M. le président. L’amendement n° I-1683 rectifié bis n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur les deux amendements identiques ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Les auteurs de ces amendements identiques reviennent sur la problématique soulevée par les dispositifs de soutien, que nous avons déjà évoquée hier soir.
De mon point de vue, en l’état, cela soulève une difficulté juridique, puisque le dispositif est éteint depuis 2021. Il me paraît difficile de remettre en vigueur un dispositif qui n’existe plus.
Par conséquent, sur ces amendements d’appel, la commission sollicite l’avis du Gouvernement, pour savoir si et dans quelle mesure une nouvelle procédure peut être mise en œuvre.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Gabriel Attal, ministre délégué. Cette disposition existait dans le code général des impôts jusqu’à la fin de l’année dernière pour inciter à la réalisation de travaux visant à conforter les logements sociaux contre les risques de catastrophes naturelles. L’année dernière, le Parlement n’a pas souhaité prolonger cette disposition, qui était bornée dans le temps et qui arrivait à expiration.
Je n’occupais pas les fonctions qui sont les miennes aujourd’hui lorsque le Parlement a fait ce choix. Je crois comprendre qu’il l’a fait sur le fondement de plusieurs rapports, notamment un rapport de la Cour des comptes, pour indiquer que ce dispositif visant à inciter à engager des travaux pour protéger les logements contre les risques naturels n’avait pas fait la preuve de son efficacité.
Par ailleurs, ces besoins sont en grande partie couverts par la défiscalisation, puisqu’il existe des volets spécifiques, par exemple pour des abris anticycloniques ou pour d’autres types de travaux.
Je le dis très clairement : s’il est un enjeu absolument essentiel par-delà tous les autres, c’est bien de protéger nos concitoyens ultramarins face aux risques de catastrophes naturelles et de mettre en place les leviers utiles et efficaces pour permettre les travaux dans les logements.
Si le Parlement n’a pas souhaité prolonger le dispositif, c’est parce que celui-ci n’a pas été jugé comme le plus efficient et le plus utile, alors même que la défiscalisation permet un accompagnement.
J’ajoute que ces dispositifs, lorsqu’ils existent – il peut y en avoir d’autres, qui touchent par exemple à la fiscalité locale, à la fiscalité foncière ou à d’autres types de fiscalité –, ont un objectif incitatif : ils visent à engager des travaux. C’est le but des mesures de défiscalisation.
Or ces amendements identiques visent une forme de « régularisation », puisque l’avantage fiscal est prévu, y compris pour des travaux qui ont déjà eu lieu ou qui ont déjà été engagés par le passé, c’est-à-dire dans l’année qui vient de s’écouler, depuis que le dispositif s’est éteint. Dans la mesure où ces travaux ont déjà été engagés en dehors de l’avantage fiscal, il n’y a pas de visée incitative.
Par conséquent, le Gouvernement demande le retrait de ces amendements identiques ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Victoire Jasmin, pour explication de vote.
Mme Victoire Jasmin. Monsieur le ministre, j’entends votre propos ainsi que les arguments avancés par le rapporteur général, mais il faudra bien un moment être dans la vérité !
Après Irma et Maria, les ministres, notamment la ministre des outre-mer d’alors, Mme Girardin, et le Président de la République, M. Macron, se sont déplacés et ont fait un certain nombre de déclarations. Récemment, après Fiona, le ministre délégué chargé des outre-mer est venu en Guadeloupe : il a dit beaucoup de choses !
À un moment donné, entre le dire et le faire, il ne doit plus y avoir la mer. Entre le dire et le faire, il doit y avoir une cohérence dans l’action.
Je prendrai un exemple simple : quand on a créé une structure pour l’eau, j’ai proposé ici même un certain nombre d’amendements. Le Gouvernement a tout refusé, rien n’a été retenu. Pourtant, monsieur le ministre, il y a une semaine, le Gouvernement a tout repris à son compte et mes propositions sont toutes devenues les arguments avancés par votre gouvernement pour récupérer cette structure, qui est en fait une coquille vide, ce que j’avais dénoncé dans cet hémicycle !
