M. le président. La parole est à M. Philippe Mouiller, pour explication de vote.
M. Philippe Mouiller. Pour ma part, je ne soutiendrai pas cet amendement, qui vise, finalement, à créer une taxe supplémentaire, quel que soit le capital imposé.
Notre débat devrait être beaucoup plus global. Or, depuis le début, pour ce qui concerne le financement de la cinquième branche, nous n’avons pas de vision d’ensemble : il faut une stratégie, des objectifs, une connaissance des besoins et une planification des moyens financiers.
L’adoption de cet amendement aurait un coût estimé à 1,5 milliard d’euros, même s’il convient d’examiner de près une telle estimation. Globalement, il faut traiter les choses avec une autre vision.
Certes, une tranche de la CSG sera intégrée dans les recettes à partir de l’année prochaine, mais ce sera pour atteindre, simplement, l’équilibre de la branche, ce qui est largement insuffisant. Il y a donc urgence à bien définir la stratégie et à trouver des moyens financiers pérennes.
La taxe prévue par cet amendement, qui est un appel lancé au Gouvernement, n’est pas suffisante. J’invite donc ce dernier à nous proposer une véritable loi sur l’autonomie, dotée d’une capacité financière pérenne. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je soutiendrai cet amendement, qui vise à reprendre l’une des propositions du rapport Libault, lequel remonte déjà à quelques années.
Jusqu’à quand différerons-nous les décisions à prendre ? Voilà déjà deux ans que nous connaissons un déficit, et celui-ci représentera sans doute 9 milliards d’euros à l’horizon 2030. Il est temps de nous y atteler. Or, en refusant d’adopter cet amendement, on procrastine, comme le fait le Gouvernement.
Qu’il y ait ou non une cinquième branche, si l’on enchâsse – j’aime bien cette idée – dans l’assurance maladie le risque de perte d’autonomie, il faut que l’assurance maladie change de nom et devienne l’assurance santé.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Sueur. Ce débat me fait penser à ces chœurs d’opéra – comme dans Faust de Gounod, d’après Goethe – qui chantent « Marchons, marchons ! » tout en restant inexorablement sur place. (Rires.)
En 2020, nous avons voté une loi. Puis, le Président de la République a dit et répété, avec infiniment d’éloquence, que la prestation autonomie constituait sa grande priorité et qu’il allait la mettre en œuvre. Pourtant, rien ne se passe ! Certes, on peut toujours critiquer toutes les dispositions proposées. De toute façon, mes chers collègues, cela coûtera, et cela coûtera cher. Mais c’est une question de dignité. Nous le savons, il faut le faire.
Mme Meunier propose quelque chose de concret, et nous sommes très ouverts à toutes les propositions. Ce qui est sûr, c’est que l’on ne peut rester éternellement avec une coquille vide. Ce n’est ni respectueux ni sérieux ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, pour explication de vote.
Mme Corinne Féret. Je soutiendrai bien évidemment cet amendement. Comme l’ont dit plusieurs d’entre nous, nous avons voté la création d’une cinquième branche en août 2020. Nous sommes en novembre 2022, et rien ne s’est passé s’agissant d’un financement pérenne. La fameuse grande loi sur l’autonomie, tant attendue et tant promise dans le cadre du premier mandat du Président de la République, c’est aujourd’hui l’Arlésienne !
Récemment, au cours de nos débats, j’ai entendu que nous pourrions organiser les choses autrement, sans débattre obligatoirement ou mettre sur la table un texte aussi attendu.
La proposition contenue dans cet amendement ne sera pas suffisante, nous le savons, face aux besoins. Toutefois, c’est un début : cela montre que, avec des actes concrets, nous pourrions être capables de rassembler 1,5 milliard d’euros chaque année.
M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote.
M. Alain Milon. Mes chers collègues, permettez-moi de revenir sur les propos de Mmes Cohen et Féret.
La loi sur l’autonomie – je m’adresse à ceux qui connaissent l’histoire de notre chambre – a été évoquée au cours de la dernière année du mandat de M. Sarkozy, qui avait nommé une ministre devenue ensuite présidente de la CNSA, la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie. Mais une durée d’un an était insuffisante pour mettre en place cette loi.
