Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Corinne Imbert, rapporteure. Nous partageons la volonté des auteurs de cet amendement d’accroître davantage encore les moyens consacrés à la lutte contre la fraude. Néanmoins, les mesures qu’ils proposent paraissent à la commission quelque peu excessives.

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 a déjà porté le plafonnement de la sanction de 50 % à 70 % des sommes concernées.

Par ailleurs, cet amendement tend à supprimer le pouvoir d’appréciation du directeur de l’organisme local d’assurance maladie en lui retirant la possibilité d’abandonner des poursuites. Quelle que soit l’importance des enjeux, il ne paraît pas souhaitable de lier les mains du détenteur du pouvoir de sanction et de verser dans le « systématisme » : le principe de proportionnalité doit rester applicable à ces sanctions.

En outre, l’amendement vise à modifier un ancien article du code de la sécurité sociale, qui n’est plus en vigueur.

Pour toutes ces raisons, l’avis est défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Adrien Taquet, secrétaire dÉtat. Même avis, pour les mêmes raisons.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 837 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 41 ter - Amendement  n° 837 rectifié bis
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022
Article 41 quater (nouveau)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 595 rectifié est présenté par M. Sautarel, Mme Belrhiti, MM. Klinger et Anglars, Mme Bellurot, MM. Bouchet, Darnaud, Charon, Perrin, Rietmann, Belin, Chaize, Genet, Rojouan, Favreau et Tabarot, Mmes Demas, Schalck et Dumont, MM. Cambon, Duplomb et J.M. Boyer et Mme Muller-Bronn.

L’amendement n° 623 rectifié quater est présenté par Mme Meunier, MM. Tissot, Michau, Pla et Antiste, Mme Van Heghe, MM. Montaugé, Bourgi, Houllegatte et Jeansannetas, Mme Féret, M. Gillé, Mmes Conway-Mouret, Rossignol et Poumirol, M. P. Joly, Mme Monier, M. Vaugrenard, Mme Bonnefoy, MM. Chantrel, Cardon et Temal et Mmes Blatrix Contat, Briquet et Le Houerou.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 41 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Afin de construire un modèle économique pérenne permettant d’assurer aux centres de santé une viabilité économique, le Gouvernement remet au Parlement, dans les six mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport évaluant les besoins de financement de l’activité des infirmiers en centre de santé. Ce rapport émet des préconisations pour le soutien de cette activité de soins au sein des centres de santé.

L’amendement n° 595 rectifié n’est pas soutenu.

La parole est à Mme Michelle Meunier, pour présenter l’amendement n° 623 rectifié quater.

Mme Michelle Meunier. Les centres de santé participent à la politique de maintien à domicile des personnes âgées et handicapées. Outils de prévention des hospitalisations, ils s’inscrivent pleinement dans la stratégie Ma santé 2022. Reconnus par le code de la santé, ces centres sont aussi une réponse à la désertification médicale, mais leur pérennité est menacée, leur situation financière de plus en plus précaire, et ils ne peuvent pas absorber les augmentations légitimées par le Ségur de la santé, et prévues à son avenant 43 relatif aux rémunérations dans la branche de l’aide à domicile, qui se matérialisera par une augmentation de 15 % en moyenne de la masse salariale.

Dans mon département de la Loire-Atlantique, le centre de santé d’Ancenis emploie 17 infirmières. Le calcul est vite fait : l’évolution de la rémunération entraîne un surcoût de 90 000 euros. Si l’on estime que les fonds propres de l’organisation gestionnaire sont de 150 000 euros environ, l’espérance de vie de ce centre de santé ne dépassera pas deux à trois ans.

Dans quelques mois, si rien n’est envisagé, c’est l’ensemble des activités de ces centres qui sera en péril et qui devra s’arrêter, laissant ainsi encore un grand nombre de patients sans réponse.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Corinne Imbert, rapporteure. Ma chère collègue, vous connaissez l’issue de cette demande de rapport au Parlement évaluant les besoins de financement de l’activité des infirmiers en centre de santé : soit ces rapports ne sont pas remis, soit ils ne sont pas suivis d’effet ! L’avis est donc défavorable.

