Mme Annie Le Houerou. Afin de mieux accompagner les mineurs victimes de prostitution, il est proposé une nouvelle dérogation à l’exercice du secret professionnel prévu à l’article 226-13 du code pénal. Il s’agit d’étendre le dispositif de levée du secret professionnel dès lors qu’un mineur exerce une activité prostitutionnelle, sans qu’il soit nécessaire d’établir que ce mineur soit victime de sévices ou de privations laissant présumer des violences à son encontre.
Cette rédaction reprend ainsi les dispositions de l’article 13 de la loi précitée du 4 mars 2002, selon lequel « tout mineur qui se livre à la prostitution, même occasionnellement, est réputé en danger ».
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Bonne, rapporteur. Les amendements nos 17 rectifié nonies et 253 visent à codifier, dans le code civil, la disposition de l’article 13 de la loi du 4 mars 2002 relative à l’autorité parentale, selon laquelle « tout mineur qui se livre à la prostitution […] est réputé en danger ». Cela améliorerait la lisibilité du droit ainsi que la visibilité et la prise en compte de cette disposition par les professionnels.
Toutefois, contrairement à l’amendement n° 253, l’amendement n° 17 rectifié nonies tend à supprimer la disposition ainsi codifiée du texte d’origine, la loi du 4 mars 2002. En effet, pour des raisons de clarté et de sécurité juridique, il est préférable que, parallèlement à toute codification, on procède à une telle suppression.
Pour ces raisons, la commission demande le retrait de l’amendement n° 253, au profit de l’amendement n° 17 rectifié nonies, sur lequel elle a émis un avis favorable.
Quant à l’amendement n° 254, il paraît satisfait par la lecture combinée de l’article 226-14 du code pénal, dont le 2° concerne déjà les mineurs en danger ou risquant de l’être, et de la disposition selon laquelle « tout mineur qui se livre à la prostitution […] est réputé en danger ».
L’intention des auteurs de l’amendement étant satisfaite par le droit en vigueur, la commission en demande le retrait ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Commençons par l’amendement n° 254, relatif à la levée du secret médical pour un mineur victime de prostitution. Je confirme l’analyse de M. le rapporteur : cet amendement est effectivement satisfait par le droit en vigueur.
En revanche, en ce qui concerne les amendements nos 17 rectifié nonies et 253, le Gouvernement a une analyse divergente, qui le conduit à demander le retrait de ces amendements au profit de son amendement n° 355 rectifié.
En effet, les auteurs de ces amendements proposent de modifier le code civil, plus précisément son article 375.
En premier lieu, cet article est formulé dans des termes généraux, globaux : « Si la santé, la sécurité ou la moralité d’un mineur non émancipé sont en danger, ou si les conditions de son éducation ou de son développement physique, affectif, intellectuel et social sont gravement compromises, des mesures d’assistance éducative peuvent être ordonnées par justice. » On ne cible donc pas, dans cet article, une menace ni un danger précis.
Or vous proposez de modifier cet article en ciblant les faits de prostitution, donc en détaillant partiellement les menaces visées dans l’article 375, ce qui remet en cause le caractère général de cette disposition. Si l’on cite la prostitution, il faudra également lister tous les autres dangers menaçant les enfants et pouvant donner lieu à une mesure d’assistance éducative.
Ainsi, en premier lieu, maintenons le caractère général de la rédaction de cet article, ne commençons pas à lister les menaces, puisque, je le répète, si l’on cite une menace, il faut les lister toutes.
En second lieu, c’est vrai, la loi de 2002 précitée qualifie les mineurs se livrant à la prostitution de victimes et – c’est tout aussi exact – cela n’a pas donné lieu à codification. Or, en effet, le groupe de travail sur la prostitution des mineurs que j’ai mis en place, présidé par Catherine Champrenault, a préconisé la codification de cette mesure.
Toutefois, depuis 2002, il y a eu deux lois, celle de 2007 et celle de 2016, qui instaurent un principe de subsidiarité. C’est pourquoi il nous semble préférable de cibler non le code civil, mais le code de l’action sociale et des familles, dans lequel nous proposons d’inscrire, par l’amendement n° 355 rectifié que je vais vous présenter dans un instant, le fait que les enfants se livrant à la prostitution sont réputées victimes et doivent à ce titre, être protégées par l’aide sociale à l’enfance. Ainsi, au nom de ce principe de subsidiarité, il convient de modifier le code de l’action sociale et des familles et non le code civil.
