M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, pour la réplique.
Mme Corinne Féret. Madame la ministre, j’entends bien ce que vous dites. Vous avez parlé « d’aide à la petite semaine » ! Comment osez-vous tenir de tels propos en direction des élus ?
J’aimerais revenir aux réalités du terrain, telles qu’elles me sont exposées, notamment, par les maires du Calvados. Les collectivités qui souhaitaient réaliser un investissement sur la base de plusieurs devis constatent, en ouvrant les offres pour le marché, que la crise actuelle est prétexte à des hausses de prix considérables.
Comment doivent-elles faire, dès lors ? À elles de trouver des solutions, parfois en retardant leur projet ou bien en ayant recours à l’endettement. Ce sont les seules réponses que vous leur apportez aujourd’hui.
raccordement final des abonnés
M. le président. La parole est à Mme Patricia Demas, auteure de la question n° 1929, adressée à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance et de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la transition numérique et des communications électroniques.
Mme Patricia Demas. Ma question porte sur la problématique du raccordement final des abonnés.
L’accélération massive du déploiement de la fibre en France s’est inscrite dans les modalités d’organisation de la filière fibre qui a confié, en pratique, à l’opérateur commercial, le raccordement du client final.
Le mode « sous-traitance opérateur commercial » (STOC) fait intervenir une chaîne de sous-traitants, lesquels peuvent être mal équipés et mal formés pour effectuer le raccordement final à l’abonné, donnant lieu à de nombreux cas de dysfonctionnement.
Les remontées du terrain montrent que les élus sont désignés comme responsables par les abonnés, qui leur font part, sur le terrain, de leur désapprobation. Le nombre d’usagers mécontents s’est d’ailleurs significativement accru depuis le début de la crise sanitaire.
Le mode STOC constitue encore la grande majorité des raccordements finaux et représente, sans équivoque, la principale menace quant à la résilience des réseaux fibre jusqu’à l’abonné (FttH).
Certes, des initiatives ont été prises, comme la feuille de route proposée par la fédération InfraNum en 2020. De son côté, l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep) a introduit des obligations de qualité de service pour les opérateurs d’infrastructures. Ceux-ci doivent s’engager contractuellement, depuis 2021, envers les opérateurs commerciaux, et devront, à compter de 2023, respecter des seuils réglementaires de qualité.
Ces nouveaux contrats devraient faire progresser la qualité des réseaux. Force est de constater qu’ils ne sont pas encore suffisamment partagés.
L’État pourrait, par exemple, prendre des mesures applicables aux opérateurs qui n’adhèrent pas au nouveau cadre contractuel ou qui ne mettent pas en place rapidement des indicateurs de qualité.
Dans ce contexte préoccupant, je souhaite connaître les mesures que compte prendre le Gouvernement en la matière.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargée de l’industrie. Madame la sénatrice Demas, les problèmes récurrents de qualité des raccordements de fibre optique que rencontrent les usagers, et desquels doivent répondre les élus et les services de l’État, ne sont pas acceptables.
Comme vous l’indiquez, le déploiement de la fibre a connu ces dernières années une accélération très importante du nombre de raccordements finaux. C’est un des éléments forts du bilan de ce gouvernement.
Au troisième trimestre 2021, plus de 28 millions de locaux ont été rendus raccordables, ce qui représente 67 % de couverture du territoire national et environ 20 000 prises déployées par jour, en moyenne, sur les six derniers mois pour lesquels les données sont disponibles.
Cette accélération ne doit pas se faire au détriment de la qualité des raccordements ni se traduire, entre autres, en échecs de raccordement, débranchements sauvages de clients ou dégradations d’infrastructures.
Dans ce contexte, les opérateurs d’infrastructures doivent identifier les éventuels dysfonctionnements et les résoudre ; les opérateurs commerciaux doivent, quant à eux, intervenir dans le respect des spécifications techniques et des règles de l’art sur les réseaux des opérateurs d’infrastructures.
