Mme Michelle Meunier. Ces deux amendements visent chacun à demander un rapport ; je connais donc le sort qui leur est réservé, mais je n’ai rien trouvé d’autre pour attirer de nouveau l’attention sur la situation de crise et d’urgence que connaît l’aide sociale à l’enfance, notamment au travers du métier d’assistant familial, et sur le devenir des familles d’accueil.
Je souhaite que le Gouvernement travaille réellement à des solutions. À titre d’exemple, il serait souhaitable, pour le métier d’assistant familial, de favoriser les passerelles entre la fonction publique territoriale et la fonction publique hospitalière.
Aujourd’hui, si un éducateur de l’ASE souhaite devenir famille d’accueil, il lui faut soit se mettre en disponibilité, soit démissionner, car il ne peut pas cumuler le statut de fonctionnaire et le statut de contractuel de la fonction publique.
Or il pourrait être intéressant que des professionnels déjà formés à la protection de l’enfance puissent s’orienter, en cours de carrière, vers les métiers de famille d’accueil.
L’amendement n° 283 tend également à demander un rapport, cette fois sur les conséquences dramatiques, en termes de rémunération, pour l’assistant familial et sa famille en cas de retrait d’un mineur à la suite d’un signalement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Bonne, rapporteur. La commission émet sur ces demandes de rapport un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Même avis.
Sachez, madame la sénatrice, que la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) mène actuellement une grande enquête sur les assistants familiaux.
Ses résultats devaient être publiés à la fin du mois de décembre 2021, mais comme nous sommes déjà le 15 décembre, j’imagine qu’ils le seront plutôt au début de l’année 2022… Je demanderai donc à la Drees de me communiquer la date précise de publication.
Madame Meunier, vous aviez laissé entendre que vous présenteriez un amendement sur la question de l’accès aux origines…
Mme Michelle Meunier. Il a été déclaré irrecevable au titre de l’article 45 de la Constitution !
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. J’attendais que vous présentiez cet amendement pour vous informer que, si les adoptions illicites font l’objet d’une attention médiatique, nous sommes, de notre côté, en contact depuis un certain nombre de semaines et de mois sur cette question avec les associations d’enfants adoptés.
Je vous confirme ce que j’ai commencé à évoquer devant l’Assemblée nationale : nous allons mettre en place, au premier trimestre de 2022, avec le ministère des affaires étrangères et le ministère de la justice, une mission interministérielle inspirée du modèle de la Commission d’information et de recherche sur les enfants de la Creuse.
L’objectif est d’enquêter sur ces adoptions illicites et de pouvoir apporter une réponse à ces enfants devenus grands.
Mme la présidente. L’amendement n° 284, présenté par Mmes Le Houerou, Meunier et Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Poumirol, Rossignol et Harribey, MM. Sueur, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 16
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de six mois à compter de la date de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur les modalités de financement des lieux de vie et d’accueil.
La parole est à Mme Annie Le Houerou.
Mme Annie Le Houerou. J’imagine que cet amendement connaîtra le même sort que les précédents…
Il y a en France 450 lieux de vie et d’accueil (LVA). Dans la mesure où ils ne sont pas des établissements et services sociaux ou médico-sociaux, les LVA ne font pas partie des schémas départementaux. Les organismes utilisateurs ne sont pas solidaires d’éventuels déficits générés par les LVA, qui sont seuls redevables de leurs pertes.
Aussi, il n’y a pas d’organisme financeur pour les LVA, mais des utilisateurs, qui payent une prestation de services délivrée par des structures souvent de droit privé.
Nombre de ces LVA se trouvent aujourd’hui en difficulté, alors qu’ils répondent à de véritables besoins et à des situations très compliquées.
Par ailleurs, le décret auquel renvoie l’article L. 312–1 du code de l’action sociale et des familles attribue aux présidents de conseil départemental le pouvoir de fixer la tarification journalière des LVA. Or les départements ne sont pas les seuls à recourir à leurs services ; la protection judiciaire de la jeunesse et les agences régionales de santé le font également.
En outre, la pratique révèle que certains départements, qui bien souvent n’ont pas recours aux LVA, fixent systématiquement des prix de journées identiques et trop faibles. Cela entretient une normalisation des places, ce qui va à l’encontre de la singularité de chaque LVA.
Ces structures offrent une réponse adaptée aux besoins de chaque enfant ou adolescent ; un accompagnement individuel est donc nécessaire, ce qui induit des coûts de fonctionnement importants.