Je m’en souviens très bien, nous étions en salle Médicis lorsque le nouveau gouvernement de M. Ayrault avait été présenté, voilà douze ans. À ce moment, je m’étais fait carrément assommer par Mme Delaunay, qui m’avait déclaré : « Vous n’avez pas fait la loi sur l’autonomie. Moi, je vais la faire ! »
Il faut avoir un peu de mémoire ! Certes, on peut reprocher à M. Macron de ne pas avoir fait cette loi. Toutefois, d’autres avant lui ne l’ont pas faite non plus. (Protestations sur les travées du groupe SER.)
Par ailleurs, nous avons voté une loi, c’est vrai, mais il s’agit d’une coquille vide, avec une branche autonomie sans conseil d’administration et sans financement.
Je suis d’accord avec Laurence Cohen, nous n’aurions jamais dû appeler cette branche autonomie la « cinquième branche ». Et avant de la créer, nous aurions dû penser à la façon de l’organiser et de la financer, dans le cadre de l’examen d’une grande loi sur l’autonomie, qui ne vient toujours pas, à la suite des hésitations de M. Sarkozy, dans le cadre de la dernière année de son mandat, de M. Hollande, dans le cadre de ses cinq années de mandat et de M. Macron, dans le cadre de son premier mandat. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. le président. Mes chers collègues, de grâce, restez-en à l’amendement dans vos explications de vote !
La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Pour ma part, je voudrais remonter à un ministre de Jacques Chirac, à savoir Philippe Bas (Exclamations amusées.), qui avait rédigé un très bon rapport.
Il y était expliqué la chose suivante : lorsque le GMP, le GIR (groupe iso-ressources) moyen pondéré, sera à 730, il faudra qu’il y ait un employé pour un pensionnaire. Or on en est toujours à 0,6 employé pour un pensionnaire, dont 0,3 soignant. Il faudrait au moins monter à 0,5 soignant ! Si tel était le cas, cela représenterait 5 emplois de plus par Ehpad, soit environ 3 milliards d’euros supplémentaires. Entre 2020 et 2030, il y aura à peu près 200 000 personnes dépendantes en plus. Il faudra encore faire un effort.
Nous attendons, monsieur le ministre, que cette branche autonomie soit financée. Le Président de la République, comme le ministre de l’autonomie, a annoncé 50 000 emplois. Il en faut 35 000 dans les Ehpad. Il convient donc de prévoir d’urgence un financement par la CSG. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à M. André Reichardt, pour explication de vote.
M. André Reichardt. Pour ma part, je voterai cet amendement, et cela pour deux raisons.
Tout d’abord, on ne peut pas laisser dire que la perte d’autonomie ne serait pas un risque : on naît, on meurt, circulez, il n’y a rien à voir ! Une telle vision est pour moi inacceptable. Ainsi, à quoi serviraient les allocations familiales ? On naît, on meurt, circulez, il n’y a rien à voir… Je ne comprends pas ce discours.
Ensuite, cela a été dit à de multiples reprises, nous sommes face à une coquille vide, qu’il faut bien remplir ! Je considère donc cet amendement comme un amendement d’appel. C’est la raison pour laquelle je le voterai.
M. le président. La parole est à M. Serge Mérillou, pour explication de vote.
M. Serge Mérillou. On pourrait évoquer longuement le passé à dix ans, à cinq ans ou à trois ans.
Nous vous proposons ce soir une solution concrète. Elle n’est sans doute pas parfaite, mais nous sommes face à un enjeu majeur : notre population vieillit, et la perte d’autonomie sera importante dans les années à venir. Selon moi, la façon dont nous traiterons ce sujet témoignera tout simplement de notre prise en compte de notre humanité.
L’absence d’autonomie n’est plus un risque, mais une certitude : nous serons tous, un jour ou l’autre, confrontés à la perte d’autonomie.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué. J’apporterai deux éléments en réaction à ce qui a été dit.
Premièrement, la création de la cinquième branche, résultat d’une initiative parlementaire, est évidemment une excellente nouvelle. En effet, la perte d’autonomie est un risque, pour la personne âgée, mais aussi pour la personne qui, au cours de sa vie, bien avant d’atteindre l’âge de la dépendance, se voit touchée par le handicap, qui est couvert par le risque de perte d’autonomie.
