M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Mizzon, auteur de la question n° 1861, adressée à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
M. Jean-Marie Mizzon. À ce jour, sur les quelque 20 000 vétérinaires que compte la France – dont 55 % sont des femmes –, seuls 4 000 exercent en zone rurale. C’est pourtant là que se trouve la très grande majorité des animaux.
Par conséquent, force est de constater qu’aujourd’hui en France, le métier de vétérinaire en zone rurale est en voie de quasi-disparition.
Cette profession doit, il est vrai, faire face à des journées harassantes aux amplitudes horaires hors norme, qui plus est rythmées par d’incessants déplacements. Les mesures prises par le Conseil national de l’ordre des vétérinaires, ainsi que la loi du 3 décembre 2020 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière économique et financière, qui permet aux collectivités territoriales d’attribuer des aides à ceux qui décident de soigner des animaux d’élevage dans des zones définies comme des déserts vétérinaires, vont dans le bon sens.
Elles gagneraient toutefois à être accompagnées d’une baisse des charges – très, voire trop importantes dans cette corporation – pour les jeunes diplômés, dont plus de 70 % sont des femmes, qui choisiraient d’exercer en zone rurale.
Madame la ministre, le Gouvernement serait-il prêt à intervenir en ce sens ? Plus largement, quelles mesures envisage-t-il de prendre pour que cette profession se porte mieux en milieu rural ? Il y a urgence dans tous nos territoires.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée auprès de la ministre des armées, chargée de la mémoire et des anciens combattants. Monsieur le sénateur, je vous prie d’excuser le ministre de l’agriculture et de l’alimentation, qui m’a demandé de répondre à cette question importante.
Vous abordez un sujet essentiel, celui du maillage territorial des vétérinaires qui vise à assurer la sécurité sanitaire des élevages et qui participe également au maintien de l’activité agricole et du dynamisme des territoires.
Comme vous le rappelez très justement, de nombreux facteurs peuvent décourager l’installation des jeunes vétérinaires, dont la difficulté d’exercice et les obstacles liés à la rentabilité économique de l’activité.
La loi du 3 décembre 2020 dont vous avez parlé, monsieur le sénateur, entraîne de nettes améliorations et comporte de fortes incitations. Elle fournit en effet une aide financière substantielle à tout vétérinaire qui s’engage à travailler dans un territoire en demande de vétérinaires ruraux. Cette aide pourra s’exercer sous diverses formes, telles que la prise en charge des frais d’investissement, le versement d’une prime d’exercice ou encore la mise à disposition d’un logement ou d’un local professionnel. Son montant pourra atteindre 60 000 euros par an, ce qui est significatif.
La formation en école vétérinaire et l’accès à ces études constituent également des enjeux importants. La première année est désormais accessible aux jeunes qui ont obtenu un baccalauréat en lycée agricole. Il s’agit là d’un élément essentiel.
De plus, 80 % des étudiants qui ont recours au système du tutorat en dernière année restent en milieu rural. Ce dispositif est financé par le ministère de l’agriculture et de l’alimentation et peut être soutenu également, bien sûr, par les collectivités territoriales.
Enfin, le ministère de l’agriculture a lancé un appel à manifestation d’intérêt, le 18 janvier dernier, afin de sélectionner six territoires désireux de réfléchir aux causes et aux remèdes de la désertification vétérinaire. Je crois que c’est en passant par les territoires, par leur expérience et par leurs propositions, que nous arriverons à mettre en œuvre des mesures supplémentaires plus concrètes.
M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Mizzon, pour la réplique.
M. Jean-Marie Mizzon. Madame la ministre, merci de votre réponse. J’observe qu’elle se limite au constat d’une situation difficile et qu’elle se borne à la description des dispositifs existants.
Je vous demandais plus que cela, mais je sais que la question des soins vétérinaires ne relève pas des attributions de votre ministère, de sorte qu’il vous est bien difficile de répondre à la place de la personne concernée. Néanmoins, madame la ministre, soyez-en remerciée.
refonte de la politique forestière
M. le président. La parole est à M. Mathieu Darnaud, auteur de la question n° 2047, adressée à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
M. Mathieu Darnaud. En matière de ruralité, les communes forestières jouent un rôle important. Celles-ci ne souhaitent pas la disparition de l’Office national des forêts (ONF), qui gère plus de six millions d’hectares, dont la moitié en forêt communale.
