Mme Sophie Primas. Et les prix ?
M. Laurent Duplomb. Et les débouchés ?
M. Julien Denormandie, ministre. En ce qui concerne la rémunération, connaissez-vous beaucoup de mandatures qui remettent l’ouvrage sur le métier ? C’est ce que nous avons fait en adoptant la loi Égalim 2, reconnaissant ainsi qu’Égalim 1 n’allait pas assez loin. Ce n’est généralement pas ce que font les politiques, mais nous l’avons fait et nous nous battons, comme l’a rappelé M. le Premier ministre.
Je voudrais enfin profiter de cette dernière séance de questions d’actualité pour remercier l’ensemble du Parlement. J’ai eu beaucoup de plaisir à travailler avec vous.
M. Bruno Retailleau. Nous aussi !
M. Julien Denormandie, ministre. Nous avons souvent eu des désaccords, mais nous avons su travailler en bonne intelligence pour trouver des solutions. (M. Bruno Sido applaudit.) Je voudrais saluer tout particulièrement la présidente de la commission des affaires économiques, Sophie Primas, et Laurent Duplomb (Marques d’amusement sur les travées du groupe Les Républicains.) et vous dire, mesdames, messieurs les sénateurs, que la politique du dépassement fonctionne dans le monde agricole.
Je suis persuadé que cette politique peut fonctionner ailleurs et je vous invite par conséquent à la choisir ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées des groupes RDSE et UC.)
bilan de la politique du gouvernement en matière de logement
M. le président. La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Dominique Estrosi Sassone. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre et j’espère qu’il y répondra… (Marques d’amusement sur les travées du groupe Les Républicains.)
Voilà cinq ans, le candidat Emmanuel Macron promettait un choc de l’offre afin de faire baisser les prix de l’immobilier. Il promettait la construction de 60 000 logements étudiants et de répondre aux besoins des ménages aux revenus les plus modestes.
Force est de constater, cinq ans après, que le nombre de permis de construire et de mises en chantier est passé sous la barre symbolique des 400 000.
Cette crise du logement, peut-être l’une des plus graves pour notre pays depuis celle de l’hiver 1954 qui avait conduit l’abbé Pierre à lancer son appel, est le fruit de décisions ayant pénalisé l’ensemble du secteur : baisse de cinq euros des aides personnalisées au logement (APL), réduction du loyer de solidarité supportée par les bailleurs sociaux, augmentation du taux de TVA à 10 % pour le logement social, fin de l’aide aux maires bâtisseurs, zigzags sur le prêt à taux zéro (PTZ), fin de l’APL accession, attaque contre la maison individuelle…
La politique du logement d’Emmanuel Macron n’aura été que coups de rabot successifs, louvoiements et dérobades qui auront fait payer aux Français le prix fort de cet immobilisme. (Protestations sur les travées du groupe RDPI.)
Monsieur le Premier ministre, quelle est votre réponse face à un décalage si grand entre les promesses du Président de la République et la réalité de son échec en matière de logement ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mmes Valérie Létard, Annick Billon et Marie-Noëlle Lienemann applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée du logement.
Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée auprès de la ministre de la transition écologique, chargée du logement. Madame la sénatrice Dominique Estrosi Sassone, je voudrais tout d’abord saluer votre engagement sur la question du logement, ainsi que celui de Mmes Valérie Létard, Vivianne Artigalas et Marie-Noëlle Lienemann qui travaillent sur ce sujet depuis de nombreuses années.
Nous avons avancé ensemble dans le cadre de l’examen du projet de loi relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale (3DS) pour aboutir à un accord en commission mixte paritaire et du projet de loi Climat et résilience. Je salue le travail réalisé au Sénat sur la question du logement.
Comme vous le savez, madame la sénatrice, le nombre des permis de construire s’élève à 470 000 sur les douze derniers mois et il atteint 2,27 millions sur le quinquennat, soit 100 000 de plus que pendant le quinquennat précédent. (Exclamations sur les travées des groupes SER et GEST. – Marques d’ironie sur les travées des groupes UC et Les Républicains.) Le nombre des mises en chantier est également plus élevé durant ce quinquennat que durant le précédent.
Nous avons su redresser la construction neuve, qui a repris en France. Il est important de le souligner. (Mêmes mouvements.)