Néanmoins, vous avez raison de vous interroger sur l’avenir de ces centres de santé, notamment publics. Preuve en est que certaines collectivités, des EPCI ou des conseils départementaux, leur apportent un soutien financier au cours des premières années parce qu’ils déficitaires. C’est un sujet dont nous aurons certainement à reparler.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Adrien Taquet, secrétaire dÉtat. Votre amendement, madame la sénatrice, me semble appeler une réponse de fond. Voilà deux jours, nous avons débattu de questions quelque peu connexes, et j’avais alors émis un avis de sagesse, que je renouvelle sur cet amendement.

Le modèle économique des centres de soins infirmiers pose question. Vous l’avez dit, ils sont dans une situation financière fragile, en raison notamment de leur petite taille. Par ailleurs, depuis le 1er octobre dernier, en effet, en vertu de l’avenant relatif aux rémunérations dans la branche de l’aide à domicile, les salaires des salariés en relevant ont dû être augmentés, ce qui vous fait craindre la possible fermeture de certains de ces centres et, partant, une détérioration de l’accès aux soins.

Je rappelle que les centres de soins infirmiers facturent à l’acte : ils peuvent donc faire varier leur rémunération en adaptant leur activité et ainsi bénéficier des revalorisations décidées dans le cadre conventionnel.

Le bilan de soins infirmiers, qui était réservé à ce jour aux personnes de plus de 90 ans, sera très prochainement étendu. C’est là un exemple d’opportunité réelle pour ces centres qui leur permettra de mieux valoriser la prise en charge des personnes dépendantes par les infirmiers.

Pour autant, je suis sensible à cette problématique, qui nécessite effectivement une analyse approfondie et un état des lieux de leur situation. Il est opportun de rechercher des solutions adaptées, pourquoi pas dans le cadre de ce rapport, ou dans un autre cadre. Toujours est-il que ce sujet doit être approfondi.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 623 rectifié quater.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 41 ter - Amendements n° 595 rectifié et n° 623 rectifié quater
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022
Article 41 quinquies (nouveau)

Article 41 quater (nouveau)

Le II de l’article 80 de la loi n° 2020-1576 du 14 décembre 2020 de financement de la sécurité sociale pour 2021 est ainsi modifié :

1° À la fin du A, l’année : « 2021 » est remplacée par l’année : « 2022 » ;

2° À la fin du B, l’année : « 2023 » est remplacée par l’année : « 2024 ». – (Adopté.)

Article 41 quater (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022
Article 41 sexies (nouveau)

Article 41 quinquies (nouveau)

I. – Dans le cadre des structures d’exercice coordonné mentionnées aux articles L. 1411-11-1, L. 1434-12, L. 6323-1 et L. 6323-3 du code de la santé publique, l’État peut autoriser les masseurs-kinésithérapeutes à exercer leur art sans prescription médicale pour une durée de trois ans et dans six départements. Un bilan initial et un compte rendu des soins réalisés par le masseur-kinésithérapeute sont adressés au médecin traitant et reportés dans le dossier médical partagé.

II. – Un décret précise les modalités de mise en œuvre de l’expérimentation mentionnée au I du présent article, les départements concernés par cette expérimentation ainsi que les conditions d’évaluation de l’expérimentation en vue d’une éventuelle généralisation.

Mme la présidente. L’amendement n° 976 rectifié bis, présenté par M. Jomier, Mmes Le Houerou et Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Antiste, Mmes Blatrix Contat et Bonnefoy, M. Bouad, Mme Briquet, MM. Chantrel, Durain, Gillé, Jacquin et P. Joly, Mme G. Jourda, MM. Leconte, Lurel, Mérillou et Michau, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme Préville, M. Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal, Tissot, Vaugrenard, Stanzione, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Bernard Jomier.

M. Bernard Jomier. Nous avons voté précédemment le renvoi à la négociation conventionnelle de la définition des modalités du renouvellement des prescriptions par les masseurs-kinésithérapeutes.