Pour ces raisons, nous demandons au Gouvernement qu’il remette au Parlement un rapport sur les modalités de financement des LVA et plus largement sur leur fonctionnement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Bonne, rapporteur. Il s’agit d’une demande de rapport : l’avis est donc défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. L’avis est également défavorable, mais je dois dire que nous allons faire mieux qu’un rapport – j’en ai parlé hier.
En effet, nous avons déjà réuni un groupe de travail, auquel participait notamment la Fédération nationale des lieux de vie et d’accueil, qui a permis d’aboutir à un décret sur l’organisation du travail des salariés de ces lieux. Vous le savez, le temps de travail est une problématique importante pour les LVA.
Un second groupe de travail réfléchit à la question du financement ; il devrait rendre ses résultats au début de 2022.
Vous le voyez, nous sommes au-delà du rapport, puisque nous travaillons sur les réponses à apporter.
Mme la présidente. L’amendement n° 338 rectifié bis, présenté par MM. Iacovelli et Rambaud, Mme Schillinger, MM. Buis, Rohfritsch et Lévrier, Mmes Duranton et Havet, M. Théophile et Mme Dindar, est ainsi libellé :
Après l’article 16
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au plus tard six mois après la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’opportunité de modifier l’article 1186 du code de procédure civile, afin de rendre l’assistance d’un avocat systématique pour les mineurs faisant l’objet d’une procédure d’assistance éducative, indépendamment de leur état de discernement et de la formulation d’une demande explicite en ce sens. Ce rapport étudie notamment la possibilité de prendre en charge cette assistance au titre de l’aide juridictionnelle.
La parole est à M. Xavier Iacovelli.
M. Xavier Iacovelli. Défendu !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Bonne, rapporteur. Défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 338 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Vote sur l’ensemble
Mme la présidente. Avant de mettre aux voix l’ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Je souhaite tout d’abord remercier M. le secrétaire d’État pour les explications qu’il nous a fournies tout au long de nos débats et notre rapporteur, Bernard Bonne, pour son implication et pour sa contribution à l’élaboration de ce texte.
Nous souhaitons d’ailleurs, monsieur le secrétaire d’État, que ces améliorations soient retenues dans la suite de la navette parlementaire.
Certains sujets n’ont pas été abordés lors de nos débats ; je pense notamment à l’accompagnement à la parentalité ou à la pédopsychiatrie, secteur qui rencontre d’importantes difficultés.
En outre, l’intitulé du projet de loi qui évoque « la protection des enfants », et non « la protection de l’enfance », peut prêter à confusion. En fait, ce texte ne concerne que les services de l’aide sociale à l’enfance.
Le dernier point que je souhaite évoquer, c’est celui du coût, car le financement est évidemment un élément déterminant dans la prise en charge des enfants.
J’ai noté, monsieur le secrétaire d’État, que vous aviez annoncé un certain nombre de choses de ce point de vue, mais il faudra bien s’assurer que les départements pourront continuer de faire leur travail de manière satisfaisante – c’est leur préoccupation principale –, par exemple lorsqu’ils devront prendre en charge les jeunes majeurs. Il faut donner aux départements les moyens de faire face aux dépenses supplémentaires.
C’est pour cette raison qu’il était important de ne pas trop surcharger ce texte de contraintes nouvelles qui mobiliseraient les services administratifs des départements au détriment du temps passé par les travailleurs sociaux auprès des enfants.
Pour conclure, nous considérons que ce projet de loi a été enrichi par les travaux du Sénat. Nous le voterons ainsi modifié. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à M. Xavier Iacovelli, pour explication de vote.
M. Xavier Iacovelli. Je voudrais remercier l’ensemble de nos collègues pour la qualité de nos débats, et plus particulièrement notre rapporteur pour son implication et ses explications, même si nous n’avons pas toujours été d’accord…
Je souhaite également remercier M. le secrétaire d’État, qui a su nous présenter un texte de qualité.
Je voudrais souligner les avancées contenues dans ce projet de loi.
Je pense notamment à l’encadrement, durant la période transitoire, des jeunes dans les établissements hôteliers, même si nous aurions préféré que le délai de mise en place soit plus court.
Je pense aussi au droit au retour, introduit sur l’initiative de notre rapporteur – c’était une attente forte des enfants et des professionnels –, au délai de trois mois pour le retour sur les informations préoccupantes ou encore à la réécriture de l’article 3 bis D afin de protéger davantage les jeunes majeurs.
