M. le président. La parole est à Mme Maryse Carrère.
Mme Maryse Carrère. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, il y a quelques jours, lors de l’examen du budget, j’ai eu l’occasion de mettre l’accent sur certaines difficultés auxquelles étaient confrontés les services gravitant autour de l’accompagnement de l’enfance : surcharge de travail, manque de moyen et de personnel, engagement de plus en plus important face à des situations de plus en plus complexes et douloureuses.
La protection de l’enfance demande autant de persévérance que de patience. Qu’il me soit donc permis de rendre hommage à ceux qui s’y dévouent, souvent pour des salaires modestes et des emplois du temps éreintants.
Je remercie Xavier Iacovelli de son initiative. Elle doit nous maintenir en alerte. On pourrait considérer que, sur la forme, cette proposition de loi soulève une difficulté, d’autant que notre groupe n’est pas toujours favorable à l’inflation législative.
Certes, comme à l’Assemblée nationale, l’objectif visé au travers de ce texte pourrait être atteint autrement que par une loi. Notre conférence des présidents pourrait se charger elle-même de la création d’une délégation aux droits des enfants. Mais, à défaut, il fallait trouver un moyen de l’alerter. C’est ce que permet cette proposition de loi.
S’agissant du fond maintenant, il est légitime de s’interroger sur la nécessité d’une telle délégation.
Qui, dans cet hémicycle, ne serait pas favorable à ce que nous portions une attention particulière à la question des droits de l’enfant ? Évidemment, personne !
Loin de nous l’idée de renier tout le travail qui a été réalisé ces dernières années. Il va de soi que la définition de l’intérêt de l’enfant peut varier d’un esprit à l’autre, mais sur les sujets les plus fondamentaux, nous savons être unanimes.
Je pense, par exemple, à la loi du 21 avril 2021 visant à protéger les mineurs des crimes et délits sexuels et de l’inceste, portée par notre collègue Annick Billon. Chacun se souvient d’ailleurs de l’injuste traitement médiatique dont ce texte avait fait l’objet. Il est pourtant clair aujourd’hui que le Sénat avait été à l’origine d’une avancée significative dans la lutte contre les violences sexuelles faites aux enfants, même s’il reste encore des progrès à accomplir.
Pour revenir au texte du jour, notre rapporteure l’a souligné, le Sénat défend déjà, et ce depuis longtemps, les droits et l’intégrité des enfants, comme nos nombreux travaux en témoignent – notre rapporteure a dressé une liste non exhaustive des rapports et auditions de ces dernières années. Ce point ne fait l’objet d’aucun débat : c’est un sujet sur lequel nous travaillons.
Toutefois, malgré ces éléments, je n’irai pas dans le sens de notre commission. D’ailleurs, quelques membres du groupe RDSE ont également cosigné cette proposition de loi.
En effet, puisque c’est un sujet majeur, plutôt que de multiplier les initiatives et d’éparpiller nos réflexions, pourquoi ne pas structurer cet ensemble au sein d’une même instance, à savoir une délégation aux droits des enfants ?
Personne ici ne dira que les autres délégations déjà instituées manquent d’utilité et de légitimité.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Quoique…
Mme Maryse Carrère. Elles permettent d’offrir des réponses et des analyses transversales, marquées par la spécialité et l’expertise sur une thématique, qu’il s’agisse de la décentralisation, de l’égalité des chances, des entreprises ou de l’outre-mer. Elles sont aussi des lieux de dialogue et d’analyses prospectives de grande qualité, qui viennent nourrir nos travaux législatifs. Pourquoi alors ne pas créer une délégation aux droits des enfants ? Je n’ai aucun doute sur le fait que cette nouvelle délégation trouverait ici toute sa place. Aussi, notre groupe votera en faveur de cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE, RDPI, SER et CRCE, ainsi que sur des travées des groupes INDEP et UC.)
M. le président. La parole est à M. Bernard Bonne.
M. Bernard Bonne. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, à l’occasion de la Journée nationale des droits de l’enfant le 20 novembre dernier, le Fonds des Nations unies pour l’enfance (Unicef) a publié des chiffres alarmants : en France, un enfant est tué par l’un de ses parents tous les cinq jours en moyenne.
L’association l’Enfant Bleu a, pour sa part, constaté une augmentation de 45 % des appels de victimes ou de témoins de maltraitances sur des enfants entre 2019 et 2022.
