M. Fabien Gay. Je vous invite vivement à m’accompagner à Noisy-le-Sec, madame la ministre !
responsabilité des maires et des collectivités en cas d’agressions de personnes, d’accidents et d’atteintes aux biens à la suite d’une interruption volontaire de l’éclairage public
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Anglars, auteur de la question n° 225, adressée à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
M. Jean-Claude Anglars. Madame la ministre, en raison de l’augmentation du prix de l’électricité et des enjeux liés à la transition écologique, certaines municipalités envisagent, ou pratiquent déjà, l’extinction totale de l’éclairage public.
Or celui-ci est indispensable à l’exploitation de la voirie ainsi qu’à la sécurité des biens et des personnes. L’extinction totale de l’éclairage public est susceptible de mettre en cause la responsabilité du maire et de la commune.
En effet, les juges peuvent soit établir un lien de causalité entre l’absence d’éclairage et le dommage résultant d’un accident soit estimer que le défaut d’éclairage constitue l’élément aggravant d’un accident.
D’après la jurisprudence, le défaut ou l’insuffisance d’éclairage public est également susceptible d’engager la responsabilité de la collectivité gestionnaire de la voirie pour défaut d’entretien normal de l’ouvrage public.
Il pourrait enfin être reproché au maire un manquement dans l’exercice de son autorité de police ayant conduit à la commission d’infractions.
Le cadre légal et réglementaire, qui n’impose pas aux collectivités territoriales une obligation générale et absolue d’éclairage de l’ensemble des voies de la commune, ne semble plus adapté.
En outre, la réponse du ministère selon laquelle « il appartient au maire de rechercher un juste équilibre entre les objectifs d’économie d’énergie et de sécurité » n’apporte pas de fondements objectifs susceptibles d’aider les maires et les collectivités dans l’exercice de leurs compétences.
Madame la ministre, pouvez-vous préciser les recommandations du ministère de l’intérieur concernant l’extinction de l’éclairage public, afin de protéger les maires et les collectivités face au risque d’engagement de leur responsabilité ? Comptez-vous donner un cadre législatif aux enjeux de l’éclairage public afin que les élus puissent se fonder sur la loi pour exercer leurs compétences ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Monsieur le sénateur Jean-Claude Anglars, le cadre législatif, auquel on reproche souvent son excès de précision, n’impose pas d’obligation d’éclairage aux communes, leur évitant ainsi un coût important et une responsabilité accrue. C’est à la commune de déterminer les lieux nécessitant d’être éclairés.
La question de l’éclairage public nécessite de concilier trois objectifs : la sécurité des usagers des voies, la limitation des nuisances lumineuses pour les riverains comme pour la biodiversité et, enfin, la nécessaire réduction des consommations d’énergie.
En l’absence de prescription législative et réglementaire, le juge administratif admet que chaque autorité administrative puisse fixer des horaires d’extinction partielle ou totale des éclairages la nuit, dès lors que cette extinction est justifiée par les objectifs précités.
Toutefois, en cas de défaut d’éclairage ayant causé un accident, le juge recherche si, outre la responsabilité du gestionnaire de la voirie, des circonstances particulières témoignant d’une faute du maire dans l’exercice de ses pouvoirs de police sont susceptibles d’engager sa responsabilité.
Aussi, nonobstant l’arrêté municipal édictant les modalités de mise en œuvre de l’extinction de l’éclairage public, il est recommandé de prendre des mesures de signalisation visibles de nuit, tels que des panneaux réfléchissants ou clignotants avertissant des dangers.
Enfin, la modernisation de l’éclairage public s’accompagne d’une baisse de la facture d’électricité, ce qui permet aux communes de dégager de nouvelles marges de manœuvre pour cibler les lieux où l’éclairage serait rendu nécessaire pour des raisons de sécurité.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Anglars, pour la réplique.
M. Jean-Claude Anglars. Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre, mais elle ne me paraît pas suffisante.
Dans la mesure où vous êtes chargée des collectivités territoriales et de la ruralité, je vous engage à vous saisir de ce sujet avec le ministre de l’intérieur.
retard dans la délivrance des titres d’identité
Mme la présidente. La parole est à M. Gilbert Roger, auteur de la question n° 226, adressée à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
M. Gilbert Roger. Ma question porte sur les lenteurs de la chaîne de délivrance des titres d’identité – carte nationale d’identité et passeport.