C’est la seconde raison pour laquelle je vous demande de bien vouloir retirer les amendements nos 17 rectifié nonies et 253, au bénéfice de l’amendement n° 355 rectifié du Gouvernement, qui a le même objectif et a une formulation proche, mais qui vise le bon code.
M. le président. En conséquence, un article ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l’article 4, et les amendements nos 253 et 254 n’ont plus d’objet.
L’amendement n° 355 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Avant l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le 5° bis de l’article L. 221-1 du code de l’action sociale et des familles, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« 5° … Apporter un soutien matériel, éducatif et psychologique au mineur qui se livre à la prostitution, même occasionnellement, réputé en danger ; ».
La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Pour être clair, mesdames, messieurs les sénateurs, vous venez de modifier l’article 375 du code civil en ne citant qu’une menace pesant sur les mineurs ; cela exclut donc toutes les autres. Il faudra soit veiller à compléter cet article, soit – ce que nous essaierons de faire, je pense – revenir à la formulation générale initiale.
En ce qui concerne l’amendement n° 355 rectifié, il se justifie, je crois, par son texte même.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Bonne, rapporteur. Monsieur le secrétaire d’État, je crois que nous sommes d’accord sur le fond, mais, du point de vue légistique, nous sommes effectivement en désaccord.
La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement, dans la mesure où le Sénat vient d’adopter l’amendement n° 17 rectifié nonies.
M. le président. Monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, il est presque minuit. Je vous propose de prolonger la séance jusqu’à zéro heure trente, afin de poursuivre plus avant l’examen de ce texte.
Il n’y a pas d’observation ?…
Il en est ainsi décidé.
L’amendement n° 249, présenté par Mmes Meunier et Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Le Houerou et Jasmin, M. Jomier, Mmes Poumirol, Rossignol et Harribey, M. Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Avant l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur la prostitution des mineurs non accompagnés y associant l’ensemble des partenaires utiles afin de mieux identifier les spécificités de l’exploitation sexuelle de ces mineurs, d’élaborer des outils adaptés à leur situation à destination des professionnels afin de renforcer leur identification et leur accompagnement. Ce rapport associe en particulier le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes, la mission interministérielle pour la protection des femmes contre les violences et la lutte contre la traite des êtres humains et le Conseil national de la protection de l’enfance.
La parole est à Mme Michelle Meunier.
Mme Michelle Meunier. Catherine Champrenault, procureure générale près la cour d’appel de Paris et présidente du groupe de travail sur la prostitution des mineurs, le rappelle, les MNA forment l’essentiel des victimes masculines de la prostitution des mineurs. Cette magistrate observe également que la prise en charge, par l’ASE, de ces mineurs particulièrement vulnérables intervient après « un certain temps » et que les spécificités de cette population plaident en faveur de travaux complémentaires.
Il convient donc d’approfondir ce travail par la rédaction d’un rapport spécifique associant les partenaires identifiés, dans l’Hexagone comme en outre-mer.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Bonne, rapporteur. S’agissant d’une demande de rapport, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Je vais abonder dans votre sens, madame la sénatrice, mais je vous indique d’emblée que votre amendement est satisfait.
On dispose globalement de très peu de données sur la prostitution des mineurs. Il existe une première étude sur la prostitution des enfants, au financement de laquelle nous participons depuis novembre 2019, qui est menée par Mélanie Dupont, de l’Hôtel-Dieu, et deux autres personnes. Un rapport intermédiaire m’a d’ailleurs été remis voilà quelques jours.
En outre, dans le cadre du premier plan national de lutte contre la prostitution des enfants, présenté le 15 novembre dernier, nous allons financer des études sur cette question, puisque nous manquons de données quantitatives et qualitatives.
Enfin, deux autres études spécifiques seront financées et porteront, d’une part, sur la question des mineurs non accompagnés – cela répond à votre préoccupation – et, d’autre part, sur la prostitution des enfants dans les outre-mer, qui représente une problématique spécifique sur laquelle nous devons approfondir nos connaissances.
Ainsi, votre amendement étant satisfait, je vous propose de le retirer, madame la sénatrice.
M. le président. Madame Meunier, l’amendement n° 249 est-il maintenu ?
Mme Michelle Meunier. Non, sur le fondement de ces explications, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 249 est retiré.
L’amendement n° 252, présenté par Mmes Rossignol, Meunier et Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Le Houerou et Jasmin, M. Jomier, Mmes Poumirol et Harribey, M. Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Avant l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai d’un an après la promulgation de la présente loi, un rapport relatif à l’amélioration de la coopération entre les acteurs de prévention de la prostitution des mineurs, en examinant en particulier la mise en place de protocoles efficaces de repérage et d’accompagnement entre le parquet, la justice, la protection de l’enfance, l’Éducation nationale et les professionnels de santé.