Deuxièmement, cette branche n’est pas une coquille complètement vide. (Exclamations ironiques sur les travées des groupes Les Républicains, UC et SER.) En effet, dès la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021, quelque 33 milliards d’euros ont été inscrits dans ce cadre. Dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale que vous êtes en train d’examiner, mesdames, messieurs les sénateurs, ce sont 36 milliards d’euros qui sont prévus.
Comme vous le savez, en 2024, nous aurons un cliquet de 2 milliards d’euros supplémentaires, si bien que, en 2026, la projection est de 42 milliards d’euros, pour cette coquille qui n’est pas complètement vide et qui est perfectible, s’agissant d’une branche résultant d’une initiative parlementaire créée voilà seulement deux ans.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1065 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 11
Est approuvé le montant de 6,2 milliards d’euros correspondant à la compensation des exonérations, réductions ou abattements d’assiette de cotisations ou contributions de sécurité sociale, mentionné à l’annexe 4 jointe au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023. – (Adopté.)
Après l’article 11
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L’amendement n° 466 rectifié bis est présenté par Mmes Borchio Fontimp et Demas, MM. H. Leroy et Genet, Mme Gruny, MM. Bansard, Bascher et Belin, Mmes Belrhiti et Bonfanti-Dossat, MM. Bouchet, Brisson, Calvet, Cambon, Charon et Chatillon, Mmes Chauvin, Delmont-Koropoulis, Dumas et Dumont, MM. B. Fournier, Frassa, Gremillet et Houpert, Mme Joseph, MM. Klinger, D. Laurent et Lefèvre, Mmes Lopez, Micouleau, Muller-Bronn et Noël et MM. Pellevat, Sautarel, Savin, Sido et J.P. Vogel.
L’amendement n° 660 rectifié bis est présenté par Mme Gatel, M. Delcros, Mme Létard, M. Henno, Mme Canayer, M. Canévet, Mme Morin-Desailly, MM. Bonneau et Détraigne, Mmes Dindar et Férat, M. Hingray, Mme Jacquemet, MM. Janssens et Kern, Mme de La Provôté, MM. Lafon, Le Nay, Levi, Longeot et P. Martin, Mmes Perrot et Sollogoub et M. Chauvet.
L’amendement n° 1118 rectifié est présenté par M. C. Vial.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le 6° du 1 de l’article 39 est abrogé.
2° L’article 235 ter ZC est abrogé ;
II. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Les articles L. 137-30 à L. 137-39, l’article L. 138-1 et les articles L. 651-2 à L. 651-9 sont abrogés.
2° L’article L. 241-3 est ainsi modifié :
a) À la première phrase du premier alinéa, les mots : « par une contribution du fonds institué par l’article L. 131-1 dans les conditions fixées par l’article L. 135-2, » sont supprimés ;
b) Le 1° est abrogé.
III. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
IV. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à Mme Alexandra Borchio Fontimp, pour présenter l’amendement n° 466 rectifié bis.
Mme Alexandra Borchio Fontimp. Cet amendement vise à répondre à une attente exprimée par l’Association des maires de France, une demande légitime qui s’inscrit dans une recherche de bon sens. Il s’agit de la contribution sociale de solidarité des sociétés, plus connue sous l’acronyme C3S.
Le Conseil d’analyse économique a estimé que cette cotisation est « l’impôt le plus nocif, à supprimer en priorité ». En effet, elle présente plusieurs désavantages.
Tout d’abord, elle affecte négativement le processus de production.
Ensuite, elle pénalise l’exportation, car, pour réduire l’impact de la C3S sur leur compétitivité, il devient plus intéressant pour les entreprises françaises de s’approvisionner à l’étranger, où cette taxe n’existe pas.
Enfin, et surtout, la suppression de la C3S coûterait moitié moins à l’État que la compensation de la CVAE, la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises.
À mon sens, il est essentiel de sauvegarder le lien, y compris fiscal, entre les entreprises et leur territoire d’implantation. Tel est l’objet de cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Françoise Gatel, pour présenter l’amendement n° 660 rectifié bis.
Mme Françoise Gatel. On pourrait se demander ce que vient faire là cet amendement. Pourtant, il a bien un lien avec le PLFSS, puisque la C3S est une contribution qui finance la branche vieillesse, à hauteur de 3,6 milliards d’euros.
Il ne s’agit pas du tout d’exonérer les entreprises d’impôts. Vous le savez, monsieur le ministre, il est fortement question de supprimer la CVAE, qui est un impôt économique payé par les entreprises sur les territoires.