Toutefois, tout en reconnaissant les compétences de ces personnels sur le terrain, nous pouvons comprendre qu’elles réclament davantage de transparence et de rigueur dans la gestion d’un établissement dont le déficit annuel varie entre 50 millions et 100 millions d’euros.
Reculant devant leur mobilisation, le Gouvernement a abandonné son projet de nouvelle ponction sur les 14 000 communes relevant du régime forestier, ce qui a permis la reprise des négociations de la convention entre l’État et l’ONF.
Cependant, les communes forestières ne peuvent demeurer la variable d’ajustement de l’équilibre du budget de l’ONF pour combler les défaillances de l’État. Un débat doit donc s’ouvrir sur la nature du versement compensateur de 140 millions d’euros reçu de l’État dans le cadre de l’action de l’ONF auprès des communes. Si certaines communes y voient un investissement, voire une péréquation pour les services rendus à la forêt, d’autres le considèrent comme une subvention d’équilibre finançant le déficit de gestion des forêts des collectivités.
Afin de répondre à ce problème, les communes forestières ont proposé la création d’une grande administration chapeautant l’ensemble des forêts, le renforcement du régime forestier pour les forêts publiques ainsi qu’une séparation nette au sein de l’ONF entre les missions de service public et les activités marchandes.
Madame la ministre, ma question est simple : je souhaite savoir si le Gouvernement envisage de refonder la politique forestière en écoutant ce qu’ont à dire les communes concernées.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée auprès de la ministre des armées, chargée de la mémoire et des anciens combattants. Je suis originaire d’un département rural, forestier et agricole. Ce sont donc des sujets dont je suis familière, même si je ne suis pas au ministère de l’agriculture.
Monsieur le sénateur, pour conduire une politique forestière et de développement des usages du bois ambitieuse, l’État a besoin d’un ONF fort et performant. Cet établissement représente à ses yeux un outil précieux.
Ainsi, le Gouvernement a décidé de renouveler, dans le cadre du contrat État-ONF 2021-2025, sa confiance en l’ONF, garant de la gestion durable et multifonctionnelle des forêts publiques, tout en engageant des mesures importantes visant à lui redonner des perspectives soutenables. En effet, comme vous l’avez souligné, il faut que l’ONF équilibre ses activités et son budget.
Ce contrat conforte notamment les missions d’intérêt général assumées par l’ONF et consacre la notion de prise en charge à coût complet de ces missions, quel qu’en soit le commanditaire, en commençant par l’État. Les régularisations ont été effectuées sur les budgets 2021 et 2022.
Le versement compensateur aux coûts liés à l’application du régime forestier aux forêts communales est par ailleurs maintenu. Il convient de rappeler que les communes forestières contribuent à ces coûts à hauteur d’environ 17 %.
En parallèle, le Gouvernement décide de mobiliser 60 millions d’euros supplémentaires répartis entre 2021 et 2023 pour soutenir son établissement en renforçant la subvention d’équilibre.
Enfin, dans le cadre du plan France Relance, une dotation de 30 millions d’euros a été allouée pour 2021 à l’ONF, afin de financer la reconstitution des forêts domaniales atteintes par les crises sanitaires.
Le soutien aux investissements de renouvellement forestier se poursuivra, bien sûr, en 2022. Le plan d’investissement France 2030 prendra ensuite le relais.
En contrepartie de ces engagements, l’État demande à l’ONF un effort de modernisation et de réduction de ses charges. L’établissement s’est engagé dans un plan de modernisation à hauteur de 4 millions d’euros dès 2022.
prévention de nouvelles vagues d’influenza aviaire
M. le président. La parole est à M. Max Brisson, auteur de la question n° 2123, adressée à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
M. Max Brisson. En mars dernier, j’appelais déjà l’attention du ministre de l’agriculture et de l’alimentation sur les conséquences de l’influenza aviaire sur nos élevages de canards et d’oies.
Comme vous le savez, depuis le mois de décembre dernier, en particulier, la France affronte une nouvelle vague d’épidémie et nos éleveurs sont confrontés à des mesures d’abattage massif et préventif.
