Sommaire
Présidence de M. Pierre Laurent
Secrétaires :
Mmes Jacqueline Eustache-Brinio, Victoire Jasmin.
2. Lutte contre le dérèglement climatique. – Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
Articles additionnels après l’article 19
Amendement n° 717 rectifié de Mme Angèle Préville. – Retrait.
Amendement n° 2143 du Gouvernement. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.
Adoption de l’article.
Articles additionnels après l’article 19 bis A
Amendement n° 112 rectifié de Mme Nadia Sollogoub. – Rejet.
Amendement n° 968 rectifié bis de M. Vincent Segouin. – Rejet.
Amendement n° 969 rectifié bis de M. Vincent Segouin. – Rejet.
Amendement n° 52 rectifié de Mme Alexandra Borchio Fontimp. – Retrait.
Amendement n° 51 rectifié de Mme Alexandra Borchio Fontimp. – Retrait.
Amendement n° 53 rectifié de Mme Alexandra Borchio Fontimp. – Rejet.
Amendement n° 1084 de M. Ronan Dantec. – Rejet.
Amendement n° 812 de M. Fabien Gay. – Retrait.
L’article demeure supprimé.
Mme Barbara Pompili, ministre de la transition écologique
Amendement n° 329 rectifié de Mme Valérie Boyer. – Non soutenu.
Amendement n° 510 rectifié bis de M. Guillaume Chevrollier
Amendement n° 1418 de Mme Martine Filleul
Suspension et reprise de la séance
Amendement n° 510 rectifié bis de M. Guillaume Chevrollier (suite). – Adoption de l’amendement rédigeant l’article.
Amendement n° 1418 de Mme Martine Filleul (suite). – Devenu sans objet.
Amendement n° 2144 du Gouvernement. – Devenu sans objet.
Amendement n° 1851 de M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. – Devenu sans objet.
Amendement n° 1872 de M. Ronan Dantec. – Retrait.
Amendement n° 967 rectifié bis de M. Vincent Segouin. – Devenu sans objet.
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques
Amendement n° 1878 de M. Joël Labbé
Amendement n° 1419 rectifié de Mme Martine Filleul
Amendement n° 2110 de M. Didier Rambaud
Amendement n° 816 rectifié de M. Fabien Gay
Amendement n° 1879 de M. Joël Labbé
Amendement n° 1880 de M. Joël Labbé
Amendement n° 1420 de Mme Martine Filleul
Amendement n° 1421 de Mme Martine Filleul
Amendement n° 1422 de Mme Martine Filleul
3. Candidatures à une commission mixte paritaire
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE M. Vincent Delahaye
4. Candidatures à une mission d’information
5. Lutte contre le dérèglement climatique – Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
Amendement n° 1878 de M. Joël Labbé (suite). – Rejet.
Amendement n° 1419 rectifié de Mme Martine Filleul (suite). – Adoption.
Amendement n° 2110 de M. Didier Rambaud (suite). – Adoption.
Amendement n° 816 rectifié de M. Fabien Gay (suite). – Devenu sans objet.
Amendement n° 1879 de M. Joël Labbé (suite). – Devenu sans objet.
Amendement n° 1880 de M. Joël Labbé (suite). – Devenu sans objet.
Amendement n° 1420 de Mme Martine Filleul (suite). – Rejet.
Amendement n° 1421 de Mme Martine Filleul (suite). – Rejet.
Amendement n° 1422 de Mme Martine Filleul (suite). – Rejet.
Amendement n° 267 rectifié de M. Éric Gold. – Retrait.
Amendement n° 2109 de M. Didier Rambaud. – Retrait.
Amendement n° 815 de M. Fabien Gay. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Articles additionnels après l’article 19 bis D
Amendement n° 1637 de Mme Laurence Rossignol. – Rejet.
Amendement n° 1885 de M. Joël Labbé. – Rejet.
Amendement n° 1424 de Mme Martine Filleul. – Rejet.
Amendement n° 1425 de Mme Martine Filleul. – Retrait.
Amendement n° 1882 de M. Joël Labbé. – Rejet.
Amendement n° 1883 de M. Joël Labbé. – Rejet.
Amendement n° 817 de M. Fabien Gay. – Rejet.
Amendement n° 1888 rectifié de M. Joël Labbé. – Rejet.
Amendement n° 1423 de Mme Martine Filleul. – Rejet.
Amendement n° 68 de M. Jean Sol. – Non soutenu.
Adoption de l’article.
Article 19 bis EB (nouveau) – Adoption.
Article additionnel après l’article 19 bis EB
Amendement n° 2113 de M. Didier Rambaud. – Rejet.
Amendement n° 746 rectifié de Mme Angèle Préville. – Devenu sans objet.
Amendement n° 271 rectifié bis de M. Éric Gold. – Devenu sans objet.
Amendement n° 1428 de Mme Martine Filleul. – Devenu sans objet.
Amendement n° 819 rectifié de M. Fabien Gay. – Devenu sans objet.
Amendement n° 1884 de M. Joël Labbé. – Devenu sans objet.
Amendements nos 1429 et 1430 de Mme Martine Filleul. – Devenus sans objet.
Amendement n° 1954 rectifié de M. Patrick Chaize. – Devenu sans objet.
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques
Amendement n° 2114 de M. Didier Rambaud. – Rejet.
Adoption de l’article.
Articles additionnels après l’article 19 bis F
Amendement n° 2121 rectifié bis de M. Georges Patient. – Retrait.
Articles 19 bis G et 19 bis H – Adoption.
Article additionnel après l’article 19 bis H
Amendement n° 491 rectifié ter de M. Alain Cadec. – Retrait.
Amendement n° 911 rectifié de M. Laurent Duplomb. – Rejet.
Amendement n° 780 de Mme Sabine Drexler. – Non soutenu.
Adoption de l’article modifié.
Adoption de l’article.
Amendement n° 2260 de la commission. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Article 19 quinquies (nouveau) – Adoption.
Articles additionnels après l’article 19 quinquies
Amendement n° 1671 rectifié de M. Olivier Jacquin. – Rejet.
Amendement n° 1672 rectifié de M. Olivier Jacquin. – Rejet.
Amendement n° 159 de M. Fabien Gay. – Rejet.
Amendement n° 413 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.
Amendement n° 412 rectifié de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.
Amendement n° 2269 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 1673 rectifié bis de M. Olivier Jacquin. – Rejet.
Amendement n° 2270 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 2123 rectifié bis de M. Georges Patient. – Adoption.
Amendement n° 1674 rectifié de M. Olivier Jacquin. – Retrait.
Amendement n° 85 rectifié de M. Stéphane Demilly. – Adoption.
Amendement n° 367 rectifié de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.
Amendement n° 230 de M. Jean-Michel Houllegatte. – Adoption.
Amendement n° 2271 de la commission. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Articles additionnels après l’article 20
Amendement n° 1679 rectifié de M. Olivier Jacquin. – Rejet.
Amendement n° 417 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.
Amendement n° 1678 rectifié de M. Olivier Jacquin. – Rejet.
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques
Amendement n° 2140 du Gouvernement. – Rejet.
Amendement n° 2125 rectifié de M. Georges Patient. – Retrait.
Amendement n° 1695 rectifié de M. Olivier Jacquin. – Rejet.
Amendement n° 421 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.
Amendement n° 1978 rectifié quater de M. Jean-Pierre Corbisez. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Articles additionnels après l’article 20 bis A
Amendement n° 1676 rectifié bis de M. Olivier Jacquin. – Rejet.
Amendement n° 1677 rectifié bis de M. Olivier Jacquin. – Rejet.
Amendement n° 1680 rectifié bis de M. Olivier Jacquin. – Rejet.
Amendement n° 937 rectifié de M. Stéphane Demilly. – Adoption.
Amendement n° 415 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.
Amendement n° 1433 rectifié de M. Michel Dagbert. – Rejet.
Adoption de l’article modifié.
Adoption de l’article modifié.
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE M. Roger Karoutchi
Amendement n° 161 de M. Fabien Gay. – Adoption.
Amendement n° 2138 rectifié du Gouvernement. – Adoption.
Amendement n° 160 de M. Fabien Gay. – Retrait.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° 416 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.
Adoption de l’article.
Article 20 quinquies – Adoption.
Amendement n° 2268 de la commission. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Article additionnel après l’article 20 sexies
Amendement n° 1675 rectifié bis de M. Olivier Jacquin. – Rejet.
Adoption de l’article modifié.
Articles 20 octies et 20 nonies – Adoption.
Amendement n° 2139 du Gouvernement. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Article additionnel après l’article 20 decies
Article 20 undecies – Adoption.
Articles additionnels après l’article 20 undecies
Amendement n° 414 rectifié de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.
Amendement n° 1115 rectifié de Mme Esther Benbassa. – rejet.
Article 20 duodecies (nouveau) – Adoption.
Article 20 terdecies (nouveau)
Amendement n° 2191 du Gouvernement. – Rejet.
Amendement n° 1358 rectifié de M. Olivier Jacquin. – Rejet.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° 2142 du Gouvernement. – Rejet.
Amendement n° 1627 rectifié de M. Jean-Jacques Michau. – Adoption.
Amendement n° 2141 du Gouvernement. – Devenu sans objet.
Amendement n° 1042 de Mme Esther Benbassa. – Rejet.
Amendement n° 861 rectifié de Mme Denise Saint-Pé. – Rejet.
Amendement n° 1359 rectifié de M. Olivier Jacquin. – Irrecevable.
Amendement n° 1697 rectifié de M. Olivier Jacquin. – Irrecevable.
Amendement n° 1698 rectifié de M. Olivier Jacquin. – Irrecevable
Amendement n° 1212 de M. Stéphane Demilly. – Irrecevable.
Amendement n° 1743 rectifié bis de M. Patrick Chaize. – Retrait.
Amendement n° 422 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.
Amendement n° 1700 rectifié de M. Olivier Jacquin. – Rejet.
Amendement n° 420 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.
Amendement n° 1696 rectifié de M. Olivier Jacquin. – Rejet.
Adoption de l’article modifié.
Articles additionnels après l’article 21
Amendement n° 793 rectifié de Mme Sophie Taillé-Polian. – Rejet.
Amendement n° 796 rectifié de Mme Sophie Taillé-Polian. – Rejet.
Article 21 bis (nouveau) – Adoption.
Articles additionnels avant l’article 22
Amendement n° 823 de M. Fabien Gay. – Retrait.
Amendement n° 1519 rectifié de M. Jean-Claude Tissot. – Rejet.
Amendement n° 567 rectifié bis de Mme Catherine Fournier. – Rejet.
Amendement n° 821 de M. Fabien Gay. – Retrait.
Renvoi de la suite de la discussion.
Nomination de membres d’une commission mixte paritaire
Nomination de membres d’une mission d’information
compte rendu intégral
Présidence de M. Pierre Laurent
vice-président
Secrétaires :
Mme Jacqueline Eustache-Brinio,
Mme Victoire Jasmin.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Lutte contre le dérèglement climatique
Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets (projet n° 551, texte de la commission n° 667, rapport n° 666, avis nos 634, 635, 649 et 650).
Dans la discussion du texte de la commission, nous en sommes parvenus, au sein du chapitre III du titre II, aux amendements tendant à insérer des articles additionnels après l’article 19.
TITRE II (SUITE)
PRODUIRE ET TRAVAILLER
Chapitre III (suite)
Protéger les écosystèmes et la diversité biologique
Articles additionnels après l’article 19
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 842 est présenté par MM. Gontard, Dantec, Fernique, Labbé, Salmon et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
L’amendement n° 1738 rectifié est présenté par Mme Préville, MM. J. Bigot, Montaugé et Kanner, Mme Bonnefoy, MM. Dagbert et Devinaz, Mme M. Filleul, MM. Gillé, Houllegatte et Jacquin, Mmes Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 19
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre Ier du titre II du livre III du code de la santé publique est complété par un article L. 1321-5-… ainsi rédigé :
« Art. L. 1321-5-…. – Le contrôle sanitaire de la qualité des eaux potables contrôle la présence des substances per- et polyfluoroalkylées dans les eaux destinées à la consommation humaine. Un décret du ministre chargé de la santé pris après avis de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail détermine les conditions d’échantillonnage. »
La parole est à M. Joël Labbé, pour présenter l’amendement n° 842.
M. Joël Labbé. Cet amendement déposé par le président de notre groupe, Guillaume Gontard, a pour objet des substances au nom imprononçable : les perfluoroalkyles et les polyfluoroalkyles (PFAS).
M. Jean-François Longeot, président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Vous l’avez très bien prononcé ! (Sourires.)
M. Joël Labbé. Ces substances ne font toujours pas partie des paramètres soumis à l’obligation du contrôle sanitaire des eaux destinées à la consommation humaine, alors même que leur toxicité, d’un point de vue aussi bien environnemental que sanitaire, est prouvée.
À ce jour, les seules données nationales relatives à la présence de PFAS dans les eaux distribuées qui sont utilisées sont extraites d’un rapport que l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) a consacré à la campagne nationale d’occurrence des composés alkyles perfluorés dans les eaux destinées à la consommation humaine, document publié en mai 2011.
Or – on le sait – la contamination de l’environnement par les PFAS et leur accumulation dans les organismes des personnes contaminées se sont poursuivies depuis.
Récemment, le seuil d’exposition tolérable aux quatre PFAS les plus couramment utilisés, établi par l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA), a été nettement réévalué à la baisse : ce seuil a été divisé par 2 500 entre 2008 et 2020.
En outre, comme le souligne l’Anses dans ses recommandations, il n’existe pas à ce jour de valeurs toxicologiques de référence pour tous les PFAS, ce qui empêche la construction de valeurs sanitaires maximales.
Il est donc indispensable que des études généralisées soient menées sur tous les PFAS et que des valeurs guides soient établies.
Enfin, au regard de l’enjeu majeur de santé publique que représentent les PFAS, nous jugeons indispensable d’établir des valeurs guides de ces substances et d’effectuer des contrôles plus réguliers, ce qui passe par leur prise en compte dans le contrôle de qualité des eaux potables.
M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour présenter l’amendement n° 1738 rectifié.
Mme Angèle Préville. Cet amendement, dont Joël Labbé vient de présenter les dispositions, vise à créer un nouvel article dans le code de la santé publique afin de prévoir un contrôle sanitaire de la qualité des eaux potables renforcé, identifiant la présence des perfluoroalkyles et des polyfluoroalkyles.
En effet, ces substances ne font pas partie des paramètres soumis à l’obligation du contrôle sanitaire des eaux destinées à la consommation humaine, alors même que leur toxicité, d’un point de vue aussi bien environnemental que sanitaire, est prouvée.
À ce jour, les seules données nationales concernant leur présence dans les eaux distribuées sont extraites d’un rapport de l’Anses déjà vieux de dix ans : ce document, portant sur la campagne nationale d’occurrence de ces composés dans les eaux destinées à la consommation humaine, a été publié en mai 2011.
Pourtant, la contamination de l’environnement par ces PFAS et leur accumulation dans les organismes des personnes contaminées se sont évidemment poursuivies. Pourquoi ? Parce que ces polluants sont très persistants, que ce soit dans l’environnement ou chez les êtres vivants.
Or ce groupe de plus de 4 700 composés est fortement utilisé dans les procédés industriels et dans les produits de consommation, comme les emballages alimentaires. On les retrouve dans des enduits protecteurs, dans l’habillement, notamment dans les vêtements de sport, dans les revêtements antiadhésifs ou encore dans les mousses ignifuges.
J’y insiste, ces produits ne se dégradent pas dans l’environnement : ils vont donc s’accumuler et, malheureusement, on les retrouve presque partout. On en a détecté jusque dans l’Arctique, ce qui est très inquiétant, compte tenu de leur toxicité.
Au regard de l’enjeu majeur de santé publique que représentent les PFAS, nous demandons l’inscription de ces dispositions dans le code de la santé publique !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Ces amendements tendent à rendre obligatoire la recherche des substances perfluoroalkylées et polyfluoroalkylées dans les eaux destinées à la consommation humaine.
Cette recherche aurait notamment une incidence sur le coût de l’eau facturé au consommateur, dans une proportion qui n’a pas été évaluée à ce stade. Avant de la systématiser, il convient de mieux connaître ces substances et la manière de lutter contre elles.
C’est la raison pour laquelle j’émettrai un avis favorable sur les amendements identiques nos 521 et 1739, qui seront examinés dans quelques instants et qui tendent à demander un rapport relatif à ces substances.
En revanche, les amendements nos 842 et 1738 rectifié reçoivent un avis défavorable de la part de la commission.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité. Monsieur Labbé, madame Préville, l’introduction d’un tel contrôle ne relève pas du domaine de la loi. Cela étant, votre préoccupation est tout à fait fondée : aujourd’hui, ces substances font l’objet d’une vigilance accrue et leurs impacts sont étudiés très précisément. Nous devons le prendre en considération.
Le contrôle de l’eau destinée à la consommation humaine est actuellement encadré par plusieurs articles du code de la santé publique ; ces dispositions transposent une directive européenne de 1998, qui a fixé un cadre précis à cette surveillance.
Ainsi, par l’arrêté du 11 janvier 2007 relatif aux limites et références de qualité des eaux brutes et des eaux destinées à la consommation humaine, nous avons mentionné aux articles R. 1321-2, R. 1321-3, R. 1321-7 et R. 1321-38 du code de la santé publique les paramètres à surveiller tout au long de la chaîne de production et de distribution d’eau potable, au regard des exigences de qualité associées.
Sur le fond, les substances en question ne font effectivement pas encore partie des paramètres surveillés dans les eaux destinées à la consommation humaine.
Cette disposition est apparue dans la toute récente directive européenne Eau potable, du 16 décembre 2020. La surveillance de ces paramètres est en cours d’introduction : la France sera dans l’obligation de transposer cette directive avant le 12 janvier 2023 et les délais seront tenus – je m’y engage. Votre préoccupation sera donc prise en compte.
Je précise que ces travaux sont menés par le ministère des solidarités et de la santé, car c’est de lui que relève cette disposition.
Pour ces raisons, je vous demande de bien vouloir retirer vos amendements. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour explication de vote.
Mme Angèle Préville. Madame la secrétaire d’État, qu’il s’agisse de la pollution des eaux, des sols ou de l’air, l’utilisation de la chimie dans nos vies représente un impensé global.
Vous faites valoir que ces dispositions sont de nature réglementaire ; mais, à l’évidence, la réglementation n’avance pas suffisamment vite et c’est notre responsabilité d’intervenir, car la dangerosité de ces substances est connue.
J’y insiste, le rapport de l’Anses a déjà dix ans : la lenteur avec laquelle ces contrôles sont mis en œuvre ne peut que nous interpeller. Pendant ce temps, les contaminations continuent. Ces produits s’accumulent dans nos tissus : nous, êtres humains, sommes aussi particulièrement concernés !
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.
M. Joël Labbé. Madame la secrétaire d’État, nous avons entendu vos engagements : en l’absence de Guillaume Gontard, je suis tenu de maintenir cet amendement. Mais, pour nous, le plus important, c’est l’adoption de l’amendement suivant, que défendra Daniel Salmon !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 842 et 1738 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 521 est présenté par MM. Gontard, Dantec, Fernique, Labbé, Salmon et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires.
L’amendement n° 1739 est présenté par Mme Préville, MM. J. Bigot, Montaugé et Kanner, Mme Bonnefoy, MM. Dagbert et Devinaz, Mme M. Filleul, MM. Gillé, Houllegatte et Jacquin, Mmes Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 19
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de douze mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport sur la pollution des eaux et des sols par les substances per- et polyfluoroalkyles. Ce rapport propose notamment des solutions applicables pour la dépollution des eaux et des sols contaminés par des substances per- et polyfluoroalkyles.
II. – Le Gouvernement fournit systématiquement un nouveau rapport sur ce sujet à chaque réévaluation à la baisse du seuil d’exposition tolérable aux substances per- et polyfluoroalkyles fourni par l’autorité administrative européenne compétente dans les douze mois qui suivent la réévaluation à la baisse dudit seuil.
La parole est à M. Daniel Salmon, pour présenter l’amendement n° 521.
M. Daniel Salmon. Leur nom n’est pas très connu : les perfluoroalkyles et polyfluoroalkyles sont pourtant des poisons, présents dans les eaux et dans les sols.
Ces substances sont très utilisées depuis des années par l’industrie, on les retrouve dans une multitude de matières, mais on les ignore. Ce sont des poisons très persistants dans l’environnement, très difficiles à traiter et on n’en a qu’une connaissance très partielle.
Cet amendement vise à demander au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport dans un délai de douze mois. Ensuite, nous demanderons un nouveau rapport, qui devra être systématiquement fourni à chaque réévaluation. En effet, chaque mois qui passe montre davantage la dangerosité des PFAS. Une meilleure connaissance est donc absolument indispensable : ces substances induisent de nombreuses perturbations et on leur attribue un grand nombre de maladies, comme le cancer et le diabète.
Nous devons approfondir nos connaissances pour avoir la vision la plus exhaustive possible de ces poisons présents dans l’environnement !
M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour présenter l’amendement n° 1739.
Mme Angèle Préville. Dans la continuité de l’amendement précédent, nous proposons de renforcer la prise en compte des substances perfluoroalkyles et polyfluoroalkyles.
Ainsi, nous demandons la remise d’un rapport au Parlement sur la pollution des eaux et des sols par ces substances. Ce document devra notamment détailler les solutions à apporter pour procéder à la dépollution.
Je le rappelle, ces substances sont largement utilisées dans le secteur industriel, pour des emplois divers et variés : dans l’industrie textile, comme agents imperméabilisants, notamment pour les vêtements de sport ; dans l’industrie du papier et du carton, comme agents répulsifs de graisse ; dans l’industrie de la peinture, notamment pour leurs propriétés réfléchissantes et antistatiques ; dans l’industrie phytopharmaceutique, notamment dans les insecticides ; ou encore dans l’industrie électronique, comme agents d’étanchéité.
Je l’ai également dit, ces composés sont très persistants et ont tendance à s’accumuler dans l’organisme des personnes contaminées, ce qui leur vaut le triste surnom de « produits chimiques éternels ».
Ainsi, les rejets industriels, la pollution des sols et la pollution des nappes phréatiques dus, d’une part, à la production et aux utilisations passées de ces substances et, d’autre part, à la poursuite de leur utilisation, aujourd’hui encore, contribuent à une imprégnation totale de notre environnement par ces composés perfluorés.
Par ailleurs, comme l’a rappelé M. Salmon, l’exposition à ces substances, même à des niveaux extrêmement faibles, peut avoir des effets particulièrement néfastes sur l’organisme : diabète, déséquilibre des hormones thyroïdiennes, cancers, baisse de la réponse immunitaire, etc.
Le problème majeur réside dans le fait que ces composés sont difficilement traitables ; par exemple, les procédés habituels de traitement des eaux, comme l’oxydation chimique, la sédimentation, la coagulation, la filtration ou encore l’irradiation aux ultraviolets ne sont pas complètement efficaces. Voilà pourquoi il faut absolument étudier la question de près.
Ces composés se retrouvent partout : certains d’entre eux sont volatils. On en a détecté jusque dans l’Arctique !
Au sein de l’Union européenne, des études ont été menées. On les a retrouvés en particulier dans les eaux souterraines superficielles, dans les organismes vivants, dans les sols, dans l’air et dans des lieux qui exigent une vigilance toute particulière : les sites de production industrielle, où les salariés travaillent, les aéroports, les bases militaires et les centres d’entraînement des pompiers !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. Les auteurs de ces amendements demandent la remise d’un rapport au Parlement sur la pollution des eaux et des sols par les substances perfluoroalkylées et polyfluoroalkylées et sur les solutions applicables pour la dépollution des eaux.
La dangerosité de ces substances a été maintes fois prouvée : je souhaite moi aussi que nous bénéficiions d’un diagnostic précis sur l’état de nos cours d’eau et sur les moyens technologiques et scientifiques de faire face à ces pollutions.
Aussi, la commission émet un avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État. À la demande de la Commission européenne, l’Agence européenne des produits chimiques (ECHA) travaille à une mesure de restriction dans le cadre du règlement Reach, qui couvrirait l’ensemble de ces substances en les limitant aux usages essentiels.
En parallèle, des projets de recherche sont en cours afin de développer des méthodes intégratrices de la mesure de la présence de ces substances. Tout l’enjeu est là ; or, aujourd’hui, nous ne sommes pas à même d’effectuer ces mesures.
Même lorsqu’elles sont identifiées, ces substances sont réputées très difficiles à capter du fait de leurs caractéristiques chimiques : les techniques performantes disponibles à un coût accessible sont peu nombreuses. Nous suivons donc avec intérêt les travaux européens visant à restreindre les usages de ces composants en vue d’en limiter la dissémination.
Dans les délais demandés, il me semble compliqué de produire des données significatives sur la présence de ces substances dans les milieux aquatiques et terrestres : il nous faut attendre la mise en œuvre des dispositifs de mesure intégrés. Toutefois – je vous rejoins tout à fait sur ce point –, il est nécessaire de cristalliser nos connaissances : même s’il paraît impossible de trouver des solutions miracles dans des délais si contraints, un tel rapport pourrait au moins nous éclairer sur cette difficulté.
En conséquence, le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat tout en insistant sur ce point de vigilance : les délais en question peuvent laisser craindre des données encore lacunaires.
M. le président. La parole est à Mme Sophie Primas, pour explication de vote.
Mme Sophie Primas. Je voterai cet amendement, car il va dans le sens de la connaissance : à l’heure actuelle, les informations disponibles ne sont pas toujours très bien documentées.
Il faut déterminer précisément la dangerosité de ces molécules et, dans la mesure du possible, les moyens d’assurer une dépollution. Surtout, il faut pouvoir se projeter vers des solutions de substitution : si ces produits sont utilisés dans tant d’industries, dans tant de domaines d’activité, il faut penser à les remplacer ! (M. le rapporteur opine.) Nous devons être très attentifs à l’après, pour ne pas perturber l’économie, tout en restant, évidemment, soucieux de la sécurité sanitaire.
Enfin, mes chers collègues, je vous rappelle que le Parlement peut se saisir lui-même de ces sujets : nous avons les moyens de mener les travaux que nous sollicitons du Gouvernement, si nous en avons la volonté !
M. le président. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.
M. Daniel Salmon. Je tiens à remercier M. le rapporteur et Mme la secrétaire d’État de leurs avis, ainsi que Mme Primas de ses propos.
À ce stade, nous ne proposons pas de fixer une limite : ce serait tout à fait prématuré. Il s’agit d’analyser un phénomène qui pose aujourd’hui un problème grave, mais dont on ne connaît pas les tenants et les aboutissants.
Nous devons améliorer notre connaissance et le vote de cet amendement sera un premier pas vers d’autres solutions. À mon sens, de tels changements seront nécessaires, mais il faut commencer par ce travail de quantification.
M. le président. La parole est à M. Joël Bigot, pour explication de vote.
M. Joël Bigot. Bien entendu, les membres de notre groupe voteront cet amendement, qui marque une progression dans la prise de conscience du problème. Aujourd’hui, on constate que des sols sont pollués ; on sait qu’un certain nombre de substances sont nocives. Toutefois, il ne faudrait pas que ce rapport reste au fond d’un tiroir. Mme Primas l’a dit : nous devrons, ensuite, amorcer une autre dynamique.
L’an dernier, le Sénat a consacré une commission d’enquête à la pollution des sols : nous avons établi qu’en France plus de 6 000 sites pollués sont aujourd’hui à l’abandon.
Dans le cadre de ce projet de loi, nous débattrons de l’artificialisation des sols. En l’occurrence, nous sommes face à de grands enjeux de restauration de la qualité des sols.
Aujourd’hui, il faut prendre conscience du fait que certains sols sont pollués et déterminer la nature de cette pollution pour intervenir demain. C’est une première étape, mais il ne faut pas s’en tenir là !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 521 et 1739.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 19.
Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 717 rectifié, présenté par Mmes Préville, Monier, Jasmin et Conway-Mouret, est ainsi libellé :
Après l’article 19
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 79 de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire est ainsi rédigé :
« Art. 79. - I. – Avant le 1er juillet 2022, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur la mise en place de mécanismes permettant de réduire les rejets de fibres microplastiques issues du lavage du textile, en déterminant les objectifs à atteindre. Ce rapport s’attache en particulier à évaluer la pertinence technico-économique, environnementale et d’appropriation du consommateur, à lister les solutions internes ou externes envisageables pour les lave-linge neufs, ménagers ou professionnels, ainsi qu’à en déterminer leur degré de filtration.
« II. – Les lave-linge neufs sont dotés d’un dispositif visant à réduire la quantité de fibres microplastiques issues du lavage du textile.
« Au plus tard le 1er janvier 2025, un décret pris en concertation avec les filières industrielles concernées précise les modalités d’application du présent article. Ce décret définit notamment les conditions dans lesquelles le dispositif retenu remplit les objectifs de réduction de fibres microplastiques dans les eaux évacuées.
« III. – Le II entre en vigueur trois ans après la publication du décret mentionné au second alinéa du II. »
La parole est à Mme Angèle Préville.
Mme Angèle Préville. Afin de lutter contre la pollution aux microplastiques, la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire, ou loi AGEC, a créé l’obligation d’équiper les lave-linge neufs d’un filtre à microfibres plastiques à compter du 1er janvier 2025.
Cette obligation a été introduite par voie d’amendement parlementaire, donc sans la moindre évaluation préalable.
Le commissaire européen à l’environnement a rappelé en juin dernier que le règlement communautaire relatif aux exigences en matière d’écoconception applicables aux lave-linge ménagers et aux lave-linge séchants ménagers n’avait pas prévu d’exigences d’écoconception pour les filtres, « étant donné qu’il n’existait pas de solution technique suffisamment au point et commercialement disponible lorsque les exigences d’écoconception ont été examinées ».
L’article 8 de ce même règlement prévoit d’ailleurs que la Commission européenne devra réexaminer ces normes à la lumière des progrès technologiques : elle devra, le cas échéant, présenter un projet de proposition de révision du règlement d’ici au 25 décembre 2025. Ce réexamen devra notamment porter sur la faisabilité et sur l’opportunité de nouvelles exigences visant à réduire le taux de microplastiques des eaux évacuées, comme l’installation de filtres.
Plus récemment, en décembre 2020, j’ai remis à l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst) un rapport d’information relatif à la pollution plastique.
Ce rapport met en lumière les obstacles à la mise en place de ces filtres et les limites déplorées en la matière. Il souligne que ces filtres ne sont pas encore au point et détaille les difficultés sous-jacentes : le nettoyage de ces filtres, l’appropriation par le consommateur, l’entretien et le remplacement des filtres usagés.
En outre, l’implication forte du consommateur soulève deux enjeux auxquels aucune réponse n’est apportée à ce jour.
En effet, dans le cas où le filtre ne fonctionne plus, deux solutions sont envisageables : premièrement, le consommateur peut mettre en place un système de contournement aboutissant au retrait du filtre pour assurer le fonctionnement normal de sa machine ; deuxièmement, si le filtre est bouché ou s’il a provoqué un dysfonctionnement de la machine, le consommateur ne peut plus utiliser son lave-linge. (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains.) Il lui est alors loisible de le réparer – seuls 40 % des particuliers le font aujourd’hui – ou d’en changer, ce qui contribuerait à accélérer le renouvellement des produits, à rebours du but visé par les pouvoirs publics : favoriser la réparation et l’allongement de la durée de vie des équipements.
Il est ainsi essentiel que le dispositif retenu puisse prendre en compte ce risque d’augmentation du nombre de pannes possibles et in fine de déception pour le consommateur.
M. le président. L’amendement n° 2143, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 19
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 79 de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire est ainsi rédigé :
« Art. 79. – Afin de réduire la dispersion des microfibres plastiques dans l’environnement issues du lavage du linge, à compter du 1er janvier 2025, les lave-linge neufs domestiques ou professionnels sont dotés d’un filtre à microfibres plastiques ou de toute autre solution interne ou externe à la machine. Un décret précise les modalités d’application du présent article.
« Un rapport du Gouvernement à l’attention des parlementaires est rédigé en 2022 pour décrire, depuis la production du tissu jusqu’au lavage du linge, les connaissances sur les sources d’émission, les contraintes des filières et les mesures volontaires prises pour réduire les émissions de microfibres plastiques. »
La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État. Madame Préville, nous sommes d’accord sur le fond : il est nécessaire d’élargir les dispositions de la loi AGEC à d’autres techniques que le filtre. Nous visons bel et bien le même objectif.
Toutefois, la rédaction de l’amendement gouvernemental me semble plus explicite pour ce qui concerne les autres technologies. De plus, nous proposons d’inscrire ces dispositions dans la loi elle-même, alors que vous renvoyez à un décret. Je vous propose donc de vous rallier à notre amendement !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. L’amendement n° 717 rectifié vise à demander la remise d’un rapport au Parlement sur la mise en place de mécanismes permettant de réduire les rejets de fibres microplastiques issues du lavage du textile. En outre, il tend à préciser que les lave-linge neufs seront dotés d’un dispositif visant à réduire la quantité de fibres microplastiques.
Ma chère collègue, je vous invite à retirer cet amendement au profit de l’amendement n° 2143. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
En effet, l’amendement du Gouvernement vise à réécrire l’article 79 de la loi AGEC, lequel impose que les lave-linge neufs soient dotés d’un filtre à microfibres plastiques, afin de tenir compte de l’évolution technologique et des solutions nouvelles déployées par les industriels. Le Gouvernement précise que cette obligation pourrait être satisfaite par d’autres solutions technologiques parvenant au même résultat.
La commission est favorable à cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Martine Filleul, pour explication de vote.
Mme Martine Filleul. Nous voterons l’amendement du Gouvernement, et pour cause : nous avions proposé cette disposition il y a deux ans lors de l’examen du projet de loi AGEC ! Je déplore simplement le retard avec lequel on prend conscience de ce grave problème écologique.
M. le président. Madame Préville, l’amendement n° 717 rectifié est-il maintenu ?
Mme Angèle Préville. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 717 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 2143.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 19.
Article 19 bis A
(Non modifié)
À la première phrase du premier alinéa du I de l’article L. 110-1 du code de l’environnement, après le mot : « air, », sont insérés les mots : « la qualité de l’eau, ».
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements identiques.
L’amendement n° 108 rectifié est présenté par MM. Mizzon et Bonneau, Mmes Sollogoub et Perrot, MM. Kern et Masson, Mme Vermeillet, M. Détraigne, Mme Chain-Larché, M. Cuypers, Mme Thomas, M. Bouchet, Mme Herzog, M. Canévet, Mme C. Fournier et MM. Bonnecarrère, Chauvet, Louault, Prince, Calvet, Cigolotti, S. Demilly et Cazabonne.
L’amendement n° 243 rectifié bis est présenté par MM. Chasseing, Guerriau, Menonville, Decool et Lagourgue, Mme Mélot, MM. A. Marc, Capus et Wattebled, Mme Garriaud-Maylam, MM. Henno, Guérini et Grand, Mme Dumas et MM. Laménie et Hingray.
L’amendement n° 909 rectifié bis est présenté par MM. Duplomb et J.M. Boyer, Mme Chauvin, M. Chatillon, Mme Puissat, M. Pointereau, Mmes Belrhiti et Delmont-Koropoulis, MM. Brisson, Klinger, Burgoa, Cardoux, Houpert, Anglars, de Legge et Vogel, Mme Richer, MM. J.M. Arnaud, Somon, Savary, Belin et Lefèvre, Mmes Dumont et Deromedi, M. Sido, Mme Micouleau, MM. Genet, Daubresse, Longuet et Courtial, Mmes Drexler et Lassarade, MM. Cadec et Panunzi, Mme Lopez, MM. Bascher, D. Laurent et Segouin, Mme Imbert, MM. Saury et H. Leroy, Mme Joseph et MM. Piednoir, Rietmann, Favreau, Allizard, Karoutchi et Bas.
L’amendement n° 2108 est présenté par Mme Schillinger, MM. Rambaud, Marchand et Lévrier, Mme Havet et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Michel Canévet, pour présenter l’amendement n° 108 rectifié.
M. Michel Canévet. L’ajout proposé à l’article L. 110-1 du code de l’environnement serait redondant. Or il n’est pas bon que la loi bavarde : au contraire, il faut s’efforcer de la simplifier pour qu’elle soit la plus intelligible possible. Ne répétons pas la même chose à tout bout de champ : soyons efficaces !
M. le président. La parole est à M. Joël Guerriau, pour présenter l’amendement n° 243 rectifié bis.
M. Joël Guerriau. Cet article précise dans le code de l’environnement que la qualité de l’eau fait partie du patrimoine de la Nation. Cette notion figurant déjà dans ledit code, une telle disposition serait source de confusion. C’est la raison pour laquelle nous estimons qu’il faut supprimer l’article 19 bis A.
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour présenter l’amendement n° 909 rectifié bis.
M. René-Paul Savary. Laurent Duplomb m’a demandé d’insister sur cette question particulièrement importante.
Monsieur le rapporteur, je suis très surpris de constater que la commission est défavorable à ces amendements. En effet, son rapport est sans ambiguïté : cet article est une affirmation solennelle à portée symbolique, mais qui n’ajoute rien à la protection et à la restauration de la qualité de l’eau.
Quand on écrit la loi, il faut toujours comparer les bénéfices aux risques. La législation indique déjà clairement que la qualité de l’eau est un patrimoine commun. En outre, ajouter cette précision, c’est créer des contraintes supplémentaires et soulever de nouvelles questions juridiques : pourra-t-on prélever de l’eau, utiliser ou non des intrants ? J’ajoute que les surfaces considérées sont considérables : les aquifères couvrent des dizaines de kilomètres carrés !
En évitant cette redondance, on s’épargnera un certain nombre de difficultés juridiques.
M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour présenter l’amendement n° 2108.
Mme Patricia Schillinger. Mes collègues ont déjà tout dit : comme eux, je suis convaincue qu’il faut supprimer cet article !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. Il n’a pas paru opportun à la commission de supprimer l’ajout de la qualité de l’eau au patrimoine commun de la Nation.
En effet, le législateur a fait le choix, avec la loi visant à définir et protéger le patrimoine sensoriel des campagnes françaises, adoptée en janvier 2021, d’intégrer au patrimoine commun de la Nation « les sons et odeurs qui caractérisent les espaces, ressources et milieux naturels terrestres et marins ».
Après l’ajout de ces éléments dans l’énumération des composantes du patrimoine commun de la Nation, on voit mal comment s’opposer à l’inscription de la qualité de l’eau, tout aussi importante, si ce n’est plus.
L’avis de la commission est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État. Je rejoins l’avis exprimé par M. le rapporteur ; effectivement, l’eau est le seul élément qui ne soit pas cité à l’article général du code de l’environnement, lequel liste pourtant tous les compartiments de l’environnement, définis comme patrimoine commun de la Nation. Y sont cités la qualité de l’air, des sites, des paysages, de la biodiversité, ou encore des sons et des odeurs qui caractérise les milieux terrestres et marins.
Il était donc légitime que les députés souhaitent combler cette absence dans la liste générale. Quand bien même l’eau fait l’objet d’un livre spécifique du code de l’environnement, ainsi que vous l’indiquez, c’est aussi le cas d’autres ressources et élément déjà cités.
A contrario, son absence dans cet article L. 110–1 induirait un doute sur l’importance que nous souhaitons donner à la protection de la qualité des eaux dans notre environnement.
Au-delà du symbole, il s’agit donc d’un élément d’importance. Je demande donc le retrait de ces amendements ; à défaut, l’avis serait défavorable.
M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.
