Mme Laurence Rossignol. On est d’accord !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Gabriel Attal, ministre délégué. La question des carrières hachées est un véritable sujet. Les conséquences se révèlent plus crûment lors du départ à la retraite avec la perception de pensions moins importantes.
Pour autant, je ne suis pas convaincu que l’index soit l’outil le plus adapté pour répondre à la question des carrières hachées.
Pourquoi pointer du doigt l’entreprise qui a recruté un salarié et qui contribue ainsi à gommer le caractère haché de sa carrière ? Voilà qui me semble un peu étrange.
Mme Lienemann m’a interpellé sur les contrats courts. Cette question est traitée en grande partie par le bonus-malus mis en place sur les cotisations des entreprises ayant recours aux contrats courts. Cette mesure me semble bien plus efficace que l’index.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’ensemble des amendements.
M. le président. La parole est à Mme Michelle Meunier, pour explication de vote.
Mme Michelle Meunier. Je voterai les amendements du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires pour lutter contre cette triple peine des carrières hachées.
L’index n’est bien évidemment pas l’alpha et l’oméga, mais il permet d’exercer une contrainte au travers de critères resserrés.
L’index de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes (Egapro) accorde, par exemple, une note de 92 sur 100 à un groupe hôtelier. Cependant, à y regarder de plus près, la note du premier indicateur, qui mesure l’écart de rémunération entre les femmes et les hommes selon la tranche d’âge et la catégorie socioprofessionnelle, est passée de 38 à 33 sur 40. Par conséquent, l’écart a dû augmenter en défaveur des femmes.
Cependant, cette baisse est compensée par la hausse du cinquième indicateur, qui mesure le nombre de femmes et d’hommes figurant dans les dix plus hautes catégories de rémunération. On peut en déduire que cette entreprise a embauché plus de femmes.
Voyez comme le diable se niche dans les détails : l’entreprise compte plus de femmes, mais moins rémunérées, et reçoit tout de même une bonne note !
Il est possible de faire dire ce que l’on veut aux index. C’est la raison pour laquelle nous sommes très méfiants à l’égard de l’index seniors. En rapprochant et en resserrant les critères, on pourrait peut-être avoir plus de garanties.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Comme Mme Meunier, je pense que les index ne sont pas la panacée.
Cependant, j’observe que l’on accepte d’instaurer des index pour certains sujets et pas pour d’autres. Or la précarité du salariat et les carrières hachées sont les symptômes de la grande crise que connaît le monde du travail. La proposition de Mme Poncet Monge et de ses collègues permet d’équilibrer le regard que nous portons sur la situation.
Monsieur le ministre, vous n’avez pas l’intention de progresser sur la question des carrières hachées des femmes. En effet, les simulations du COR dont vous disposez et les données que vous avez citées montrent que le taux d’activité des femmes en 2030 – excusez du peu – sera le même qu’aujourd’hui.
Or le taux d’activité des femmes est également lié à la précarité de leurs emplois. Il ne s’agit pas simplement d’avoir un emploi, mais d’avoir un équivalent temps plein, si je puis dire. Vous n’avez donc aucunement l’intention de faire reculer la précarité dans les métiers occupés par des femmes, puisque vous maintenez leur taux d’activité à son niveau actuel.
Enfin, monsieur le rapporteur, quelle belle idée que de recourir à des labels plutôt qu’à des index contraignants. J’imagine bien le groupe Airbus, qui doit choisir entre plusieurs sous-traitants, dont les tarifs sont plus ou moins chers, se prononcer finalement…
M. le président. Il faut conclure !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. … en faveur de celui disposant d’un label qualité emploi des seniors. En toute franchise, les labels n’ont pas cette efficacité !
M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.
M. Jean-Yves Leconte. Je voterai ces amendements, même si les dispositifs qu’ils visent à mettre en place ne constituent pas des solutions aux difficultés évoquées, particulièrement concernant les inégalités salariales entre les femmes et les hommes ainsi que les carrières hachées. Toutefois, pour avancer sur ces questions, il semble préférable de les connaître et de les chiffrer.
Le débat sur ces sujets montre combien il est important d’améliorer ces dispositions pour avoir de meilleures retraites et favoriser les carrières longues qui permettent de cotiser.
En tant que sénateur représentant les Français établis hors de France, je voudrais évoquer le cas de ceux qui ont interrompu leur carrière pour suivre leur conjoint à l’étranger. Des réflexions sur ce sujet existent. Plusieurs pays européens offrent la possibilité de partager ou de transmettre à son conjoint des annuités ou des trimestres cotisés, soit au cours de la carrière, soit au moment de la liquidation de ses droits à la retraite.
