développé une réelle expertise sur leur territoire et elles sont aussi les garantes de l’innovation sociale face à l’homogénéisation des solutions. Dans un souci d’efficacité de nos politiques publiques, il est donc important de préserver le pluralisme associatif pour garantir une diversité des interlocuteurs.
Compte tenu de l’utilité de ces associations intermédiaires sur le terrain, notamment dans nos territoires ruraux et périurbains, quelles mesures le Gouvernement compte-t-il mettre en œuvre pour préserver notre tissu associatif local et rééquilibrer le rapport de force entre elles et les grands groupes ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée auprès du ministre de la santé et de la prévention, chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé. Monsieur le sénateur, vous avez raison de souligner que le pluralisme de notre tissu associatif est une richesse qu’il nous faut préserver. Au plus près de nos concitoyens, les associations, petites et grandes, font preuve d’initiative, répondent à des besoins précis et accompagnent les publics les plus précaires. Le Gouvernement leur rend bien sûr hommage et se place à leur côté, en soutien.
J’entends vos remarques sur la concentration et la polarisation du secteur, qui mériteraient d’être objectivées. Cependant, je ne tiens pas à opposer les petits et les grands acteurs, qui œuvrent en complémentarité, le plus souvent dans de très bonnes conditions. Nous avons besoin d’acteurs au réseau développé, capables de porter des programmes ambitieux, ainsi que de plus petites structures, parfois plus agiles, au niveau local.
Par exemple, le ministre des solidarités, de l’autonomie et des personnes handicapées et celui de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire ont lancé ensemble, il y a peu, le programme Mieux manger pour tous !, doté de 60 millions d’euros en 2023, qui aura notamment pour vocation d’appuyer les démarches innovantes des territoires.
La responsabilité du Gouvernement en la matière est de parler à tous les acteurs et de les soutenir tous lorsque les difficultés s’accentuent. C’est ce que nous avons fait en les accompagnant dans la mise en œuvre des mesures de revalorisation salariale liées au Ségur. C’est encore ce que nous faisons en cette période d’inflation, avec l’application des mesures, comme le bouclier tarifaire, à toutes les structures.
Il nous faudra bien sûr aller plus loin. Le secrétariat d’État auprès de la Première ministre chargé de l’économie sociale et solidaire et de la vie associative mène actuellement les assises de la simplification associative. Celles-ci donneront lieu à une feuille de route pour mettre en œuvre des projets précis et les dirigeants et bénévoles des associations de toutes tailles sont impliqués dans toutes les phases de cette concertation. C’est une autre façon de continuer à faire vivre ce pluralisme qui nous est cher.
M. le président. La parole est à M. Denis Bouad, pour la réplique.
M. Denis Bouad. Madame la ministre, j’entends votre réponse et je ne suis pas loin de la partager, mais j’appelle votre attention sur les difficultés que peuvent connaître nos associations de proximité ; elles ne sont pas toutes très petites !
revalorisation des frais de déplacement pour les aides à domicile et attractivité de la profession
M. le président. La parole est à Mme Else Joseph, auteure de la question n° 085, adressée à M. le ministre des solidarités, de l’autonomie et des personnes handicapées.
Mme Else Joseph. L’aide à domicile et l’aide à l’autonomie des personnes sont indispensables dans notre société. Ce sont des missions auxquelles un conseil départemental ne peut pas se dérober.
Voilà quelques mois, le département des Ardennes a voté la revalorisation de l’indemnité kilométrique à 45 centimes d’euros pour tous les personnels qui interviennent dans les services d’aide à domicile tarifés par le département. Cela n’avait pas été fait depuis 2008. Cette revalorisation est essentielle, mais nos départements ne peuvent pas supporter à eux seuls des charges qui ont un impact sur leur budget.
Permettez-moi de rappeler un point trop souvent méconnu à Paris : 600 000 euros de plus, cela semble dérisoire, « epsilonesque », mais dans les Ardennes, cela représentait un point de fiscalité lorsque l’on pouvait lever l’impôt. Une telle charge conduit à faire des choix. Nous n’avons pas souhaité sacrifier l’aide à domicile, car, au-delà des chiffres, celle-ci touche aux personnes, à l’humain, au lien social.
Aider les personnes à domicile, c’est un cri du cœur : notre département n’entend pas se dérober à sa vocation de solidarité. C’est aussi un cri d’alarme : ne laissez pas nos conseils départementaux seuls ! La situation est délicate en ce moment ; les infirmières territoriales et libérales, ainsi que les aides à domicile sont mises sous pression et se dépensent sans compter, alors que leurs charges sont nombreuses et reconnues, et que leurs conditions de travail se sont dégradées.
Ainsi, la spécificité des infirmières territoriales mériterait d’être prise en compte : l’accompagnement qu’elles exercent est personnalisé et il est apprécié. Leur avis est précieux auprès de la commission en charge de la mobilité du département comme pour l’évaluation de la perte d’autonomie des personnes âgées et elles s’impliquent dans le réseau départemental.
