M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.
M. Fabien Gay. Comme cela vient d’être dit, cette règle de 5 000 personnes a quelque chose d’absurde. Un organisateur accueillant 5 000 spectateurs dans un stade qui compte 40 000 ou 50 000 places perd de l’argent. Il n’y a ni « hospitalités » ni buvettes. Que fait-il ? Il ouvre une seule tribune de 5 000 places, sans aucun écart entre les sièges.
En revanche, si l’on retient une règle de proportionnalité à 50 %, en prévoyant une ouverture complète des stades, indépendamment de la capacité d’accueil – 10 000, 20 000, 50 000, 80 000 places, etc. –, et en imposant un écart d’un siège entre chaque personne ou chaque groupe de personnes venues ensemble, on accompagnera les clubs professionnels, qui perdront tout de même 50 % des places, dans la traversée de cette crise.
Ce dispositif me paraît bien plus compréhensible qu’une jauge de 5 000 personnes imposée partout, que le stade compte 50 000 ou 80 000 places.
Évidemment, avec la jauge actuelle, on n’ouvrira pas l’ensemble d’un stade de 60 000 ou 80 000 personnes : en procédant ainsi, on perdrait énormément d’argent !
Une nouvelle fois, on devrait écouter les clubs et tirer les leçons de la crise que nous vivons depuis deux ans. Rétablir cette jauge de 5 000 personnes n’est ni efficace ni tenable économiquement. Nous pouvons proposer autre chose à l’ensemble des clubs, des supporteurs et supportrices qui, en cette période, ont aussi envie de vivre des moments de solidarité, de fraternité et de divertissement.
Mme Céline Brulin. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Bien sûr, nous devons prendre garde au variant omicron, car il est extraordinairement contagieux.
Quant aux dispositions que propose M. Levi, elles sont peut-être perfectibles ; cela étant, je voterai cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Arnaud, pour explication de vote.
M. Jean-Michel Arnaud. Évidemment, je soutiens pleinement l’amendement de M. Levi. Au-delà – la question a été posée –, j’aimerais que la situation des clubs professionnels soit clarifiée, sinon aujourd’hui, du moins dans les jours qui viennent.
Qu’il s’agisse du rugby, du football ou du hockey sur glace – pour ce qui concerne ce dernier sport, je pense en particulier aux Rapaces de Gap, dans mon département des Hautes-Alpes –, les restrictions décidées placent les clubs dans des situations catastrophiques.
Or, à ce jour, ni les compensations ni l’accompagnement nécessaires n’ont été prévus pour sauvegarder non seulement ces clubs professionnels, mais aussi et surtout la dynamique éducative au cœur de laquelle ils se trouvent.
Voilà pourquoi il faut déclencher le signal d’alarme : j’attends les réponses du Gouvernement.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Bas, rapporteur. Monsieur le président, je ne défends pas simplement le football : je défends également le rugby. Je tenais à le dire, car, sur ce point, ma première intervention n’était pas complète. (Sourires.)
Mes chers collègues, j’ajoute que je vais précisément dans le sens des auteurs de ces amendements. Toutefois, je me permets de leur signaler qu’en les faisant voter ils se tireraient une balle dans le pied, tout simplement.
Les uns affirment que la jauge doit être proportionnelle à la capacité d’accueil sans fixer aucune proportion : dès lors, le Gouvernement aura les mains entièrement libres.
M. Antoine Lefèvre. Eh oui !
M. Philippe Bas, rapporteur. Il pourra retenir 5 %, 10 % ou 20 % de la capacité d’accueil.
M. Fabien Gay. Ce qu’il faut, c’est 50 % !
Mme Éliane Assassi. Oui : 50 % partout !
M. Philippe Bas, rapporteur. Juridiquement – c’est inévitable –, il fera exactement ce qu’il voudra.
Les deux amendements ainsi rédigés tendent donc à donner les pleins pouvoirs au Gouvernement pour fixer la jauge dans les stades, aussi bien pour le rugby que pour le football.
J’insiste sur ce point. Pour le Gouvernement, les dispositions de ces amendements sont moins contraignantes que le texte de la commission. Je vous ai déjà rappelé notre position : il faut tenir compte des risques de promiscuité en fonction de la configuration et de la capacité d’accueil du stade considéré.
Mme Éliane Assassi. Ce n’est pas juste !