Ainsi, force est de constater que, si la France progresse en matière de protection des enfants, elle n’a pas encore réussi à éradiquer les violences faites à leur encontre ni à faire respecter leurs droits.
Quelque 3 millions d’enfants vivent en France sous le seuil de pauvreté, et les inégalités en matière de santé, de logement, d’accès à l’éducation ou aux loisirs demeurent bien trop importantes.
S’ajoutent à cela de nouvelles formes de violences, physiques, mais aussi morales, telles que le harcèlement, la maltraitance, la pédophilie, l’exploitation sexuelle, dans le cadre familial bien souvent, mais aussi – et de plus en plus – dans le cadre scolaire ou médico-social.
La situation est encore bien plus dramatique dans le monde : la guerre, la misère et la pauvreté, les inégalités et le changement climatique mettent en péril la vie de millions d’enfants.
Ayons, mes chers collègues, en tête ces données très préoccupantes alors que nous examinons aujourd’hui la proposition de loi tendant à la création de délégations parlementaires aux droits des enfants.
Plusieurs collègues l’ont rappelé, c’est la Convention internationale des droits de l’enfant (CIDE) adoptée par les Nations unies le 20 novembre 1989 et que la France a ratifiée en août 1990 qui garantit les droits interdépendants et inaliénables des enfants.
Le texte vise la protection spécifique de l’enfant en tant que sujet de droit à part entière. Sont ainsi pris en considération le caractère vulnérable et la nécessité de développement de l’enfant. Il a ainsi droit à une identité, à la santé, à l’éducation, à une vie de famille, à un niveau de vie suffisant. Il a le droit d’être protégé de la violence, de s’exprimer, d’être protégé de la guerre, d’être protégé de l’exploitation. Il a le droit de jouer et d’avoir des loisirs.
Trois protocoles facultatifs entrés en vigueur en 2014 et en 2022 ont complété cet instrument. Ils concernent notamment l’implication des enfants dans les conflits armés et mettent l’accent sur la nécessité de les protéger contre leur recrutement. Ils visent également à lutter contre la vente d’enfants, la prostitution et la pornographie les mettant en scène.
Pour en revenir au texte que nous examinons aujourd’hui, je rappellerai tout d’abord que ce n’est pas la première fois qu’une telle proposition de loi est déposée sur le bureau des assemblées, et parfois examinée. En 2003 déjà, un texte similaire avait été adopté à l’Assemblée nationale, mais il n’avait jamais été examiné au Sénat.
La proposition de loi que présente notre collègue Xavier Iacovelli reprend le texte d’une proposition de loi déposée en 2018 par notre collègue Éliane Assassi, qui avait été examinée et rejetée en séance le 20 novembre 2019. La rapporteure en était déjà notre collègue Muriel Jourda. Je regrette qu’une concertation au sein de la commission des affaires sociales n’ait pas eu lieu avant le dépôt de cette proposition de loi,…
M. Xavier Iacovelli. On en parle depuis 2020 !
M. Bernard Bonne. … d’autant que nous pouvons légitimement nous interroger sur la nécessité de passer par un texte de loi.
En effet, la création de délégations touche à l’organisation interne des travaux dans chaque assemblée. Il n’est donc pas nécessaire de légiférer sur de telles dispositions. Laissons les membres du bureau décider de la création ou non de cette délégation : c’est leur rôle.
Il est vrai que la question des droits de l’enfant est un sujet transversal, qui concerne de nombreux domaines tels que l’éducation, la santé, la justice, la gouvernance.
Vous le savez, j’ai été l’an passé rapporteur de la loi du 7 février 2022 relative à la protection des enfants. Nous avions constaté le manque d’efficience de cette politique de protection au regard des moyens qui lui sont consacrés et nous avions fait des propositions très concrètes.
Certes, cette loi porte sur la protection des enfants relevant de l’aide sociale à l’enfance, mais au cours des nombreuses auditions que nous avons conduites, tous les acteurs rencontrés, particulièrement ceux qui agissent auprès des enfants, ont souligné leur attachement à la mise en place d’une veille pérenne et indépendante sur la question de l’élaboration, de l’évaluation et du suivi des politiques publiques en faveur des droits des enfants.
Je comprends qu’après la création au sein de l’Assemblée nationale d’une délégation aux droits des enfants ces associations demandent que le Sénat en fasse de même. En effet, une délégation aux droits de l’enfant a été créée à l’Assemblée nationale le 13 septembre dernier sur décision de la conférence des présidents.