À un moment donné, il faut tenir compte de ce que nous disons, ici, au Parlement, pour mettre en place des politiques cohérentes. Il ne suffit pas de venir dans nos départements pour pleurer et faire des annonces devant les médias chaque fois qu’il s’y passe quelque chose !
Mme Catherine Conconne. Bravo !
M. le président. La parole est à Mme Catherine Conconne, pour explication de vote.
Mme Catherine Conconne. Le rapport de la Cour des comptes a peut-être conclu que ce dispositif n’était pas efficace, mais, moi, je vois les travaux de confortement sismique, je les vois !
Je rappelle que, chez nous, les opérateurs sociaux dans le locatif reçoivent, pour construire, notamment des fonds de la ligne budgétaire unique (LBU), avec des avantages sur les taux de prêt supportés par les collectivités locales. Ils ne reçoivent pas de subventions pour une remise aux normes parasismiques, cela se fait uniquement sur leurs fonds propres.
On connaît les contraintes qui pèsent sur les fonds propres des bailleurs sociaux, lesquels doivent demeurer à un certain niveau pour que ces structures soient pérennes. Rien n’est accordé en plus pour faire ce confortement.
Ce dispositif n’aurait pas été incitatif ? Celle qui vous parle a été jusqu’à tardivement membre de deux conseils d’administration de bailleurs sociaux : il y a des travaux tout le temps. Tout le temps, on pose des équerres en métal partout pour tenir des immeubles vieux de quarante ou de cinquante ans, qui risquent de s’écrouler comme un château de cartes au moindre tremblement de terre et sur lesquels apparaissent déjà des fissures. On conforte là où il y a des glissements de terrain. Et l’on m’oppose que ce dispositif n’a pas été efficace ?
Je demande à voir ce rapport de la Cour des comptes et je partage les propos de Victoire Jasmin : à chaque venue de ministre, c’est vrai, on a droit à un certain nombre de déclarations – certaines sont suivies d’effets, je ne peux pas dire le contraire.
Pourtant, alors que l’on nous explique que nous vivons dans des territoires à risques et que l’on demande de pousser aux confortements contre les risques, on nous répond que, non, ce dispositif n’a pas été efficace.
Parfois, je me demande ce que je fais ici…
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-551 et I-1516 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 3 nonies.
L’amendement n° I-1661 rectifié, présenté par MM. Patient et Dennemont, Mme Duranton, M. Hassani, Mme Havet, MM. Haye et Lemoyne, Mmes Phinera-Horth et Schillinger et M. Théophile, est ainsi libellé :
Après l’article 3 nonies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. Au II de l’article 15 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021, l’année : « 2022 » est remplacée par l’année : « 2023 ».
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Dominique Théophile.
M. Dominique Théophile. Adoptée initialement en loi de finances pour 2021 pour une durée de deux ans, une disposition dérogatoire ouvrait le bénéfice du crédit d’impôt codifié à l’article 244 quater W du code général des impôts aux entreprises en difficulté, au sens du règlement de la Commission européenne, pour leurs investissements productifs neufs réalisés en outre-mer.
Cette disposition venait renforcer les différentes mesures de soutien à l’économie prises par le Gouvernement dans le cadre du plan de relance pour faire face à la crise économique induite par l’épidémie de covid-19. L’année 2022, loin de marquer une sortie définitive de la crise économique, a vu celle-ci se prolonger par la crise énergétique et la guerre en Ukraine.