Les Landes et des Pyrénées-Atlantiques sont durement touchées. Au 2 février, dans ce dernier département, 64 foyers ont été détectés, 353 communes ont été placées en zone réglementée et 26 autres en zone de dépeuplement préventif. Nos éleveurs vivent un nouveau drame.
Je réitère mes questions au Gouvernement : pourquoi ne pas avoir travaillé à une modulation des abattages pour tenir compte de la diversité des formes d’élevage ? Que répond le Gouvernement aux craintes des éleveurs de ne plus pouvoir exercer le savoir-faire de l’élevage en plein air et de devoir appliquer la claustration ? Surtout, face à ces crises à répétition, ne devrions-nous pas, une bonne fois pour toutes, lever le tabou de la vaccination aviaire ?
Je ne fais pas fi de la question de l’exportation, je ne demande pas d’autoriser des campagnes de vaccination préventive systématiques, mais de les autoriser dès que les alertes de l’influenza aviaire sont détectées sur les couloirs de migration.
Aussi, madame la ministre, je renouvelle ma question : où en est le Gouvernement dans sa réflexion sur la vaccination aviaire et sur les expérimentations ? Dans le cadre de protocoles stricts, des campagnes de vaccination préventive ne sont-elles pas une des réponses possibles pour faire face à ce drame ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée auprès de la ministre des armées, chargée de la mémoire et des anciens combattants. Monsieur le sénateur, vous l’avez dit, cette influenza aviaire qui circule encore cet hiver dans nos départements a emporté de lourdes conséquences, en particulier dans le Sud-Ouest, où elle n’a pas touché que les palmipèdes, mais toutes les volailles, poulets, poules et dindes. Cette année, l’épidémie est donc encore plus difficile pour nos agriculteurs.
La crise que traverse à nouveau ce secteur est dramatique et il faut envisager des solutions complémentaires aux mesures de biosécurité dont nous avons parlé.
C’est dans cet esprit que le ministre de l’agriculture et de l’alimentation a souhaité qu’une réflexion sans tabou sur la vaccination soit engagée dès l’été 2021, dans le cadre de la concertation autour de la signature de la nouvelle feuille de route contre l’influenza.
Les modalités de lutte contre l’influenza aviaire hautement pathogène (IAHP) qui atteint, cette année, nos élevages ne doivent pas seulement évoluer, mais aussi être envisagées avec méthode et dans la concertation. Vous savez que la vaccination des volailles est interdite par la réglementation européenne, sauf autorisation explicitement demandée et accordée par la Commission européenne.
La mise en place d’une stratégie vaccinale dans le territoire doit par ailleurs faire l’objet d’un consensus de l’ensemble des acteurs de la filière concernée, ce qui est peut-être le cas aujourd’hui, alors que cela ne l’était pas forcément l’année dernière.
Afin de prouver que cette vaccination est efficace, nous avons besoin de mener une expérimentation sur une petite quantité de volailles. Pour avancer sur ce volet, celle-ci va être initiée à partir du mois de mars prochain pour deux candidats vaccins.
Vous le voyez, monsieur le sénateur, nous avançons. Nous n’en sommes pas encore au stade de vacciner massivement les volailles ; nous souhaitons mettre en œuvre ce moyen de lutte prometteur à disposition des acteurs de la filière, sur des bases scientifiques fiables et de façon sécurisée.
M. le président. La parole est à M. Max Brisson, pour la réplique.
M. Max Brisson. Merci, madame la ministre, de ces réponses que j’attendais.
Oui, la réflexion doit être sans tabou ; oui, il faut une stratégie vaccinale ; oui, le consensus progresse.
Ne pas vacciner revient à mettre en danger la pérennité des indications géographiques protégées (IGP) et des labels, et à renoncer à l’élevage en plein air en période de migration. Il y a urgence ; j’espère que la mise en œuvre de ce processus sera rapide.
conditions d’éligibilité à l’appel à manifestation d’intérêt pour le renouvellement forestier
M. le président. La parole est à Mme Frédérique Puissat, auteur de la question n° 1875, adressée à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
Mme Frédérique Puissat. Ma question porte sur les conditions d’éligibilité aux volets 2 et 3 de l’appel à manifestation d’intérêt (AMI) pour le renouvellement forestier.