Néanmoins, force est de constater que les sujets sur lesquels cette délégation souhaite se pencher ont largement été traités par le Sénat. Je ne les listerai pas tous ici. Certains ont été examinés par la commission des affaires sociales, d’autres par la commission de la culture, la commission des lois, la commission des affaires économiques, mais aussi par la délégation aux droits des femmes.
Ainsi, dans le droit fil de la révision constitutionnelle de 2008, c’est bien via ses commissions permanentes que le Sénat exerce son pouvoir de contrôle et d’évaluation des politiques publiques. Il n’est peut-être pas utile de multiplier les structures – le travail parlementaire ne s’en trouvera pas plus efficace –, mais il convient que nos commissions, particulièrement la commission des affaires sociales, continuent de se saisir de ces questions.
En effet, de nouvelles formes de violences concomitantes avec les usages de nos sociétés apparaissent. Mme la Défenseure des droits et la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) ont récemment souligné l’urgence qu’il y avait à protéger les enfants des dangers du numérique.
Je souhaite également que nous puissions, peut-être via la création d’une mission d’information, étudier la réalité de l’application des lois de 2007, de 2016 et de 2022 relatives à la protection de l’enfant, qui ne sont pas également mises en œuvre sur l’ensemble du territoire. Or je sais, madame la secrétaire d’État, que vous y êtes très attachée. (Mme Laurence Rossignol signale que le temps de parole de l’orateur est écoulé.)
Mes chers collègues, une société qui ne sait pas protéger ses enfants dans un monde apaisé et rassurant est une société qui transige avec ses valeurs les plus fondamentales. (Mme Corinne Imbert applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme Colette Mélot. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP. – M. Xavier Iacovelli applaudit également.)
Mme Colette Mélot. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, au sein de cet hémicycle, notre intérêt pour les droits de l’enfant est unanime.
Notre volonté d’offrir à tous les enfants les moyens de construire leur avenir demeure inaltérable et notre devoir d’éradiquer le fléau des violences qui leur sont faites, quelles que soient les formes qu’elles peuvent revêtir, est indéfectible.
Pourtant, en France et dans le monde, les problématiques liées à l’enfance sont toujours d’une actualité brûlante, et nombreux sont les défis qui restent à relever, comme l’amélioration de la situation des enfants atteints d’un handicap ou du sort des enfants migrants.
Aussi, parce que la protection de l’enfant et son intérêt supérieur doivent être une préoccupation permanente du législateur, l’initiative de notre collègue Xavier Iacovelli mérite d’être saluée. Je félicite le groupe RDPI d’avoir inscrit cette proposition de loi à l’ordre du jour.
M. Xavier Iacovelli. Merci !
Mme Colette Mélot. Comme son titre l’indique, ce texte a pour objectif de constituer une délégation parlementaire aux droits de l’enfant.
L’article unique vise à instituer, en premier lieu, dans chaque assemblée, une délégation parlementaire aux droits de l’enfant de trente-six membres, choisis à la représentation proportionnelle des groupes.
En deuxième lieu, il vise à charger ces délégations d’assurer le suivi de la politique des droits de l’enfant et tend à leur permettre d’être saisies de projets ou de propositions de loi sur demande du bureau, d’une commission, d’un président de groupe ou de leur propre initiative.
En troisième lieu, il vise à prévoir la remise d’un rapport d’activité annuel comprenant, le cas échéant, des « propositions d’amélioration de la législation et de la réglementation ».
Enfin, il tend à donner la possibilité à la délégation de l’Assemblée nationale et à celle du Sénat de décider de tenir des réunions communes.
Une proposition de loi identique avait déjà été examinée au Sénat une première fois, en 2019, et avait été repoussée. Or, depuis le 13 septembre dernier, l’Assemblée nationale s’est dotée d’une délégation aux droits des enfants composée de trente-six députés. Cet élément nouveau nous incite à revoir notre position de 2019.
La création d’un équivalent au Sénat permettrait, au cours de réunions menées conjointement, de faire bénéficier la question des droits de l’enfant de l’expertise des sénateurs, notamment à la lumière du rôle majeur que les collectivités territoriales jouent en faveur de l’enfance. Je pense, notamment, au département, chef de file des politiques sociales et de la protection de l’enfance. (Mme Victoire Jasmin applaudit.)
Mme Michelle Meunier. Très bien !