L’amendement vise donc à prolonger la dérogation jusqu’en 2023, pour les mêmes raisons que celles qui avaient prévalu lors de l’adoption de celle-ci, notamment pour faciliter les reprises ou les restructurations d’entreprise.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. La commission a émis un avis favorable sur cet amendement, qui a pour objet de proroger pendant un an, à titre exceptionnel, le dispositif dérogatoire mis en place en 2021 avec le plan de relance et dans le cadre de la crise sanitaire.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Gabriel Attal, ministre délégué. Nous avons eu ce débat hier et j’ai rappelé le contexte dans lequel cette mesure avait été prise, à titre temporaire. Son objectif était d’accompagner la restructuration de la compagnie Corsair, qui a connu de grandes difficultés financières. Le comité interministériel de restructuration industrielle (Ciri), qui suit de très près cette entreprise, avait recommandé une mesure fiscale pour lui permettre de tenir pendant la crise sanitaire.
Un deuxième plan de restructuration est en cours d’élaboration et les experts du Ciri qui suivent la compagnie ne recommandent pas la reconduction du dispositif. Comme nous sommes sortis de la crise sanitaire, celui-ci serait probablement considéré comme une aide d’État par la Commission européenne, la souplesse accordée alors pour accompagner des entreprises en difficulté n’étant plus de mise, et n’échapperait pas aux fourches caudines de Bruxelles.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. L’adoption, hier, d’un amendement permet de prolonger de deux ans ce dispositif. L’amendement n° I-1661 rectifié est donc satisfait, et j’en demande finalement le retrait. À défaut, l’avis de la commission sera défavorable.
M. le président. Monsieur Théophile, l’amendement n° I-1661 rectifié est-il maintenu ?
M. Dominique Théophile. Monsieur le président, je suis bien embarrassé : il m’est très difficile de retirer cet amendement, rédigé par mon collègue Georges Patient, qui connaît bien le sujet puisqu’il siège à la commission des finances. Je maintiens donc l’amendement et m’en remets à la sagesse de notre assemblée.
M. le président. L’amendement n° I-1691 rectifié, présenté par MM. Mohamed Soilihi, Hassani et Rohfritsch et Mme Phinera-Horth, est ainsi libellé :
Après l’article 3 nonies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Les I et II de l’article 1417 du code général des impôts sont ainsi modifiés :
1° À l’avant-dernière phrase, après le mot : « Guyane », sont insérés les mots : « et Mayotte » ;
2° La dernière phrase est supprimée.
II. – À la fin du II de l’article 49 de la loi n° 2016-1918 du 29 décembre 2016 de finances rectificative pour 2016, l’année : « 2022 » est remplacée par l’année : « 2023 ».
III. – Le I s’applique à compter des impositions établies au titre de 2024.
IV. – La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du I est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
V. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi.
M. Thani Mohamed Soilihi. En 2017, nous avons adopté une majoration temporaire, pour Mayotte, des seuils de revenu fiscal de référence au-dessous desquels les contribuables de condition modeste ainsi que les personnes âgées ou en situation de handicap peuvent bénéficier des allégements de taxe foncière sur les propriétés bâties.
Prévue jusqu’en 2022, cette disposition visait à tenir compte de la situation particulière de Mayotte au regard du niveau des valeurs locatives et de la titrisation du foncier, sur laquelle un travail d’ampleur est en cours sous l’égide de la commission d’urgence foncière (CUF), créée également en 2017. À Mayotte, 70 % des parcelles ne sont pas titrées. Du coup, la pression fiscale est énorme sur le tiers restant. La CUF fait un énorme travail pour élargir l’assiette fiscale en titrant les parcelles.
Notre amendement tend à proroger pour un an cette majoration temporaire dans l’attente de l’achèvement du travail de la CUF. Ce sera un soulagement pour le pouvoir d’achat des contribuables mahorais les plus modestes. Je vous rappelle, chers collègues, que, dans ce département, 77 % de la population vit au-dessous du seuil de pauvreté.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. La commission estime que le travail sur les valeurs locatives en vue de les alléger doit être poursuivi à Mayotte. Cet amendement est donc opportun : avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Gabriel Attal, ministre délégué. Effectivement, nous avons relevé il y a quelques années, pour Mayotte, les seuils de revenu fiscal de référence pour l’application des allégements de taxe foncière sur les propriétés bâties sous condition de ressources pour les personnes modestes. En effet, comme l’a expliqué l’auteur de l’amendement, la situation de ce département est particulière, avec des indicateurs très spécifiques.
