M. le président. La parole est à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Plusieurs points, monsieur le sénateur Dantec.
D’abord – je ne peux m’abstenir de le souligner en réponse à une question sur les incendies –, 2 300 pompiers se battent actuellement aux côtés des élus locaux et des forces de l’ordre contre ces feux. Il est essentiel de le rappeler en répondant à chacune de ces questions, parce que le réchauffement climatique provoque la sécheresse des sols et accroît la vitesse de propagation des feux.
Cela dit, je tiens à le répéter, dans 95 % des cas, les départs de feu sont d’origine humaine…
Mme Cathy Apourceau-Poly. Et alors ?
M. Christophe Béchu, ministre. … et nous avons collectivement la responsabilité de diffuser les consignes et de rappeler la nécessité de lutter contre cette propagation. (M. Alain Richard applaudit.)
Reste que les forêts qui brûlent actuellement ont toutes été plantées à une époque où étaient ignorées les conséquences actuelles des changements climatiques.
Vous soulevez la question de la situation climatique qui sera la nôtre quand les forêts que nous nous apprêtons à planter arriveront à maturité. En ce domaine, des recherches ont été conduites pour faire en sorte, par exemple, de planter autour d’une pinède d’autres types d’essences, notamment méditerranéennes, plus adaptées à des sols plus secs.
Vous avez raison de dire qu’il faut mobiliser tant les connaissances scientifiques actuelles sur le sujet que les moyens dont l’État peut disposer. Le ministre de l’agriculture et moi-même venons, il y a peu, de soumettre des propositions à l’attention de la direction générale de l’ONF, pour celui ou celle qui aura à suggérer des pistes au Gouvernement dans ces différents domaines.
J’ajoute que l’ONF gère 25 % de la forêt française, 75 % des forêts étant privées.
M. Loïc Hervé. Et le Centre national de la propriété forestière ?
M. Christophe Béchu, ministre. Braquer les projecteurs sur ce que nous avons à faire pour les forêts publiques est une chose. Cependant, nous ne pouvons pas oublier le dialogue avec l’ensemble des propriétaires de forêts privées, qu’il s’agisse des couloirs de défense incendie ou des réflexions sur les essences. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées du groupe INDEP. – Mme Raymonde Poncet Monge proteste.)
revenus complémentaires des agriculteurs
M. le président. La parole est à M. Pierre Médevielle, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
M. Pierre Médevielle. Le groupe Les Indépendants – République et Territoires s’associe au soutien exprimé à nos sapeurs-pompiers, qui, courageusement, combattent les flammes sur notre territoire.
Ma question s’adresse à M. le ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.
Nos cultures ont soif, nos bêtes ont chaud et nos agriculteurs souffrent. Le dérèglement climatique met en danger notre souveraineté alimentaire. Nous ne pouvons pas aller indéfiniment de plans d’urgence en indemnisations. Notre autonomie énergétique est sérieusement remise en cause. La question du développement de solutions alternatives « urge », tout comme celle de la préservation de nos sols.
Voilà un dilemme cornélien que l’agrivoltaïsme peut résoudre, permettant d’aligner toutes les planètes : production d’électricité par panneaux photovoltaïques inclinables, sur des surfaces tant cultivées que d’élevage, amélioration du revenu des agriculteurs et des productions agricoles, artificialisation maîtrisée des sols.
La proposition de résolution défendue par nos collègues Jean-François Longeot et Jean-Pierre Moga a permis de définir cette activité. La proposition de loi déposée par les membres de mon groupe et d’autres sénateurs, sur l’initiative de Jean-Pierre Decool, organise de façon réaliste le développement nécessaire de l’agrivoltaïsme, son accompagnement et son encadrement.
Il est clair que l’agriculture doit rester l’activité principale. Cependant, dans notre beau pays, champion de la surtransposition et de la réglementation à outrance, certains obstacles doivent être rapidement levés. Je pense aux problèmes d’autorisation liés au code de l’urbanisme ou à la suppression des aides de la politique agricole commune (PAC) en cas de production d’énergie plus de quinze jours par an sur des surfaces agricoles.
