M. Bernard Bonne, rapporteur. La commission sera favorable à l’amendement du Gouvernement, sous réserve de l’adoption de ce sous-amendement.

La question de la présence systématique d’un avocat auprès des enfants est très discutée : certains juges des enfants sont pour, d’autres absolument contre. Des avocats nous ont dit qu’ils pouvaient défendre tous les enfants.

L’avantage de l’avocat est que, le plus souvent, il reste en place : il peut donc suivre un enfant tout au long de son parcours au sein de l’aide sociale à l’enfance (ASE), jusqu’à 18 ans ou 21 ans, alors qu’un juge des enfants change de poste tous les deux ou trois ans. C’est pour cette raison que la présence de l’avocat nous semblait intéressante, mais l’article 40 de la Constitution ne nous a pas permis de déposer un amendement visant à systématiser la présence d’un avocat auprès des enfants.

Bien sûr, les enfants ou les parents peuvent demander la présence d’un avocat, mais nous souhaitons ajouter que le président du conseil départemental puisse également faire une telle demande – c’est l’objet du sous-amendement n° 437. Je rappelle qu’un enfant est confié, non pas à l’ASE, mais au président du conseil départemental. Le président n’est pas un substitut des parents, mais il nous semble qu’il doit être en état de demander la présence d’un avocat pour accompagner un enfant, que celui-ci soit capable de discernement ou pas. Il s’agit, j’y insiste, non pas de défendre l’enfant, mais de le suivre.

Nous ne pouvions pas aller plus loin en matière de systématisation de la présence de l’avocat. Cet ajout nous semble donc important. Nous sommes nombreux ici à avoir été présidents de conseil départemental et nous savons bien qu’il peut être intéressant, selon la personnalité du juge des enfants, qu’un adulte soit présent non pas pour contester ses décisions, mais pour débattre avec lui des dispositions à prendre.

Je souscris donc pleinement à l’amendement du Gouvernement, mais je souhaite que l’on permette au président du conseil départemental de demander la présence d’un avocat auprès des enfants.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur le sous-amendement n° 437 ?

M. Adrien Taquet, secrétaire dÉtat. Le Gouvernement est défavorable à ce sous-amendement, qui tend à revenir à une rédaction que nous souhaitons justement supprimer.

J’ajoute que la formulation proposée par la commission revient à la désignation systématique d’un avocat. (M. le rapporteur le conteste.) C’est pourtant ce qui est prévu, monsieur le rapporteur. Je lis votre rédaction : « À la demande du président du conseil départemental, le juge des enfants saisit le bâtonnier afin qu’il désigne un avocat ». Il y a donc une forme d’automaticité.

M. Adrien Taquet, secrétaire dÉtat. Qui plus est, vous n’évoquez pas l’intérêt de l’enfant.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Bernard Bonne, rapporteur. C’est bien « à la demande » du président du conseil départemental, dans des cas particuliers. Cela ne sera évidemment pas systématique. Il s’agit d’une possibilité pour le président du département : s’il le juge utile, il peut demander la désignation d’un avocat par le bâtonnier.

M. Adrien Taquet, secrétaire dÉtat. Bien sûr, mais s’il le demande, la désignation sera automatique ! Et indépendamment de l’intérêt de l’enfant.

M. Bernard Bonne, rapporteur. Ce n’est aucunement automatique ; c’est seulement si le président du conseil départemental le demande.

M. le président. Pour que tout le monde comprenne bien : ce qui n’est pas automatique, c’est la demande du président du conseil départemental.

La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.

Mme Laurence Rossignol. Je suis bien ennuyée…

Monsieur le secrétaire d’État, nos positions convergent souvent, mais pas sur ce sujet. Je ne pense pas que la présence de l’avocat soit réservée aux litiges ou à des dissensions entre parties. Dans les procédures de divorce devant notaire, par exemple, les avocats sont là pour trouver un compromis – d’ailleurs, c’était déjà souvent le cas avant la réforme du divorce.

Un avocat n’est pas systématiquement générateur de conflits et il peut être présent sans que cela dénature la fonction de juge des enfants. J’ajoute que le juge des enfants prend des décisions qui n’opposent pas nécessairement différentes parties. Il me semble donc que l’avocat est utile pour l’enfant.