Nous avons aussi investi comme jamais dans la rénovation énergétique des logements, que ce soit au travers des certificats d’économie d’énergie ou de la mise en place de MaPrimeRénov’, une véritable révolution à laquelle nous consacrons 2,5 milliards d’euros – 1 million de Français ont déjà déposé un dossier. En cette période où les prix de l’énergie sont chers et alors que la rénovation énergétique est bonne pour le pouvoir d’achat, la planète et nos artisans, nous sommes au rendez-vous.
Nous n’avons pas laissé les plus fragiles sur le côté, puisque nous avons ouvert 200 000 places d’hébergement d’urgence et permis à 330 000 personnes d’avoir accès à un logement, en particulier de nombreuses personnes qui vivaient dans la rue.
Nous avons livré 57 000 logements étudiants et 16 000 logements pour les jeunes.
Nous avons encore des besoins, c’est certain, mais nous faisons tout pour soutenir l’offre.
J’ajoute que l’une des jolies réussites de ce quinquennat aura été la multiplication par dix du nombre de personnes sans caution ni garant bénéficiant de la garantie Visale : 660 000 contrats ont ainsi été signés.
Comme vous le voyez, durant ce quinquennat, nous aurons été au rendez-vous sur la question du logement. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, pour la réplique.
Mme Dominique Estrosi Sassone. Madame la ministre, je suis au regret de vous dire que la politique du logement d’Emmanuel Macron aura été un zigzag permanent, sans cap, sans vision, sans réforme d’ampleur.
À travers cette politique du logement et ses échecs, le Président de la République aura une nouvelle fois montré sa déconnexion avec les aspirations des Français. (Protestations sur les travées du RDPI). Une autre politique du logement était possible et elle l’est toujours. Il sera urgent, demain, d’entreprendre de véritables réformes pour répondre à ce besoin essentiel : permettre à chaque Français d’offrir un toit à sa famille ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mmes Michelle Meunier et Valérie Létard applaudissent également.)
impact de la dette publique sur les collectivités locales
M. le président. La parole est à Mme Amel Gacquerre, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme Amel Gacquerre. Ma question s’adresse à M. le ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics.
Dans son rapport public annuel, la Cour des comptes alerte sur la situation des finances publiques. Elle souligne que leur redressement imposera de réaliser 9 milliards d’euros d’économies supplémentaires par an jusqu’en 2027.
Monsieur le ministre, les élus locaux sont très inquiets de cette situation. Ils craignent ce que l’on pourrait appeler « l’effet Hollande » : entre 2013 et 2018, la dotation globale de fonctionnement (DGF) est passée de 41 milliards d’euros à 27 milliards. Sous le quinquennat de François Hollande et le début de celui d’Emmanuel Macron, les dotations aux collectivités ont donc servi de variable d’ajustement pour redresser les comptes publics.
Il serait catastrophique pour les collectivités que cela se reproduise. Et ce, pour trois raisons.
Premièrement, les finances locales ont été plombées par la crise sanitaire. Les charges qui en ont découlé n’ont jamais été intégralement compensées. Encore hier, ma collègue sénatrice Jocelyne Guidez évoquait la compensation financière insuffisante pour la mise en place du service minimum d’accueil des enfants dans les écoles.
Deuxièmement, l’autonomie fiscale locale a été substantiellement réduite par la suppression de la taxe d’habitation.
Troisièmement, les collectivités sont mises à contribution pour des chantiers colossaux, qu’il s’agisse de la transition énergétique ou du logement.
La préoccupation des élus locaux est d’autant plus grande que les recettes fiscales locales ont été plus dynamiques que prévu en 2021, ce qui pourrait servir de prétexte pour amputer encore les dotations.
Monsieur le ministre, ma question est simple : pouvez-vous nous garantir que la DGF ne sera pas, une fois de plus, une variable d’ajustement et l’instrument du redressement des comptes publics ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées du groupe Les Républicains. – Mme Cathy Apourceau-Poly applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des comptes publics.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics. Madame la sénatrice, vous m’interrogez à la fois sur la situation des finances locales et sur les perspectives en matière de dotation.
Votre question tombe à pic, si vous me permettez cette expression : j’ai présenté ce matin aux associations d’élus et aux responsables des délégations aux collectivités territoriales du Parlement le bilan de l’exécution comptable des collectivités pour 2021.