Monsieur le ministre, ces installations de panneaux sont démontables, ne présentent aucun danger pour l’environnement et constituent, à l’heure d’un changement climatique galopant, un réel espoir pour nos agriculteurs en matière, d’une part, de protection des cultures et des élevages, d’autre part, d’amélioration de leurs revenus.
Comment comptez-vous lever les obstacles et encourager rapidement le développement de l’agrivoltaïsme, pour le bien de nos agriculteurs et de notre souveraineté alimentaire ? (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP. – M. François Patriat applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.
M. Marc Fesneau, ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire. Monsieur le sénateur Médevielle, je vous remercie de votre question, qui me permet de mettre en valeur à la fois le travail de vos collègues qui ont élaboré une proposition de résolution, et le vôtre : je pense à la proposition de loi que vous avez préparée notamment avec M. Jean-Pierre Decool.
Le sujet est important. Il est porteur de nombreux espoirs.
D’abord, l’agrivoltaïsme permet bel et bien de lutter contre le dérèglement climatique en développant les énergies renouvelables. Telle est d’ailleurs la volonté du Gouvernement en même temps que celle de promouvoir d’autres énergies.
Ensuite, vous l’avez dit, monsieur le sénateur, il s’agit de développer l’agrivoltaïsme tout en conservant l’agriculture comme base et comme activité principale. Cela permet non seulement d’assurer un revenu complémentaire aux agriculteurs, mais aussi de produire de l’énergie renouvelable, de protéger les sols et de développer un certain nombre d’activités. C’est dire si ses vertus sont importantes.
Enfin, vous avez raison, monsieur le sénateur, une simplification, d’un point de vue tant réglementaire que législatif, s’impose. Je tiens à souligner le travail qui, sous l’autorité de la Première ministre, est en cours sur les énergies voltaïque et photovoltaïque, comme sur d’autres énergies renouvelables. Ce travail, mené avec Agnès Pannier-Runacher, vise à simplifier les procédures pour que, rapidement, les projets se débloquent.
Il y a une urgence climatique, mais il y a aussi une urgence pour les agriculteurs. Je le répète : l’agrivoltaïsme permet de sécuriser les revenus, de répondre à la question de la souveraineté agricole et à celle de la souveraineté énergétique, et de faire face aux enjeux climatiques qui ont été évoqués dans certaines des questions précédentes.
Nous sommes au rendez-vous de la simplification, même si, il faut le dire, cette dernière relève parfois des pratiques locales. Il s’agit de faire en sorte que, grâce aux actions que mène le Gouvernement, nous puissions donner à l’administration les directives nécessaires (M. François Patriat acquiesce.), afin que les choses soient les plus simples possible et que nous avancions enfin sur le sujet des énergies renouvelables. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP.)
lutte contre les feux de forêt (ii)
M. le président. La parole est à Mme Florence Lassarade, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Florence Lassarade. Ma question s’adresse à Mme la Première ministre.
Depuis presque dix jours, deux gigantesques feux ravagent la Gironde. Cela a été rappelé : plus de 20 000 hectares de végétation ont été brûlés ; 2 000 sapeurs-pompiers sont mobilisés, appuyés par huit Canadair et deux avions Dash.
Je veux, tout d’abord, rendre hommage à ces soldats du feu ainsi qu’aux maires des communes concernées. La Gironde est le département de France où les départs de feux sont les plus nombreux. Actuellement, la chaleur caniculaire, l’hygrométrie basse et les vents provoquent des feux dynamiques, d’une ampleur exceptionnelle. Nous serons amenés à revoir ces phénomènes régulièrement…
Madame la Première ministre, l’État doit rapidement adapter son dispositif de lutte contre les incendies aux évolutions climatiques. Désormais, l’ensemble de la France est concerné : 31 % du territoire métropolitain est boisé. Or les moyens de l’État consacrés au fonctionnement des services départementaux d’incendie et de secours (SDIS) sont insuffisants et ne correspondent plus à la réalité. L’assiette sur laquelle se fixe le financement des secours n’a pas évolué depuis vingt ans, alors que, dans le même temps, la Gironde et les Landes ont gagné environ 400 000 habitants.