Protéger les enfants, c’est aussi leur assurer un avenir plus sûr, ce qui nécessite une politique volontariste en faveur d’une meilleure prise en charge. Je pense ici à la prise en compte de la santé mentale, au contrôle accru des situations de maltraitance, au renforcement de l’accompagnement ou à la systématisation du parrainage – une belle avancée permise par nos débats.
Pour autant, des limites persistent, qui ne sont pas nécessairement d’ordre législatif.
Je pense notamment à la possibilité pour les assistants familiaux d’accueillir un seul enfant et de travailler à côté : cela élargirait le champ des possibles et permettrait de lutter contre la diminution du nombre de personnes prêtes à remplir cette mission. J’espère que le Gouvernement pourra réfléchir à cette piste de travail.
Je pense également à la question, importante, de la scolarisation et du temps scolaire. Aujourd’hui, très souvent, les différents rendez-vous liés à la prise en charge par l’ASE sont pris sur le temps scolaire, ce qui peut contribuer à la déscolarisation de ces enfants.
Je pourrais évoquer beaucoup d’autres sujets.
Mme la présidente. Mais il vous faut conclure, mon cher collègue…
M. Xavier Iacovelli. Ce texte est une pierre de l’édifice des politiques que nous devons conduire pour protéger les enfants. Le groupe RDPI le votera en l’état.
Mme la présidente. La parole est à Mme Michelle Meunier, pour explication de vote.
Mme Michelle Meunier. Lors de la discussion générale, je m’étais posé une question : est-ce que ce texte va permettre de mieux répondre aux besoins des enfants confiés à l’aide sociale à l’enfance ? Je dois dire qu’il est encore difficile pour moi de répondre clairement à cette question.
Il contient quelques avancées.
Je retiens le fait que la prostitution des mineurs est reconnue comme un facteur de danger qui ouvre droit à la protection de la société.
Je pense aussi à la meilleure information des personnels qui signalent des informations préoccupantes à la CRIP, la cellule de recueil, de traitement et d’évaluation des informations préoccupantes, et aux améliorations dans la rémunération des familles d’accueil.
Ce sont des points positifs.
Toutefois, pour certaines mesures, nous restons au milieu du gué : je pense notamment à l’accompagnement des jeunes majeurs, qui s’arrêtera à 21 ans, et à l’interdiction des nuitées d’hôtel, qui connaît encore trop de dérogations et qui ne va pas assez vite à mon sens.
En outre, le périmètre très restrictif posé pour l’examen de ce texte n’a pas permis d’aborder certains débats. Je pense ici aux violences conjugales ou sexuelles, dont les enfants peuvent être victimes, aux enfants non capables de discernement, dont l’expression n’est pas même recherchée, ou encore aux enfants confiés faute d’avoir pu exclure les violences éducatives ordinaires des établissements. Je regrette que nous n’ayons pas pu débattre de ces sujets.
Ce texte maintient un certain statu quo en ce qui concerne le rôle et les compétences des départements. Or le groupe socialiste estime que ce fonctionnement n’est pas optimal, loin de là !
Enfin, l’article 15 nous empêche à lui seul de voter ce projet de loi.
Pour toutes ces raisons, nous nous abstiendrons. Il s’agit toutefois d’une abstention positive, monsieur le secrétaire d’État, parce que nous prenons acte des mesures que vous avez annoncées.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Ce texte constitue une avancée très importante dans la prise en charge de l’enfance par l’ASE.
Je voudrais féliciter le rapporteur, Bernard Bonne, qui s’est beaucoup impliqué pour améliorer ce texte, mais aussi M. le secrétaire d’État, qui nous a apporté beaucoup d’explications extrêmement précises.
Nous le savons, 40 % des jeunes de moins de 25 ans sans domicile sont d’anciens enfants placés à l’aide sociale en France. Le texte prévoit un accompagnement des jeunes majeurs jusqu’à 21 ans – pas 25 ans –, grâce à un financement de l’État pour fournir notamment une formation à ces jeunes afin qu’ils aillent vers l’emploi. Cette disposition est absolument capitale.
Le texte prévoit aussi l’interdiction de l’hébergement en hôtel, où la surveillance est inefficace, pour privilégier un hébergement où l’ASE peut organiser un encadrement adapté.
Le groupe Les Indépendants est favorable à toutes ces mesures.
Cela a été dit, il existe une pénurie de pédopsychiatres dans certains territoires, ce qui nuit gravement à la prise en charge des enfants de l’ASE.