Ce dispositif, qui ne serait pas avantageux pour les cotisations d’assurance vieillesse, permettrait toutefois de restreindre le nombre de personnes concernées par des carrières hachées et des handicaps lors de la liquidation des droits à la retraite pour avoir favorisé la carrière de leur conjoint.
Toujours est-il que ces problèmes ne peuvent être résolus à la va-vite, mais au travers d’un véritable projet de loi de réforme des retraites,…
M. le président. Il faut conclure !
M. Jean-Yves Leconte. … qui transcrirait des accords avec les partenaires sociaux.
M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.
M. Victorin Lurel. Je voterai ces amendements. Cependant, j’aimerais attirer l’attention de mes collègues sur les conséquences catastrophiques qu’entraînera l’adoption de ce texte pour les outre-mer.
Ainsi, le contrat de fin de carrière pour les entreprises de plus de 300 salariés qui vient d’être voté ne s’appliquera pas outre-mer, où 95 % des entreprises comptent moins de 50 salariés.
À ma connaissance, les directions de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités (Deets) ne publient pas l’index égalité femmes-hommes.
En ce qui concerne les carrières hachées, je dispose de chiffres effrayants : 33 % des jeunes âgés de 15 à 29 ans ne sont pas en activité ; en métropole, 70 % des personnes âgées de 50 à 64 ans sont en activité, contre seulement 55 % dans les outre-mer. C’est dramatique ! Le royaume de la précarité, de la pauvreté et des carrières hachées se situe dans les outre-mer.
Aucune étude préalable ni aucune étude d’impact n’ont été réalisées, puisqu’on peut s’en passer dans le cadre d’un projet de loi de financement, et la note de synthèse n’est pas communiquée. On ne sait rien, on vote à l’aveugle !
Depuis 2017, on a abîmé les outre-mer ! Heureusement, la commission des affaires sociales a généralisé le seuil de récupération sur succession…
M. le président. Il faut conclure !
M. Victorin Lurel. … de 100 000 euros aux outre-mer. Je remercie la commission des affaires sociales !
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. J’aimerais ne pas avoir à rappeler régulièrement que nous n’étions pas opposés à l’index, mais à son inclusion dans ce projet de loi. Puisque vous l’avez maintenu, il était normal que nous en discutions et que nous essayions de l’enrichir.
Certains indicateurs peuvent avoir des effets, notamment au regard des carrières hachées. Il faudra travailler sur cette question.
De même, en ce qui concerne l’égalité hommes-femmes, il faudra prévoir des dispositifs sur le temps partiel, par exemple, ou sur les congés parentaux. Cela fournirait des indications sur la façon d’aménager le temps de travail afin de ne pas contraindre des parents – c’est-à-dire surtout les femmes – à interrompre leur carrière faute de place en crèche ou d’une organisation du travail idoine. Les postes et les organisations du travail doivent être adaptés aux hommes et non l’inverse. L’homme ne doit pas s’adapter à de mauvaises organisations de travail qui sont toxiques ou à des postes de travail qui usent.
L’indicateur d’égalité femmes-hommes n’est pas efficace, parce qu’on ne l’enrichit pas et qu’on se contente de la bonne note qu’obtiennent la majorité des entreprises, en dépit des biais évoqués, pour laisser accroire que tout va bien.
Il est aussi question de promotions pour briser le plafond de verre,…
M. le président. Il faut conclure !
Mme Raymonde Poncet Monge. … mais il faudrait également parler du plancher collant, c’est-à-dire de la différence de salaire entre les femmes et les hommes dès l’embauche !
M. le président. La parole est à Mme Annick Billon, pour explication de vote.
Mme Annick Billon. Oui, pour lutter contre les inégalités salariales et les inégalités à la retraite, mais, non, ce texte ne permettra pas de les réduire.
Je suis véritablement attachée à l’égalité salariale. Peut-être devrions-nous nous demander pourquoi, à la veille du 8 mars, nous ne comptons quasiment plus de femmes en poste dans le domaine du numérique, alors qu’elles étaient très nombreuses lorsque ce secteur ne représentait pas autant d’emplois. (Mme Joëlle Garriaud-Maylam renchérit.)
Pourquoi n’agissons-nous pas davantage au niveau de l’orientation ou de la formation ? Le rapport de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, intitulé Femmes et ruralités : en finir avec les zones blanches de l’égalité, mettait véritablement en évidence les inégalités d’orientation et de formation dans les territoires.
