compte rendu intégral
Présidence de M. Pierre Laurent
vice-président
Secrétaires :
Mme Jacqueline Eustache-Brinio,
M. Loïc Hervé.
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Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
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Questions orales
M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.
ajournés des concours de la fonction publique
M. le président. La parole est à M. Gilbert Roger, auteur de la question n° 193, adressée à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.
M. Gilbert Roger. J’attire l’attention du Gouvernement sur la contradiction qui existe entre la pénurie de personnel dans l’enseignement et la santé et l’ajournement d’étudiants aux concours de la fonction publique territoriale.
De plus en plus de témoignages d’étudiants recalés à ces concours en raison d’une note juste en deçà du seuil d’admission nous parviennent. Le plus souvent, ces jeunes sont laissés pour compte. Je pense notamment à une jeune étudiante ajournée de l’agrégation pour seulement un point à qui aucune proposition n’a été faite.
Or ces secteurs, pour lesquels on constate un réel manque d’intérêt, doivent aujourd’hui remédier aux démissions. Les rectorats sont parfois même obligés de trouver des contractuels en speed dating, comme l’on dit, et de les former en quelques jours à un métier complexe.
Quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre dans l’immédiat pour entrer en contact avec ces ajournés et leur proposer des postes de contractuels avec, pour échéance, une titularisation ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Carole Grandjean, ministre déléguée auprès du ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion et du ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse, chargée de l’enseignement et de la formation professionnels. Monsieur le sénateur Gilbert Roger, chaque concours donne lieu à l’établissement d’une liste principale par un jury qui classe par ordre de mérite les candidats déclarés aptes.
Si la liste principale est complète, le jury peut établir une liste complémentaire, afin de permettre le remplacement des candidats inscrits sur liste principale qui ne pourraient pas être nommés.
Je le rappelle, l’appréciation de la qualité des prestations des candidats à un concours relève de la compétence souveraine des jurys, dont les décisions ne sont susceptibles d’aucun recours devant les juridictions administratives, dès lors que ces jurys ont fonctionné et délibéré de manière régulière.
Hormis le cas très spécifique du recrutement de personnes en situation de handicap par voie contractuelle, qui entraîne leur titularisation à l’issue du contrat, aucune disposition législative ne permet actuellement de recruter un agent contractuel au sein de la fonction publique et de le titulariser sans concours.
La réduction du nombre de candidats enregistrée aux concours de recrutement de professeurs des premier et second degrés s’est traduite, pour la session 2022, par une baisse de rendement d’environ 10 %.
Le ministère a donc demandé aux académies, lorsque des besoins apparaissent, de mener une politique volontariste de recrutement de contractuels, afin – vous l’avez indiqué, monsieur le sénateur – de pourvoir les postes vacants, et de proposer une rémunération cohérente avec celle des professeurs titulaires.
Plus globalement, votre question porte sur les actions en faveur de la nécessaire attractivité des métiers de l’enseignement et de la santé.
Sachez que le ministère de l’éducation nationale a ouvert un chantier pour améliorer les rémunérations des enseignants, sujet évoqué à de nombreuses reprises dans votre assemblée. D’autres métiers au sein du ministère sont également concernés. Je pense en particulier au chantier de la revalorisation indemnitaire des personnels de santé, engagé en 2021 et qui se poursuivra en 2023.
De manière générale, l’amélioration des conditions d’exercice doit aussi permettre de renforcer l’attractivité de ces métiers. C’est là tout l’objectif des concertations qui sont menées en ce moment par M. le ministre de l’éducation nationale.
M. le président. La parole est à M. Gilbert Roger, pour la réplique.
M. Gilbert Roger. Je vous remercie, madame la ministre.
Je pense qu’il y a matière à envisager des évolutions. Il n’est pas normal de laisser une personne dans la nature, sans aucune proposition, simplement parce qu’elle aurait raté le concours de l’agrégation à un point près, surtout quand on sait que des séances de speed dating sont organisées, comme cela a été le cas dans l’académie des Yvelines, pour recruter des candidats n’ayant pas comme ambition première d’entrer dans l’éducation nationale.