Nous regrettons le rejet de l’amendement présenté par Colette Mélot qui visait à inscrire la prévention et la lutte contre la prostitution des mineurs dans une stratégie de prévention. Les faits de prostitution sont extrêmement graves et nous devons identifier et réprimer avec une grande fermeté les auteurs de ces actes.
Dans l’ensemble, le projet de loi contient des avancées importantes : l’interdiction de placement en hôtel, le droit de retour des enfants à l’ASE jusqu’à 21 ans, le renforcement du contrôle des antécédents judiciaires des personnels, le parrainage et le mentorat, et surtout la sécurisation du métier d’assistant familial avec l’augmentation des salaires, la formation et la participation à l’élaboration du projet des enfants.
Par conséquent, notre groupe votera ce projet de loi.
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Je souhaite à mon tour remercier notre rapporteur.
Je veux aussi remercier particulièrement M. le secrétaire d’État, qui a passé du temps dans cet hémicycle et qui a su respecter l’ensemble des sénateurs qui sont intervenus dans ce débat. Il a montré beaucoup de pédagogie. L’attitude dont il a fait preuve n’est pas nécessairement celle de l’ensemble des membres du Gouvernement ; c’est pourquoi je tenais à le souligner. Nous pouvions ne pas être d’accord, mais il argumentait et respectait nos travaux, ce qui me semble extrêmement important.
Ce texte était très attendu, mais il ne me semble constituer qu’une étape. J’ai d’ailleurs senti – c’est un avis tout à fait personnel… – que M. le secrétaire d’État aurait bien voulu aller plus loin, mais qu’il n’avait pas remporté tous les arbitrages…
Il contient des avancées : le tiers de confiance, les parrainages ou encore l’interdiction des hébergements en hôtel, même si cette mesure comprend encore trop de dérogations.
Dans le même temps, il n’est à la hauteur ni des besoins de terrain, compte tenu de la situation actuelle, ni des ambitions affichées. Le groupe communiste républicain citoyen et écologiste n’est pas seul à dire cela, puisque la Défenseure des droits, Claire Hédon, le pense également.
Il n’est pas à la hauteur, parce que les moyens dégagés ne sont pas suffisants, même si M. le secrétaire d’État a tenté de faire des efforts en la matière – nous en avons parlé durant nos débats.
Finalement, la portée de ce texte est donc limitée. Des améliorations ont été décidées pour les assistantes familiales, mais ni sur leur statut ni sur la revalorisation des carrières. Une grande part de la responsabilité est reportée sur les conseils départementaux, mais sans véritables contraintes.
Il manque donc beaucoup de choses dans ce texte, si bien que le groupe CRCE va s’abstenir.
Mme la présidente. La parole est à Mme Brigitte Devésa, pour explication de vote.
Mme Brigitte Devésa. Nous pouvons nous féliciter de la qualité de nos débats. Je remercie pour cela M. le secrétaire d’État pour ses explications claires et les échanges cordiaux que nous avons eus, ainsi que M. le rapporteur pour son travail et son implication.
Malgré nos différences et nos positions parfois divergentes, l’objectif commun était bien d’améliorer la situation des enfants placés à l’ASE. De ce point de vue, qu’il s’agisse de l’interdiction des placements en hôtel, des normes d’encadrement des foyers, de la modernisation du métier d’assistant familial ou encore de l’accompagnement pour accéder à l’autonomie – un sujet très important –, on peut considérer qu’une étape a été franchie pour garantir aux enfants un cadre de vie sécurisant et serein.
Je crois que nous pouvons nous en féliciter. C’est pourquoi le groupe Union Centriste, que j’ai le plaisir de représenter, votera ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – M. Daniel Chasseing applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Beaucoup de choses ont été dites et je ne vais pas les reprendre toutes.
Je voudrais à mon tour souligner la qualité de nos débats, celle des réponses apportées par M. le secrétaire d’État et celle du travail de notre rapporteur qui, dès les auditions qu’il a organisées, a su nous écouter.
Depuis la discussion générale, nous n’avons pas obtenu grand-chose… Certes, l’un de nos amendements a été adopté – c’est Noël ! (Sourires.)
Nous mettons en avant les mêmes avancées que celles qui ont été indiquées par mes collègues – nous les avons d’ailleurs votées –, mais aussi les mêmes limites, en particulier l’article 15, un véritable intrus dans ce texte, qui ne met pas sur un pied d’égalité les enfants français et les mineurs non accompagnés. Cet article constitue une très grande contrariété pour nous.