Nous venons d’entendre des arguments à la fois pour et contre l’index. Or il faut choisir : soit l’index est un bon outil, soit c’est un mauvais outil, auquel cas il est inutile de l’étendre à plus d’entreprises.
Si je partage les propos de M. le rapporteur, je voudrais néanmoins l’inviter à la prudence sur les labels. En effet, en l’absence de contrainte, l’égalité ne progresse pas ou très peu. Comme le rappelait notre collègue Laurence Cohen, si des dispositions contraignantes n’avaient pas été mises en place en matière de représentation politique, par exemple, pour les communes au-dessus du seuil de 1 000 habitants, nous ne serions peut-être pas aussi nombreuses dans cet hémicycle. Attention à ces bonnes idées !
Par ailleurs, je suis très favorable à la surcote et au travail sur les index. Nous pouvons encore améliorer cet outil récent pour le rendre plus efficace et plus à même de favoriser l’égalité dans les entreprises.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Bravo !
M. René-Paul Savary, rapporteur. Vous m’avez convaincu ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, pour explication de vote.
Mme Marie-Pierre Monier. Je voterai ces amendements, car il est important de mieux prendre en compte les carrières hachées, qui touchent principalement les femmes.
Je reviendrai sur les propos de Mme la présidente de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes.
En tant qu’élue rurale, je souhaitais justement que nous nous penchions sur l’inégalité entre les femmes et les hommes ainsi que sur la place des femmes en ruralité.
Ce rapport a mis en lumière l’existence de stéréotypes de genre dans de nombreux domaines et a pointé l’accroissement des inégalités dans les territoires ruraux entre les femmes et les hommes, liées à la mobilité et, en particulier, à l’éloignement des solutions de garde.
M. le rapporteur a précédemment indiqué que nous nous en occuperions et qu’une surcote serait mise en place dans le cadre de l’article 8. Toutefois, j’aimerais qu’on élargisse le débat, car nous ne sommes pas que des reproductrices. Ce n’est pas pour avoir eu des enfants que nous devons être récompensées lors de la retraite. (Applaudissements sur des travées des groupes CRCE et SER.) En tant que femmes, nous avons des droits, et il faut arriver à avancer en matière d’égalité entre les femmes et les hommes, tout simplement !
M. le président. La parole est à M. Hervé Gillé, pour explication de vote.
M. Hervé Gillé. Pour ma part, je voterai ces amendements, car de telles dispositions participent d’une volonté de clarifier la communication au sujet des retraites. Aujourd’hui, beaucoup de personnes méconnaissent leur véritable situation.
Prenons l’exemple du malus de 10 % applicable aux complémentaires Agirc-Arrco, dont le but est d’inciter les assurés à travailler encore un peu après 62 ans. Nombreux sont ceux qui pensent partir avec une pension à taux plein à 62 ans, qu’il s’agisse de la retraite générale ou de la retraite complémentaire. De tels problèmes le montrent clairement : il faut faire beaucoup d’efforts pour développer les outils améliorant la lisibilité des parcours professionnels.
Voilà pourquoi ces indicateurs vont dans le bon sens. Ils responsabilisent aussi les entreprises, en les incitant à accompagner leurs salariés dans leurs parcours personnel et professionnel. Il s’agit donc d’une excellente proposition.
Chers collègues de la majorité sénatoriale, vous qui souhaitez revaloriser le droit au travail, vous y trouverez aussi un excellent moyen de mettre en lumière les risques inhérents aux parcours hachés et de mieux contractualiser avec les branches professionnelles.
Un tel dispositif permet de renforcer le paritarisme tout en donnant des éléments de clarification. À plus d’un titre, il va dans le bon sens : dans le sens de la communication, de l’information et de la responsabilisation de l’ensemble des parties prenantes.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Je le dis et je le répète, non seulement cette réforme est mauvaise, mais elle n’emprunte pas le bon véhicule législatif.
Avec ces amendements, nous abordons l’égalité entre les femmes et les hommes, ou plutôt les inégalités qui les opposent, qu’il s’agisse des salaires ou du déroulement des carrières. Or le présent texte n’a pas vocation à traiter ces différents sujets : il faudrait une grande loi Travail, mais telle n’est pas la volonté du Gouvernement.
Pour notre part, nous nous efforçons d’améliorer les choses. À nos yeux, l’index n’est pas le nec plus ultra. C’est un outil qui peut notamment révéler les inégalités entre les femmes et les hommes.