S’il faut passer par la loi pour avancer, faisons-le. Mais je suis sûr que vous pourriez d’ores et déjà prévoir des évolutions, en lien avec les recteurs, en votre qualité de ministre
baisse du nombre d’enseignants du premier degré et pérennité des regroupements pédagogiques intercommunaux.
M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, auteure de la question n° 495, adressée à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.
Mme Cathy Apourceau-Poly. La colère gronde chez les enseignants, les parents, les élus, car la soustraction est devenue l’opération favorite du Gouvernement.
Pour le Pas-de-Calais, on prévoit soixante-treize suppressions de classes et cinquante-trois suppressions de postes dans le primaire et en maternelle, sans compter la baisse drastique de la dotation horaire globale de nos collèges et lycées, d’où découlera la suppression de nombreuses options dans des bassins de vie déjà durement touchés par la crise sociale.
Beaucoup de maires, qu’ils soient du bassin minier, de la côte ou de la ruralité, m’interpellent au sujet de la baisse des moyens dans l’éducation nationale, qui entraîne la constitution de plus en plus de classes à triple, voire à quadruple niveau ! S’ajoute à cela le manque de remplaçants, y compris lorsque les absences sont prévues.
Je suis parfois surprise de la façon dont se déroule le dialogue entre les maires et l’éducation nationale.
Pour ne prendre qu’un exemple récent, je citerai l’échange entre le regroupement pédagogique intercommunal (RPI) de Chériennes/Le-Quesnoy-en-Artois/Vacqueriette-Erquières : un seul maire du regroupement a été avisé du projet de fermeture de postes ; en plus, ce n’était pas celui de la commune concernée… Et lorsque les maires des trois communes du RPI ont écrit au rectorat pour contester cette fermeture, le rectorat leur a répondu dix jours après, sans avoir consulté la réponse des élus, que la décision était déjà validée.
Comme vous le savez, les maires investissent beaucoup dans les écoles, car, en ruralité, il y va souvent de la vie du village.
De la même manière, faute de prise en compte des enfants de moins de trois ans dans le calcul des moyens éducatifs alloués, les écoles sont souvent dans l’incapacité d’accueillir les enfants en question.
Les écoles représentent pourtant le cœur de nos villes et de nos villages. Nous avons besoin de pérenniser l’école publique de proximité. Il est donc indispensable de fidéliser au plus tôt les familles, ce qui suppose des moyens dédiés et, in fine, l’intégration des enfants de moins de trois ans dans les tableaux d’effectifs.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Carole Grandjean, ministre déléguée auprès du ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion et du ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse, chargée de l’enseignement et de la formation professionnels. Madame la sénatrice Apourceau-Poly, dans le contexte de forte baisse démographique que nous connaissons, tout dispositif visant à maintenir le service public de l’éducation, partout sur le territoire, est le bienvenu.
À ce titre, les RPI demeurent un outil d’aménagement scolaire essentiel. À la rentrée 2022, 4 790 regroupements totalisant 9 167 écoles ont été recensés, contre 4 777 regroupements totalisant 9 253 écoles à la rentrée 2021.
En outre, 6 997 communes sans école participaient à un RPI à la rentrée 2022, un chiffre en légère augmentation par rapport à l’année précédente, puisque l’on comptabilisait 66 communes supplémentaires, soit près de 1 % de plus.
À cet égard, je me permets de saluer le travail des maires : pour maintenir une offre scolaire sur le territoire, ils acceptent, en lien avec les directeurs académiques des services de l’éducation nationale (Dasen), de fermer certaines écoles et de former des regroupements pour offrir de meilleures conditions d’enseignement aux élèves de leurs communes.
Il convient de préciser que, d’une manière générale, les travaux de préparation de la carte scolaire de rentrée donnent lieu à de nombreux échanges avec les élus locaux et reposent sur une appréciation fine et objective de la situation de chaque école et des spécificités de chaque territoire.
Ce processus, engagé en janvier, se poursuivra jusqu’à la rentrée de septembre, dans le cadre d’un dialogue continu avec les élus et d’un suivi très attentif des évolutions éventuelles des effectifs.