Madame la ministre, qu’envisagez-vous pour soutenir l’aide à domicile et revaloriser ce beau métier ? Comment faire pour que celui-ci reste attractif, à quelques jours de la journée nationale des aides à domicile ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée auprès du ministre de la santé et de la prévention, chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé. Madame la sénatrice, conscient des difficultés de recrutement dans les métiers du soin et de l’accompagnement à domicile, le Gouvernement a pris des engagements forts pour développer l’attractivité de ces métiers, notamment en matière de mobilité.
Ainsi, il a agréé l’avenant 50 à la convention collective de la branche de l’aide à domicile, qui revalorise le montant des indemnités kilométriques. Depuis le 1er octobre 2022, les salariés relevant de cette branche se voient rembourser leurs frais de déplacement à hauteur de 38 centimes d’euros par kilomètre, contre 35 auparavant.
La remise sur les prix des carburants, mise en œuvre jusqu’au 31 décembre 2022, a été remplacée par l’indemnité carburant de 100 euros, soutenant les travailleurs utilisant leur voiture pour se rendre au travail. Cette aide a bénéficié aux millions de Français ayant un revenu fiscal de référence par part inférieur à 14 700 euros, parmi lesquels un certain nombre d’aides à domicile. Pour un Français parcourant 12 000 kilomètres par an, soit la moyenne nationale, cette indemnité représente une aide d’un peu plus de 10 centimes par litre.
En outre, afin de promouvoir des moyens de transport plus écologiques, le forfait mobilité durable, issu de la loi d’orientation des mobilités, offre aux employeurs la possibilité d’attribuer une indemnité exonérée de cotisations aux salariés privilégiant les modes de transport dits « à mobilité douce ». Ce forfait est exonéré de cotisations et contributions sociales dans la limite de 700 euros par an et par salarié en 2022 et en 2023. Il a été adopté par les partenaires sociaux dans de nombreux établissements et services sociaux et médico-sociaux (ESSMS) via des accords collectifs locaux agréés par l’État.
Il est également important de rappeler que les conseils départementaux peuvent mettre en place des dispositifs de soutien à la mobilité, tels que des initiatives permettant de cofinancer la location ou l’achat d’un véhicule, ou la mise en place d’une flotte de véhicules.
Bien sûr, nous devons continuer à réfléchir ensemble, dans le cadre d’une démarche plus large d’attractivité, aux mesures complémentaires susceptibles de soutenir la mobilité des professionnels.
À ce titre, le ministre Jean-Christophe Combe est pleinement mobilisé et a fait du sujet de la mobilité des professionnels un point d’intention spécifique du volet Bien vieillir du Conseil national de la refondation.
M. le président. La parole est à Mme Else Joseph, pour la réplique.
Mme Else Joseph. Madame la ministre, j’entends bien vos propos, mais je rappelle que nos départements, et le mien en particulier, sont au bord de l’asphyxie. Je ne suis pas convaincue que les réponses que vous venez d’apporter conduiront à améliorer l’attractivité de ce métier.
incidences de l’application du décret n° 2022-257 du 22 février 2022 pour les titulaires de contrat de prévoyance
M. le président. La parole est à M. Philippe Mouiller, auteur de la question n° 369, transmise à M. le ministre des solidarités, de l’autonomie et des personnes handicapées.
M. Philippe Mouiller. Ma question porte sur les incidences pour les travailleurs en situation de handicap de l’application du décret relatif au cumul de la pension d’invalidité avec d’autres revenus et modifiant diverses dispositions relatives aux pensions d’invalidité.
Les dispositions de ce décret emportent des conséquences financières injustes et pénalisantes pour les travailleurs handicapés, au sujet desquelles j’interpelle de nouveau le Gouvernement.
Ce texte introduit une nouvelle méthode de calcul des pensions d’invalidité : les personnes invalides dont les revenus d’activité dépassent le seuil du plafond annuel de la sécurité sociale ont vu le montant de leur pension d’invalidité suspendu depuis septembre 2022 sans en être informées. Cela entraîne de facto la fin du versement des rentes de prévoyance, puisque celles-ci sont assujetties au versement d’une pension d’invalidité.
Les travailleurs handicapés concernés sont donc doublement pénalisés, alors qu’ils ont cotisé pendant des années dans le cadre des contrats de prévoyance, comme les entreprises qui les emploient.
En raison de la perte de leur pension d’invalidité et, par conséquent, de leur rente de prévoyance, les travailleurs handicapés concernés se retrouvent dans une situation financière critique.
Certains d’entre eux envisagent même de cesser toute activité professionnelle alors que le travail est synonyme d’émancipation et d’indépendance financière.
Ce texte réglementaire va manifestement à l’encontre de l’esprit de la réforme, qui vise à favoriser le cumul emploi-ressources. S’il semble améliorer la situation d’un certain nombre de titulaires de pensions, nul ne doit être lésé.