M. Ronan Dantec. M. Savary a été très explicite quant aux raisons pour lesquelles il souhaitait la suppression de cet article. Il a indiqué que cette demande était importante et je suis d’accord avec lui : il est extrêmement important de maintenir cet article.
La qualité de l’eau est mauvaise en France et nous sommes très loin des objectifs européens. L’eau est certes un patrimoine national, mais la qualité de l’eau en est aussi un, parce que cette dégradation, ainsi que l’a relevé le rapporteur, emporte des coûts de traitement. Toute la Nation paye la mauvaise qualité de l’eau.
Nous devons mener une politique nationale de reconquête, en prêtant attention, bien sûr, à l’équilibre des usages. Aujourd’hui, c’est en train de devenir un des grands sujets conflictuels de la société française, la Bretagne en est un exemple.
Il est donc absolument essentiel d’inscrire dans le code de l’environnement que la reconquête de la qualité de l’eau est une priorité de la politique nationale, parce que ce sujet est en train de provoquer beaucoup de tensions dans la société française et de coûts induits pour les consommateurs dans ses différents usages.
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Je partage ces arguments, voyez-vous, je ne suis pas contre des mesures de protection de l’eau, nous avons tous des efforts à faire.
Pourtant, si l’on souhaite que ceux-ci soient couronnés de succès, les premiers concernés vont être les agriculteurs. De ce point de vue, il vaut mieux travailler en bonne intelligence avec eux. En leur imposant toujours des contraintes supplémentaires, on parviendra à un système contre-productif, qui ne leur permettra pas de s’emparer de cette politique et d’améliorer la qualité de l’eau.
Or les contraintes sont multiples, mais le monde agricole a déjà pris conscience du problème. La démarche symbolique que porte cet article n’est pas forcément pratique et va poser un certain nombre de questions qui devront être tranchées par le juge, et non par le législateur.
C’est la raison pour laquelle je soutiens cet amendement de suppression.
M. le président. La parole est à Mme Sophie Primas, pour explication de vote.
Mme Sophie Primas. Monsieur le président, mes chers collègues, l’eau fait évidemment partie de notre patrimoine commun et il faut la préserver. J’entends d’ailleurs que se déroule un Grenelle de l’eau avec des ateliers destinés à travailler à sa qualité.
Il faut évidemment y être attentif, mais cet amendement de suppression découle du fait que cette question est déjà intégrée dans le code de l’environnement, dans lequel l’eau est citée parmi les ressources naturelles et les milieux naturels terrestres et marins, qui sont des patrimoines communs de la Nation.
Il s’agit donc simplement d’éviter ici la confusion résultant de la redondance juridique, au profit de la clarté de la loi, qui fait parfois défaut.
M. Jean-Raymond Hugonet. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.
M. Joël Labbé. Sans insister trop lourdement, ainsi que Ronan Dantec l’a précisé, il s’agit bien ici de la qualité de l’eau. Un énorme travail collectif doit être mené sur ce sujet, dans l’intérêt, aussi, du monde agricole.
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.
M. Marc Laménie. J’ai cosigné l’amendement de M. Chasseing visant à supprimer cet article et je suis intervenu en ce sens hier soir. Nous sommes soumis à des sollicitations diverses de nos agriculteurs, que nous défendons, car il est vrai qu’ils sont soumis à de nombreuses contraintes.
Pourtant, à la lecture du rapport, qui est très bien rédigé s’agissant de cet article 19 bis A, il me semble qu’il est bon d’indiquer dans le texte que la qualité de l’eau est un enjeu fondamental.
Même si je comprends l’intervention de René-Paul Savary concernant les difficultés d’appréciation juridique, j’ai été convaincu par M. le rapporteur et Mme la secrétaire d’État du bien-fondé du maintien de cet article. Je me rangerai donc à leur avis. (Mme Marta de Cidrac applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Didier Mandelli, pour explication de vote.
M. Didier Mandelli. Je comprends la position de mes collègues qui souhaitent la suppression de cet article, mais il s’agit bien de qualité de l’eau, et je ne voudrais pas que l’on en fasse un argument qui ne concernerait que les agriculteurs.
Nous sommes tous concernés, y compris les collectivités locales, les entreprises, tous ceux qui consomment de l’eau, qui portent donc une responsabilité vis-à-vis de ce produit essentiel à la vie.
Je suivrai la position du rapporteur et j’invite mes collègues à faire de même. Il s’agit d’intégrer la notion de qualité de l’eau, comme c’est le cas pour d’autres éléments, dans notre bien commun. (Mme Marta de Cidrac applaudit.)
M. le président. La parole est à M. le président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable.
M. Jean-François Longeot, président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Je partage ce qui vient d’être dit par Didier Mandelli et je soutiens le rapporteur. Supprimer l’article 19 bis A, qui parle de l’eau, dans un tel projet de loi, reviendrait à émettre un très mauvais signal en direction de l’ensemble de nos concitoyens.
J’ai bien compris les arguments avancés, mais il ne s’agit pas uniquement d’un problème agricole ; nous sommes confrontés tous les jours à la question de la qualité des eaux, tous les jours, je suis interpellé à ce sujet.
C’est une préoccupation importante qui doit tous nous concerner ; la suppression de cet article serait un très mauvais signe, j’invite donc tous ceux qui siègent dans cet hémicycle à le maintenir.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Barbara Pompili, ministre de la transition écologique. Je soutiens les propos que je viens d’entendre. En effet, la question de la qualité de l’eau nous touche tous. Elle dépend de multiples facteurs, et le fait que nous travaillions tous ensemble à des solutions pour l’améliorer me paraît être un très bon signal que l’on envoie vers l’extérieur.
Mme Primas a évoqué l’initiative qui a été lancée en lien avec mon collègue Julien Denormandie. Pour préciser, celle-ci ne concerne pas vraiment la qualité de l’eau, mais plutôt sa gestion quantitative.
Il y a eu les fameuses assises de l’eau, auxquelles nombre d’entre vous ont participé et qui ont été très fructueuses et intéressantes. Nous entrons maintenant dans la suite, dans les mises en application, dans la définition des solutions.
Il a été décidé de faire un focus particulier sur la question agricole, car – je vous rejoins sur ce point – les agriculteurs sont en première ligne sur cette question, même s’ils sont loin d’être les seuls. Les différentes mesures de transition écologique, concernant notamment l’industrie, vont nécessiter que nous gérions mieux l’eau.
Ce Varenne de l’eau permet donc d’aborder spécifiquement ce point en mettant tout le monde autour de la table. Il s’agit donc de trouver des solutions pour répondre aux besoins de nos agriculteurs qui nous nourrissent de manière anticipée, afin de limiter les problèmes à venir ; nous savons malheureusement que nous allons connaître des tensions sur l’eau.
Mme Sophie Primas. Merci !
M. Joël Guerriau. Je retire mon amendement, monsieur le président !
M. le président. L’amendement n° 243 rectifié bis est retiré.
M. Michel Canévet. Je retire également le mien, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 108 rectifié est retiré.
Je mets aux voix les amendements identiques nos 909 rectifié bis et 2108.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 19 bis A.
(L’article 19 bis A est adopté.)
Articles additionnels après l’article 19 bis A
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 112 rectifié, présenté par Mmes Sollogoub et Jacquemet, M. Détraigne, Mme Saint-Pé, MM. Houpert, Cardoux, Prince, Menonville et Decool, Mme Gosselin, MM. Cigolotti et Canévet et Mme Garriaud-Maylam, est ainsi libellé :
Après l’article 19 bis A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le I de l’article L. 211-1 du code de l’environnement est ainsi modifié :
1° À la première phrase du premier alinéa, après les mots : « cette gestion », sont insérés les mots : « , d’intérêt général, » ;
2° Au 1°, après les mots : « des sites et des zones humides », sont insérés les mots : « d’origine naturelle ou humaine » ;
3° Le 7° est complété par les mots : « , en veillant à ce que cette action augmente et non diminue la ressource en eau disponible, et respecte les milieux aquatiques et humides, y compris d’origine humaine ».
La parole est à Mme Denise Saint-Pé.
Mme Denise Saint-Pé. Cet amendement vise, d’une part, à préciser dans la loi que l’origine humaine d’un milieu aquatique ou humide ne fait pas obstacle à sa protection et à sa bonne gestion ; d’autre part, à exiger de la restauration de la continuité écologique qu’elle veille à ne pas abaisser la ressource locale en eau non plus qu’à détruire des milieux d’intérêt d’origine humaine.
Il a été constaté, tant par la recherche scientifique que par les acteurs des territoires, une confusion sur le sens du mot « naturel » : trop de gestionnaires de l’eau considèrent aujourd’hui qu’un milieu naturel aquatique ou humide est forcément sauvage et sans humain.
Or la nature en France a évolué depuis des millénaires avec les activités humaines : les lacs, les étangs, les plans d’eau, les retenues, les canaux font aussi partie des écosystèmes, bien que la plupart d’entre eux soient issus d’activités humaines passées ou présentes.
Ces milieux d’origine humaine rendent de nombreux services écosystémiques. La confusion assimilant « naturel » et « sauvage » a d’ores et déjà conduit à de regrettables décisions dans de nombreux territoires, par exemple à des destructions ou à des assèchements de lacs ou d’étangs.
C’est le cas, en particulier, des chantiers de restauration de continuité écologique qui ne réalisent pas d’étude d’impact sérieuse sur l’hydrologie, l’écologie et l’usage des milieux en place.
Face au changement climatique, il est nécessaire de garantir la protection de la ressource en eau sur tout le territoire, pour ses usages tant sociaux et économiques que biologiques et écologiques.
Aussi les chantiers de continuité écologique doivent-ils s’assurer que le choix d’aménagement d’un ouvrage ne conduise ni à une perte locale en eau de surface ni à une diminution locale du stockage d’eau souterraine, ce qui converge avec le souhait, déjà exprimé par les auteurs d’autres amendements, de rechercher des solutions multi-usages, douces et intelligentes, de continuité des rivières.
M. le président. L’amendement n° 968 rectifié bis, présenté par MM. Segouin, Cuypers, Longuet, Klinger et Rojouan, Mme Bellurot, MM. Cardoux et Saury, Mme Deromedi, MM. Burgoa et B. Fournier, Mmes Belrhiti et Lassarade, MM. de Legge et Anglars, Mmes Garriaud-Maylam et Canayer, MM. de Nicolaÿ et Brisson, Mme Gruny, MM. J.M. Boyer et Duplomb, Mme Pluchet, M. Savin, Mme Gosselin, MM. Houpert et H. Leroy et Mme Dumont, est ainsi libellé :
Après l’article 19 bis A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le 1° du I de l’article L. 211-1 du code de l’environnement est ainsi modifié :
1° Après le mot : « entend », sont insérés les mots : « par écosystème aquatique tous les milieux en eau de manière régulière, incluant ceux créés par l’activité humaine dont les services rendus à la société et à l’environnement doivent être évalués et préservés, et » ;
2° Après le mot : « non », sont insérés les mots : « , d’origine naturelle ou humaine ».
La parole est à M. Pierre Cuypers.
M. Pierre Cuypers. De très nombreux scientifiques montrent que les retenues, plans d’eau, lacs, étangs, canaux biefs, apportent des services écosystémiques aujourd’hui indispensables. Les ouvrages assurent la préservation de l’eau à l’étiage, la régulation des crues, la dépollution locale par épuration, constituent un réservoir de biodiversité, des puits de carbone, offrent un agrément paysager, une source d’énergie bas-carbone, permettent l’alimentation des nappes et des zones humides. La Coordination nationale eau et rivières humaines (Cnerh) a publié récemment une synthèse de plus de cent publications de recherche qui confirme l’existence de ces services.
Or ces écosystèmes d’origine humaine, toujours de petite taille, sont mal protégés par le droit, contrairement aux plus grands. Ils sont détruits sans aucune étude d’impact, d’une part, parce que leur utilité écologique est ignorée, et, d’autre part, en raison de mauvaises interprétations d’autres dispositions du droit. La restauration de la continuité écologique est ainsi parfois interprétée, à tort, comme un objectif de retour à une « rivière sauvage ».
Cet amendement vise donc à enrichir l’article L. 211-1 du code de l’environnement, qui définit l’intérêt général à travers la « gestion équilibrée et durable de l’eau », afin d’étendre expressément la protection de la loi à ces milieux.
M. le président. L’amendement n° 969 rectifié bis, présenté par MM. Segouin, Cuypers, Longuet, Klinger et Rojouan, Mme Bellurot, MM. Cardoux et Saury, Mme Deromedi, MM. Burgoa et B. Fournier, Mmes Belrhiti et Lassarade, MM. de Legge et Anglars, Mmes Garriaud-Maylam et Canayer, MM. de Nicolaÿ et Brisson, Mme Gruny, MM. J.M. Boyer et Duplomb, Mme Pluchet, M. Savin, Mme Gosselin, MM. Houpert et H. Leroy et Mme Dumont, est ainsi libellé :
Après l’article 19 bis A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le I de l’article L. 211-1 du code de l’environnement est ainsi modifié :
1° au 1°, après les mots : « zone humide », sont insérés les mots : « , que ceux-ci soient d’origine naturelle ou humaine » ;
2° Le même 1° est complété par les mots : « , les écosystèmes aquatiques ou zones humides d’origine humaine étant les mares, étangs, retenues, lacs, canaux, biefs » ;
3° Le 7° est complété par les mots : « , en respectant les écosystèmes aquatiques et zones humides d’origine humaine tels que définis dans le 1° ».
La parole est à M. Pierre Cuypers.
M. Pierre Cuypers. Les retenues, plans d’eau, lacs, étangs, canaux, biefs apportent des services écosystémiques, cet amendement vise donc également à enrichir l’article L. 211–1 du code de l’environnement qui définit l’intérêt général à travers la « gestion équilibrée et durable de l’eau ».
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. S’agissant de l’amendement n° 112 rectifié, je ne peux que souscrire à la précision selon laquelle la gestion équilibrée et durable de la ressource en eau est d’intérêt général. C’est d’ailleurs ce que dispose l’article L. 210–1 du code de l’environnement : « L’eau fait partie du patrimoine commun de la nation. Sa protection, sa mise en valeur et le développement de la ressource utilisable, dans le respect des équilibres naturels, sont d’intérêt général. »
En revanche, l’intérêt de préciser que les sites et zones humides peuvent être d’origine humaine ou naturelle est moins évident ; le code de l’environnement ne fait pas de distinction selon l’origine anthropique ou non de ces milieux, d’autant qu’il n’est pas toujours aisé de tracer une délimitation nette de cette origine.
Enfin, disposer que le rétablissement de la continuité écologique ne peut qu’augmenter, et non diminuer, la ressource en eau disponible complexifierait la mise en œuvre de cette politique, d’autant qu’il est malaisé de déterminer les effets liés aux aménagements et ceux qui découlent de l’hydrologie du cours d’eau.
L’avis est donc défavorable sur cet amendement.
Pour ce qui concerne les amendements nos 968 rectifié bis et 969 rectifié bis, il n’est pas opportun de préciser que les sites et zones humides peuvent être d’origine humaine ou naturelle ; le code de l’environnement ne fait pas de distinction selon l’origine anthropique ou non de ces milieux.
Certains milieux d’origine humaine sont devenus des milieux naturels par leur abandon, d’autres nécessitent au contraire de maintenir une gestion particulière et régulière pour jouer leur rôle positif.
Différencier de manière explicite dans la loi les milieux d’origine humaine des autres et lister les écosystèmes aquatiques ou zones humides d’origine humaine ne peut que conduire à l’oubli de certains d’entre eux.
L’avis est donc également défavorable sur ces deux amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État. L’article L. 211–1 du code de l’environnement ne fait, en effet, pas de distinction entre les écosystèmes naturels ou d’origine anthropique ; il s’applique à tous les écosystèmes. La définition des zones humides présente à l’article L. 211–1 précise d’ailleurs déjà que celles-ci peuvent être exploitées par l’homme. Les niveaux d’eau des marais, par exemple, sont gérés par l’homme, pour autant, ces marais sont bien considérés comme des milieux humides exceptionnels.
La définition des zones humides, évoquée dans l’amendement n° 968 rectifié bis, a fait l’objet de plusieurs modifications récentes et vient seulement d’être stabilisée ; il ne semble donc pas souhaitable d’y revenir et de la modifier.
S’agissant de l’amendement n° 969 rectifié bis, les aménagements hydrauliques humains ne créent pas tous des milieux naturels à préserver. Je comprends l’inquiétude exprimée par ceux qui veulent préserver ce geste humain dans ces milieux exceptionnels ; pour autant, cet article, voire ce texte tout entier, en ce qu’il promeut la résilience, nous invite à repenser la qualité et la richesse de l’écosystème, avant sa forme ou son origine, naturelle ou de la main de l’homme, laquelle n’a qu’un intérêt secondaire.
Il n’y a donc pas, à mon sens, de dissensus sur cette question, nous privilégions toujours la qualité des écosystèmes, quelle qu’en soit l’origine, ainsi que l’indique déjà l’article L. 211–1.
L’avis est donc défavorable sur ces trois amendements.
M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.
M. Ronan Dantec. J’ai du mal à déterminer mon vote sur l’amendement n° 112 rectifié. Je m’adresse donc à ses auteurs : je souscris à une bonne partie de son dispositif, qui est essentiellement une attaque d’une rare virulence contre les bassines. Je voulais donc bien m’assurer que ses auteurs étaient bien opposés à ces retenues artificielles et que tel était bien le sens de cet amendement.
En écrivant : « en veillant à ce que cette action augmente et non diminue la ressource en eau disponible, et respecte les milieux aquatiques et humides, y compris d’origine humaine », ils font référence à de grands milieux humides d’origine humaine, comme la Brière, qui constituent des zones de biodiversité et un patrimoine très important, mais ils impliquent aussi qu’il faut respecter le milieu aquatique humide et maintenir une disponibilité en eau assez large.
Or la bassine, la retenue artificielle, ne correspond ni au respect des milieux aquatiques et humides ni même à la disponibilité en eau, dans la mesure où elle provoque un gaspillage énorme.
Le sens de cet amendement est-il donc bien d’interdire implicitement les bassines et les retenues artificielles ? Si tel est le cas, je me demande si je ne vais pas le voter… (Sourires.)
M. le président. La parole est à Mme Denise Saint-Pé, pour explication de vote.
Mme Denise Saint-Pé. J’ai présenté cet amendement pour Mme Sollogoub, qui en est l’auteur, mais je vous indique qu’en aucun cas son dispositif n’exprime une opposition à la notion de bassine ou de retenue d’eau.
M. Ronan Dantec. Si, relisez-le bien !
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 968 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 969 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 52 rectifié, présenté par Mme Borchio Fontimp, MM. Bouchet, Burgoa et Charon, Mmes Demas, Deromedi, Dumont et Garriaud-Maylam, MM. Genet et Meurant, Mme Raimond-Pavero et MM. Rojouan, Saury et H. Leroy, est ainsi libellé :
Après l’article 19 bis A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le 7° du I de l’article L. 211-1 du code de l’environnement, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° La sauvegarde des aires protégées préservant les écosystèmes aquatiques d’eau douce en facilitant leur création ou leur extension. »
La parole est à M. Bruno Rojouan.
M. Bruno Rojouan. Actuellement, les aires protégées ne représentent que 23,5 % du territoire aussi bien métropolitain que d’outre-mer. Si le Gouvernement ambitionne de porter ce chiffre à 30 % dès 2022, le présent projet de loi ne fait qu’effleurer le sujet des écosystèmes aquatiques d’eau douce. Or plus un espace est protégé, plus la biodiversité sera restaurée.
L’objectif affiché ici est de faciliter la création et l’extension d’aires protégées pour les écosystèmes aquatiques – rivières, lacs, etc. – afin de connecter ceux-ci plus largement entre eux ; cette connexion participe indéniablement à la nécessaire reconquête de la biodiversité dans ces espaces.
Le présent amendement vise donc à favoriser la réussite de nos objectifs nationaux de protection de la biodiversité, notamment en traitant de l’enjeu des aires protégées.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. La commission a souhaité simplifier la gestion équilibrée et durable de la ressource en eau en n’ajoutant pas un nouvel objectif à une énumération qui en comporte déjà sept.
Cet amendement vise la sauvegarde des aires protégées préservant les écosystèmes aquatiques d’eau douce.
Dans la mesure où le 1° de l’article L. 211–1 du code de l’environnement prévoit d’ores et déjà « la préservation des écosystèmes aquatiques, des sites et des zones humides », il n’est pas utile d’apporter cette précision qui ne ferait que complexifier la rédaction de l’article, sans gain pour la préservation des écosystèmes.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État. Personne ne peut douter de mon attachement aux aires protégées ; vous le savez, nous les défendons largement et nous déclinons en plans d’action la stratégie nationale pour les aires protégées que j’ai eu le plaisir de vous présenter en début d’année.
Nous partageons la préoccupation des auteurs de cet amendement ; pour autant, dans une perspective de clarté et de lisibilité du droit, je rejoins M. le rapporteur. Il ne me semble pas pertinent d’ajouter à cet article traitant de la gestion équilibrée de la ressource en eau, la préservation d’aires protégées, laquelle relève d’outils spécifiques et d’un autre livre du code.
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Je retrouve les arguments que j’ai exposés précédemment concernant la redondance des textes ! Or d’un côté on réécrit malgré tout la loi, de l’autre, on refuse de le faire.
Il ne faut pas être redondant, c’est la raison pour laquelle je ne voterai pas cet amendement et je me rangerai à votre avis, madame la secrétaire d’État.
M. le président. Monsieur Rojouan, l’amendement n° 52 rectifié est-il maintenu ?
M. Bruno Rojouan. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 52 rectifié est retiré.
L’amendement n° 51 rectifié, présenté par Mme Borchio Fontimp, MM. Bouchet, Burgoa et Charon, Mmes Demas, Deromedi, Dumont, Garnier et Garriaud-Maylam, MM. Genet, Meurant et Pellevat, Mme Raimond-Pavero et MM. Rojouan, Saury et H. Leroy, est ainsi libellé :
Après l’article 19 bis A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le chapitre préliminaire du titre II du livre Ier du code de l’environnement est complété par un article L. 120-… ainsi rédigé :
« Art. L. 120-…. – I. – Les citoyens sont des acteurs de la lutte contre le dérèglement climatique, ils participent à la protection de l’environnement notamment via des initiatives individuelles ou collectives.
« À titre expérimental, à compter de l’entrée en vigueur de la loi n° … du … portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets et pour une durée de trois ans, les départements organisent, au minimum une fois par mois, des opérations de nettoyage des lieux pouvant faire l’objet de dégradations liées à l’activité humaine.
« Au regard des circonstances locales, un arrêté conjoint des ministres chargés de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales et de la transition écologique dresse la liste des départements autorisés à participer à cette expérimentation.
« Les citoyens volontaires font connaître leur souhait de participer à cette activité auprès de leur département. Sur cette base, le département établit une liste afin de procéder mensuellement au tirage au sort des citoyens mobilisés.
« II. – Un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application du présent article. »
La parole est à M. Bruno Rojouan.
M. Bruno Rojouan. Le citoyen est un acteur clé dans la protection de l’environnement. Chacun, à son niveau, a la possibilité, voire le devoir, d’adapter ses comportements afin de s’inscrire dans une démarche respectueuse de notre trésor commun : notre planète.
À cet effet, les initiatives individuelles et collectives sont nombreuses. Les opérations de collecte de mégots de cigarettes en milieu urbain ou de nettoyage des littoraux sont devenues choses communes.
Toutefois, celles-ci sont loin d’être suffisantes, sachant que, chaque année, les Français jettent environ 81 000 tonnes de déchets sauvages dans la nature.
Le présent amendement a pour objectif d’insister sur ces programmes de prévention.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. Les auteurs de cet amendement proposent, à titre expérimental, que les conseils départementaux organisent, au minimum une fois par mois, des opérations de nettoyage des lieux pouvant faire l’objet de dégradations liées à l’activité humaine. (Mme Dominique Estrosi Sassone s’exclame.)
Or rien n’empêche actuellement les collectivités d’organiser des journées « nettoyons la planète », comme c’est le cas de mon département d’élection, la Seine-Maritime, parmi d’autres. Faisons confiance aux collectivités pour agir dans l’intérêt de leur territoire et ne leur imposons pas de nouvelles contraintes qui porteraient une nouvelle atteinte au principe de libre administration.
Avis défavorable.
Mme Sophie Primas. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État. Toutes ces initiatives sont bienvenues, loin de nous l’idée de décourager n’importe quel niveau de collectivité ou n’importe quel acteur, citoyen ou association désireux de mener des expérimentations et de mettre en place ce type d’actions.
Toutefois, j’émets une réserve concernant le fait, d’une part, que le service public de gestion des déchets, au regard de la répartition des compétences – je ne vous l’apprends pas –, relève en premier lieu du bloc communal et, d’autre part, que l’exercice des pouvoirs de police dévolus au maire à des fins de salubrité publique exige que nous respections la lisibilité de ces compétences.
Avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.
M. Daniel Gremillet. On prend le sujet à l’envers : c’est un problème d’éducation. On est en plein dérapage, revenons à l’essentiel ! Nous en sommes à mettre en place des tas de procédures, parce que les citoyens sont incapables d’adopter un comportement normal.
Considérez les quantités de déchets qui traînent dans ce monde dit moderne, ce monde dit du développement durable : on n’en aurait jamais trouvé autant il y a un demi-siècle, ni même il y a vingt ans ! J’estime qu’il est absolument anormal de légiférer pour régler un problème qui relève avant tout d’un défaut d’éducation. Merci, monsieur le rapporteur, merci, mesdames les ministres, revenons à l’essentiel ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. Monsieur Rojouan, l’amendement n° 51 rectifié est-il maintenu ?
M. Bruno Rojouan. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 51 rectifié est retiré.
L’amendement n° 53 rectifié, présenté par Mme Borchio Fontimp, MM. Bouchet, Brisson, Burgoa et Charon, Mmes Demas, Deromedi, Dumont et Garriaud-Maylam, MM. Genet, Houpert, Meurant et Pellevat, Mme Raimond-Pavero et MM. Rietmann, Rojouan, Saury, Savin et H. Leroy, est ainsi libellé :
Après l’article 19 bis A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – À titre expérimental, pour une durée de trois ans à compter de l’entrée en vigueur de la présente loi, les collectivités territoriales de métropole et d’outre-mer possédant sur leur territoire des exutoires destinés aux eaux usées procèdent à l’installation d’un filet de collecte de déchets.
II. – Au regard des circonstances locales, un arrêté conjoint des ministres chargés de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales et de la transition écologique dresse la liste des collectivités territoriales autorisées à participer à cette expérimentation.
III. – Un décret en Conseil d’État détermine les conditions d’application du présent article.
IV. – Au plus tard neuf mois avant le terme de l’expérimentation, le Gouvernement remet au Parlement un rapport détaillant l’efficacité du dispositif et mesurant l’opportunité de le généraliser.
La parole est à M. Bruno Rojouan.
M. Bruno Rojouan. En septembre 2020, la France a signé l’Engagement des dirigeants en faveur de la nature.
S’inscrivant dans la philosophie de cet accord, le présent amendement tend à instaurer l’expérimentation à grande échelle du dispositif de filets de collecte de déchets, ou filets anti-déchets.
Dans les Alpes-Maritimes, la commune de Cannes a fait preuve d’anticipation, puisqu’elle est la première à expérimenter ce dispositif.
Ces filets, qui permettent de capter jusqu’aux plus fines particules de polystyrène, seront placés à la sortie des bouches d’évacuation ou exutoires afin de stopper la course vers les océans des déchets qui échappent aux réseaux de collecte et de retraitement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. Cet amendement tend à instaurer l’expérimentation, pour une durée de trois ans, de l’installation de filets de collecte de déchets par les collectivités possédant sur leur territoire des exutoires destinés aux eaux usées.
Plusieurs collectivités – dont celle que vous avez citée, monsieur le sénateur –, ont déjà installé de tels filets anti-déchets sur leur territoire, ce qui permet incontestablement de réduire le volume des déchets jetés au sol charriés par les eaux de pluie.
Cette solution est efficace, car elle permet d’éviter que des macro-déchets, tels que les sachets en plastique et les bouteilles, ne se déversent dans les rivières ou dans la mer.
Je demeure toutefois circonspect quant à la nécessité d’instaurer une telle expérimentation, dans la mesure où un certain nombre de collectivités ont déjà commencé à s’équiper.
Je m’en remets donc à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État. Les rejets de macro-déchets, les rejets d’eaux pluviales et les déversements des réseaux d’assainissement en cas de forte pluie peuvent effectivement être à l’origine de pollutions. C’est pourquoi le Gouvernement a établi une feuille de route « zéro déchet en mer ». Il a également engagé des actions – que vous connaissez bien, monsieur le sénateur – visant à mieux évaluer la contribution des rejets d’eaux pluviales et des déversoirs d’orage des systèmes d’assainissement à la pollution des milieux marins par les macro-déchets.
En la matière, les collectivités et les syndicats qui gèrent les eaux usées font preuve d’un fort volontarisme, et ils ne sont nullement empêchés dans la mise en place de ce type d’expérimentation et d’outil.
Les expérimentations inscrites dans la loi doivent, non pas confirmer ce qui est déjà possible, mais permettre de déroger à ce qui est d’ordinaire interdit.
J’émets donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.
M. Daniel Salmon. La question des déchets est complexe, et l’on ne peut y répondre qu’en marchant sur deux jambes : la première, rappelée par mon collègue Daniel Gremillet, est l’éducation, et la seconde, tout aussi importante, l’action sur le tout-jetable.
Il y a quelques siècles, le déchet n’existait pas, parce qu’étant biodégradable, il disparaissait très rapidement. Dans notre société, au contraire, le jetable a complètement envahi nos espaces. De ce fait, même si seule une personne sur cent ou sur mille jette des déchets dans l’espace public, ces derniers sont en quantités tellement invraisemblables qu’on se retrouve avec des déchets dans toutes les rues, puis dans les cours d’eau et dans la mer.
Pour éviter cela, la loi doit limiter la production de produits jetables, ceux-ci constituant l’un des plus importants gisements de déchets.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 53 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 19 bis B
(Supprimé)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 1084, présenté par MM. Dantec, Fernique, Labbé, Salmon et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Au 1° du I de l’article L. 211-1 du code de l’environnement, après les mots : « zones humides », sont insérés les mots : « et leur restauration ».
La parole est à M. Ronan Dantec.
M. Ronan Dantec. Cet amendement vise à rétablir l’article 19 bis B relatif à la restauration des zones humides. En effet, pour atteindre cet objectif, il faut d’abord restaurer l’article !
Dans le cadre de ce projet de loi Climat, il nous paraît essentiel de rappeler que les zones humides sont d’importants lieux de stockage de CO2.
Les tourbières, par exemple, qui n’occupent que 3 % du territoire, sont à l’origine d’une captation de carbone équivalente à 30 % du carbone séquestré dans les écosystèmes. Or on estime que plus de 100 000 hectares de tourbières dégradées nécessitent une restauration.
L’intégration d’une orientation visant à la restauration de ces milieux, dans le cadre de la précision du contenu d’une gestion équilibrée et durable des ressources en eau que cet amendement tend à introduire, induit par ailleurs une valorisation économique des services rendus par la nature.
Le fléchage sur les tourbières est, enfin, une stratégie intéressante dans le cadre de la compensation aérienne. (M. Philippe Tabarot, rapporteur, approuve.)
Je crois que nous sommes d’accord quant à la nécessité de restaurer ces zones humides et donc, leurs capacités de stockage de CO2.
Le Conseil d’État avait toutefois relevé une difficulté qui avait conduit à la suppression de cet article. En effet, dans sa rédaction initiale, celui-ci comportait une liste des milieux aquatiques.
Le Conseil d’État ayant indiqué qu’il fallait éviter une telle énumération, nous proposons une rédaction différente, par laquelle nous introduisons simplement, après les mots « zones humides », les mots « et leur restauration ».
Ainsi, nous tenons compte de l’objection du Conseil d’État, et nous répondons à la nécessité de mettre la restauration des zones humides au cœur de notre stratégie de captage du carbone.
M. le président. L’amendement n° 812, présenté par M. Gay, Mme Varaillas et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Après le 7° du I de l’article L. 211-1 du code de l’environnement, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« … La restauration des milieux aquatiques, notamment des tourbières, mangroves, ripisylves et herbiers marins, qui rendent des services écosystémiques d’importance significative, tels que la séquestration de carbone. »
La parole est à M. Gérard Lahellec.
M. Gérard Lahellec. En convergence objective avec l’intervention de notre collègue Dantec, cet amendement vise à inscrire dans ce texte la nécessité de restaurer des écosystèmes aquatiques, qui rendent des services substantiels dans la lutte contre le changement climatique.
Il ne suffit pas de conserver l’existant : il convient d’insuffler une dynamique écologique. C’est la raison pour laquelle notre préférence va au rétablissement de l’article qui a été supprimé en commission.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. La commission a fait le choix de la suppression de l’obligation de restauration des zones humides au titre des objectifs de la gestion équilibrée et durable, dans la mesure où la préservation des zones humides dispose déjà d’au moins trois assises législatives : le 1° du I de l’article L. 211-1 du code de l’environnement vise la préservation des écosystèmes aquatiques, des sites et des zones humides ; l’article L. 211-1-1 du code de l’environnement dispose, depuis 2005, « que la préservation et la gestion durable des zones humides […] sont d’intérêt général », et que les « politiques nationales, régionales et locales d’aménagement des territoires ruraux et l’attribution des aides publiques tiennent compte des difficultés particulières de conservation, d’exploitation et de gestion durable des zones humides et de leur contribution aux politiques de préservation de la diversité biologique […] » ; enfin, l’article 19 du présent projet de loi prescrit d’ores et déjà, à l’article L. 210-1 du code de l’environnement « la préservation et, le cas échéant, la restauration des fonctionnalités naturelles des écosystèmes aquatiques […] dont font partie les zones humides ».
Il n’est pas nécessaire de multiplier des dispositions similaires en de multiples endroits du code, au risque d’affaiblir la lisibilité du droit et de créer de possibles contradictions en cas de formulations différentes.
J’émets donc un avis défavorable sur ces deux amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État. L’article 19 bis B adopté par l’Assemblée nationale introduisait un huitième alinéa au I de l’article L. 211-1 du code de l’environnement relatif à la restauration de certains milieux aquatiques tels que les zones humides, les tourbières et les mangroves.
Cet objectif est essentiel, car le rôle de ces milieux aquatiques dans la lutte contre le changement climatique est significatif.
Si l’intention des auteurs de ces deux amendements est la même, j’observe que M. Dantec propose une rédaction de compromis entre la version adoptée par l’Assemblée nationale et la préoccupation qui a conduit à la suppression de cet article par la commission, puisqu’elle permet d’introduire cet objectif de restauration, sans autre précision, au sein d’un article du code de l’environnement qui vise déjà la préservation des écosystèmes aquatiques et des zones humides.
Ainsi, nous intégrons l’objectif de restauration, qui est essentiel, tout en tenant compte du souci exprimé par les sénateurs en commission quant aux conséquences d’une énumération.
Je demande donc le retrait de l’amendement n° 812, au profit de l’amendement n° 1084, sur lequel j’émets un avis favorable.
M. le président. Monsieur Lahellec, l’amendement n° 812 est-il maintenu ?
M. Gérard Lahellec. Compte tenu de ces explications, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 812 est retiré.
La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.
M. Ronan Dantec. Monsieur le rapporteur nous a donné lecture de l’article L. 211-1 du code de l’environnement, qui est l’article socle. De fait, si l’objectif de reconquête des zones humides est mentionné dans deux autres articles du même code, il ne l’est pas dans cet article socle.
Il ne s’agit pas de voter une loi bavarde – j’y suis également attentif –, mais, par souci de cohérence de l’action publique, d’utiliser les mêmes termes dans les différents articles relatifs aux zones humides.
Au fond, cet amendement vise à remédier au déséquilibre par lequel, dans le droit existant, seul l’article L. 211-1, c’est-à-dire l’article socle en matière de zones humides, ne fait pas mention de l’objectif de restauration.
Il me semble que cette proposition pourrait être assez consensuelle.
M. le président. En conséquence, l’article 19 bis B demeure supprimé.
Article 19 bis C
I. – Le 2° du I de l’article L. 214-17 du code de l’environnement est ainsi modifié :
1° et 2° (Supprimés)
3° (nouveau) Sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :
« L’obligation prévue au présent 2 ne peut servir de motif pour justifier la destruction des moulins à eau ni des éléments essentiels de l’ouvrage permettant l’utilisation de la force motrice du cours d’eau, sauf s’il s’agit de la volonté du propriétaire de l’ouvrage ou si le propriétaire ne peut être identifié.
« En cas de désaccord entre l’autorité administrative et le propriétaire ou, à défaut, l’exploitant, concernant les modalités de maintien ou de restauration de la continuité écologique, une procédure de conciliation est engagée. Cette procédure est conduite par un référent territorial désigné par le représentant de l’État dans le département, qui exerce ses fonctions à titre gratuit. Un décret du ministre chargé de l’environnement précise les modalités de mise en œuvre de la procédure de conciliation territoriale. »
II (nouveau). – L’article L. 214-18-1 du code de l’environnement est ainsi modifié :
1° La première phrase est ainsi modifiée :
a) après la première occurrence du mot : « eau », sont insérés les mots : « autorisés ou fondés en titre, les forges et leurs dépendances, destinés à la fabrication de papier, de produits oléicoles, de farines et produits issus de la meunerie ou » ;
b) le mot : « régulièrement » est supprimé ;
2° La seconde phrase est supprimée ;
3° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Cette dérogation s’applique à tous les moulins à eau, forges et leurs dépendances existant à la date de publication de la loi n° … du … portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dès lors que leurs propriétaires, des tiers délégués ou des collectivités territoriales les dotent d’un équipement pour produire de l’électricité, y compris postérieurement à cette date. »
M. le président. La parole est à M. Stéphane Demilly, sur l’article.
M. Stéphane Demilly. Cet article important continue de susciter beaucoup d’émotion. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle nous serons deux à intervenir au nom du groupe Union Centriste sur l’article.
Je souhaiterais commencer mon intervention en saluant le compromis proposé par notre rapporteur Pascal Martin et voté en commission. Vous aviez d’ailleurs appelé un tel compromis de vos vœux, madame la ministre, lors de votre audition par notre commission.
Ne pas détruire le patrimoine hydraulique que constituent nos moulins est une volonté légitime, d’une part, parce que l’hydroélectricité constitue naturellement une source d’énergie de premier plan pour notre environnement et notre économie, d’autre part, parce que nos moulins font incontestablement partie du patrimoine culturel.
Je souhaite toutefois rappeler devant cette assemblée que l’obligation de restauration de la continuité écologique ne concerne aujourd’hui que 11 % des cours d’eau en France, c’est-à-dire ceux qui sont classés en liste 2. Surtout, cette obligation n’emporte pas tant la destruction des moulins en tant que tels que la réduction de l’impact des ouvrages existants sur les cours d’eau.
La restauration de la continuité écologique des cours d’eau est essentielle. Le défaut d’une telle restauration se traduit par une perte d’habitat pour les espèces aquatiques, une baisse du taux d’oxygène dans l’eau, ou encore un réchauffement de la température de celle-ci. On constate d’ailleurs aujourd’hui que certaines espèces piscicoles, telles que l’anguille, bien connue dans mon département de la Somme, sont en train de disparaître.
Avant de commencer l’examen de cet article, je vous invite donc, mes chers collègues, à ne pas entrer dans des débats de posture, mais à rester extrêmement pragmatiques sur ce sujet.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, sur l’article.