Nous regrettons aussi l’étroitesse du périmètre retenu pour l’examen de ce texte. Si nous débattions vraiment de la protection des enfants, on aurait pu penser que la suspension, voire le retrait, de l’autorité parentale en cas de violence sexuelle, d’inceste ou de violence conjugale en ferait partie. Cela n’a malheureusement pas été le cas en raison de l’application de l’article 45 de la Constitution. Il faut pourtant avancer très vite sur ces sujets et trouver un véhicule législatif adapté.
Enfin, la question des moyens nous fait douter du caractère effectif des mesures que nous avons adoptées.
Pour toutes ces raisons, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires s’abstiendra.
Mme la présidente. Personne ne demande plus la parole ?…
Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l’ensemble du projet de loi relatif à la protection des enfants.
(Le projet de loi est adopté.)
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Bonne, rapporteur. Je veux remercier la présidente de la commission des affaires sociales d’avoir proposé à la commission de me choisir comme rapporteur de ce texte, ainsi que tous nos collègues qui ont participé à ce débat et qui se sont impliqués dans nos travaux.
Chacun a pu regretter que l’examen de ce texte arrive un peu tard en cette fin d’année 2021, mais les deux jours que nous y avons consacrés, s’ils ont été courts, ont quand même permis que le débat se déroule dans de bonnes conditions.
Il s’agit d’un projet de loi important. Nos débats auraient peut-être pu durer plus longtemps et être encore plus approfondis, nous aurions sans doute pu aller encore plus loin pour protéger les enfants, mais je crois que nous avons bien avancé sur un certain nombre de sujets.
Les sénateurs ont souvent été élus départementaux – ils le sont encore parfois –, nous sommes donc particulièrement impliqués sur les questions liées à la protection de l’enfance. Je suis moi-même très intéressé par ce sujet, ayant longtemps été vice-président du département de la Loire chargé des affaires sociales, puis quelques années président de ce conseil départemental. J’avais alors coutume de dire à mes collègues que la protection de l’enfance était l’une des missions essentielles des conseils départementaux.
Ce projet de loi contient des avancées importantes.
Je pense notamment à l’interdiction de l’hébergement en hôtel, au comité de pilotage et à l’accompagnement des jeunes majeurs entre 18 et 21 ans, sujet essentiel pour la sécurisation du projet des enfants.
Je pense aussi à la question des mineurs non accompagnés. Nous devrons certainement travailler de nouveau sur ce sujet, mais je tiens à remercier nos collègues Xavier Iacovelli, Laurent Burgoa, Henri Leroy et Hussein Bourgi pour le rapport qu’ils ont publié en septembre dernier.
Je pense également à la question des assistants familiaux, sur laquelle nous avons un peu progressé. Il faudra cependant aller nettement plus loin et trouver des solutions pour renforcer l’attractivité de ce métier particulièrement difficile.
Je pense enfin à la présence d’un avocat auprès des enfants durant la procédure. Je crois que nous avons là aussi avancé, même si nous n’avons pas pu aller aussi loin que nous le souhaitions en raison de l’article 40 de la Constitution.
Il est vrai que l’article 45 de la Constitution nous a empêchés de travailler sur certains sujets particuliers.
En ce qui concerne le financement, j’en ai beaucoup discuté avec M. le secrétaire d’État et il était extrêmement important que le Gouvernement s’engage sur ce sujet. En effet, le projet de loi de finances pour 2022 ne prévoyait pas de financements spécifiques liés à la mise en œuvre des dispositions de ce texte. D’où l’importance de l’engagement du Gouvernement en séance.
Monsieur le secrétaire d’État, je crois en votre parole pour l’année 2022, mais nous devrons regarder attentivement dans le courant de l’année les dépenses réelles des départements pour aller plus loin en cas de besoin.
Enfin, je voulais vous remercier, monsieur le secrétaire d’État. Il a été agréable et facile de travailler avec vous, nous nous sommes rencontrés à de nombreuses reprises pour préparer l’examen de ce texte par le Sénat. Il fallait en effet que nous réussissions à déboucher sur des propositions acceptables pour les uns et pour les autres afin que la commission mixte paritaire, qui devrait se réunir le 11 janvier, puisse trouver un accord – je n’ai d’ailleurs pas beaucoup de doutes à ce sujet.
