M. le président. La parole est à M. Laurent Burgoa, pour la réplique.
M. Laurent Burgoa. Je tiens à vous remercier, madame la ministre, de la réponse que vous venez d’apporter à ces maires, notamment celui des Angles, récemment élu.
Je me doutais bien que c’était Mme la préfète du Gard, qui entretient d’ailleurs d’excellentes relations avec les élus, qui était compétente.
Non seulement cette problématique des aires d’accueil peut emporter des conséquences en termes de sécurité, mais elle pose aussi un problème de compétence, dans la mesure où ces aires relèvent à la fois des attributions des agglomérations et de la politique de la ville.
Il est très compliqué pour un nouvel élu de savoir quelle est l’autorité compétente en la matière, d’autant que la gestion des aires d’accueil peut concerner divers départements et diverses régions.
Permettez-moi de nouveau de vous remercier d’avoir éclairé les élus des Angles.
adaptation de la procédure et des critères de reconnaissance d’état de catastrophe naturelle ainsi que du mode de financement des indemnisations
M. le président. La parole est à M. François Bonhomme, auteur de la question n° 389, adressée à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
M. François Bonhomme. Je souhaite attirer l’attention du Gouvernement sur la procédure de reconnaissance d’état de catastrophe naturelle des communes confrontées à des phénomènes de retrait-gonflement des argiles, et sur le financement de la couverture de ce risque.
Vous le savez, ce phénomène, qui touche près de la moitié du territoire national, a des conséquences souvent désastreuses tant pour l’habitat individuel que pour les bâtiments publics, ces derniers subissant alors d’importantes dégradations.
Le coût de la réparation ou de la sauvegarde du bâti se révèle très souvent impossible à supporter pour les propriétaires, sans une protection assurantielle liée à la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle.
Un dédommagement est, certes, prévu depuis 1989 dans le cadre du régime dit CatNat et de la loi du 28 décembre 2021 relative à l’indemnisation des catastrophes naturelles, mais la règle mise en œuvre par l’autorité administrative pour instruire les demandes des communes de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle reste très insatisfaisante. Seule la moitié des communes concernées parviennent en réalité à obtenir une telle reconnaissance.
Par ailleurs, face à l’accroissement du phénomène de retrait-gonflement, la question du financement de ce risque se pose. Son coût total est évalué à plus de 3 milliards d’euros pour les prochaines années.
En outre, l’ordonnance du 8 février 2023, qui doit permettre d’accroître le nombre de communes susceptibles d’être reconnues en état de catastrophe naturelle, limiterait les indemnisations aux sinistres les plus graves, faisant sortir certains propriétaires de la couverture assurantielle.
Madame la ministre, quelles dispositions complémentaires comptez-vous prendre pour que les communes concernées par le phénomène de retrait-gonflement puissent bénéficier de la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle et, surtout, que l’ensemble des propriétaires touchés soient éligibles à l’indemnisation des dommages prévue en pareil cas, y compris pour ceux d’entre eux qui décideraient d’abandonner leur habitation ? Enfin, quel plan de financement envisagez-vous pour maintenir l’équilibre du régime CatNat ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Monsieur le sénateur Bonhomme, l’indemnisation des dégâts provoqués par le phénomène de sécheresse-réhydratation des sols est assurée par la garantie catastrophe naturelle.
Conscient des limites des modalités actuelles de prise en charge des effets de ce phénomène, le Gouvernement a été habilité à entreprendre par voie d’ordonnance, au titre de l’article 161 de la loi 3DS, une réforme des modalités d’indemnisation du phénomène de sécheresse-réhydratation des sols au sein du régime de la garantie catastrophe naturelle.
Ainsi, l’ordonnance du 8 février 2023 prévoit : un assouplissement des critères pris en compte pour analyser le caractère anormal des épisodes de sécheresse ; une prise en compte des communes ayant subi une succession anormale de sécheresses d’ampleur significative, mais dont l’intensité mesurée, année après année, n’est pas exceptionnelle ; une meilleure prise en compte de la situation des communes adjacentes à celles reconnues en état de catastrophe naturelle, afin de répondre aux effets de bord des critères actuels. Elle prévoit également l’encadrement des modalités de réalisation des expertises diligentées par les assureurs, qui sera assorti de contrôles et de sanctions pesant sur les experts des assureurs ne remplissant pas les exigences de qualité ; ces dernières seront fixées par décret.