Il s’agit d’une année de reprise, ce qui est une bonne nouvelle. Les recettes fiscales sont dynamiques ; les compensations apportées pendant la période de crise ont joué le rôle que nous attendions. Nous constatons à la fois une reprise très forte de l’épargne brute et de l’épargne nette des collectivités, une capacité à faire face aux engagements et une dynamique pour l’année 2022 qui s’annonce particulièrement bonne.
À titre d’exemple, les fractions de TVA affectées aux collectivités régionales, départementales ou intercommunales vont augmenter de 6 %, soit 2 milliards d’euros.
Par ailleurs, comme vous le savez, la révision des valeurs locatives de 3,4 % pour 2022 va entraîner une progression des recettes de la taxe foncière de 1,6 milliard d’euros.
À la fin de l’exercice 2021 et au regard de leurs niveaux d’épargne brute et de trésorerie, on peut dire que la situation des collectivités est globalement meilleure – il y a toujours des situations particulières – qu’au début du quinquennat.
Cela a été possible, parce que nous avons maintenu l’enveloppe globale de la DGF à 27 milliards d’euros et parce que nous avons maintenu les dotations d’investissement à leur niveau.
Cela a également été possible, parce que, au moment de la crise sanitaire, nous avons mobilisé un filet de sécurité de 9,3 milliards d’euros sur deux ans pour aider les collectivités à compenser les pertes de recettes fiscales et domaniales et accompagner leurs régies. Nous avons mobilisé 2,5 milliards d’euros d’aides exceptionnelles à l’investissement et nous avons accompagné les autorités organisatrices de mobilité.
Ce gouvernement, madame la sénatrice, a tenu un engagement majeur du Président de la République, à savoir la stabilité des dotations, la visibilité, ainsi que la compensation intégrale des recettes fiscales que nous avons supprimées à l’occasion de telle ou telle réforme – je pense notamment à celle de la taxe d’habitation.
Permettez-moi un trait de malice. Vous me demandez de prendre un engagement : si ce que nous avons fait depuis cinq ans vous convient davantage que ce qui avait été réalisé précédemment, gardez-nous ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
Mme Sophie Primas. C’était un gouvernement que vous souteniez, à l’époque…
situation des finances publiques
M. le président. La parole est à Mme Christine Lavarde, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Christine Lavarde. « Il nous faudra engager des réformes structurelles et réduire les dépenses publiques. Ne laissons pas croire aux Français que l’on pourra réduire la dette uniquement par la croissance. »
Monsieur le Premier ministre, ces paroles ne sont pas celles d’un représentant de l’une de vos oppositions. Ce sont les propos tenus par l’un de vos ministres devant la commission des finances du Sénat.
Des mots à la réalité, il y a un grand pas !
Déjà, en 2017, le candidat Macron appelait au sérieux et à la responsabilité en matière de finances publiques, car, selon son document programme, « l’État est lourdement endetté ».
Son premier engagement était de réduire les déficits en réalisant 60 milliards d’euros d’économies. Cinq ans plus tard, comme le rapporteur général de la commission des finances le rappelle assez souvent, la dépense courante a augmenté de 60 milliards d’euros…
Son deuxième engagement était de faire des choix et de cibler un petit nombre de dépenses prioritaires. Cinq ans plus tard, après le « quoi qu’il en coûte » sanitaire, nous vivons depuis quelques mois le « quoi qu’il en coûte » électoral ! Pas moins de 25 milliards d’euros de dépenses supplémentaires ont été annoncés depuis le mois de juillet dernier, hors plan de relance et hors plan France 2030.
Le rapport sur la France du Fonds monétaire international (FMI) publié le 26 janvier préconise de revenir à un déficit de 3 % dès 2025 et de procéder à un ajustement budgétaire important à partir de 2023.
Vous avez décidé de reporter après les échéances électorales la publication du programme de stabilité et du programme national de réforme. Pour autant, la représentation nationale et les Français sont en droit de connaître les réformes structurelles que vous envisagez de mettre en œuvre. Ma question est simple : quelles sont-elles ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Catherine Morin-Desailly applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Jean Castex, Premier ministre. Madame la sénatrice, vous abordez un sujet grave et structurel auquel, croyez-le bien, j’attache une importance toute particulière.