La parole est à Mme Victoire Jasmin.
Mme Victoire Jasmin. Cet amendement d’appel, qui s’inscrit dans la continuité des propos précédents, vise à souligner, dans la droite ligne des recommandations remises au Gouvernement l’été dernier, la nécessaire coordination institutionnelle dans la prévention de la prostitution des mineurs et dans la protection des mineurs victimes.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Bonne, rapporteur. Demande de rapport : avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 252.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 4
I. – L’article L. 133-6 du code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, les mots : « à quelque titre que ce soit » sont remplacés par les mots : « permanente ou occasionnelle, à quelque titre que ce soit, y compris bénévole » ;
2° Après le douzième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le respect des incapacités mentionnées aux douze premiers alinéas du présent article est vérifié par la délivrance du bulletin n° 2 du casier judiciaire dans les conditions prévues à l’article 776 du code de procédure pénale et par l’accès aux informations contenues dans le fichier judiciaire national automatisé des auteurs d’infractions sexuelles ou violentes dans les conditions prévues à l’article 706-53-7 du même code, avant l’exercice des fonctions et lors de leur exercice à intervalles de temps réguliers, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État. »
II. – Le I entre en vigueur le premier jour du neuvième mois suivant la publication de la présente loi.
M. le président. L’amendement n° 353 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. – Le code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° L’article L. 133-6 est ainsi rédigé :
« Art. L. 133-6. – Nul ne peut exploiter ni diriger l’un quelconque des établissements, services ou lieux de vie et d’accueil régis par le présent code ou ceux mentionnés à l’article L. 2324-1 du code de la santé publique, y intervenir ou y exercer une fonction permanente ou occasionnelle, à quelque titre que ce soit, y compris bénévole, ou être agréé au titre des dispositions du présent code, s’il a été définitivement condamné soit pour un crime, soit pour les délits prévus :
« – Au chapitre Ier du titre II du livre II du code pénal, à l’exception des articles 221-6 à 221-6-2 ;
« - Au chapitre II du titre II du livre II du même code, à l’exception des articles 222-19 à 222-20-2 ;
« - Aux chapitres III, IV, V et VII du titre II du livre II du même code et à l’article 321-1 du même code lorsque le bien recelé provient des infractions mentionnées à l’article 227-23 ;
« - Au titre Ier du livre III du même code ;
« - À la section 2 du chapitre II, du titre II du livre III du même code ;
« - Au titre Ier du livre IV du même code ;
« – Au titre II du livre IV du même code.
« L’incapacité prévue au premier alinéa s’applique également en cas de condamnation définitive à une peine supérieure à deux mois d’emprisonnement sans sursis pour les délits prévus :
« – Aux articles 221-6 à 221-6-2 et 222-19 à 222-20-2 du code pénal ;
« - Au chapitre Ier du titre II du livre III du même code ;
« - Aux paragraphes 2 et 5 de la section 3 du chapitre II du titre III du livre IV du même code ;
« - À la section 1 du chapitre III du titre III du livre IV du même code ;
« – À la section 2 du chapitre IV du titre III du livre IV du même code ;
« – Au chapitre Ier du titre IV du livre IV du même code ;
« – À l’article L. 3421-4 du code de la santé publique.
« Le respect des incapacités mentionnées aux précédents alinéas est vérifié, par la délivrance du bulletin n° 2 du casier judiciaire dans les conditions prévues à l’article 776 du code de procédure pénale et par l’accès aux informations contenues dans le fichier judiciaire national automatisé des auteurs d’infractions sexuelles ou violentes dans les conditions prévues à l’article 706-53-7 du même code, avant l’exercice des fonctions et lors de leur exercice à intervalles de temps réguliers.
« En cas de condamnation, prononcée par une juridiction étrangère et passée en force de chose jugée, pour une infraction constituant, selon la loi française, un crime ou l’un des délits mentionnés aux alinéas précédents, le tribunal judiciaire du domicile du condamné, statuant en matière correctionnelle, déclare, à la requête du ministère public, qu’il y a lieu à l’application de l’incapacité d’exercice prévue au présent article, après constatation de la régularité et de la légalité de la condamnation et l’intéressé dûment appelé en chambre du conseil.
« Les personnes frappées d’une incapacité d’exercice peuvent demander à en être relevées dans les conditions prévues aux articles 132-21 du code pénal, 702-1 et 703 du code de procédure pénale. Cette requête est portée devant la chambre des appels correctionnels de la cour d’appel dans le ressort de laquelle le requérant réside lorsque la condamnation résulte d’une condamnation étrangère et qu’il a été fait application des dispositions de l’alinéa précédent.