Enfin, l’indemnisation sera concentrée sur les sinistres susceptibles d’affecter la solidité ou d’entraver l’utilisation normale du bâtiment endommagé. Le Gouvernement souhaite accompagner en priorité les sinistrés confrontés à des dommages matériels affectant la solidité de l’habitation ou susceptibles de créer des dommages graves à terme.
En outre, l’ordonnance prévoit d’augmenter le nombre de communes éligibles à la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle. Vous le voyez, le Gouvernement est toujours pleinement mobilisé sur ce sujet.
M. le président. La parole est à M. François Bonhomme, pour la réplique.
M. François Bonhomme. Madame la ministre, j’entends votre réponse, qui ne me surprend pas.
Simplement, vous n’avez pas répondu sur les conditions de l’équilibre financier du régime CatNat, prévu à très moyen terme. Le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) estime à 10 millions le nombre d’habitations concernées et le coût cumulé de la sinistralité sécheresse à 43 milliards d’euros dans les vingt prochaines années.
Si un effort de financement n’est pas fourni, il faudra malheureusement réduire encore plus le nombre de bénéficiaires de ce régime d’indemnisation.
délais de délivrance des titres d’identité
M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, auteure de la question n° 445, adressée à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
Mme Corinne Féret. Je souhaiterais le Gouvernement interroger sur les délais de délivrance des cartes nationales d’identité et des passeports, ainsi que sur les difficultés perdurant dans le Calvados et, plus largement, sur l’ensemble du territoire national.
Les Français ont davantage besoin de présenter un titre d’identité en cours de validité que par le passé. Or la crise sanitaire, l’effet du Brexit et l’augmentation structurelle de la demande ont pour conséquence un allongement des délais de délivrance. Actuellement, le délai moyen pour obtenir un rendez-vous en mairie serait de cinquante-huit jours, voire bien plus dans certains territoires, particulièrement en zones urbaines.
Malgré le plan d’urgence lancé par le Gouvernement en mai 2022, les résultats restent très insuffisants.
Cette année, près de 14 millions de Français doivent refaire leur pièce d’identité, soit 5 millions de plus que l’an dernier. Pour faire face à la demande, les collectivités devront certainement embaucher, ce qui aura un coût.
De même, force est de constater que les élus locaux – et, au premier chef, les maires – et les agents communaux sont les victimes collatérales des dysfonctionnements observés. Confrontés à la frustration d’usagers agacés par les délais d’attente, il n’est pas rare qu’ils soient victimes de violence verbale, voire pire.
Il semblerait également que la nouvelle carte nationale d’identité sécurisée suscite un véritable engouement. L’été approchant, les demandes augmenteront encore.
Je souhaiterais donc savoir ce que le Gouvernement entend mettre en œuvre pour assurer un délai raisonnable de délivrance de titres d’identité aux usagers, l’objectif devant être aussi de garantir une offre de proximité pour tous sur l’ensemble du territoire national.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Madame la sénatrice Féret, en 2022, face à l’augmentation exceptionnelle des demandes de titres d’identité et, concomitamment, de celle des délais de délivrance, le ministère de l’intérieur et des outre-mer a mis en place de nouvelles mesures.
En effet, l’accompagnement des mairies est une priorité et les mesures prises doivent permettre de limiter les conséquences de l’augmentation continue de la demande sur leurs services.
La définition de règles nationales de priorisation du traitement des demandes et de mesures dérogatoires favorables au passage d’examen avec un titre périmé depuis moins de cinq ans doit ainsi permettre de contenir le volume des demandes.
Le moteur national de recherche de rendez-vous déployé permet aux usagers de connaître les disponibilités dans une zone géographique donnée et de réduire le nombre de rendez-vous non honorés. L’enregistrement d’une prédemande en ligne est encouragé, car il permet de limiter la durée des rendez-vous de recueil et d’augmenter le nombre de rendez-vous assurés. Le soutien financier est également prévu, grâce à la revalorisation exceptionnelle de la dotation pour les titres sécurisés, afin de porter l’enveloppe globale à 73 millions d’euros en 2023.