Cette majoration devait s’arrêter à la fin de l’année. Cet amendement a pour objet de la prolonger. Mon avis est favorable, car cela constituera un soutien pour les personnes les plus modestes.
M. le président. Monsieur le ministre délégué, acceptez-vous de lever le gage ?
M. le président. Il s’agit donc de l’amendement n° I-1691 rectifié bis.
Je le mets aux voix.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 3 nonies.
L’amendement n° I-1431 rectifié bis, présenté par MM. Théophile, Mohamed Soilihi, Patient et Lemoyne, Mme Duranton, MM. Buis et Haye et Mme Schillinger, est ainsi libellé :
Après l’article 3 nonies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Au second alinéa de l’article 8 de la loi n° 2004-639 du 2 juillet 2004 relative à l’octroi de mer, le montant : « 205 € » est remplacé par le montant : « 400 € ».
II. – La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du I est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
III – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Dominique Théophile.
M. Dominique Théophile. La reprise du dédouanement des colis par La Poste a été mise en œuvre d’abord dans l’Hexagone puis, de manière échelonnée, dans les départements et régions d’outre-mer (Drom), entre octobre 2021 et juin 2022. Cette réforme a des impacts négatifs plus importants sur les Ultramarins que sur les Hexagonaux.
En effet, l’envoi de colis entre particuliers de la métropole vers les Drom peut faire l’objet d’une taxation au titre de l’octroi de mer, de l’octroi de mer régional et de la TVA, ainsi que de la perception, par La Poste, de frais relatifs au dédouanement des colis. Or l’envoi de colis entre particuliers situés dans l’Hexagone ne fait l’objet d’aucune taxation ni de frais autres que ceux qui sont associés au transport. (Mme Catherine Conconne s’en désole.)
Si le sens général de la réforme est défendable, la différence de traitement des envois de colis entre particuliers est perçue comme injuste par nos compatriotes ultramarins. (Mme Catherine Conconne le confirme.)
Pour que l’essentiel de ces envois ne fasse l’objet ni de taxation ni de frais liés au dédouanement, le présent amendement vise à relever de 205 à 400 euros la franchise de taxation des biens qui font l’objet de petits envois non commerciaux pour l’octroi de mer et la TVA.
Cette mesure s’inscrit dans une logique de soutien au pouvoir d’achat des ménages et sera perçue, par nos compatriotes, comme une simplification bienvenue.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Nous nous sommes interrogés sur le montant de l’augmentation, car cet amendement vise quasiment à doubler le montant de la franchise, mais les éléments tarifaires qui nous ont été communiqués correspondent à la réalité et nous ont donc convaincus. Avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Gabriel Attal, ministre délégué. C’est un sujet important, assez technique, qui mérite d’être analysé précisément. On observe effectivement un renchérissement du coût des colis. A-t-il une origine fiscale ? Je ne le crois pas. Il vient de ce que la mission de dédouanement des colis a été confiée à La Poste en juillet 2021 et que celle-ci répercute les coûts d’acheminement de l’ensemble des colis sur ceux qui dépassent le seuil de 205 euros. Si nous relevons ce seuil, le coût augmenterait encore pour les colis supérieurs à 400 euros.
Nous préférons travailler avec La Poste pour que celle-ci revoie sa politique de tarification, afin d’éviter que l’intégralité des coûts ne pèse sur une partie seulement des colis.
Je demande donc le retrait de cet amendement. Je m’engage à travailler étroitement avec La Poste, en concertation avec mon collègue Jean-François Carenco, pour trouver une solution au problème et obtenir une révision de la politique de tarification.