Vous avez cité le juge Édouard Durand : je souhaite à tous les enfants qui entrent dans le cabinet d’un juge de tomber sur quelqu’un comme lui ! Il existe évidemment d’autres excellents juges des enfants, mais il n’y a aucune garantie de tomber sur l’un d’eux. En droit, on dit toujours « le juge » : c’est une forme d’abstraction, de concept, mais, dans la réalité, il y a des juges et certains sont bons, d’autres moins… C’est comme dans tous les métiers ou toutes les fonctions, que ce soit médecin, sénateur ou ministre – ce soir, il n’y a naturellement que de très bons sénateurs et nous avons un très bon ministre… (Sourires.)

Il existe donc un aléa dans la vie de ces enfants : les choses dépendent aussi du juge sur lequel ils tombent. Chacun a une compréhension et une philosophie différentes en matière de protection de l’enfance et les cultures n’évoluent pas partout à la même vitesse. L’avocat est donc une garantie pour les enfants.

Mais, disons-le clairement, la réalité, c’est que cela coûte cher ! Pourquoi ne dites-vous pas tout simplement que prévoir la présence systématique d’un avocat devant le juge des enfants est une dépense trop importante ? Cela serait une forme d’honnêteté de le reconnaître. Peut-être même que l’on hésiterait, parce qu’il faudrait trouver des moyens de financement qui soient acceptables.

En conclusion, je regrette qu’à cause de l’article 40 de la Constitution nous ne puissions pas défendre nos amendements en faveur du ministère d’avocat pour tous les enfants.

L’amendement du Gouvernement reprend la notion de mineur capable de discernement, en en laissant l’appréciation au juge. La présence de l’avocat est importante, ne serait-ce que pour débattre de cette question.

À mon sens, tout cela donne trop de latitude aux juges – je mets le terme au pluriel – et pas assez de garanties pour les enfants.

M. le président. La parole est à M. Xavier Iacovelli, pour explication de vote.

M. Xavier Iacovelli. Moi aussi, j’avais déposé un amendement, déclaré irrecevable au titre de l’article 40 de la Constitution, en faveur de la systématisation de la présence de l’avocat. Je suis un fervent partisan de cette mesure, qui permettrait de défendre l’intérêt supérieur de l’enfant, sans pour autant, à mon sens, judiciariser la procédure. Je ne reprendrai pas l’excellent argumentaire de Laurence Rossignol, qui a clairement présenté les tenants et les aboutissants de cette question.

En ce qui me concerne, j’étais opposé à l’amendement présenté par le rapporteur en commission et tendant à ce que l’ASE puisse demander au juge de saisir le bâtonnier pour la désignation d’un avocat pour l’enfant capable de discernement. Seule l’ASE aurait eu cette possibilité, ce qui la met dans une position où elle est à la fois juge et partie.

Je trouve très problématique de donner la possibilité à l’ASE de contester les décisions du juge sur les placements sans même faire figurer dans le texte le fait que l’intérêt supérieur de l’enfant est primordial. Je rappelle que nous débattons d’un projet de loi qui est relatif à la protection des enfants.

Par ailleurs, continuer de distinguer les enfants selon qu’ils sont capables ou non de discernement pose aussi un problème. Ce débat est évidemment lié à celui sur la systématisation de la présence d’un avocat. Chacun sait qu’une telle systématisation coûterait cher aux finances publiques, comme coûte cher l’aide juridictionnelle. Toutefois, cela ne doit pas nous empêcher d’en débattre.

Les parlementaires ne peuvent pas déposer d’amendement tendant à avancer sur cette question et l’amendement du Gouvernement ne me satisfait qu’à moitié. Je ne peux évidemment pas le voter à moitié… (Sourires.) Je le voterai donc, mais je ne voterai pas le sous-amendement de la commission.

J’attends aussi du Gouvernement des gestes plus forts en faveur d’un meilleur accompagnement des enfants.

M. Adrien Taquet, secrétaire dÉtat. Nous prévoyons l’audition systématique du mineur !

M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

M. René-Paul Savary. Il faut savoir que certains juges demandent systématiquement un avocat, d’autres non.

En tout cas, monsieur le secrétaire d’État, je suis déçu par votre réponse : vous dites que le sous-amendement de la commission ne prévoit pas que le juge saisit le bâtonnier pour désigner un avocat « dans l’intérêt de l’enfant ». C’est un procès d’intention ! Si le président du conseil départemental fait cette demande, c’est naturellement dans l’intérêt de l’enfant ! Je trouve particulièrement indélicat que vous remettiez en cause cette évidence.