Pour terminer, je vous rappelle que nous portons une attention particulière aux RPI et tenons notamment compte des efforts de regroupements déjà réalisés dans certains territoires.
priorisation académique des établissements scolaires ruraux
M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Roux, auteur de la question n° 478, adressée à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.
M. Jean-Yves Roux. Les écoles rurales représentent 36 % des écoles métropolitaines et accueillent 20 % des élèves de notre pays. Elles répondent à des caractéristiques tout à fait particulières : je pense à la forte proportion de classes multiniveaux – 76 % – et de regroupements pédagogiques intercommunaux.
Confrontés à une déprise démographique et à la difficulté de pérenniser les équipes pédagogiques, les élus ruraux mènent de nombreuses actions en faveur de l’animation et de l’attractivité de leur territoire, afin que les familles continuent de faire vivre la commune et son pilier, l’école.
Or, chaque année, les élus sont confrontés au couperet de l’annonce des fermetures et des ouvertures de classes, fondée sur le seul critère des effectifs. C’est la fameuse carte scolaire, qui est susceptible de bouleverser des équilibres et dynamiques locales obtenues de haute lutte.
Mes chers collègues, les collectivités locales sont, après l’État, les premiers contributeurs en matière d’éducation. Malheureusement, le couple ne regarde pas dans la même direction…
Au mois d’octobre 2019, M. Lafon et moi-même avons réalisé un rapport sénatorial sur les nouveaux territoires de l’éducation. Nous soulignions alors que les écoles situées en milieu rural étaient moins attirantes que les autres aux yeux des équipes éducatives et enseignantes et que leurs élèves poursuivaient leurs études dans des proportions bien inférieures à la moyenne nationale. Cela justifiait selon nous l’adoption d’une autre approche pour favoriser la réussite scolaire.
Nous indiquions notamment dans ce rapport que le gel des cartes scolaires pendant trois ans dans les territoires ruraux pouvait constituer une réponse.
Pendant ces trois ans, les élus auraient le temps de mener des politiques publiques locales pour conforter leurs écoles et leurs effectifs, tandis que les équipes pédagogiques auraient, elles aussi, le temps de monter des projets.
Voilà un an, nous adoptions la loi du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale, dite loi 3DS, qui entendait, par la déconcentration, rapprocher l’État du terrain, en soutien des collectivités. Nous sommes convaincus que l’éducation nationale gagnerait en efficacité en s’inscrivant dans l’esprit de cette loi.
Envisagez-vous, par expérimentation tout d’abord, de proposer une carte scolaire stable, valable durant trois ans, pour la ruralité ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Carole Grandjean, ministre déléguée auprès du ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion et du ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse, chargée de l’enseignement et de la formation professionnels. Monsieur le sénateur Jean-Yves Roux, l’engagement présidentiel de ne fermer aucune école en zone rurale sans l’accord préalable du maire de la commune a été pris en 2019.
Reconduit chaque année, cet engagement concerne uniquement les écoles, et non les classes, et s’applique sans exception.
Comme vous le savez, la démographie scolaire est en forte diminution. Malgré cette baisse, qui est appelée à se prolonger – je tiens à le préciser –, nous avons fait le choix de ne pas nous arrêter à un simple travail arithmétique concernant la carte scolaire, spécialement en milieu rural, où l’école publique constitue un élément de dynamisation du territoire.
Ainsi, la répartition des moyens du service public de l’éducation tient compte des différences de situation, notamment en matière économique, territoriale et sociale.
Elle repose à ce titre sur plusieurs indicateurs : le respect des caractéristiques du réseau scolaire académique, le maintien du service public dans les zones rurales et la réussite des élèves issus des catégories sociales les plus défavorisées.
Nous utilisons un indicateur territorial qui intègre la typologie des territoires, des moins éloignés aux plus éloignés des zones urbaines, comme le préconisait votre rapport, monsieur le sénateur.
D’autres dispositifs spécifiques sont mis en place en ruralité. Je pense par exemple aux territoires éducatifs ruraux, que nous venons d’étendre à dix académies, au vu du volontarisme des élus locaux à propos de ce dispositif.