M. Philippe Bas, rapporteur. Quant aux deux autres amendements, ils tendent à établir eux-mêmes une jauge. Or – je le répète – c’est une erreur de fixer une jauge dans la loi. Un tel choix aboutirait nécessairement à traiter de la même manière le stade de Rennes et le Stade de France,…
Mme Éliane Assassi. C’est pour cela qu’il faut 50 % partout !
M. Philippe Bas, rapporteur. … alors qu’ils n’ont pas la même capacité d’accueil.
J’insiste également sur ce point, même si les questions dont il s’agit ne sont pas au cœur de notre discussion législative. Ne votez pas ces amendements, dans l’intérêt même de ceux qui les défendent. En effet, je voudrais que leur intention trouve une traduction efficace, opérationnelle, dans la loi. En ce sens, la moins mauvaise solution reste celle que nous avons retenue, car elle est contraignante pour le Gouvernement.
M. Bruno Retailleau. C’est vrai !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Monsieur Folliot, si une jauge de 10 000 personnes ne figure pas dans ce texte, c’est parce qu’une telle disposition n’est pas d’ordre législatif. Pour des raisons exposées notamment par M. le rapporteur, elle est de nature réglementaire : c’est donc bien par décret que le seuil de 5 000 a été décidé.
D’ailleurs, pourquoi pas une jauge de 15 000 voire, demain, de 2 000 personnes, selon l’évolution de la situation sanitaire ?
M. Philippe Folliot. Il s’agit de rassemblements à l’extérieur !
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Certes, monsieur le sénateur, mais le risque existe également à l’extérieur. Vous l’avez rappelé vous-même : un certain nombre d’activités sociales se déroulent dans les enceintes sportives. C’est fort heureux ; mais, dans ce cadre aussi, le virus circule.
Ne rigidifions pas les règles à l’excès. Je le répète, il ne s’agit pas de laisser ou non les mains libres au Gouvernement, mais d’avoir la capacité de s’adapter à la situation sanitaire.
Madame Robert, vous proposez de fixer les jauges de chaque établissement recevant du public (ERP) au prorata de sa capacité d’accueil, notamment en fonction de sa surface et de sa configuration.
Projetons-nous un instant : très concrètement, cela signifie que, dans tous les départements, le préfet devra se rendre dans chaque établissement recevant du public. (Protestations sur les travées du groupe SER.) L’administration devra donc émettre des centaines de milliers d’actes individuels…
M. Philippe Bas, rapporteur. Pas des centaines de milliers !
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Si, monsieur le rapporteur. On peut s’en tenir à la théorie, mais la réalité est là : les préfets devront se rendre dans chaque ERP…
M. Lucien Stanzione. Non !
M. Yannick Vaugrenard. Pas du tout !
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. … pour déterminer les capacités d’accueil. Selon la configuration des lieux, la surface à prendre en compte donnera lieu à de nouvelles discussions… (Nouvelles protestations.)
Il faudrait mobiliser des centaines de fonctionnaires préfectoraux, et même plus encore, pour accomplir ce travail.
Mme Sylvie Robert. Les surfaces sont déjà connues !
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Je ne crois pas que ce soit envisageable. (M. Guy Benarroche proteste.) Monsieur Benarroche, c’est bien ce qu’il faudra faire si l’on adopte de tels dispositifs !
J’en viens au fameux match Lille-Lens, ou Lens-Lille – je ne sais plus qui recevait à domicile…
M. Patrick Kanner. C’était Lens-Lille, et Lens a gagné ! (Sourires.)
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Effectivement, nous avons tous été un peu surpris de voir les 5 000 supporteurs réunis dans une même tribune.
Comme vous le savez, la ministre des sports ne cesse de répéter que les protocoles en vigueur proscrivent une telle concentration du public. Elle l’a encore rappelé aux responsables des clubs et aux exploitants des stades à la suite de cet événement.
Toujours au sujet du sport, je vous le certifie : les ministres des sports et de l’économie sont attentifs à la situation des clubs et ils veillent à les soutenir, notamment face aux difficultés financières qu’ils peuvent connaître. Je suis un peu étonné d’entendre dire que rien n’est fait en leur faveur : c’est assez loin de la réalité.