Notre amendement de suppression de l’article 41 quinquies fait écho à ce débat que nous avons eu et s’inscrit dans le même ordre d’idées. Cet article prévoit une expérimentation concernant les kinésithérapeutes qui travaillent dans une structure d’exercice coordonné. Il tend à différencier les modalités d’accès à ces professionnels selon le mode et le lieu d’exercice du praticien, distinction qui nous paraît problématique et source d’une complexité supplémentaire pour les assurés sociaux. Il ne figurait pas dans le texte initial : il a été inséré à l’Assemblée nationale sur l’initiative du rapporteur général de la commission des affaires sociales.

Nous n’avions pas demandé la suppression de l’article relatif aux ophtalmologistes et aux orthoptistes, mais ici toutes les conditions sont réunies pour demander que l’article 41 quinquies soit supprimé.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Corinne Imbert, rapporteure. L’avis est défavorable.

Les doutes de la commission sur l’article 41 quinquies portent moins sur sa pertinence en termes d’amélioration de l’accès aux soins que sur sa place dans une loi de financement de la sécurité sociale.

Néanmoins, la commission a souhaité garantir la qualité et la pertinence des soins dans le cadre de l’expérimentation de l’accès direct aux masseurs-kinésithérapeutes en prévoyant que le décret fixant les modalités de cette expérimentation devra être pris en Conseil d’État après avis de la Haute Autorité de santé et de l’Académie nationale de médecine. L’objectif est de mieux encadrer ces expérimentations sur le plan médical.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Adrien Taquet, secrétaire dÉtat. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 976 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 193, présenté par Mme Imbert, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 1

1° Première phrase, au début

Ajouter les mots :

À titre expérimental,

2° Seconde phrase

Compléter cette phrase par les mots :

, dans le respect des conditions prévues au III de l’article L. 1111-17 du même code

II. – Alinéa 2

1° Après le mot :

décret

insérer les mots :

en Conseil d’État, pris après avis de la Haute Autorité de santé et de l’Académie nationale de médecine,

2° Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Un rapport d’évaluation est réalisé au terme de l’expérimentation et fait l’objet d’une transmission au Parlement par le Gouvernement.

La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Corinne Imbert, rapporteure. Cet amendement tend à mieux encadrer l’expérimentation de l’accès direct aux masseurs-kinésithérapeutes.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Adrien Taquet, secrétaire dÉtat. Le Gouvernement est satisfait du dispositif qu’avait imaginé l’Assemblée nationale. Madame la rapporteure, vous proposez d’encadrer l’expérimentation dans une optique un peu plus restrictive.

Par cohérence avec la position que nous avons défendue à l’Assemblée nationale, l’avis donc est plutôt défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

M. René-Paul Savary. La commission a adopté une position intermédiaire. Prévoir un accès direct à certaines professions paramédicales alors même qu’un tel accès aux médecins est impossible – cela serait pourtant nécessaire pour un certain nombre de spécialistes – remet en cause l’organisation des soins, le rôle du médecin référent, etc.

Aussi, il me paraît nécessaire de borner l’expérimentation, nécessaire, de ce dispositif avant d’en envisager la généralisation.

Les choses ne sont pas aussi simples, et le risque existe de passer à côté de possibles complications liées à d’autres pathologies ou au profil génétique du patient, dont la symptomatologie différera de celle qu’on rencontre habituellement.

En conséquence, je suis très réservé sur cette avancée de l’Assemblée nationale : l’article n’a fait l’objet ni de la nécessaire concertation avec les différents ordres concernés ni d’une étude d’impact. Je le redis, borner le dispositif me paraît donc essentiel.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 193.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 365 rectifié ter, présenté par Mme Lassarade, M. Savary, Mme Micouleau, MM. Panunzi et Cadec, Mmes Demas et Gosselin, MM. Grand, Burgoa, Bouchet, Pellevat, J.B. Blanc, Bonne et Charon, Mme Puissat, M. Belin, Mme Chauvin, MM. Tabarot et Brisson, Mmes Bonfanti-Dossat et Dumont, M. Cambon, Mme Di Folco et MM. Mandelli, Gremillet, Sido et Klinger, est ainsi libellé :

Alinéa 1, première phrase

Remplacer les mots :

six départements

par les mots :

au plus six départements d’une même région

La parole est à Mme Florence Lassarade.