Les entreprises contrevenantes n’aiment pas trop ce genre de publicité, qui conduit à les montrer du doigt. Cela dit, les index peuvent toujours être contournés.
Mme Annick Billon. Bien sûr !
Mme Laurence Cohen. Il faut, de la part du Gouvernement, une véritable volonté politique pour fixer un cadre réellement contraignant, augmenter les pénalités et appliquer des critères soigneusement établis. Sinon – on le voit bien pour l’index égalité femmes-hommes –, de tels instruments sont détournés et l’on peine à avancer concrètement. Je le répète, les index ne sont ni plus ni moins que des outils.
En parallèle, nous dénonçons un phénomène majeur : si les carrières des femmes sont hachées, c’est à cause du temps partiel subi. Rappelons tout de même que 80 % des femmes qui travaillent sont à temps partiel : voilà ce qu’il faut remettre en cause, tout en assurant la revalorisation des salaires des femmes et la reconnaissance des métiers dits « féminisés ».
Les propositions de nos camarades du groupe écologiste sont de nature à améliorer la situation, si du moins la volonté politique est au rendez-vous. C’est pourquoi nous voterons leurs amendements.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 3219.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 177 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 334 |
Pour l’adoption | 92 |
Contre | 242 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix l’amendement n° 2523.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 178 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 334 |
Pour l’adoption | 92 |
Contre | 242 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix l’amendement n° 3503 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 2806 rectifié bis, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le deuxième alinéa de l’article L. 241-3 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« À partir du 1er juillet 2024, le taux de la cotisation d’assurance vieillesse à la charge de l’employeur est majoré pour les entreprises dont les indicateurs mentionnés à l’article L. 5121-7 du code du travail n’ont pas atteint des seuils définis par décret en Conseil d’État pris après concertation avec les organisations syndicales et patronales représentatives. Cette modulation tient compte des mesures mises en place par l’employeur en faveur de l’amélioration de l’embauche et du maintien en activité des salariés âgés de plus de cinquante ans. La majoration n’est pas due par les entreprises qui ont mis en place l’accord collectif ou le plan d’action prévus à l’article L. 2242-10 du même code. »
La parole est à Mme Émilienne Poumirol.
Mme Émilienne Poumirol. Monsieur le rapporteur, je vous l’assure, nous ne sommes pas opposés par principe à l’index seniors, dont nous avons longuement débattu hier ; mais encore faut-il préciser ce dispositif à l’aide d’indicateurs tangibles. En outre, comme l’a souligné ma collègue Michèle Meunier, l’intérêt de ce dispositif suppose un croisement des données.
Surtout, le non-respect de cet index doit faire l’objet de contraintes financières ; sinon, le taux de personnes de plus de 60 ans demeurant dans l’emploi restera sans doute de 36 %.
De nombreux orateurs l’ont rappelé avec raison, 10 % d’augmentation de l’emploi des seniors permettrait de dégager 13 milliards d’euros de recettes supplémentaires et le problème de financement des retraites s’en trouverait ainsi résolu.
Hier après-midi, vous avez refusé tous nos amendements de suppression. Nous avons donc proposé un certain nombre de modifications, par le biais d’autres amendements, et nous continuons aujourd’hui.
En l’occurrence, nous ne suggérons pas une énième exonération de cotisations : le dernier PLFSS en contient déjà suffisamment, pour un total de 75 milliards d’euros par an. Nous vous proposons des gains supplémentaires pour la Caisse nationale d’assurance vieillesse (Cnav) via une majoration du taux de cotisation des entreprises ne respectant pas l’index seniors.
M. le président. L’amendement n° 257 rectifié, présenté par MM. Chasseing, Guerriau et Decool, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Wattebled, Grand, Menonville, A. Marc et Capus et Mmes Paoli-Gagin et Renaud-Garabedian, est ainsi libellé :
Après l’article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le deuxième alinéa de l’article L. 241-3 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« La Caisse d’assurance retraite et de la santé au travail peut minorer ou majorer le taux de la cotisation d’assurance vieillesse à la charge de l’employeur dans des conditions fixées par décret pour tenir compte des mesures mises en place par l’employeur en faveur de l’amélioration de l’embauche et du maintien en activité des salariés âgés. »
La parole est à M. Alain Marc.
M. Alain Marc. Notre amendement vise à inciter à l’embauche et au maintien dans l’emploi des salariés seniors par une modulation des cotisations vieillesse à la charge de l’employeur.