Je pense aussi à l’extension aux zones rurales de certains dispositifs d’accompagnement, comme les cordées de la réussite, qui concernent près de 32 000 élèves de territoires ruraux sur un total de 180 000 à l’échelon national, ou encore l’école ouverte dans le cadre des vacances apprenantes depuis l’été 2020.
Enfin, le dispositif des internats d’excellence est un levier important pour les élèves des territoires situés en zone rurale ou isolée.
Je connais votre travail et votre engagement sur la question de l’organisation territoriale du service public de l’éducation. Soyez assuré, monsieur le sénateur, que nous continuerons à travailler en lien avec les élus locaux pour permettre à tous nos élèves d’accéder aux apprentissages dans les meilleures conditions.
impact du programme « france travail jeunes » sur les missions locales pour l’emploi
M. le président. La parole est à M. Antoine Lefèvre, auteur de la question n° 500, adressée à M. le ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion.
M. Antoine Lefèvre. Madame la ministre, le programme France Travail Jeunes, que vous avez récemment appelé de vos vœux, suscite doutes et inquiétudes au sein du réseau national des missions locales pour l’emploi.
Ce projet, qui se rattache au chantier France Travail, attendu pour 2024, prévoit de rebaptiser les missions locales sans pour autant maintenir l’exclusivité dont elles bénéficient dans l’accompagnement des publics accueillis.
Les responsables des antennes locales perçoivent cette initiative comme une volonté de l’État de se substituer intégralement à eux sur le long terme, malgré leur forte implication dans les territoires pour aider les publics en recherche d’emploi.
Engagées depuis plus de quarante ans pour l’insertion des jeunes, les missions locales se sont constamment réinventées pour suivre l’évolution des dispositifs d’insertion et fournir une offre sur-mesure, adaptée aux territoires et aux publics ciblés.
Similairement au dédoublement des objectifs entre les missions locales et Pôle emploi depuis le lancement du contrat d’engagement jeune (CEJ) en 2022, cette annonce d’une double tutelle est perçue comme une menace vis-à-vis du maintien des missions locales.
Par ailleurs, les élus de l’Union nationale des missions locales (UNML) avaient accueilli avec perplexité l’annonce selon laquelle l’attribution de l’opérateur chargé du demandeur d’emploi se ferait désormais sur le fondement d’un algorithme conçu pour orienter sa recherche.
Ce n’est autre qu’un moyen supplémentaire de déboussoler encore davantage des publics précaires, isolés pour certains, et pour lesquels il convient de maintenir le lien essentiel de proximité avec le conseiller de la mission locale.
Quelle sera la portée véritable de ce nouveau projet ? Êtes-vous en mesure d’apporter les garanties nécessaires à la préservation de l’autonomie des missions et des moyens de nos missions locales ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Carole Grandjean, ministre déléguée auprès du ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion et du ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse, chargée de l’enseignement et de la formation professionnels. Monsieur le sénateur Lefèvre, dans le cadre des travaux de la mission de concertation et de préfiguration relative à France Travail, il est proposé, comme vous l’indiquiez, que les missions locales qui le souhaitent prennent l’appellation « France Travail Jeunes ».
Cela ne signifie évidemment pas qu’elles seront seules chargées de l’accompagnement vers l’insertion professionnelle de tous les jeunes. Les missions locales auront pour principal objectif de mettre en œuvre les parcours des jeunes qui ont besoin d’un accompagnement socio-professionnel global, ce qui constitue un enjeu majeur pour leur insertion.
Les missions locales coélaboreront avec l’opérateur France Travail un projet de feuille de route pour l’ensemble des jeunes concernés sur chaque territoire, sous la gouvernance du comité France Travail, coprésidé par l’État et les collectivités locales. Leur rôle en sort donc renforcé.
L’orientation résultera de l’application de critères partagés, qui permettront aux jeunes de bénéficier d’un diagnostic et d’un accompagnement pertinents. Cela conduira aussi à diminuer la concurrence entre réseaux.
Le contrat d’engagement jeune continuera d’être proposé conjointement par les missions locales et Pôle emploi, les publics étant orientés en fonction des besoins des jeunes et dans le cadre d’un développement des complémentarités et de la coopération sur chaque territoire.