M. le président. La parole est à Mme Nassimah Dindar, pour explication de vote.
Mme Nassimah Dindar. Nous devons vraiment travailler sur ce sujet, car l’augmentation des frais de port pour les colis a révolté les familles réunionnaises, surtout en cette période de fin d’année : pour recevoir un colis qui vient de parents vivant en métropole, il peut en coûter 50 euros de frais supplémentaires si l’on dépasse le seuil.
Ce n’est pas seulement une question de pouvoir d’achat pour les familles domiennes, c’est aussi un problème d’inégalité : on ne comprend pas pourquoi des colis arrivant chez nous devraient générer de tels frais, qui augmentent de manière exponentielle d’année en année. Nous devons absolument avoir une réflexion sur le sujet.
M. le président. La parole est à Mme Victoire Jasmin, pour explication de vote.
Mme Victoire Jasmin. Monsieur le ministre, il faut, à un moment donné, une certaine cohérence. Votre collègue ministre délégué chargé des outre-mer a déjà fait des annonces sur ces dispositifs. Quand on expédie un colis de Paris vers la Corse ou la Bretagne, les taxes atteignent-elles des montants comparables ? Ce qui se passe n’est pas normal. Un tel changement aurait dû faire l’objet, au moins, d’une concertation préalable. Entre le tollé en Guadeloupe, ce qui se dit sur les réseaux sociaux, ce que je lis dans les médias et ce que j’entends ici, je suis dans le brouillard…
M. le président. La parole est à M. Dominique Théophile, pour explication de vote.
M. Dominique Théophile. Monsieur le ministre, ce que vous avez dit n’est pas suffisant, et j’attends de vous un engagement plus précis, compte tenu des dégâts que ce sujet a déjà faits sur nos territoires. Nos compatriotes ne comprendraient pas que nous renvoyions cela à une discussion ultérieure sans fixer un calendrier. Nous avons déjà interrogé le ministre délégué chargé des outre-mer : les réponses que nous avons obtenues n’ont pas suffi à faire baisser l’indignation qui s’exprime sur les réseaux sociaux. Un engagement à résoudre le problème avant la fin de l’année aurait un meilleur effet.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Conconne, pour explication de vote.
Mme Catherine Conconne. Mes collègues ont raison : il ne faut pas aggraver le sentiment d’inégalité, car cela crée des dégâts. Une personne qui souhaite envoyer un petit cadeau à sa famille en Martinique, en Guadeloupe, à la Réunion ou en Guyane se voit taxée, alors qu’elle ne l’est pas si elle envoie un colis de Paris à Bordeaux.
Cela fait des mois que la population s’est soulevée contre cette situation, qui a été imposée brutalement. Est-ce dû à la nouvelle gouvernance de La Poste ? On nous dit qu’il y a des discussions, que tout va s’arranger… En attendant, avec l’arrivée des fêtes, les envois de petits cadeaux entre familles vont se multiplier. De plus, beaucoup d’articles sont introuvables sur place, il faut les commander sur internet. On subit alors une double taxation, en sus des 20 % déjà payés : 9,5 % de TVA, plus l’octroi de mer. Il y a un problème, il faut regarder les choses à la loupe et réparer ce qui doit l’être.
En l’état, ce n’est pas tenable et, j’ose le mot, c’est injuste.
M. le président. La parole est à M. Jérôme Bascher, pour explication de vote.
M. Jérôme Bascher. Tous ces arguments sont fondés, mais il est également vrai que le groupe La Poste ne peut pas assumer seul ces coûts. Cette année, son bénéfice s’est quasiment réduit à néant. Si nous parlons d’un service public, il faut augmenter la dotation versée à La Poste au titre du service universel postal.
On ne peut pas supprimer des frais de manière magique… Le groupe étant surveillé par les autorités de Bruxelles, on ne peut pas faire ce qu’on veut, ou laisser filer les déficits d’année en année sans s’en préoccuper. Sa gestion doit être sérieuse.