Qui plus est, les moyens aériens ont fait défaut au début de l’incendie, en particulier à Landiras : le renforcement de la force aérienne nationale de la sécurité civile est urgent, afin que cette dernière puisse agir dès le départ du feu. Outre leur nombre, la localisation des bombardiers d’eau à proximité est primordiale.
Face à la rupture majeure que constitue le changement climatique, la prévention est vitale. L’augmentation des départs de feu nécessite un besoin constant en investissement, à la charge notamment des forestiers, pour maintenir un bon niveau de prévention. Les sylviculteurs du Sud-Ouest sont les seuls en France à payer la taxe DFCI (défense de la forêt contre les incendies), qui permet, entre autres, de financer pare-feux et réserves d’eau.
La situation nous impose d’agir rapidement pour garantir l’avenir de nos forêts.
Madame la Première ministre, quels moyens et dispositifs concrets le Gouvernement envisage-t-il de mettre en œuvre pour lutter contre les incendies ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Plusieurs sénateurs du groupe Les Républicains. La Première ministre, elle est où ? (« Elle est sur son téléphone ! », sur les mêmes travées.)
Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales. Madame la sénatrice Florence Lassarade, les feux auxquels vous faites allusion et qui sévissent dans votre département sont d’une ampleur exceptionnelle.
À l’échelon national, au mois de juin dernier, plus de 27 000 hectares de forêts et de 23 000 hectares de cultures ont déjà brûlé. Ces feux bouleversent la vie de nos concitoyens. Je tiens à les assurer du soutien du Gouvernement, eux, mais aussi les élus locaux mobilisés dans ce contexte exceptionnel et, évidemment, les sapeurs-pompiers, eux-mêmes engagés sans relâche, dans des conditions d’extrême difficulté, au péril de leur vie.
En Gironde, les deux incendies de la Teste-de-Buch et de Landiras nécessitent encore une implication forte de notre part. La priorité a été la mise à l’abri des personnes : près de 36 000 habitants ont été évacués. Nous mobilisons des moyens considérables. Sur ces deux feux, près de 2 000 sapeurs-pompiers et sapeurs-sauveteurs, ainsi que 200 forestiers, sont engagés. Les moyens aériens déployés à ce jour sont six Canadair et deux Dash. Comme je l’indiquais précédemment, les moyens en renforts nationaux atteignent 1 222 personnes.
Comme vous le savez aussi, le Président de la République et le ministre de l’intérieur sont cet après-midi en Gironde, afin de faire le point sur la situation et d’adapter les moyens nécessaires à la lutte contre les incendies en cours.
Vous le voyez : l’État, les collectivités et l’ensemble des forces vives de la Nation se mobilisent pour protéger nos concitoyens et ces territoires, face à des incendies exceptionnels. (M. François Patriat applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme Florence Lassarade, pour la réplique.
Mme Florence Lassarade. Madame la ministre, ma question portait sur les actions à venir de l’État. Vous me répondez sur ce qui se passe en détaillant ce que vous avez fait.
Que fait-on demain ? Comment proportionne-t-on les moyens pour tenir compte du changement climatique ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
multiplication des attaques à l’arme blanche
M. le président. La parole est à M. Stéphane Piednoir, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Stéphane Piednoir. Ma question s’adressait à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
Monsieur le garde des sceaux, au mois de septembre 2020, vous déclariez : « La France, ce n’est pas un coupe-gorge. » Hélas, en l’espace de deux mois, plusieurs meurtres à l’arme blanche vous donnent tort : au mois de mai dernier, un médecin militaire a été tué à Marseille ; le 10 juillet, un retraité a été poignardé à Trappes ; le lendemain, une femme a été assassinée à Montpellier ; le 14 juillet, deux jeunes ont été mortellement blessés à Metz et à Amiens.