Je pourrais vous répondre longuement, car l’équilibre des finances publiques – je veux le dire à tous nos concitoyens – est un sujet qui, comme vous le soulignez, doit être traité avec beaucoup de respect. La restauration des comptes publics est en effet une question de souveraineté !
Premier élément : jusqu’à ce qu’un « tout petit » événement soit venu frapper le pays au début de l’année 2020, les finances publiques de la France étaient en voie de redressement ! (On le conteste à droite.) C’est un fait, quoi que vous puissiez en dire !
En 2019, dernier exercice comptable clôturé avant le début de la crise, le déficit public était repassé en dessous de la barre des 3 %. Ce n’est pas moi qui le dis, d’autant que je n’étais pas Premier ministre à l’époque, c’est la Commission européenne.
Dois-je rappeler que la procédure engagée par la Commission européenne contre la France pour déficit excessif était encore en cours au début du quinquennat et qu’elle a été levée avant le début de la crise sanitaire ? Voilà les faits ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – M. Bernard Fialaire applaudit également.)
On peut dire que ce n’est pas assez, que cela ne va pas assez vite. On peut aussi dresser un historique des finances publiques, j’y suis prêt !
Puis est arrivée la crise, qui a été considérable, brutale et profonde.
M. Laurent Duplomb. Elle a eu lieu dans tous les pays !
M. Dominique de Legge. Elle a bon dos !
M. Jean Castex, Premier ministre. Pas du tout ! C’est simplement la vérité ! Et nous devons être fiers de ce que nous avons fait !
La crise sanitaire – nous en avons beaucoup parlé ici – a eu des conséquences économiques considérables. En 2020, le PIB a chuté de 9 %. Je fais partie de ceux qui ont bien connu la précédente grave crise que la France a traversée, celle des subprimes de 2008-2009. À cette occasion, le PIB avait chuté de 3 % : c’était déjà considérable, mais c’est trois fois moins qu’en 2020 !
M. Vincent Segouin. Et l’Allemagne ?
M. Jean Castex, Premier ministre. Le Président de la République a décidé de mettre en place le « quoi qu’il en coûte » pour éviter que notre économie, c’est-à-dire ses entreprises et leurs salariés, ne s’effondre. Immédiatement après, nous avons mis en œuvre un plan de relance à hauteur de 100 milliards d’euros, auquel vous avez fait allusion.
Il était absolument indispensable de prendre ces décisions. Elles ont permis de faire la différence avec la crise de 2008-2009 durant laquelle la France, qui le voulait, n’avait pas pu prendre de telles mesures.
Ces mesures étaient nécessaires ; elles ont fonctionné, parce qu’elles ont été décidées dans un cadre européen coordonné. Vous savez d’ailleurs toutes et tous que 40 % du plan de relance français sera remboursé par l’Union européenne.
Vous savez aussi toutes et tous qu’une telle politique budgétaire ne peut fonctionner que si elle s’accompagne d’une politique monétaire adaptée. La Banque centrale européenne a joué son rôle en ce sens et elle continue de le faire. Tout cela marche (Remarques ironiques sur des travées du groupe Les Républicains.), puisque la France a enregistré 7 % de croissance en 2021.
Mme Sophie Primas. Après une baisse de 9 %…
M. Jean Castex, Premier ministre. Vous avez cité le FMI ; je lis toutes ses publications !
Je connais également bien cette noble institution qu’est la Cour des comptes. J’ai pris connaissance de son dernier rapport et je sais comment elle travaille, rassurez-vous !
Selon le rapport du FMI, la France devait retrouver la croissance qu’elle connaissait en 2019, soit avant la crise, au début de l’année 2022. Les Françaises et les Français ont atteint cet objectif à l’été 2021 !
Évidemment, cela a accru notre déficit budgétaire et notre dette. (Exclamations sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. Laurent Duplomb. Et ce n’est pas grave ?
M. Jean Castex, Premier ministre. Nous avons une stratégie de redressement, mais ce ne sera pas la purge que nous avons subie entre 2011 et 2012. (Ah ! à gauche.)
Cette purge, qui nous a été en partie imposée par l’Union européenne et que nous payons encore selon tous les experts, n’a pas eu l’effet escompté. Elle a relancé le chômage, alors que celui-ci se trouve aujourd’hui au plus bas et à un niveau que nous ne connaissions plus depuis des années ! (On ironise à droite.)