Il me semble au contraire que la rédaction est claire. Dans votre amendement, monsieur le secrétaire d’État, il est écrit que, « lorsque l’intérêt de l’enfant l’exige, le juge des enfants demande au bâtonnier la désignation d’un avocat ». Le sous-amendement complète cet alinéa par une phrase prévoyant que le juge fait la même chose « à la demande du président du conseil départemental ». L’intérêt de l’enfant est donc toujours au cœur du dispositif, ce qui devrait vous rassurer, monsieur le secrétaire d’État.

M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour explication de vote.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Beaucoup de choses ont été dites. Laurence Cohen et moi-même partageons complètement l’argumentaire de Laurence Rossignol et de Xavier Iacovelli.

Nous sommes favorables à la systématisation de la présence de l’avocat, parce que nous pensons que l’assistance d’un avocat est beaucoup plus protectrice pour garantir les droits des enfants, en particulier les droits des enfants placés.

La présence d’un avocat spécialisé dans ce domaine facilitera le processus de médiation et l’accompagnement des enfants dans la compréhension de la loi et des décisions qui sont prises. Nous pensons qu’avec un avocat à ses côtés un enfant sera davantage en confiance pour parler.

M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. Je n’ai pas bien compris ce que vous vouliez faire, monsieur le secrétaire d’État. En tout état de cause, le juge Édouard Durand – il me semble que c’était lui – nous a bien précisé qu’il disait toujours aux enfants qu’il accueillait dans son cabinet qu’ils avaient droit à un avocat. Je ne vois donc pas bien ce que vous allez ajouter en la matière.

Je ne vais pas reprendre tous les arguments en faveur de la présence d’un avocat, si possible formé à l’écoute de l’enfant. Pour moi, il est le tuteur de la parole. Je serais d’ailleurs tentée de dire que c’est surtout quand l’enfant n’est pas capable de discernement qu’il a besoin d’un avocat.

Un autre avantage à la présence d’un avocat est le fait qu’il peut accompagner un enfant dans la durée, contrairement au juge des enfants, qui change de poste tous les deux ans. Ainsi accompagné, l’enfant peut mieux comprendre le processus et les conséquences des décisions qui sont prises. C’est une véritable plus-value si l’on veut que l’enfant adhère à ces décisions.

Enfin, je le répète, je suis également favorable à la systématisation de la présence de l’avocat, mais il me semblait qu’il était déjà inscrit dans le code que tout enfant avait droit à un avocat et que le juge des enfants avait l’obligation de le lui rappeler à chaque occasion.

M. le président. La parole est à M. Gilbert Favreau, pour explication de vote.

M. Gilbert Favreau. Le sous-amendement présenté par le rapporteur correspond bien à la réalité. Tout à l’heure, notre collègue Iacovelli a confondu l’ASE et le président du conseil départemental ; ce n’est pas la même chose, l’ASE étant un service du département.

Ensuite, c’est non pas le président du conseil départemental qui choisit l’avocat chargé de défendre l’enfant, mais le bâtonnier de l’ordre.

Dans ces conditions, toutes les assurances sont réunies pour que le mineur soit correctement représenté.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Adrien Taquet, secrétaire dÉtat. Je voudrais apporter quelques éléments de réponse.

Madame Poncet Monge, nous allons modifier l’article 1186 du code de procédure civile pour prévoir qu’à chaque audition ou audience le juge doit rappeler au mineur qu’il peut se faire accompagner par un avocat. Aujourd’hui, certains juges le font, d’autres non. Nous rendons cette information obligatoire.

Par ailleurs, c’est un administrateur ad hoc qui doit être désigné pour un enfant qui n’est pas capable de discernement plutôt qu’un avocat.

Plus largement, en ce qui concerne la notion de discernement – nous en avons parlé hier, mais je n’en retrouvais plus la définition –, la Défenseure des enfants a précisé en 2008 que « cette notion recouvre la capacité pour l’enfant de comprendre ce qui se passe, d’appréhender la situation qu’il vit, de pouvoir exprimer ses sentiments à ce propos ». La jurisprudence l’entend comme la capacité intellectuelle à comprendre le sens et les enjeux de la procédure. On ne peut donc pas figer les choses dans la loi, par exemple en définissant un âge où l’enfant est censé être capable de discernement. Cela dépend de chaque enfant et de chaque situation.