Au-delà de cette responsabilité naturelle, plusieurs chantiers ambitieux ont été engagés sous l’égide de l’Arcep : évolutions des contrats de sous-traitance, meilleur contrôle par les opérateurs d’infrastructures, pénalités financières en cas de dégradations, protocoles de reprise des installations endommagées, meilleure maîtrise de la chaîne de sous-traitance, mobilisation d’outils pour s’assurer de l’absence de dégradations.
L’Arcep a publié le 25 novembre 2021 un plan d’action complémentaire pour améliorer encore la qualité de l’exploitation et des raccordements.
Le premier axe de ce plan vise la mise en place d’outils pour contrôler la qualité des interventions, permettant aux opérateurs d’identifier les éventuelles malfaçons. Le deuxième axe porte sur la formation des intervenants et la limitation des rangs de sous-traitance. Le troisième axe concerne la mise en œuvre de plans de remise en conformité des infrastructures.
L’Arcep s’est également dotée d’outils pour suivre qualitativement et quantitativement cette exploitation, comme la plateforme « J’alerte l’Arcep ».
Compte tenu des difficultés particulièrement aiguës observées sur certains réseaux, l’Arcep a récemment ouvert une enquête, en cours, à l’encontre de l’opérateur Xp Fibre sur le respect de l’obligation d’accès aux lignes FttH.
problèmes posés par l’apparition de nouveaux travaux dans les tracés utilisés pour l’installation de la fibre optique
M. le président. La parole est à Mme Else Joseph, auteure de la question n° 1940, adressée à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance et de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la transition numérique et des communications électroniques.
Mme Else Joseph. Nous nous réjouissons tous les jours du déploiement de la fibre optique dans notre département des Ardennes et de tout ce qui contribue au désenclavement numérique de nos communes, en particulier grâce au rôle décisif de la région Grand Est.
L’accès au numérique est une chance pour notre territoire et chacun sait qu’internet est devenu un outil indispensable à toute activité économique, artisanale et autre. Cette installation a nécessité des travaux de génie civil importants et coûteux. Le déploiement est en cours.
Cependant, des difficultés sont apparues dans certaines communes de mon département lorsque d’autres opérateurs numériques ont décidé d’utiliser le tracé mis en place par le prestataire de la région, Losange, en procédant à des travaux identiques, sans demander aucune autorisation, en particulier aux maires des communes.
Les élus et les habitants déplorent une absence de cohérence dans ces travaux, malgré des chantiers et des tracés similaires. Ils doivent faire face à des désagréments et à des nuisances incompréhensibles, alors que les travaux pour l’installation de la fibre optique s’étaient achevés il y a quelques semaines.
Les nouveaux travaux créent en effet des perturbations sur la voie publique. Pour les communes, cela a évidemment un coût, ne serait-ce que par l’obstruction ou l’immobilisation partielle de certaines voies. En outre, vous savez très bien, madame la ministre, que les travaux de comblement des tranchées sont parfois bâclés.
Ces travaux donnent l’impression de doublons, de dépenses superfétatoires, multipliant des contraintes inutiles qui auraient pu être évitées.
Il y a donc un véritable problème de mutualisation entre les différents opérateurs, dont les objectifs sont certes légitimes, mais les démarches incompréhensibles, en raison des complications entraînées.
Madame la ministre, que proposent les pouvoirs publics pour remédier à cette absence flagrante de concertation entre les opérateurs, même si la loi ne les oblige pas à mutualiser ?
Qu’envisagez-vous pour qu’il y ait mutualisation entre tous ceux qui empruntent les mêmes axes, au millimètre près ?
Surtout, que proposez-vous pour qu’il soit mis fin dans les plus brefs délais aux nuisances en tout genre subis par les habitants des communes concernées ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargée de l’industrie. Madame la sénatrice Else Joseph, le Gouvernement a fait de l’amélioration de la couverture numérique, fixe comme mobile, une priorité de son action, afin de permettre à l’ensemble des Français, quel que soit leur lieu de résidence, de bénéficier d’une couverture de qualité. L’enjeu était de rattraper le retard accumulé lors des mandatures précédentes.