Pensez aux jeunes ! Lors de la précédente crise, le chômage des jeunes avait explosé de 31 % ; aujourd’hui, il baisse de 10 %. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – M. Bernard Fialaire applaudit également.)
Ce résultat, nous le devons à l’apprentissage. Vous y avez toujours été favorables ; nous l’avons fait, puisque nous avons formé 725 000 apprentis l’année dernière, et c’est au bénéfice de nos concitoyens. On n’avait jamais vu cela ! (Mme Sophie Primas proteste.)
Il faut tout d’abord redresser la croissance pour diminuer notre déficit budgétaire. Il faut ensuite définir une trajectoire : 5 % cette année, cap sur 3 % en 2027. Cet objectif est jugé raisonnable par les organismes de prévision ; il peut être atteint grâce à des réformes structurelles, en particulier celle des retraites, qui doit venir au bon moment – l’art de la réforme, c’est de choisir le bon moment ! (Mmes Sophie Primas et Dominique Estrosi Sassone s’esclaffent.)
La France, par son travail, remboursera ses dettes et se félicitera des choix économiques qui ont été faits pendant la gestion de cette crise ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées des groupes RDSE et UC.)
M. le président. La parole est à Mme Christine Lavarde, pour la réplique.
Mme Christine Lavarde. Je vous remercie, monsieur le Premier ministre, d’avoir pris le temps de me répondre. Vous avez parlé de stratégie, mais je n’en ai décelé aucune dans vos propos !
Vous avez aussi évoqué le redressement des finances publiques entre 2017 et 2019. Or, si l’on met en base 100 la dette des pays de l’Union européenne en 2017, la dette de la France n’évoluait pas, tandis que celles de l’Irlande et des Pays-Bas, par exemple, diminuaient de 15 points. Vous vous réjouissez d’une stabilité, mais d’autres pays ont amélioré leur situation durant la même période !
Vous avez parlé de souveraineté au sujet de nos dépenses publiques. C’est une question tellement importante que le ministre de l’économie a dû préciser, dans sa réponse à la Cour des comptes, que la qualité de la dette française n’était pas en cause au regard de notre situation…
Si Emmanuel Macron, ancien conseiller à l’Élysée, ancien ministre de l’économie, puis Président de la République, avait géré les finances de la France comme l’ont été celles de l’Allemagne, notre pays enregistrerait aujourd’hui 1 000 milliards d’euros de dette en moins, soit l’équivalent de dix plans de relance ou de trente plans France 2030 ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Catherine Morin-Desailly applaudit également.)
recapitalisation d’edf
M. le président. La parole est à M. Thierry Cozic, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Thierry Cozic. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’économie, des finances et de la relance. En son absence, c’est certainement Mme la secrétaire d’État chargée de l’économie sociale, solidaire et responsable qui me répondra…
Madame la secrétaire d’État, le Gouvernement a annoncé une recapitalisation du groupe UDF… (Rires et applaudissements sur de nombreuses travées.) Je voulais bien sûr parler du groupe EDF – c’est un lapsus révélateur ! (Nouveaux rires.)
De prime abord, cette décision est louable, mais cela semble aussi être un peu l’arbre qui cache la forêt. De fait, l’État actionnaire est de nouveau tombé dans ses pires travers. Les 2,1 milliards d’euros que vous allez faire payer au contribuable vont compenser d’une main ce que votre mesure sur le plafonnement tarifaire a pris de l’autre.
Par cette recapitalisation, le Président candidat, qui se veut le Président du pouvoir d’achat, devient celui du pouvoir de rachat ! Or ce rachat se fait au détriment de l’intérêt général pour restaurer la confiance des investisseurs privés.
La confiance n’a pas de prix et il va en falloir au vu de l’ampleur des chantiers qui attendent EDF dans les cinquante prochaines années.
Comme je le déplorais il y a un mois, ce tour de passe-passe masque mal votre absence de vision à long terme en faveur d’une politique énergétique sérieuse en France. La politique du carnet de chèques ne peut pas constituer l’horizon indépassable de vos investissements en matière d’énergie.
Nous avons déjà perdu cinq ans, nous ne pouvons plus attendre. La crise ukrainienne nous prouve que nous devons être le moins dépendants possible d’entités extérieures.