Enfin, gardons à l’esprit la situation sanitaire dans laquelle nous nous trouvons : plus de 300 000 de nos concitoyens sont contaminés chaque jour. D’ailleurs, dans un certain nombre de pays voisins du nôtre, les établissements dont nous parlons sont tout simplement fermés.
La politique mise en œuvre par le Gouvernement, les règles que nous retenons permettent de maintenir l’activité tout en s’adaptant au mieux à l’évolution sanitaire. Elles concilient la sécurité des Français et la poursuite de l’activité économique tout en apportant aux uns et aux autres le soutien dont ils ont besoin face aux difficultés qu’ils rencontrent.
M. le président. La parole est à M. Michel Bonnus, pour explication de vote.
M. Michel Bonnus. Monsieur le secrétaire d’État, a-t-on évalué les conséquences de cette décision sur les clubs sportifs professionnels ? Prenons l’exemple du match Lyon-Paris-Saint-Germain (PSG), samedi dernier : avec une jauge de 5 000 personnes, combien l’Olympique lyonnais (OL) a-t-il perdu,…
M. Yves Détraigne. Trois à zéro ? (Sourires.)
M. Michel Bonnus. … sachant que son stade compte 70 000 places ?
J’ai eu le président de l’OL au téléphone : les conséquences financières sont énormes.
Chaque week-end, les galeries marchandes accueillent des centaines de milliers de clients. Le week-end dernier, 100 000 personnes ont arpenté le grand centre commercial de Toulon – c’est son directeur lui-même qui me l’a dit. Mais aujourd’hui les stades sont vides et, malheureusement, chaque fois qu’ils disputent un match, nos clubs perdent des sommes considérables. J’ajoute que ces pertes ne peuvent pas être rattrapées.
C’est pour cela que je voterai l’amendement de M. Levi : ces dispositions me semblent justes et loyales envers les clubs professionnels, qu’il s’agisse du rugby, du football ou d’autres disciplines encore.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 36 rectifié.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, adopte l’amendement.) – (Applaudissements sur des travées des groupes UC, Les Républicains, SER et CRCE.)
M. le président. En conséquence, les amendements nos 119, 74, 59 et 106 n’ont plus d’objet.
3
Communication relative à une commission mixte paritaire
M. le président. J’informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la protection des enfants est parvenue à l’adoption d’un texte commun.
4
Mise au point au sujet d’un vote
M. le président. La parole est à Mme Victoire Jasmin.
Mme Victoire Jasmin. Monsieur le président, lors du scrutin public n° 70, sur l’amendement n° 33 rectifié, je tiens à préciser que je souhaitais m’abstenir.
M. le président. Acte vous est donné de cette mise au point, ma chère collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quarante-cinq.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt heures dix, est reprise à vingt et une heures quarante-cinq, sous la présidence de Mme Laurence Rossignol.)
PRÉSIDENCE DE Mme Laurence Rossignol
vice-présidente
Mme la présidente. La séance est reprise.
5
Mise au point au sujet d’un vote
Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Kanner.
M. Patrick Kanner. Madame la présidente, je tiens à vous signaler que M. Maurice Antiste souhaitait ne pas prendre part au scrutin public n° 70, sur l’amendement n° 33 rectifié.
Mme la présidente. Acte vous est donné de cette mise au point, mon cher collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.
6
Gestion de la crise sanitaire
Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi
Mme la présidente. Nous reprenons l’examen du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, renforçant les outils de gestion de la crise sanitaire et modifiant le code de la santé publique.
Nous poursuivons la discussion de l’article 1er.
Article 1er (suite)
Mme la présidente. L’amendement n° 75, présenté par MM. Sueur, Jomier et Kanner, Mme Lubin, M. Leconte, Mmes Rossignol et de La Gontrie, MM. Durain et Bourgi, Mme Harribey, MM. Kerrouche et Marie, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Le Houerou, Jasmin, Meunier, Monier et Poumirol, MM. Antiste et Assouline, Mme Blatrix Contat, M. Bouad, Mmes Briquet et Carlotti, M. Chantrel, Mme Conway-Mouret, MM. Cozic, Féraud, Jacquin, Lurel, Mérillou, Michau et Montaugé, Mme S. Robert, MM. Stanzione, Temal, Tissot, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 2
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
…° Le I du même 1er est complété par un 4° ainsi rédigé :
« 4° Instaurer un examen bi-hebdomadaire de dépistage ne concluant pas à une contamination par la covid-19 dans les écoles, collèges et lycées en lien avec les autorités sanitaires, préfectorales et les collectivités locales intéressées.