Cette modulation interviendra dans des conditions fixées par décret, en fonction du niveau des indicateurs de l’index seniors de l’entreprise.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. La modulation des pénalités mérite bel et bien d’être discutée. Toutefois, la commission suit à ce sujet le raisonnement exposé hier : tout dépend de la négociation avec les partenaires sociaux.
À chaque jour suffit sa peine, mais soyez assurés que cette proposition sera prise en compte lors de l’examen du projet de loi Travail.
À ce stade, nous avons préféré un dispositif incitatif, à savoir le CDI senior, qui répond également aux préoccupations que nous exprimons tous au sujet des carrières hachées.
Monsieur le ministre, ce nouveau CDI tout à fait spécifique permettra de prendre en compte les difficultés mentionnées à ce titre : c’est bel et bien l’outil dont nous avons besoin.
Mes chers collègues, en résumé, nous ne contestons pas la pertinence de vos argumentaires. Mais, selon nous, de tels dispositifs relèvent plutôt du futur projet de loi Travail. J’émets donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Alain Marc, pour explication de vote.
M. Alain Marc. Compte tenu des explications que vient de nous donner M. le rapporteur, nous retirons cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 257 rectifié est retiré.
Madame Poumirol, l’amendement n° 2806 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Émilienne Poumirol. Oui, je le maintiens.
M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.
M. Jean-Yves Leconte. Je tiens à la fois à soutenir l’amendement défendu par Mme Poumirol et à réagir aux propos de M. le rapporteur.
Selon moi, cette modulation est préférable au CDI senior, qui va entraîner des effets d’aubaine : au lieu de recourir à un CDI classique, nombre d’employeurs opteront pour ce dispositif afin de réduire leurs cotisations.
Monsieur le rapporteur, avec la modulation proposée, l’on tiendra compte du respect de l’index par les entreprises au titre des cotisations vieillesse. C’est bien plus logique et, partant, préférable. À l’inverse, votre dispositif serait particulièrement néfaste pour les recettes de la branche vieillesse.
M. le président. La parole est à M. Claude Raynal, pour explication de vote.
M. Claude Raynal. Mes chers collègues, à l’issue de nos débats, que constaterons-nous ?
Pour un très grand nombre d’amendements, présentés notamment par les groupes siégeant à la gauche de cet hémicycle, mais pas seulement, on nous aura opposé la réponse suivante : « Nous pourrons revoir le sujet dans le cadre du projet de loi Travail. »
Monsieur le rapporteur, vous avez d’ores et déjà émis un avis assez favorable à bon nombre de nos amendements ; c’est précisément pourquoi je souhaite en revenir au fond.
Voilà quelques instants, notre collègue Annick Billon a elle aussi fait valoir que nos propositions ne relevaient pas du bon texte. C’est pourquoi, à l’entendre, elle ne peut les voter.
Chers collègues de la majorité sénatoriale, c’est là la faute originelle, si je puis m’exprimer ainsi. Dès le départ, vous auriez dû dire : « Ce texte, nous n’en voulons pas. Il faut faire les choses dans l’ordre : nous voulons le projet de loi Travail en premier. » (Applaudissements sur des travées des groupes SER et CRCE.)
J’ai du respect pour l’intelligence de tous – soyez-en sûrs. Pourquoi n’avez-vous pas fait les choses à l’endroit ? Puisque l’exécutif a besoin de votre concours, vous auriez pu l’exiger.
Si vous ne l’avez pas fait, c’est uniquement à cause de l’article 7,…
M. le président. Il faut penser à conclure !
M. Claude Raynal. … c’est-à-dire à cause des 64 ans. Eh bien, c’est navrant. (Bravo ! et applaudissements sur des travées des groupes SER et CRCE.)
M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, pour explication de vote.
Mme Corinne Féret. La mise à contribution des employeurs dont le taux de séparation des seniors dépasserait un certain seuil permettrait de financer des droits et formations pour les seniors en difficulté sur le marché de l’emploi tout en dissuadant les politiques « anti-seniors » au sein de certaines entreprises.
Tel est le sens de cet amendement. Il ne suffit pas d’instaurer un index et de supposer que tout ira bien. Les entreprises qui ne jouent pas le jeu doivent contribuer plus fortement.
Monsieur le rapporteur, depuis jeudi dernier, nous débattons d’une réforme des retraites à laquelle le véhicule législatif retenu, à savoir un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale, ne convient absolument pas.
Une fois de plus, vous nous dites : « On aimerait bien mettre en œuvre ce que vous proposez. Vous avez raison, mais ce n’est pas possible. »
Pourquoi avoir choisi un véhicule législatif,…