Madame Rossignol, il est vrai que j’ai beaucoup parlé lors des débats à l’Assemblée nationale de la conflictualité que pouvait induire la présence d’un avocat, mais je ne l’ai pas fait ici.

Mme Laurence Rossignol. Vous voyez, je vous lis !

M. Adrien Taquet, secrétaire dÉtat. J’en prends acte ! Je vais faire attention à ce que je dis… (Sourires.)

Mon propos a pu paraître caricatural – je m’en excuse auprès des avocats – et cette conflictualité n’est évidemment pas systématique.

Pour autant, dans certaines situations, la présence d’un avocat peut introduire de la conflictualité et biaiser – je ne sais pas si ce terme est correct – la relation entre les parents et l’enfant. Je pense par exemple à un enfant qui est victime non pas de maltraitance ou de violence, mais de carence éducative : les relations entre les parents et l’enfant se passent bien, mais, pour de multiples raisons, il y a carence éducative et le juge doit prendre des mesures. La présence d’un avocat pour représenter l’enfant « contre » ses parents pourrait finalement se révéler contre-productive dans certains cas. C’est pourquoi la systématisation ne me semble pas pertinente.

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 437.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 357, modifié.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l’article 7 bis est ainsi rédigé, et les amendements nos 158, 159, 202 rectifié bis, 399 et 329 rectifié bis n’ont plus d’objet.

Article 7 bis
Dossier législatif : projet de loi relatif à la protection des enfants
Article 9

Article 8

(Non modifié)

Le second alinéa de l’article L. 223-3 du code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :

1° Après la première phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée : « En cas d’urgence, le service informe le juge compétent dans un délai de quarante-huit heures à compter de la décision de modification du lieu de placement. » ;

2° La seconde phrase est remplacée par deux phrases ainsi rédigées : « Le service départemental de l’aide sociale à l’enfance justifie obligatoirement la décision de modification du lieu de placement. En cas de séparation d’une fratrie, le service départemental de l’aide sociale à l’enfance justifie obligatoirement sa décision et en informe le juge compétent dans un délai de quarante-huit heures au plus. »

M. le président. Je suis saisi de six amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 414 rectifié, présenté par MM. Requier, Artano, Bilhac, Cabanel, Fialaire, Gold et Guérini, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et M. Roux, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 1

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…° À la première phrase, les mots : « en informe » sont remplacés par le mot : « consulte » ;

La parole est à M. Jean-Claude Requier.

M. Jean-Claude Requier. Certains enfants pris en charge par l’ASE connaissent des parcours chaotiques, marqués par de fréquentes ruptures dans les modalités de prise en charge.

Si les changements peuvent être motivés par des raisons légitimes, il arrive malheureusement qu’ils le soient par des considérations extérieures à l’intérêt supérieur de l’enfant. Or ils peuvent perturber l’enfant et susciter des ruptures de prise en charge.

Aussi, nous nous félicitons que l’article 8 tende à renforcer l’information du juge en cas de changement du lieu de placement de l’enfant décidé par les services de l’aide sociale à l’enfance.

Pour autant, nous souhaiterions que le juge soit consulté, et non plus seulement informé.

M. le président. L’amendement n° 63 rectifié quinquies, présenté par Mme Billon, M. de Belenet, Mmes de La Provôté, Dindar, Jacquemet et Vérien et MM. Capo-Canellas, Delcros, S. Demilly, Détraigne, Duffourg, Hingray, Kern, Lafon, Le Nay, Levi, Louault et Longeot, est ainsi libellé :

Alinéas 2 et 3

Remplacer ces alinéas par trois alinéas ainsi rédigés :

1° À la première phrase, les mots : « il en informe » sont remplacés par les mots : « il consulte » ;

2° Après la même première phrase, sont insérées deux phrases ainsi rédigées : « Le juge dispose de quinze jours pour rendre un avis sur la décision du service départemental. Passé ce délai, l’avis est réputé conforme. » ;

3° La seconde phrase est ainsi rédigée : « En cas d’urgence, le juge compétent est avisé de la modification du lieu de placement dans les meilleurs délais. »

La parole est à Mme Annick Billon.