« Le II de l’article 93 de la loi n° 2021-1754 du 23 décembre 2021 de financement de la sécurité sociale pour 2022 n’est pas applicable au présent 4°. » ;
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. La situation sanitaire se tend beaucoup dans les établissements scolaires en ce début d’année, en raison du variant omicron, qui fait bondir le nombre de contaminations à un niveau encore jamais atteint.
Les cas positifs se multiplient dans les écoles et le nombre de fermetures de classes commence à augmenter. Or il nous paraît absolument impératif de limiter au maximum la circulation du virus en milieu scolaire.
Cet amendement tend à donner au Premier ministre la faculté d’instaurer une politique de dépistage régulière, avec des campagnes de tests salivaires dans les écoles et la distribution d’autotests pour les collégiens.
Cela étant, ces dispositions n’ont pas vocation à s’appliquer aux lycéens : je tiens à apporter cette rectification.
Cet amendement vise ainsi à reprendre l’une des préconisations du rapport de la mission commune d’information destinée à évaluer les effets des mesures prises ou envisagées en matière de confinement ou de restrictions d’activités, quant à la stratégie vaccinale à mettre en œuvre pour limiter la quatrième vague de la pandémie, rapport que notre collègue Bernard Jomier a déposé le 1er juillet dernier.
Mes chers collègues, n’ayons pas peur des mots : chacun voit dans quel état d’anarchie se trouvent nos établissements scolaires. Ordres et contre-ordres se multiplient, le ministre de l’éducation nationale changeant de stratégie d’une semaine à l’autre et même, parfois, du jour au lendemain.
On aboutit à une situation inextricable…
Mme la présidente. Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. Jean-Pierre Sueur. … et très difficile, madame la présidente, pour les parents comme pour les enseignants. C’est pourquoi vous comprendrez l’importance de cet amendement !
Mme la présidente. Il s’agit donc de l’amendement n° 75 rectifié, présenté par MM. Sueur, Jomier et Kanner, Mme Lubin, M. Leconte, Mmes Rossignol et de La Gontrie, MM. Durain et Bourgi, Mme Harribey, MM. Kerrouche et Marie, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Le Houerou, Jasmin, Meunier, Monier et Poumirol, MM. Antiste et Assouline, Mme Blatrix Contat, M. Bouad, Mmes Briquet et Carlotti, M. Chantrel, Mme Conway-Mouret, MM. Cozic, Féraud, Jacquin, Lurel, Mérillou, Michau et Montaugé, Mme S. Robert, MM. Stanzione, Temal, Tissot, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, et ainsi libellé :
Après l’alinéa 2
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
…° Le I du même 1er est complété par un 4° ainsi rédigé :
« 4° Instaurer un examen bi-hebdomadaire de dépistage ne concluant pas à une contamination par la covid-19 dans les écoles et collèges en lien avec les autorités sanitaires, préfectorales et les collectivités locales intéressées.
« Le II de l’article 93 de la loi n° 2021-1754 du 23 décembre 2021 de financement de la sécurité sociale pour 2022 n’est pas applicable au présent 4°. » ;
Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Bas, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. Malgré la qualité des auteurs de cet amendement et de l’intervention de Jean-Pierre Sueur, je vais émettre, à mon grand regret, un avis défavorable au nom de la commission.
Mon cher collègue, le plus grand désordre règne en effet à l’école. Des dispositions sont prises du jour pour le lendemain, puis annulées par le Premier ministre, qui en décide d’autres. Mais, à présent, vous proposez un autre système. (Mme Françoise Gatel s’exclame.)
La protestation est en train de gonfler dans l’école de la République. Les professeurs devraient être nombreux à se mettre en grève jeudi prochain (M. François Calvet le confirme.) et, pour beaucoup d’entre eux, les parents d’élèves les soutiennent.
Je ne voudrais pas que nous ajoutions à la confusion, d’autant que le régime de gestion de la crise sanitaire permet déjà de faire ce que vous proposez.