Je vous remercie pour votre bienveillance et votre écoute. C’est lorsque chacun s’écoute et tient compte de ces échanges que l’on peut progresser. Je souhaiterais vraiment que l’ensemble des membres du Gouvernement ait cette même attitude – je ne nie cependant pas le fait que d’autres que vous l’ont également… (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et RDSE. – Mme Michelle Meunier applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Je souhaite remercier à mon tour l’ensemble de nos collègues qui ont travaillé sur ce texte, qu’ils appartiennent ou non à la commission des affaires sociales, ainsi que le secrétariat de la commission et la direction de la séance, qui ont également beaucoup travaillé.
Je remercie tout particulièrement Bernard Bonne, dont l’expérience de vice-président et de président de conseil départemental a été précieuse pour l’examen de ce texte.
Comme lui, j’espère que la commission mixte paritaire aboutira à un accord à même de faire progresser la cause de la protection des enfants – c’est l’une des missions essentielles des conseils départementaux comme de notre commission.
Enfin, je veux remercier M. le secrétaire d’État et ses collaborateurs.
Pour conclure, je souhaite à toutes et à tous un joyeux Noël ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Je voudrais vous dire, sans aucune flagornerie, que c’est toujours un plaisir de venir débattre au Sénat. C’est aussi le cas avec mes anciens collègues de l’Assemblée nationale, mais il est vrai que les sénateurs ont une certaine compétence et expérience sur ce type de sujet.
Je remercie tout particulièrement M. le rapporteur pour les échanges que nous avons eus, mais aussi l’ensemble des sénateurs qui se sont impliqués sur ce texte depuis des mois. Nous avons commencé à le préparer il y a un peu plus d’un an, ce qui est nécessaire compte tenu de sa nature.
Certains d’entre vous ont regretté que ce projet de loi ne règle pas tous les problèmes. Ils ont raison : tout n’est pas dans ce texte, mais beaucoup de choses y sont et, en tant que membre du Gouvernement chargé de ces questions depuis trois ans, j’en retire une certaine fierté.
Nous avons déjà beaucoup œuvré pour la protection des enfants, mais il reste des choses à faire, tout simplement parce que nous partons de loin ! La situation des enfants reste dramatique dans notre pays et je ne parle pas uniquement de ceux qui sont confiés.
J’ajoute que tout ne relève pas du domaine de la loi. J’ai par exemple évoqué durant nos débats tout ce que nous avions déjà engagé en faveur des assistants familiaux. Par ailleurs, vous savez bien que beaucoup de choses dépendent des pratiques professionnelles et l’un des enjeux des prochains mois sera justement de diffuser auprès des professionnels, qu’ils soient travailleurs sociaux, juges, agents de l’éducation nationale, etc., toutes les avancées du texte qui sera, je l’espère, adopté en commission mixte paritaire. Chacun devra s’approprier ces nouvelles dispositions.
Le projet de loi contient des avancées qui peuvent paraître techniques, comme sur la gouvernance, qu’elle soit nationale ou territoriale, mais qui sont en réalité très importantes.
Il contient aussi des avancées majeures qui correspondent à la mise en œuvre de grands principes et qui contribueront à la transformation de notre système de protection de l’enfance : le recours au tiers digne de confiance, l’interdiction de la séparation des fratries, l’interdiction du placement en hôtel, la modernisation et la revalorisation du métier d’assistant familial, etc.
Nous avons également réformé la gouvernance de ce secteur pour en renforcer le pilotage.
Je vous concède qu’il reste des choses à faire et que nous devons continuer les chantiers que nous avons lancés, mais nous avons adopté de nombreuses mesures, qui sont dans la continuité – je le revendique – des lois de 2007 et de 2016.
J’allais oublier ce qui constitue l’une des avancées majeures de ce texte : la fin du couperet des 18 ans, des sorties sèches. Nous systématisons l’accompagnement des jeunes de 18 à 21 ans et un projet pour l’autonomie sera préparé avec eux dans le prolongement du projet pour l’enfant. Chaque jeune pourra ainsi s’appuyer sur un projet dédié qui reposera lui-même sur trois piliers : la poursuite d’un accompagnement humain, un hébergement et un accompagnement dans l’insertion professionnelle ou dans les études.
Pour conclure, je voudrais remercier l’ensemble des services du Sénat et de mon ministère, avec une pensée particulière pour un membre de mon cabinet, ancienne enfant confiée : son regard et son expérience ont eu une grande influence sur ce texte, notamment en ce qui concerne l’accompagnement des jeunes majeurs – merci à elle ! (Applaudissements.)