Pour une plus grande proximité avec les usagers, 500 nouveaux dispositifs supplémentaires sont en cours de déploiement d’ici à la fin du mois d’avril. Cette nouvelle augmentation significative du nombre de communes pouvant accueillir les demandes des usagers contribuera à la réduction des tensions que vous relevez.
En outre, la récente loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur prévoit d’affecter des effectifs supplémentaires pérennes. Le suivi attentif du maillage territorial des dispositifs de recueil (DR) et l’accompagnement quotidien des communes traduisent l’engagement du Gouvernement à garantir un service de proximité de qualité pour tous les usagers sur l’ensemble du territoire national.
M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, pour la réplique.
Mme Corinne Féret. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse.
J’ai été alertée par plusieurs maires de mon département, le Calvados, qui m’ont fait part de leur inquiétude, voire des difficultés qu’ils rencontrent depuis plusieurs mois.
Les nouveaux moyens que vous annoncez nécessiteront aussi un peu de temps pour être mis en place : du temps pour l’installation des machines, du temps de formation des agents. Or il y a urgence, car nos concitoyens attendent depuis trop longtemps maintenant.
politique de développement de l’habitat inclusif
M. le président. La parole est à M. Jean Pierre Vogel, auteur de la question n° 413, transmise à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
M. Jean Pierre Vogel. Promu par le Gouvernement, l’habitat inclusif, défini par la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, dite loi Élan, fait l’objet d’un financement particulier, celui de la prestation d’aide à la vie partagée.
Il est destiné aux personnes handicapées ou âgées choisissant un mode d’habitation individuelle qui garantisse inclusion sociale et vie autonome, tout en restant au domicile. La demande est – on peut le comprendre – croissante et le regroupement de plusieurs personnes handicapées est indispensable à la mutualisation des prestations financées par le conseil départemental.
L’association départementale des infirmes moteurs cérébraux (Adimc) de la Sarthe a développé depuis 1994 un habitat inclusif de seize logements adaptés aux personnes atteintes d’un handicap moteur, aux caractéristiques PMR++, pour lesquels chacune d’entre elles bénéficie d’un bail d’habitation à titre personnel, dans un immeuble comptant vingt-cinq appartements.
Or la commission de sécurité du service départemental d’incendie et de secours (Sdis) de la Sarthe a requalifié l’immeuble en établissement recevant du public (ERP), en se fondant sur un arrêté datant de 1980, aux termes duquel la présence de plus de six personnes en situation de handicap dans un même immeuble emporte de facto cette qualification.
Le bailleur social propriétaire n’ayant pas réalisé les travaux d’adaptation de l’immeuble dans les délais impartis, le maire du Mans en a prononcé la fermeture administrative, et tous les occupants se trouvent menacés d’une expulsion imminente, aucune solution de relogement adaptée n’étant trouvée pour les occupants handicapés.
Par conséquent, il existe une incompatibilité entre les réglementations ERP et habitat inclusif regroupant plus de six logements pour PMR (personnes à mobilité réduite), avec des conséquences lourdes : probable classification en ERP de tous les habitats inclusifs, nouvelles fermetures administratives, menaces d’expulsion, coup d’arrêt à l’habitat inclusif.
Madame la ministre, quelles dispositions urgentes entend prendre le Gouvernement aussi bien pour sauvegarder l’habitat inclusif existant que pour permettre son développement ?
Envisagez-vous de soutenir financièrement les bailleurs publics et privés, afin qu’ils prévoient la création de logements adaptés à l’habitat inclusif – six au maximum, sans doute, pour échapper à la qualification d’ERP – dans toute construction nouvelle, afin de permettre la mutualisation des prestations handicap et d’imposer, peut-être, un certain nombre de logements destinés à l’habitat inclusif au sein de chaque nouvelle construction ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Monsieur le sénateur Vogel, le cadre général de la sécurité incendie des locaux d’hébergement relève de la réglementation relative aux habitations portée par le ministère en charge de la construction.