Des témoignages de plus en plus nombreux nous parviennent quant à l’augmentation du temps d’attente pour disposer d’un rendez-vous en mairie afin d’obtenir un titre d’identité. Ces lenteurs contraignent les Français à des déplacements parfois importants et coûteux pour obtenir un rendez-vous dans des délais raisonnables. Les collectivités territoriales semblent ne pas bénéficier des moyens nécessaires pour suppléer aux fortes démarches.
Un administré m’a expliqué avoir dû parcourir plus de cinquante kilomètres pour demander un passeport, qui lui permettra de passer les fêtes de fin d’année dans sa famille à l’étranger. Il n’est pourtant pas certain de disposer de son titre avant la mi-décembre.
Aussi, je vous demande de bien vouloir m’indiquer comment le Gouvernement compte résorber ces délais d’instruction anormalement longs, qui pénalisent les Français, et de m’expliquer les raisons de ces blocages, depuis le rendez-vous en mairie jusqu’à la remise du titre.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Monsieur le sénateur Gilbert Roger, pour freiner l’augmentation des délais en matière de délivrance des titres d’identité et de voyage, le ministère de l’intérieur et des outre-mer a décidé de mettre en place un plan d’urgence en 2022. Des actions sont également conduites pour prévenir une nouvelle crise en 2023.
Le Gouvernement a ainsi pris différentes mesures.
Je pense tout d’abord au déploiement d’un moteur national de recherche de rendez-vous permettant aux usagers de connaître les disponibilités sur une zone géographique donnée et de réduire le nombre de rendez-vous non honorés.
Je pense ensuite à l’incitation à l’enregistrement d’une prédemande en ligne pour limiter la durée des rendez-vous de recueil et augmenter le nombre de rendez-vous assurés.
Le Gouvernement a également prévu l’installation, en 2022, de 401 dispositifs de recueil et un plan d’installation de 500 nouveaux dispositifs en 2023.
Je pense encore à la définition de règles nationales de priorisation du traitement des demandes, telles que, par exemple, un départ à l’étranger urgent et imprévisible ou l’absence de tout titre d’identité à la suite d’une perte ou d’un vol.
Le Gouvernement a également décidé une augmentation temporaire de l’effectif des services d’instruction de 42 % pour 2022 ; le projet de loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur et des outre-mer prévoit d’y affecter des effectifs supplémentaires pérennes.
Je pense enfin à la revalorisation exceptionnelle de la dotation « titres sécurisés » à hauteur de 21 millions d’euros à compter de 2023.
Vous le voyez, toutes les mesures sont prises pour répondre le mieux possible à cette situation et résorber les retards constatés.
entrisme des frères musulmans en france
Mme la présidente. La parole est à Mme Jacqueline Eustache-Brinio, auteure de la question n° 242, adressée à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
Mme Jacqueline Eustache-Brinio. Madame la ministre, les Frères musulmans font preuve d’un entrisme croissant en France, en toute impunité, au niveau non seulement religieux, mais également politique, éducatif et social, ainsi qu’à l’hôpital public.
Il n’est pas inutile de rappeler que les Frères musulmans, qui seraient 55 000 sur le territoire français, sont considérés comme une organisation terroriste en Égypte, pays qui a vu naître ce mouvement.
En décembre 2019, lors de son audition par la commission d’enquête sur les attaques à la préfecture de police de Paris, un responsable du renseignement définissait les « fréristes » ainsi : « Il s’agit d’une élite souhaitant irriguer complètement la société en entrant dans la vie publique, voire politique. […] Ils désirent clairement prendre le pouvoir par les urnes. […] Le but est de faire un jour que le pays dans lequel ils se trouvent soit régi par la loi de Dieu et non par la loi des hommes. »
Quelques exemples de l’influence de cette organisation dans notre pays : Hassan Iquioussen, désormais l’imam le plus célèbre de France, proche des Frères musulmans, a prêché pendant des années des discours nauséabonds ; depuis 1990, l’Institut européen des sciences humaines (IESH) de Château-Chinon, censé former des imams et des cadres religieux, est considéré par beaucoup comme la base arrière des Frères musulmans en France.