Au-delà de la question énergétique, c’est un problème de souveraineté nationale qui s’impose à nous, et ce alors que nous évoluons dans un monde de plus en plus conflictuel.
Il faut absolument que l’État agisse en stratège. Il y va de la protection du pouvoir d’achat de nos concitoyens. Vos « mesurettes » ne contiennent que trop peu la flambée des factures d’énergie que vit le pays.
Madame la secrétaire d’État, quelles mesures structurelles envisagez-vous de prendre afin de garantir la pérennité et la viabilité financière du groupe EDF, conditions sine qua non au maintien d’une politique énergétique économiquement soutenable pour tous nos concitoyens ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de l’économie sociale, solidaire et responsable.
Mme Olivia Gregoire, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargée de l’économie sociale, solidaire et responsable. Monsieur le sénateur Cozic, je ne vous apprendrai rien, car je sais que Bruno Le Maire a eu l’occasion de vous le rappeler : EDF traverse un moment quelque peu particulier.
La production d’électricité en 2022 sera faible. Elle sera même au plus bas du fait de l’arrêt de plusieurs réacteurs, ce qui représente une perte de 11 milliards d’euros de revenus pour le groupe.
M. François Bonhomme. Il ne faut pas s’en étonner !
Mme Olivia Gregoire, secrétaire d’État. Dans le même temps, le Président de la République a annoncé depuis Belfort, il y a quelques jours, la nécessité d’investir dans la construction de six nouveaux réacteurs pressurisés européens, ou EPR, d’étudier la construction de huit autres et de lancer cinquante nouveaux champs éoliens.
Vous le savez, nous limitons l’augmentation de la facture d’électricité des Français à 4 %. Vous parlez de « mesurette » : il s’agit tout de même d’une grosse mesurette, puisque cet effort, considérable, d’EDF représente un coût estimé entre 7,7 milliards d’euros et 8,4 milliards !
M. François Bonhomme. Cela ne marche qu’une fois !
Mme Olivia Gregoire, secrétaire d’État. Dans ces conditions, nous n’aurons de cesse de le rappeler : l’État n’abandonne pas et n’abandonnera pas EDF.
En qualité d’actionnaire de contrôle d’EDF, l’État soutient totalement le plan d’action de l’entreprise, adopté par son conseil d’administration il y a quelques jours. L’augmentation du capital de 510 millions d’actions se traduira pour l’État, qui détient près de 84 % du capital, par une souscription de 415 millions, avec maintien du droit préférentiel, ce qui représente un apport à EDF de la part de l’État de 2,1 milliards d’euros.
Par ailleurs, monsieur le sénateur, l’État va prolonger, au moins pour les exercices 2022 et 2023, son engagement actuel, qui consiste à percevoir ses dividendes en titres, comme le proposera l’entreprise à l’ensemble de ses actionnaires.
Il s’agit donc d’un double engagement, à la fois pour aujourd’hui et pour demain. L’État réaffirme ainsi sa confiance dans la direction de l’entreprise et dans l’ensemble de ses salariés, ce qui permettra à EDF de restaurer ses comptes, tout en continuant d’investir dans l’avenir. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
politique du gouvernement en matière d’éducation
M. le président. La parole est à M. Max Brisson, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Max Brisson. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
Monsieur le ministre, c’est la Cour des comptes qui le dit – il est donc inutile de vous mettre, comme hier, en colère contre moi – : la performance du système éducatif français reste médiocre malgré l’importance des moyens mobilisés, les systèmes scolaires les plus performants sont ceux qui donnent le plus de place à chaque établissement, qui fédèrent la communauté éducative autour d’un projet et qui encouragent les enseignants à être novateurs.
Que constate la Cour des comptes pour la France ? Une autonomie des établissements très encadrée, un système éducatif très centralisé et une chaîne managériale qui contrôle fortement les marges d’action des établissements.
C’est encore la Cour qui note que seulement 10 % des décisions éducatives sont prises au niveau des établissements et 2 % à peine en autonomie totale.
Ma question est donc simple : monsieur le ministre, vous qui êtes depuis cinq ans aux manettes, que pensez-vous de ce constat implacable de la Cour des comptes ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Catherine Morin-Desailly applaudit également.)