M. Jean-Pierre Sueur. J’ai déjà eu l’occasion à plusieurs reprises d’évoquer le sujet des moulins dans cet hémicycle. Lorsque vous êtes venue dans mon département, madame la ministre, j’ai également eu l’occasion de vous dire toute la beauté et tout l’intérêt du patrimoine historique que représentent les dizaines, et peut-être même les centaines de milliers de moulins qui existent le long de nos rivières.
Je pense notamment aux trente magnifiques moulins situés sur la Cléry : appréciés de toutes et de tous, ils constituent des atouts patrimoniaux et touristiques.
Or, soudainement, les propriétaires de ces moulins reçoivent des courriers comminatoires de la préfecture, qui leur enjoint de faire tels ou tels travaux pour telle date. Ces propriétaires ne comprennent pas.
Nous, élus, prenons alors attache avec le préfet. Nous trouvons les chemins d’un dialogue, mais quelques mois plus tard, de nouvelles objections dirimantes sont émises contre les argumentaires des propriétaires de moulins. Nous estimons qu’un dialogue est nécessaire.
Je tiens à saluer le travail de l’Assemblée nationale. En effet, la rédaction qui a été proposée permet d’éviter la destruction d’éléments de ce patrimoine tout en préservant la continuité écologique, à laquelle nous sommes tous attachés. Ce qui a été fait par l’Assemblée nationale doit pouvoir être encore amélioré par le Sénat, dans le respect de l’environnement, c’est-à-dire de la double exigence de la continuité écologique, d’une part, et du rôle que jouent les moulins pour la régulation du passage de l’eau dans nos rivières, d’autre part.
Madame la ministre, il est important de ne pas opposer la culture et la nature. C’est pourquoi nous devons trouver le chemin qui permettra de préserver la culture, et donc, les moulins, qui sont partie prenante de la culture de notre pays, tout en respectant la nature.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Moga, sur l’article.
M. Jean-Pierre Moga. Pour compléter les propos de mon collègue Stéphane Demilly, et rappeler la ligne de crête, bien identifiée, de notre groupe Union Centriste, nous refusons une continuité écologique qui conduise à la destruction systématique des retenues et des moulins.
Nous défendons une continuité écologique apaisée, permettant de valoriser les moulins et de garantir une production hydroélectrique renouvelable, en associant l’ensemble des parties prenantes dans un dialogue le plus constructif possible.
À rebours d’une mise en œuvre trop rigide ayant conduit à la destruction de 3 000 à 5 000 retenues d’eau, en particulier des moulins, dans le cadre des programmes d’aide des agences de l’eau, une politique plus apaisée est possible : elle a été défendue dans un excellent rapport de notre collègue Guillaume Chevrollier (Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains.), ainsi que lors de l’examen de la proposition de loi tendant à inscrire l’hydroélectricité au cœur de la transition énergétique et de la relance économique grâce à la rapporteure Laurence Muller-Bronn. (Mêmes mouvements.)
Aussi le présent article, introduit à l’Assemblée nationale par l’adoption de vingt-neuf amendements identiques, exclut-il la destruction des ouvrages hydrauliques, mettant fin à la continuité écologique destructive précédemment mentionnée.
Après avoir largement consulté l’ensemble des parties prenantes, le rapporteur Pascal Martin, que je salue, a proposé d’amender le dispositif pour parvenir à une solution d’équilibre.
La destruction des ouvrages ne doit pas être un principe, mais elle doit rester possible lorsque les propriétaires en expriment le souhait. Par ailleurs, en cas de désaccord, une conciliation permettra de réunir les acteurs.
Mes chers collègues, je vous invite à débattre de manière apaisée, de sorte que le bon sens et le pragmatisme l’emportent. (M. le président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Barbara Pompili, ministre. Ce débat illustre les difficultés que l’on peut rencontrer lorsque l’on s’efforce de concilier des priorités absolues : en l’occurrence, la préservation de la qualité de notre eau et des écosystèmes aquatiques, qui suppose la continuité des cours d’eau, et celle d’un magnifique patrimoine dont nous sommes tous fiers et que nous avons envie de voir perdurer.
Pour tenir cette ligne de crête, il nous faut trouver un difficile équilibre.
Les problèmes qui ont été rencontrés dans un certain nombre de territoires ont été portés à notre attention. Le présent article, qui a été voté en première lecture par l’Assemblée nationale, a été proposé afin de remédier à ces difficultés, mais il s’avère que la rédaction ainsi introduite, par un effet de retour de balancier, interdit d’effectuer des travaux de rétablissement de la continuité écologique au nom de la préservation de notre patrimoine, même lorsque ces travaux sont reconnus comme nécessaires par l’ensemble des acteurs, y compris par les propriétaires des ouvrages eux-mêmes. En tombant dans l’excès inverse, une telle disposition ne permettait pas de répondre aux besoins que nous ressentons collectivement.
La commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat s’est emparée de ce sujet. Elle a proposé une rédaction qui me paraît beaucoup plus équilibrée, car elle autorise la préservation d’ouvrages constitutifs de notre patrimoine, en particulier de moulins, tout en permettant que des travaux nécessaires soient réalisés quand l’ensemble des acteurs en sont d’accord, à commencer par les propriétaires, ou même, en l’absence de propriétaire.
Ce point d’équilibre me paraît de bon sens. J’estime qu’il fait honneur au débat parlementaire, qui a permis d’apporter une solution à ce problème.
Certains réglages pourront sans doute encore être apportés. En particulier, il me paraît opportun de prévoir une procédure de médiation afin de calmer le jeu dans certains territoires qui connaissent des tensions.
Quoi qu’il en soit, il me semble que si nous suivons cette ligne de crête en nous efforçant de concilier nos deux priorités, nous parviendrons à élaborer une rédaction susceptible de satisfaire tout le monde.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Corbisez, sur l’article.
M. Jean-Pierre Corbisez. J’évoquerai pour ma part le droit à produire de l’hydroélectricité dans nos moulins. Dans le cadre du groupe d’études Énergie, Daniel Gremillet et moi-même avions d’ailleurs reçu le syndicat France Hydroélectricité.
Madame la ministre, le bon sens que vous invoquez ne pourra être appliqué dans nos départements par les ingénieurs des directions départementales des territoires et de la mer (DDTM) tant que perdurera, au sein de votre ministère, la querelle entre le développement durable et la défense de la faune et de la flore.
Je peux en témoigner personnellement, car, résidant entre un moulin et une écluse, j’ai souhaité me doter d’une petite installation hydroélectrique.
Après avoir validé mon projet, l’ingénieur travaux m’a renvoyé vers sa collègue chargée de la faune et de la flore.
Première question : les poissons remontent-ils le moulin ? Je lui ai répondu qu’à moins de s’appeler Sergueï Bubka et d’être capable de faire un bond de trois mètres cinquante, un gardon aurait plus de chances de passer par l’écluse. (Sourires.)
Deuxième question : est-ce une zone de frayère ? Le cours d’eau étant de faible profondeur – de quatre-vingts centimètres à un mètre – on peut voir qu’il n’y a pas d’herbe au fond. Dans ces conditions, je ne vois pas comment une frayère pourrait s’y trouver.
Quoi qu’il en soit, on m’indique qu’il faut réaliser une étude faune-flore « quatre saisons », sur une année. Mais combien cela coûte-t-il ?
Madame la ministre, dès lors que les techniciens de l’État déploient tous les moyens pour empêcher ce type de projet d’aboutir, il n’est pas étonnant que certains propriétaires de moulins doivent attendre plus de cinq ans une dernière réponse pour monter un dossier d’installation l’hydroélectrique.
Il y a pourtant une solution simple : le préfet est le patron des services de la DDTM ; qu’il signe donc les permis qu’il souhaite autoriser !
Madame la ministre, le bon sens doit d’abord être appliqué dans votre ministère avant de diffuser au sein des DDTM. Alors seulement, nous n’aurons plus de problèmes dans nos départements ! (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une décision commune.
L’amendement n° 329 rectifié n’est pas soutenu.
L’amendement n° 510 rectifié bis, présenté par MM. Chevrollier, Favreau et Piednoir, Mme Muller-Bronn, M. de Nicolaÿ et Mmes Deroche et Doineau, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Le 2° du I de l’article L. 214-17 du code de l’environnement est ainsi modifié :
1° La seconde phrase est complétée par les mots : « , sans que puisse être remis en cause son usage actuel ou potentiel, en particulier aux fins de production d’énergie » ;
2° Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « S’agissant plus particulièrement des moulins à eau, l’entretien, la gestion et l’équipement des ouvrages de retenue sont les seules modalités prévues pour l’accomplissement des obligations relatives au franchissement par les poissons migrateurs et au transport suffisant des sédiments, à l’exclusion de toute autre, notamment de celles portant sur la destruction de ces ouvrages. »
La parole est à M. Guillaume Chevrollier.
M. Guillaume Chevrollier. À l’occasion de la présentation de cet amendement, qu’il me soit permis de saluer tout d’abord l’action des élus et de l’ensemble des acteurs de terrain qui agissent pour l’eau, ce bien commun.
Ces acteurs ont un objectif commun : la restauration de la continuité écologique, qui consiste à assurer la préservation de la biodiversité et du bon état des masses d’eau. Cependant, l’application de ce principe est source de complexité et de tensions. De fait, les incompréhensions sur le terrain sont nombreuses entre les services de l’État et les propriétaires d’ouvrages hydrauliques.
La destruction des ouvrages, plutôt que leur aménagement, serait privilégiée. Or il n’existe pas une, mais des solutions. Il apparaît donc nécessaire de mettre en œuvre une politique de gestion apaisée de la continuité écologique, mais il s’agit d’un débat complexe, dans lequel s’opposent des positions contradictoires.
Le présent amendement vise à revenir à la rédaction de l’article 19 bis C résultant des travaux de l’Assemblée nationale, rédaction qui consacrait un principe de non-destruction des moulins à eau. Elle est soutenue par des acteurs de terrain, parmi lesquels des propriétaires de moulins ou d’étangs, des agriculteurs et des défenseurs du patrimoine.
Si la rédaction issue des travaux de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable apportait des réponses pertinentes s’agissant de l’obtention des aides des agences de l’eau pour la suppression volontaire des seuils à des fins de restauration de la continuité écologique, et proposait des solutions autour de la médiation, il semble plus approprié de retenir la rédaction de l’Assemblée nationale, qui offre un degré de protection supérieur pour les propriétaires de ces ouvrages.
Un vote conforme permettrait d’engager une politique de la continuité écologique plus apaisée, et de réorienter l’action des pouvoirs publics en faveur de la valorisation des ouvrages, dans une perspective de développement durable et conformément au projet de loi initial, qui dispose que la préservation des milieux repose sur le triptyque de la gestion, de l’entretien et des équipements.
M. le président. L’amendement n° 1418, présenté par Mme M. Filleul, MM. J. Bigot, Montaugé et Kanner, Mme Bonnefoy, MM. Dagbert, Devinaz, Gillé, Houllegatte et Jacquin, Mmes Préville, Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Le 2° du I de l’article L. 214-17 du code de l’environnement est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Dans le cas où les solutions de mise en conformité des ouvrages, dont l’arasement, ont pour incidence de porter une atteinte grave à l’intérêt patrimonial de ces derniers ou à supprimer des capacités de production hydroélectrique que souhaiterait préserver le propriétaire, ou ne seraient pas acceptées par les propriétaires, un argumentaire devra être présenté par l’administration instructrice. En cas de conflit persistant entre le propriétaire et les services instructeurs, une procédure de conciliation est engagée, pilotée par un référent territorial nommé par le représentant de l’État dans le département au sein des services de l’État. En cas d’échec de la procédure de médiation territoriale, le comité national de l’eau sera mandaté pour proposer des solutions consensuelles. Un décret précisera le contenu de l’argumentaire, les modalités de recours à la procédure de conciliation territoriale et nationale, les missions du référent, les missions et la composition de la commission d’expertise qui sera constituée pour accompagner le comité national de l’eau. »
La parole est à Mme Martine Filleul.
Mme Martine Filleul. Ce sujet aura décidément donné beaucoup de grain à moudre à notre assemblée ! (Sourires.)
Permettez-moi tout d’abord de préciser notre cadre : les sénateurs du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain sont très attachés à la préservation de la continuité écologique des cours d’eau et ne souhaitent pas sa remise en cause.
Pour mémoire, la directive Eau de 2000 nous fixait l’objectif d’atteindre un bon état écologique pour les deux tiers de nos masses d’eau en 2015. Or, comme cela a été rappelé lors des assises de l’eau en 2019, seulement 44 % des masses d’eau ont atteint cet objectif européen, du fait de la trop forte artificialisation de nos rivières, des pollutions agricoles et de prélèvements trop importants.
Pour apaiser ce débat, il faut replacer les choses dans leur contexte et à leur juste mesure. Pour cela, il est important de préciser que tous les cours d’eau ne sont pas concernés par cette protection, tant s’en faut. De fait, tous les moulins et installations de petite hydroélectricité ne sont potentiellement pas menacés de destruction.
Nous sommes favorables à la recherche d’une conciliation entre cet engagement environnemental et le développement de la petite hydroélectricité en France, qui répond à la nécessité d’encourager le développement de nos énergies renouvelables.
Par cet amendement, nous proposons un compromis axé sur le renforcement des procédures de conciliation, ainsi qu’une méthodologie et un chemin très précis.
Par souci de transparence, je précise que cet amendement a été élaboré avec l’Association nationale des élus de bassin. Il vise à renforcer les procédures de dialogue et de conciliation en cas de conflit, ainsi qu’à garantir la plus grande transparence lorsque des décisions sont prises. Ainsi toute solution de mise en conformité conduisant à la suppression des capacités de production hydroélectriques ou portant atteinte à l’intérêt patrimonial – ce point tient particulièrement à cœur à mes collègues Sylvie Robert et Jean-Pierre Sueur – devra-t-elle être accompagnée d’un argumentaire de l’administration visant à justifier ce choix.
En cas de persistance du conflit, une procédure de conciliation sera engagée. Celle-ci sera pilotée par un référent territorial nommé par le préfet du département. En cas d’échec de cette procédure de conciliation, le Comité national de l’eau sera alors mandaté pour présenter des solutions consensuelles afin de trouver une sortie satisfaisante pour l’ensemble des parties.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. L’amendement n° 510 rectifié bis, présenté il y a quelques minutes par M. Chevrollier, vise à rétablir la rédaction issue des travaux de l’Assemblée nationale.
Le maintien et la restauration de la continuité écologique est un sujet qui a beaucoup occupé notre commission ces derniers mois. Je salue, à ce propos, le travail accompli par Guillaume Chevrollier dans son rapport d’information qui contient des pistes intéressantes pour la mise en œuvre d’une continuité écologique apaisée. Je salue également celui de Laurence Muller-Bronn, dont le rapport pour avis sur la proposition de loi tendant à inscrire l’hydroélectricité au cœur de la transition énergétique et de la relance économique de Daniel Gremillet a déjà été cité.
Ce sujet, c’est le moins que l’on puisse dire, a fait l’objet de débats passionnés à l’Assemblée nationale. Je sais que, parmi nous, nombreux sont ceux qui s’intéressent aux moulins à eau, car ces ouvrages sont souvent présents sur les cours d’eau.
Cependant, la rédaction retenue par nos collègues députés me paraît juridiquement plus fragile que celle dont j’ai proposé l’adoption à la commission, de sorte qu’elle peut être source de difficultés d’interprétation.
J’ai néanmoins également entendu les inquiétudes que bon nombre d’entre vous sont venus exprimer, au sujet de la possible disparition de cet article à l’issue de la commission mixte paritaire.
Compte tenu de ces éléments, j’ai décidé de m’en remettre à la sagesse du Sénat sur l’opportunité d’en revenir à la rédaction de nos collègues députés. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
Mme Françoise Gatel. Bravo !
M. Pascal Martin, rapporteur. Quant à l’amendement n° 1418 de Martine Filleul, il a pour objet la mise en œuvre d’une procédure de conciliation en cas de désaccord entre un propriétaire de moulin et l’administration, concernant l’obligation de restauration de la continuité écologique.
Les travaux de notre commission ont montré à quel point des tensions pouvaient exister dans certains territoires au sujet des prescriptions administratives en matière d’aménagement et d’équipement des ouvrages hydrauliques.
Le législateur doit se saisir de ces questions, afin d’assurer une continuité écologique apaisée qui préserve non seulement l’environnement et la biodiversité, mais également les moulins à eau à forte valeur patrimoniale. Une conciliation paraît de nature à lever les malentendus.
Cependant, cet amendement est satisfait par la rédaction issue des travaux de la commission. J’en demande donc le retrait, faute de quoi j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État. Nous avons eu effectivement, en commission, un débat très riche. Il était nécessaire et je vous en remercie.
Le ministère a été amené à constater et à étudier certains cas particuliers, liés à des situations locales que vous avez bien voulu d’ores et déjà nous faire remonter. À partir du moment où le sujet a été porté à l’Assemblée nationale, de manière certes un peu brutale, nous y avons travaillé.
Je remercie la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat de ses efforts pour trouver une rédaction de compromis. Elle a compris qu’il était nécessaire de changer de regard dans le traitement des dossiers qui concernent ces ouvrages, et a inscrit dans le texte la nécessité de développer une véritable médiation, ce dont chacun convient aujourd’hui.
Sur la forme, adopter l’amendement de M. Chevrollier reviendrait à nous priver d’un certain nombre de possibles.
La nécessité d’une médiation a été largement entendue. C’était là tout l’objet du travail parlementaire et des positions qui ont été défendues avec force aussi bien à l’Assemblée nationale qu’au Sénat. Maintenant que le message est passé, ne nous privons pas des outils grâce auxquels nous éviterions de nous enfermer dans des situations figées !
En effet, je suis sûre que vous conviendrez qu’il serait d’autant plus regrettable que des propriétaires qui n’ont pas de perspectives en matière d’hydroélectricité et souhaitent intervenir sur leur ouvrage, pour s’épargner quelques frais d’entretien, ne puissent plus le faire.
Ne nous privons pas non plus de la possibilité d’intervenir sur des ouvrages sans propriétaire ! Je crois qu’il nous faut préserver cette médiation, parce que le sujet des moulins n’est que l’incarnation ou la cristallisation de l’équilibre que nous avons besoin de construire, en responsabilité, en veillant à préserver les continuités écologiques et le patrimoine, et en veillant aussi à sauvegarder la production d’hydroélectricité, quand bien même celle-ci serait très individuelle.
Or, s’il était adopté, monsieur Chevrollier, votre amendement qui rétablit la rédaction du texte issu de l’Assemblée nationale nous couperait de ces possibles, contrairement aux améliorations que la commission de l’aménagement du territoire du Sénat, dans sa grande sagesse, a bien voulu introduire dans le texte.
Comme vous le savez, je me suis engagée à organiser une concertation, à l’issue de la consultation publique sur les schémas directeurs d’aménagement et de la gestion des eaux (Sdage), à l’automne, et nous l’accueillerons bien volontiers au ministère, ainsi que tous les parlementaires qui souhaiteront y être associés.
Le Gouvernement présentera également un amendement qui vise à organiser cette médiation à un double niveau, local et national. Tous ces outils ont reçu un accueil largement favorable.
Je vous demande donc, monsieur Chevrollier, de retirer votre amendement, puisque le message porté à l’Assemblée nationale a été très largement entendu, afin de rendre possibles la définition de projets locaux et l’ouverture d’un chemin pour une médiation.
En ce qui concerne l’amendement n° 1418, la réponse est dans la médiation prévue dans l’amendement n° 2144 du Gouvernement. Au-delà des questions territoriales, les autres partenaires, dont le Comité national de l’eau dont vous prévoyez la saisine, madame Filleul, sont évidemment, de fait, acteurs de cette réflexion. Ils sont aussi, localement, les premiers médiateurs de ces sujets.
Par conséquent, je demande le retrait de cet amendement au profit de l’amendement n° 2144 du Gouvernement, qui privilégie la médiation.
M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.
M. Ronan Dantec. Je me sens légèrement déstabilisé. En effet, j’avais cru comprendre, en écoutant l’intervention de Mme la ministre, que le Sénat avait fait œuvre utile et que le Gouvernement avait entendu ceux qui s’étaient mobilisés sur ce sujet, parfois avec force, ce qui a pu nous surprendre.
Nous étions donc arrivés à une rédaction de compromis qui, pour reprendre en substance les mots de Mme la secrétaire d’État, dit les possibles et fixe le cadre de la concertation. À mon avis, si l’on a trouvé ce compromis, il ne faut pas le remettre en cause ! Un vote conforme risquerait de nous faire perdre davantage que le cadre fixé.
Je souhaite donc en rester à ce compromis et je retire l’amendement de suppression partielle que j’avais déposé. C’est une manière pour moi de reconnaître le travail collectif qui a été effectué, même s’il ne correspond pas totalement à ma position personnelle ni à celle de mon groupe. Je souhaite vraiment que nous en restions à ce travail collectif.
Sur le fond, néanmoins, je crois qu’il faut être clair : la restauration des continuités écologiques est une priorité européenne. Il est important de le rappeler, car 11 % des cours d’eau en France sont morcelés. Même si ce morcellement ne concerne pas la totalité des cours d’eau, nous ne pouvons pas négliger la nécessité de préserver la continuité écologique.
Un autre problème, assez important, qu’il nous faut prendre en compte concerne le développement des cyanobactéries. J’y ai été confronté dans mon département. Des cyanobactéries comme Planktothrix ou Anabaena, – je les connais par cœur ! – remettent en cause beaucoup d’usages lorsqu’elles arrivent sur un plan d’eau. Pour lutter contre leur développement, il faut non seulement limiter les intrants, notamment le phosphore, mais il faut aussi que l’eau circule.
Dans tous les cas, nous ne pouvons pas accepter que les cours d’eau finissent par devenir une suite de retenues avec de l’eau qui ne coule plus. Ce serait désastreux tant pour la qualité que pour l’usage de l’eau, car l’on favoriserait ainsi le développement des cyanobactéries, avec tous les problèmes qui en découlent.
Par respect pour le travail collectif accompli, je retire l’amendement n° 1872, et je ne voterai pas non plus ceux qui vont à l’encontre de cette position.
M. le président. L’amendement n° 1872 est retiré.
La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.
M. Daniel Gremillet. Je veux dire trois choses. La première, c’est que, au Sénat, nous avons tous une histoire de vie dans nos territoires. Nous pourrions tous prendre des exemples de ce que nous vivons, de ce que nous avons connu, de ce qui a existé, ou de ce qui a été fait dans nos territoires.
Pour ma part, je viens d’un petit village, où coule un ruisseau qui prend sa source à peine à un kilomètre de chez moi. Sur ce ruisseau, il y avait deux féculeries, un tissage, un moulin, et une turbine. Je suis pêcheur dans tous les sens du terme. J’ai toujours attrapé des truites, en haut, en bas. J’ai toujours vu des écrevisses en haut et en bas. (Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains.) Je suis très sérieux, quand je dis cela !
La vie d’un cours d’eau est complexe. Il y a eu ce qu’ont fait nos anciens et qui constitue notre histoire, car nous ne venons pas de nulle part. Cela a permis, effectivement, la préservation de richesse aquatique.
Le ruisseau devant chez moi s’appelle la Bouillante. Vous avez tous l’équivalent dans vos territoires, vous avez tous un vécu et une histoire. Je tiens à remercier notre collègue Guillaume Chevrollier pour son amendement, ainsi que M. le rapporteur pour son avis de sagesse.
Nous ne pouvons pas renier notre histoire et, grâce à cette force, pour une fois, nous allons inscrire « dans le dur », si nous votons conforme le texte adopté par l’Assemblée nationale, un point qui fait polémique et débat depuis tant de temps !
Tout ce temps perdu a empêché les investissements. Je reprends là le propos de notre collègue que je partage à 200 %. L’innovation n’est possible que si l’on investit. Il faut permettre ce renouvellement, car, grâce aux technologies, nous pourrons faire des choses qui seront différentes que ce qui a été fait dans le passé.
Je suis rapporteur pour avis sur ce texte et je suis très fier du travail que nous avons fait ensemble. Cependant, pour une fois, je serai très content que l’amendement que je dois présenter au nom de la commission des affaires économiques tombe, si celui de M. Guillaume Chevrollier est adopté.
En effet, notre amendement a trait à la conciliation. Or qui dit conciliation dit aussi conflit. Si nous pouvons éviter le conflit, comme nous avons l’occasion de le faire, nous aurons fait un excellent travail. (Applaudissements sur des travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Je souhaite aussi soutenir l’amendement de notre collègue Chevrollier. En effet, quelques années de pratique dans cet hémicycle nous montrent, madame la ministre, qu’il vaut mieux tenir que courir.
Nous avons aussi, dans l’Orne, une histoire avec les moulins. Certaines associations sont très actives, notamment l’association Les Amis des moulins, qui assure la protection et la sauvegarde des moulins, ainsi que l’assistance aux propriétaires d’ouvrages hydrauliques, et qui existe d’ailleurs aussi en Bretagne. Ces associations sont très mobilisées, nous en avons déjà beaucoup parlé.
En leur nom, nous souhaitons donc défendre une solution qui soit équitable et conforme à leurs attentes. Comme notre collègue Gremillet l’a déjà très bien dit, là où il y a une médiation, il y a aussi un risque.
On connaît aussi les divergences de position des administrations, d’un territoire à l’autre. Celles-ci peuvent varier au cours de l’eau, si j’ose dire, et être différentes à un endroit et à un autre du cours d’eau, simplement parce que celui-ci coule sur des territoires où les jurisprudences ne sont pas les mêmes.
Je soutiens donc avec force cet amendement, au nom de toutes les associations qui ont travaillé sur ces sujets, et qui sont extrêmement inquiètes. (M. Stéphane Demilly applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme Sophie Primas, pour explication de vote.
Mme Sophie Primas. Cela fait des années que l’on attend cette disposition pour les moulins ! Nul doute que la rédaction issue des travaux de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable est de meilleure qualité, puisqu’elle donne une place centrale à la médiation ! Je suis d’accord.
Cependant, cela fait tellement longtemps que l’on attend cet article que je vais soutenir l’amendement de notre collègue Guillaume Chevrollier. Ainsi, nous pourrons au moins avoir l’assurance que nous disposerons d’une base juridique et que l’article sera validé et « fermé » à l’Assemblée nationale.
Madame la ministre, madame la secrétaire d’État, nous avons confiance en vous. Sur ce point, laissez-moi cependant vous faire une suggestion : inscrivez la proposition de loi de Daniel Gremillet à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale, de sorte que les deux assemblées puissent en débattre et avancer !
En attendant, je soutiens l’amendement de Guillaume Chevrollier, car il nous donne précisément l’assurance d’avancer. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Barbara Pompili, ministre. À cette heure, et parce que cela me concerne personnellement, je souhaite adresser un petit salut à nos futurs bacheliers qui viennent de terminer l’épreuve de philosophie. Le sujet sur lequel ils devaient travailler était le suivant : « La technique nous libère-t-elle de la nature ? » Voilà que leurs aînés en débattent aussi ! J’ai une pensée pour ma fille dont j’attends des nouvelles… (Sourires.)
Les débats à l’Assemblée nationale ont été passionnés, mais les amendements n’avaient pas été suffisamment préparés en amont. Après le vote à l’Assemblée nationale, de nombreux députés, qu’ils siègent sur les bancs de la majorité ou de l’opposition, tous très soucieux des questions relatives aux moulins, sont venus me faire part de leur satisfaction d’avoir fixé une règle nouvelle, mais aussi de leur crainte d’avoir été trop loin en entérinant une régression environnementale.
En effet, les mesures qui ont été votées à l’Assemblée nationale ne prévoient aucun moyen pour faire les travaux qui s’imposent, en cas de régression environnementale avérée sur un cours d’eau,…
Mme Sophie Primas. Faites inscrire la proposition de loi de Daniel Gremillet à l’ordre du jour !
Mme Barbara Pompili, ministre. … et cela même si personne ne conteste leur nécessité. Les propriétaires devront donc les faire à leurs frais.
Voilà pourquoi les députés sont venus me voir, en espérant que la mesure pourrait être recalibrée lors de l’examen du texte au Sénat. La commission de l’aménagement du territoire et du développement durable l’a fait, en veillant à inscrire clairement dans son texte qu’il ne pouvait plus y avoir de dérasements de seuil « sans l’accord des propriétaires ».
Cela signifie qu’on ne pourra plus enjoindre à aucun propriétaire, de manière un peu brutale, comme cela a parfois été le cas dans certains territoires, de renoncer à son moulin. Cette mesure était attendue depuis très longtemps et nous ne voulons pas revenir dessus. C’est un point très important.
Nous devons cependant veiller à ne pas prendre des mesures qui ne seraient pas équilibrées et qui risqueraient d’avoir pour effet que, là où chacun serait d’accord pour constater une régression environnementale, on ne pourrait pas y remédier.
La médiation est essentielle sur ce point, car certains sujets nécessitent que tous les acteurs puissent échanger. À l’issue des discussions, le propriétaire pourra ainsi être mieux à même d’envisager une solution.
Croyez-vous vraiment qu’il suffise de supprimer la médiation pour arrêter tous les conflits ? Pas du tout ! Cela ne mettra pas fin aux recours.
Nous devons gérer un problème de qualité de l’eau sur certains cours d’eau, mais pas sur tous, heureusement ! L’immense majorité des cours d’eau et des moulins n’est pas concernée par les mesures dont nous parlons.
Il nous faut donc trouver des solutions équilibrées pour répondre à ces cas particuliers. Votre commission a réussi à en proposer une, car elle a pu travailler en évitant la précipitation, contrairement à l’Assemblée nationale. Nous avons eu le temps de faire ce travail, et les sénateurs de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable ont apporté d’excellentes contributions pour conserver l’acquis très attendu auquel un certain nombre d’entre vous tient beaucoup, tout en préservant les possibilités de ne pas favoriser la régression environnementale, quand il y en a.
Vous avez voté, avant l’article 1er, une disposition consacrant la nécessité de faire très attention à ne pas favoriser la régression environnementale. Je vous alerte donc, à présent, sur le fait que la proposition de la commission permet d’y veiller. En revanche, le texte issu des travaux de l’Assemblée nationale risque d’entraîner des problèmes sur un certain nombre de cours d’eau, même si celui-ci reste assez réduit.
Je crois fermement qu’il est possible de trouver un chemin de crête. La voie qui y mène ne passe pas par un retour à la rédaction de l’Assemblée nationale. Tel est le point sur lequel je vous alerte.
En revanche, j’entends les inquiétudes qui ont été relayées par M. le rapporteur : si l’article n’est pas voté conforme, qui nous dit qu’en commission mixte paritaire, on ne le supprimera pas tout simplement ?
Je considère que, sur cette question, nous devons faire confiance à l’intelligence collective. Toutefois, la confiance exige des preuves. Donc, en tant que représentante du Gouvernement, présente ici avec Bérangère Abba, je prends l’engagement formel que, en commission mixte paritaire, on ne supprimera pas cet article, et que l’on gardera a minima la version qui a été votée par l’Assemblée nationale. (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains.)
Si jamais la commission mixte paritaire échoue, ce qui peut arriver, en nouvelle lecture, nous défendrons cette position, et je peux vous garantir que la majorité de l’Assemblée nationale la votera, c’est une évidence !
Au pire, les députés voudront revenir à leur rédaction initiale, mais je ne pense pas qu’ils le feront, puisqu’ils ont constaté les limites de celle-ci.
La rédaction issue des travaux du Sénat sera de toute façon votée. Quand bien même elle ne le serait pas, au pire pour moi, ou au mieux pour vous, on en reviendrait à la rédaction de l’Assemblée nationale.
Par conséquent, vous ne prenez pas de risques à voter ce que la commission a très bien écrit, et qui garantit non seulement la préservation de notre patrimoine, mais aussi la possibilité de sauver des cours d’eau, dont la qualité exige une attention particulière.
Voilà ce que je souhaitais vous dire. Je ne peux pas aller plus loin. Si vous choisissez de « fermer » l’article, en le votant dans la rédaction de l’Assemblée nationale, cela risque de poser un grave problème de régression environnementale.
M. le président. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.
M. Daniel Salmon. J’entends parfaitement ce que Mme la ministre vient d’exprimer. La commission est arrivée à une solution très équilibrée, qui n’était pas facile du tout à mettre par écrit. Malgré les intérêts très contradictoires qui s’expriment au sujet des cours d’eau, on peut parvenir à dégager des convergences.
Figer cet article en votant l’amendement de notre collègue Chevrollier, c’est aller vers de nouveaux soucis. Loin de favoriser l’apaisement et le dialogue, nous irons vers de nouveaux affrontements, car nous braquerons à nouveau les associations, et les recours au niveau européens se multiplieront. Évitons de reprendre le chemin du conflit, et appuyons-nous plutôt sur le travail effectué en commission, car celle-ci a su trouver le bon étiage – c’est le cas de le dire… (Sourires.) Ce n’est pas le moment de remettre trois seaux d’eau dans le nourrain !
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Sueur. Mon intervention sera brève. Je suis très surpris, madame la ministre, que vous preniez ici un engagement au nom de la commission mixte paritaire. Vous avez dit, en effet, prendre l’engagement qu’il n’y aurait aucun problème lors de la commission mixte paritaire.
Je suis confus de devoir rappeler que le Gouvernement ne siège pas dans une commission mixte paritaire. Il n’y a que des parlementaires, madame la ministre.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable.
M. Jean-François Longeot, président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Je veux tout d’abord saluer Ronan Dantec qui a retiré son amendement au profit du texte de la commission. Le débat n’est effectivement pas facile. Il oppose celles et ceux qui veulent mettre un terme à la destruction des barrages et ceux qui disent qu’il ne faut pas le faire. Le sujet est compliqué.
En tant que président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, je considère que l’article 19 bis C n’interdit pas ni n’autorise la destruction des barrages. Il constitue une sorte de compromis qui permet d’assurer la continuité écologique et de ne pas maintenir un barrage ou un moulin qui ne fonctionne plus, ou qui n’a plus d’utilité. Ce point est important dans la décision que nous prendrons et nous devons nous autoriser à prendre un peu de recul.
J’ai bien noté le souhait de Guillaume Chevrollier, et j’en ai longuement discuté avec lui. Cependant, dans l’immédiat, mieux vaut que nous conservions le texte dont nous avons beaucoup discuté en commission. Nous pourrons ainsi ouvrir des perspectives et nous éviterons de figer la situation.
En effet, l’interdiction, si nous la décidons, vaudra partout. Or peut-être que, à un moment donné, il y aura des volontés ou des usages qui dépasseront le cadre environnemental et que nous ne pourrons plus maîtriser.
J’ai bien compris que l’administration pouvait parfois poser problème. Cependant, la rédaction issue des travaux de la commission me semble sage. Elle permet une certaine ouverture, et je souhaite que nous puissions la conserver.
Monsieur Sueur, je ne sais pas ce qui se passera en commission mixte paritaire. Celle-ci ne durera peut-être que trente secondes ou bien cinq heures. Quoi qu’il en soit, j’ai entendu les engagements de Mme la ministre. Sachez, mon cher collègue, que je n’oublierai pas de rappeler les propos qui ont été tenus aujourd’hui par Mme la ministre.
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.
M. Marc Laménie. Quelques mots très rapides, car je veux d’autant moins allonger le débat que le mérite de la solution proposée revient aux collègues de la commission, mais je tiens quand même à souligner un point concernant cet amendement que j’aurais volontiers soutenu, puisque Guillaume Chevrollier et ses collègues ont beaucoup travaillé sur ces sujets.
Je ne suis pas un spécialiste des moulins, mais davantage du ferroviaire, des petites lignes et des petites gares que je défends avec passion et conviction, comme le font pour les moulins ceux de mes collègues qui se sont exprimés sur ce sujet.
Nous avons effectivement été sollicités par des propriétaires et par des associations qui défendent les moulins et le patrimoine. Un amendement qui n’a pas été défendu visait aussi le travail mené par les élus et les forces vives au sein des parcs naturels régionaux. Les parcs nationaux ont aussi une histoire et une vocation importante de défense du petit patrimoine.
Compte tenu des arguments développés par le président de la commission et par le rapporteur, je me plierai à leur avis.
Merci également, madame la ministre et madame la secrétaire d’État, pour votre engagement. Un travail de fond a été effectué. Je tiens sincèrement à féliciter mes collègues de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, ainsi que ceux de la commission des affaires économiques, dont Daniel Gremillet qui est un grand spécialiste de ces questions.
Je me rallierai donc à la position de la commission.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable.
M. Jean-François Longeot, président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Je demande une suspension de séance, monsieur le président.
M. le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures trente, est reprise à douze heures trente-cinq.)
M. le président. La séance est reprise.
La parole est à M. Didier Mandelli, pour explication de vote.
M. Didier Mandelli. J’ai la lourde tâche de tenter de clarifier la position de la commission et celle de la majorité sénatoriale sur cette question sensible.
Mes chers collègues, nous allons vous demander de voter l’amendement n° 510 rectifié bis de Guillaume Chevrollier.
Je remercie le Gouvernement, plus précisément les deux ministres présentes parmi nous ce matin, des engagements formels et fermes qu’il a pu prendre.
Cela étant, en complément de l’adoption de l’amendement de notre collègue, nous souhaitons que la proposition de loi de Daniel Gremillet puisse être inscrite à l’ordre du jour. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
Mme Françoise Gatel. Très bien !
M. Didier Mandelli. Cela nous permettrait de résoudre toutes les difficultés et d’avoir un débat beaucoup plus approfondi sur un sujet qui nécessite, effectivement, une attention particulière. Je le dis tout en reconnaissant l’efficacité du travail du rapporteur Pascal Martin et tout en ayant conscience des efforts qu’il a dû faire pour en arriver à cette position.
En attendant, j’ai bien conscience que personne ne sera complètement satisfait de cette issue.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 510 rectifié bis.
(L’amendement est adopté.) – (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
M. le président. En conséquence, l’article 19 bis C est ainsi rédigé, et les amendements nos 1418, 2144, 1851 et 967 rectifié bis n’ont plus d’objet.
Article 19 bis D
Le livre Ier du code forestier est ainsi modifié :
1° L’article L. 112-1 est ainsi modifié :
a) (nouveau) Le 4° est ainsi rédigé :
« 4° La préservation de la qualité des sols forestiers au regard de la biodiversité ainsi que la fixation, notamment en zone de montagne, des sols par la forêt ; »
b) Au 5°, les deux occurrences des mots : « bois et forêts » sont remplacées par les mots : « sols forestiers, bois et forêts » ;
1° bis (nouveau) À la fin du second alinéa de l’article L. 112-2, les mots : « sage gestion économique » sont remplacés par les mots : « gestion durable et multifonctionnelle » ;
2° L’article L. 121-1 est ainsi modifié :
a) La seconde phrase du premier alinéa est complétée par les mots : « et sont conformes aux principes mentionnés au présent article » ;
b) Au deuxième alinéa, après le mot : « État », sont insérés les mots : « , en concertation avec les collectivités territoriales et leurs groupements et en mobilisant les autres parties prenantes, » ;
c) Le 2° est complété par les mots : « afin de contribuer à l’objectif de neutralité carbone à l’horizon 2050 énoncé à l’article L. 100-4 du code de l’énergie » ;
d) Au 3°, après le mot : « biologiques », sont insérés les mots : « , notamment en matière d’essences, » ;
e) Le 4° est complété par les mots : « , en ayant notamment recours à la migration assistée des essences ou à la régénération naturelle » ;
f) Après le 7°, sont insérés des 8° et 9° ainsi rédigés :
« 8° À la promotion de l’utilisation de bois d’œuvre provenant de feuillus ;
« 9° À l’impulsion et au financement de la recherche et à la diffusion des connaissances sur les écosystèmes forestiers, afin d’anticiper les risques et les crises. » ;
g) Les deux premières phrases du dernier alinéa sont remplacées par une phrase ainsi rédigée : « La politique forestière a pour objet d’assurer la gestion durable et la vocation multifonctionnelle, à la fois économique, écologique et sociale, des bois et forêts. » ;
2° bis (nouveau) Après le premier alinéa de l’article L. 121-2, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L’État encourage le déploiement de méthodes et de projets pouvant donner lieu à l’attribution de crédits carbone au titre du label “Bas-Carbone” en faveur des pratiques sylvicoles durables, sur l’ensemble du territoire. » ;
3° La deuxième phrase du premier alinéa de l’article L. 121-2-2 est complétée par les mots : « conformément aux principes énoncés à l’article L. 121-1 ».