Dans ce contexte préoccupant pour notre sécurité, je m’étonne du mystère autour de la composition du Forum de l’islam de France (Forif) mis en place par le Gouvernement. Je me demande notamment pourquoi la liste de ses membres n’est pas divulguée, mais je me demande surtout si les Frères musulmans en sont bien exclus !
Madame la ministre, quels sont les moyens mis en œuvre par le Gouvernement pour lutter contre cette organisation prosélyte, qui s’inscrit dans le temps long pour parvenir à ses fins ? (M. François Bonhomme applaudit.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Madame la sénatrice Jacqueline Eustache-Brinio, la lutte contre le séparatisme islamiste, qu’il soit lié à la mouvance des Frères musulmans ou à d’autres branches, comme le salafisme, est une priorité du Gouvernement.
En témoignent les quatorze prédicateurs évoluant dans la mouvance des Frères musulmans qui ont fait l’objet d’un arrêté d’expulsion, tandis que six autres se sont vu refuser le droit d’entrer sur le territoire français.
Par ailleurs, depuis 2017, cinq associations évoluant dans la mouvance des Frères musulmans ont été dissoutes.
Si nous sommes sans concession avec ceux qui ne respectent pas les valeurs de la République, nous souhaitons entretenir le dialogue avec nos compatriotes musulmans indépendants et constructifs. C’est la raison pour laquelle nous avons créé le Forum de l’islam de France, que vous avez cité. Cela va dans le sens de la réforme des modalités de dialogue entre l’État et le culte musulman engagée depuis 2003.
Les participants au Forif sont des acteurs du culte musulman,…
Mme Jacqueline Eustache-Brinio. Lesquels ?
Mme Dominique Faure, ministre délégué. … actifs dans leur territoire, ayant donné leur accord pour travailler au niveau national avec l’État.
Le Forif n’est pas une organisation ; il n’a pas vocation à représenter les musulmans. Il s’agit du regroupement de personnes identifiées par les préfets et engagées pour travailler avec l’État.
C’est précisément parce que nous ne désirons pas reproduire les erreurs du passé, en personnalisant le lien entre l’État et le culte musulman, que les participants au Forif vont travailler sans se mettre en avant.
Au demeurant, tout s’est fait de façon très publique : des journalistes étaient présents au Conseil économique, social et environnemental (Cese) lors du lancement du Forum, en février 2022, et beaucoup de participants ont pris la parole en public.
L’objectif est de faire avancer des projets portés par des acteurs de terrain et de faciliter la structuration d’un islam de France émancipé des ingérences étrangères et de l’influence des porteurs de haine.
Mme la présidente. La parole est à Mme Jacqueline Eustache-Brinio, pour la réplique.
Mme Jacqueline Eustache-Brinio. Je suis loin d’être rassurée par vos propos, madame la ministre, qui ne m’apprennent rien de plus – ni chiffres ni analyses – que ce qu’on peut lire dans la presse.
Le Forif est un grand mystère. Qui, comment, pourquoi ? On ne sait pas ! La lutte contre les Frères musulmans nécessite du courage, de la clarté et une grande fermeté.
Madame la ministre, notre faiblesse, c’est leur force !
suites apportées au rapport de la cour des comptes sur mayotte
Mme la présidente. La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi, auteur de la question n° 129, transmise à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
M. Thani Mohamed Soilihi. Madame la ministre, le 30 juin dernier, au terme de plusieurs mois d’enquête, la Cour des comptes a rendu un rapport intitulé Quel développement pour Mayotte ? Mieux répondre aux défis de la démographie, de la départementalisation et des attentes des Mahorais.
Dans ce document, la Cour des comptes constate tout d’abord des avancées importantes dont la création d’une agence régionale de santé et d’un rectorat de plein exercice, la relance de la lutte contre l’immigration clandestine, le renforcement des moyens consacrés à la sécurité ou encore la création d’un établissement public foncier et d’aménagement.
La Cour des comptes souligne cependant que, malgré ces avancées et un réel rattrapage du niveau de vie des Mahorais, les services de l’État et du département ne parviennent pas à apporter les solutions attendues par les habitants sur le plan social, économique et sociétal.