Cependant, la réglementation relative aux ERP relevant du ministère de l’intérieur et des outre-mer peut s’y substituer pour garantir la sécurité des usagers dès lors qu’ils sont à l’extérieur de leur domicile – internat scolaire, hôtel, etc. – ou que l’aptitude de ceux-ci ne leur permettrait pas de se soustraire seuls aux effets d’un incendie.
L’habitat inclusif, qui est une solution de logement de substitution à l’habitat individuel isolé et à la vie collective en résidence pour les personnes âgées et les personnes handicapées, fait actuellement l’objet d’échanges interministériels visant à concilier la préservation du lien social avec l’impérieuse nécessité de protéger nos populations les plus fragiles, particulièrement exposées lors d’un incendie.
Dans le cas cité en exemple, le bâtiment concerné comporte quinze logements répartis dans des étages, accueillant des personnes infirmes moteurs cérébraux, reconnues comme des personnes souffrant d’un handicap sévère, les privant d’autonomie pour accomplir les actes de la vie quotidienne. En application de la réglementation, la sous-commission départementale de sécurité a proposé au maire, après une visite sur place en avril 2022, le classement en ERP.
Le propriétaire n’ayant pas mis son bâtiment en conformité avec la réglementation, le maire a pris un arrêté de fermeture le 8 décembre 2022, qui a fait l’objet d’un contentieux administratif. Le Conseil d’État a confirmé, par une ordonnance du 20 février 2023, le statut d’ERP de ce bâtiment, en s’appuyant notamment sur la situation de fragilité des résidents.
Par conséquent, les porteurs de projet doivent intégrer que l’autonomie du public accueilli est un des critères déterminants du statut juridique de l’établissement.
attractivité pour les professionnels de santé des territoires voisins des zones de revitalisation rurale
M. le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, auteur de la question n° 493, adressée à Mme la ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. Madame la ministre, ma question porte sur la situation des communes limitrophes ou situées à proximité des zones de revitalisation rurale (ZRR).
En effet, les ZRR sont un dispositif indispensable pour un certain nombre de collectivités, puisqu’il concerne près de 18 000 d’entre elles en France, en leur accordant des avantages fiscaux et sociaux pour conforter leur attractivité.
Pour autant, un certain nombre de communes situées à proximité de ces zones rencontrent des difficultés pour attirer des professionnels, notamment de santé. En effet, le régime intéressant des communes voisines situées en ZRR incite ces professionnels à y visser leur plaque.
Quels sont les dispositifs prévus et les réflexions en cours au sein du Gouvernement pour réduire l’« effet frontière » ou l’effet de seuil et d’éviter que ces communes, qui ont également besoin d’attirer des professionnels, ne pâtissent de la proximité d’une zone plus attractive ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Monsieur le sénateur Lemoyne, les zones de revitalisation rurale sont un dispositif d’exonération fiscale et sociale – vous l’avez indiqué – visant à favoriser l’attractivité des territoires ruraux.
Parmi ces aides, un dispositif d’exonération fiscale pour les médecins généralistes exerçant dans une commune en ZRR est effectivement présent. Comme vous l’indiquez, et comme c’est le cas pour la plupart des dispositifs de zonage, des « effets frontière » peuvent exister.
Le dispositif ZRR prend fin au 31 décembre 2023. Depuis l’été 2022, je travaille sur l’avenir des ZRR. Ce travail repose sur une mission que j’ai confiée au préfet François Philizot, avec le soutien de la direction générale des collectivités locales (DGCL).
Les effets de bord ou de frontières inhérents aux ZRR sont bien identifiés, notamment en matière de déserts médicaux, et l’un des objets de cette mission est d’y apporter une solution.
Cette problématique rejoint aussi, en partie, celle des communes rurales qui ne sont pas classées en ZRR, car appartenant à un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) n’étant lui-même pas classé en ZRR.
Nous travaillons donc à un mécanisme permettant, par dérogation à l’application d’une méthode nationale de calcul au niveau des EPCI, de faire entrer certaines communes dans le dispositif, dès lors qu’elles répondent aux critères de zonage.
Ainsi, dans les semaines qui viennent, des annonces seront faites sur l’avenir des ZRR à compter du mois de janvier 2024, mais également sur une nouvelle déclinaison de l’agenda rural, sous l’appellation générale de France Ruralité.