Cet AMI, annoncé dans le cadre du plan France Relance, a généré un engouement des propriétaires et des gestionnaires forestiers de l’Isère, comme de toute la France.
Ses volets 2 – renouvellement des forêts vulnérables – et 3 – transformations des peuplements pauvres – correspondent aux besoins locaux. C’est le cas en Isère, où 500 hectares de travaux ont déjà été identifiés en forêt publique, correspondant à 750 000 euros de besoins de financement pour 1,25 million d’euros de travaux.
Or le ministre de l’agriculture a indiqué le 16 février 2021 que les seuls projets de plantations recevables à l’AMI sont ceux qui ont fait l’objet de travaux de récolte en amont, avec une date butoir précise.
En Isère, comme dans d’autres départements français, cette contrainte de coupes préalables a entravé la quasi-totalité des projets d’enrichissement de forêts. Le président du département, M. Jean-Pierre Barbier, a interpellé le ministre sur ce sujet le 8 juin dernier.
Il semble que cette contrainte ait, depuis lors, été prise en compte et qu’un décret plus souple quant à la date butoir de travaux de récolte, voire quant à la nécessité même de cette récolte, soit en cours de rédaction.
Madame la ministre, pouvez-vous nous indiquer si ce décret va sortir, à quelle date, et quelle sera la nature de son contenu, afin de rassurer les propriétaires et les présidents des associations des communes forestières ? J’en profite pour saluer M. Guy Charron, président de celle de l’Isère.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée auprès de la ministre des armées, chargée de la mémoire et des anciens combattants. Madame la sénatrice, vous l’avez dit, la mesure « Aider la forêt à s’adapter au changement climatique pour mieux l’atténuer » du plan France Relance mobilise des moyens inédits dans leur ampleur au service des forêts françaises, à destination des peuplements dépérissants – c’est le volet 1 –, vulnérables aux effets du changement climatique – c’est le volet 2 – ou pauvres – c’est le volet 3.
Pour accéder à ce dernier volet, la condition de coupe préalable est exigée lorsque le peuplement concerné présente une faible valeur sylvicole et que ses caractéristiques ne permettent pas d’envisager une amélioration de cette valeur dans l’avenir. Cette obligation est encadrée par le schéma régional de gestion sylvicole (SRGS), qui constitue une déclinaison de la politique forestière nationale et de ses objectifs, adaptée aux spécificités des forêts privées régionales.
S’agissant des trouées, doivent être distinguées celles qui sont réalisées volontairement en vue de leur régénération et celles qui sont subies, à la suite d’un événement indépendant de la volonté du propriétaire.
Dans le cadre du plan France Relance et dans le prolongement des dispositifs d’aides antérieurs, le choix a été fait d’accompagner en priorité les chantiers correspondants au deuxième cas, afin de garantir le caractère incitatif de ce dispositif.
Néanmoins, à la suite d’échanges conduits avec les professionnels de la filière forêt-bois, des assouplissements de ces critères d’éligibilité seront prochainement mis en œuvre. Ces évolutions permettront notamment d’ouvrir le dispositif aux futaies irrégulières, le mode de gestion le plus courant et le plus adapté aux zones de montagne, sans exiger de coupes préalables, afin de tenir compte des surcoûts d’exploitation en montagne qui réduisent la valeur des bois et limitent ainsi les capacités financières de réinvestissement.
Tout cela sera mis en œuvre très rapidement.
M. le président. La parole est à Mme Frédérique Puissat, pour la réplique.
Mme Frédérique Puissat. Le « prochainement » m’inquiète. Pourrions-nous obtenir une réponse précise de la part du ministre ? Celle-ci est attendue par les professionnels, par les communes gestionnaires de forêts publiques et par les propriétaires privés. Nous préparons un courrier, mais nous aimerions recevoir cette réponse.
conséquences de l’augmentation du prix de l’énergie pour les collectivités locales
M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey, auteur de la question n° 2097, transmise à M. le ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics.
M. Hervé Maurey. Je souhaite attirer l’attention du Gouvernement sur les conséquences de l’augmentation du prix de l’énergie pour les collectivités locales.