Je souhaiterais savoir, madame la ministre, quelles suites le Gouvernement entend donner aux treize recommandations formulées par la Cour des comptes afin notamment de consolider l’action des pouvoirs publics et de renforcer la lutte contre l’immigration clandestine ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Monsieur le sénateur Mohamed Soilihi, je peux vous affirmer que le Gouvernement est très attentif à la prise en compte des recommandations formulées.
S’agissant du renforcement de la lutte contre l’immigration clandestine, la stratégie repose, depuis 2019, sur le plan Shikandra 2.0, partenariat civilo-militaire agissant notamment sur la prévention, l’éloignement, la lutte contre la fraude.
L’État mobilise des moyens opérationnels renforcés et inédits au plan national. À titre d’exemple, trois intercepteurs sont en permanence en mer et un en alerte. Près de 24 000 étrangers en situation irrégulière ont été reconduits à la frontière l’an passé à Mayotte, soit 78 % de plus qu’en 2020.
Je rappelle que la meilleure façon de lutter contre l’immigration clandestine, c’est aussi de favoriser le développement des Comores. Le plan de développement France-Comores a ainsi été doté de 150 millions d’euros pour offrir aux habitants des perspectives plus favorables.
Quant au développement de Mayotte, l’État n’est pas inactif, même si le Gouvernement regrette que le projet de loi pour un développement accéléré de Mayotte, dont la mise en œuvre aurait permis d’améliorer les choses, n’ait pas été accepté par le territoire.
Je rappelle enfin que le port de Longoni est un port départemental et que l’État sera toujours présent pour accompagner, en lien étroit avec le département, le développement de cette infrastructure stratégique pour le territoire.
Je peux vous assurer, monsieur le sénateur, que nous sommes attentifs au développement régional de votre territoire, parce que c’est dans ce contexte que sa prospérité peut s’assurer.
Mme la présidente. La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi, pour la réplique.
M. Thani Mohamed Soilihi. Madame la ministre, je vous sais gré de vos réponses.
Lorsque l’on évoque les chiffres de l’immigration, on insiste toujours sur les reconduites à la frontière. Mais chaque jour, des bateaux entiers de migrants arrivent à Mayotte ! Comment mettre en place la moindre politique publique quand on ignore combien de personnes seront concernées ?
L’actualité de cette île, madame la ministre, c’est l’insécurité ; l’insécurité qui frappe tout le monde. On ne peut accepter, dans notre République, que des bus scolaires soient attaqués à la machette. Avant de penser au développement de l’île, les élus attendent du Gouvernement qu’il agisse dans les domaines régaliens.
moyens d’action d’une commune face au propriétaire défaillant d’un immeuble menaçant ruine
Mme la présidente. La parole est à Mme Patricia Demas, auteure de la question n° 182, transmise à M. le ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé de la ville et du logement.
Mme Patricia Demas. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, ma question porte sur les difficultés que rencontrent les communes rurales à obtenir des propriétaires défaillants d’immeubles identifiés comme dangereux le remboursement des frais qu’elles doivent engager pour faire cesser le péril.
En l’espèce, le maire de la commune de Bonson, dans les Alpes-Maritimes, touchée par la déferlante de la tempête Alex en octobre 2020, avait été alerté sur l’état préoccupant d’un bâtiment privé à l’abandon, situé en cœur de village et fortement fragilisé par l’événement.
Face à cette situation, le maire diligentait en urgence une entreprise spécialisée, qui concluait à la dangerosité du bâtiment et en avertissait le propriétaire, une société civile immobilière domiciliée à Monaco, qui n’a donné aucune suite, malgré les relances de la mairie.
Dès lors, la commune saisissait le tribunal administratif, qui concluait à un péril grave imminent, en même temps qu’il entérinait le relogement anticipé d’une des propriétaires mitoyennes du bâtiment.
Finalement, Bonson, qui compte 730 habitants, s’est vu dans l’obligation de réaliser, sur ses seuls deniers, des travaux de sécurisation colossaux, qui représentent un tiers de son budget annuel, avec peu d’espoir d’en obtenir le remboursement, dans la mesure où cette société civile immobilière, domiciliée à l’étranger, demeure muette, y compris à la proposition d’achat du bien qui lui a été faite.