Ces annonces trouveront leur place dans un plan national ambitieux à destination des territoires ruraux. Celui-ci tiendra évidemment compte des problématiques que vous évoquez, en y apportant des solutions concrètes et adaptées à chaque territoire. J’aurai alors plaisir à vous le présenter.
M. le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, pour la réplique.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. Madame la ministre, je vous remercie de ces éléments d’orientation.
Que les choses soient claires : encore une fois, il ne s’agit pas de remettre en cause les ZRR. J’espère que le travail engagé sur ce sujet, entre autres par nos collègues Bernard Delcros et Frédérique Espagnac, permettra de conforter ce régime et de trouver des solutions pour les communes riveraines voisines de ces zones.
C’est exactement le sens des déclarations du Premier ministre Jean Castex, lors de son déplacement à Migennes dans l’Yonne, alors que le maire de l’époque l’avait sensibilisé à cette question. Le Premier ministre s’était alors montré ouvert à des dispositions qui trouveraient leur place dans un projet de loi de finances (PLF) ou un projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS).
Nul doute que les orientations évoquées permettront de continuer le travail et – je l’espère – de le faire aboutir.
définition du potentiel fiscal et financier des communes
M. le président. La parole est à M. Bruno Belin, auteur de la question n° 153, adressée à Mme la ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité.
M. Bruno Belin. Madame la ministre, je voudrais revenir sur la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite loi NOTRe.
Celle-ci a été un véritable séisme pour un certain nombre de collectivités, comme les départements. Ceux-ci ont perdu la clause de compétence générale, la compétence économique et une des compétences de proximité les plus symboliques, le transport scolaire, transféré aux grandes régions, qui naissaient alors et connaissaient moins le terrain.
Il y aurait beaucoup à dire sur ces grandes régions, qui n’ont permis de réaliser aucune économie de fonctionnement depuis sept ou huit ans et qui ont parfois conservé leur hôtel de région dans d’anciennes capitales régionales.
Cette loi a été un cataclysme pour les collectivités locales, et sans doute pour les plus rurales d’entre elles.
En effet, elles ont dû, parfois contre leur gré, intégrer des établissements publics de coopération intercommunale de grande taille, comme des communautés urbaines.
Je connais plusieurs exemples de communes dans le département de la Vienne, autour de Poitiers, dont le potentiel financier a mécaniquement doublé ou triplé, alors que les maires s’interrogent, puisque la population de leur commune n’est pas devenue plus riche.
La conséquence immédiate a été l’effondrement de la dotation globale de fonctionnement (DGF). Or, actuellement, des communes sont asphyxiées, essaient de travailler à l’élaboration de leur budget sans y parvenir et ne peuvent avoir un budget d’investissement, car leur budget de fonctionnement n’est pas bouclé. Je pense à des communes, comme Liniers, Bonnes ou Cloué, qui essaient de survivre.
Quelle est la position du Gouvernement pour aider ces collectivités asphyxiées ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Monsieur le sénateur Belin, le potentiel fiscal et le potentiel financier communaux ont pour vocation de retranscrire, de la manière la plus objective possible, en neutralisant les choix budgétaires et de gestion des collectivités locales, le niveau de ressources libres d’emploi qu’une commune est en mesure de retirer, à la fois de la fiscalité locale et de la fiscalité transférée qu’elle peut percevoir, mais aussi la richesse qu’elle tire de son appartenance à un EPCI à fiscalité propre.
En effet, au sein d’un EPCI à fiscalité propre, une commune bénéficie, directement ou indirectement, des produits de fiscalité économique, des prélèvements ou reversements fiscaux intercommunaux ou bien encore de la répartition des attributions de compensation décidées par le conseil communautaire.
Ce mode de calcul, commun à l’ensemble des communes appartenant à un EPCI faisant l’application du régime de la fiscalité professionnelle unique, ce qui est le cas de 90 % des communes, assure la comparabilité de leur niveau de ressources potentielles entre elles et constitue la condition sine qua non d’une répartition objective et équitable des différentes composantes de la DGF à l’échelon national.