Les particuliers et les entreprises ne sont pas les seuls à faire face à cette augmentation ; les collectivités locales, notamment les communes, n’y échappent pas, malgré les affirmations contraires du Gouvernement. Certaines associations d’élus estiment d’ailleurs, sur la base d’une consultation de leurs membres, que ces augmentations sont comprises entre 30 % et 300 %, selon les collectivités.
Je peux citer l’exemple d’une commune de mon département, Charleval, qui m’a saisi. Son fournisseur de gaz vient de lui annoncer que la facture passerait de 60 000 euros en 2021 à 100 000 euros en 2022, soit une augmentation de 67 %.
Les collectivités locales, plus particulièrement les communes, seront donc très prochainement contraintes de répercuter ces dépenses supplémentaires, soit en augmentant leur fiscalité soit en abandonnant des projets.
Je souhaite donc savoir quand le Gouvernement compte sortir du déni dans lequel il est et prendre les mesures qui s’imposent pour aider les collectivités locales à faire face à cette augmentation supplémentaire.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargée de l’industrie. Monsieur le sénateur Hervé Maurey, comme vous le savez, nous faisons face à une hausse sans précédent des prix de l’électricité ces dernières semaines, dans un contexte de tension sur la disponibilité des installations de production française et sur l’approvisionnement gazier de l’Europe.
Ces hausses touchent toute l’Europe, tous les secteurs et tous les consommateurs. Pour faire face à cette situation temporaire et préserver le pouvoir d’achat des Français, le Gouvernement a décidé de prendre des mesures exceptionnelles de soutien.
Nous avons abaissé la taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité (TICFE) de 8 milliards d’euros en 2022, de sorte qu’elle est annulée dans sa quasi-totalité pour l’ensemble des consommateurs ; nous avons distribué un chèque énergie exceptionnel de 100 euros à 5,8 millions de ménages, qui en avaient déjà reçu un autre d’un montant moyen de 150 euros en avril 2021 ; nous avons augmenté de 20 térawattheures le volume de l’accès régulé à l’électricité nucléaire historique (Arenh), mis à disposition de tous les consommateurs à 46,20 euros le mégawattheure, au lieu de 200 euros, qui est le coût actuel du marché.
Vous le savez, les communes bénéficieront de la baisse de la TICFE dans les mêmes conditions que les autres consommateurs.
En outre, pour les plus petites collectivités territoriales, qui sont soumises au tarif réglementé, la hausse du prix de l’électricité sera limitée à 4 %. Les collectivités au tarif réglementé sont celles qui emploient moins de dix personnes, avec des recettes réelles de fonctionnement de moins de 2 millions d’euros. Pour les autres, la hausse des prix de l’électricité sera diminuée grâce à la hausse du volume de l’Arenh. Tous ces dispositifs qui concernent les Français s’appliquent aussi aux collectivités territoriales.
Plus structurellement, l’État accompagne ces dernières pour les aider à faire des économies d’énergie à moyen terme, et c’est cela, le combat que nous devons mener. À titre d’illustration, l’État a soutenu financièrement les collectivités territoriales par l’intermédiaire de la dotation de rénovation énergétique, pour laquelle 933 millions d’euros ont été mobilisés en 2021, afin de financer près de 3 500 projets sur lesquels nous avons un retour, avec des économies significatives à la clé.
M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey, pour la réplique.
M. Hervé Maurey. Madame la ministre, je suis absolument stupéfait.
Je vous interroge sur les collectivités locales et vous me répondez sur les ménages, sur les entreprises, par des généralités. Au moins M. Dussopt avait-il évoqué, l’autre jour, la revalorisation des bases locatives ; je m’attendais à ce que vous fassiez de même, mais vous n’avez rien dit du tout.
Je ne sais pas ce que je vais répondre aux élus qui m’ont interpellé à ce sujet, sinon que le Gouvernement ne propose rien et n’est apparemment même pas conscient du problème, puisque vous ne m’avez pas répondu.