M. le président. La parole est à Mme la rapporteure pour avis.
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques. La Convention citoyenne pour le climat a formulé un certain nombre de propositions sur la forêt. Toutefois, peu d’entre elles ont été retenues par le Gouvernement dans son projet de loi. Les interactions entre forêt et changement climatique sont pourtant nombreuses et ont une incidence majeure. Ainsi, la forêt française, l’une des plus grandes et des plus diversifiées d’Europe, atténue le changement climatique en absorbant chaque année plus de 11 % de nos émissions de gaz à effet de serre. Elle filtre l’eau, l’air, rafraîchit les températures et abrite un réservoir de biodiversité.
À ces fonctions de séquestration et de stockage de carbone, il faut également ajouter des fonctions de substitution de ce matériau et de cette énergie renouvelable, au regard de matériaux et d’énergies dont le bilan carbone est plus préjudiciable à l’environnement. C’est toute la stratégie de la RE2020.
Ces dernières années, notre forêt a subi de plein fouet les premiers effets du changement climatique : cimes des arbres brûlées à cause des fortes chaleurs, prolifération de parasites et d’insectes ravageurs sur quasiment toutes les essences d’arbres, rendues plus vulnérables du fait des sécheresses à répétition, montée du risque d’incendie dans des régions où il était, hier encore, inimaginable.
Face à ces menaces croissantes, la réponse passe par davantage de pragmatisme local et de multifonctionnalité.
La multifonctionnalité est un concept de gestion forestière qui rencontre un grand succès en France depuis la loi de 2001 d’orientation sur la forêt et qui privilégie la conciliation des enjeux environnementaux, sociaux et économiques de la forêt. Ce n’est pas une mince affaire – il faut le dire – sur le terrain, mais cette gestion a pu se développer au fil du temps grâce, principalement, aux stratégies locales de développement forestier, comme les chartes forestières de territoire, qui sont de précieux outils d’administration des massifs.
La gestion multifonctionnelle française de la forêt repose sur quelques principes simples : le prélèvement du bois pour s’équiper en mobilier ou pour la construction, tout en séquestrant le carbone et en répondant à l’objectif de substitution fixé par la RE2020, par exemple via le recours de plus en plus important aux matériaux biosourcés dans le bâtiment ; la préservation du stockage de carbone dans les sols et de la biodiversité des espaces forestiers par des interventions adaptées ; l’accueil de nos concitoyens dans des forêts publiques, mais aussi très souvent privées, ouvertes aux promeneurs, aménagées et sécurisées. Il faut continuer à encourager et à propager cette politique de gestion au fil du temps – certes souvent long – de la forêt.
Nos collègues députés ont adopté trois articles sur la forêt, que nous avons enrichis en commission des affaires économiques. Nous avons aussi introduit deux nouveaux articles, qui visent à développer le label bas-carbone en forêt et dans les aires protégées, à étendre les paiements pour services environnementaux à la forêt, à préserver la qualité des sols forestiers, notamment face aux pratiques sylvicoles préjudiciables au stockage de carbone et à la biodiversité, à prendre en compte les risques d’incendie émergents dans des territoires jusqu’ici relativement épargnés, avec la faculté pour des maires en quelque sorte « lanceurs d’alerte » d’imposer des obligations en matière de débroussaillement, ou encore à maîtriser les exportations massives de bois d’œuvre, qui risquent d’être préjudiciables à terme à l’approvisionnement de nos propres entreprises et, donc, de nous empêcher d’atteindre les objectifs fixés par la stratégie nationale bas-carbone.
Ainsi amendé, l’article 19 bis D ajuste les grands principes du code forestier en y intégrant les objectifs opérationnels de soutien à l’adaptation et à la résilience des forêts face au changement climatique. Il promeut une forêt multifonctionnelle, source de solutions face à l’ensemble des défis climatiques qui sont devant nous.
M. René-Paul Savary. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Kristina Pluchet, sur l’article.
Mme Kristina Pluchet. Je souhaite concentrer mes propos sur les services écosystémiques rendus par la forêt.
Si la forêt a besoin de s’adapter au dérèglement climatique, elle est elle-même un vecteur majeur de lutte contre celui-ci. Il me semble que, à ce titre, elle a besoin d’un traitement particulier.
Nous sommes confrontés aujourd’hui à l’impérieuse nécessité d’adapter nos politiques de développement pour répondre à l’objectif de réduction de nos émissions de gaz à effet de serre. La forêt joue en la matière un rôle majeur : il est impératif de renforcer sa place et de sécuriser sa bonne gestion pour optimiser ses atouts.
Il est nécessaire que, au-delà des certifications existantes, les services écosystémiques des forêts fassent l’objet d’une reconnaissance officielle en France. Cela passe sans doute par le biais d’une nouvelle certification, qui comblerait les lacunes des précédentes : elle valoriserait davantage une sylviculture mélangée, à couvert continu, dont les effets ne sont plus contestables en termes de performances écosystémiques, à l’inverse de l’exploitation forestière de masse, souvent en monoculture, qui a longtemps prévalu, mais qui ne contribue pas à la fixation durable et massive du carbone. Les chercheurs ont récemment prouvé qu’une forêt gérée en futaie irrégulière stockait six à sept fois plus de carbone dans son sol.
Nos voisins allemands se mobilisent pour une reconnaissance des services écosystémiques de la forêt : le 22 avril dernier, le Bundestag a mandaté les ministères de l’agriculture et de l’environnement pour élaborer et mettre en œuvre un dispositif visant à compenser financièrement ces services rendus par la forêt. Captation et stockage de carbone, filtration de l’eau et réserve en eau, réservoir de biodiversité, espace de bien-être sont autant de services rendus et de services vitaux pour l’équilibre de notre planète. Il faut donc accroître au maximum les capacités de photosynthèse des écosystèmes forestiers.
Le renouvellement forestier et les pratiques sylvicoles vertueuses doivent être promus pour lutter contre le réchauffement climatique. Il n’est par conséquent pas excessif d’envisager une juste rémunération de ces services, en contrepartie de critères exigeants qui valident l’excellente gestion de nos forêts privées et publiques.
Les entreprises envisagent de consacrer une partie de leurs recettes à la rémunération de ces services. Il me paraît important que ces pratiques forestières vertueuses puissent être divulguées, labellisées et rémunérées.
M. le président. La parole est à M. Jérémy Bacchi, sur l’article.
M. Jérémy Bacchi. Comme l’ont souligné nos collègues députés lors des débats à l’Assemblée nationale, la forêt était la grande absente du projet de loi initial. Il est heureux que le travail parlementaire ait réparé cet oubli, car la forêt française absorbe chaque année près de 20 % des émissions nationales de CO2. Elle rend gratuitement des services inestimables à notre pays et ne reçoit rien, ou presque, en échange.
Pis, depuis plusieurs années, notre forêt est objet de spéculation : elle est devenue une valeur refuge, qui suscite beaucoup d’appétit de la part des investisseurs privés, lesquels n’ont que peu de considération pour l’écosystème forestier, pourtant très fragile. Cela concerne en particulier les massifs de résineux. Ainsi, en les couvrant en monoculture avec des essences comme le Douglas, dont la rentabilité est forte, le risque d’une baisse systématique de l’âge d’exploitabilité des forêts et d’une atteinte à la biodiversité est avéré.
Ce n’est pas pour rien que la Convention citoyenne pour le climat a consacré une large place à la situation des forêts françaises, recommandant notamment de privilégier une gestion forestière sans destruction du couvert forestier, de minimiser la replantation de résineux et de veiller au mélange des variétés d’arbres, de ne pas accroître la récolte de bois, d’interdire les coupes rases dans les vieilles forêts et, surtout, de pérenniser l’existence de l’ONF et d’en augmenter les effectifs. Or, depuis vingt ans, l’État se désengage de la gestion forestière en imposant à l’ONF des contraintes financières disproportionnées et des missions éloignées de sa vocation première.
L’Office, garant du patrimoine forestier public, perd peu à peu son rôle d’acteur pivot, car il dispose de moins de personnel et de temps pour l’entretien des voies et des pièces d’eau, pour le conseil aux élus des communes forestières, pour l’accueil et la sensibilisation du public. Saigné à blanc, il a vu disparaître près de quatre emplois sur dix, soit au total 38 % de ses effectifs, et ce alors même que ces agents sont extrêmement précieux pour la filière bois et jouent un rôle essentiel auprès d’une myriade de petits propriétaires. Il faut conforter l’Office, rassurer les agents, agrandir les parcelles et renoncer à la politique de démantèlement de ce service public fondamental.
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, sur l’article.
M. René-Paul Savary. Je voudrais saluer les propos tout à fait réalistes des précédents intervenants et remercier Anne-Catherine Loisier de son action en faveur de la forêt, tant publique que privée.
Mon intervention sera très concrète et complétera celle de mon prédécesseur, puisqu’elle concerne les agents des centres régionaux de la propriété forestière.
Qu’ils émanent des CRPF ou de l’ONF, les acteurs de la forêt ont besoin de conseils. Il importe aujourd’hui de modifier les pratiques et de faire en sorte que la forêt joue le rôle multifonctionnel dont a parlé Mme la rapporteure pour avis. Encore faut-il que ces organismes en aient les moyens. C’est la raison pour laquelle il est important que l’article 19 bis EA introduit par le Sénat soit maintenu : il prévoit de prolonger les codes des bonnes pratiques sylvicoles, véritable moyen pour les petits propriétaires forestiers de connaître les différentes composantes de la forêt.
Des organismes tels que les CRPF ou l’ONF ont besoin de notre soutien. De fait, sans corrélation entre forêts voisines, sans conseils, les mauvaises pratiques se généralisent, car tout n’est pas toujours d’une redoutable évidence.
En outre, l’exploitation forestière implique que l’on trouve un maître d’ouvrage – il existe tout un tas de syndicats ou de coopératives de propriétaires – qui organise et conseille, mais également des maîtres d’œuvre, les experts forestiers. En conséquence, c’est toute une série de bonnes pratiques qu’il faut encourager.
Il est important d’y mettre les moyens, tant pour la forêt publique que privée, de façon à ce que nous puissions réfléchir, de façon connexe, massif forestier par massif forestier. Ce point me paraît essentiel.
Madame la ministre, puisque vous avez la volonté d’agir efficacement, me semble-t-il, je vous remercie de faire en sorte que cet article soit conservé par l’Assemblée nationale.
Autre point important et très concret : la forêt est morcelée. C’est pourquoi un droit de préférence s’y applique : à chaque nouvelle mise en vente d’une parcelle forestière, on offre la possibilité aux propriétaires forestiers voisins de l’acheter en priorité. Sauf que, en règle générale, les ventes concernent plusieurs parcelles, qui ne sont pas forcément les unes à côté des autres. On dénombre alors souvent plus d’une dizaine de propriétaires voisins. Dans ce type de situation, le droit de préférence ne s’exerce plus forcément : s’y substitue un simple droit de publicité qui ne permet pas à ces propriétaires d’être pleinement informés.
Lorsqu’une parcelle, même de plusieurs hectares, est vendue, il suffit que celle-ci comporte quelques mètres carrés de pré, c’est-à-dire une surface qui, même si elle est boisée, est encore classée au cadastre en tant que pré, pour qu’elle soit considérée comme un bien dit « mixte ». Or, dans ce cas, le droit de préférence ne s’applique plus, ce qui nuit à l’efficacité de la lutte contre le morcellement des propriétés forestières. Je veux vous alerter sur ce point, parce qu’il doit être relativement simple de trouver une solution permettant d’empêcher cette fragmentation forestière.
M. le président. Je suis saisi de neuf amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 1878, présenté par MM. Labbé, Dantec, Fernique, Salmon et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 2
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…) Au 1°, après le mot : « forêts », sont insérés les mots : « en tant que milieu naturel et puits de carbone » ;
II. – Alinéa 6
Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés :
… L’article L. 112-2 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les mots : « à l’équilibre biologique » sont remplacés par les mots : « au maintien, et le cas échéant à la restauration, d’un bon état de conservation des forêts en tant que milieu naturel et puits de carbone » ;
b) À la fin du second alinéa, les mots : « sage gestion économique » sont remplacés par les mots : « gestion durable et multifonctionnelle garantissant la préservation de la biodiversité ainsi que de l’environnement et permettant de lutter contre le dérèglement climatique ».
III. – Alinéa 9
Compléter cet alinéa par les mots :
notamment les propriétaires privés, les entreprises, les associations de protection de l’environnement et les citoyens
IV. – Alinéa 11
Remplacer les mots :
matière d’essences,
par les mots :
favorisant le mélange d’essences à l’échelle de la parcelle,
V. – Alinéa 12
Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :
e) Après le 4°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« … À la promotion de la régénération naturelle, à la limitation du recours aux plantations en excluant, au plus tard au 1er janvier 2023, toute plantation en plein d’une seule essence et au développement d’une gestion forestière à couvert continu ; »
VI. – Alinéa 14
1° Après le mot :
œuvre
insérer le mot :
massif
2° Compléter cet alinéa par les mots :
, notamment par la structuration de filières industrielles adaptées, et à l’empêchement de l’enrésinement des forêts aux niveaux national et local
VII. – Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
… Le premier alinéa de l’article L. 121-6 est complété par les mots : « , ainsi qu’à la démonstration des bénéfices apportés pour la réalisation des objectifs prévus à l’article L. 121-1 ».
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. Cet amendement vise à mieux intégrer les objectifs de lutte contre le dérèglement climatique, de renforcement de la résilience de la forêt et de préservation de la biodiversité, en rééquilibrant les articles de principe du code forestier et de la politique forestière nationale. Notre but est de mieux faire reconnaître le caractère multifonctionnel de la forêt.
L’article 19 bis D, introduit à la suite de l’adoption d’un amendement en partie vidé de sa substance à l’Assemblée nationale, est insuffisamment ambitieux à cet égard. Certes, des avancées ont été obtenues en commission, avec notamment l’introduction de la notion de « gestion multifonctionnelle des forêts » ou l’ajout des termes « sols forestiers ». Cependant, au vu des enjeux écologiques et sociaux, la situation actuelle de la forêt en France impose d’aller encore plus loin.
Les forêts vivent des crises sanitaires majeures, alors même qu’elles ont un rôle primordial à jouer, notamment dans la lutte contre le réchauffement climatique. Ces espaces ont des fonctions multiples et essentielles pour nos territoires, à la fois pour les paysages, le patrimoine, la biodiversité, le stockage de carbone et l’atténuation des effets du réchauffement climatique. Bien gérées, les forêts jouent aussi un rôle important dans la production de bois, matériau écologique et renouvelable.
Les études scientifiques montrent que les pratiques sylvicoles actuellement en fort essor, c’est-à-dire les plantations monospécifiques de résineux et les coupes rases, fragilisent la résilience des forêts face au réchauffement climatique, aux tempêtes et à la prolifération des insectes. De ce fait, elles diminuent le stockage de CO2.
Les crises se multiplient, sans que l’on constate malheureusement une véritable réorientation des politiques forestières. Au contraire, la tendance à l’industrialisation de la forêt s’accélère : on observe de plus en plus de coupes rases dans les forêts de feuillus, qui sont remplacées par des forêts monospécifiques de résineux. Il est pourtant fondamental de préserver la diversité des forêts sur notre territoire et de les mettre en adéquation avec les équilibres locaux, car elles sont une source de résilience.
Notre amendement vise, tout en conservant les avancées adoptées par la commission des affaires économiques, à prévoir que la politique forestière favorise les pratiques qui maintiennent un couvert forestier continu, une diversité d’essences à l’échelon de la parcelle, via l’interdiction des plantations monospécifiques à compter de 2023 et la limitation des forêts de résineux.
M. le président. L’amendement n° 1419 rectifié, présenté par Mme M. Filleul, MM. J. Bigot, Montaugé et Kanner, Mme Bonnefoy, MM. Dagbert, Devinaz, Gillé, Houllegatte et Jacquin, Mmes Préville, Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 4
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…) Le début du 5° est ainsi rédigé : « Le rôle de puits de carbone par… (le reste sans changement) » ;
La parole est à Mme Martine Filleul.
Mme Martine Filleul. Cet amendement vise à préciser que les forêts, en tant que milieux naturels et puits de carbone, sont reconnues d’intérêt général, et ce en vertu d’arguments qui ont déjà été défendus par les précédents intervenants.
Comme vous le savez, les forêts constituent le deuxième plus grand puits de carbone de la planète après les océans. Jusqu’à sa maturité, un peuplement forestier capture du CO2, participant ainsi à la réduction de la présence des gaz à effet de serre dans l’atmosphère. Mais ce n’est pas là le seul atout de la forêt : une fois récoltés, les arbres continuent de jouer un rôle dans le stockage de carbone sur le long terme et peuvent se substituer à des matériaux plus énergivores, réduisant ainsi les émissions de gaz à effet de serre dans d’autres secteurs.
Ces puits de carbone sont des milieux vulnérables, dont la capacité de tampon est elle-même amoindrie par le réchauffement climatique et ses effets. Dans son rapport d’avril 2020, le Haut Conseil pour le climat proposait de consacrer davantage de moyens à la consolidation de ces puits.
M. le président. L’amendement n° 2110, présenté par MM. Rambaud, Marchand et Lévrier et Mmes Schillinger et Havet, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 9
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…) Le 1° est complété par les mots : « en prenant en compte la problématique du changement climatique afin de favoriser la résilience des forêts en mobilisant l’ensemble des techniques sylvicoles notamment la diversification des essences, la migration assistée ou la régénération naturelle quand elles sont appropriées » ;
II. – Alinéas 11 et 12
Supprimer ces alinéas.
III. – Alinéa 14
Après le mot :
provenant
insérer le mot :
notamment
La parole est à Mme Nadège Havet.
Mme Nadège Havet. Cet amendement tend à améliorer la rédaction consolidée de l’article L. 121-1 du code forestier, après les nombreuses modifications apportées lors de l’examen du texte à l’Assemblée nationale.
La résilience des forêts face au changement climatique doit faire partie de nos priorités. L’article 19 bis D, introduit sur l’initiative de députés issus de nombreux groupes politiques, a donc toute sa place dans ce texte. En revanche, il est nécessaire d’apporter certaines rectifications.
Il semble plus adapté de rattacher l’enjeu de la problématique du changement climatique au 1° de l’article L. 121-1 du code forestier relatif à l’adaptation des essences forestières. C’est pourquoi nous proposons de supprimer les dispositions introduites aux alinéas 11 et 12 du présent article.
Si la promotion du bois d’œuvre issu de feuillus est une des priorités pour valoriser les ressources forestières nationales, elle n’est pas exclusive de la valorisation des ressources résineuses. C’est la raison pour laquelle nous proposons également une modification rédactionnelle qui tend à élargir le champ de cet article.
M. le président. L’amendement n° 816 rectifié, présenté par M. Gay, Mme Varaillas et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 11
Remplacer les mots :
matière d’essences
par les mots :
favorisant le mélange d’essences à l’échelle de la parcelle
II. – Alinéa 12
Remplacer les mots :
migration assistée des essences ou à la régénération naturelle
par les mots :
régénération naturelle si elle est possible et, en cas d’impossibilité, à la migration assistée de gènes ou d’essences de zones plus chaudes et plus sèches
La parole est à M. Gérard Lahellec.
M. Gérard Lahellec. Cet amendement vise à apporter des précisions au dispositif de l’article 19 bis D pour le rendre plus clair, mais également, et surtout, beaucoup plus efficace.
L’État, par sa politique forestière, veille au maintien de l’équilibre et de la diversité biologiques, notamment en matière d’essences. Cependant, cet article ne mentionne pas explicitement l’importance fondamentale du mélange d’essences. Or, en termes de biodiversité, de longévité des forêts et de stockage de carbone, le mélange d’essences est absolument nécessaire, comme l’a rappelé notre collègue Labbé. Il favorise également la régénérescence naturelle de la forêt.
Contrairement au mélange d’essences, la tendance actuelle est de privilégier la monoculture. Pardonnez-moi de le dire en ces termes, mais cela signifie que l’on favorise les essences qui poussent le plus vite.
Notre amendement a pour objet de donner une plus grande portée à cet article.
M. le président. L’amendement n° 1879, présenté par MM. Labbé, Dantec, Fernique, Salmon et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :
Alinéa 11
Remplacer les mots :
en matière d’essences
par les mots :
en favorisant le mélange d’essences à l’échelle de la parcelle
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. Pour compléter les propos de Gérard Lahellec, j’insisterai sur le fait que les scientifiques de l’INRA demandent à ce que soient atténués certains risques biotiques.
Le mélange d’essences améliore la qualité des arbres, la stabilité face au vent et, dans une certaine mesure, la résilience à la sécheresse. Or, il faut le rappeler, aujourd’hui, 84 % des plantations sont monospécifiques. Sur 69 millions de plants forestiers utilisés en France lors de la saison 2017-2018, dix essences seulement totalisaient 92 % des plants vendus, dont plus de 80 % de résineux. C’est pourquoi il nous semble essentiel de faire apparaître la notion de « mélange d’essences à l’échelle de la parcelle » dans cet article.
Enfin, je précise que le dispositif de cet amendement reprend l’une des propositions de la Convention citoyenne pour le climat, qui souhaitait minimiser la replantation des résineux et veiller au mélange des variétés d’arbres.
M. le président. L’amendement n° 1880, présenté par MM. Labbé, Dantec, Salmon, Fernique et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :
Alinéa 12
Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :
e) Après le 4°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« … À la promotion de la régénération naturelle, à la limitation du recours aux plantations en excluant, au plus tard au 1er janvier 2023, toute plantation en plein d’une seule essence et au développement d’une gestion forestière à couvert continu ; »
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. Cet amendement de repli vise à substituer à la notion de « migration assistée des essences », promue par le présent article, celle de régénération naturelle, de limitation des plantations, d’exclusion des monocultures à partir de 2023 et de développement d’une gestion forestière à couvert continu. En l’état, l’article 19 bis D précise en effet que l’État, via sa politique forestière, veille à la régénération des peuplements forestiers, en ayant notamment recours à la migration assistée des essences ou à la régénération naturelle.
Il est très réducteur de présenter la migration assistée des essences comme réponse à la problématique de la régénération des forêts. En effet, il semble que cette méthode soit encore mal définie et ne donne pour l’instant que peu de résultats. On peut donc se demander s’il est utile de l’inscrire dans la loi, d’autant que certains chercheurs de l’ONF chargés de l’adaptation des forêts au réchauffement climatique estimaient, dans un article paru en 2020, que cette approche dite « de migration assistée » était souvent évoquée théoriquement, mais très peu mise en pratique.
Notre amendement tend à donner la priorité à la régénération naturelle pour lutter contre la perte de couverture forestière et favoriser la résilience de la forêt, en s’appuyant sur la diversité qu’elle favorise. La régénération naturelle permet de bénéficier de la capitalisation génétique naturelle de la forêt, qui garantit son adaptation climatique, y compris dans le cadre de la sélection de nouvelles essences sylvicoles. Ainsi, les pratiques de plantation ou de migration des essences ne devraient persister que si la régénération n’est pas possible ou en complément de la régénération naturelle.
Dans le même esprit, le présent amendement vise à interdire les forêts monospécifiques à compter de 2023, car celles-ci créent des milieux fragiles, pauvres en biodiversité, vulnérables aux agressions d’insectes, aux tempêtes et au changement climatique.
En parallèle de ces enjeux écologiques majeurs, il nous faut promouvoir une gestion forestière respectueuse des paysages pour répondre aux attentes sociétales de plus en plus fortes en la matière. Cette gestion présente également un intérêt économique en raison de sa résilience, de sa durabilité et des faibles risques qu’elle fait courir aux forêts grâce à la diversification des essences.
M. le président. L’amendement n° 1420, présenté par Mme M. Filleul, MM. J. Bigot, Montaugé et Kanner, Mme Bonnefoy, MM. Dagbert, Devinaz, Gillé, Houllegatte et Jacquin, Mmes Préville, Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 12
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…) Après le 4°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« … À la promotion de la régénération naturelle, à la limitation du recours aux plantations en excluant toute plantation en plein d’une seule essence et au développement d’une gestion forestière à couvert continu ;
La parole est à Mme Martine Filleul.
Mme Martine Filleul. Cet amendement vise à préciser les orientations générales de notre politique forestière en indiquant que l’État doit veiller à la promotion de la régénération naturelle, à la limitation du recours aux plantations, en excluant toute plantation en plein d’une seule essence, et au développement d’une gestion forestière à couvert continu. En effet, seuls 18 % des écosystèmes forestiers remarquables sont dans un bon état de conservation. Pourtant, dans le cadre de la Convention sur la diversité biologique, la France s’était engagée à mettre fin à l’érosion de la biodiversité, notamment en forêt, un objectif qui aurait dû être atteint en 2010, mais qui est, depuis, régulièrement repoussé.
Plutôt que de miser sur la diversification et le renforcement de la résilience, la tendance actuelle est plutôt à privilégier un renouvellement forestier par des plantations en monoculture. Près de 84 % des nouvelles plantations sont monospécifiques et environ 87 % des arbres plantés sont des résineux.
Des forêts diversifiées et en bonne santé sont converties par coupes rases en plantations, le plus souvent monospécifiques. C’est un pari très risqué d’après les scientifiques, car ces monocultures sont plus sensibles au changement climatique.
M. le président. L’amendement n° 1421, présenté par Mme M. Filleul, MM. J. Bigot, Montaugé et Kanner, Mme Bonnefoy, MM. Dagbert, Devinaz, Gillé, Houllegatte et Jacquin, Mmes Préville, Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 14
Compléter cet alinéa par les mots :
, notamment par la structuration de filières industrielles adaptées, et à l’empêchement de l’enrésinement des forêts aux niveaux national et local
La parole est à Mme Martine Filleul.
Mme Martine Filleul. Si l’utilisation du bois de construction est recommandée pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, elle doit être raisonnée et son extraction gérée de manière durable. En effet, une trop forte augmentation des prélèvements entraînerait une forte baisse du puits de carbone et dégraderait la fertilité et la biodiversité, hypothéquant nos chances de restaurer un bon état écologique des forêts.
Par ailleurs, des forêts diversifiées en bon état de santé, mais qualifiées de pauvres, sont converties par coupes rases en plantations, le plus souvent monospécifiques. Or c’est un pari très risqué, comme je l’ai dit précédemment. C’est pourquoi nous proposons, par cet amendement, de préciser que la promotion de l’utilisation de bois d’œuvre provenant de feuillus doit notamment passer par la restructuration ou la structuration des filières industrielles et l’empêchement de l’enrésinement des forêts.
M. le président. L’amendement n° 1422, présenté par Mme M. Filleul, MM. J. Bigot, Montaugé et Kanner, Mme Bonnefoy, MM. Dagbert, Devinaz, Gillé, Houllegatte et Jacquin, Mmes Préville, Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
… Le premier alinéa de l’article L. 121-6 est complété par les mots : « , ainsi qu’à la démonstration des bénéfices apportés pour la réalisation des objectifs prévus à l’article L. 121-1 ».
La parole est à Mme Martine Filleul.
Mme Martine Filleul. Les forêts françaises hexagonales sont parmi les plus vastes d’Europe, avec une diversité de climat, d’altitude et de sol ; il en va de même des forêts ultramarines. À différents titres – activités économiques, préservation de la biodiversité, stockage de carbone, paysage, loisirs –, elles représentent un atout indéniable pour notre pays et l’ensemble de la population.
À l’exception de celle de Guyane, demeurée en majorité dans son état primaire, la forêt a depuis longtemps été utilisée par l’homme, lequel l’a façonnée peu à peu. Elle s’est donc adaptée en faisant preuve de résilience. Mais, aujourd’hui, on constate des dommages déjà subis par de vastes étendues boisées, en particulier dans l’est de la France. On peut sérieusement se demander si elle sera en mesure de faire face au changement climatique, source de graves menaces de différentes natures selon les massifs forestiers.
Dans ce contexte, nous devons affronter un double enjeu : veiller à ce que les forêts contribuent de manière significative à l’atténuation du changement climatique, tout en s’y adaptant, afin de permettre le maintien de la biodiversité et des activités générées par la forêt.
Cet amendement vise donc à préciser que l’attribution des aides publiques destinées à la forêt est conditionnée à la démonstration des bénéfices apportés dans la réalisation des objectifs de notre politique forestière. Il y va de l’utilisation optimale de l’argent public, dans le sens d’une politique forestière plus durable qui respecte les équilibres écologiques et accompagne nos filières économiques.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour avis. La commission a émis un avis favorable sur l’amendement n° 1419 rectifié, qui tend à préciser le rôle de puits de carbone des forêts, ainsi que celui joué par la séquestration et la substitution. La commission est également favorable à l’amendement n° 2110, compte tenu des précisions rédactionnelles qu’il vise à apporter sur les techniques sylvicoles.
L’amendement n° 816 rectifié a pour objet de promouvoir la régénération naturelle plutôt que la migration assistée des essences. S’il était adopté, nous nous verrions privés d’une technique pourtant essentielle à l’adaptation de nos forêts au changement climatique – celui-ci ayant la caractéristique d’être très rapide, il nous faut y répondre le plus vite possible. La commission a donc émis un avis défavorable.
L’amendement n° 1879 vise à préconiser le mélange d’essences à l’échelle de la parcelle. Cette précision est inopportune et peu réaliste pour les parcelles de quelques ares, l’enjeu étant d’avoir des forêts mosaïques caractérisées par une complémentarité de l’ensemble du massif. L’avis est donc défavorable.
Les amendements nos 1880, 1420 et 1421 tendent à interdire les plantations en plein d’une seule essence et l’enrésinement. S’ils reprennent un certain nombre de pratiques reconnues – régularisation des peuplements, régénération naturelle, etc. –, qui ont toute leur place dans le code forestier et ont été largement renforcées, ces amendements semblent excessifs et surtout inadaptés aux besoins actuels de la multifonctionnalité pour laquelle nous plaidons tous. N’ignorons pas les besoins de notre filière, de nos entreprises, de la construction et de l’approvisionnement en bois ! Je rappelle que la gestion forestière se fait d’abord in situ, en appréhendant tout l’écosystème. J’invite nos collègues à ne pas chercher à légiférer en apportant trop de précisions et à faire confiance aux forestiers sur le terrain. La commission a donc émis un avis défavorable.
L’amendement n° 1422 a pour objet de préciser que l’attribution des aides publiques est conditionnée au respect des principes d’intérêt général. C’est une volonté que nous partageons, mais l’amendement est déjà satisfait par les documents de gestion durable, qu’il convient de renforcer et sur lesquels il faut rester vigilant. En conséquence, la commission demande le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettra un avis défavorable.
Enfin, l’amendement n° 1878 vise à reprendre l’ensemble des contraintes venant d’être évoquées. Dans la mesure où celles-ci sont trop restrictives et ne permettront pas à la forêt de remplir ses missions de multifonctionnalité, l’avis est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État. Je serai relativement succincte, car je rejoins la position de la rapporteure pour avis sur l’essentiel.
Je tiens vraiment à remercier le Sénat de sa volonté d’enrichir le texte sur la question forestière. Le couple forêt et usages du bois contribue de façon déterminante à la transition écologique et énergétique. La forêt est un levier absolument essentiel d’atténuation du dérèglement climatique et le premier réservoir de biodiversité terrestre. Il est donc impératif que nous nous en occupions : sa production durable doit être sécurisée et amplifiée. Ses services environnementaux et socio-économiques – en faveur du bien-être, du développement d’une bioéconomie et de nos paysages – sont, pour nous et les générations futures, primordiaux.
Le Gouvernement défendra des orientations fortes et équilibrées en la matière. Nous n’irons sans doute pas au bout de cette discussion dans le cadre de ce texte, mais sachez que, dans les mois à venir, Julien Denormandie et moi-même les porterons.
L’amendement n° 1878 est en quelque sorte un best of de tous les autres amendements. Je ne vais donc pas détailler les nombreuses propositions qu’il contient. La diversification et le mélange d’essences sont nécessaires et doivent être envisagés par la régénération naturelle, mais à une échelle plus locale, avec un maillage plus fin, dans le cadre de la révision actuelle des schémas régionaux de gestion sylvicole et des documents-cadres de gestion forestière.
Le Gouvernement est très favorable à l’amendement n° 1419 rectifié de cohérence et de précision, car il s’inscrit dans le vocabulaire de la stratégie nationale bas-carbone. Le Gouvernement avait d’ailleurs déposé, à l’Assemblée nationale, un sous-amendement allant dans ce sens.
L’avis est également favorable sur l’amendement n° 2110, dont l’adoption améliorera la rédaction de l’article. Il fait écho aux moyens inédits mobilisés dans le plan France Relance pour faire face à l’avenir incertain de la forêt et à la nécessaire diversification des essences et des techniques sylvicoles.
Sur les autres amendements en discussion commune, le Gouvernement émet un avis défavorable. Mieux vaut mettre en cohérence les documents-cadres de gestion forestière plutôt qu’établir des critères prédéfinis à l’échelon national. Sur le fond, je vous rejoins sur des considérations telles que la valorisation des feuillus, les plantations monospécifiques ou la diversification. En revanche, je ne pense pas qu’il faille d’ores et déjà fixer des curseurs pour l’ensemble du territoire.
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Pour ma part, je suivrai les avis de la commission et du Gouvernement.
Tout le monde s’accorde sur le principe d’une forêt mosaïque, mais, la forêt, c’est le temps long. Les vieux forestiers vous le diront : il faut attendre cent ans après une plantation et trois cents ans pour la régénération naturelle. C’est donc un investissement pour les générations suivantes.
S’agissant de la diversification, restons humbles. Chacun a son expérience dans son département. Pour ma part, je prendrai l’exemple de massifs forestiers qui ne sont pas dans mon département. Les épicéas, par exemple, peuvent être touchés par le scolyte ; les sapins peuvent être « guités », c’est-à-dire parasités par le gui, qui prolifère à des altitudes de plus en plus élevées. Pour y remédier, des sapins Douglas sont souvent plantés, mais ils peuvent être victimes de l’effet de cerf, qui, en se frottant contre leur tronc, abime leur écorce.
Les experts forestiers, qu’ils soient privés ou publics, ont déjà intégré qu’il était nécessaire de substituer les futaies irrégulières aux futaies régulières. Laissons-leur une liberté de manœuvre et le temps nécessaire pour parvenir à une forêt mosaïque. Cela implique également de former et de transformer la filière. Souvent, les professionnels du bois ne veulent pas récupérer des feuillus plantés au milieu de résineux, car ils ne savent tout simplement pas les travailler. Le bois est donc perdu…
Le Sénat a fait du bon travail, et il permet déjà d’avancer. (M. Marc Laménie applaudit.)
Mme Françoise Gatel. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.
M. Joël Labbé. La forêt, c’est du temps long, c’est vrai, mais on a pris du retard ! Plus vite on donnera de nouvelles orientations, plus vite on avancera. Oui, c’est pour les générations futures !
La forêt mosaïque est le souhait de toutes et de tous. La formulation que nous avons choisie – « mélange d’essences à l’échelle de la parcelle » – permettrait de s’assurer que, pour s’adapter à cette diversification des essences, on ne plante pas en majeure partie des résineux monospécifiques sur un massif forestier de cent hectares, laissant une toute petite surface, à la marge, à la régénération naturelle. À défaut, cela viderait de son sens la notion de diversité d’essences.
Le Sénat va enrichir le texte quoi qu’il arrive. C’est une fierté ! Une autre fierté est la qualité du travail du groupe d’études Forêt et filière bois. Si nous maintenons nos amendements, c’est parce que nous sommes exigeants, mais, en fin de compte, nous sommes plutôt satisfaits.
M. le président. Mes chers collègues, dans la mesure où je suis saisi de plusieurs demandes de scrutin public, il me semble plus raisonnable de suspendre la séance maintenant. (Marques d’approbation au banc des commissions.)
3
Candidatures à une commission mixte paritaire
M. le président. J’informe le Sénat que des candidatures pour siéger au sein de la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de programmation relatif au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales ont été publiées. Ces candidatures seront ratifiées si la présidence n’a pas reçu d’opposition dans le délai d’une heure prévu par notre règlement.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures quarante-cinq.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à treize heures quinze, est reprise à quatorze heures quarante-cinq, sous la présidence de M. Vincent Delahaye.)
PRÉSIDENCE DE M. Vincent Delahaye
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
4
Candidatures à une mission d’information
M. le président. L’ordre du jour appelle la nomination des membres de la mission d’information sur le thème : « Uberisation de la société : quel impact des plateformes numériques sur les métiers et l’emploi ? »
Conformément à l’article 8 du règlement, les listes des candidats remises par les groupes politiques ont été publiées. Elles seront ratifiées s’il n’y a pas d’opposition dans le délai d’une heure prévu par notre règlement.
5
Lutte contre le dérèglement climatique
Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.
Dans la discussion du texte de la commission, nous poursuivons l’examen de l’article 19 bis D.
Article 19 bis D (suite)
M. le président. Au sein de l’article 19 bis D, nous en sommes parvenus au vote sur neuf amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Je mets aux voix l’amendement n° 1878.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. En conséquence, les amendements nos 816 rectifié, 1879 et 1880 n’ont plus d’objet.
Je mets aux voix l’amendement n° 1420.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 267 rectifié, présenté par MM. Gold, Cabanel, Corbisez et Bilhac, Mmes N. Delattre et Guillotin, MM. Guiol, Requier et Roux, Mme M. Carrère, M. Guérini et Mme Pantel, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 2
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…) Le 2° est complété par les mots : « en particulier dans les forêts primaires et matures » ;
La parole est à M. Henri Cabanel.
M. Henri Cabanel. Les forêts primaires et les forêts matures jouent un rôle crucial dans le stockage du carbone et abritent la biodiversité la plus dense, avec des milliers d’espèces, souvent rares ou menacées. Elles sont, de surcroît, plus résistantes aux aléas climatiques que les forêts secondaires. Or nous constatons une régression préoccupante des forêts primaires et matures.
S’il n’existe plus de forêt primaire en métropole, la Guyane dispose de la plus vaste forêt primaire de France et de l’Union européenne, s’étendant sur 80 000 kilomètres carrés.
La protection de ces forêts constitue une priorité identifiée dans le cadre de la stratégie européenne pour la biodiversité, notamment en raison de leur rôle de puits majeur de carbone. Il est prévu de définir, cartographier, surveiller et protéger strictement les forêts primaires et anciennes encore présentes dans l’Union européenne.
Le présent amendement vise à inscrire les forêts primaires et matures parmi les ressources forestières reconnues d’intérêt général.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques. Je comprends la volonté des auteurs de cet amendement, mais celui-ci nous semble tout de même inapproprié : la biodiversité est un enjeu crucial dans toutes les forêts, et pas seulement dans les forêts primaires ou matures. Les jeunes forêts, par exemple, constituent un enjeu majeur de biodiversité pour les années à venir.