Cependant, je vous rejoins sur le fait que l’échelon local joue un rôle essentiel pour assurer une plus grande solidarité entre les communes. Pour cela, il dispose d’outils dédiés. En effet, plusieurs mécanismes fiscaux permettent d’assurer une plus forte péréquation des ressources en direction des communes les moins dotées, comme la révision libre des attributions de compensation ou l’institution d’une dotation de solidarité communautaire (DSC). J’ajouterai également qu’il existe un dispositif de répartition locale de la DGF, dont les élus peuvent se saisir pour définir des règles de réallocation des attributions de DGF qui leur sont notifiées.
Grâce à l’ensemble de ces outils, les collectivités ont donc la possibilité de faire jouer la solidarité intercommunale. J’ajoute que je suis à votre entière disposition pour poursuivre ces échanges.
M. le président. La parole est à M. Bruno Belin, pour la réplique.
M. Bruno Belin. Madame la ministre, je vous ai bien écoutée, et l’Évangile selon saint Bercy, nous le connaissons ! (Sourires.) Or la réalité du terrain est tout autre aujourd’hui.
Ainsi, le Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales (Fpic), également bien connu – j’ai moi-même présidé une intercommunalité pendant une quinzaine d’années – nécessite l’unanimité du conseil communautaire, ce qui ne marche pas.
Par conséquent, des moyens de créer des fonds de compensation pour sauver les communes rurales doivent absolument être trouvés. (M. Olivier Cigolotti et M. Vincent Segouin applaudissent.)
périmètre pris en compte dans les décomptes de l’objectif du dispositif zéro artificialisation nette
M. le président. La parole est à M. Cédric Vial, auteur de la question n° 338, adressée à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
M. Cédric Vial. Ma question a trait au dispositif du « zéro artificialisation nette », dit ZAN, inscrit dans la loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite loi Climat et résilience, qui a des effets directs sur les collectivités territoriales.
Dans son discours de clôture du congrès des maires, Mme la Première ministre a confirmé l’objectif de 2050 pour la désartificialisation des sols. Elle a également précisé que les objectifs devaient être territorialisés et différenciés, sans trahir les ambitions nationales. Elle a aussi indiqué que les projets d’envergure nationale seront décomptés à l’échelle nationale.
Ces annonces sont des éléments importants pour les collectivités. Toutefois, des questions subsistent. Par exemple, en Isère, l’entreprise STMicroelectronics a annoncé une extension de son usine qui permettra de doubler la capacité de production, avec, à la clé, la création de plus de 1 000 emplois sur place.
Ce projet entre dans la stratégie de la politique nationale de soutien de la filière électronique, en termes de développement industriel, comme le Président de la République a pu le préciser lors de son déplacement sur le site de cette entreprise.
Toutefois, pouvez-vous nous indiquer si cette extension sera décomptée à l’échelle nationale et quel décompte sera pris en compte, uniquement le tènement foncier de cette extension ou aussi les conséquences de l’arrivée de 1 000 nouveaux salariés sur le territoire ?
En effet, ces créations d’emplois se traduiront par des logements supplémentaires, des services publics et équipements complémentaires. Ceux-ci seront-ils intégrés au décompte ?
Si ce projet n’est pas pris en compte au niveau national, ses conséquences auraient a minima des effets sur l’enveloppe foncière disponible de trois schémas de cohérence territoriale (Scot) différents, ce qui empêchera quasiment toute autre forme de développement endogène.
Or une augmentation de leur enveloppe ne pourrait être envisagée qu’en révisant à la baisse la capacité de développement des autres Scot régionaux, afin de conserver les objectifs à l’échelle du schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (Sraddet), qui devra lui aussi être modifié.
Compte tenu des délais de mise à jour de ces multiples documents, l’entreprise devra attendre plusieurs années avant de pouvoir déposer un permis de construire. Si nos entreprises doivent attendre l’évolution de ces documents-cadres pour déposer un début de projet se pose alors la question de la réactivité nécessaire pour notre autonomie industrielle. L’intervention des différents documents Sraddet, Scot et plan local d’urbanisme (PLU) pourraient rendre tout projet important de ce type impossible à mettre en œuvre.