Mme Annick Billon. Cet amendement vise à ce que le juge soit consulté, et non plus seulement informé, avant un changement de lieu de placement, sauf en cas d’urgence.

Les changements de lieu de placement peuvent avoir d’importantes conséquences sur l’enfant. Il paraît normal que le juge des enfants qui suit l’enfant soit informé, mais aussi qu’il puisse donner son avis sur ce changement de placement. Sans retour de la part du juge au bout de quinze jours après la notification par le conseil départemental, le changement de lieu de placement serait considéré comme approuvé.

M. le président. L’amendement n° 331 rectifié bis, présenté par MM. Iacovelli et Rambaud, Mme Schillinger, MM. Buis, Rohfritsch et Lévrier, Mmes Duranton et Havet, M. Théophile et Mme Dindar, est ainsi libellé :

Alinéas 2 et 3

Remplacer ces alinéas par trois alinéas ainsi rédigés :

1° À la première phrase, les mots : « il en informe » sont remplacés par les mots : « il consulte » ;

2° Après la même première phrase, sont insérées deux phrases ainsi rédigées : « Le juge dispose de quinze jours pour donner son avis sur la décision du service départemental. Passé ce délai, la décision est réputée approuvée. » ;

3° La seconde phrase est ainsi rédigée : « En cas d’urgence, le juge compétent est avisé de la modification du lieu de placement dans les meilleurs délais. »

La parole est à M. Xavier Iacovelli.

M. Xavier Iacovelli. Nous souhaitons que soit prévue la consultation du juge avant un changement de lieu de placement, sauf en cas d’urgence.

Selon l’article 8 du présent projet de loi, le juge est « informé » de ce changement. Or une telle décision peut avoir d’importantes conséquences sur l’enfant, même si elle est justifiée. Il apparaît donc pertinent que le juge des enfants ne soit pas seulement informé, mais « consulté », et qu’il puisse donner un avis sur le changement de lieu de placement.

Une telle décision est souvent prise pour protéger l’enfant. Un délai de quinze jours durant lequel le juge peut donner son avis est donc prévu afin de ne pas causer de préjudice à l’enfant. En l’absence de réponse, le changement de lieu de placement serait considéré comme approuvé.

Il s’agit, vous l’aurez compris, de protéger l’intérêt supérieur de l’enfant.

M. le président. L’amendement n° 316 rectifié, présenté par MM. Iacovelli, Lévrier, Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :

Alinéas 2 et 3, première phrase

Remplacer les mots :

de placement

par les mots :

d’accueil

La parole est à M. Xavier Iacovelli.

M. Xavier Iacovelli. Cet amendement vise à s’assurer que la terminologie évolue en même temps que les pratiques : or le mot « placement », utilisé dans cet article 8, ne semble pas décrire avec justesse la réalité. Le texte que nous examinons a comme boussole l’intérêt supérieur de l’enfant et cet intérêt doit se retrouver dans les politiques publiques que nous menons.

Mes chers collègues, les mots ont leur importance et, en parlant de lieu « de placement », nous oublions tout le reste pour l’enfant. Au-delà d’un placement, c’est un nouveau lieu de vie pour le jeune, un lieu pour panser les plaies du passé, pour avancer et pour s’épanouir.

Il nous paraît important que la terminologie que nous choisissons reflète tout cela. C’est pourquoi nous préférons l’expression « lieu d’accueil ».

M. le président. L’amendement n° 398, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 3, première phrase

Remplacer les mots :

de placement

par les mots :

d’accueil

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Mme Laurence Cohen. Cet amendement va dans le même sens que celui que vient de présenter M. Iacovelli.

Dans le projet de loi, on parle à plusieurs reprises de « confier » un enfant plutôt que de le « placer », ce qui correspond à des orientations différentes. En tant qu’orthophoniste, et comme beaucoup d’entre vous, je suis sensible à la terminologie : il est extrêmement important de bien nommer les choses. Nous devons aller au bout de la logique et ne plus parler de lieux de placement, mais de lieux d’accueil. C’est bien de cela qu’il s’agit dans ce texte.