Mme Colette Mélot. Par ailleurs, une délégation aux droits de l’enfant pourrait avoir un angle d’approche différent de celui des commissions permanentes, qui effectuent un remarquable travail légistique.
Madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la création d’une délégation parlementaire aux droits de l’enfant faciliterait une démarche plus transversale pour traiter efficacement les multiples problématiques.
Elle aurait aussi le mérite d’améliorer la connaissance des droits de l’enfant par les pouvoirs publics tout en donnant davantage de visibilité à ces droits.
Pour toutes ces raisons, la majorité du groupe Les Indépendants - République et Territoires votera en faveur de ce texte. (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP, RDPI, RDSE et SER. – Mme Laurence Cohen applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Laurent Burgoa.
M. Laurent Burgoa. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, nous le savons, l’enfer peut être pavé de bonnes intentions. (Mme Laurence Rossignol s’exclame.)
Aussi, je crois utile de rappeler que la création d’une délégation relève usuellement d’une simple décision du bureau. Je crois également bon de souligner que la loi du 15 juin 2009 – ce n’est si lointain – avait supprimé pas moins de cinq délégations dans un souci de rationalisation des travaux parlementaires.
M. Xavier Iacovelli. Nous en avons recréé trois depuis…
M. Laurent Burgoa. À vrai dire, cette proposition est surtout révélatrice de ce que pourrait devenir notre vie parlementaire.
Mme Laurence Rossignol. Nous parlons d’enfants là…
M. Laurent Burgoa. Disons-le, nous ne manquons pas d’outils pour nous emparer des enjeux de notre société. Il y a, bien sûr, les propositions de loi et les amendements, mais il y a aussi les commissions d’enquête et les rapports d’information.
Plutôt que de nous saisir de l’un de ces instruments, nous discutons aujourd’hui, à cette heure, de la création d’une délégation. Ne vaudrait-il pas mieux débattre de solutions concrètes à des difficultés précises ? (Protestations à gauche.)
M. Xavier Iacovelli. Il s’agit de notre espace réservé !
M. Laurent Burgoa. J’ai bien conscience que cette proposition de loi vise, d’une certaine manière, à se donner le beau rôle. Mais n’oublions pas, par exemple, que la commission des lois et la commission des affaires sociales, à travers un rapport d’information conjoint dont j’étais le corapporteur, ont déjà pu pleinement s’investir sur le sort des mineurs non accompagnés et formuler de nombreuses propositions. C’est la preuve que le travail transversal sur des problématiques précises existe déjà, fort heureusement ! (Mme Laurence Rossignol s’exclame.)
En somme, je ne crois pas qu’émietter le travail parlementaire le rendra plus pertinent. Je ne suis d’ailleurs pas le seul à le penser puisque le groupe de réflexion sur les méthodes de travail du Sénat avait recommandé, en 2015, d’éviter une division trop importante de notre champ de travail.
En créant cette délégation, on se ferait plaisir, on communiquerait, mais concrètement rien ne changerait. Or, c’est tout l’objet de mon propos, le Parlement – au vu du niveau d’abstention lors des dernières élections – est attendu sur cette question de la traduction de son travail dans le quotidien des Français.
Le travail parlementaire est reconnu pour sa qualité – c’est à mon sens indéniable –, mais les Français, comme l’auteur de cette proposition peut-être, sont las de voir nos rapports ne pas être pris en considération par un pouvoir exécutif qui pense être le seul à avoir les solutions aux problèmes et qui croit connaître tout sur tout !
Admettons-le, c’est difficile à vivre lorsque l’on est dans l’opposition, mais je ne doute pas que le Gouvernement entende parfois raison sur des dispositifs que nous l’encouragerions à mettre en place.
Je milite donc pour un Sénat qui persiste à être véritablement force de proposition plutôt que pour un Sénat qui se renfermerait sur lui-même (M. Xavier Iacovelli proteste.) et qui, à l’instar de notre administration, s’égarerait dans une succession de comités Théodule, perdant ainsi en souplesse.
Pour ces raisons, mes chers collègues, comme une grande majorité du groupe Les Républicains, je ne voterai pas cette proposition de loi.
Mme Laurence Rossignol. Il y en a donc quelques-uns qui vont la voter !
M. Laurent Burgoa. Ce vote, madame Rossignol, n’est pas dirigé contre le droit de l’enfant. Je souhaiterais que certains dans cet hémicycle ne le réduisent pas à une position caricaturale : comme nos travaux sénatoriaux le démontrent, nous défendons au contraire tous les jours les droits des enfants ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La discussion générale est close.