Une fois de plus, les collectivités locales, lesquelles, déjà, n’ont pas été compensées des conséquences financières de la crise sanitaire, ne se voient rien proposer par le Gouvernement pour les aider à faire face à cette situation. Je le regrette.
conséquences de l’inflation sur le financement des projets locaux
M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, auteure de la question n° 2126, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics.
Mme Corinne Féret. Madame la ministre, je souhaite vous alerter sur les conséquences de l’inflation sur le financement des projets locaux.
Il convient, tout d’abord, de souligner que les hausses considérables des prix de l’énergie vont affecter rapidement et durablement les services publics locaux, dont les collectivités locales et leurs groupements assurent l’organisation et, parfois, directement la gestion.
Il appartient donc au Gouvernement de mettre en place des aménagements afin de permettre à ces derniers d’affronter cette crise et de préserver la continuité de services publics de qualité.
De façon concrète, l’inflation risque de se traduire par une augmentation très forte des coûts des projets locaux. À n’en pas douter, les plans de financement vont fortement déraper cette année, car les entreprises répercuteront les hausses des prix des matières premières, de l’énergie et des carburants sur les devis qu’elles proposeront aux collectivités territoriales.
Dans le même temps, les hypothèses budgétaires sur lesquelles les projets ont été bâtis, travaillées de longue date par leurs porteurs, en particulier pour faire des demandes de dotations, se révéleront obsolètes. Dans mon département du Calvados comme ailleurs, au moment de lancer les marchés, alors que les montants des dotations de l’État sont déjà connus, cela pourrait remettre en question nombre de projets.
Madame la ministre, pourriez-vous nous indiquer les solutions que le Gouvernement entend apporter aux élus locaux, qui craignent de voir les budgets prévisionnels déraper à cause de l’inflation et certains projets ne plus pouvoir être menés à terme ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargée de l’industrie. Madame la sénatrice Corinne Féret, merci de votre question, qui me permet de compléter la réponse faite à M. Maurey.
J’ai évoqué deux compartiments qui représentent plusieurs milliards d’euros et qui bénéficieront aux collectivités locales. Je le répète, parce que cela ne correspond pas à la seule épaisseur du trait.
J’ai mentionné la taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité (TICFE) de 8 milliards d’euros, qui ne concerne pas seulement les ménages, et l’augmentation de 20 térawattheures du volume de l’Arenh, qui est notre meilleur bouclier, puisque cela permettra de diviser par quatre le prix de la facture énergétique sur la partie dépendante de l’Arenh.
Les communes bénéficieront de la baisse de TICFE, le tarif des petites collectivités territoriales sera plafonné à 4 % et les autres bénéficieront de l’Arenh.
Plus structurellement, l’État continuera de soutenir l’investissement local, avec plus de 2 milliards d’euros de subventions en dotations d’équipement des territoires ruraux (DETR), en dotations de soutien à l’investissement local (DSIL) et en dotations politique de la ville (DPV) en 2022. Cette année, la DSIL augmente même de plus de 300 millions d’euros, pour financer les contrats de relance et de transition écologique (CRTE).
Grâce à ces dotations d’investissement, notamment les dotations exceptionnelles versées en 2020 et en 2021, l’État accompagne les collectivités territoriales pour les aider à réaliser des économies d’énergie à moyen terme.
À titre d’illustration, je mentionnais à l’instant les 933 millions d’euros mobilisés pour les dotations destinées à accompagner des projets de rénovation énergétique. Sur près de 3 500 projets pour lesquels nous disposons d’un retour, 2 700 atteignent ou dépassent une cible de 30 % d’économies d’énergie, soit une facture également diminuée de 30 %, et 1 200 produiraient plus de 50 % d’économies d’énergie.
Ces mesures structurelles me semblent plus fortes que toute forme d’aide à la petite semaine.
Par ailleurs, l’inflation aura des conséquences positives sur certaines ressources fiscales des collectivités, et vous le savez. C’est le cas des impôts assis sur les bases locatives cadastrales, lesquelles sont revalorisées chaque année en tenant compte de l’indice des prix ainsi que de la TVA, laquelle dépend du prix des consommations. En 2022, sa hausse devrait atteindre 6 % et rapporter 400 millions d’euros supplémentaires aux intercommunalités, plus de 800 millions d’euros aux départements et 800 millions d’euros aux régions.