Je ne tiens pas à ce que nous rigidifions davantage encore un système qui a fait la preuve de sa complexité. D’ailleurs, cette situation était bien prévisible. Dès le mois de décembre, le conseil scientifique lui-même annonçait que nous allions au-devant d’une désorganisation sociétale majeure : eh bien, nous y sommes.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l’enfance et des familles. Mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement préfère relever que la France est, dans le monde, le pays où l’école est restée la plus ouverte. À mon sens, mieux vaut s’en féliciter que de se réjouir du mouvement social qui aura lieu jeudi…
M. Philippe Bas, rapporteur. Tout le monde le déplore !
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Je suis ravi que vous le déploriez, monsieur le rapporteur.
Les parents d’élèves, les professionnels de l’éducation… bref, la communauté éducative tout entière aura certainement été rassurée par les annonces faites hier par le Premier ministre… (Exclamations ironiques sur les travées des groupes SER et Les Républicains.)
Mme Michelle Meunier. Non, hélas !
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Ces mesures permettront de simplifier l’organisation des tests, notamment pour les élèves qui sont cas contacts.
Je vous le rappelle : c’est grâce à ces tests que nous assurons la continuité éducative. C’est grâce à eux que nos enfants peuvent continuer d’aller à l’école, voir leurs petits camarades et donc garder des relations sociales. On sait à quel point c’est important. On sait à quel point les effets de cette crise ont été délétères pour la santé mentale de nos enfants.
Je le répète, je préfère me réjouir des résultats obtenus.
En outre, comme vous l’avez dit, les dispositions actuelles permettent d’ores et déjà au Premier ministre de prendre des mesures pour suivre l’évolution de la situation au plus près et s’adapter à la réalité que vivent nos concitoyens. C’est ce qu’il a fait encore hier.
J’émets un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Mes chers collègues, j’ai l’impression que, lors de ce débat, les représentants du Gouvernement ont décidé de ne pas écouter nos propos.
Monsieur le secrétaire d’État, nous n’avons jamais dit qu’il fallait fermer les écoles.
Mme Sylvie Robert. Absolument !
M. Bernard Jomier. Nous avons bien retenu la communication du Gouvernement, reprise hier encore à propos du nouveau protocole. Elle consiste à dire : « L’objectif, c’est de garder les écoles ouvertes. »
Pour notre part, nous répondons : « Il faut garder les écoles ouvertes tout en assurant la sécurité sanitaire des enfants et des personnels. » Or c’est ce que vous refusez de faire, avec une constance remarquable, je dois le dire, depuis le début de la crise sanitaire.
Les rapporteurs de notre mission d’information préconisaient la mise en place d’un dépistage salivaire dans les écoles ; au mois d’août, le conseil scientifique s’est lui aussi prononcé en ce sens, avant de répéter son avis en décembre dernier.
Au cours de ce même mois de décembre, les alertes n’ont pas manqué : face à la flambée du virus, il fallait déployer une procédure de dépistage plus opérante. Mais vous avez refusé à la fois de décaler la rentrée de janvier et d’instituer un protocole efficace. Dès lors, ce qui devait arriver est arrivé : c’est le chaos dans les écoles.
Le ministre de l’éducation devrait se poser des questions sur la manière d’assumer ses responsabilités.
M. Éric Kerrouche. Tout à fait !
M. Jean-Pierre Sueur. Très bien !
M. Bernard Jomier. Enfin, monsieur le rapporteur, le dépistage que nous proposons n’est pas un nouveau système : j’y insiste, c’est celui que le conseil scientifique préconise, selon une méthode éprouvée.
Certes – je le reconnais –, un tel choix suppose une organisation. Je n’ai pas d’illusion sur la capacité du Gouvernement à la mettre en place. (M. le rapporteur hausse les épaules.) Mais ce n’est pas parce qu’il est incapable de la déployer que nous, parlementaires, devons renoncer à la demander, si nous pensons qu’elle est nécessaire.
Ce que nous disons par cet amendement, c’est que le chaos a assez duré. Malheureusement, il risque fort de persister : en pratique, les protocoles changent tous les deux jours et, sur le fond, ce gouvernement campe sur la même ligne, car il ne cherche pas à réduire le risque sanitaire à l’école. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. Daniel Salmon applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Esther Benbassa, pour explication de vote.
Mme Esther Benbassa. M. Jomier a dit l’essentiel. J’ajoute simplement une précision : on n’a pas mesuré les efforts que l’application des consignes sanitaires coûte aux enseignants comme au personnel administratif des écoles. Ce personnel est déjà exténué et l’on alourdit encore sa charge de travail.