Par ailleurs, cet amendement est partiellement satisfait, puisqu’il s’avère qu’une grande partie des surfaces, notamment en Guyane, seront bientôt classées en aires protégées. Elles bénéficieront donc de toute la protection nécessaire.
La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité. La rédaction actuelle du code forestier est volontairement généraliste, afin de préserver la biodiversité quel que soit le type de forêt concerné.
Existe, en outre, la stratégie pour les aires protégées, avec un renforcement de la protection des écosystèmes, notamment pour certaines forêts qui présentent un caractère subnaturel ou permettant l’expression complète du cycle forestier. J’ajoute, en clin d’œil, la création prochaine de la réserve intégrale de près de 3 000 hectares au sein du parc national de forêts.
Je souhaite appeler votre attention sur le fait que les termes « forêt primaire » et « forêt mature » ne font pas, à ce jour, l’objet d’une définition consensuelle et partagée.
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Monsieur Cabanel, l’amendement n° 267 rectifié est-il maintenu ?
M. Henri Cabanel. Non, je le retire.
M. le président. L’amendement n° 267 rectifié est retiré.
Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 2109, présenté par MM. Rambaud, Lévrier et Marchand et Mmes Schillinger et Havet, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 4
Rédiger ainsi cet alinéa :
« 4° La protection ainsi que la fixation des sols par la forêt, notamment en zone de montagne, et la préservation de la qualité des sols forestiers, notamment au regard des enjeux de biodiversité ; »
II. – Alinéa 5
Remplacer les mots :
les deux occurrences
par les mots :
la seconde occurrence
La parole est à Mme Patricia Schillinger.
Mme Patricia Schillinger. Cet amendement vise à élargir la rédaction issue de l’examen en commission, pour ne pas se limiter aux enjeux de biodiversité. La préservation de la qualité des sols forestiers doit être considérée suivant de nombreuses problématiques : perte de matière organique et de biodiversité du sol, érosion, salinisation…
M. le président. L’amendement n° 1824, présenté par Mme Loisier, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 4
Remplacer les mots :
au regard de la biodiversité
par les mots :
, notamment au regard des enjeux de biodiversité,
II. – Alinéa 5
Rédiger ainsi cet alinéa :
b) Au 5°, après la deuxième occurrence du mot : « les », sont insérés les mots : « sols forestiers, » ;
La parole est à Mme la rapporteure pour avis, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis de la commission des affaires économiques sur l’amendement n° 2109.
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques. Les deux amendements ont le même objet : la préservation de la qualité des sols forestiers. La commission des affaires économiques du Sénat l’a ancrée dans la loi, en en faisant une véritable priorité.
Madame Schillinger, je vous demande de bien vouloir privilégier l’amendement de la commission, tout en saluant l’effort qui est réalisé au travers de l’amendement que vous avez présenté pour contribuer à la dynamique en faveur des sols forestiers. C’est la raison pour laquelle l’avis est défavorable sur l’amendement n° 2109.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État. Ces deux amendements visent à élargir la rédaction issue du texte de la commission, pour ne pas limiter la protection des sols forestiers aux seuls enjeux de biodiversité. Les deux rédactions étant, somme toute, extrêmement proches, le Gouvernement a émis un avis favorable sur les deux amendements.
Mme Patricia Schillinger. Je retire mon amendement au profit de celui de la commission !
M. le président. L’amendement n° 2109 est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 1824.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. L’amendement n° 815, présenté par M. Gay, Mme Varaillas et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 16
Remplacer les mots :
économique, écologique et sociale
par les mots :
écologique, sociale et économique
La parole est à M. Gérard Lahellec.
M. Gérard Lahellec. Nous saluons le travail de la rapporteure pour avis, Mme Anne-Catherine Loisier, qui a su renforcer la place de la forêt dans ce projet de loi.
Par cet amendement, nous souhaitons hiérarchiser les objectifs de la politique forestière de l’État et de la gestion des propriétaires privés inscrits à l’article 19 bis D, afin de mieux intégrer les objectifs de lutte contre le dérèglement climatique.
Pour conforter le principe d’une gestion durable et multifonctionnelle de toutes les forêts, il convient de concilier – dans cet ordre – les logiques écologique, sociale et économique. C’est à ce rééquilibrage que tend cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour avis. Il s’agit d’une précision purement symbolique, à laquelle la commission a souhaité donner un avis favorable. Néanmoins, j’insiste sur le fait qu’il n’y a pas de hiérarchisation, puisque nous nous inscrivons dans le principe de la multifonctionnalité, qui place au même niveau les enjeux écologique, économique et social.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État. Je rejoins Mme la rapporteure pour avis : il n’est pas question de hiérarchiser ces enjeux. D’ailleurs, dans de nombreux textes, nous trouvons ces trois piliers du développement durable. Le Gouvernement s’en remet donc à la sagesse du Sénat.
M. le président. L’amendement n° 1828, présenté par Mme Loisier, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
… Au second alinéa de l’article L. 175-4, les mots : « sage gestion économique » sont remplacés par les mots « gestion durable et multifonctionnelle ».
La parole est à Mme la rapporteure pour avis.
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques. Il s’agit d’un amendement de coordination, qui vise à ce que ces dispositions s’appliquent à Mayotte comme dans le reste du territoire français.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 19 bis D, modifié.
(L’article 19 bis D est adopté.)
Articles additionnels après l’article 19 bis D
M. le président. L’amendement n° 1637, présenté par Mmes Rossignol et M. Filleul, MM. J. Bigot, Montaugé et Kanner, Mme Bonnefoy, MM. Dagbert, Devinaz, Gillé, Houllegatte et Jacquin, Mmes Préville, Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 19 bis D
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le 5° de l’article L. 112-1 du nouveau code forestier, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« … Le reboisement d’essences d’arbres variées afin d’éviter l’enrésinement. »
La parole est à M. Joël Bigot.
M. Joël Bigot. Depuis la seconde moitié du XXe siècle, la France mène de vastes travaux de reboisement des forêts, qui ont connu une incroyable expansion, atteignant plus de 16 millions d’hectares sur notre territoire. Or, sur les 30 millions de plants plantés par an aujourd’hui, 20 millions sont des résineux. Ces essences d’arbres connues pour leur capacité à pousser très vite ont des effets nocifs sur l’écosystème des forêts.
Alors qu’il est plus que nécessaire de reboiser avec des essences capables de s’adapter aux changements climatiques, les résineux ont une capacité d’absorption du dioxyde de carbone très faible, ce qui rend les forêts de plus en plus vulnérables. Ainsi, cet amendement, proposé par Déclic et Greenlobby, vise à intégrer dans le nouveau code forestier cette nécessité de reboiser nos forêts de manière variée, afin de les adapter au mieux aux bouleversements climatiques.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour avis. Cet amendement est déjà satisfait par l’intégration de la mention « diversification des essences » à l’article 19 bis D, sur laquelle nous avons beaucoup insisté.
En outre, la référence à la lutte contre l’enrésinement nous pose souci, puisque la loi doit viser un équilibre forestier général, lequel passe par un mélange d’essences et, donc, par des résineux. Je rappelle que nous avons besoin de ces résineux pour atteindre l’objectif de la stratégie nationale bas-carbone en matière de construction et de matériaux bois. J’ajoute qu’il existe de très belles forêts de résineux avec un mélange d’espèces, en régénération naturelle et en forêt irrégulière.
Aussi, cet amendement me paraît satisfait pour une part et inopportun pour l’autre. La commission en demande donc le retrait ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État. La diversification des essences et leur adaptation aux conditions climatiques font effectivement encore l’objet d’incertitudes, mais il n’est pas souhaitable d’opposer les résineux et les feuillus. Tous deux font partie intégrante de la nature, et nous aurons besoin de la diversité des ressources végétales adaptées au climat futur pour garantir la pérennité de nos écosystèmes.
Naturellement, il s’agit d’être vigilant sur le choix des essences qui se retrouvent dans les documents d’encadrement des pratiques sylvicoles en cours de révision, notamment pour les forêts privées. Ces documents d’encadrement sont des outils précieux.
Le Gouvernement a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Monsieur Bigot, l’amendement n° 1637 est-il maintenu ?
M. Joël Bigot. Oui, je le maintiens.
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L’amendement n° 813 rectifié est présenté par M. Gay, Mme Varaillas et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 936 rectifié est présenté par MM. S. Demilly, Moga et les membres du groupe Union Centriste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 19 bis D
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code forestier est ainsi modifié :
1° Après l’article L. 121-1, il est inséré un article L. 121-… ainsi rédigé :
« Art. L. 121-…. – Pour répondre à l’urgence écologique et climatique et atteindre l’objectif de neutralité carbone à l’horizon 2050 énoncé à l’article L. 100-4 du code de l’énergie, la politique forestière nationale a pour objectif de conserver et, le cas échéant, de renforcer le puits de carbone forestier conformément à l’article 5 de l’Accord de Paris adopté le 12 décembre 2015, signé par la France à New York le 22 avril 2016, et au d du 1 de l’article 4 de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, conclue à New York le 9 mai 1992 et signée par la France le 13 juin 1992. » ;
2° Le premier alinéa de l’article L. 121-2-2 est complété par deux phrases ainsi rédigées : « Les objectifs de ce programme permettent la conservation, voire le renforcement, du puits de carbone forestier en veillant au respect des fonctions écologiques, sociales et économiques des forêts. Ces objectifs prévoient de plafonner le niveau de prélèvement global à celui de l’année 2019 en veillant à la répartition équilibrée des prélèvements entre les territoires ainsi qu’entre les différents types et statuts de bois et forêts. »
La parole est à Mme Laurence Cohen, pour présenter l’amendement n° 813 rectifié.
Mme Laurence Cohen. Nous le savons, la forêt est un des puits de carbone de notre planète, avec l’océan. Or, selon une étude récente, la forêt amazonienne commence à émettre plus de gaz à effet de serre qu’elle n’en stocke, du fait de la déforestation, des incendies de forêt et de l’élevage. Le groupe d’amitié France-Brésil, que j’ai l’honneur de présider, y est particulièrement sensible.
L’urgence est donc non seulement climatique, mais, plus largement, environnementale, car climat et biodiversité sont étroitement liés. Cette urgence impose des actions fortes et rapides. Surtout, cette urgence est mondiale ; elle concerne tous les pays et tous les habitants de la planète. Chaque État est responsable ; dans ce contexte, la France peut et doit montrer l’exemple. Les générations futures s’en souviendront.
Le présent amendement vise à inscrire, dans le code forestier, les objectifs de conservation et de renforcement du puits de carbone forestier, pour atteindre les objectifs de neutralité carbone de la France à l’horizon de 2050. En effet, comme le souligne l’association Canopée, l’engagement de la France pour tenir les objectifs de l’accord de Paris doit apparaître dans le code forestier, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.
Cet état de fait conduit à une lacune absolument considérable : cet engagement n’est pas suffisamment pris en compte dans la politique nationale forestière retranscrite dans le programme national de la forêt et du bois. Or, pour atteindre les objectifs de neutralité carbone que nous nous sommes fixés, il est essentiel de renforcer le puits de carbone forestier, ce qui doit se traduire concrètement par un plafonnement du niveau de prélèvements.
Tel est le sens de notre amendement.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Moga, pour présenter l’amendement n° 936 rectifié.
M. Jean-Pierre Moga. L’objet de cet amendement est également d’inscrire, dans le code forestier, les objectifs de conservation, voire de renforcement du puits de carbone forestier, indispensable pour atteindre les objectifs de neutralité carbone de la France à horizon de 2050. Cet engagement de la France au titre de l’accord de Paris n’apparaît pas, actuellement, dans le code forestier. Il n’est, de ce fait, pas pris en compte à la hauteur des enjeux dans la politique nationale forestière retranscrite dans le programme national de la forêt et du bois.
Pour atteindre les objectifs de neutralité carbone, il est essentiel de préserver, voire de renforcer le puits de carbone forestier, ce qui doit se traduire concrètement par un plafonnement au niveau des prélèvements dans les objectifs de la politique nationale forestière retranscrite dans le programme national de la forêt et du bois.
Selon le rapport annuel 2019 du Haut Conseil pour le climat, pour la période 2015-2018, le puits net de carbone du secteur des terres a diminué de 2,1 % par an en moyenne, du fait des forêts. Pourtant, la trajectoire de la stratégie nationale bas-carbone anticipait un accroissement annuel de 11 %. Le rapport annuel 2020 indique que cette tendance se poursuit.
Les études françaises récentes sur le bilan carbone des scénarios d’augmentation de la récolte confirment les résultats à l’échelle européenne : une augmentation massive de la récolte augmentera les émissions de CO2 pendant au moins trois décennies. De leur côté, les climatologues estiment que seule une diminution totale, d’ici à 2030-2050, peut nous permettre de rester sous le seuil de 1,5 degré de réchauffement ciblé par les accords de Paris.
M. le président. L’amendement n° 1885, présenté par MM. Labbé, Dantec, Salmon, Fernique et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :
Après l’article 19 bis D
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code forestier est ainsi modifié :
1° Après l’article L. 121-1, il est inséré un article L. 121-1-… ainsi rédigé :
« Art. L. 121-1-…. – Pour répondre à l’urgence écologique et climatique et atteindre l’objectif de neutralité carbone à l’horizon 2050 énoncé à l’article L. 100-4 du code de l’énergie, la politique forestière nationale a pour objectif de conserver et, le cas échéant, renforcer le puits de carbone forestier. »
2° Le premier alinéa de l’article L. 121-2-2 est complété par deux phrases ainsi rédigées : « Les objectifs du programme national de la forêt et du bois permettent la conservation, voire le renforcement du puits de carbone forestier en veillant au respect des fonctions écologiques, sociales et économiques des forêts. Ces objectifs prévoient de plafonner le niveau de prélèvement global à celui de l’année 2019 en veillant à leur répartition équilibrée sur le territoire et entre les différents statuts et types de bois et forêts. »
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. En complément des arguments de mon collègue Jean-Pierre Moga, je tiens à préciser que les prélèvements forestiers dégagent du carbone via leur impact sur le sol et, lorsqu’il s’agit de bois énergie, leur combustion. Ces émissions ne sont compensées par la repousse des arbres et la restauration du sol que des dizaines, voire des centaines d’années plus tard. Or c’est maintenant, dans les décennies à venir, qu’il nous faut réduire notre impact carbone.
Le plafonnement proposé par cet amendement est essentiel pour atteindre les objectifs climatiques de la France. Il correspond, par ailleurs, aux propositions de la Convention citoyenne pour le climat.
Si une confusion est entretenue à ce sujet, permettez-moi de dire que ce sont bien les vieilles forêts, et non les forêts jeunes, qui stockent le plus de carbone, notamment du fait du stockage dans les sols forestiers. En forêt tempérée, les sols stockent plus de carbone que la partie aérienne de l’arbre.
En France, 79 % des arbres ont moins de cent ans et, donc, sont jeunes. Accélérer les prélèvements ne fera qu’accentuer la perte de stockage de CO2 par les forêts. De plus, une augmentation des prélèvements dégraderait la fertilité et la biodiversité des écosystèmes forestiers, hypothéquant ainsi nos chances de restaurer un bon état écologique des forêts françaises.
M. le président. L’amendement n° 1424, présenté par Mme M. Filleul, MM. J. Bigot, Montaugé et Kanner, Mme Bonnefoy, MM. Dagbert, Devinaz, Gillé, Houllegatte et Jacquin, Mmes Préville, Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy et Tissot, Mme G. Jourda et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 19 bis D
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l’article L. 121-2-2 du code forestier est complété par une phrase ainsi rédigée : « Il vise à préserver et le cas échéant, à renforcer le rôle de puits de carbone de la forêt afin de contribuer à l’objectif de neutralité carbone à l’horizon 2050 énoncé à l’article L. 100-4 du code de l’énergie. »
La parole est à Mme Martine Filleul.
Mme Martine Filleul. Comme cela a été souligné par les intervenants précédents, les écosystèmes terrestres français constituent actuellement un puits net de carbone très significatif, estimé à près de 20 % des émissions françaises. Ce puits est principalement constitué des écosystèmes forestiers, qui, en plus de fournir le bois nécessaire à la transition bas-carbone, séquestrent près de 87 millions de tonnes de CO2 par an, soit l’équivalent de 19 % des émissions annuelles françaises.
Le rôle de puits de carbone de la forêt a été inscrit par d’autres dispositions au sein de notre politique forestière nationale. Nous proposons, par souci de cohérence, d’intégrer cette dimension dans les objectifs du programme national de la forêt et du bois, afin de contribuer à l’objectif de neutralité carbone à l’horizon de 2050.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour avis. Nous nous rejoignons sur l’objectif de renforcer le puits de carbone forestier. C’est d’ailleurs ce que la commission des affaires économiques s’est attachée à faire aux articles 19 bis D et 19 bis F. Aussi, je pense que ces amendements sont satisfaits par les dispositions déjà prises, ainsi que par l’adoption de l’amendement n° 1419 rectifié.
S’agissant du plafonnement des prélèvements de bois dans le PNFB, celui-ci nous semble inapproprié, puisque l’enjeu est beaucoup plus large : il s’agit d’adapter ces prélèvements aux réalités de terrain, qui peuvent être différentes en fonction de nos régions, et donc des PRFB.
La commission demande donc le retrait de ces amendements ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État. Les amendements nos 813 rectifié, 936 rectifié et 1885 visent à introduire, dans le code forestier, une double disposition : maintenir ou renforcer le puits de carbone forestier et plafonner le niveau de prélèvements de bois à celui de 2019.
La stratégie nationale bas-carbone a inclus des scenarii chiffrés à l’horizon de 2050 et des indicateurs de résultats avec, dans les prélèvements qui découlent de l’application des plans de gestion agréés par l’État, un plafonnement national. Le plafonnement proposé par ces amendements n’aurait donc guère de sens opérationnel.
J’ajoute que, en associant les effets du puits forestier et l’augmentation du stockage des produits bois, nous activons aussi ce troisième levier de la substitution, qui doit nous permettre de répondre aux matériaux plus énergivores et aux énergies fossiles. Ce levier est incontournable pour la réduction des émissions dans les secteurs du bâtiment, du transport et de l’énergie. Le Gouvernement est donc défavorable à ces trois amendements.
S’agissant de l’amendement n° 1424, le Gouvernement en demande le retrait, car il est satisfait par l’article L. 121-1 du code forestier, qui dispose que l’État veille à l’« optimisation du stockage de carbone dans les bois et forêts, le bois et les produits fabriqués à partir de bois ». Le puits de carbone de la forêt et des produits bois y est donc déjà mentionné.
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.
M. Fabien Gay. Vous voyez que, au détour d’un amendement, on fait beaucoup de politique…
J’entends ce que dit Mme la rapporteure pour avis, mais nous ne retirerons pas notre amendement, parce qu’il n’est pas du tout satisfait. Reconnaître la forêt comme puits de carbone a des conséquences ! Par exemple – nous avons eu le débat en commission –, aujourd’hui, en Amazonie française, 360 000 hectares sont menacés par des mines industrielles. Nous aurons ce débat dans quelques heures à propos du code minier. Aussi, si nous reconnaissons la forêt comme puits de carbone, il faut arrêter ces mines industrielles qui menacent l’Amazonie française. Vous le voyez, tout se tient !
De la même manière, si nous reconnaissons la forêt comme puits de carbone nécessaire, nous devrions avoir tout un débat, comme nous l’avons eu hier, sur les traités de libre-échange. On ne peut pas, d’un côté, déclarer ne pas cautionner la politique de Bolsonaro et, de l’autre, signer le Mercosur, qui participe à la déforestation.
Nous maintenons donc notre amendement, parce que, je le répète, il n’est pas du tout satisfait. Nous considérons qu’inscrire un tel dispositif dans le code forestier serait un gain écologique et social.
M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.
M. Daniel Gremillet. Je voudrais soutenir notre rapporteure pour avis, pour deux raisons.
Tout d’abord, on se méprend : comme les hommes et les femmes, le stock de carbone se constitue au fil du temps. Et, comme la société, sans renouvellement, la forêt s’appauvrit. Aujourd’hui, le problème de nos forêts est qu’on a davantage d’arbres qui dépérissent ou qui sont prélevés que de jeunes pousses, que ce soit par plantation ou par régénération naturelle. Voilà le vrai débat !
Ensuite, comme l’a dit notre collègue Joël Labbé, sans jeunes de plants, on hypothèque les captations de carbone pour le futur.
Telles sont les raisons pour lesquelles je soutiens ardemment notre rapporteure pour avis. Il est essentiel d’en rester à la rédaction de la commission des affaires économiques.
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.
M. Joël Labbé. Comme dans de nombreux domaines, on nage en plein paradoxe : la bonne volonté, la lucidité et les intentions sont là, mais on réfléchit à court terme. L’économie de la forêt devra passer par la mise en place de filières françaises et européennes pour aboutir au produit fini. Les prélèvements devront nécessairement être moindres.
Nous l’avons dit, la vieille forêt est beaucoup plus captatrice en carbone que la jeune. Or il faut trois, quatre, voire cinq générations pour y parvenir. On travaille pour les générations futures !
Nous discutons d’un projet de loi Climat et résilience. Or on ne peut aboutir à la résilience sans sobriété. Il faut revoir le logiciel de l’exploitation et cultiver la forêt au lieu de l’exploiter au maximum.
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Il me semble que nous partageons tous ces notions de puits de carbone, mais ne brusquons pas les choses : elles sont en train de se faire naturellement.
Ne bloquons pas le marché de la forêt. Si on veut que la forêt appartienne à moins de propriétaires et soit mieux gérée, il faut impérativement qu’elle ait une certaine valeur. Quand on achète une forêt, c’est en fonction du bois qu’il y a sur la parcelle. Si on ne peut pas prélever le bois, personne ne l’achètera. Sans transaction, il n’y aura plus d’investissement, la forêt ne sera plus gérée, et on sera face au problème que soulève Daniel Gremillet. Si on veut bloquer le marché, il n’y a qu’à s’y prendre comme ça ! Interdire les plantations d’épicéas, par exemple, c’est rendre ce type de massif forestier invendable !
Si on veut arriver à ne plus avoir de plantations uniques au profit de forêts mosaïques, mieux vaut faire évoluer petit à petit les mentalités que de bloquer le marché, sinon le bois sera acheté ailleurs et on va déforester, ce qui serait contre-productif ! C’est la même chose pour la baisse de TVA qui a été proposée pour le bois d’appellation d’origine contrôlée : là aussi, c’est contre-productif !
La commission a su trouver le juste milieu : préserver les intérêts écologiques et les intérêts économiques. Il faut véritablement en rester là !
M. le président. Monsieur Moga, l’amendement n° 936 rectifié est-il maintenu ?
M. Jean-Pierre Moga. Non, je le retire.
M. le président. L’amendement n° 936 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 813 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 1425, présenté par Mme M. Filleul, MM. J. Bigot, Montaugé et Kanner, Mme Bonnefoy, MM. Dagbert, Devinaz, Gillé, Houllegatte et Jacquin, Mmes Préville, Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy et Tissot, Mme G. Jourda et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 19 bis D
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 121-5 du code forestier est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Ces documents de gestion peuvent prévoir exceptionnellement de laisser certaines surfaces, parcelles ou massifs, en libre évolution notamment pour des motifs d’ordre écologique, paysager, scientifique ou éducatif.
« La gestion sous forme de libre évolution peut être prévue par le propriétaire dans le cadre des obligations réelles environnementales mentionnées à l’article L. 132-3 du code de l’environnement. »
La parole est à Mme Martine Filleul.
Mme Martine Filleul. Cet amendement vise à consacrer, dans le code forestier, la possibilité de laisser des surfaces forestières en libre évolution, lesquelles peuvent jouer un rôle intéressant dans notre stratégie de lutte contre le réchauffement climatique. En effet, si l’exploitation économique des forêts a toute sa vocation pour la création de matériaux durables et d’énergie, elle empêche le plus souvent le vieillissement naturel des arbres. Or le stockage du carbone se réalise d’autant mieux que les arbres sont anciens, la décomposition du bois mort incorporant bien davantage de carbone dans le sol qu’elle n’en libère.
Par ailleurs, les arbres âgés, le bois mort sous toutes ses formes et les écosystèmes caractéristiques des forêts en libre évolution sont les supports de vie d’un quart de la biodiversité terrestre.
La libre évolution permet aussi de garder des témoins du fonctionnement originel des forêts et constitue un laboratoire précieux d’observation pour la connaissance du fonctionnement des écosystèmes forestiers, notamment dans le cadre du changement climatique.
Pour ces raisons, nous souhaitons consacrer cette possibilité dans le code forestier pour faire de la libre évolution un véritable mode de gestion exceptionnel appliqué soit à des petites surfaces constituant des îlots de sénescence, soit à des parcelles entières.
La libre évolution doit demeurer une faculté. Il ne s’agit pas de la rendre systématique dans certaines zones. En effet, l’intervention humaine peut s’avérer nécessaire pour veiller à la bonne santé écologique d’un territoire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour avis. Les propriétaires ont toute latitude pour mettre en œuvre la libre évolution. Bon nombre d’entre eux le font déjà. Dans les grandes forêts, les stations forestières ne sont pas toutes les mêmes : régénération naturelle, plantations, libre évolution… On trouve d’ailleurs beaucoup de libre évolution dans les toutes petites parcelles non gérées qu’évoquait à l’instant M. Savary. De fait, elle est déjà largement pratiquée sur l’ensemble du territoire.
Par ailleurs, on ne connaît pas les conséquences réelles de la libre évolution sur la biodiversité et sur le puits de carbone. Il faut aussi prendre en compte les risques supplémentaires induits en termes d’incendies, de déséquilibres sylvo-cynégétiques ou de risques parasitaires. C’est la raison pour laquelle la commission des affaires économiques a demandé une évaluation de l’impact des forêts en libre évolution, notamment dans les aires protégées.
Pour ces raisons, madame la sénatrice, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État. En l’état actuel du droit, il est tout à fait possible – et même souhaitable – d’intégrer une partie de libre évolution dans les documents de gestion durable. Il faut également toujours garder à l’esprit la notion de multifonctionnalité.
Nous devrions sans doute réfléchir à une révision de la fiscalité. Ce levier a pu être oublié en d’autres temps.
En ce qui concerne les obligations réelles environnementales et le souhait de certains propriétaires de s’inscrire dans une démarche environnementale de long terme, sachez qu’un séminaire technique se tiendra à l’automne prochain pour dresser un premier bilan et accompagner la massification du recours aux ORE, qui constituent un dispositif très intéressant.
En l’état, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
M. le président. Madame Filleul, l’amendement n° 1425 est-il maintenu ?
Mme Martine Filleul. Non, je le retire.
M. le président. L’amendement n° 1425 est retiré.
Je suis saisi de quatre amendements identiques.
L’amendement n° 553 rectifié bis est présenté par MM. Corbisez, Cabanel, Gold, Guiol et Roux, Mme M. Carrère, M. Guérini, Mme Guillotin et MM. Requier et Bilhac.
L’amendement n° 1101 est présenté par M. Gay, Mme Varaillas et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 1426 est présenté par Mme M. Filleul, MM. J. Bigot, Montaugé et Kanner, Mme Bonnefoy, MM. Dagbert, Devinaz, Gillé, Houllegatte et Jacquin, Mmes Préville, Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy et Tissot, Mme G. Jourda et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 1881 est présenté par MM. Labbé, Dantec, Salmon, Fernique et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 19 bis D
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code forestier est ainsi modifié :
1° La section 2 du chapitre IV du titre II du livre Ier est complétée par un article L. 124-5-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 124-5-1. – I. – Les coupes rases, définies comme les coupes d’un seul tenant de la totalité des arbres d’une parcelle sans régénération acquise, d’une surface supérieure à deux hectares, sont interdites, sauf autorisation délivrée par le représentant de l’État dans le département et pour les bois et forêts des particuliers, après avis du Centre national de la propriété forestière. L’autorisation est délivrée à condition que la coupe soit justifiée par une situation d’impasse sanitaire, définie par un état de santé des arbres fortement compromis et par une absence de régénération naturelle de qualité et suffisante. Le calcul des surfaces tient compte des coupes rases cumulées au cours des cinq dernières années sur des parcelles contiguës appartenant à un même propriétaire.
« II. – Un décret en Conseil d’État détermine les conditions dans lesquelles est délivrée l’autorisation mentionnée au I.
« III. – Les documents d’aménagement mentionnés à l’article L. 212-1 peuvent exceptionnellement autoriser des coupes rases selon les critères établis au I, auquel cas l’autorisation prévue n’est pas requise. » ;
2° Au premier alinéa de l’article L. 124-6, les mots : « d’une surface supérieure à un seuil arrêté par la même autorité dans les mêmes conditions » sont remplacés par les mots : « encadrée selon les modalités prévues par l’article L. 124-5-1 ».
3° Le deuxième alinéa de l’article L. 312-5 est complété par les mots : « sans préjudice de l’article L. 124-5-1 » ;
4° Au dernier alinéa de l’article L. 312-11, après la référence : « L. 124-5 », est insérée la référence : « , L. 124-5-1 ».
La parole est à M. Jean-Pierre Corbisez, pour présenter l’amendement n° 553 rectifié bis.
M. Jean-Pierre Corbisez. Les coupes rases ne tiennent pas compte de l’écosystème forestier ni de l’âge de maturité des arbres. Cette pratique se répand dans les forêts dites de « feuillus », diversifiées, avec plusieurs essences et des âges d’arbre différents, et donc plus résilientes au changement climatique, malheureusement dans le seul but de les convertir en plantations monospécifiques de résineux. Les forêts plantées après coupe rase sont moins résilientes face au dérèglement climatique, aux incendies ou encore à la prolifération d’insectes.
Cet amendement vise à interdire les coupes rases des bois et forêts qui ne font pas actuellement l’objet d’une définition au sein du code forestier. Elles seraient ainsi définies « comme les coupes d’un seul tenant de la totalité des arbres d’une parcelle sans régénération acquise, d’une surface supérieure à deux hectares ». Elles seraient interdites, sauf « autorisation délivrée par le représentant de l’État dans le département et pour les bois et forêts des particuliers, après avis du Centre national de la propriété forestière », et ne seraient autorisées qu’en cas d’impasse sanitaire.
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour présenter l’amendement n° 1101.
M. Fabien Gay. Cet amendement vise à interdire la coupe rase, qui consiste à abattre la totalité des arbres d’une parcelle d’une exploitation forestière.
Aujourd’hui, la coupe rase, ou coupe à blanc, est une technique qui ne tient pas compte des limites et des fragilités du couvert forestier français et qui a des effets dévastateurs sur l’écosystème, les sols et les paysages.
La coupe rase entraîne une perturbation anormale et brutale de l’écosystème forestier, accroît le risque d’une mauvaise régénération des essences – si précieuse – et la compaction et parfois l’érosion des sols, ce qui nuit à la bonne régénération naturelle et au bon ancrage des arbres plantés.
Enfin, cette pratique forestière peut conduire à une modification profonde et brutale des mécanismes de ruissellement et du cycle de l’eau, ce qui se traduit par une pollution ou dégradation des cours d’eau, localement et en aval.
M. le président. La parole est à Mme Martine Filleul, pour présenter l’amendement n° 1426.
Mme Martine Filleul. Les sénateurs du groupe socialiste proposent d’interdire les coupes rases d’un seul tenant d’une surface supérieure à deux hectares, sauf autorisation du préfet de département et du CNPF.
La pratique des coupes rases constitue un véritable préjudice pour le stock carbone contenu dans les sols forestiers. Elle doit, à ce titre, être interdite.
Une récente étude, publiée par la Commission européenne en juin 2020, a révélé que la surface de forêt recollée par coupe rase avait augmenté de 49 % sur la période 2016-2018 par rapport à 2011-2015.
De même, le rapport des associations Fern et Canopée, avec qui nous avons travaillé sur l’élaboration de cet amendement, montre que les coupes rases représentent près de 14 % de la surface forestière française en 2016.
Ces chiffres doivent nous alarmer sur la nécessité d’endiguer ce phénomène afin de préserver notre surface forestière, dont le rôle est essentiel pour la régulation du CO2 au niveau atmosphérique. Les forêts, qui stockent plus de la moitié du carbone des terres émergées, doivent donc être protégées des coupes rases.
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour présenter l’amendement n° 1881.
M. Joël Labbé. Il faut rendre la forêt plus résiliente face au dérèglement climatique. Or les forêts plantées après une coupe rase sont moins résistantes aux événements extrêmes comme les tempêtes, les incendies et les proliférations d’insectes.
Certes, la coupe rase, suivie d’une nouvelle plantation, peut se justifier. Le dispositif proposé prévoit d’ailleurs une dérogation avec des critères sanitaires stricts pour distinguer les forêts objectivement dépérissantes en situation d’impasse.
Il s’agit d’un amendement équilibré. Il nous faut vraiment encadrer cette pratique qui augmente pour d’autres raisons que la seule arrivée à maturité de plantations d’arbres. Or le plan de relance du Gouvernement nous promet une accélération de la tendance en permettant de subventionner – avec de l’argent public ! – des pratiques qui consistent à détruire entièrement une forêt diversifiée, en parfaite santé, par coupe rase, puis à la remplacer par une autre plantation, généralement une monoculture de résineux.
L’industrialisation de la forêt se poursuit donc à rebours des enjeux sociétaux, environnementaux et économiques liés à ces milieux si précieux. Les choses ne peuvent pas se faire en claquant des doigts. Il faut une volonté politique. Les acteurs et les citoyens réclament cette réindustrialisation, notamment pour le bois de construction et pour le bois de meubles. Il est temps de travailler sur cette filière, qui a un beau passé et qui doit avoir un bel avenir. (Mme Esther Benbassa applaudit.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour avis. Ne nous trompons pas : l’évolution des coupes rases depuis 2016-2017 est en grande partie due au changement climatique et à une vulnérabilité croissante de nos arbres.
Le changement climatique n’est pas arrivé d’un coup. Ce phénomène se déroule dans le temps. Les sécheresses de ces dernières années ont affaibli des peuplements, qui dépérissent.
La commission des affaires économiques n’est pas favorable à l’interdiction de telle ou telle pratique sylvicole plutôt qu’une autre. Elles peuvent toutes être opportunes à un moment donné, sur une station donnée.
Nous souhaitons nous appuyer sur l’appréciation, la qualification des acteurs locaux : professionnels forestiers, élus… Ces derniers participent d’ailleurs de plus en plus aux stratégies locales de développement forestier.
Nos amendements crantent dans la loi, dans le code forestier, la préservation et la qualité des sols. Ce sont autant d’outils à la disposition des préfets et des CRPF pour contrôler et éviter, demain, les pratiques abusives.
Mes chers collègues, ne nous trompons pas de sujet : l’objectif de ce projet de loi Climat est bien de préserver la biodiversité et la richesse des sols, non d’interdire tel ou tel outil. Que ferons-nous sur une parcelle de plus de deux hectares en mono-essence de résineux et futaie régulière – soit l’archétype de ce que l’on ne veut pas ? Pourquoi ne pas la couper alors qu’on pourrait y replanter des essences adaptées, mélangées, plus aptes à résister au changement climatique ?
Nous ne voulons pas d’interdiction systématique, mais une plus grande vigilance des organismes de contrôle.
Pour toutes ces raisons, la commission demande le retrait de ces quatre amendements identiques ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État. Les coupes rases émeuvent, notamment pour le choc paysager qu’elles peuvent provoquer. Nous partageons tous ce sentiment. Personne ne veut ici accepter des pratiques irraisonnées et court-termistes.
Pour autant, nous ne devons pas nous laisser emporter par l’émotion : parfois, des causes sanitaires justifient ces coupes rases. Par ailleurs, si l’impact de cette pratique sur la biodiversité peut être avéré, il n’est pas absolu, notamment si des plantations ou des régénérations naturelles s’ensuivent pour leur donner un sens dans le temps.
Je partage le souci de vigilance des différents intervenants, mais appliquer un seuil au niveau national me semble prématuré. C’est la raison pour laquelle je demande le retrait de ces amendements ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Je voudrais souligner une contradiction : en défendant l’amendement n° 1425, Mme Filleul expliquait qu’il fallait laisser les surfaces se développer naturellement. Mais quelles surfaces se développent naturellement sinon celles où il y a eu coupe rase ? Dans l’amendement suivant, vous ne voulez plus de coupe rase !
Il faut aussi faire attention à l’enjeu social. Les propriétaires font généralement ces coupes rases quand ils ont besoin d’argent, par exemple pour payer l’Ehpad du grand-père… Soyons attentifs : derrière ces coupes, on trouve des questions de gestion du patrimoine, d’héritage… Si on ne peut plus faire de coupes, ce petit patrimoine ne vaudra plus rien. Croyez-vous qu’un débardeur, en montagne, va monter pour tirer trois arbres ou que le marchand de bois va se déplacer s’il ne remplit pas un camion ?
Tous ces enjeux économiques, sociaux, écologiques doivent être pris en compte. Il y a un juste milieu à trouver en laissant les mentalités évoluer progressivement, surtout pas en posant des interdits qui bloqueraient le peu de gens qui sont encore de bonne volonté.
M. le président. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.
M. Daniel Salmon. L’amendement de notre groupe ne pose pas d’interdiction stricto sensu. Il s’agit d’un renversement pour assurer un contrôle sur ce qui est coupé.
Comme cela a été souligné, les coupes rases peuvent se justifier pour des raisons sanitaires ou quand la forêt est arrivée à maturité complète, mais il faut les encadrer. À défaut, on retrouvera ces grandes incompréhensions, ces débats sociétaux… La forêt est un patrimoine commun qu’il faut appréhender en tant que tel.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Corbisez, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Corbisez. Je comprends l’intervention de M. Savary et son souci de l’intérêt social.
Madame la secrétaire d’État nous demande d’être vigilants et Mme la rapporteure pour avis de faire confiance au contrôle sur le terrain. Mais, pour être vigilant et procéder aux bons contrôles, mieux vaut disposer de bons éléments législatifs. C’est pour cette raison que je maintiens mon amendement.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 553 rectifié bis, 1101, 1426 et 1881.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 1882, présenté par MM. Labbé, Dantec, Salmon, Fernique et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :
Après l’article 19 bis D
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 124-5 du code forestier est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est ainsi modifié :
a) Après le mot : « département », sont insérés les mots : «, ou sur tout ou partie d’un parc naturel régional, » ;
b) Sont ajoutés les mots : « et du syndicat mixte de gestion du parc naturel régional si la coupe est comprise dans son périmètre » ;
2° Le deuxième alinéa est ainsi modifié :
a) Après le mot : « département », sont insérés les mots : « ou sur tout ou partie d’un parc naturel régional, » ;
b) Sont ajoutés les mots : « et le cas échéant du syndicat mixte de gestion du parc naturel régional » ;
3° Le troisième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « Le traitement de cette autorisation prend en compte le respect des caractéristiques paysagères et environnementales locales. »
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. Le football est à l’honneur en ce moment, et, même si nous ne suivons pas les matchs, parce que nous sommes au boulot, nous nous y intéressons. Quand une équipe attaque sans succès, elle se replie pour mieux réattaquer ; c’est ce que je fais avec cet amendement de repli (Sourires), que je n’ai pu défendre en commission tant les choses sont allées vite. Ce n’est pas un reproche, nous étions tenus d’avancer à marche forcée…
Je tiens à défendre cet amendement en séance, avec force. Il s’agit d’encadrer les coupes rases non plus de manière globale, mais en lien avec les associations de syndicats mixtes des parcs naturels régionaux.