Tout récemment, nous avons tous été extrêmement choqués par un triple meurtre à l’arme blanche à Angers. Trois jeunes hommes, âgés de 16 à 20 ans, issus de la communauté wallisienne, ont en effet été tués alors qu’ils portaient secours à une jeune femme agressée sexuellement.
Malheureusement, ces faits se multiplient, et pas seulement dans nos métropoles. Sans réelle stratégie, dans un déni et une émotion « de routine », dirais-je, votre gouvernement participe à la banalisation de cette triste réalité en refusant de nommer ces actes barbares pour ce qu’ils sont, en les qualifiant, par exemple, de faits divers ou, selon le président Macron, de simples « incivilités ».
Monsieur le garde des sceaux, il n’est question ni de stigmatiser ni de prétendre détenir une quelconque baguette magique. Il s’agit simplement de vous interroger sur la réponse que vous apportez aux familles qui ne se résignent pas, qui n’acceptent pas que la vie de quiconque puisse ainsi être aussi facilement fauchée dans la rue. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice. (Marques de satisfaction sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur le sénateur Piednoir, naturellement, l’émotion rend les mots dérisoires. Pourtant, ce sont des mots qu’il convient que je prononce pour répondre à cette question si légitime.
Après les faits qui se sont déroulés à Angers, les familles et 400 anonymes se sont réunis sur le parvis de l’hôtel de ville. Ils ont collectivement exprimé le souhait qu’il n’y ait aucune récupération politique – d’ailleurs, monsieur le sénateur, je ne vous fais en aucune façon ce procès. (Marques d’approbation sur les travées du groupe Les Républicains.) Vous n’êtes pas l’extrême droite, et nous le savons.
Je présenterai quelques chiffres, tout aussi dérisoires que les mots, pour affirmer que, depuis de nombreuses années, le nombre de meurtres commis dans ce pays est à peu près stable. Pour autant, et vous l’entendez, cela ne nous conduit pas au fatalisme.
Quelles sont les réponses que nous essayons d’apporter ?
La première réponse concerne l’augmentation des moyens, que vous avez votée, afin de disposer de davantage de policiers, de davantage de magistrats, de davantage de greffiers.
La deuxième réponse a trait à la prévention. Les auteurs des faits dont nous parlons sont jeunes ; en l’occurrence, le code de la justice pénale des mineurs permet désormais d’apporter une réponse beaucoup plus rapide. Vous avez été à nos côtés pour voter ce texte.
La troisième réponse, enfin, que l’on peut apporter aux familles, est relative à la sévérité de la réponse pénale. La décision judiciaire sera rendue par nos compatriotes, puisque, vraisemblablement, une cour d’assises aura à dire ce qu’elle doit dire en la matière.
Je profite toutefois de cette question pour rappeler – mais, bien sûr, vous le savez monsieur le sénateur – qu’en l’an 2000 le taux des peines fermes était de 28 % : il est actuellement de 36 %. Le quantum moyen en 2000 était de 6 mois ferme : il est aujourd’hui de 9,6 mois, ce qui fait de notre pays l’un des plus sévères d’Europe. Je note encore qu’entre 2021 et 2022 la durée moyenne d’emprisonnement a augmenté de 11 %.
Pour tordre le cou à ces idées fausses, qui circulent de façon récurrente et qui font le lit de l’extrême droite, j’ai tenu à créer au ministère de la justice un Observatoire des peines. Je tiens naturellement toutes ses données, produites mensuellement, à votre disposition.
Monsieur le sénateur, je vous remercie de m’avoir permis d’exprimer ces quelques mots, dont je sais – et je le redis – qu’ils sont, face à cette émotion, totalement dérisoires. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
M. François Patriat. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Stéphane Piednoir, pour la réplique.
M. Stéphane Piednoir. Monsieur le garde des sceaux, vous le savez, la sécurité est la première des libertés que l’État doit à ses citoyens. Notre société, nous le constatons, est en pleine déliquescence. Le règlement de comptes à l’Opinel est aujourd’hui monnaie courante ; l’indifférence à la mort de l’autre l’est aussi.