La commission n’ayant pas élaboré de texte, nous passons à la discussion de l’article unique de la proposition de loi initiale.
proposition de loi tendant à la création de délégations parlementaires aux droits de l’enfant
Article unique
L’article 6 quater de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires est ainsi rétabli :
« Art. 6 quater. – I. – Il est constitué, dans chacune des deux assemblées du Parlement, une délégation parlementaire aux droits de l’enfant. Chacune de ces délégations compte trente-six membres.
« II. – Les membres des délégations sont désignés en leur sein par chacune des deux assemblées de manière à assurer une représentation proportionnelle des groupes parlementaires et équilibrée des hommes et des femmes ainsi que des commissions permanentes.
« La délégation de l’Assemblée nationale est désignée au début de la législature pour la durée de celle-ci.
« La délégation du Sénat est désignée après chaque renouvellement partiel de cette assemblée.
« III. – Sans préjudice des compétences des commissions permanentes ou spéciales ni de celles des commissions chargées des affaires européennes, les délégations parlementaires aux droits de l’enfant ont pour mission d’informer les assemblées de la politique suivie par le Gouvernement au regard de ses conséquences sur les droits de l’enfant. En ce domaine, elles assurent le suivi de l’application des lois.
« En outre, les délégations parlementaires aux droits de l’enfant peuvent être saisies sur les projets ou propositions de loi par :
« 1° Le Bureau de l’une ou l’autre assemblée, soit à son initiative, soit à la demande d’un président de groupe ;
« 2° Une commission permanente ou spéciale, à son initiative ou sur demande de la délégation.
« Enfin, les délégations peuvent être saisies par les commissions chargées des affaires européennes sur les textes soumis aux assemblées en application de l’article 88-4 de la Constitution.
« Elles demandent à entendre les ministres. Le Gouvernement leur communique les informations utiles et les documents nécessaires à l’accomplissement de leur mission.
« IV. – Les délégations établissent, sur les questions dont elles sont saisies, des rapports comportant des recommandations qui sont déposés sur le bureau de l’assemblée dont elles relèvent et transmis aux commissions parlementaires compétentes ainsi qu’aux commissions chargées des affaires européennes. Ces rapports sont rendus publics.
« Elles établissent en outre, chaque année, un rapport public dressant le bilan de leur activité et comportant, le cas échéant, des propositions d’amélioration de la législation et de la réglementation dans leurs domaines de compétence.
« V. – Chaque délégation organise la publicité de ses travaux dans les conditions définies par le règlement de chaque assemblée. La délégation de l’Assemblée nationale et celle du Sénat peuvent décider de tenir des réunions conjointes.
« VI. – Les délégations établissent leur règlement intérieur. »
Vote sur l’ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l’article unique constituant l’ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à Mme Véronique Guillotin, pour explication de vote.
Mme Véronique Guillotin. Si j’ai bien suivi les débats, il existe une délégation aux droits des femmes, une délégation aux entreprises, une délégation aux collectivités territoriales, et d’autres encore. Cela signifie que le bureau du Sénat a jugé, à un moment donné, que ces délégations étaient utiles pour mener des réflexions sur ces sujets.
Les droits de l’enfant, quant à eux, ne méritent-ils pas une délégation ? N’y a-t-il pas urgence à agir dans ce domaine et à s’emparer de ces problématiques ?
La liste des nombreux travaux égrenés par la rapporteure montre qu’il existe un intérêt du Sénat pour ces sujets. L’excellent plaidoyer de Bernard Bonne en faveur des droits de l’enfant en témoigne également.
Si cette proposition de loi peut être le véhicule permettant de lever les freins posés par le bureau du Sénat pour ce qui concerne les droits de l’enfant, alors je voterai ce texte, et j’incite tous ceux qui veulent s’emparer de sujets sociétaux au sein de cet hémicycle à faire de même. (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE, RDPI, GEST, SER et CRCE, ainsi que sur des travées des groupes INDEP et UC.)
M. le président. La parole est à M. Hussein Bourgi, pour explication de vote.
M. Hussein Bourgi. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je prends la parole pour répéter quelques éléments que j’ai déjà exposés en commission des lois.