Le code forestier permet aux préfets d’adapter le seuil d’autorisation des coupes d’un seul tenant, dites coupes rases, à un département, mais il ne permet pas de l’adapter à l’échelle d’un parc naturel régional (PNR). Cette incapacité d’adaptation aux enjeux spécifiques de ces territoires, pourtant particuliers sur le plan écologique et paysager, ne permet pas de répondre de manière efficace aux dynamiques identifiées dans les chartes de parcs, comme cela a été souligné lors de leur récente révision.
Les élus des parcs se sont souvent trouvés très démunis pour apporter une réponse à leur population sur la question des coupes rases. Cet amendement tend donc à permettre aux préfets de département de fixer, en lien avec les syndicats mixtes à l’échelle d’un PNR ou d’une partie de PNR, un seuil d’autorisation de coupe de bois et forêts, comme ils peuvent le faire aujourd’hui à l’échelle du département. Les parcs naturels régionaux disposent d’une charte qui permet de justifier les objectifs d’une telle mesure et de définir la zone sur laquelle elle doit être mise en œuvre.
Cet amendement vise également à inscrire dans la loi l’exigence de prise en compte des caractéristiques paysagères et environnementales du territoire. Il a été travaillé avec la Fédération nationale des parcs naturels régionaux – ces parcs sont des territoires exemplaires, des territoires d’exception qui doivent nous tirer vers le haut.
M. le président. Il faut conclure, cher collègue !
M. Joël Labbé. L’adoption de cet amendement serait une grande satisfaction.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 1082 rectifié quater est présenté par MM. P. Joly et Bourgi, Mmes Bonnefoy, Conway-Mouret et Jasmin, MM. Lurel et Pla, Mme Artigalas, MM. Michau, Redon-Sarrazy et Jomier, Mme Rossignol, MM. Tissot et Durain, Mmes Meunier et Poumirol, MM. Jeansannetas, Lozach et Kerrouche, Mme Féret et M. Cozic.
L’amendement n° 1298 rectifié bis est présenté par Mme Lienemann, M. Gay, Mme Varaillas et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 19 bis D
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre IV du titre II du code forestier est complété par une section ainsi rédigée :
« Section …
« Autorisations de coupes dans les zones de montagne, dans les parcs nationaux et dans les parcs naturels régionaux
« Art. L. 124-7. – Dans les zones de montagne, les coupes rases ou récoltant plus de la moitié du volume des arbres de futaie, d’une surface supérieure à 0,5 hectare, sont soumises à autorisation.
« L’autorisation de coupe est délivrée, en fonction de critères sylvicoles, environnementaux et sanitaires, après avis du Centre national de la propriété forestière pour les bois et forêts des particuliers, ou de l’Office national des forêts pour les forêts publiques par :
« Le parc, dans les parcs nationaux et parcs naturels régionaux qui souhaitent exercer cette compétence.
« Le représentant de l’État dans le département, en dehors des parcs nationaux et parcs naturels régionaux qui souhaitent exercer cette compétence.
« Art. L. 124-8. – Dans les parcs nationaux et parcs naturels régionaux, hors zone de montagne, les coupes rases ou récoltant plus de la moitié du volume des arbres de futaie, d’une surface supérieure à un seuil fixé par le parc, sont soumises à autorisation.
« Le seuil de surface est fixé, et l’autorisation de coupe est délivrée, en fonction de critères sylvicoles, environnementaux et sanitaires après avis du Centre national de la propriété forestière pour les bois et forêts des particuliers, ou de l’Office national des forêts pour les forêts publiques par :
« Le parc, dans les parcs nationaux et parcs naturels régionaux qui souhaitent exercer cette compétence.
« Le représentant de l’État dans le département, en dehors des parcs nationaux et parcs naturels régionaux qui souhaitent exercer cette compétence. »
La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy, pour présenter l’amendement n° 1082 rectifié quater.
M. Christian Redon-Sarrazy. Je vais aller dans le même sens que M. Labbé, peut-être pas avec la même fougue, mais avec la même détermination.
Les coupes rases de forêts peuvent avoir des impacts très négatifs sur l’environnement : paysage, sols, biodiversité, cycle du carbone, cycle de l’eau… Malheureusement insuffisamment encadrée par le législateur, cette pratique est aujourd’hui trop fréquente, ce qui conduit à de nombreux abus. Vous avez d’ailleurs souligné, madame la secrétaire d’État, que beaucoup de nos concitoyens exprimaient leur émotion devant ces coupes rases.
Ces risques sont encore plus élevés dans les zones de montagne, car l’impact paysager est plus fort qu’en plaine, avec un risque accru d’érosion des sols.
Dans les aires censées être protégées que sont les parcs nationaux et les parcs naturels régionaux, on constate aujourd’hui un manque d’outils juridiques pour réguler ces coupes.
Cet amendement vise donc à mieux réguler cette pratique, en particulier dans les zones de montagne et les parcs.
M. le président. La parole est à M. Jérémy Bacchi, pour présenter l’amendement n° 1298 rectifié bis.
M. Jérémy Bacchi. Depuis plusieurs années, citoyens, élus, associations de protection de l’environnement s’élèvent contre les coupes rases dans les forêts publiques et privées. Aussi appelées coupe à blanc, elles se définissent par un abattage de la totalité des arbres ou d’une parcelle d’une forêt.
Cette pratique est malheureusement croissante, car nos forêts françaises sont en voie d’industrialisation : plantations, monocultures, coupes rases… Cette pratique est pourtant contraire aux principes écologiques définis dans la Charte de l’environnement et en préambule du code forestier : « Sont reconnus d’intérêt général […] la conservation des ressources génétiques et de la biodiversité forestières ; […] la fixation du dioxyde de carbone par les bois et forêts et le stockage de carbone dans les bois et forêts, […], contribuant ainsi à la lutte contre le changement climatique. »
En outre, plus de la moitié du carbone stocké en forêt l’est dans les sols. Or la coupe rase en libère une partie dans l’atmosphère. L’arrachage des souches, la mise en andains et le travail du sol qui s’ensuivent amplifient encore la libération du carbone, et ce pendant plusieurs décennies.
La mise à nu des sols amplifie leur dégradation. Pour lutter contre le dérèglement climatique, nous devons renforcer le rôle des forêts comme puits de carbone. C’est le sens de notre amendement, qui tend à encadrer les coupes rases dans les zones de montagne, dans les parcs nationaux et dans les parcs naturels régionaux.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour avis. La commission a clairement affirmé son souhait de lutter contre les pratiques abusives. C’est en ce sens que nous avons cranté la protection de la biodiversité, la protection des sols dans le code, de manière à donner des outils juridiques aux préfets et au CNPF, qui instruisent les plans de gestion et donc les coupes. Ils pourront en faire usage dans leur dialogue avec les propriétaires installés dans le périmètre des parcs naturels régionaux.
Ces derniers disposent également d’outils : chartes forestières, plans de développement de massif, plans de zones sensibles, plans relatifs au cône paysager… Beaucoup d’outils qui doivent peut-être être davantage mis au service de la biodiversité, de l’acceptabilité dans ces territoires et davantage pris en compte par les préfets, qui pourront se référer à ce que nous avons inscrit dans le code forestier.
Je souligne enfin que des expérimentations sont menées en ce sens dans le parc naturel régional du Morvan, dont j’ai été la vice-présidente durant une quinzaine d’années. Il s’agit d’assurer une concertation et un dialogue grandissant avec les préfets, garants de ces équilibres territoriaux.
Pour ces raisons, la commission demande le retrait de ces amendements ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État. Le travail mené dans le cadre de la charte du PNR du Morvan montre que ces décisions peuvent tout à fait s’appliquer, dès lors que les débats ont lieu en concertation.
Par ailleurs, ces éléments ne contreviennent pas forcément au cadre administratif actuel de contrôle des coupes d’un seul tenant.
J’entends le message et l’appel à faire en sorte que les parcs naturels régionaux et les parcs nationaux soient le lieu de ces débats et des premières limitations des coupes. Toutefois, une inscription dans la loi ne me semble pas nécessaire, raison pour laquelle je suis défavorable à ces trois amendements.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 1082 rectifié quater et 1298 rectifié bis.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 1883, présenté par MM. Labbé, Dantec, Salmon, Fernique et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :
Après l’article 19 bis D
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l’article L. 124-6 du code forestier est complété par deux phrases ainsi rédigées : « Ces mesures de renouvellement respectent une diversité et un mélange d’essences, en privilégiant les essences locales, dans un objectif d’adaptation des forêts au changement climatique. Les schémas régionaux de gestion sylvicole définissent les modalités d’application de cette obligation. »
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. Je passe à une nouvelle contre-attaque… (Sourires)
Une fois de plus, cet amendement vise à promouvoir la diversité des essences, notion déjà incluse dans l’article 19 bis D. Comme je l’ai déjà souligné, le mélange des essences est un levier essentiel de la résilience des forêts françaises, fortement impactées par le changement climatique et les diverses crises sanitaires. Les monocultures, plus sensibles au changement climatique, aux tempêtes, aux invasions d’insectes, ont montré leurs limites dans de nombreux cas.
Si de nombreuses incertitudes demeurent toujours sur l’adaptation des forêts au changement climatique, les scientifiques et les acteurs de terrain s’accordent sur un point : pour améliorer la résilience des forêts au risque climatique et leur adaptation à des variations écologiques locales difficilement prévisibles, le maintien d’une diversité maximale en structure et en essences locales est la solution à même de minimiser les risques.
Cet amendement vise donc à prévoir que les mesures prises après une coupe rase pour assurer, en l’absence d’une régénération ou reconstitution naturelle satisfaisante, le renouvellement des peuplements forestiers respectent une diversité d’essences, en privilégiant les essences locales. Les schémas régionaux de gestion sylvicoles pourront définir les modalités de mise en œuvre de cette disposition pour préserver une certaine souplesse et une bonne prise en compte des spécificités locales.
M. le président. L’amendement n° 817, présenté par M. Gay, Mme Varaillas et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 19 bis D
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l’article L. 124-6 du code forestier est complété par deux phrases ainsi rédigées : « Ces mesures de renouvellement respectent une diversité des essences, en privilégiant les essences locales, dans un objectif d’adaptation des forêts au changement climatique. Les schémas régionaux de gestion sylvicole définissent les modalités d’application de cette obligation. »
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Cet amendement vise également à assurer le renouvellement des peuplements forestiers après une coupe rase.
La feuille de route pour l’adaptation de la forêt au changement climatique est assez claire : si la forêt a bénéficié pendant plus d’un siècle de conditions favorables à son développement, le changement climatique et son cortège de phénomènes extrêmes affectent désormais sa vitalité.
Pour assurer la vitalité et la résilience de la forêt, notamment son adaptation à des variations écologiques locales difficiles à prévoir, il faut maintenir une diversité maximale en structure et en essences locales, ce dont nous avons beaucoup débattu lors de l’examen de l’article 19 bis D. Les forêts composées d’une diversité d’essences sont en effet mieux armées pour faire face aux manifestations actuelles et futures du changement climatique que les forêts plus homogènes. Les ravageurs, en particulier les insectes, progressent moins vite dans les peuplements mélangés. Les épicéas, par exemple, accompagnés d’autres essences, résistent bien mieux aux scolytes. Avec un plus grand nombre d’essences, la lumière est plus diffuse, ce qui favorise la flore et donc le développement de la faune.
En outre, sur le plan économique, si l’espace boisé est plus important, le capital de bois sur pied progresse, ce qui devrait rassurer mon collègue Savary.
M. René-Paul Savary. Merci !
Mme Laurence Cohen. Cet amendement vise donc à prévoir que les mesures prises après une coupe rase pour assurer le renouvellement des peuplements forestiers respectent une diversité des essences, en privilégiant les essences locales, afin d’adapter les forêts au changement climatique. Les schémas régionaux de gestion sylvicole définiront les modalités de mise en œuvre de cette disposition pour préserver une certaine souplesse et une bonne prise en compte des spécificités locales.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour avis. Les auteurs de ces amendements veulent rendre obligatoire la diversification des essences replantées après une coupe d’un seul tenant.
La commission est tout à fait favorable à la diversification des essences. À cet égard, madame la secrétaire d’État, l’ajout de quelques outils fiscaux et incitatifs dans le prochain projet de loi de finances pourrait constituer un levier intéressant. Par contre, privilégier les essences locales ne nous semble pas opportun. Avec le changement climatique, les essences dites aujourd’hui locales ne sont pas forcément les plus adaptées dans la durée. C’est la raison pour laquelle l’article 19 bis D invoque d’autres techniques comme la migration des essences, par exemple, qui consiste à reprendre les essences quelques centaines de kilomètres plus bas pour les adapter. Ces outils nous semblent vraiment essentiels.
Parce qu’il faut aborder les stations avec beaucoup de pragmatisme, comme pour tout ce qui concerne la gestion du naturel, je vous demande, mes chers collègues, de bien vouloir retirer vos amendements ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État. La diversification des essences est une préoccupation totalement partagée, mais je tique sur la volonté de privilégier les essences locales. Nous savons que le changement climatique et la nécessité d’un renouvellement des forêts ne nous permettent malheureusement pas de camper sur une telle position : nous ne saurions nous enfermer avec des espèces qui peuvent s’avérer beaucoup plus vulnérables qu’en d’autres temps.
Si le souci de préserver les essences locales et a fortiori de se prémunir contre des essences exotiques à caractère invasif est évidemment partagé, nous devons néanmoins nous réserver la possibilité de recourir à des essences exotiques si leur introduction se révèle judicieuse pour le renouvellement des forêts dans le contexte du changement climatique.
Je demande donc aux auteurs de ces amendements de bien vouloir les retirer ; à défaut, l’avis du Gouvernement sera défavorable.
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.
M. Joël Labbé. Je n’ai pas vraiment l’habitude de recourir à cette procédure, mais pourquoi ne pas rectifier l’amendement en remplaçant les mots « essences locales » par les mots « essences adaptées aux conditions locales » ?
M. le président. L’avis de la commission des affaires économiques s’en trouverait-il modifié ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour avis. Cette précision pourrait être intéressante, mais l’obligation qui est prévue me pose problème.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. La proposition de notre collègue, me semble-t-il, ouvre la porte à une solution. On l’a bien vu, la réponse de Mme la secrétaire d’État était embarrassée : elle trouvait nos deux amendements intéressants, mais ce n’était pas tout à fait ça…
En la matière, il y a un vide. Il nous incombe de le combler. Faisons toutes et tous un effort : acceptons cette rectification. Tout le monde y trouvera satisfaction, en premier lieu l’environnement !
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires économiques.
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Il ne s’agit pas de petits aménagements : aux termes de la dernière phrase du dispositif proposé par ces amendements, « les schémas régionaux de gestion sylvicole définissent les modalités d’application de cette obligation ». Or notre rapporteure pour avis ne veut pas d’une obligation. Ce n’est donc pas seulement une question de mots.
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.
M. Guillaume Gontard. J’ai un petit peu de mal à comprendre les avis émis sur ces amendements.
Madame la rapporteure pour avis, madame la secrétaire d’État, vous dites être parfaitement d’accord et reconnaissez la nécessité, après une coupe rase, de respecter une diversité des essences. La difficulté soulevée concerne le caractère strictement local des essences privilégiées. La rectification proposée par Joël Labbé me paraît y répondre. On nous dit maintenant que c’est l’obligation qui pose problème. Mais à quoi peut donc bien servir une disposition législative sans obligation ? Il me semble plutôt que cette proposition va clairement dans le bon sens.
Surtout, je ne comprends plus ce que vous venez de nous dire sur les coupes rases, à savoir qu’on pouvait les autoriser dans certaines circonstances, en vue de replanter. Bien sûr qu’il faut replanter ! Or si l’on veut replanter en adaptant les essences au changement climatique, la diversité est indispensable. Notre proposition va donc totalement dans le sens de la logique que vous avez vous-mêmes posée.
Je demande donc plus d’explications, car j’avoue ne pas comprendre.
M. le président. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.
M. Daniel Salmon. La forêt, comme je le disais précédemment, a de nombreux usages, et les aménités forestières, notamment, doivent être valorisées. On ne saurait gérer une forêt comme on gère un champ de maïs : l’uniformité nuit à la résilience de la forêt – on le sait très bien. Quand les sujets sont tous identiques, dès qu’un ravageur arrive, c’est toute la forêt qui disparaît. La diversification des plantations au sein d’une parcelle est indispensable si l’objectif est la résilience de la forêt.
Puisque notre proposition de rectification ne suffit pas, essayons autre chose : supprimons l’obligation et écrivons « en privilégiant la diversité sur une parcelle » au lieu d’écrire « en privilégiant les essences locales ». Là, nous serons allés au bout du bout ; cela vous conviendrait-il ?
M. le président. La parole est à Mme la rapporteure pour avis.
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques. Pour le coup, cette dernière proposition est satisfaite par les amendements que nous avons adoptés à l’article 19 bis D. Nous avons dit et redit que nous souhaitions privilégier les mélanges d’essences.
Nous sommes d’accord sur le principe de la diversification, mais soyons conscients que la diversification engendre un certain nombre de contraintes d’entretien. C’est pourquoi j’ai parlé précédemment de dispositifs d’accompagnement.
Vous vous souvenez que la mise en place du plan de relance forestier a occasionné un tas de débats sur l’opportunité de conditionner les aides au respect de certaines exigences en matière de mélange des essences. Ce débat va revenir, et je vous invite tous à le remettre sur la table lorsque nous examinerons le prochain projet de loi de finances : si l’on choisit d’aider, aidons davantage les pratiques identifiées comme vertueuses. Le cas échéant, nous disposerons d’un vrai levier.
Un autre élément me gêne dans l’obligation – je l’ai déjà évoqué – : on obligerait les exploitants de toutes petites parcelles de quelques ares à diversifier, alors que la diversification n’y est pas forcément opportune. C’est donc le principe même de l’obligation qui, d’une manière générale, pose problème.
Je vous rejoins sur les enjeux et sur les objectifs, mais je pense que nous avons d’autres outils pour y parvenir. Nous pourrons y travailler dans les prochains mois dans le cadre du groupe d’études Forêt et filière bois du Sénat.
M. le président. L’amendement n° 1827, présenté par Mme Loisier, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Après l’article 19 bis D
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le dernier alinéa de l’article L. 131-10 du code forestier est complété par une phrase ainsi rédigée : « Dans les territoires qui ne sont pas réputés particulièrement exposés aux risques d’incendie au sens de l’article L. 133-1, le maire ou le président de l’établissement public de coopération intercommunale peut arrêter les modalités de mise en œuvre du débroussaillement selon la nature des risques, après avis conforme du représentant de l’État dans le département. »
La parole est à Mme la rapporteure pour avis.
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques. Il s’agit de donner aux maires ou aux présidents d’intercommunalité la possibilité d’édicter des obligations légales de débroussaillement (OLD) dans les territoires où il existe des risques émergents d’incendie.
Vous le constatez tous, mes chers collègues, notamment ceux qui sont issus de territoires situés dans la partie nord de l’Hexagone, le risque d’incendie monte avec les températures – je pense aux parcelles sinistrées ou dépérissantes, qui sont totalement sèches, parfois situées en bord de route, aux abords des habitations. Le risque est grandissant, mais il peut être épars ; les préfets des départements concernés n’ont donc pas forcément pris d’arrêtés permettant la mise en œuvre d’OLD.
L’idée est donc de créer un dispositif dont pourraient se saisir des maires lanceurs d’alerte. Ceux-ci, identifiant un risque émergent sur leur territoire, pourront, après avis conforme du préfet, engager des actions de débroussaillement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État. Vous proposez d’accorder aux maires ou aux présidents d’EPCI la possibilité de définir eux-mêmes les modalités de débroussaillement. Or, en matière de feux de forêt, les actions sont définies à l’échelle du massif forestier, condition nécessaire de leur efficacité et de leur lisibilité.
Si la commune devait devenir l’échelle de référence, on aurait des règles variables d’une commune à l’autre, ce qui rendrait la réglementation sur les OLD, qui est déjà complexe, très difficilement compréhensible. Cette mesure ne me semble donc pas souhaitable. L’avis est défavorable.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 19 bis D.
L’amendement n° 1888 rectifié, présenté par MM. Labbé, Dantec, Salmon, Fernique et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :
Après l’article 19 bis D
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 141-1 du code forestier est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L’action des pouvoirs publics tend à ce que, au plus tard au 1er janvier 2030, tous les bois et forêts, hors forêts de production, situés à la périphérie des grandes agglomérations soient classés en forêts de protection. »
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. Il arrive qu’on en ait un peu marre : on irait bien faire un petit tour… « Hé, j’crois qu’j’ai besoin d’un peu d’air frais, d’une balade en forêt. » Ces paroles sont de circonstance ; elles sont de mon ami Guizmo – c’est pour vous, madame la secrétaire d’État. (Sourires.)
Les forêts et les bois qui bordent nos villes jouent un rôle de poumon vert utile pour la lutte contre les îlots de chaleur et pour le stockage du carbone. Ils rendent à nos concitoyens qui vivent dans de grandes agglomérations un nombre important de services écosystémiques – cycle de l’eau, biodiversité, paysages – et récréatifs.
Ces massifs périurbains sont trop souvent menacés par l’artificialisation des sols. Les services qu’ils rendent justifieraient pourtant leur classement en « forêt de protection », statut qui permet de protéger durablement les boisements et forêts.
Une forêt est éligible à ce statut protecteur lorsqu’est reconnu son rôle pour la préservation de la sécurité des riverains contre certains risques naturels ou pour la santé et la qualité de vie des habitants de zones urbanisées, ou encore lorsqu’elle abrite des écosystèmes particulièrement sensibles. Cette reconnaissance permet de la protéger, de la gérer ou de la restaurer en garantissant ses propriétés protectrices.
Dès 1979, une circulaire du ministre de l’agriculture adressée aux préfets indique que les principaux massifs forestiers proches des grandes agglomérations ont vocation à être classés en forêt de protection. Ce même objectif est explicitement mentionné dans une circulaire de 1992 du ministère de l’agriculture et de la forêt, sur la mise en œuvre de la politique relative aux forêts périurbaines, qui précise que l’action des préfets doit viser, pour ces forêts, « le classement progressif en forêt de protection des massifs les plus exposés ».
Depuis, les pouvoirs publics ont régulièrement continué d’affirmer que le statut de forêt de protection était le plus adapté aux forêts périurbaines et à la lutte contre les pressions d’artificialisation qu’elles subissent. Pourtant, les forêts périurbaines ne bénéficiant pas de ce statut sont encore trop nombreuses. Dès lors, ce principe de classement des forêts périurbaines en forêt de protection mérite d’être porté au niveau législatif afin de rendre enfin effectif l’objectif fixé dans les textes auxquels j’ai fait référence.
Il est donc proposé de préciser que les pouvoirs publics veillent à ce que, d’ici au 1er janvier 2030, tous les bois et forêts situés à la périphérie des grandes agglomérations soient classés en forêt de protection.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour avis. Le classement en forêt de protection est effectivement un outil intéressant du code forestier, qui est de plus en plus utilisé. La commission n’est toutefois pas favorable – vous le savez, mon cher collègue – à un objectif de classement systématique. Elle souhaite demeurer dans le régime actuel, qui fonctionne au cas par cas, selon les souhaits exprimés par les collectivités.
J’ajoute que la stratégie nationale pour les aires protégées va entraîner le classement de près de 70 000 hectares de forêt métropolitaine sous protection forte. Votre souhait et vos attentes seront donc en partie satisfaits. C’est pourquoi je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État. Je partage l’argument qui vient d’être développé : l’outil est certes efficace – en Île-de-France, par exemple, il est déjà largement mobilisé –, mais la systématisation du classement ne me semble pas appropriée. Il faut plutôt faire selon les territoires, selon les espaces, selon la superficie des forêts. Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.
M. le président. Monsieur Labbé, l’amendement n° 1888 rectifié est-il maintenu ?
M. Joël Labbé. J’ai eu un jour la chance de faire un voyage d’études à Stockholm pour travailler sur la question des sociotopes, où peuvent cohabiter, précisément, l’humain et la biodiversité.
À Stockholm, toutes les forêts qui entourent la ville sont hyperprotégées depuis plus de cinquante ans. Elles jouent un rôle absolument magnifique, et des percées en ville font qu’aucun habitant ne vit à moins de deux cents mètres d’un couloir l’emmenant en forêt.
M. Philippe Pemezec. Eh bien, allez donc y vivre !
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 1427 rectifié est présenté par MM. Montaugé et Gillé, Mme M. Filleul, MM. J. Bigot et Kanner, Mme Bonnefoy, MM. Dagbert, Devinaz, Houllegatte et Jacquin, Mmes Préville, Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy et Tissot, Mme G. Jourda et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 1887 est présenté par MM. Labbé, Dantec, Salmon, Fernique et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 19 bis D
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À partir du 1er janvier 2022, les exportations de grumes non transformées sont interdites en dehors de l’Union européenne dans des conditions définies par décret.
La parole est à Mme Gisèle Jourda, pour présenter l’amendement n° 1427 rectifié.
Mme Gisèle Jourda. La rédaction actuelle de l’alinéa 5 de l’article 19 bis EB, introduit par la rapportrice pour avis et que nous examinerons dans quelques instants, prévoit que la politique forestière favorise la mobilisation des dispositifs incitatifs ou contractuels visant à ce que la transformation du bois d’œuvre se fasse sur le territoire de l’Union européenne.
Si nous partageons cet objectif, nous le considérons comme un minimum ; la situation actuelle exige une décision plus radicale. Il faut en effet rappeler qu’actuellement 17,5 % de la récolte de chêne français est exportée en Chine du fait du moindre coût de la main-d’œuvre dans ce pays.
À l’heure où nous nous accordons tous sur la nécessité de relocaliser nos productions comme l’ont fait d’autres pays comme l’Allemagne, la Bulgarie, la Croatie et la Hongrie, le présent amendement vise à mettre un terme à cette pratique afin notamment de garantir l’avenir des petites et moyennes scieries ainsi qu’un débouché solide pour le bois français.
L’adoption de cet amendement rendrait évidemment inopérant le dispositif prévu à l’article 19 bis EB, qui est moins-disant.
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour présenter l’amendement n° 1887.
M. Joël Labbé. Je précise, en complément de ce que vient de dire ma collègue, que le travail sur la grume génère des coproduits, qui représentent environ 50 % de la masse de la grume. Ces coproduits constituent un gisement de bois d’industrie et de bois énergie qui, contrairement à la récolte directe de bois en forêt, ne diminue pas le puits de carbone forestier.
Transformer les grumes en France, c’est donc conserver ces coproduits sur le territoire et contribuer, via leur valorisation, à diminuer l’empreinte carbone de la France. La transformation des grumes sur le territoire national est en outre créatrice d’emplois – on compte, par exemple, 26 000 emplois pour la seule essence du chêne.
L’exportation de bois brut induit par ailleurs une perte cumulée de valeur tout au long de la chaîne : TVA, cotisations, fiscalité locale.
Le départ des grumes hors Union européenne, qui est actuellement massivement pratiqué, est donc pénalisant pour les industries hexagonales, notamment pour les petites et moyennes, qui mériteraient de se développer mais sont privées de matières premières à transformer.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour avis. Nous partageons évidemment cette inquiétude. L’exportation massive de grumes non transformées menace en effet nos forêts, mais aussi l’approvisionnement durable de nos entreprises. Elle alourdit de surcroît notre bilan carbone, obérant la stratégie nationale bas-carbone.
La difficulté est de proposer un dispositif qui soit compatible avec le droit européen – à cette condition seulement pourra-t-il prospérer – et qui ne fragilise pas les dispositifs que nous avons mis en place jusqu’à présent, notamment le label « Transformation UE » pour les forêts publiques, communales et domaniales. Quoique leur succès soit modéré, ces dispositifs fonctionnent. Il ne faudrait pas non plus porter préjudice à un certain nombre de démarches qui ne manqueront pas d’être engagées au niveau européen dans quelques mois, quand la France assurera la présidence de l’Union européenne – Mme la secrétaire d’État nous en parlera certainement.
Un nouvel outil vous sera proposé d’ici à quelques minutes ; nous y avons travaillé en concertation avec le Gouvernement. Vous le voyez, ce dossier est en construction, et je crains qu’une position trop frontale au regard du droit européen ne nous soit en définitive préjudiciable.
D’autres pistes seront explorées : quotas d’exportation, critères phytosanitaires, critères de réciprocité – comme vous l’avez très justement dit, ma chère collègue, ces mêmes pays qui achètent aujourd’hui massivement nos bois sont ceux qui ont fermé leurs frontières. Pour nous permettre d’atteindre notre objectif d’une meilleure maîtrise, il faut que nous fassions en sorte que ces outils soient compatibles avec le droit européen, condition de leur efficacité.
Je demande aux auteurs de ces amendements de bien vouloir les retirer ; à défaut, l’avis de la commission sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État. L’interdiction de l’exportation de grumes se heurte au traité sur le fonctionnement de l’Union européenne et aux règlements qui y sont associés. Vous le savez, les dispositifs d’exception relatifs à la prise de mesures de sauvegarde en réponse à des évolutions exceptionnelles du marché sont à la main de l’Union, et non à celle des États membres. Les restrictions prévues sont assorties de critères limités, qui tiennent essentiellement à l’ordre public et à la santé. La lutte contre la pénurie de bois ne peut pas entrer dans ces critères. La France ne peut donc pas, de son propre chef, édicter des mesures de restriction à l’exportation de bois vers des pays tiers.
J’ajoute que, malheureusement – vous le savez –, cette interdiction n’empêcherait pas l’exportation extracommunautaire de grumes, puisque l’essentiel des exports transite déjà par de grands ports situés en Europe du Nord, et ce au détriment de notre activité portuaire.
Nous sommes attentifs à la situation et aux alertes qui nous ont été adressées ; j’ai d’ailleurs longtemps travaillé sur le sujet avec le groupe d’études Forêt, bois, nouveaux usages et industrie du bois de l’Assemblée nationale lorsque j’étais députée. Dans la perspective d’une meilleure prise en compte des effets environnementaux induits par ces pratiques, nous vous renvoyons dès maintenant à l’amendement n° 2280, assorti d’un sous-amendement proposé par Mme la rapporteure pour avis, qui vise à réglementer la profession d’exploitant forestier et les activités d’export de grumes.
Sur les présents amendements, l’avis du Gouvernement est défavorable.
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.
M. Joël Labbé. J’ai un regret et une incompréhension : l’Allemagne, la Bulgarie, la Croatie et la Hongrie sont des pays européens ; eux ont pris de telles mesures d’interdiction ou de limitation des exportations de grumes. Si certains de nos voisins l’ont fait, et à supposer que nous en ayons la volonté politique, nous devons avoir l’audace de le faire aussi.
M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour explication de vote.
Mme Angèle Préville. Comme mon collègue Joël Labbé, je m’interroge : si d’autres pays ont interdit ces exportations, pourquoi ne le pouvons-nous pas ? J’ajoute que la Russie va interdire elle aussi, à partir du 1er janvier 2022, les exportations de grumes vers la Chine. Et nous, que faisons-nous ? Si nous ne faisons rien, puisqu’un marché s’ouvre, nous pouvons nous douter que, mécaniquement, nos exportations augmenteront.
Chez nous, les scieries ont fermé massivement : de 15 000 scieries dans les années 1960, nous sommes passés à 1 500 aujourd’hui. On parle beaucoup de réindustrialisation de notre pays ; en l’espèce, il y a un vrai sujet.
J’ai cru comprendre également que les machines dont nous disposions actuellement étaient développées par les pays nordiques et adaptées aux troncs d’arbre beaucoup plus fins des essences venant de ces pays. Autrement dit, nous avons perdu la capacité de traiter des arbres plus gros. Nous devons absolument nous pencher sur ce problème et trouver des solutions.
Il y va aussi, tout simplement, d’une perte de richesse : les grumes de chêne sont après tout une matière noble, qui finit par nous revenir transformée. Là encore, penchons-nous sur cette question de la ressource que nous perdons et des conditions dans lesquelles, en bout de chaîne, nous la récupérons.
M. le président. La parole est à Mme Gisèle Jourda, pour explication de vote.
Mme Gisèle Jourda. Mon intervention s’inscrit dans le droit fil de ce que viennent de dire mes collègues Joël Labbé et Angèle Préville.
Alors que l’Union européenne vient de suspendre, pour divers motifs, le processus de ratification de l’accord global sur les investissements, comment se fait-il que certains pays européens puissent prendre des mesures en matière d’exportations vers la Chine et que nous ne puissions en faire de même ? Vous arguez que c’est impossible et qu’il faut s’accommoder du statu quo. C’est incompréhensible !
Notre rapportrice pour avis a travaillé de manière positive. Quant à nous, ce n’est pas une révolution que nous proposons : nous souhaitons simplement garantir la préservation de nos filières, ce qui n’est pas du tout incompatible, à mon sens, avec ce qui se passe au niveau de l’Union européenne. L’Union a d’ailleurs pris conscience de ce que représente la Chine par rapport aux marchés contractés à l’échelle mondiale. Et si l’on observe aujourd’hui une prise de conscience et la naissance d’un regard distancié sur la Chine, le Gouvernement n’y est pas étranger. Tout en l’accompagnant dans sa transformation énergétique, il faut faire attention à la Chine comme rival systémique.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 1427 rectifié et 1887.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 1829, présenté par Mme Loisier, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Après l’article 19 bis D
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport évaluant l’impact de la mise en œuvre de l’action 24 du plan Biodiversité, prévoyant que les agences de l’eau consacrent 150 millions d’euros d’ici 2021 à de nouveaux outils de paiement pour services environnementaux. Ce rapport évalue la faisabilité de l’extension de ces nouveaux outils aux bois et forêts et évalue l’impact qu’aurait une telle extension sur la préservation des écosystèmes forestiers. Il propose des orientations sur les modalités de financement et de gestion de ces paiements pour services environnementaux étendus aux bois et forêts.
La parole est à Mme la rapporteure pour avis.
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques. Une expérimentation lancée en 2018 a permis de payer des agriculteurs afin de rétribuer leurs pratiques vertueuses et respectueuses de l’environnement. Cet amendement vise à évaluer cette expérimentation et à étudier l’opportunité de l’étendre aux exploitants forestiers, comme l’une de nos collègues l’a proposé précédemment.
L’objectif est donc à la fois de pérenniser les paiements pour services environnementaux versés aux agriculteurs et de réfléchir à de nouveaux PSE dont pourraient bénéficier les forestiers, ce qui les aiderait à financer toutes les aménités de la forêt.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État. L’amendement de Mme la rapporteure pour avis vise à ce que le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur les paiements pour services environnementaux. Prévus par le plan Biodiversité pour rémunérer les agriculteurs en proportion du service qu’ils rendent à la collectivité et des résultats effectifs qu’ils obtiennent grâce à leurs changements de pratiques, ces PSE sont en cours de déploiement sur l’ensemble du territoire. L’accompagnement technique et financier des agences de l’eau est financé via un budget de 150 millions d’euros engagé sur trois ans, les contrats passés avec les agriculteurs étant d’une durée de cinq ans.
L’impact de ce dispositif ne sera donc pas évaluable dès l’année prochaine. À ce stade, plus de 130 projets de paiements pour services environnementaux impliquant 400 agriculteurs ont déjà été engagés par les agences de l’eau et les collectivités. Nous publierons un bilan de cette expérimentation, qui a d’ailleurs pleinement vocation à inspirer la prochaine PAC. Cette évaluation comprendra des pistes de réflexion concernant notamment l’opportunité d’étendre les PSE à d’autres objets, y compris la forêt ; mais nous ne sommes pas encore en mesure de le faire.
Je demande donc le retrait de l’amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 19 bis D.
L’amendement n° 1423, présenté par Mme M. Filleul, MM. J. Bigot, Montaugé et Kanner, Mme Bonnefoy, MM. Dagbert, Devinaz, Gillé, Houllegatte et Jacquin, Mmes Préville, Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 19 bis D
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’adéquation des moyens financiers et humains apportés par l’État et nécessaires à l’accomplissement des objectifs qu’il se fixe en matière de politique forestière.
La parole est à Mme Martine Filleul.
Mme Martine Filleul. Je souhaite aborder un sujet qui me semble absolument déterminant pour l’avenir des travaux que nous menons ici et pour l’avenir de la forêt française : je veux parler de l’Office national des forêts, gestionnaire unique de nos forêts publiques, qui joue un rôle essentiel dans la préservation et l’administration de ces espaces naturels.
Chacun le sait, les missions de l’Office sont nombreuses, variées, diverses : elles vont de la protection des milieux naturels et de la biodiversité à l’accueil du public en passant par la prévention des risques naturels et le développement de la filière bois énergie. Or des missions non rémunérées lui ont été confiées, rendant l’équilibre budgétaire de cet organisme difficile à atteindre. Plusieurs réformes et réorganisations successives de l’ONF ont été mises en œuvre dans l’objectif d’y pourvoir. Elles ont généré des tensions et même des conflits internes, la rentabilité étant difficilement conciliable avec l’exercice de missions d’intérêt général et de service public.
L’hypothèse d’une procédure de filialisation de certaines activités suscite actuellement de vives inquiétudes. Les organisations syndicales, ainsi que d’autres parties prenantes, y voient un risque de démantèlement, à terme, de l’établissement.
De surcroît, l’ONF, comme l’ensemble des autres opérateurs de l’État, est chaque année mis en difficulté et davantage affaibli par la poursuite de la diminution draconienne de ses effectifs. Près de 40 % de ses effectifs ont ainsi disparu en vingt ans, générant un malaise notable chez de nombreux salariés. Pourtant, pour que la France soit en mesure d’atteindre les objectifs qu’elle se fixe en matière de politique forestière, elle doit mobiliser les moyens humains et financiers adéquats. Pour que l’ONF soit en mesure d’accomplir l’ensemble de ses missions, qui vont croissant, il doit donc disposer de moyens renforcés.
Tous les ans, dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances, nous présentons des amendements visant à maintenir le plafond d’emploi de ces opérateurs dont fait partie l’ONF. Nous ne pouvons évidemment pas le faire dans le cadre de ce texte, mais nous considérons que c’est un sujet primordial. Nous demandons donc, par cet amendement d’appel, que soit remis au Parlement un rapport sur l’adéquation des moyens financiers et humains mobilisés par l’État avec les objectifs qu’il se fixe en matière de politique forestière.
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour avis. Comme vous le savez, ma chère collègue, votre préoccupation est partagée, mais il y a déjà eu de très nombreux rapports sur les moyens consacrés à la forêt et à l’ONF ces dernières années. Le diagnostic est désormais bien connu : le bois n’a jamais suffi à payer l’ensemble des missions de l’ONF.
Il faut une meilleure reconnaissance des aménités de la forêt. C’est le sens de la demande de rapport que j’ai formulée dans l’amendement précédent, et qui a été adopté. Il faut aussi une revalorisation globale des missions d’intérêt général qui sont aujourd’hui confiées à l’ONF. Il faut surtout, madame la secrétaire d’État, car des bruits courent en ce moment, ne pas faire peser encore plus sur les communes forestières le prix des efforts supplémentaires qui servent l’intérêt général, au risque de les voir quitter massivement le régime forestier.
Je demande le retrait de cet amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable. En tout état de cause, je serais très intéressée d’entendre Mme la secrétaire d’État sur les perspectives de financement et d’accompagnement de l’ONF par l’État.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État. Au cours du conseil d’administration du 2 juillet de l’ONF sera présenté le nouveau contrat d’objectifs et de performance. Le soutien de l’État en faveur de l’ONF sera renforcé, avec un triplement de la contribution du ministère de la transition écologique. Il n’est question ni d’une filialisation ni d’une privatisation, mais simplement d’une réflexion sur la pérennité du modèle de financement, qui est nécessaire.