Concernant la couverture mobile, en janvier 2018, le Gouvernement, l’Arcep et les opérateurs de téléphonie mobile sont parvenus à un accord historique, le New Deal mobile, visant à généraliser la couverture mobile de qualité pour tous les Français, afin de résorber les zones blanches.
S’agissant de la couverture fixe, le plan France Très Haut Débit a pour objectif de garantir à tous les Français un accès au très haut débit, supérieur à 30 mégabits par seconde, d’ici à 2022. Le Président de la République a, par ailleurs, fixé un objectif ambitieux de généralisation de la fibre optique à l’horizon de 2025.
Dans votre département, deux initiatives cohabitent au sein de la zone moins dense (ZMD) : le réseau d’initiative publique, porté par la région Grand Est, qui desservira, d’ici à 2023, 439 communes des Ardennes et le réseau d’initiative privée, porté par l’opérateur Orange sur dix communes de la communauté d’agglomération Ardenne Métropole.
Au sein de la zone moins dense, encadrée par le régulateur, la mutualisation des réseaux fibre jusqu’à l’abonné est recherchée par des mesures encadrant un accès neutre et ouvert au réseau. Cette mutualisation est déterminante pour permettre des investissements publics efficaces.
Dans le cas d’espèce, la région Grand Est, s’assure, en vertu de ses compétences et de l’article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales, que le réseau d’initiative publique construit par son délégataire respecte la réglementation en vigueur.
L’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) travaille en bonne intelligence avec la région Grand Est et s’est d’ores et déjà rapprochée d’elle pour porter un regard attentif sur les actions entreprises au nom de la mutualisation et de la réutilisation des réseaux existants et pour étudier les situations que vous avez mises en lumière.
Le Gouvernement reste vigilant, madame la sénatrice, à l’évolution de la mutualisation sur le terrain. Il veillera, en lien avec le régulateur, à ce que les réseaux déployés soient neutres, accessibles et ouverts.
état des infrastructures de télécommunications dans les hautes-alpes
M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Arnaud, auteur de la question n° 2119, adressée à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance et de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la transition numérique et des communications électroniques.
M. Jean-Michel Arnaud. Ce 7 février, Orange a dévoilé le plan de fermeture de son réseau de boucle locale cuivre au bénéfice de la fibre. Jugé trop coûteux, ce réseau compte encore 21 millions de lignes actives. Ce plan s’articule autour de deux phases, de 2020 à 2030.
La fermeture commerciale du réseau doit respecter plusieurs critères, dont le fait que la totalité des locaux domestiques et professionnels soit raccordée à la fibre. Dans le même temps, le plan prévoit aussi que la fermeture concernera en priorité les communes pour lesquelles les opérations lourdes de réaménagement du réseau cuivre seront identifiées.
Nous avons affaire à une injonction contradictoire pour un territoire de montagne, comme celui des Hautes-Alpes. J’ai mené une consultation auprès des maires de mon département, dont le résultat est sans appel : ceux-ci déplorent tous un réseau mal entretenu et une mauvaise coopération, voire une absence de communication, avec Orange.
Notre réseau cuivre est dans un état dégradé, car il est mal entretenu. Alors que le déploiement de la fibre reste embryonnaire et complexe, quelle priorité sera donnée, par exemple dans mon département de montagne, au démantèlement du réseau cuivre ?
Par ailleurs, madame la ministre, pouvez-vous me garantir qu’à l’issue de ce processus, aucun usager ne se retrouvera dans une zone blanche de non-connexion ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargée de l’industrie. Monsieur le sénateur Jean-Michel Arnaud, la période de fermeture progressive de la boucle cuivre s’accompagne d’un plan de renforcement pour maintenir un bon niveau de qualité de services sur ce réseau cuivre.
C’est pourquoi le Gouvernement a demandé à Orange de prendre des engagements complémentaires dans le cadre de la mise en œuvre d’un nouveau plan d’action permettant d’améliorer la qualité globale du réseau cuivre et de soulager les zones en souffrance.