« Par dérogation aux dispositions de l’article 133-16 du code pénal, les incapacités prévues par le présent article sont applicables en cas de condamnation définitive figurant au fichier judiciaire national automatisé des auteurs d’infractions sexuelles ou violentes même si cette condamnation n’est plus inscrite au bulletin n° 2 du casier judiciaire. » ;
2° Au III de l’article L. 214-1-1, les mots : « à l’exception de celles des 4° et 5° de cet article » sont supprimés.
II. – 1° Le présent article entre en vigueur le premier jour du neuvième mois suivant la publication de la présente loi.
2° Le III de l’article L. 214-1-1 du code de l’action sociale et des familles, dans sa rédaction issue de la présente loi, entre en vigueur le premier jour du neuvième mois suivant la publication de la présente loi.
La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Conformément à ce qui a été préconisé par le Conseil d’État dans son avis sur ce projet de loi, cet amendement vise à clarifier le régime juridique de l’incapacité d’une personne à intervenir ou à exercer une fonction dans un établissement relevant du code de l’action sociale et des familles en raison de ses antécédents judiciaires.
Nous abordons ici la question du meilleur contrôle des antécédents judiciaires de tout le personnel travaillant auprès des enfants, sans se limiter à l’ASE. C’est l’une des priorités du Gouvernement depuis la création de mon secrétariat d’État.
La rédaction de l’article L. 133-6 du code précité serait clarifiée par l’adoption de cet amendement, grâce, d’une part, à l’introduction d’une distinction selon la nature de l’infraction commise – atteinte aux personnes et atteinte aux biens – et, d’autre part, à la mention du quantum de la peine prononcée selon le type de délit.
Cet amendement tend par ailleurs à modifier l’état du droit en ajoutant les crimes et délits suivants : les destructions, dégradations et détériorations dangereuses, les actes de terrorisme et les atteintes aux intérêts fondamentaux de la Nation.
Il a également pour objet de conserver les améliorations apportées par la commission des affaires sociales à l’alinéa prévoyant les modalités de contrôle des antécédents, par référence à la consultation du bulletin n° 2 du casier judiciaire et du fichier judiciaire national automatisé des auteurs d’infractions sexuelles ou violentes (Fijais). En effet, un certain nombre d’infractions peuvent disparaître du bulletin n° 2, ce qui pose problème, car elles ne sont alors plus visibles, tout en restant inscrites au Fijais. D’où la nécessité de viser ce fichier national.
Dès lors que le texte prévoit la consultation du Fijais, il convient de préciser que toute condamnation définitive figurant dans ce fichier entraîne l’incapacité prévue par les nouvelles dispositions, même si la condamnation ne figure plus au bulletin n° 2 du casier judiciaire.
Par ailleurs, la rédaction de l’article L. 214-1-1 du même code est également modifiée, afin d’être mise en cohérence avec l’article L. 133-6 ; cela relève de la coordination.
Enfin, afin de permettre la mise en œuvre effective des dispositions de l’article L. 133-6 du code de l’action sociale et des familles, la direction générale de la cohésion sociale développe un système informatique dont le délai de mise en œuvre devrait permettre, selon les estimations, l’application de ces dispositions neuf mois après la publication de la présente loi.
En effet, c’est très bien de prévoir la consultation systématique du Fijais pour contrôler les antécédents judiciaires de toute personne qui travaille auprès des enfants, mais encore faut-il que, lorsqu’un département veut embaucher, par exemple, un travailleur social et a fait une demande à la préfecture, il reçoive l’information rapidement, avant d’avoir été forcé d’embaucher ce travailleur en raison des besoins en encadrement.
Il nous faut généraliser l’automatisation du système de contrôle des antécédents judiciaires et des fichiers, sur le modèle de ce qui se fait déjà depuis des années au sein des services de l’éducation nationale et de la jeunesse et des sports, lesquels passent chaque année des millions de personnes au crible parce qu’elles travaillent auprès des enfants.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Bonne, rapporteur. Cet amendement tend à clarifier, actualiser et sécuriser les dispositions listant les incapacités d’exercer une activité professionnelle ou bénévole dans le secteur social et médico-social, en cas de condamnation pour crime ou pour certains délits.