Ma collègue l’a dit, tout comme des associations d’élus, la suppression de la CVAE représente un danger énorme, et cela pour plusieurs raisons.
Tout d’abord, chacun ici souscrit au principe « qui décide paye ». Par conséquent, décider de supprimer un impôt relevant des territoires est quelque peu gênant, et l’État ferait mieux de supprimer des impôts qui le concernent.
Ensuite, il existe entre les territoires et la CVAE un lien qu’il faut savoir respecter. Quand nous devrons mettre en place le ZAN, le zéro artificialisation nette, et choisir entre l’habitat et l’implantation d’entreprises, les territoires ne choisiront pas ces dernières si aucun impôt ne leur est lié.
Nous sommes des gens très responsables. Le produit de la C3S représente, je l’ai dit, 3,6 milliards d’euros. Or la compensation par l’État, ce qui constitue un minimum, de la disparition de la CVAE pour les territoires représente 9,5 milliards d’euros. Dans la mesure où l’État compense d’ores et déjà 2 milliards d’euros, la facture reviendrait à 7 milliards d’euros.
Je vous invite donc à méditer sérieusement les dispositions prévues par cet amendement, monsieur le ministre.
M. le président. L’amendement n° 1118 rectifié n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je vous remercie, mes chères collègues, de vos propositions.
L’effet économique des impôts de production est probablement néfaste, comme l’a souligné l’auteure de l’amendement n° 466 rectifié bis. Tel est d’ailleurs la logique de la suppression de la CVAE.
Cependant, l’affectation de la C3S à la branche vieillesse de la sécurité sociale la rend indispensable à l’équilibre de cette branche. Il ne paraît donc pas opportun de la supprimer.
De plus, le PLFSS n’est sans doute pas le meilleur véhicule pour comparer les mérites ou les effets nocifs de la C3S et de la CVAE.
Si la question peut se poser, la réalité est que nous avons besoin de la C3S pour la branche vieillesse. C’est pourquoi la commission est défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué. C’est vrai, il fallait choisir entre la suppression de la C3S ou celle de la CVAE. C’est un choix que nous avons fait voilà un an ou deux, au moment de la relance, lorsqu’une première tranche de la CVAE et une tranche de la CFE, la cotisation foncière des entreprises, ont été supprimées.
La suppression de la C3S était tentante. En effet, elle frappe le chiffre d’affaires, c’est-à-dire, dans le compte de résultat, un niveau plus élevé que la CVAE. Elle entraîne donc des effets de distorsion et de désincitation plus importants.
Par ailleurs, on peut la soupçonner d’être répercutée en cascade dans les chaînes de production. Potentiellement, elle est donc un peu plus toxique que la CVAE.
S’il a été décidé de supprimer la CVAE, c’est parce qu’il existe d’ores et déjà un abattement de 19 millions d’euros pour la C3S. Si bien que, lorsque vous supprimez la C3S, vous favorisez en réalité les entreprises qui font plus de 19 millions d’euros de chiffre d’affaires, donc qui sont d’une certaine taille.
La suppression de la C3S conduirait à amputer le financement de la branche vieillesse. En outre, elle favoriserait plutôt les services, notamment financiers, que l’industrie.
Pour l’ensemble de ces raisons, liées à la volonté de soutenir les PME et les ETI et de donner un coup de pouce à l’industrie, c’est la suppression de la CVAE qui a été retenue au moment de la relance, dans le cadre du projet de loi de finances.
Vous l’avez dit, il est évidemment indispensable que la suppression de la CVAE soit compensée dans les collectivités. Un certain nombre de débats ont eu lieu sur ce sujet dans les deux assemblées.
Le Gouvernement est donc défavorable à ces deux amendements identiques.
M. le président. La parole est à Mme Françoise Gatel, pour explication de vote.
Mme Françoise Gatel. Vous avez raison, monsieur le ministre, il s’agit d’une décision et d’un choix du Gouvernement, qui lui appartiennent.
Je veux rassurer mon excellente collègue rapporteure générale. Il s’agit non pas de supprimer des recettes, mais de prévoir une compensation de l’État en faveur de la branche vieillesse. C’est la même chose concernant la compensation de l’État aux territoires de la CVAE !