C’est l’objectif poursuivi par la circulaire du Premier ministre du 5 juin 2021 et par le rappel adressé aux préfectures le 21 octobre 2021. Les services de l’État doivent mettre en œuvre des comités de concertation départementaux sur l’accès aux réseaux de communications électroniques fixes et mobiles, particulièrement dans les départements ciblés en priorité par le plan d’action d’Orange sur le réseau cuivre.
L’opérateur Orange s’est engagé, pour sa part, à maintenir 500 millions d’euros annuels d’investissements consacrés à l’entretien du réseau cuivre sur l’ensemble du territoire, soit un budget par ligne active en augmentation de 22 % depuis 2018. Quelque 10 millions d’euros supplémentaires sont également alloués aux vingt-deux territoires prioritaires.
L’opérateur a renforcé son recrutement, grâce à la création de 123 nouveaux postes, en priorité dans les départements en tension, et à une augmentation de 30 % des effectifs nationaux d’intervention en cas de crise.
Par ailleurs, Orange s’engage, si un dysfonctionnement survient, à fournir une solution de secours mobile en vingt-quatre heures maximum. À défaut de couverture mobile, une solution de téléphonie satellitaire est mise à disposition en mairie. La solution de connectivité en mairie en cas de crise collective majeure est disponible depuis l’été 2021.
S’agissant des engagements de l’opérateur Orange, les 123 recrutements sont finalisés au niveau national. S’ajoute à ces recrutements la force d’intervention d’urgence, composée de 270 binômes opérationnels, qui a vocation à intervenir en fonction des urgences partout sur le territoire.
Quant aux difficultés que vous évoquez dans le département des Hautes-Alpes, la préfecture est invitée à réunir le comité de concertation locale, afin d’analyser et de traiter au plus vite les situations signalées pour le réseau cuivre.
En outre, l’Arcep a publié le 25 novembre dernier un plan d’action complémentaire pour l’amélioration de la qualité d’exploitation.
M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Arnaud, pour la réplique.
M. Jean-Michel Arnaud. Je vous remercie de ces explications, madame la ministre.
Je tiens à insister sur une difficulté qui pourrait survenir. Dans le cadre du plan d’action mentionné se posent des questions de démantèlement du réseau et des équipements. Orange prévoit ce démantèlement « sauf pour des configurations qui ne permettraient pas une dépose dans des conditions techniques ou économiques raisonnables ».
Je ne souhaiterais pas que, sur un tel fondement, les collectivités locales se retrouvent, à l’issue du processus de fermeture du réseau, avec une série de poteaux à enlever elles-mêmes, ce qui altérerait à la fois la dimension paysagère du territoire et leurs finances.
Enfin, Orange nous a récemment fait savoir que l’offre satellitaire dans les zones de montagne aujourd’hui non accessibles par le réseau cuivre – et, j’imagine, difficilement accessibles demain par la fibre – serait dorénavant suspendue. Je crains donc que nous nous retrouvions, dans des départements comme le mien avec des zones blanches de non-droit et de non-connectivité. J’appelle le Gouvernement à se saisir de cette question.
responsabilité comptable des directeurs généraux des services
M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, auteure de la question n° 2033, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics.
Mme Cathy Apourceau-Poly. L’article 41 du projet de loi de finances pour 2022 autorise le Gouvernement à prendre une ordonnance pour réformer la responsabilité pécuniaire et personnelle (RPP) des comptables publics.
L’objectif visé est de transférer une partie de la responsabilité des actes administratifs des comptables aux ordonnateurs, afin d’adapter le régime de la RPP.
Certes nécessaire, cette réforme aurait nécessité un débat, en particulier avec le Sénat, représentant des collectivités territoriales. Ces dernières vont en effet se retrouver financièrement responsables, aux côtés des directeurs généraux des services (DGS) et des trésoriers, alors même que la réorganisation et la baisse du nombre de centres de finances publiques ont réduit à peu de choses l’appui du réseau des comptables publics.
Sur la base des échanges à l’Assemblée nationale, il semble que les DGS seront soumis à une sanction potentielle, sans que leur rôle ne soit véritablement défini dans le contrôle qu’ils auront eux-mêmes à effectuer pour se prémunir contre l’engagement de leur responsabilité… On marche sur la tête !