Par ailleurs, avec ce contrat d’engagement Jeunes en rupture, nous souhaitons mieux articuler les interventions des missions locales avec les structures retenues dans le cadre des appels à projets.
Le partage des offres de services, le développement de communs numériques, physiques et méthodologiques ou le soutien à la formation et au partage de pratiques sur les territoires concernés par le projet France Travail s’inscriront dans cette logique de coopération et de complémentarité.
Enfin, l’État continuera d’apporter un accompagnement significatif aux missions locales : une enveloppe de 600 millions d’euros en crédits de paiement leur sera ainsi dédiée en 2023. J’ajoute que les financements alloués à l’UNML ont crû de manière substantielle depuis 2022 dans le but d’améliorer l’animation des missions locales.
M. le président. La parole est à M. Antoine Lefèvre, pour la réplique.
M. Antoine Lefèvre. Je vous remercie de ces précisions, madame la ministre.
Étant moi-même depuis plus de vingt ans président d’une mission locale fusionnée avec une maison de l’emploi et de la formation, je sais par expérience que les jeunes, les élus, les partenaires ont besoin de signaux clairs, d’une ligne de conduite simple et d’une prise en charge exclusive au plus près des territoires.
Aujourd’hui encore, près de 150 000 jeunes sortent du système scolaire sans aucune qualification. Ils ont besoin de nous, et ce n’est pas un algorithme qui améliorera leur prise en charge. Alors, s’il vous plaît, faites confiance au réseau des missions locales.
faciliter la mutualisation de l’exploitation de la vidéo-protection entre des communes associées
M. le président. La parole est à M. Gilbert-Luc Devinaz, auteur de la question n° 433, adressée à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
M. Gilbert-Luc Devinaz. Ma question porte sur les contraintes juridiques qui restreignent la mutualisation de l’exploitation de la vidéoprotection entre plusieurs communes.
Cette mutualisation présente de nombreux avantages, comme l’augmentation des capacités d’investissement pour du matériel plus performant, la mutualisation des charges de personnel et le renforcement des territoires couverts par la vidéoprotection.
La gouvernance d’une telle mutualisation peut être mise en œuvre sous différents régimes. Je pense à la possible création d’un syndicat à usage unique ou à la mise en place d’une entente intercommunale par convention.
Cette dernière solution offre l’avantage de la souplesse, sans augmenter le nombre de structures sur un même territoire. Cependant, elle se heurte à des difficultés de mise en œuvre qui réduisent son attrait pour les communes intéressées.
L’instruction gouvernementale du 4 mars 2022 laisse entendre que, dans le cadre d’une entente intercommunale, l’exploitation des images des communes associées ne peut se faire que par un policier municipal.
De fait, si les communes décident d’affecter un agent technique communal ou un agent de surveillance de la voie publique, celui-ci ne pourrait visualiser que les images de la commune qui le rémunère. Ainsi, l’intérêt d’une telle mutualisation disparaîtrait.
Serait-il possible, dans une entente intercommunale, de permettre à des opérateurs de vidéoprotection ou à des agents de surveillance de la voie publique d’exploiter les images, et non de réserver cette faculté aux seuls policiers municipaux ? Pourrait-on autoriser ces agents à visualiser l’ensemble des vidéos des communes membres de l’entente intercommunale ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Monsieur le sénateur Devinaz, la loi du 25 mai 2021 pour une sécurité globale préservant les libertés donne beaucoup de possibilités nouvelles pour favoriser la vidéoprotection et la mise en commun de polices municipales.
L’article 42 de cette loi a ainsi étendu la possibilité de visionnage d’images de la voie publique issues de la vidéoprotection à des agents territoriaux qui ne relèvent pas des cadres d’emploi de la police municipale.
Les agents communaux peuvent ainsi solliciter un agrément préfectoral, afin de visionner les images de vidéoprotection de leur territoire communal.
Si la loi n’a effectivement pas prévu de régime de mutualisation strictement pluricommunale de ses agents, elle a en revanche autorisé la mise à disposition des communes d’opérateurs de vidéoprotection qui ne sont pas des policiers municipaux par les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre compétents et par des syndicats mixtes, dont les communes sont membres. Ces agents peuvent alors être habilités à visionner les images d’un territoire regroupant plusieurs de ces communes membres.