Monsieur le ministre, vous le savez, puisque vous connaissez bien le dossier, le Conseil d’analyse économique a estimé, en 2019, que la C3S était l’impôt le plus toxique, dans la mesure où il pénalise la production et l’exportation.
Si j’ai bien entendu votre réponse, je vous invite à poursuivre la méditation à laquelle je vous encourageais tout à l’heure ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à Mme Pascale Gruny, pour explication de vote.
Mme Pascale Gruny. J’ai cosigné l’amendement n° 466 rectifié bis, et je ne reviendrai pas sur ce qui vient d’être dit.
Simplement, je le rappelle, les entreprises ont besoin de visibilité. Changer tous les ans de système, c’est tout simplement insupportable. Si la C3S a été diminuée en 2016, après l’instauration d’un abattement, elle devait être totalement supprimée en 2017. Or tel n’a pas été le cas. Nous ne devrions donc pas avoir ce débat.
Par ailleurs, je soutiens le lien entre les impôts et les territoires, qui est essentiel, alors même que la taxe d’habitation a déjà été supprimée par le Gouvernement. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 466 rectifié bis et 660 rectifié bis.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 766 rectifié, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 241-2 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« Art. L. 241-2. – I. – Les ressources des assurances maladie, maternité, invalidité et décès sont également constituées par des cotisations assises sur :
« 1° Les avantages de retraite, soit qu’ils aient été financés en tout ou partie par une contribution de l’employeur, soit qu’ils aient donné lieu à rachat de cotisations ainsi que les avantages de retraite versés au titre des articles L. 381-1 et L. 742-1, à l’exclusion des bonifications ou majorations pour enfants autres que les annuités supplémentaires ;
« 2° Les allocations et revenus de remplacement mentionnés à l’article L. 131-2 ;
« 3° Le produit de la contribution additionnelle à la contribution sociale de solidarité à la charge des sociétés, prévue par l’article L. 245-13 ;
« 4° Le produit de la contribution mentionnée à l’article L. 137-15.
« Des cotisations forfaitaires peuvent être fixées par arrêté ministériel pour certaines catégories de travailleurs salariés ou assimilés.
« Les cotisations dues au titre des assurances maladie, maternité, invalidité et décès sont à la charge des employeurs et des travailleurs salariés et personnes assimilées ainsi que des titulaires des avantages de retraite et des allocations et revenus de remplacement mentionnés aux 1° et 2° du présent I.
« II. – Les ressources des assurances maladie, maternité, invalidité et décès sont en outre constituées par une fraction égale à 38,81 % du droit de consommation prévu à l’article 575 du code général des impôts. »
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. À l’heure actuelle, l’assurance maladie prend en charge 80 % des dépenses de consommation de soins et de biens médicaux, mais la répartition de la dépense par type de soins est très contrastée et démontre que les soins de ville représentent la première dépense pour les ménages.
Selon la Drees, la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques, 89 % des personnes les plus pauvres ont une complémentaire santé, contre 95 % dans la population générale. Les retraités, eu égard à leur âge, ont les cotisations les plus élevées, ainsi que les personnes en situation de handicap ou souffrant de maladies chroniques, qui ne peuvent pas travailler, les chômeurs et les travailleurs indépendants, qui doivent prendre une complémentaire de santé individuelle au prix fort et non déductible des impôts.
Face aux inégalités dans l’accès aux complémentaires de santé et dans les couvertures qu’elles proposent, ainsi que face au coût pour les assurés sociaux et l’État, nous défendons le projet d’un remboursement des dépenses de santé à 100 % par la sécurité sociale.
Cet amendement a pour objet de reprendre une proposition de loi déposée par notre groupe en juin dernier visant à restaurer une sécurité sociale solidaire, avec la suppression des barrières financières et des dépassements d’honoraire, à remplacer la notion de panier de soins par celle de « soins prescrits », à étendre les remboursements aux aides techniques pour les personnes en situation de handicap et à intégrer l’aide médicale d’État au régime général d’assurance maladie.
Notre amendement tend donc à rétablir les cotisations du CICE, le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, pour assurer le financement intégral des dépenses de santé par l’assurance maladie, en renouant ainsi avec les principes originels de la sécurité sociale.
Le remboursement des dépenses de santé à 100 % par l’assurance maladie entraînera une réorientation des mutuelles vers leurs missions de prévention et de promotion de la santé, en organisant et en développant les centres de santé, mais aussi en assurant la gestion des établissements médicaux et médico-sociaux.