Mme Florence Lassarade. Cet amendement tend à préciser que cette expérimentation est effectuée dans six départements d’une même région afin de rendre le dispositif plus cohérent et de permettre à l’ARS d’en avoir une meilleure visibilité.

Mme la présidente. Le sous-amendement n° 663 rectifié bis, présenté par MM. Théophile, Iacovelli, Lévrier et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :

Amendement n° 365

Alinéa 5

1° Remplacer le mot :

six

par le mot :

cinq

2° Compléter cet alinéa par les mots :

et dans au moins un département d’outre-mer

La parole est à M. Dominique Théophile.

M. Dominique Théophile. Dans son rapport Les outre-mer face au défi de laccès aux droits, le Défenseur des droits indiquait, à la suite d’une enquête menée dans ce cadre, que 47,3 % des Guadeloupéennes et des Guadeloupéens et 45 % des Martiniquaises et des Martiniquais citaient l’accès aux soins comme l’une de leurs priorités.

L’accès aux soins est une impérieuse nécessité, tant dans l’Hexagone que dans les outre-mer. Or, en matière de densité médicale, les chiffres sont, dans ces dernières, bien inférieurs à la moyenne nationale. L’expérimentation prévue à l’article 41 quinquies visant à permettre l’accès direct des patients, sans prescription, aux soins de kinésithérapie permettra de renforcer l’accès aux soins. Le présent sous-amendement, qui s’inscrit dans une série de plusieurs amendements du même type, vise à inclure un département d’outre-mer dans cette expérimentation.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Corinne Imbert, rapporteure. L’amendement n° 365 rectifié ter prévoit que l’expérimentation de l’accès direct aux masseurs-kinésithérapeutes devra être réalisée dans « au plus six départements d’une même région ». Il est vrai qu’une expérimentation conduite au niveau régional permettra de garantir une meilleure coordination de son déploiement sous l’égide de l’ARS.

Le sous-amendement n° 663 rectifié bis apporte une précision bienvenue. Il permet de s’assurer que l’expérimentation de l’accès direct aux masseurs-kinésithérapeutes inclura bien un département d’outre-mer : celle-ci aura donc lieu dans au plus cinq départements d’une même région et dans un département d’outre-mer.

L’avis est favorable sur l’amendement et le sous-amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Adrien Taquet, secrétaire dÉtat. Il faut bien comprendre quelles seraient les conséquences concrètes de l’adoption de cet amendement et de ce sous-amendement.

L’avis est plutôt défavorable sur l’amendement n° 365 rectifié ter. Restreindre cette expérimentation à une même région nous semble faire obstacle à l’obtention d’un résultat représentatif des pratiques de l’ensemble des masseurs-kinésithérapeutes. Or, comme l’a clairement rappelé M. Savary, c’est bien là l’objet de cette expérimentation, et un cadre aussi restreint ne permettrait de conclure ni dans un sens ni dans l’autre, alors que tel est l’objectif recherché.

Je comprends et partage l’intention des auteurs du sous-amendement. Je m’engage, au nom du ministre, à tout faire pour qu’un territoire d’outre-mer soit intégré dans l’expérimentation qui sera lancée. En revanche, en faire une condition, inscrite dans la loi, de sa mise en œuvre ne nous paraît pas être une bonne solution et nous semble aller trop loin, notamment au regard des conditions sanitaires actuelles.

Là aussi, l’avis est plutôt défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 663 rectifié bis.

(Le sous-amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 365 rectifié ter, modifié.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 41 quinquies, modifié.

(Larticle 41 quinquies est adopté.)

Article 41 quinquies (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022
Article 41 septies (nouveau)

Article 41 sexies (nouveau)

I. – Dans le cadre des structures d’exercice coordonné mentionnées aux articles L. 1411-11-1, L. 1434-12, L. 6323-1 et L. 6323-3 du code de la santé publique, l’État peut autoriser les orthophonistes à exercer leur art sans prescription médicale pour une durée de trois ans et dans six départements. Un bilan initial et un compte rendu des soins réalisés par l’orthophoniste sont adressés au médecin traitant et reportés dans le dossier médical partagé.