Vous me demandez de vous éclairer sur ce sujet. Je crois que nous avons déjà entre les mains beaucoup d’éléments. Votre demande de rapport sur l’adéquation des moyens financiers et humains est déjà en partie satisfaite par les rapports sur la politique forestière, notamment celui très récent de la députée Cattelot. Par ailleurs, la Cour des comptes a remis il y a peu un rapport qui contient l’essentiel des éléments attendus. De surcroît, en préparation de la loi de finances, nous disposons annuellement des différents questionnaires et documents d’accompagnement qui traitent de ces questions.
Votre interrogation, il me semble, porte davantage sur la pérennité de ce modèle. Les travaux en cours avec l’Office national des forêts y répondront très rapidement.
En l’état, j’émets un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.
M. Marc Laménie. Je comprends notre collègue qui a présenté cet amendement d’appel. Nous sommes toutes et tous conscients de l’importance de l’ONF. Malheureusement, les effectifs de l’Office diminuent, comme c’est le cas pour d’autres opérateurs de l’État et d’autres services. Le ministère de l’écologie a perdu des postes localement, ainsi que les directions départementales de l’agriculture et de la forêt.
L’ONF joue un rôle important dans le département que je représente, qui est également un département forestier. Les communes forestières prennent leur part, mais les personnels de l’ONF apportent une aide considérable aux élus locaux de proximité, que ce soit pour les forêts communales ou les forêts domaniales. L’ONF est aussi un partenaire institutionnel essentiel.
Même si je comprends le sens de cet amendement d’appel, je me rallie à l’avis de Mme le rapporteur pour avis. Ce texte sur la lutte conte le dérèglement climatique est très large et recouvre beaucoup de sujets d’importance. La question de l’ONF, évoquée en loi de finances chaque année, pourrait être abordée au travers d’un texte dédié.
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.
M. Joël Labbé. Nous allons soutenir cet amendement. Certes, il s’agit d’un amendement d’appel, comme cela a été souligné, mais il est absolument nécessaire. Même si un certain nombre de rapports ont été rendus, nul n’a jamais tenu compte de leurs conclusions.
Madame la secrétaire d’État, en parlant de la remise en question du modèle économique, vous avez tout dit ! Aujourd’hui, l’ONF est quasiment en perdition. En vingt ans, 40 % des emplois ont été supprimés, et les employés actuels souffrent à plusieurs points de vue. C’est pourtant un organisme noble, qui a fait ses preuves dans l’ensemble du pays et qui a encore bien du travail à réaliser, comme l’ensemble de nos travaux le démontrent.
Je suis désolé de vous le dire, mais nous avons auditionné il y a deux ou trois ans un candidat pour présider l’ONF. Au Sénat, il avait fait pratiquement l’unanimité contre lui. Or c’est lui qui a été retenu : il faut enfin dire les choses !
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.
M. Guillaume Gontard. J’irai dans le même sens que mon collègue Labbé.
Cela a été souligné, c’est un amendement d’appel, mais, ce qui est particulièrement intéressant, c’est la réponse de Mme la secrétaire d’État. Effectivement, il y a déjà eu de nombreux rapports, mais tous démontrent la même chose. J’espère donc que, pour une fois, le Gouvernement ira dans le sens de leurs conclusions.
La problématique a été rappelée par Joël Labbé : 805 postes ont été supprimés entre 2016 et 2020 à l’ONF. Ce sont autant d’hommes et de femmes en moins pour accomplir un travail d’accompagnement forestier et aider nos collectivités. Or nous avons besoin de cette présence humaine dans nos forêts.
Il existe un lien de confiance entre les communes et l’ONF. Gérer une forêt, ce n’est pas uniquement vendre du bois. À l’heure où nous parlons de réchauffement climatique et d’adaptation, il convient de rappeler que les élus ont besoin de cette ingénierie, de ces conseils.
Il serait bon, madame la secrétaire d’État, que vous ayez bien présent à l’esprit que l’ONF n’est pas une entreprise et que nous avons bel et bien besoin d’un service public de la forêt.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable.
M. Jean-François Longeot, président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Comme vient de le souligner Guillaume Gontard, nous avons besoin, surtout en ce moment, de conseils et de travaux dans nos forêts. Les forêts de mon département, par exemple, sont ravagées par les scolytes, c’est à la fois une catastrophe pour l’environnement, une catastrophe pour le paysage, une catastrophe pour le tourisme et une catastrophe financière pour les communes.
Il est donc important d’augmenter les moyens de l’ONF, mais il ne faut pas que ce soit au détriment des communes forestières. Ce ne sont pas aux communes forestières d’amener une manne financière. Il m’a été rétorqué qu’il s’agissait de communes riches. Moi, je ne sais pas ce que cela veut dire : oui, ce sont des communes qui ont des bois dont elles tirent des recettes, mais ce ne sont pas pour autant des communes riches. Je ne citerai qu’un seul exemple, celui d’une commune de 1 500 habitants dans mon département à qui il restait auparavant environ 250 000 euros une fois les dépenses payées et les recettes encaissées. Cette année, il lui restera peut-être 50 000 euros. Sa forêt est devenue pour elle une source de dépenses. Comment fera-t-elle pour procéder à son entretien ?
L’ONF a besoin d’être accompagné financièrement, mais les communes ne pourront pas augmenter leur participation. C’est un point sur lequel je tiens véritablement à appeler votre attention, madame la secrétaire d’État. Nous devons faire face au problème sanitaire des forêts et au problème environnemental, mais nous devons aussi tenir compte des problèmes financiers des collectivités.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1423.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 19 bis EA (nouveau)
I. – La loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt est ainsi modifiée :
1° Les 2° à 5° du I de l’article 69 sont abrogés ;
2° Les XII, XIX et XX de l’article 93 sont abrogés.
II. – La section 2 du chapitre III du titre Ier du livre III du code forestier est complétée par un article L. 313-4 ainsi rédigé :
« Art. L. 313-4. – Lorsqu’il adhère au code des bonnes pratiques sylvicoles, le propriétaire forestier soumet à l’approbation du centre national de la propriété forestière un programme des coupes et travaux. »
III. – Les bois et forêts dont les propriétaires ont adhéré aux codes des bonnes pratiques sylvicoles mentionnés à l’article L. 122-3 du code forestier avant la promulgation de la présente loi continuent à présenter une présomption de gestion durable dans les conditions prévues à l’article L. 124-2 du même code, même si leurs propriétaires n’ont pas fait approuver un programme des coupes et travaux. Cette présomption de gestion durable est caduque à l’expiration d’un délai de deux ans si les propriétaires ayant adhéré aux codes des bonnes pratiques sylvicoles avant la promulgation de la présente loi n’ont pas soumis à l’approbation du centre national de la propriété forestière un programme des coupes et travaux.
M. le président. L’amendement n° 68 n’est pas soutenu.
Je mets aux voix l’article 19 bis EA.
(L’article 19 bis EA est adopté.)
Article 19 bis EB (nouveau)
Le code forestier est ainsi modifié :
1° Après le 7° de l’article L. 121-1, il est inséré un 8° ainsi rédigé :
« 8° À la promotion de l’utilisation de bois d’œuvre, en favorisant sa transformation industrielle sur le territoire de l’Union européenne afin d’optimiser le bénéfice de son stockage de carbone. » ;
2° Après le premier alinéa de l’article L. 121-2, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« La politique forestière favorise tous dispositifs incitatifs ou contractuels visant à ce que le bois d’œuvre issu de forêts françaises gérées durablement soit transformé sur le territoire de l’Union européenne, contribuant ainsi à optimiser le bénéfice de son stockage carbone. » – (Adopté.)
Article additionnel après l’article 19 bis EB
M. le président. L’amendement n° 2280, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 19 bis EB
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre IV du titre V du livre Ier du code forestier est complété par un article L. 154-4 ainsi rédigé :
« Art. L. 154-4. – Les personnes qui achètent du bois en vue de sa revente et sans transformation au sein de l’Union européenne doivent disposer d’une qualification leur permettant de s’assurer du bon respect des règles applicables en matière de traitement sanitaire du bois et de la prise en compte de l’impact climatique et environnemental de leur activité, tant en termes de préservation du puits de carbone forestier que de bilan carbone global de leur activité.
« Les conditions de formation initiale ou continue ou d’expérience professionnelle et les modalités selon lesquelles cette qualification professionnelle est reconnue sont définies par décret. »
La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État. Devant le phénomène de départ de grumes très difficilement contrôlable, nous avons pris acte de la nécessité de trouver une réponse qui ne contrevienne pas au droit communautaire. Cet amendement, qui sera sous-amendé par Mme la rapporteure pour avis, vise à donner un cadre à cet export de bois non transformé. Il s’agit de préserver notre tissu industriel de la première transformation, qui est très inquiet de ce phénomène.
Cet amendement tend donc à réglementer la profession d’exploitant forestier qui ne transforme pas le bois acheté au sein de l’Union européenne, en subordonnant son accès à la possession de certaines qualifications professionnelles permettant de garantir la détention par celles et ceux qui l’exercent des compétences en matière sanitaire, ainsi que des capacités à mesurer l’incidence de leurs activités sur la gestion forestière, le climat et l’environnement. Ces exploitants sont tout à fait conscients de ces problématiques.
Il nous reste à formaliser ce cadre et cette réglementation de la profession de manière à sécuriser ceux qui exercent ces métiers ainsi que les flux. Leur activité doit en effet être compatible avec l’objectif d’une gestion durable de la ressource en bois, en particulier avec la préservation du puits de carbone forestier et l’optimisation du bilan carbone du bois. Ce n’est bien sûr pas le seul levier susceptible de répondre à la dynamique observée, mais ce dispositif permettra tout de même d’apporter une première solution, en particulier en allant dans le sens de la préservation de nos ressources.
Je vous confirme que l’ensemble du Gouvernement est fortement mobilisé sur ce sujet. Nous aurons sans doute à affiner ce dispositif, en étroite concertation avec la profession, mais nous souhaitons d’ores et déjà fixer ce marqueur, en réponse à la problématique actuelle.
M. le président. Le sous-amendement n° 2281 rectifié, présenté par Mme Loisier, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Amendement n° 2280
I. – Alinéa 4
1° Remplacer les mots :
qualification leur permettant de s’assurer du bon respect
par les mots :
carte professionnelle d’exploitant forestier attestant de leurs qualifications, notamment de leur connaissance
, les mots :
la prise
par les mots :
leur prise
et les mots :
de l’impact climatique et environnemental de leur activité
par les mots :
des enjeux climatiques et environnementaux dans leur activité
2° Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
En l’absence de cette carte professionnelle, elles ne peuvent accéder aux ventes publiques et privées de bois.
II. – Alinéa 5
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Les conditions selon lesquelles cette carte professionnelle est obtenue, notamment en matière de formation initiale ou continue ou d’expérience professionnelle, sont définies par décret. »
La parole est à Mme la rapporteure pour avis.
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques. Ce sous-amendement vise à compléter l’effort du Gouvernement pour tenter de maîtriser, autant que faire se peut, avec les outils juridiques dont nous disposons aujourd’hui, ces achats croissants de bois qui partent pour être transformés.
La rédaction de la commission cherche à solidifier le dispositif proposé par le Gouvernement en restaurant la carte professionnelle de l’exploitant forestier, qui existait il y a quelques années. Cette carte permettra d’attester des connaissances et des compétences des professionnels, notamment en matière d’impact climatique de leur activité. Elle pourrait, à l’avenir, devenir le sésame pour accéder aux ventes publiques et privées de bois.
Ce dispositif reste à consolider juridiquement, mais il pourrait nous permettre de mieux maîtriser et contrôler l’achat du bois français et de savoir s’il sera transformé ou pas en France ou dans l’Union européenne.
La commission est donc favorable à l’amendement du Gouvernement, sous réserve de l’adoption de ce sous-amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État. Je remercie Mme la rapporteure pour avis de ce sous-amendement.
Nous n’allons pas nous mentir : nous avons agi dans des délais très contraints, et il sera sans doute nécessaire d’affiner cette proposition afin de vérifier son opérationnalité et sa sécurité juridique. Nous nous laissons donc un temps de réserve au sujet de sa rédaction, qui doit nécessairement être conforme à la directive européenne relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles.
La carte d’exploitant forestier n’a pas d’existence à ce jour. Elle reste donc à créer. Nous avons d’ores et déjà des points de vigilance sur le fait que ce dispositif ne doit pas concerner les artisans.
Au regard du délai d’examen, le Gouvernement prévoit de travailler avec vous, madame la rapporteure pour avis, si vous le voulez bien, à la stabilisation de cette rédaction. En attendant, tout en saluant l’initiative de la commission des affaires économiques, je m’en remets à la sagesse du Sénat.
M. le président. La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy, pour explication de vote.
M. Christian Redon-Sarrazy. L’acheteur sera peut-être titulaire d’une carte professionnelle, mais aura-t-on pour autant la certitude que les grumes seront transformées en France ou dans l’Union européenne ? La réponse est non ! Tout cela n’est donc qu’un pis-aller…
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.
M. Joël Labbé. Je remercie Mme la rapporteure pour avis de cette initiative pour tenter de réguler le marché.
On entend maintenant parler de traders sur les lots de bois. Dans ce domaine aussi, on ne pourra pas mener de politique efficace tant qu’on laissera notre économie entre les mains de ce genre de business. Il importe que le marché soit réservé aux professionnels.
Permettez-moi de vous dire, madame la secrétaire d’État, que vous aussi vous agissez dans la précipitation. Nous y sommes tous contraints… Si vous voulez prendre un peu de temps, pourquoi pas ? Mais nous allons inévitablement devoir encadrer le marché pour le relocaliser.
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.
M. Guillaume Gontard. Le travail qui a été réalisé sur la vente de grumes non transformées, et c’est en lien avec l’amendement examiné précédemment, est important, mais il reste une question. En réglementant et en encadrant, cela ne veut-il pas dire que l’on accepte le procédé ? C’est un peu ce qui vient d’être déploré : nous n’avons aucune garantie sur l’efficacité du dispositif. En créant une carte professionnelle, il ne faudrait pas non plus aboutir à un effet de niche et que certains pensent qu’ils peuvent y aller, que c’est OK ! C’est un point sur lequel il faudra se montrer vigilant.
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires économiques.
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Je comprends votre crainte, monsieur Gontard. Simplement, comme Mme la secrétaire d’État et Mme la rapporteure pour avis l’ont souligné, nous n’avons pas pour l’instant d’autres moyens techniques d’empêcher de telles pratiques, sauf à être sanctionnés par la Commission européenne. Il convient de se montrer raisonnable et de prendre les outils que nous sommes parvenus à imaginer.
Évidemment, nous n’acceptons pas de telles pratiques. Si nous les acceptions, nous ne travaillerions pas à ce genre de dispositif. Nous sommes tous d’accord pour les condamner. Pour autant, toute mesure doit s’inscrire dans le cadre du droit européen, qui est beaucoup plus large que le droit national sur lequel nous légiférons aujourd’hui.
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 2281 rectifié.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 19 bis EB.
Article 19 bis E
I. – L’État, en lien avec les collectivités territoriales et l’ensemble des acteurs de la filière forestière, se dote, avant le 31 décembre 2022, d’une stratégie nationale pour l’adaptation des forêts au dérèglement climatique.
II. – La stratégie mentionnée au I vise à renforcer la résilience du patrimoine forestier et à garantir dans toutes les forêts une gestion durable et multifonctionnelle des ressources forestières permettant à la fois de valoriser les forêts en tant que milieu naturel et puits de carbone et de développer les filières économiques françaises liées au bois.
M. le président. L’amendement n° 2113, présenté par M. Rambaud, Mme Schillinger, M. Marchand, Mme Havet, M. Lévrier et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Patricia Schillinger.
Mme Patricia Schillinger. Cet article, introduit par un amendement parlementaire à l’Assemblée nationale, vise à établir une stratégie nationale pour l’adaptation des forêts au dérèglement climatique. Cette proposition est louable, mais une feuille de route pour l’adaptation des forêts au changement climatique a été établie en 2020. Par ailleurs, l’article 19 bis F prévoit d’adapter le programme national de la forêt et du bois 2016-2026.
Dans un souci de clarification et de simplification, il vous est demandé de supprimer cet article pour mieux le fusionner dans l’article suivant.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour avis. Plutôt que de supprimer purement et simplement la stratégie nationale pour l’adaptation des forêts au dérèglement climatique, qui a tout son sens, je vous propose de vous rallier à l’amendement n° 1831, qui vise à reprendre ces objectifs, qui ont été enrichis par la commission des affaires économiques, et à les intégrer directement du PNFB vers le code forestier. Je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État. Il me paraît pour ma part pertinent de fusionner ces deux articles dans un souci de lisibilité.
Le programme national de la forêt et du bois est le document-cadre de la politique forestière. Il a vraiment vocation à porter les grands enjeux, dont l’adaptation des forêts. J’émets donc un avis favorable.
M. le président. L’amendement n° 1831, présenté par Mme Loisier, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Le premier alinéa de l’article L. 121-2-2 du code forestier est complété par une phrase ainsi rédigée : « Il vise en particulier à renforcer la résilience du patrimoine forestier, à garantir dans toutes les forêts une gestion durable et multifonctionnelle des ressources forestières permettant à la fois de valoriser les forêts en tant que milieu naturel et puits de carbone et de développer les filières économiques françaises liées au bois. »
La parole est à Mme la rapporteure pour avis.
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques. La commission est très attachée à l’article 19 bis F, qui doit permettre de réviser l’ensemble des objectifs du PNFB. Ces objectifs ne sont effectivement plus tenables après les crises et les dépérissements massifs que nous avons connus. Nous souhaitons donc que cet article soit adopté conforme. Pour ce faire, je vous propose, mes chers collègues, de reprendre les objectifs assignés à la stratégie définie dans l’article 19 bis E et de les appliquer directement dans l’article du code forestier qui traite du PNFB.
J’appelle votre attention sur le fait que le plan national d’adaptation au changement climatique n’est pas du tout la même chose que le programme national de la forêt et du bois. Le programme national de la forêt et du bois fixe essentiellement des objectifs de mobilisation des volumes. Le plan national d’adaptation au changement climatique, lui, fixe une stratégie pour adapter nos peuplements, nos essences et nos massifs. Nous avons ici une complémentarité que nous tenons à préserver.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, l’article 19 bis E est ainsi rédigé, et les amendements nos 746 rectifié, 271 rectifié bis, 1428, 819 rectifié, 1884, 1429, 1430 et 1954 rectifié n’ont plus d’objet.
Article 19 bis F
(Non modifié)
Le Gouvernement propose, dès 2022, après l’évaluation à mi-parcours du programme national de la forêt et du bois 2016-2026, des adaptations de ce programme prenant en compte les recommandations de la feuille de route pour l’adaptation des forêts au changement climatique publiée en décembre 2020 et les données de l’inventaire forestier national.
M. le président. La parole est à Mme la rapporteure pour avis.
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques. Avec cet article, nous abordons le programme national de la forêt et du bois.
L’ensemble de mes collègues du groupe d’études Forêt et filière bois du Sénat et moi-même sommes très attachés à cette stratégie qui consiste à adapter le PNFB aux nouvelles réalités de nos massifs forestiers. Nous avions d’ailleurs publié en avril dernier une tribune invitant le Gouvernement à adapter sans tarder le PNFB aux nouvelles réalités liées au changement climatique. Nous souhaitons donc vivement un vote conforme sur cet article.
Le PNFB, comme je viens de le souligner, est avant tout une stratégie de mobilisation du bois pour répondre aux besoins sociétaux. Il prévoit pour cela une augmentation des prélèvements à hauteur de 12 millions de mètres cubes d’ici à 2026, sachant qu’aujourd’hui nous n’exploitons même pas l’accroissement annuel de la forêt, celles-ci continuant donc à s’étendre, souvent au détriment des terres agricoles. C’est donc une stratégie au service du développement soutenable prenant en compte les enjeux environnementaux, économiques et sociaux qui a prévalu à la mise en place de ce PNFB et à sa déclinaison dans les régions, dans le cadre de plans régionaux de la forêt et du bois, dont certains ont été formalisés il y a quelques mois.
Le problème du PNFB, comme nous l’avons évoqué, est qu’il a été établi en 2016, à partir de données encore antérieures et qui n’incluaient donc pas les impacts du dérèglement climatique, lesquels ont accéléré depuis les années 2017-2018. Le manque d’eau, associé aux très fortes chaleurs qui brûlent la cime des arbres, a affaibli les peuplements. Parallèlement, le réchauffement a favorisé la prolifération d’insectes ravageurs, comme les scolytes pour les résineux, mais aussi différentes espèces de chenilles pour l’ensemble des feuillus.
Au final, aujourd’hui, toutes les essences d’arbre sont plus ou moins menacées. Plus de 10 millions de mètres cubes d’épicéas et de sapins ont déjà été atteints depuis trois ans, et ce n’est malheureusement pas terminé.
Tout cela bouscule la programmation des coupes inscrite au PNFB, sature les débouchés, fait s’effondrer un certain nombre de prix – ils augmentent de nouveau aujourd’hui, il faut le souligner – et bouleverse durablement les prévisions de récolte pour les années à venir. Il est donc inconcevable de rester avec les mêmes trajectoires de prélèvements dans les PRFB et le PNFB, notamment dans les régions les plus productives, qui ont été malheureusement aussi les plus impactées.
M. le président. Il faut conclure !
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour avis. Il faut donc sans tarder revoir nos prospectives et adapter le PNFB aux réalités de nos territoires.
M. le président. L’amendement n° 2114, présenté par M. Rambaud, Mmes Havet et Schillinger, MM. Lévrier, Marchand et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Le Gouvernement propose, dès 2022, selon les résultats de l’évaluation à mi-parcours du programme national de la forêt et du bois 2016-2026, des adaptations de ce programme ou des actions, prenant en compte des recommandations de la feuille de route pour l’adaptation des forêts au changement climatique publiée en décembre 2020 et des données de l’inventaire forestier national, dans l’objectif de renforcer la résilience du patrimoine forestier et de promouvoir une gestion des ressources forestières permettant à la fois de valoriser les forêts en tant que milieu naturel et puits de carbone et de développer les filières économiques françaises liées au bois.
La parole est à Mme Patricia Schillinger.
Mme Patricia Schillinger. Cet amendement vise à réécrire cet article, qui prévoit d’adapter le programme national de la forêt et du bois 2016-2026 en fonction de l’évaluation de ce programme, qui aura lieu en 2022.
Une telle adaptation est une démarche lourde, qui risque de ralentir et de complexifier le PNFB. Pour gagner en efficacité et en souplesse, mieux vaudrait fusionner l’article qui traite de la stratégie nationale pour l’adaptation des forêts au dérèglement climatique et celui qui porte sur l’adaptation du programme national de la forêt et du bois.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour avis. Cet amendement est déjà satisfait par l’amendement n° 1831. S’il était adopté, il ferait perdre toute sa portée à l’article 19 bis F, car il offrirait la possibilité au Gouvernement non pas de réviser le PNFB, mais seulement de réviser un certain nombre de plans d’action. Ce serait une grave erreur pour l’avenir de nos massifs, pour les enjeux de prospective concernant l’approvisionnement, les volumes et la disponibilité forestière, mais aussi pour l’acceptabilité sociale des prélèvements. Je vous demande donc de le retirer. À défaut, j’émettrai un avis très défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État. Permettez-moi d’apporter quelques précisions sur cette révision du PNFB 2016-2026, avec une première étape de consolidation en cours des programmes régionaux pour vérifier la cohérence de l’ensemble.
Cette évaluation est bien prévue dans l’arrêté fixant la composition du comité de suivi du PNFB. Elle aboutira en 2022 et elle permettra, si besoin, d’ajuster les curseurs sur les prélèvements. Ces éléments révisés seront valorisés dans la loi de programmation énergie-climat qui vous sera soumise en 2023.
Cet amendement, dont je partage pleinement l’orientation, vise à ne pas imposer une révision du PNFB et à laisser ouverte la possibilité de se tourner vers d’autres options plus directement opérationnelles. En l’état, j’émets donc un avis favorable.
M. le président. Je mets aux voix l’article 19 bis F.
(L’article 19 bis F est adopté.)
Articles additionnels après l’article 19 bis F
M. le président. L’amendement n° 2121 rectifié bis, présenté par MM. Patient et Buis, Mme Duranton, M. Hassani, Mme Havet, M. Haye, Mmes Phinera-Horth et Schillinger et M. Théophile, est ainsi libellé :
Après l’article 19 bis F
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’action des pouvoirs publics tend à ce que, d’ici le 1er janvier 2023, l’inventaire permanent des ressources forestières nationales est réalisé au même rythme dans tous les massifs forestiers français y compris ceux des collectivités mentionnées à l’article 72-3 de la Constitution.
La parole est à Mme Patricia Schillinger.
Mme Patricia Schillinger. À la différence de l’Hexagone, les forêts ultramarines ne font pas l’objet d’un suivi régulier et planifié au sein de l’inventaire forestier national.
M. Falcone, adjoint au directeur général de l’Office national des forêts, entendu en audition par le CESE (Conseil économique, social et environnemental) le 22 septembre 2020, reconnaissait que l’impact du changement climatique est peu documenté concernant les écosystèmes forestiers en outre-mer, car il n’y a pas d’inventaire forestier en outre-mer, faute de moyens suffisants. Pourtant, la loi du 13 octobre 2014 d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt a rendu obligatoire la prise en compte des ressources forestières nationales dans l’inventaire, ainsi que les particularités des bois situés en outre-mer. Or cette obligation n’est pas effective dans les territoires ultramarins.
Les forêts ultramarines doivent faire l’objet du même niveau de connaissance, d’inventaire et de protection que les forêts de l’Hexagone. Leur préservation passe d’abord par la description détaillée de l’ensemble des essences et de la biodiversité. C’est pourquoi la réalisation d’un inventaire forestier complet par l’Institut national de l’information géographique et forestière tout comme la mise en place d’un réseau de suivi des écosystèmes forestiers équivalent au réseau Renecofor existant en France hexagonale sont nécessaires.
De ce fait, cet amendement à portée programmatique générale vise à rappeler les engagements pris par l’État à l’égard des forêts des territoires ultramarins.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour avis. Nous comprenons tous cette demande d’inventaire forestier sur l’ensemble des massifs. Toutefois, procéder en outre-mer au même rythme qu’en métropole serait une contrainte importante pour les équipes de l’IGN.
Je propose que nous adoptions plutôt l’amendement de repli qui sera examiné dans quelques instants, lequel vise également à réaliser cet inventaire, mais pas au même rythme que pour les massifs de l’Hexagone. Je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Barbara Pompili, ministre de la transition écologique. Les singularités des bois et forêts des espaces ultramarins sont importantes au regard de leur surface et de leur potentialité sylvicole et économique, ainsi que des enjeux de politique publique, notamment en matière de biodiversité.
Les modalités de réalisation de l’inventaire en termes de méthodes ou de fréquences qui sont appliquées en métropole ne sont pas adaptées aux particularités des forêts d’outre-mer. Des études au cas par cas, des modalités spécifiques en fonction des enjeux à suivre sont, en l’espèce, à privilégier, d’où mon avis défavorable.
M. le président. Madame Schillinger, l’amendement n° 2121 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Patricia Schillinger. Non, je le retire.
M. le président. L’amendement n° 2121 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 2122 rectifié bis, présenté par MM. Patient et Buis, Mme Duranton, M. Hassani, Mme Havet, M. Haye, Mmes Phinera-Horth et Schillinger et M. Théophile, est ainsi libellé :
Après l’article 19 bis F
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code forestier est ainsi modifié :
1° L’article L. 151-1 est complété par les mots : « , pour tous les bois et forêts de France y compris ceux des collectivités mentionnées à l’article 72-3 de la Constitution » ;
2° L’article L. 151-3 est abrogé.
II. – Le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2023.
La parole est à Mme Patricia Schillinger.
Mme Patricia Schillinger. Cet amendement de M. Patient est complémentaire du précédent. Il vise à inscrire dans l’article du code forestier qui instaure l’inventaire forestier national que celui-ci doit concerner tous les bois et forêts de France, y compris ceux d’outre-mer, ce qui jusqu’à présent ne semble pas encore être le cas. Par exemple, il n’y a pas d’inventaire en Polynésie française ou en Nouvelle-Calédonie. Il en résulte que nous ne connaissons pas précisément les surfaces forestières de ces territoires.
La couverture forestière des territoires ultramarins est pour la plupart d’entre eux supérieure à celle de l’Hexagone. La forêt guyanaise, qui est le plus important massif forestier français, représente un tiers de la forêt française. Par conséquent, à ce jour, plus du tiers des forêts françaises ne sont pas étudiées ou le sont peu.
Nous voulons réaffirmer, par cet amendement, que l’inventaire forestier national doit couvrir l’ensemble de nos forêts.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour avis. Cet amendement vise à prévoir un inventaire des forêts d’outre-mer, selon des modalités tenables pour les services compétents. L’avis est donc favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 19 bis F.
Article 19 bis G
L’article L. 2224-7-1 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :
« Le schéma mentionné au premier alinéa comprend un descriptif détaillé et un diagnostic des ouvrages et équipements nécessaires à la distribution d’eau potable et, le cas échéant, à sa production, à son transport et à son stockage. Il comprend également un programme d’actions chiffrées et hiérarchisées visant à améliorer l’état et le fonctionnement de ces ouvrages et équipements. Ce schéma tient compte de l’évolution de la population et des ressources en eau disponibles. Lorsque le taux de perte en eau du réseau s’avère supérieur à un taux fixé par décret selon les caractéristiques du service et de la ressource, ce schéma est complété, avant la fin du second exercice suivant l’exercice pour lequel le dépassement a été constaté, par un plan d’actions comprenant, s’il y a lieu, un projet de programme pluriannuel de travaux d’amélioration du réseau. » ;
2° La première phrase du troisième alinéa est ainsi rédigée : « Le schéma d’alimentation d’eau potable est établi au plus tard le 31 décembre 2024 ou dans les deux années suivant la prise de compétence à titre obligatoire par la communauté de communes, si cette prise de compétence intervient après le 1er janvier 2023. » – (Adopté.)
Article 19 bis H
Le titre Ier du livre Ier du code de l’environnement est complété par un article L. 110-5 ainsi rédigé :
« Art. L. 110-5. – La République française réaffirme l’importance première de la contribution des territoires d’outre-mer à ses caractéristiques propres, à sa richesse environnementale, à sa biodiversité ainsi qu’à son assise géostratégique.
« L’action de l’État concourt à la reconnaissance, à la préservation et à la mise en valeur des richesses biologiques, environnementales et patrimoniales des territoires d’outre-mer. » – (Adopté.)
Article additionnel après l’article 19 bis H
M. le président. L’amendement n° 491 rectifié ter, présenté par MM. Cadec, Bascher et Sautarel, Mme Garriaud-Maylam, MM. Pellevat et Panunzi, Mme Thomas, MM. J.M. Boyer, Courtial, Cardoux et Brisson, Mmes Gruny et Berthet, M. Bouchet, Mme Deromedi, MM. Rojouan et de Nicolaÿ, Mme Paoli-Gagin, MM. Levi, Sido, Belin et Favreau, Mme Delmont-Koropoulis, MM. Houpert et Babary, Mme Di Folco et M. Rapin, est ainsi libellé :
Après l’article 19 bis H
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le II de l’article L. 181-3 du code de l’environnement est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« … La préservation des ressources biologiques en eaux intérieures et en mer territoriale concernant les installations de production d’énergies renouvelables mentionnées à l’article L. 511-2 du présent code. »
La parole est à Mme Catherine Di Folco.
Mme Catherine Di Folco. Cet amendement déposé par notre collègue Alain Cadec, sénateur des Côtes-d’Armor, porte sur un sujet qui le préoccupe beaucoup.
À la fin des années 2000, l’éolien en mer est apparu comme une énergie d’avenir. Mais, en 2021, de nombreuses associations environnementales, ainsi que nombre d’élus et de citoyens, s’inquiètent de l’impact négatif à long terme de l’éolien offshore sur l’environnement. La mise en œuvre de cette énergie risque en effet de nuire aux écosystèmes, à la biodiversité, au fonctionnement physique des bassins maritimes et, par conséquent, à la pêche artisanale côtière.
Cet amendement vise ainsi à obliger l’autorité administrative chargée d’autoriser l’installation, l’exploitation et l’aménagement d’installations éoliennes en mer à rejeter une demande d’installation dans le cas où les conditions visant à préserver les ressources biologiques ne sont pas réunies, et ce au titre de l’article L. 181-3 du code de l’environnement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Cet amendement, qui vise à interdire les projets d’installations éoliennes en mer s’ils ne respectent pas la préservation des ressources biologiques en eaux intérieures et en mer territoriale, est déjà satisfait par la combinaison des articles L. 181-3 et L. 211-1 du code de l’environnement. En effet, en application de l’article L. 181-3 du code de l’environnement, « l’autorisation environnementale ne peut être accordée que si les mesures qu’elle comporte assurent la prévention des dangers ou inconvénients pour les intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1 ».
Je rappelle que, aux termes de l’article L. 211-1 du code de l’environnement, « une gestion équilibrée et durable de la ressource en eau » implique de prendre en compte « la préservation des écosystèmes aquatiques […], la protection des eaux et la lutte contre toute pollution par déversements, écoulements, rejets, dépôts directs ou indirects de matières de toute nature et plus généralement par tout fait susceptible de provoquer ou d’accroître la dégradation des eaux en modifiant leurs caractéristiques physiques, chimiques, biologiques ou bactériologiques, qu’il s’agisse des eaux superficielles, souterraines ou des eaux de la mer dans la limite des eaux territoriales ».
C’est pourquoi le fait de soumettre à une évaluation environnementale ces projets limiterait ce développement de l’énergie éolienne offshore à l’atteinte des objectifs de décarbonation de notre économie, alors que l’implantation d’éoliennes terrestres est de plus en plus contestée.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Catherine Di Folco, pour explication de vote.
Mme Catherine Di Folco. Je suis sensible aux arguments de M. le rapporteur. Puisque l’amendement est satisfait – je pense qu’Alain Cadec en sera d’accord –, je le retire.
M. le président. L’amendement n° 491 rectifié ter est retiré.
Article 19 bis
(Non modifié)
Le chapitre II du titre Ier du livre II du code de l’environnement est ainsi modifié :
1° Le II de l’article L. 212-1 est complété par un 3° ainsi rédigé :
« 3° À l’identification, au plus tard le 31 décembre 2027, des masses d’eau souterraines et des aquifères qui comprennent des ressources stratégiques pour l’alimentation en eau potable actuelle ou future ainsi que, si l’information est disponible, leurs zones de sauvegarde, au sein desquelles des mesures de protection sont instituées pour la préservation de ces ressources stratégiques. Ces mesures contribuent à assurer l’équilibre quantitatif entre les prélèvements dans ces ressources et leur capacité à se reconstituer naturellement et contribuent également à préserver leur qualité pour satisfaire en priorité les besoins pour la consommation humaine, sans traitement ou avec un traitement limité. » ;
2° Le I de l’article L. 212-5-1 est ainsi modifié :
a) Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Si le schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux n’a pas procédé à l’identification des zones de sauvegarde des ressources stratégiques pour l’alimentation en eau potable au sein des masses d’eau souterraines et des aquifères prévue au 3° du II de l’article L. 212-1, le plan d’aménagement et de gestion durable de la ressource en eau et des milieux aquatiques identifie ces zones. » ;
b) Le 3° est complété par les mots : « et définir les mesures de protection à mettre en œuvre au sein des zones de sauvegarde des ressources stratégiques pour l’alimentation en eau potable des masses d’eau souterraines et des aquifères, mentionnées au 3° du II de l’article L. 212-1, ainsi que les éventuelles mesures permettant d’accompagner l’adaptation des activités humaines dans ces zones de sauvegarde ».
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, sur l’article.
M. Marc Laménie. Pour ce qui concerne cet article 19 bis, un dilemme se pose.
D’un côté, cet article, soutenu par la commission, vise à renforcer la protection des ressources stratégiques pour l’alimentation en eau potable au sein des masses d’eau souterraines, en l’occurrence les nappes phréatiques, et à définir les mesures permettant d’accompagner l’adaptation des activités humaines dans les zones de sauvegarde. Ainsi, selon le rapport de la commission, 33 820 points de captage sont recensés.
Les enjeux sont les suivants : le problème de la qualité ; les périmètres de protection ; les prélèvements sur les ressources ; la référence au droit européen – je pense à la directive-cadre sur l’eau – et à la loi de 2006 sur l’eau et les différentes contraintes y afférentes.
L’obligation de procéder à l’identification des masses d’eau souterraines stratégiques et l’institution des mesures de protection sont nécessaires à la préservation de l’eau, qui est un bien précieux – on le rappelle régulièrement.
Il est également nécessaire de mieux connaître les ressources souterraines pour se préparer aux défis de la raréfaction de la ressource. On le voit en effet, les étés sont de plus en plus secs, y compris dans les départements situés au nord de la Loire, lesquels sont de plus en plus contraints de faire des économies d’eau potable.
Il faut donc se préparer à ces différents défis, comme cela est préconisé dans le rapport d’information, fait au nom de la délégation sénatoriale à la prospective, et intitulé Adapter la France aux dérèglements climatiques à l’horizon 2050 : urgence déclarée.
D’un autre côté, nous sommes sollicités par le monde agricole, qui exprime ses inquiétudes sur l’utilisation de l’eau.
Ce dilemme étant posé, je suivrai la position de la commission.
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements identiques.
L’amendement n° 84 rectifié bis est présenté par M. S. Demilly, Mmes Morin-Desailly et Vérien, MM. Levi, Genet et Canévet, Mme Sollogoub, M. J.M. Arnaud et Mmes Dumont et Garriaud-Maylam.
L’amendement n° 107 rectifié ter est présenté par MM. Mizzon et Bonneau, Mme Perrot, MM. Kern et Masson, Mme Vermeillet, MM. Moga et Détraigne, Mme Chain-Larché, M. Cuypers, Mmes Thomas et Férat, M. Bouchet, Mmes Herzog et C. Fournier et MM. Bonnecarrère, Chauvet, Louault, Prince, Duffourg, Calvet, Cigolotti et Cazabonne.
L’amendement n° 244 rectifié ter est présenté par MM. Chasseing, Guerriau, Menonville, Decool et Lagourgue, Mme Mélot, MM. A. Marc, Malhuret, Capus, Wattebled, Henno, Guérini et Grand, Mme Dumas et MM. Laménie et Hingray.
L’amendement n° 511 rectifié est présenté par MM. Bacci, Bonnus, Pellevat, Brisson, Burgoa et D. Laurent, Mmes Demas et Deromedi, MM. Belin et Bascher, Mme Ventalon et MM. Longuet, Darnaud, Klinger, Somon, Bas et Rojouan.
L’amendement n° 900 rectifié bis est présenté par MM. Duplomb et J.M. Boyer, Mmes Chauvin et Puissat, MM. Cardoux et Chatillon, Mmes Delmont-Koropoulis et Belrhiti, MM. B. Fournier, Houpert, Anglars, de Legge et Vogel, Mme Richer, MM. Savary, Lefèvre et Sido, Mme Micouleau, MM. Daubresse et Karoutchi, Mme Lopez, M. Panunzi, Mme Lassarade, MM. Courtial et Segouin, Mme Imbert, MM. Favreau, Rietmann et Piednoir, Mme Joseph et MM. H. Leroy, Allizard et Saury.
Ces cinq amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Stéphane Demilly, pour présenter l’amendement n° 84 rectifié bis.