Dans le cas d’espèce, Bonson ne peut prétendre à aucune subvention. Une telle situation n’est pas acceptable, moralement et financièrement.
Aussi, je souhaiterais connaître la position du Gouvernement sur cette problématique particulière, malheureusement courante dans les villages, et les évolutions qu’il pourrait entreprendre en faveur des communes rurales qui y sont confrontées et qui ont grand besoin d’accompagnement et de soutien, pour ne pas fragiliser encore plus leur budget ou le mettre en péril, comme c’est malheureusement le cas de Bonson. (M. François Bonhomme applaudit.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Madame la sénatrice Demas, le Gouvernement est fortement engagé dans la lutte contre l’habitat indigne aux côtés des collectivités.
Une ordonnance de 2020 a ainsi refondu le cadre juridique, unifiant plus d’une dizaine de procédures de police administrative utilisées en matière de lutte contre l’habitat indigne, dont la police du péril. Cette nouvelle police permet d’intervenir plus rapidement et plus efficacement sur les situations d’habitat indigne.
À ce titre, le maire peut saisir le tribunal administratif pour obtenir la nomination d’un expert dépêché sur place pour dresser la liste des désordres et des mesures nécessaires pour y remédier.
Sur le plan financier, les communes bénéficient d’un soutien fort de la part de l’Agence nationale de l’habitat, qui finance 50 % du montant des travaux d’office exécutés sur le fondement d’un arrêté de mise en sécurité. Ce taux est majoré à 100 % sur six départements dits « territoires d’accélérations », dont le département des Alpes-Maritimes.
Par ailleurs, il existe différents dispositifs permettant aux communes d’acquérir des logements indignes dans des conditions facilitées. C’est notamment le cas de l’expropriation simplifiée pour les logements frappés d’un arrêté de mise en sécurité comportant une prescription d’interdiction définitive d’habiter ou de démolition.
Ainsi, en l’espèce, la commune de Bonson peut étudier l’opportunité de lancer une procédure ordinaire de mise en sécurité comportant une interdiction définitive d’habiter, afin d’engager ensuite une expropriation pour acquérir plus facilement le bien immobilier.
S’agissant enfin du recouvrement auprès du propriétaire, le comptable public de la commune peut exercer toutes les voies de droit à sa disposition.
calendrier de rénovation énergétique du parc locatif
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Baptiste Blanc, auteur de la question n° 266, adressée à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
M. Jean-Baptiste Blanc. Madame la présidente, madame la ministre, la loi Climat et résilience, prévoit que seront considérés comme indécents les logements classés G au titre du diagnostic de performance énergétique (DPE) en 2025, F en 2028 et, sous réserve d’une clause de revoyure, E en 2034.
En 2022, les circonstances ont bien changé : le secteur du bâtiment est confronté à une pénurie de matériaux, les soubresauts du covid-19 ont encore ralenti des décisions d’assemblée générale indispensables pour prévoir des travaux de rénovation énergétique efficaces, et le coût des travaux énergétiques, déjà chers initialement, est décuplé par l’inflation, au moment où la situation du marché du crédit se tend.
MaPrimeRénov’ est le seul dispositif d’aide à la rénovation énergétique. Il est aujourd’hui manifeste que, malgré son succès, cet outil n’accompagne pas efficacement la sortie du statut de passoire énergétique, 2 500 logements seulement étant sortis de ce statut en 2021 !
Depuis juillet 2022, nous savons que 2 millions de logements sont concernés par cette future interdiction de location dans le parc locatif, dont 1,6 million de logements dans le parc privé. Les professionnels de l’immobilier alertent : ils constatent une tension accrue de l’offre locative, à la fois en raison d’une moindre mobilité dans le parc, et de ventes de biens classés F et G à la hausse. Ils estiment à un quart le nombre de logements classés F et G actuellement loués qui seront vendus. Ils alertent en particulier sur le risque observé dans les immeubles, avec des copropriétaires bailleurs qui déplorent de ne pas parvenir à obtenir un vote en assemblée générale de copropriété permettant des travaux de rénovation efficaces, notamment via l’isolation par l’extérieur.