Dans une telle société, il vous faudra beaucoup de courage et beaucoup de conviction pour restaurer l’autorité républicaine à tous les niveaux, de l’école jusqu’à l’institution judiciaire. Nous comptons sur vous pour le faire. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Annick Billon applaudit également.)
fiscalité des sdis
M. le président. La parole est à M. Denis Bouad, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Denis Bouad. Madame la Première ministre, presque toutes les questions concernant les tragiques incendies de ces dernières semaines ont déjà été posées ; j’aimerais que vous répondiez à la mienne (Applaudissements sur les travées du groupe SER.), qui n’est pas du tout polémique.
Depuis le début du mois de juin, et avec une gravité accrue ces dernières semaines, la France est en proie à de terribles incendies, en particulier dans mon département. J’ai évidemment une pensée pour le département de la Gironde, dont mon collègue Hervé Gillé a eu l’occasion d’évoquer la situation dramatique. Comme lui, je tiens à rendre hommage à l’engagement remarquable de nos sapeurs-pompiers et de l’ensemble des acteurs sur le terrain.
Dans les prochaines années, le risque d’incendie sera plus étendu dans le temps, mais également dans l’espace. Les prévisionnistes font état d’une augmentation de 80 % des surfaces brûlées d’ici à 2050. Malheureusement, l’été que nous traversons ne fait que renforcer la pertinence des alertes scientifiques.
Dans ce contexte, alors que les communes et les départements financent les services départementaux d’incendie et de secours (SDIS), comment justifiez-vous que ces derniers soient contraints de payer le malus écologique lorsqu’ils achètent des véhicules indispensables à leur intervention ?
De la même manière, comment justifiez-vous que les SDIS s’acquittent de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) alors que d’autres missions régaliennes de l’État, comme l’armée, en sont exonérées ?
Un sénateur du groupe SER. Bravo !
M. Denis Bouad. La lutte contre le changement climatique exige des politiques ambitieuses pour réduire nos émissions de gaz à effet de serre. À ce titre, chaque hectare de forêt qui brûle nuit à notre capacité de stocker du carbone.
La lutte contre le changement climatique nécessite aussi des investissements massifs pour accompagner l’adaptation de nos territoires. De ce point de vue, alors que le risque d’incendie est de plus en plus important, le volontariat de nos sapeurs-pompiers, qui sont seulement rémunérés neuf euros de l’heure, ne pourra à lui seul constituer une réponse sur le long terme.
Ma question est donc simple, madame la Première ministre. Alors que les territoires sont différemment touchés par les aléas climatiques, que ce soient par les incendies, les inondations ou la canicule, envisagez-vous de recourir à la solidarité nationale pour le financement des SDIS et le renforcement des moyens aériens ?
M. le président. Il faut conclure !
M. Denis Bouad. Dans mon département, ces derniers sont, je dois le dire, relativement anciens. (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées des groupes GEST et CRCE.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales. (Protestations sur les travées des groupes SER, CRCE, GEST et Les Républicains.)
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. « Ces gens-là »…
M. Rachid Temal. Où est la Première ministre ?
Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales. Monsieur le sénateur Denis Bouad, la crise que nous connaissons, d’une ampleur exceptionnelle, mobilise fortement les moyens de lutte contre les incendies. J’étais moi-même dans le Gard voilà une dizaine de jours, aux côtés des élus, quand un feu extrême s’est déclaré dans les Cévennes.
Cette situation conduit à une mobilisation d’envergure, comme je l’ai rappelé en répondant au sénateur Pascal Martin et à la sénatrice Florence Lassarade. Dans le seul département de la Gironde, les moyens humains et matériels sont considérables : les renforts nationaux marquent la solidarité de tout le territoire pour lutter contre ces feux.
Dans ce contexte, monsieur le sénateur, vous attirez l’attention du Gouvernement sur la question, légitime, du financement des SDIS. Dans ce but, la loi du 25 novembre 2021 visant à consolider notre modèle de sécurité civile et valoriser le volontariat des sapeurs-pompiers et les sapeurs-pompiers professionnels, dite loi Matras, prévoit qu’un rapport sera remis par le Gouvernement au Parlement d’ici au 1er janvier prochain. Il portera sur le financement des services départementaux et territoriaux d’incendie et de secours.