Il s’agit aussi, et surtout, d’un danger pour le principe de séparation de l’ordonnateur et du comptable.
Madame la ministre, quel accompagnement prévoyez-vous pour les ordonnateurs ? L’État mettra-t-il en place un régime assurantiel qu’il financera ou tout cela restera-t-il, comme d’habitude, à la charge des collectivités ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’industrie.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargée de l’industrie. Je pense, madame la sénatrice Cathy Apourceau-Poly, que votre lecture n’est pas la bonne.
Conformément aux orientations fixées dans le programme Action publique 2022, la réforme de la responsabilité des gestionnaires publics portée par la loi de finances pour 2022 vise à instituer un régime unifié de responsabilité financière pour tous les gestionnaires, qu’ils soient comptables ou ordonnateurs.
Il ne s’agit en aucun cas – vos affirmations en la matière sont fausses – de transférer la responsabilité du comptable public vers l’ordonnateur, mais de responsabiliser chaque acteur de la chaîne financière sur les actes et décisions dont il est l’auteur.
À l’opposé de vos inquiétudes, cette réforme permettra de donner plus de liberté d’action aux gestionnaires publics. L’intervention du juge financier n’est requise que pour les cas les plus graves ayant causé un préjudice financier significatif à l’organisme concerné. Ainsi, l’introduction de deux critères cumulatifs de « faute grave » et de « préjudice financier significatif » doit conduire à ne soumettre à la Cour des comptes qu’un nombre limité d’affaires.
De plus, ce nouveau régime ne remet absolument pas en cause la séparation entre ordonnateur et comptable, principe fondamental de notre système et gage important non seulement de sécurité pour les ordonnateurs, mais aussi de fiabilité et de qualité comptable.
Il permettra, en revanche, d’adapter les modalités de réalisation des contrôles, notamment d’assouplir les contrôles les plus formels afin d’accroître les marges de manœuvre des gestionnaires. L’objectif du Gouvernement est de fluidifier l’action publique en instaurant des contrôles plus sélectifs, déterminés dans le cadre d’une approche par les enjeux et les risques.
Enfin, dès lors qu’il s’agit d’un régime de responsabilité individuelle sanctionné par une amende, et non par l’obligation de rembourser un préjudice, le texte n’institue pas de régime d’assurance particulière. L’agent public bénéficie en effet, à l’occasion ou en raison de l’exercice de ses fonctions, de la protection fonctionnelle par laquelle l’administration doit notamment lui apporter une assistance juridique.
M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour la réplique.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Il y a tout de même un problème, madame la ministre : à vous entendre, notre lecture de vos réformes n’est jamais la bonne.
Pourtant, j’ai été saisie par les directeurs généraux des services (DGS) du Pas-de-Calais, qui s’inquiètent de leur exposition future à d’éventuelles poursuites judiciaires et financières, mais également des mesures managériales ou disciplinaires qui pourraient être prises dans le cadre des prérogatives de direction des responsables publics. J’ai également été alertée de la crise des vocations que risque de susciter ce nouveau régime de responsabilité.
Sur le fond, enfin, la philosophie de cette réforme ne peut qu’inquiéter : on aligne le fonctionnement de notre administration sur le droit des entreprises, les comptables étant réduits au rôle de simples exécutants et le contrôle incombant aux DGS. En d’autres termes, on procède à un glissement d’une logique juridictionnelle à une logique managériale.
réduction d’horaires et fermeture de bureaux de poste
M. le président. La parole est à M. Christian Bilhac, auteur de la question n° 2141, transmise à M. le ministre de l’économie, des finances et de la relance.
M. Christian Bilhac. En juin dernier, j’ai interrogé M. le ministre chargé des comptes publics sur les fermetures de bureaux de poste, car j’avais dans mon département de l’Hérault des remontées permanentes d’élus s’inquiétant de la dégradation des services postaux dans leurs communes.
J’avais entendu que la réduction toujours plus forte du volume de courriers traités annuellement par La Poste appelait à une restructuration de son fonctionnement, comme nos collègues Patrick Chaize, Pierre Louault et Rémi Cardon l’ont souligné dans leur rapport d’information.