On ne peut pas élaborer des consignes sanitaires sans prendre en considération l’écosystème de l’école. Bien sûr, il faut veiller à la santé des élèves ; mais il faut aussi penser aux difficultés que les protocoles créent pour les parents, les enseignants et tout le personnel scolaire.
Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Gatel, pour explication de vote.
Mme Françoise Gatel. Sur cet amendement, je suivrai l’avis de notre rapporteur. Toutefois, je saisis cette occasion pour parler des tests, notamment dans les écoles.
À cet égard, nous sommes face à deux grands problèmes.
Le premier sujet a été évoqué, et il inspire un constat unanime : aujourd’hui, les tests sont extrêmement compliqués, voire impossibles à réaliser à l’école, qui plus est pour les familles dont les enfants sont répartis entre différentes classes.
Monsieur le secrétaire d’État, je vous transmettrai le courriel qu’une maire m’a envoyé récemment. La situation qu’elle décrit pourrait être tirée d’un sketch, mais elle semble, hélas ! bien réelle. Cette élue a dû faire elle-même le service à la cantine scolaire, puisque l’agent territorial spécialisé des écoles maternelles (Atsem) devait, pour sa part, assurer la réalisation des tests.
Certes, l’école est restée ouverte et c’est très bien. Mais il est nécessaire que la situation s’apaise et que les tests deviennent plus aisés. Pour l’heure, nous sommes face à un désordre général, que ce soit à l’école, dans la famille ou dans l’entreprise et, vous le savez, les gens sont fatigués de toutes ces complications.
Le second sujet, abordé brièvement par M. Jomier, c’est celui des tests salivaires. Pour ma part, j’en suis persuadée : les tests salivaires sont plus aisés à réaliser chez les enfants. En décembre dernier, une étude scientifique a d’ailleurs indiqué que, s’ils inspiraient un certain nombre de réserves pour les variants précédents, les tests salivaires étaient tout à fait acceptables pour le variant qui nous occupe aujourd’hui.
Allez-vous encourager, développer et faciliter l’utilisation de ces tests dans les écoles maternelles et élémentaires ?
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Houpert, pour explication de vote.
M. Alain Houpert. Mes chers collègues, je suis d’accord avec M. Sueur : l’école est devenue un chantier perpétuel. Tous les jours, les établissements reçoivent de nouvelles directives et de nouveaux courriels de M. Blanquer, si bien que les enseignants ne s’y retrouvent plus.
Monsieur le secrétaire d’État, vous dites et répétez que le virus flambe. Désormais, on teste tout le monde : on fait des tests partout. Or, 1,5 million de tests par jour, cela coûte 1 milliard d’euros par mois. Avec cela, on construit trois hôpitaux et quatre écoles…
À force de tester, on va certainement dépister plein de choses, même chez des personnes qui ne tomberont jamais malades, notamment des enfants ; en attendant, ce sont les parents qui souffrent. Le matin, ils emmènent leurs enfants à l’école et, une demi-heure après, on leur envoie un courriel ou un SMS pour leur dire de venir les chercher, alors qu’eux-mêmes viennent d’arriver au travail.
M. Alain Houpert. Monsieur le secrétaire d’État, il faut sortir de cette mascarade !
Mme la présidente. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour explication de vote.
Mme Éliane Assassi. Pour notre part, nous voterons l’amendement déposé par nos collègues socialistes. Les enseignants sont à bout ; les parents sont à bout ; et, bien entendu, les enfants aussi sont à bout. À cet égard, la préconisation faite par les auteurs de cet amendement va tout à fait dans le bon sens.
Comme Mme Gatel, j’aimerais comprendre les raisons qui expliquent que les élèves, notamment de maternelle, ne bénéficient pas de ces tests salivaires que l’on évoquait au début de la crise et qui ont aujourd’hui disparu des radars. Cette technique offre, à mon sens, une solution acceptable pour les enfants de cet âge.
Nous proposons, de surcroît, que la communauté nationale prenne en charge une campagne de dépistage dans les écoles élémentaires et dans les collèges. Cet amendement me semble donc relever du bon sens et son adoption serait susceptible de nous fournir une bonne appréciation de la circulation du virus dans les écoles, en même temps qu’elle rassurerait la communauté scolaire, les parents d’élèves et les élèves. Nous voterons donc en faveur de cet amendement.