Enfin, je tiens à rassurer notre collègue André Reichardt : pour nous, la perte d’autonomie sera tout simplement prise en charge par l’assurance maladie.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Nous avons déjà eu un débat en commission au sujet de cet amendement.
Ma chère collègue, je veux vous dire mon respect pour la vision constante et cohérente du groupe CRCE sur ce que devrait être le financement de la branche maladie. Au demeurant, nous vous avons dit à plusieurs reprises combien nous étions opposés à vos propositions.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué. Je veux simplement le rappeler, les allégements de charges ne sont pas tout à fait des cadeaux faits aux entreprises, puisqu’ils ont permis, en stimulant les créations d’emplois, de contribuer au financement de la sécurité sociale.
Nous avons connu, au cours des cinq années qui viennent de s’écouler, la création nette, particulièrement dynamique dans les départements les plus pauvres de notre pays, d’un million d’emplois.
Comme vient de le dire Mme la rapporteure générale, l’intention est constante et sans doute louable, mais revenir sur ces allégements de cotisations de manière assez brutale, comme vous le proposez, madame la sénatrice, reviendrait à inverser cette trajectoire, qui a permis non seulement de créer de l’emploi, en particulier de l’emploi industriel dans les départements les plus fragiles, mais aussi de financer la protection sociale.
Le Gouvernement émet donc également un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Le CICE a constitué une bonne disposition, qui a permis aux entreprises d’avoir un peu de marge.
Par ailleurs, il semble souhaitable de diminuer les charges, car nous devons faire face à la compétition des autres pays européens. Le CICE a donc permis de créer des emplois.
S’agissant de la CVAE, à propos de laquelle je ne suis pas intervenu tout à l’heure, il convient de garder, comme l’a dit Mme Gruny, une relation entre les impôts et les territoires. En effet, lorsqu’une communauté de communes ou d’agglomération crée des entreprises, elle bénéficie de retombées économiques, et tous ses efforts sont récompensés. Il convient donc de préserver ce lien et, peut-être, de supprimer la C3S.
En ce qui concerne cet amendement, il n’est pas souhaitable d’augmenter les charges des entreprises. Sinon, on provoquera des licenciements.
M. le président. La parole est à M. Pierre Laurent, pour explication de vote.
M. Pierre Laurent. Tout à l’heure, on se demandait pourquoi nous n’arrivions pas à affronter le problème du financement de la branche autonomie. La raison est là. Nous l’entendons en cet instant !
Au fond, même si vous ne le dites pas ainsi, si vous ne voulez pas financer véritablement une branche autonomie, c’est parce que cela coûterait beaucoup d’argent, comme le disait tout à l’heure Jean-Pierre Sueur. Et cet argent, il faudra le prendre sur les richesses créées par le travail. Il n’y aura pas d’autre solution ! Si nous voulons affronter le problème de société qu’est la perte d’autonomie, il faudra aller chercher de l’argent créé par le travail.
Or vous continuez, chaque fois qu’il y a un besoin de cette importance devant nous, à dire que l’on ne peut augmenter les charges des entreprises. Mais que sont les charges des entreprises ? Ce sont les cotisations sociales, qui financent la protection sociale et permettent à notre pays d’être en bonne santé, donc compétitif.
Heureusement que nous mettons beaucoup d’argent dans la protection sociale ! Ainsi, les travailleurs de notre pays sont encore aujourd’hui, malgré tous les dégâts causés, en bonne santé. Et ils peuvent encore prendre leur retraite.
Tout cela n’est pas une charge pour la société ! Au contraire, c’est le progrès de la société. Et c’est parce que vous refusez de le financer à la hauteur des besoins que nous n’arriverons pas à financer la branche autonomie et que nous créerons sans cesse des « trous » dans le niveau de protection sociale des Français, notamment pour ce qui concerne la protection maladie des gens les plus défavorisés.
Réfléchissez à tout cela ! Si, chaque fois que nous évoquons ces sujets, le naturel revient au galop et vous nous ressortez le discours sur des cotisations sociales qui sont trop lourdes en France, nous ne ferons jamais les progrès de société qui sont nécessaires. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE. – M. Jean-Pierre Sueur applaudit également.)