Je constate avec satisfaction que le dispositif de l’amendement reprend les apports de la commission, qui a prévu explicitement la consultation du bulletin n° 2 du casier judiciaire et du Fijais pour contrôler les incapacités. Cet ajout procède d’une recommandation de la mission commune d’information sur la répression de violences sexuelles sur mineurs, qui a rendu son rapport en 2019.
L’application de ces mesures est indispensable pour assurer une prévention efficace des risques de maltraitance dans les établissements sociaux, qui accueillent des personnes souvent très vulnérables. Or, en pratique, les contrôles sont peu effectués et cela varie beaucoup d’un secteur à l’autre, d’un territoire à un autre ; cela n’est pas acceptable.
Au-delà de l’écriture de la loi, le Gouvernement est responsable de l’application de celle-ci. Je sais que des travaux sont en cours pour déployer des outils permettant d’assurer des contrôles systématiques et informatisés ; j’invite donc le Gouvernement, monsieur le secrétaire d’État, à faire de ce chantier une priorité, afin d’assurer au plus vite la protection des personnes accueillies dans les établissements.
Cela dit, la commission est tout à fait favorable à cet amendement.
M. le président. En conséquence, l’article 4 est ainsi rédigé, et les amendements nos 315 rectifié, 401, 187 rectifié, 210 rectifié bis, 255 et 307 rectifié n’ont plus d’objet.
Après l’article 4
M. le président. L’amendement n° 441, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le sixième alinéa de l’article L. 421-3 du code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° Les mots : « au domicile » sont remplacés par les mots : « le cas échéant au lieu d’exercice » ;
2° Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « L’agrément n’est pas accordé si l’un des majeurs vivant le cas échéant au lieu d’exercice du demandeur est inscrit au fichier judiciaire automatisé des auteurs d’infractions sexuelles ou violentes, à l’exception des majeurs accueillis en application d’une mesure d’aide sociale à l’enfance. »
II. – Les dispositions prévues au présent article entrent en vigueur le premier jour du neuvième mois suivant la publication de la présente loi.
La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Cet amendement porte sur les assistants maternels. L’article 10 crée – nous y reviendrons – une base nationale d’agrément pour les assistants familiaux et la commission a étendu cette base nationale aux assistants maternels.
Le présent amendement de coordination se rapporte à cet ajout, pour prévoir la nécessité de contrôler les antécédents judiciaires des adultes qui résident au domicile des assistants maternels, l’idée étant de protéger les enfants accueillis.
Aujourd’hui, les antécédents judiciaires des majeurs vivant au domicile des assistants maternels sont déjà contrôlés mais ces professionnels sont de plus en plus nombreux à préférer n’exercer qu’en dehors de leur domicile, dans une maison d’assistantes maternelles.
Par cet amendement, nous proposons de préciser que le contrôle des antécédents judiciaires n’est pas requis lorsque les assistants maternels exercent dans ces maisons ; il ne le sera que lorsqu’elles sont chez elles, où se trouvent d’autres adultes.
Second point important de cet amendement : l’extension au Fijais, au-delà du seul bulletin n° 2, du champ de la vérification réalisée à l’égard des majeurs vivant sur le lieu d’exercice des assistants maternels et des assistants familiaux. Il s’agit là de la question des conjoints de ces derniers.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Et de leurs enfants !
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Et de leurs enfants majeurs, en effet.
En réalité, il y a probablement encore un peu de travail à accomplir à ce sujet,…
M. Bernard Bonne, rapporteur. Tout à fait.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. … travail qui ne relève d’ailleurs pas forcément de la loi.
Il y a en effet deux versants à la question des conjoints.
D’une part se pose la question du contrôle des conjoints et des autres adultes qui vivent au domicile des assistants familiaux, à laquelle cet amendement tend à répondre.
D’autre part se pose la question plus large du statut du conjoint de l’assistant familial. C’est dans ce domaine que le travail doit encore être fait, en concertation avec les associations et les syndicats d’assistants familiaux. En effet, on le sait, le conjoint joue souvent un rôle. Il vit dans le foyer, avec les enfants, et il peut lui arriver, pour dépanner, d’accompagner les enfants à l’école ou chez le médecin. Or il n’est pas protégé à ce titre ; en cas d’accident de voiture avec un enfant, il n’a aucun statut ni aucune protection.
Au-delà du contrôle du conjoint, que cet amendement tend à résoudre, se pose donc la question du statut du conjoint. Il y a matière à réflexion sur le statut du conjoint des assistants familiaux. Nous n’avons pas encore eu la possibilité de conduire ce travail jusqu’à présent ; cela pourra être fait à l’avenir, sous réserve que les associations et syndicats l’estiment nécessaire, ce dont je ne doute guère…