Il n’a effectivement pas été prévu que des communes puissent mutualiser la vidéoprotection par simple convention, en employant des opérateurs de vidéoprotection en lieu et place de policiers municipaux. Ce point n’a d’ailleurs jamais été soulevé lors de l’élaboration de la loi.
Il semble nécessaire d’évaluer d’abord l’efficacité de l’ensemble des nouveaux dispositifs à la main des communes, avant d’envisager le développement d’un régime supplémentaire de mutualisation d’agents spécialement dédiés à cette mission de vidéoprotection.
M. le président. La parole est à M. Gilbert-Luc Devinaz, pour la réplique.
M. Gilbert-Luc Devinaz. Madame la ministre, j’entends d’autant mieux votre réponse que je la connaissais.
Simplement, on peut comprendre que certains élus ne souhaitent pas multiplier les structures sur leur territoire, de même que l’on peut comprendre qu’ils veuillent que les policiers municipaux soient plutôt présents sur le terrain.
Le problème est que ces élus rencontrent aujourd’hui des difficultés pour recruter des policiers municipaux. C’est pourquoi je vous demandais si l’on ne pourrait pas étendre à des agents, qui ne seraient pas des policiers, le droit de visionner les images de l’ensemble des communes associées.
difficulté à identifier le préfet compétent
M. le président. La parole est à M. Laurent Burgoa, auteur de la question n° 394, adressée à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
M. Laurent Burgoa. Ma question concerne une aire d’accueil des gens du voyage située à Villeneuve-lès-Avignon, dans le Gard. Celle-ci pose des difficultés, en raison de la présence de certains usagers venus de pays de l’Est, qui s’y sédentarisent et y organisent divers trafics.
Bien que je sois tenté de le faire, ma question n’a pas pour objet de traiter ici et maintenant les problèmes occasionnés par ces personnes, car ce type de problématique implique que l’on apporte des réponses véritablement circonstanciées ; c’est là où le bât blesse.
Les élus concernés ne savent plus vers qui se tourner, car l’aire d’accueil dont je vous parle est gérée par l’agglomération du Grand Avignon, dans le département du Vaucluse.
Oui, madame la ministre, bien que gardoises, les communes de Villeneuve-lès-Avignon et des Angles sont membres de ladite agglomération, située à la fois dans un autre département et dans une autre région, la région Sud.
Quel préfet ces communes doivent-elles saisir pour régler leur problème ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Monsieur le sénateur Burgoa, le régime applicable en matière de stationnement des gens du voyage est prévu par la loi du 5 juillet 2000 relative à l’accueil et à l’habitat des gens du voyage.
L’article 9 de cette loi permet aux maires, quelle que soit la nationalité des occupants, de demander au préfet du département de mettre en demeure les occupants de quitter les lieux.
Cette mise en demeure n’est possible que si le stationnement viole les dispositifs d’un arrêté du maire ou du président de l’établissement public de coopération intercommunale interdisant le stationnement des résidences mobiles en dehors des aires d’accueil et des terrains dédiés. Cette occupation doit en outre porter atteinte à la sécurité, à la tranquillité ou à la salubrité publiques.
En dehors de l’hypothèse du stationnement illicite, le maintien de l’ordre public sur le territoire d’une commune relève en principe de la compétence du maire en tant qu’autorité titulaire du pouvoir de police générale.
Toutefois, en application de l’article L. 2215-1 du code général des collectivités territoriales, le préfet est compétent pour prendre toute mesure relative au maintien de l’ordre public si aucune mesure n’a été prise par le maire malgré une mise en demeure restée sans résultat.
La commune de Villeneuve-lès-Avignon – vous venez de l’indiquer – est membre de la communauté d’agglomération du Grand Avignon, qui regroupe, comme le permet le code général des collectivités territoriales, des communes appartenant à deux départements différents et dont le siège est situé en Vaucluse.
Pour autant, c’est bien le préfet du Gard qui est compétent, dans la mesure où la commune de Villeneuve-lès-Avignon est située dans ce département.