Quelles mesures urgentes que le Gouvernement entend-il pour mettre fin à ce qui est vécu par les principaux intéressés comme une véritable injustice, voire comme une discrimination ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée auprès du ministre de la santé et de la prévention, chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé. Monsieur le sénateur, la pension d’invalidité vise à compenser la perte de gains ou de capacité de travail.
En fonction de la situation de l’assuré, cette pension équivaut à 30 % du salaire annuel moyen pour les pensionnés d’invalidité relevant de la première catégorie et à 50 % du revenu moyen calculé sur les dix meilleures années civiles de salaire pour les pensionnés d’invalidité de catégorie 2 ou 3.
La réforme instaurée par le décret du 23 février 2022 vise à introduire plus de justice pour les assurés qui souhaitent conserver ou reprendre une activité rémunérée après leur passage en invalidité, en permettant que toute heure travaillée conduise à un gain financier. Quelque 60 000 personnes pourront désormais cumuler rémunération professionnelle et pension d’invalidité.
Afin d’atteindre cet objectif, un nouveau seuil de comparaison au salaire antérieur limité au plafond de la sécurité sociale, soit 3 666 euros brut par mois en 2023, a été fixé.
C’est bien sur ce point spécifique que des inquiétudes sont formulées, car certains assurés dont les revenus étaient supérieurs au plafond de la sécurité sociale sont effectivement susceptibles de voir leurs revenus diminuer du fait de la réforme.
Des mesures rectificatives sont donc envisagées. Sans revenir sur le fondement du mécanisme de plafonnement, qui est un principe appliqué aux différentes prestations sociales, le seuil pourra être relevé pour permettre le maintien des pensions d’invalidité pour la grande majorité des perdants actuels de la réforme.
Par ailleurs, je vous confirme que les réclamations d’indus effectuées par certaines caisses primaires d’assurance maladie sont nulles et non avenues. Des instructions claires ont été transmises par l’assurance maladie en ce sens.
Certains assurés disposent enfin d’une pension complémentaire versée par leur organisme de prévoyance. Alors même que les droits à pension des intéressés demeurent ouverts, certains organismes ont décidé de suspendre les versements lors de l’entrée en vigueur de la réforme.
Notre analyse juridique confirmant que cette suspension ne respecte pas le droit existant, le Gouvernement souhaite trouver rapidement une solution concrète à ce désengagement des organismes concernés.
M. le président. La parole est à M. Philippe Mouiller, pour la réplique.
M. Philippe Mouiller. Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre. Je constate que vous mesurez les difficultés rencontrées par un certain nombre de travailleurs.
Depuis 2022, la situation est critique. Dans ce contexte d’urgence, nous suivrons attentivement la mise en œuvre de vos propositions.
« exclus du ségur »
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, auteur de la question n° 509, transmise à M. le ministre des solidarités, de l’autonomie et des personnes handicapées.
M. Daniel Chasseing. Les accords conclus au terme du Ségur de la santé ont permis des revalorisations salariales au bénéfice de certaines catégories de personnel. C’est très bien.
Mais il reste malheureusement des exclus. Depuis le début de la covid-19, les employés des établissements médico-sociaux se sont tous mobilisés pour assurer la continuité de service auprès des résidents. Or depuis le décret du 19 septembre 2020 relatif au versement d’un complément de traitement indiciaire aux agents des établissements publics de santé, des groupements de coopération sanitaire et des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes de la fonction publique hospitalière, des disparités entre les agents persistent, entraînant un sentiment d’incompréhension, parfois au sein d’un même établissement.
Si pour une disposition telle que l’obligation vaccinale, l’ensemble des personnels des établissements médico-sociaux – et c’est normal – ont été considérés comme des soignants, il n’en est pas de même pour la prime Ségur.
En Ehpad ou dans un centre hospitalier, un cuisinier, une lingère, un agent d’entretien des locaux, un agent des services techniques perçoivent la prime Ségur alors que ces mêmes personnels au sein d’une maison d’accueil spécialisée (MAS), par exemple, l’attendent toujours. Tous exercent pourtant le même métier.
Les faisant fonction d’aides-soignantes, les secrétaires, les agents d’entretien travaillant au sein d’une MAS sont des oubliés, alors que, dans tous les Ehpad, ces mêmes employés ont bénéficié d’une revalorisation salariale. Or il est fréquent qu’une même association gère à la fois un Ehpad et une MAS.
Les responsables, les directeurs et les présidents de conseil d’administration peinent à expliquer une telle situation à leurs employés et déplorent des démissions.
De nombreux autres métiers sont encore exclus du dispositif. J’ai par exemple rencontré des techniciens en radiothérapie ou en radiologie qui exercent en clinique et qui sont exclus du dispositif alors qu’ils sont au contact des patients toute la journée.
Le Gouvernement compte-t-il prendre en considération ces revendications légitimes et élargir le bénéfice des revalorisations salariales prévues dans le cadre du Ségur de la santé ?