À chaque fois qu’un débat a eu lieu dans notre pays au cours des derniers mois ou des dernières années, qu’il porte sur le mariage pour tous, sur l’adoption ou sur la procréation médicalement assistée (PMA), les représentants de la majorité sénatoriale ont systématiquement mis en avant l’intérêt supérieur de l’enfant.
Tout d’abord, je tiens à regretter l’absence aujourd’hui dans l’hémicycle de nos collègues de la majorité sénatoriale, alors même que nous débattons, au travers de cette proposition de loi, de l’intérêt supérieur de l’enfant ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER, GEST et RDPI.)
Ensuite, je rappelle qu’il y a au sein de notre Haute Assemblée des délégations, notamment aux entreprises et à la prospective, et que ce serait faire injure à la commission des affaires économiques de laisser à penser qu’avant la création de ces délégations, personne ne travaillait ici sur les entreprises ou sur la prospective ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et RDPI.)
Je ne partage donc pas du tout l’argument défendu par Mme la rapporteure. Le fait que les commissions permanentes travaillent sur un sujet n’interdit en aucune façon au Sénat de créer une délégation spécifique !
Enfin, rendez-vous est pris. Dans quelques mois ou quelques années, une ou un membre de la majorité sénatoriale déposera peut-être une proposition de loi similaire à celle qui est aujourd’hui discutée, en la reprenant à son compte… Les conditions seront alors réunies pour réparer l’erreur que nous allons commettre aujourd’hui si la majorité d’entre nous vote contre ce texte de Xavier Iacovelli, que je remercie d’avoir pris cette initiative. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE, GEST et RDPI, ainsi que sur des travées des groupes INDEP et UC.)
M. le président. La parole est à Mme Michelle Meunier, pour explication de vote.
Mme Michelle Meunier. Je voterai avec enthousiasme, cette proposition de loi ! J’ajouterai un point aux propos qui viennent d’être tenus.
Dans nos territoires, à la fin des inaugurations ou des rencontres autour de l’enfance ou de la petite enfance, on entend souvent citer ce proverbe africain : « Il faut tout un village pour élever un enfant. » Ces mots saluent et soulignent le partenariat, la coopération, le travail en commun et les regards croisés des différents acteurs qui interviennent sur le terrain.
Aussi, je ne comprends pas, et ne trouve pas digne de sa part, que notre Haute Assemblée rate le rendez-vous proposé aujourd’hui au travers du texte de Xavier Iacovelli. Je le regrette et le déplore ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Olivier Cadic, pour explication de vote.
M. Olivier Cadic. Alors que je venais d’être nouvellement élu au Sénat, je me souviens d’avoir interrogé en 2015 la secrétaire d’État chargée de la famille d’alors, notre collègue Laurence Rossignol. Le petit Bastien venait de mourir, après avoir été mis dans le lave-linge par son père, sur le mode « essorage ». Comme nous toutes et nous tous, j’avais été profondément bouleversé par ce drame, qui mettait en lumière les carences d’un système ayant failli à sauver un enfant d’une mort atroce.
Je sais, comme vous, qu’il existe beaucoup d’autres Bastien et que nous peinons à recenser tous ces infanticides, car il faudrait autopsier tous les bébés morts prématurément de façon inexpliquée.
La maltraitance des enfants ne s’arrête pas à nos frontières. À l’étranger, les familles françaises échappent parfois à la protection de l’enfance. Certains enfants perdent quelquefois tout contact avec l’un de leurs parents, comme nous l’avons souvent observé au Japon par exemple, grâce au travail de notre ancien collègue Richard Yung.
Les consulats ne peuvent évidemment pas, faute de moyens et de formation, être le prolongement de l’aide sociale à l’enfance. L’aide aux victimes de violences, notamment familiales, se développe néanmoins petit à petit.
C’est à sa capacité à protéger les plus faibles que l’on reconnaît une société civilisée. Avant d’agir, il faut connaître et mesurer l’ampleur du problème, et le système mis en place pour y faire face.
La création d’une délégation aux droits de l’enfant, qui consacrera ses travaux à améliorer la protection des enfants, me semble impérieuse. Je salue cette initiative de notre collègue Xavier Iacovelli, que je remercie d’avoir cité la précédente proposition de loi sur le sujet, présentée par Joëlle Garriaud-Maylam, laquelle représente comme moi les Français établis hors de France.
Je voterai donc cette proposition de loi avec le même enthousiasme que certains de nos collègues. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, GEST, SER et CRCE, ainsi que sur des travées des groupes INDEP et UC.)