Premièrement, ce rapport devra dresser l’évolution des recettes et dépenses de ces établissements publics, avec des prévisions du court au long terme.
Deuxièmement, il fera l’analyse des critères de calcul des dotations et des contributions versées à ces établissements publics et évaluera leur pertinence.
Troisièmement, il déterminera les besoins associés aux différentes prestations versées aux sapeurs-pompiers, professionnels et volontaires, pour l’ensemble des financeurs. Il détaillera les conséquences budgétaires propres aux SDIS.
Quatrièmement, enfin, le rapport précisera les conditions dans lesquelles, par dérogation, les conseils d’administration des centres d’incendie et de secours (CIS) peuvent décider de financer l’allocation de vétérance, versée aux sapeurs-pompiers volontaires, relevant d’un corps communal ou intercommunal.
Mesdames, messieurs les sénateurs, ce rapport nous permettra de poser les bases de la réflexion que vous appelez de vos vœux. (M. François Patriat applaudit. – Protestations sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Daniel Gremillet. La nationalisation annoncée d’EDF, aussi tonitruante soit-elle, ne répond pas aux difficultés du groupe.
La première difficulté est financière : c’est le mur d’investissements ! Grevé d’une dette de 43 milliards d’euros, le groupe a perdu 18 milliards d’euros du fait de la corrosion sous contrainte et 10 milliards d’euros avec le relèvement de l’accès régulé à l’électricité nucléaire historique (Arenh). En parallèle, EDF doit s’engager dans des investissements colossaux : 65 milliards d’euros pour le grand carénage, 90 milliards d’euros pour les EPR (European Pressurized Reactors).
Le deuxième enjeu est juridique : c’est l’articulation avec le droit européen. Les concessions hydroélectriques sont sous le coup d’un différend vieux de vingt ans avec la Commission européenne ; une quarantaine d’entre elles sont arrivées à échéance. Et que dire du principe du coût marginal, qui lie le prix de l’électricité à celui du gaz ? Il s’agit d’un désavantage pour notre mix énergétique.
Le dernier problème est stratégique : c’est l’absence de cap. Nous ne savons toujours pas quelle est la politique énergétique du Gouvernement : ce dernier souhaite dorénavant une nationalisation d’EDF, une relance du nucléaire, mais il a arrêté la centrale de Fessenheim en 2020 et le projet Astrid en 2019. Sur les concessions hydroélectriques, on a évoqué tout et son contraire : on parlait d’ouverture, de regroupement, de quasi régie. Que d’indécision ! Que de revirements ! Que de retards !
Aussi, ma question est simple. Au-delà de la nationalisation, monsieur le ministre, comment comptez-vous résoudre les difficultés d’EDF, qui mettent en péril notre souveraineté ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. (Exclamations ironiques sur les travées des groupes Les Républicains, SER et CRCE.)
M. Bruno Le Maire, ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. D’abord, je tiens à dire que je suis toujours très sensible à l’accueil chaleureux que me réservent les sénatrices et les sénateurs. (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.)
Je remercie le sénateur Gremillet de sa question, qui porte sur des enjeux stratégiques pour notre nation.
Le Président de la République a décidé la nationalisation d’EDF,…
M. Bruno Sido. C’est la loi qui décide !
M. Bruno Le Maire, ministre. …laquelle doit nous permettre d’accélérer le renforcement de notre indépendance énergétique, qui, chacun le voit bien au regard des enjeux liés à la guerre en Ukraine, à l’augmentation des prix énergétiques, au manque d’énergie, est l’enjeu actuel le plus important pour notre économie et pour notre nation.
M. François Bonhomme. C’est tardif !
M. Bruno Le Maire, ministre. Quelle est la feuille de route qui va être donnée au groupe pour les années qui viennent ?
La première urgence est de produire plus, retrouver une capacité de production d’électricité qui soit à la hauteur du groupe. Chacun le voit bien : nous sommes sous les 300 térawattheures de production, ce qui est insuffisant.