II. – Un décret précise les modalités de mise en œuvre de l’expérimentation mentionnée au I du présent article, les départements concernés par cette expérimentation ainsi que les conditions d’évaluation de l’expérimentation en vue d’une éventuelle généralisation.

Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, sur l’article.

Mme Laurence Cohen. Nous voterons cet article, même s’il est en deçà de ce qui avait été voté ici au Sénat dans le cadre de l’examen de la proposition de loi Rist, s’agissant à la fois des modalités d’expérimentation et de la nécessité de pratiquer dans une structure d’exercice coordonné, alors qu’une grande majorité des orthophonistes exercent en dehors de tout regroupement.

Autant, comme je l’ai indiqué, nous n’étions guère en mesure de nous prononcer sur les orthoptistes, autant je connais bien mieux les pratiques des orthophonistes, compte tenu de mon parcours professionnel.

L’accès direct à ces professionnels ne peut être considéré comme un transfert de compétences ; on reste au cœur du métier. Par ailleurs, la rédaction proposée est de nature à rassurer le corps médical, puisque la prescription médicale sera toujours possible.

De même, les comptes rendus de visite chez un orthophoniste devront être transmis au médecin.

La Fédération nationale des orthophonistes estime que près de 20 % des prescriptions médicales de bilan orthophonique, que les orthophonistes sont réglementairement tenus de réaliser, ne sont pas nécessaires et relèvent d’un mauvais adressage, tout simplement parce que les médecins ne sont pas formés à ces questions.

Favoriser l’accès direct peut y remédier en permettant une meilleure prise en charge des patients alors que l’on connaît les difficultés pour obtenir des rendez-vous chez un orthophoniste.

Au-delà de cette question de l’accès direct, j’en profite, monsieur le secrétaire d’État, pour vous demander si vous comptez augmenter le quota de professionnels. Partout, le manque d’orthophonistes est criant, et leur consultation nécessite des mois et des mois d’attente. Cette situation n’est pas tenable : il s’agit tout de même de la prise en charge du langage, de la naissance à la mort, si je puis m’exprimer ainsi.

Les orthophonistes sont les mieux formés pour connaître le nombre de séances supplémentaires nécessaires ou pour savoir s’il faut renouveler un traitement. Ils travaillent d’ailleurs en parfaite complémentarité avec les oto-rhino-laryngologistes (ORL).

Ces questions sont importantes, parce que l’orthophonie s’adresse aux enfants très jeunes, moins jeunes, mais aussi aux personnes plus mûres, aux victimes d’accidents vasculaires cérébraux. Il faut donc augmenter le quota.

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 82 rectifié bis est présenté par Mme Lassarade, M. Savary, Mme Micouleau, MM. Panunzi et Cadec, Mmes Demas et Gosselin, MM. Grand, Burgoa, Bouchet, Pellevat, J.B. Blanc, Bonne et Houpert, Mme Puissat, M. Belin, Mmes Chauvin et Delmont-Koropoulis, MM. Tabarot et Brisson, Mmes Bonfanti-Dossat et Dumont et MM. Cambon, Mandelli, Gremillet, Sido et Klinger.

L’amendement n° 977 rectifié bis est présenté par M. Jomier, Mmes Le Houerou et Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Antiste, Mmes Blatrix Contat et Bonnefoy, M. Bouad, Mme Briquet, MM. Chantrel, Durain, Gillé, Jacquin et P. Joly, Mme G. Jourda, MM. Leconte, Lurel, Mérillou et Michau, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme Préville, M. Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal, Tissot, Vaugrenard, Stanzione, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Florence Lassarade, pour présenter l’amendement n° 82 rectifié bis.

Mme Florence Lassarade. Il est défendu.

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Jomier, pour présenter l’amendement n° 977 rectifié bis.

M. Bernard Jomier. Encore une fois, je souscris à ce qui a été dit sur la différenciation entre les exercices de soins coordonnés et les autres. Il se dégage de tout cela une impression quelque peu brouillonne.

D’un côté, je suis très partisan des parcours de soins coordonnés : il ne faut pas détruire cet édifice. À cet égard, je souscris à ce qu’a dit René-Paul Savary : multiplier les accès directs avant tout pour des raisons d’opportunité plutôt que dans l’intention de construire un parcours de soins est source d’incohérences.