Les deux tiers des logements très énergivores du parc privé locatif sont situés en copropriété. Ne faut-il pas envisager très vite une stratégie de rénovation pour le parc collectif intégrant la spécificité et le rythme de la copropriété ? En d’autres termes, comment comptez-vous éviter l’écrasement de l’offre locative ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Monsieur le sénateur Jean-Baptiste Blanc, le Gouvernement partage l’idée que la rénovation énergétique des copropriétés fait face à un certain nombre de freins dans la prise de décision des travaux et leur réalisation. Ceux-ci sont accentués dans un contexte inflationniste et de hausse des coûts des matériaux.
Des aides financières ciblées existent déjà. En 2021, 11 892 logements ont bénéficié du dispositif MaPrimeRénov’ Copropriétés, attribuée par l’Anah pour des travaux de rénovation énergétique. On constate que 27 % de ces logements atteignent une étiquette B, et 11 % des logements sortent du statut de passoire énergétique F ou G. Au début du mois de novembre 2022, quelque 10 270 logements ont bénéficié de MaPrimeRénov’ Copropriétés depuis le début de l’année, ce qui signifie que le dispositif sera en progression cette année. Les moyens consacrés par l’Anah à ce dispositif seront augmentés en 2023 et, en complément, il est possible de mobiliser des CEE (certificats d’économie d’énergie), ou le prêt éco-PTZ copropriétés.
L’accélération de la rénovation des copropriétés est une priorité pour les prochaines années. En complémentarité des aides financières, il est nécessaire de mettre à disposition un accompagnement structuré autour du service public de la rénovation France Rénov’ et des filières professionnelles, notamment les syndics de copropriétés. Il faut aussi réfléchir à la gouvernance des copropriétés, qui peut conduire à des blocages. Une mission sera confiée à l’inspection générale du développement durable (IGEDD), afin d’identifier les freins actuels à la rénovation énergétique des copropriétés et faire des propositions de voies d’amélioration.
absence d’une stratégie de financement de l’objectif zéro artificialisation inscrit dans la loi climat et résilience
Mme la présidente. La parole est à Mme Sylviane Noël, auteure de la question n° 116, transmise à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
Mme Sylviane Noël. Madame la ministre, alors que la conférence des SCOT (schémas de cohérence territoriale) a rendu sa copie voilà quelques semaines et que la révision des Sradett (schémas régionaux d’aménagement et de développement durable du territoire) s’amorce, le dispositif du zéro artificialisation nette (ZAN) est toujours dépourvu à ce jour de cap économique.
Ni la loi Climat et résilience, ni les textes budgétaires qui ont suivi, ni encore moins les décrets d’application pris à la hâte par le Gouvernement et faisant l’objet d’un grave contentieux ne donnent aux collectivités locales une vision claire sur les outils et les moyens d’y parvenir, alors même que l’impact pour les collectivités s’annonce majeur.
Leurs ressources et leurs modes de financement actuels ne sont absolument pas adaptés à l’atteinte de cet objectif. La définition d’un modèle économique s’avère ainsi d’une impérieuse et urgente nécessité.
En effet, la suppression de la taxe d’habitation ou encore les injonctions contradictoires de l’État incitant, d’un côté, les communes à accroître leur stock de logements sociaux et, d’un autre côté, à réduire leur consommation de foncier, ne font que fragiliser leurs finances. La pression foncière joue en défaveur des terres naturelles et agricoles et il est moins coûteux de construire des logements neufs éloignés des centres-villes que de reconstruire « la ville sur la ville ».
Comme trop souvent, l’État se borne à adresser de grandes injonctions aux collectivités, sans considérer les impacts pratiques et locaux.
Avec un financement des communes en grande partie artificialisant, puisque fondé sur le foncier et le développement urbain – rappelons que sur les 230 milliards d’euros collectés au titre de la fiscalité locale, les deux tiers reposent sur le foncier –, l’application du ZAN enrayera la dynamique économique des collectivités locales. C’est tout un modèle économique qui est ici remis en question et toute une politique fiscale qu’il faut revoir.
Après l’excellent rapport rendu par mon collègue Jean-Baptiste Blanc sur ce sujet, je souhaiterais donc savoir par quels leviers économiques et fiscaux l’État compte répondre présent aux côtés des collectivités dans la mise en œuvre de cet objectif.