M. le président. L’amendement n° 425 rectifié, présenté par MM. Requier, Artano, Bilhac, Cabanel, Fialaire, Gold et Guérini, Mme Guillotin et MM. Guiol et Roux, est ainsi libellé :

Alinéa 3, seconde phrase

Après le mot :

décision

insérer les mots :

, en application du troisième alinéa de l’article 375-7 du code civil

La parole est à M. Jean-Claude Requier.

M. Jean-Claude Requier. Il s’agit d’un amendement de précision. L’article 8 prévoit que les séparations de fratries peuvent être effectuées sur l’initiative de l’ASE, si celle-ci en justifie la nécessité devant le juge, mais la rédaction ne précise pas sur quel fondement cette justification devra se faire. Dans son avis, la Défenseure des droits estime qu’un renvoi à l’article 375-7 du code civil serait opportun.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Bernard Bonne, rapporteur. Ces amendements en discussion commune portent sur des sujets différents.

En ce qui concerne l’information du juge en cas de changement du lieu de placement, je souhaite rappeler que les choses sont bien encadrées : lorsque l’ASE envisage de modifier le lieu de placement, la loi prévoit déjà que le service doit en informer le juge, qui est décisionnaire en la matière, au moins un mois avant la mise en œuvre de la décision. Une telle durée me semble suffisante pour que le juge puisse accepter ou non cette décision.

L’article 8 prévoit d’ajouter l’obligation pour l’ASE de justifier sa décision et l’information du juge en cas d’urgence dans les 48 heures à compter de la décision. Il peut en effet arriver qu’un problème très grave apparaisse dans une famille et qu’il faille déplacer l’enfant tout de suite : dans ce cas, le juge sera averti très vite après la décision, mais, dans les autres situations, il le sera un mois avant la décision de changement de lieu.

C’est pourquoi les amendements nos 414 rectifié, 63 rectifié quinquies et 331 rectifié bis, qui prévoient que le juge soit consulté plutôt qu’informé, me semblent satisfaits. Le code précise déjà que le juge est saisi et qu’il peut d’office et à tout moment modifier les décisions qu’il a prises. Son information me semble suffisante et correctement encadrée.

Par conséquent, la commission demande le retrait de ces amendements ; à défaut, l’avis serait défavorable.

En ce qui concerne les amendements nos 316 rectifié et 398, je suis d’accord : il serait beaucoup plus pertinent de parler de lieux d’accueil que de lieux de placement.

Néanmoins, il s’agit d’une expression qui est utilisée à de nombreux endroits du texte, ainsi que du code, et il ne me semble pas judicieux, pour des raisons de sécurité juridique et de lisibilité du droit, de la modifier uniquement à un ou deux alinéas de l’article 8 de ce projet de loi. Si nous la décidions, il faudrait opérer cette modification partout où elle est nécessaire, ce qui est un exercice compliqué à mettre en œuvre.

La commission est donc défavorable à ces amendements.

Enfin, en ce qui concerne l’amendement n° 425 rectifié, insérer une référence à l’article 375-7 du code civil ne me paraît pas nécessaire.

Cet article prévoit, certes, que le lieu de placement doit être changé, en prenant en compte le maintien des liens entre frères et sœurs, mais il ne fait pas référence à l’obligation pour l’ASE de justifier sa décision de séparation, comme le prévoit l’article 8. Raccrocher cette disposition de l’article 8 à celle du code civil n’apparaît donc pas opportun.

Par conséquent, l’avis est défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Adrien Taquet, secrétaire dÉtat. Le Gouvernement émet un avis favorable sur les amendements nos 425 rectifié de M. Requier, 316 rectifié de M. Iacovelli et 398 de Mme Cohen.

En revanche, il est défavorable aux amendements nos 414 rectifié, 63 rectifié quinquies et 331 rectifié bis.

Comme l’a indiqué le rapporteur, l’article 8 renforce déjà les conditions qui entourent la décision de changement de lieu de placement de l’enfant ; il tend notamment à supprimer les exceptions à l’information du juge et à rendre obligatoire la motivation de sa décision par l’ASE.

Les amendements nos 63 rectifié quinquies et 331 rectifié bis tendent en outre à prévoir que le juge dispose de 15 jours pour rendre son avis. Que se passe-t-il durant ce délai ? Comment est pris en compte l’intérêt supérieur de l’enfant ? Cette mesure pourrait se révéler contraire à l’objectif.

Pour ces raisons, l’avis est défavorable sur ces trois amendements.