D’un autre côté, je déplore qu’on crée une différenciation entre les professionnels qui exercent dans une structure d’exercice coordonné et ceux qui exercent hors d’une telle structure.

Certes, il n’est question que d’expérimentation, mais force est d’admettre qu’elle est compliquée à comprendre et qu’elle manque singulièrement de cohérence. C’est la raison pour laquelle nous considérons qu’il n’y a, là aussi, pas d’urgence à légiférer et qu’il convient de renvoyer cette question aux organisations professionnelles. Fort heureusement, les orthophonistes ont, de longue date, pris des initiatives dans ce domaine. Nous ne défendons pas l’idée qu’il faille nécessairement en passer par un médecin, par exemple pour la prescription d’un bilan d’orthophonie ; les orthophonistes sont parfaitement capables de le réaliser et de décider la suite qu’il convient d’y donner.

Je le répète, cette expérimentation nous paraissant singulièrement bancale, nous avons déposé un amendement de suppression de cet article.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Corinne Imbert, rapporteure. Bien que la commission se soit interrogée sur l’opportunité d’inscrire des dispositions relatives à l’accès direct aux orthophonistes dans une loi de financement de la sécurité sociale, elle a souhaité, au regard des besoins, compléter le dispositif proposé pour garantir la qualité et la pertinence des soins – notre préoccupation est toujours la même – en prévoyant un avis de la Haute Autorité de santé et de l’Académie nationale de médecine sur le décret fixant les modalités de mise en œuvre de cette expérimentation.

Aujourd’hui – et Laurence Cohen serait mieux placée que moi pour en parler –, les orthophonistes sont de plus en plus sollicités, notamment pour prendre en charge les troubles du langage chez les enfants liés à une utilisation abusive des écrans. Les besoins sont donc réels.

L’avis est défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Adrien Taquet, secrétaire dÉtat. En quelque sorte, il s’agit là d’amendements miroirs de ceux, qui ont été précédemment examinés, relatifs aux masseurs-kinésithérapeutes : l’avis du Gouvernement est donc défavorable.

Je veux indiquer à Mme Cohen que, depuis ma nomination, j’ai été très sollicité au sujet des orthophonistes. Vous le savez probablement, madame la sénatrice, nous avons augmenté de près de 5 % les quotas d’étudiants, qui étaient environ un millier à la rentrée 2021. Cette mesure produira pleinement ses effets dans quatre ans. Nous avons donc commencé à répondre à ce problème, qui a été aggravé par le phénomène rappelé par Mme la rapporteure.

Mme la présidente. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

M. René-Paul Savary. Même si j’ai cosigné l’amendement n° 82 rectifié bis de suppression, cette possibilité d’accès direct me posant problème, je m’aligne désormais sur la position de la commission, considérant qu’il est nécessaire d’avancer et de trouver des solutions, étant entendu que l’expérimentation est désormais bornée.

On parle de déserts médicaux, mais on ne parle pas de déserts paramédicaux. Or, dans certains endroits, il existe une pénurie d’orthophonistes. Est-il envisagé à leur endroit, et comme le proposent certains pour les médecins, des mesures d’installation obligatoire ? Veut-on aller vers un service public pour que nos concitoyens soient soignés par des médecins et du personnel paramédical de façon identique sur l’ensemble du territoire ? Ces questions ne sont pas abordées.

De même, il faut espérer que le dossier médical partagé (DMP) sera enfin accessible à tous et que les orthophonistes auront accès à cet espace numérique et à un certain nombre de données relatives à leurs patients, bien sûr avec l’accord de ceux-ci. Mais pourront-ils eux-mêmes compléter le DMP ? Comment ces parcours seront-ils coordonnés ? Autant de sujets essentiels qui, là encore, n’ont pas été traités. On ne modifie pas des pratiques médicales et paramédicales au travers d’un PLFSS sans en mesurer l’ensemble des conséquences. On voit là les limites d’un tel dispositif.

Je le répète, je soutiens cette expérimentation telle qu’encadrée par commission, mais avec une forte réserve. Et je redis ma grande confiance dans ce personnel paramédical.