M. Dussopt m’avait annoncé, en réponse à ces interrogations, une aide de 520 millions d’euros pour compenser une partie du déficit de La Poste et assurer la continuité du service public, ce que je salue.
La Poste reste un vecteur de lien social indispensable, notamment dans les communes rurales. Malheureusement, très peu de choses ont changé en sept mois. Pas une semaine ne passe sans que les maires ne me fassent part des mêmes inquiétudes en constatant des fermetures inopinées ou des réductions d’horaires d’ouverture… Trouver un bureau de poste ouvert plus de trois heures par jour devient un véritable défi pour les habitants.
Ainsi, la commune de Montarnaud, qui avait un bureau de poste lorsque sa population était de 500 habitants, s’en voit proposer – pour ne pas dire imposer – la transformation en agence postale communale, alors qu’elle compte désormais plus de 4 000 habitants. Que dire, madame la ministre, de la fermeture du bureau du Cap d’Agde, première station balnéaire d’Europe ?
Pouvez-vous m’indiquer de quelle manière l’aide de 520 millions d’euros, que nous avons votée ici lors de l’examen du projet de loi de finances, a permis de maintenir des bureaux de poste ? Comment comptez-vous éviter le déclin de ce service public essentiel ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’industrie.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargée de l’industrie. Monsieur le sénateur Christian Bilhac, comme vous venez de la souligner, la numérisation des échanges se traduit depuis une quinzaine d’années par une diminution continue du nombre de courriers échangés – 39 % de baisse entre 2010 et 2020. Cette tendance, qui s’est brutalement accélérée avec la crise sanitaire, devrait se poursuivre dans les années à venir.
Dans ces conditions, des mesures structurantes étaient nécessaires pour permettre de rétablir l’équilibre financier du service universel postal confié à La Poste par la loi. À défaut, le déficit risquait d’atteindre 2 milliards d’euros annuels dans quelques années.
Les mesures annoncées le 22 juillet dernier par le Premier ministre, que vous avez partiellement reprises en citant la réponse de mon collègue Olivier Dussopt, sont à la hauteur de l’enjeu : d’une part, le versement d’une compensation comprise entre 500 et 520 millions d’euros à compter de 2022, au titre de l’année 2021 ; d’autre part, l’évolution de l’offre du service universel postal à compter de 2023. Ces mesures permettront d’assurer la pérennité d’un service de qualité de distribution du courrier, six jours sur sept.
Par ailleurs, la loi fixe l’obligation à La Poste de maintenir un réseau dense d’au moins 17 000 points de contact répartis sur le territoire, de sorte que 90 % au moins de la population d’un département aient accès à un point de contact postal à moins de 5 kilomètres ou à 20 minutes en voiture de son domicile.
L’État apporte depuis 2008 son appui financier au maintien de cette proximité. Entre 2008 et 2022, il y aura consacré pratiquement 2,5 milliards d’euros, dont 522 millions d’euros sur les années 2020 à 2022.
Là encore, la mission de service public confiée à La Poste est confrontée à un changement profond des comportements. Du fait de la révolution numérique, à laquelle est venue s’ajouter la crise sanitaire, le groupe ne peut que constater une forte baisse de fréquentation de ses bureaux. Face à cette évolution, il développe, conformément à la loi, des partenariats visant à remplacer certains bureaux peu fréquentés par des agences postales communales ou par des points postaux installés chez des commerçants.
Il est nécessaire de continuer à adapter les modalités de la présence de La Poste, tout en recherchant la meilleure efficacité économique et sociale.
M. le président. Veuillez conclure, madame la ministre déléguée.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée. Ce point figure précisément dans le contrat de présence postale territoriale 2020-2022, élaboré en lien avec les élus locaux.
M. le président. La parole est à M. Christian Bilhac, pour la réplique.
M. Christian Bilhac. L’État doit verser une compensation à la hauteur du montant calculé par l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep) pour maintenir ce service public dans notre pays.
écloseries marines de gravelines