Vous soulevez un vrai problème, j’en conviens. Mais, pour la période de Noël, nous ne pourrons pas le résoudre dans le cadre de ce PLF.
Mme Catherine Conconne. C’est idiot !
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Gabriel Attal, ministre délégué. Vous comparez avec la Corse ou la Bretagne, mais nos outre-mer sont en dehors du territoire douanier de l’Union européenne : c’est un fait juridique, auquel nous ne pouvons rien. Dès lors, un certain nombre de règles de commerce international s’appliquent.
Cela dit, j’ai été le premier à dire que la situation actuelle n’est pas satisfaisante. Mais ce n’est pas en relevant le seuil de la franchise qu’on réglera le problème. Actuellement, La Poste répercute les coûts d’acheminement de l’ensemble des colis sur les seuls colis « taxables » : relever le seuil réduira le nombre des colis sur lesquels pèsera la totalité des coûts.
Je rappelle que la franchise de 205 euros s’applique par colis. Il est donc possible, au lieu d’envoyer un colis de 400 euros, d’en envoyer deux de 200 euros.
Enfin, relever le seuil occasionnerait une perte de recettes de l’ordre de 20 millions d’euros pour les régions ultramarines concernées. Ce n’est pas ce que vous souhaitez, je pense.
Je suis bien conscient du problème, tout comme mon collègue Jean-François Carenco. J’ai fait récemment un déplacement outre-mer pour en discuter sur place. Le meilleur levier d’action me semble être d’inciter La Poste à revoir sa tarification, comme nous le faisons.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 3 nonies.
Article 3 decies (nouveau)
I. – À la fin du second alinéa du 1° du I et du second alinéa du 1 du VI de l’article 199 terdecies-0 A du code général des impôts, l’année : « 2022 » est remplacée par l’année : « 2023 ».
II. – Au IV de l’article 157 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020, l’année : « 2022 » est remplacée par l’année : « 2023 ».
III. – Le I du présent article s’applique aux versements effectués à compter d’une date fixée par décret, qui ne peut être postérieure de plus de deux mois à la date de réception par le Gouvernement de la réponse de la Commission européenne permettant de considérer la disposition lui ayant été notifiée comme étant conforme au droit de l’Union européenne.
IV. – Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 30 septembre 2023, un rapport d’évaluation des dispositifs prévus aux articles 199 terdecies-0 A, 199 terdecies-0 AA et 199 terdecies-0 AB du code général des impôts.
M. le président. L’amendement n° I-846, présenté par MM. Bocquet, Savoldelli et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
L’article 199 terdecies-0 A est abrogé.
La parole est à M. Pierre Ouzoulias.
M. Pierre Ouzoulias. Mes chers collègues, faisons un petit détour par une niche, la niche Madelin !
Monsieur le ministre, dans le projet de loi de finances rectificative pour 2021, vous avez fait passer de 18 % à 25 % la proportion des sommes investies déductibles de l’impôt sur le revenu des contribuables qui investissent dans des PME (petites et moyennes entreprises). Manifestement, cela n’a pas remédié à l’inefficacité de cette niche, dont profitent environ 42 000 ménages, pour un coût, très faible, de 61 millions d’euros.
Le rapporteur général de l’Assemblée nationale a lui-même émis quelques réserves sur son intérêt et a demandé un rapport d’évaluation pour 2023. Ce n’est pas la pratique du Sénat, et nous serons plus radicaux : dans l’espoir d’un examen plus attentif de l’intérêt de cette niche, nous vous proposons de la supprimer.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. La commission émet un avis défavorable, car cet amendement est contraire à la position qu’elle a adoptée. Nous avons choisi, au contraire, d’augmenter le taux de cette réduction d’impôt, dans la mesure où il importe de renforcer les fonds propres des PME. C’est l’objet de l’amendement suivant.