M. Stéphane Demilly. L’article 19 bis, introduit à l’Assemblée nationale et non modifié lors de son examen en commission au Sénat, vise à inscrire dans les Sdage et les SAGE, c’est-à-dire les documents de planification dans le domaine de l’eau, l’identification et la protection des masses d’eau souterraines qui comprennent des ressources stratégiques pour l’alimentation en eau potable, pour assurer leur équilibre quantitatif et une utilisation sans traitement. Cela suppose un nouveau dispositif de zonage et de nouvelles réglementations dans un millefeuille juridique qui est, avouons-le, déjà très complexe et particulièrement indigeste.
Le principe de la priorité de l’alimentation en eau potable des populations locales sur tous les autres usages est incontestable, et il est déjà pris en compte dans le cadre législatif et réglementaire existant. Si des modifications sont à apporter sur ce sujet, il serait intéressant d’attendre les conclusions du Varenne agricole de l’eau et de l’adaptation au changement climatique, qui a été lancé par Julien Denormandie et Bérangère Abba le 28 mai dernier.
Cet amendement vise donc à supprimer l’article 19 bis. S’il convient d’apporter des modifications, on trouvera un autre véhicule législatif. Mais, de grâce, adoptons une chronologie cohérente !
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Moga, pour présenter l’amendement n° 107 rectifié ter.
M. Jean-Pierre Moga. Il est défendu.
M. le président. La parole est à Mme Colette Mélot, pour présenter l’amendement n° 244 rectifié ter.
Mme Colette Mélot. Le législateur ne saurait se défausser sur le juge du soin de déterminer la portée juridique des dispositions qu’il adopte. Aussi l’amendement vise-t-il à supprimer cet article introduit par l’Assemblée nationale.
M. le président. La parole est à M. Jean Bacci, pour présenter l’amendement n° 511 rectifié.
M. Jean Bacci. S’il est important d’identifier et de préserver les masses d’eau souterraines, il est également primordial de ne pas pénaliser l’activité humaine, notamment celle de nos agriculteurs, dont les conditions de travail sont déjà très difficiles. Face à cet enjeu, cet article pose trois problématiques majeures.
Premièrement, il suppose la mise en place de nouveaux dispositifs de zonage et de nouvelles réglementations dans un millefeuille juridique déjà très complexe.
Deuxièmement, comme l’a dit Stéphane Demilly, le Président de la République a annoncé en avril dernier le lancement du Varenne agricole de l’eau et de l’adaptation au changement climatique. Ne serait-il pas plus judicieux d’attendre que soient rendues ses conclusions avant de légiférer ?
Troisièmement, les risques de contentieux à l’encontre des activités agricoles que peut impliquer cet article sont disproportionnés. Nos agriculteurs pourront-ils continuer à prélever de l’eau pour l’irrigation dans ces masses d’eau ? L’apport d’intrants pour permettre la production agricole sera-t-il soumis à des mesures généralisées d’interdiction ? Le législateur ne saurait se défausser sur le juge du soin de déterminer la portée juridique des dispositions qu’il adopte. Enfin, nous devons nous assurer de ne pas pénaliser les activités en lien avec ces masses d’eau souterraines, dont certaines peuvent s’étendre sur des centaines de kilomètres carrés.
M. le président. La parole est à M. Stéphane Piednoir, pour présenter l’amendement n° 900 rectifié bis.
M. Stéphane Piednoir. Je voudrais insister sur deux points qui me semblent essentiels.
Le premier a trait à la complexification. Ce nouveau dispositif de zonage ajoute une couche au millefeuille déjà particulièrement complexe des documents liés à la qualité de l’eau, les Sdage et les SAGE précédemment évoqués. Cela ne semble pas pertinent.
Le deuxième point est que cet article introduit, plus qu’un flou, un risque de contentieux lié aux nombreuses activités nécessitant de prélever de l’eau dans ces zones ; je pense aux activités agricoles et industrielles situées dans ces territoires. Les risques encourus semblent tout à fait disproportionnés.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous souhaitons la suppression de l’article 19 bis.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. Afin de renforcer la résilience de nos territoires face au changement climatique et de sécuriser notre approvisionnement en eau pour les prochaines décennies dans un contexte de raréfaction de la ressource, il n’est pas opportun de supprimer cet article, qui permet l’identification des masses d’eau souterraines stratégiques pour l’alimentation en eau potable.
Il est pertinent de se doter d’une connaissance plus fine et cartographiée dans les Sdage des masses d’eau souterraines, afin d’anticiper de manière rationnelle la baisse prévisible des ressources stratégiques pour l’alimentation en eau potable.
Les arrêtés « sécheresse » concernent chaque été un nombre croissant de départements : cet indicateur doit nous inciter à prendre des mesures pour faire face de manière rationnelle et adéquate à ce nouveau défi.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Barbara Pompili, ministre. Ces amendements identiques visent à supprimer l’article 19 bis, lequel a été voté à l’unanimité en commission à l’Assemblée nationale, sur proposition du député Martial Saddier, dont on connaît tous l’engagement et la compétence, depuis très longtemps, sur ces sujets.
Je constate que vos interrogations ne portent pas sur l’objectif de cet article, qui vise la protection des ressources en eau potable pour les populations actuelles et futures. Cet objectif, aucun d’entre nous ne peut y être indifférent. Vous vous interrogez plutôt sur l’articulation de cette disposition avec les outils actuels de protection des captages. Vous questionnez donc le caractère opérationnel de cet article.
Sur ce point, je peux vous rassurer : les dispositions de l’article visent l’identification des aquifères stratégiques pour l’alimentation en eau potable, en s’appuyant sur les comités de bassin, qui sont les parlements locaux de l’eau et sont chargés, notamment, de l’élaboration des schémas directeurs d’aménagement et de gestion des eaux à l’échelle des grands bassins. Certains Sdage, notamment celui du bassin Rhône-Méditerranée, appliquent d’ailleurs, de facto, depuis des années les dispositions de cet article.
L’objectif est d’identifier, à l’échelle de l’aquifère, c’est-à-dire de l’ensemble de la nappe, les enjeux permettant d’assurer leur protection pour le futur. Les plans d’action concernés n’ont donc ni la même échelle ni la même portée que le périmètre de protection des captages. Il sera donc possible d’améliorer la connaissance et de mieux articuler l’implantation d’activités de population, sans qu’il soit nécessaire d’anticiper la manière dont nous nous alimenterons en eau et sans conflit d’usage.
La rédaction de cette disposition a été améliorée en séance à l’Assemblée nationale pour permettre une meilleure articulation avec le cadre législatif existant. À ce stade, le Varenne de l’eau n’apportera rien de plus sur ce point particulier. En effet, j’y insiste, il s’agit d’acquérir une connaissance dont nous avons besoin. Je ne crois pas qu’il soit urgent d’attendre. Bien au contraire, il est urgent d’avoir cette connaissance le plus tôt possible. J’émets donc un avis défavorable sur ces amendements de suppression.
M. le président. La parole est à M. Dominique de Legge, pour explication de vote.
M. Dominique de Legge. Je soutiendrai ces amendements, pour une raison simple.
Dans trois semaines, nous nous retrouverons dans ce même hémicycle pour discuter de la loi 3D ou 4D – je ne sais plus comment il faut l’appeler –,…
Mme Catherine Di Folco. La loi 3DS !
M. Dominique de Legge. … dont j’ai cru comprendre que l’objectif était d’aller vers plus de simplification. Lors de ce prochain débat, nous déclarerons donc unanimement, la main sur le cœur, qu’il faut simplifier et cesser de multiplier les documents d’urbanisme.
Je citerai quelques-uns de ces documents : la trame bleue, la trame verte, le Sdage, le SAGE, le SCoT, le PLU, sans oublier la loi Littoral, les zones humides… L’inventaire n’est pas complet !
Il me semble que la priorité est de mettre un peu d’ordre dans l’ensemble de ces documents plutôt que d’ajouter une couche, même si l’objectif est sans doute parfaitement louable. À force de complexifier les choses, je crains que l’on ne décourage les acteurs locaux et qu’à la sortie on n’avance pas très vite.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 84 rectifié bis, 107 rectifié ter, 244 rectifié ter, 511 rectifié et 900 rectifié bis.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 911 rectifié, présenté par MM. Duplomb, J.M. Boyer et Cuypers, Mme Chauvin, MM. Burgoa, D. Laurent, Karoutchi, Daubresse et Genet, Mme Puissat, M. Bascher, Mme Lopez, M. Decool, Mme Belrhiti, MM. Lefèvre, Segouin, Bouchet, Chatillon, Panunzi et Cadec, Mme Lassarade, MM. B. Fournier et Courtial, Mmes Deromedi et Richer, MM. Longuet, Savary, Piednoir, Vogel, Mizzon, Anglars et Chauvet, Mmes Garriaud-Maylam et Imbert, MM. Somon, Favreau et Houpert, Mme Joseph, MM. H. Leroy, Chasseing, Allizard, Sido, J.M. Arnaud et Saury, Mme Dumont et M. Brisson, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 3, première phrase
Remplacer le mot :
instituées
par les mots :
proposées à l’autorité administrative, en vertu du 5° de l’article L. 211-3 du code de l’environnement
II. – Alinéa 7
Remplacer le mot :
définir
par le mot :
proposer
La parole est à M. Pierre Cuypers.
M. Pierre Cuypers. Cet amendement vise à mieux articuler différentes dispositions du code de l’environnement relatives aux captages d’eau potable, qui paraissent redondantes.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. Cet amendement vise à rendre facultative la prise de mesures de protection au sein des zones de sauvegarde des ressources stratégiques pour l’alimentation en eau potable.
Si l’objectif est de préserver ces ressources stratégiques, il est essentiel que des zones de protection puissent être instituées, d’autant que l’article précise que des mesures peuvent être prises afin d’accompagner l’adaptation des activités humaines dans les zones de sauvegarde. La formulation de l’article prévoit donc bien la conciliation des usages et n’exclut pas les activités humaines aux abords des périmètres de protection.
L’avis est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 668 rectifié bis est présenté par M. Menonville, Mme Mélot et MM. Lagourgue, Chasseing, Decool, Wattebled, Guerriau, A. Marc et Malhuret.
L’amendement n° 1983 rectifié bis est présenté par MM. Segouin, Duplomb et J.M. Boyer, Mme Chauvin, M. Bas, Mme Puissat, M. Karoutchi, Mmes Imbert et Garriaud-Maylam, M. Somon, Mme Deromedi, MM. Bouchet, Favreau et Savin, Mme Richer, MM. Piednoir, Burgoa, Laménie, Allizard, Sido, J.M. Arnaud, Saury et Genet, Mme Dumont et M. Brisson.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 3, seconde phrase
1° Après le mot :
ressources
insérer les mots :
prenant notamment en compte les besoins des activités humaines
2° Remplacer les mots :
, sans traitement ou avec un traitement limité
par les mots :
et les activités de production alimentaire
La parole est à Mme Colette Mélot, pour présenter l’amendement n° 668 rectifié bis.
Mme Colette Mélot. Le principe de la priorité de l’alimentation en eau potable des populations locales sur tous les autres usages est incontestable dès lors qu’une conciliation entre les usages est impossible. Il est déjà pris en compte dans le cadre législatif et réglementaire existant.
Parallèlement, il importe de ne pas interdire toute activité humaine, en particulier celles liées à la production alimentaire, en lien avec ces masses d’eau souterraines et aquifères, dont certaines peuvent s’étendre sur des centaines de kilomètres.
En l’état de la rédaction de l’article 19 bis, les risques de contentieux à l’encontre des activités, notamment agricoles, dans les territoires sont disproportionnés. Pourra-t-on continuer à prélever de l’eau pour l’irrigation dans ces nappes ? L’apport d’intrants pour permettre la production agricole, et ainsi assurer la souveraineté alimentaire de la France, sera-t-il soumis à des mesures généralisées d’interdiction et à des risques de recours juridiques ? Les activités d’élevage risquent-elles, à terme, de se voir condamner ?
Aussi, il est proposé de préciser que les mesures visées à l’article 19 bis sur l’équilibre quantitatif des prélèvements des masses d’eau souterraines prennent notamment en compte les besoins des activités humaines, plus particulièrement les activités de production alimentaire essentielles à la souveraineté alimentaire des territoires et de la France.
M. le président. La parole est à M. Stéphane Piednoir, pour présenter l’amendement n° 1983 rectifié bis.
M. Stéphane Piednoir. Nous avons pris acte du refus de la commission et du Gouvernement de supprimer l’article 19 bis. J’ai bien compris, madame la ministre, que vous souhaitiez sauvegarder le caractère opérationnel de cet article.
Le présent amendement est donc, en quelque sorte, de précision rédactionnelle : il convient de prendre en compte, notamment, les besoins des activités humaines, que vient d’évoquer Colette Mélot, et de ne pas les entraver.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. Ces deux amendements visent à ce que les mesures prises pour la préservation des ressources stratégiques pour l’alimentation en eau potable satisfassent en priorité les besoins pour la consommation humaine et les activités de production alimentaire, c’est-à-dire les prélèvements pour l’irrigation.
Il paraît nécessaire de maintenir une « super priorité » pour les besoins de la consommation humaine. Celle-ci repose aujourd’hui sur l’article L. 211-1 du code de l’environnement, lequel dispose : « La gestion équilibrée doit permettre en priorité de satisfaire les exigences de la santé, de la salubrité publique, de la sécurité civile et de l’alimentation en eau potable de la population. »
Nous plaidons, au titre de la souveraineté alimentaire de notre pays, pour que les activités de production alimentaire puissent également bénéficier d’un régime prioritaire.
Je m’en remets à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Barbara Pompili, ministre. Il ne s’agit pas d’ajouter un niveau ou d’entrer en conflit avec les dispositifs territoriaux existants, comme les périmètres de protection des captages permettant de lutter contre les pollutions accidentelles. Citons l’article L. 1321-2 du code de la santé publique, ou encore les programmes d’action spécifiques à l’échelle de l’aire d’alimentation du captage pour lutter contre les pollutions diffuses.
Les articles L. 211-3 et L. 212-1 du code de l’environnement n’ont rien à voir avec ces domaines. L’avis est donc défavorable.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 668 rectifié bis et 1983 rectifié bis.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 780 n’est pas soutenu.
Je mets aux voix l’article 19 bis, modifié.
(L’article 19 bis est adopté.)
Article 19 ter (nouveau)
L’article L. 1331-8 du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Après les mots : « limite de », la fin du premier alinéa est ainsi rédigée : « 400 %. » ;
2° Après le même premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Cette somme n’est pas recouvrée si les obligations de raccordement prévues aux articles L. 1331-1 à L. 1331-7-1 sont satisfaites dans un délai de douze mois à compter de la date d’envoi de la notification de la pénalité. »
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, sur l’article.
M. Marc Laménie. L’article 19 ter, qui a été rédigé sur l’initiative des rapporteurs de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, vise à renforcer les pénalités applicables en cas de mauvais raccordement au réseau d’assainissement.
On sait qu’il existe des dysfonctionnements en la matière. Lorsque j’étais maire d’un village de 167 habitants dans les Ardennes, nous avions lancé, dans les années 2005-2006, une étude de diagnostic. De telles études prennent du temps et sont relativement coûteuses, même si elles sont financées en partie par les agences de l’eau.
Les plus petites communes n’ont pas les moyens de mettre en place une station d’épuration ou un lagunage. Certes, des communes de 300 ou 500 habitants y parviennent, mais avec une répercussion sur le prix de l’eau potable et du traitement des eaux usées. Quant au service public d’assainissement non collectif (Spanc), mis en place pour ces petites communes, il a aussi un coût pour les particuliers.
On observe donc des dysfonctionnements, notamment des raccordements qui n’existent pas, ce qui entraîne des pollutions, certes limitées, mais qui mettent en jeu la salubrité publique. Je rappelle que les maires et les élus locaux de proximité doivent prendre en compte l’ensemble des réseaux, qu’il s’agisse de la voirie ou des réseaux d’assainissement.
Je voterai, bien entendu, l’article 19 ter. Je m’interroge cependant sur les modalités d’application de ces pénalités. Et d’abord, qui les applique ?
Dans les petites communes, il y a de moins en moins de syndicats d’eau potable. Se pose aussi le problème des compétences « eau potable et assainissement » – nous en avons débattu au sein de notre assemblée.
Je vous remercie par avance, madame la ministre, de la réponse que vous pourrez m’apporter à cet égard.
M. le président. Je mets aux voix l’article 19 ter.
(L’article 19 ter est adopté.)
Article 19 quater (nouveau)
I. – Le 8° de l’article L. 271-4 du code de la construction et de l’habitation est complété par les mots : « ou, sur les territoires dont les rejets d’eaux usées et pluviales ont une incidence sur la qualité de l’eau pour les épreuves olympiques de nage libre et de triathlon en Seine, le document établi à l’issue du contrôle du raccordement au réseau public de collecte des eaux usées mentionné au II de l’article L. 2224-8 du code général des collectivités territoriales ».
II. – Après le premier alinéa du II de l’article L. 2224-8 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le contrôle du raccordement est notamment réalisé pour tout nouveau raccordement d’un immeuble au réseau public de collecte des eaux usées conformément au premier alinéa de l’article L. 1331-1 du code de la santé publique et lorsque les conditions de raccordement sont modifiées. À l’issue du contrôle de raccordement au réseau public, la commune établit et transmet au propriétaire de l’immeuble ou, en cas de copropriété, au syndicat des copropriétaires, un document décrivant le contrôle réalisé et évaluant la conformité du raccordement au regard des prescriptions réglementaires. La durée de validité de ce document est de dix ans. Le contrôle effectué à la demande du propriétaire de l’immeuble ou du syndicat des copropriétaires est réalisé aux frais de ce dernier et la commune lui transmet ce document dans un délai fixé par décret en Conseil d’État. »
III. – Le code de la santé publique est ainsi modifié :
1° La dernière phrase de l’article L. 1331-4 est supprimée ;
2° Après le premier alinéa de l’article L. 1331-11-1, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Sur les territoires dont les rejets d’eaux usées et pluviales ont une incidence sur la qualité de l’eau pour les épreuves olympiques de nage libre et de triathlon en Seine, lors de la vente de tout ou partie d’un immeuble à usage d’habitation, le document établi à l’issue du contrôle du raccordement au réseau public de collecte des eaux usées mentionné au II de l’article L. 2224-8 du code général des collectivités territoriales est joint au dossier de diagnostic technique prévu aux articles L. 271-4 et L. 271-5 du code de la construction et de l’habitation.
« Au plus tard un mois après la signature de l’acte authentique de vente de tout ou partie d’un immeuble, le notaire rédacteur adresse à titre de simple information par tous moyens y compris par voie dématérialisée à l’autorité compétente en matière d’assainissement émettrice du document mentionné au 8° du I de l’article L. 271-4 du code de la construction et de l’habitation une attestation contenant la date de la vente, les informations nécessaires à l’identification du bien vendu ainsi que les nom et adresse de l’acquéreur de ce bien. »
IV. – Après l’article 11 de la loi n° 2018-202 du 26 mars 2018 relative à l’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024, il est inséré un article 11-1 ainsi rédigé :
« Art. 11-1. – Sur les territoires dont les rejets d’eaux usées et pluviales ont une incidence sur la qualité de l’eau pour les épreuves olympiques de nage libre et de triathlon en Seine, les propriétaires des immeubles font procéder aux travaux prescrits par le document établi en application du II de l’article L. 2224-8 du code général des collectivités territoriales dans un délai maximal de deux ans suivant la notification de ce document.
« La liste des territoires concernés est fixée par décret. »
V. – La loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis est ainsi modifiée :
1° Le III de l’article 18 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« – sur les territoires dont les rejets d’eaux usées et pluviales ont une incidence sur la qualité de l’eau pour les épreuves olympiques de nage libre et de triathlon en Seine, de faire réaliser le contrôle des raccordements de l’immeuble au réseau public de collecte des eaux usées mentionné au II de l’article L. 2224-8 du code général des collectivités territoriales et de tenir à la disposition des copropriétaires qui en font la demande le document établi à l’issue de ce contrôle. » ;
2° Après l’article 24-9, il est inséré un article 24-10 ainsi rédigé :
« Art. 24-10. – Lorsque le syndicat ne dispose pas du document mentionné au II de l’article L. 2224-8 du code général des collectivités territoriales, en cours de validité, il en fait la demande auprès de la commune. Le document établi à l’issue de ce contrôle lui est délivré dans les conditions prévues au même article L. 2224-8. »
VI. – Le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2023, à l’exception des I et III qui entrent en vigueur le 1er juillet 2023.
VII. – Par dérogation au VI, pour les territoires identifiés par le décret prévu au IV, le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2022, à l’exception des I et III qui entrent en vigueur le 1er juillet 2022.
M. le président. L’amendement n° 2260, présenté par M. P. Martin, au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 1
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Au 9° du même article L. 271-4 du code de la construction et de l’habitation, après la référence : « L. 133-8 », sont insérés les mots : « du présent code ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 19 quater, modifié.
(L’article 19 quater est adopté.)
Article 19 quinquies (nouveau)
Après le premier alinéa de l’article L. 2224-9 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les entrepreneurs de forage doivent tenir un registre et déclarer en mairie, dans un délai de trois mois, tous les forages d’eau qu’ils réalisent quel qu’en soit l’usage. Les informations relatives à cette déclaration sont tenues à disposition du représentant de l’État dans le département et transmises aux agents des services publics d’eau potable et de la collecte des eaux usées. Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article. » – (Adopté.)
Articles additionnels après l’article 19 quinquies
M. le président. Je suis saisi de six amendements identiques.
L’amendement n° 962 rectifié est présenté par Mme Taillé-Polian, MM. Benarroche, Dantec et Gontard, Mmes de Marco et Poncet Monge et M. Salmon.
L’amendement n° 1182 rectifié ter est présenté par Mme M. Carrère, MM. Corbisez et Cabanel, Mme N. Delattre, MM. Gold et Guérini, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et MM. Requier, Roux et Bilhac.
L’amendement n° 1238 rectifié bis est présenté par MM. Pellevat et Burgoa, Mmes Dumas et Garriaud-Maylam, M. de Nicolaÿ, Mme Deromedi, MM. Sido et D. Laurent, Mme Lassarade, MM. B. Fournier, Perrin, Laménie, Genet et Charon, Mmes Bellurot et Joseph, M. Houpert, Mme Gosselin, MM. Rojouan et Bouchet, Mme Dumont et MM. Brisson et Husson.
L’amendement n° 1732 rectifié est présenté par Mme G. Jourda, M. J. Bigot, Mme Van Heghe, MM. Tissot, Montaugé et Kanner, Mme Bonnefoy, MM. Dagbert et Devinaz, Mme M. Filleul, MM. Gillé, Houllegatte et Jacquin, Mmes Préville, Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 1749 rectifié bis est présenté par MM. Lafon et Delcros, Mme de La Provôté, M. Levi, Mme Sollogoub, M. Kern, Mmes Billon et Perrot et MM. Détraigne et Moga.
L’amendement n° 1792 rectifié bis est présenté par M. Iacovelli, Mme Havet, M. Théophile, Mme Duranton, MM. Bargeton, Haye et Marchand, Mme Schillinger et M. Buis.
Ces six amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 19 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre II du titre Ier du livre V du code de l’environnement est ainsi modifié :
1° Après le premier alinéa de l’article L. 512-5 et après le premier alinéa du III de l’article L. 512-7, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Pour certaines catégories d’installations qui ne sont soumises ni à la directive 2010/75/UE du Parlement européen et du Conseil du 24 novembre 2010 relative aux émissions industrielles au titre de son annexe I, ni à une obligation d’évaluation environnementale systématique au titre de l’annexe I de la directive 85/337/CEE du 27 juin 1985 concernant l’évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l’environnement, ni à des obligations de surveillance régulière des eaux souterraines, ces règles et prescriptions incluent des exigences relatives à la surveillance, au maximum décennale, de la qualité des sols et des eaux souterraines. Les catégories d’installations concernées par ces exigences sont précisées par décret. » ;
2° Après le premier alinéa de l’article L. 512-9, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Pour certaines catégories d’installations dont l’activité est susceptible de présenter un risque accru pour la protection des intérêts visés à l’article L. 511-1, ces prescriptions incluent des exigences relatives à la surveillance, au maximum décennale, de la qualité des sols et des eaux souterraines. Les catégories d’installations concernées par ces exigences sont précisées par décret. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
IV. – La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du I est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
V. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour présenter l’amendement n° 962 rectifié.
Mme Sophie Taillé-Polian. Je tiens à saluer le travail acharné de notre collègue Gisèle Jourda, rapporteure de la commission sénatoriale d’enquête sur les problèmes sanitaires et écologiques liés aux pollutions des sols qui ont accueilli des activités industrielles ou minières, et sur les politiques publiques et industrielles de réhabilitation de ces sols. Ces questions lui tiennent en effet à cœur, et c’est aussi le cas pour de nombreux élus d’autres départements – je citerai notamment le Val-de-Marne.
Cet amendement vise à élargir les exigences relatives à la surveillance, au maximum décennale, de la qualité des sols et des eaux souterraines pour les ICPE. Cette surveillance doit être accrue et régulière afin d’éviter les catastrophes que nous connaissons dans de nombreux territoires, et pour lesquelles on a bien du mal à trouver des voies de sortie.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour présenter l’amendement n° 1182 rectifié ter.
M. Jean-Claude Requier. Il est défendu.
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour présenter l’amendement n° 1238 rectifié bis.
M. Marc Laménie. Il est défendu.
M. le président. La parole est à Mme Martine Filleul, pour présenter l’amendement n° 1732 rectifié.
Mme Martine Filleul. Cet amendement a été déposé par Gisèle Jourda, dont vous connaissez le dévouement au service de la lutte contre la pollution des sols.
La commission d’enquête sur les problèmes sanitaires et écologiques liés aux pollutions des sols qui ont accueilli des activités industrielles ou minières a recommandé d’inclure dans le code de l’environnement des exigences relatives à la surveillance, au maximum décennale, de la qualité des sols et des eaux souterraines pour les installations classées pour la protection de l’environnement, les ICPE. Notre objectif est de sécuriser la remise en état des sites et d’améliorer la surveillance des sols. Notre ambition, je le répète, est de toujours mieux prévenir et gérer les pollutions, ainsi que les risques sanitaires qui y sont associés.
Nous avons traduit cette préconisation dans l’article 12 de la proposition de loi issue des travaux de la commission d’enquête précédemment évoquée. De quoi s’agit-il ?
Dans ses réponses au questionnaire de la commission d’enquête, la Confédération des organismes indépendants tierce partie de prévention, de contrôle et d’inspection a relevé qu’à sa connaissance aucun arrêté ministériel des prescriptions générales pour les ICPE soumises à déclaration ne fixait de contrainte et, donc, a fortiori, de points de contrôle relatifs au suivi de la pollution des sols et des eaux souterraines. Dans ces conditions, nous souhaitons inclure des exigences relatives à la surveillance, au maximum décennale, de la qualité des sols et des eaux souterraines dans les arrêtés ministériels et dans les arrêtés préfectoraux relatifs aux ICPE soumises à autorisation environnementale ou à enregistrement, mais non soumises à des obligations de rapport de base ou de surveillance régulière des eaux souterraines.
Tel est l’objet de l’article 12 de notre proposition de loi, que nous avons décidé de traduire dans cet amendement au présent projet de loi Climat et résilience.
M. le président. La parole est à M. Laurent Lafon, pour présenter l’amendement n° 1749 rectifié bis.
M. Laurent Lafon. J’étais président de la commission d’enquête qui a été citée, et je veux préciser que les préconisations contenues dans le rapport y afférent ont été votées à l’unanimité des groupes. C’est pourquoi le même amendement est présenté par plusieurs groupes.
Notre travail avait très clairement montré qu’il y avait des trous dans la raquette en matière de législation sur la pollution des sols. Cet amendement vise à corriger l’un de ces trous. D’autres amendements suivront, avec le même objectif.
M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour présenter l’amendement n° 1792 rectifié bis.
Mme Patricia Schillinger. Il est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. La commission d’enquête du Sénat sur les problèmes sanitaires et écologiques liés aux pollutions des sols qui ont accueilli des activités industrielles ou minières, et sur les politiques publiques et industrielles de réhabilitation de ces sols, qui était présidée par Laurent Lafon et dont la rapportrice était Gisèle Jourda, a effectué un travail très important.
Certaines propositions figurant dans le rapport de la commission d’enquête ont d’ailleurs été reprises par le Gouvernement dans le projet de loi que nous examinons. Je pense à l’article 20 relatif à l’arrêt des travaux miniers, que nous examinerons dans quelques minutes.
Ces amendements correspondent à la proposition n° 18 du rapport de la commission d’enquête et partent du constat de l’extrême difficulté technique de mesurer l’état de la pollution des sols. Si la surveillance des eaux souterraines est plus facile à mettre en œuvre, elle pourrait être réalisée plus fréquemment.
Ces amendements vont donc dans le sens d’une meilleure protection de la qualité des sols et des eaux et permettent de combler d’éventuels trous dans la raquette, pour reprendre l’expression du président Lafon, en matière de surveillance de certains sites classés.
En conséquence, l’avis est favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Barbara Pompili, ministre. Cette commission d’enquête a effectivement accompli un travail intéressant. Nous avons d’ailleurs repris quelques-unes de ses préconisations, notamment dans la partie relative au code minier, que nous allons examiner dans quelques instants.
En revanche, ces amendements sont déjà satisfaits par le droit existant. De plus, leur adoption entraînerait un certain nombre de conséquences provoquant un recul de la protection de l’environnement.
Ces amendements visent à imposer une surveillance décennale de la qualité des sols et des eaux souterraines pour l’ensemble des installations classées.
Conformément à la directive IED, relative aux émissions industrielles, le code de l’environnement prévoit déjà pour les sites relevant de cette directive une surveillance périodique des sols et des eaux souterraines, au moins une fois tous les dix ans pour les premiers et au moins une fois tous les cinq ans pour les secondes.
Pour les autres sites soumis à autorisation ne relevant pas de cette directive et ceux soumis à enregistrement et déclaration, une surveillance éventuellement plus contraignante peut déjà être imposée pour des activités à risques pour les sols ou les eaux souterraines, par des arrêtés ministériels de prescription générale.
Par ailleurs, au regard du dossier de demande d’autorisation ou d’enregistrement et des risques associés, ou sur la base d’un constat réalisé lors d’une inspection, le préfet peut prescrire à l’exploitant une surveillance régulière des eaux souterraines par les arrêtés préfectoraux d’autorisation ou d’enregistrement, y compris lorsque les installations ne relèvent pas de la directive IED.
Il est donc contre-productif, d’une part, d’imposer une surveillance de certaines catégories d’installation sans tenir compte des cas d’espèce et, d’autre part, de limiter à dix ans la possibilité de les soumettre à surveillance.
Ces amendements étant satisfaits, j’émets un avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 962 rectifié, 1182 rectifié ter, 1238 rectifié bis, 1732 rectifié, 1749 rectifié bis et 1792 rectifié bis.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 19 quinquies.
Je suis saisi de six amendements identiques.
L’amendement n° 963 rectifié bis est présenté par Mme Taillé-Polian, MM. Benarroche, Dantec et Gontard, Mmes de Marco et Poncet Monge et M. Salmon.
L’amendement n° 1183 rectifié quater est présenté par Mme M. Carrère, MM. Corbisez et Cabanel, Mme N. Delattre, MM. Gold et Guérini, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et MM. Requier, Roux et Bilhac.
L’amendement n° 1239 rectifié bis est présenté par MM. Pellevat et Burgoa, Mmes Dumas et Garriaud-Maylam, M. de Nicolaÿ, Mme Deromedi, MM. Sido et D. Laurent, Mme Lassarade, MM. B. Fournier, Perrin, Laménie, Genet et Charon, Mmes Bellurot et Joseph, M. Houpert, Mme Gosselin, MM. Rojouan et Bouchet, Mme Dumont et MM. Brisson et Husson.
L’amendement n° 1305 rectifié bis est présenté par M. Savoldelli, Mme Varaillas et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 1733 rectifié bis est présenté par Mme G. Jourda, M. J. Bigot, Mme Van Heghe, MM. Tissot, Montaugé et Kanner, Mme Bonnefoy, MM. Dagbert et Devinaz, Mme M. Filleul, MM. Gillé, Houllegatte et Jacquin, Mmes Préville, Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 1793 rectifié ter est présenté par M. Iacovelli, Mme Havet, M. Théophile, Mme Duranton, MM. Bargeton et Marchand, Mme Schillinger et M. Buis.
Ces six amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 19 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans les six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur les conditions d’élargissement des missions de l’Office français de la biodiversité aux missions de prévention et de surveillance de la qualité des sols et des eaux souterraines.
La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour présenter l’amendement n° 963 rectifié bis.
Mme Sophie Taillé-Polian. À l’issue de la commission d’enquête déjà évoquée, il est apparu que les attributions de l’Office français de la biodiversité pourraient être très avantageusement élargies aux missions de prévention et de surveillance de la qualité des sols et des eaux souterraines.
Pour des raisons de recevabilité, nous nous contentons de proposer un rapport. Mais, bien au-delà, il semble important que cet office soit davantage présent face à ces questions et à ces enjeux.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Corbisez, pour présenter l’amendement n° 1183 rectifié quater.
M. Jean-Pierre Corbisez. Dans sa rédaction initiale, cet amendement tendait à reprendre l’article 20 de la proposition de loi déposée par notre collègue Gisèle Jourda à l’issue des travaux de notre commission d’enquête. Il s’agissait d’inscrire la prévention et la surveillance des risques d’atteinte à la biodiversité liés à la pollution des sols parmi les missions de l’Office français de la biodiversité. Mais, ainsi rédigées, ces dispositions auraient été jugées irrecevables au motif qu’elles aggravaient une charge publique. Aussi, cet amendement a été modifié au profit d’une demande de rapport.
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour présenter l’amendement n° 1239 rectifié bis.
M. Marc Laménie. Cet amendement a été déposé par M. Pellevat et plusieurs de nos collègues. Certes, les demandes de rapport reçoivent rarement un avis favorable, mais, en l’occurrence, l’enjeu est d’une grande importance.
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour présenter l’amendement n° 1305 rectifié bis.
M. Pascal Savoldelli. Comme nous avons travaillé ensemble au sein de la commission d’enquête, nous déposons les mêmes amendements, afin de dégager des préconisations concrètes à partir de nos travaux.
Notre premier axe, c’est l’amélioration de la qualité et de la lisibilité de l’information dédiée aux sites et sols pollués. Il s’agit là d’une demande de nos concitoyens comme des acteurs publics et privés.
Notre deuxième axe, c’est l’amélioration de la surveillance des sites exploités et des sols. À cet égard, nous visons un double objectif : prévenir et gérer les pollutions. Madame la ministre, cette question n’est pas sans lien avec la relance, car cet effort nous garantira une capacité de relance beaucoup plus importante.
Notre troisième axe, c’est la réunion des conditions d’une gestion réactive et transparente des risques sanitaires ainsi qu’une meilleure répartition des préjudices écologiques. Ce faisant, nous articulons les enjeux sanitaires et environnementaux.
C’est pourquoi notre groupe préconise d’inscrire dans le code de l’environnement un mécanisme de surveillance des sols et des eaux souterraines sous les installations classées pour la protection de l’environnement.
Enfin, j’ai écouté votre argumentation sur les amendements précédents. Elle était en partie juste : effectivement, le préfet peut. Mais nous, ce que nous voulons, c’est écrire « le préfet doit ».
M. le président. La parole est à M. Joël Bigot, pour présenter l’amendement n° 1733 rectifié bis.
M. Joël Bigot. Mieux prévenir et mieux gérer les pollutions des sols et les risques sanitaires qui y sont associés est une priorité : c’est l’une des ambitions de la proposition de loi visant à refonder la politique de gestion et de protection des sites et sols pollués en France.
Mes chers collègues, vous êtes nombreux à avoir cosigné ce texte, et Mme Jourda vous en remercie.
L’article 20 inscrit la prévention et la surveillance des risques d’atteinte à la biodiversité liés à la pollution des sols parmi les missions de l’Office français de la biodiversité.
Aujourd’hui, l’OFB assure notamment le développement de la connaissance, de la recherche et de l’expertise sur les espèces, les milieux, leurs fonctionnalités et leurs usages, sur les services écosystémiques, sur les liens entre le changement climatique et la biodiversité ainsi que sur les risques sanitaires en lien avec la faune sauvage. Cet organisme nous semble le mieux placé pour remplir une mission de prévention et de surveillance de la qualité des sols et des eaux souterraines.
Dans la continuité de ces travaux, nous voulons donc renforcer le rôle de l’OFB en matière de prévention et de surveillance des risques d’atteinte à la biodiversité en inscrivant au titre de ses missions le développement de la connaissance relative aux impacts de la pollution des sols sur la biodiversité.
Ainsi, nous avons voulu traduire cette préconisation dans le présent texte. Malheureusement, l’article 40 nous en a empêchés. Nous voilà condamnés à demander un rapport sur les conditions d’élargissement des missions de l’Office français de la biodiversité. C’est bien dommage !
Madame la ministre, la connaissance de l’impact de la pollution et de l’artificialisation des sols sur les écosystèmes et la biodiversité mérite d’être approfondie. Nous aurons certainement l’occasion d’y revenir lors de ce débat, car l’artificialisation des sols fera partie des sujets que nous allons aborder. Je ne vous cache pas que nous souhaitons des avancées en ce sens.
Mes chers collègues, pour l’ensemble de ces raisons, je vous invite à adopter cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour présenter l’amendement n° 1793 rectifié ter.
Mme Patricia Schillinger. Il est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. Ces six amendements visent à demander la remise d’un rapport au Parlement sur les conditions d’élargissement des attributions de l’Office français de la biodiversité aux missions de prévention et de surveillance de la qualité des sols et des eaux souterraines.
Je ne suis pas favorable à un énième rapport : si la nécessité d’élargir les missions de l’OFB fait consensus, emparons-nous du projet de loi de finances pour confier aux inspecteurs de l’environnement affectés à l’OFB la police de la qualité des sols et des eaux souterraines.
J’émets un avis défavorable sur ces six amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Barbara Pompili, ministre. Je ne sais pas si, dans le cadre de votre commission d’enquête, vous avez auditionné des agents de l’OFB. Pour ce qui me concerne, j’ai des contacts réguliers avec eux, et c’est bien normal.
Cet office vient de subir deux et même trois réorganisations. Plusieurs organismes ont fusionné en un seul il y a deux ans ; l’Office national de la chasse et de la faune sauvage les a rejoints cette année dans le cadre d’une nouvelle fusion.
J’étais, à l’Assemblée nationale, rapporteure du projet de loi qui a créé l’OFB, et j’en suis très fière. Nous avons donné à ces agents des missions extrêmement larges. Dès lors, le premier enjeu, c’est de bien installer cet office pour qu’il puisse monter en puissance et s’organiser au mieux. Aujourd’hui, il peine à assumer un certain nombre de ses missions compte tenu du vaste mouvement de réorganisation en cours.
Lui confier de nouvelles missions aujourd’hui assumées par d’autres acteurs me paraît au mieux prématuré ; au pire, il s’agit d’une mauvaise idée.
Les agents de l’OFB ont déjà des prérogatives en matière de pollution des eaux. Quant à la pollution des sols, elle relève des inspecteurs des installations classées. Ces derniers peuvent s’appuyer sur l’expertise du BRGM et de l’Ineris. Bref, les rôles sont déjà répartis.
Mesdames, messieurs les sénateurs, vous êtes évidemment libres de votre vote. Si je prends la parole longuement, c’est pour voir figurer cette précision au compte rendu : je ne souhaite pas que l’on accroisse encore la charge de travail de l’OFB. Je souhaite que cet organisme puisse prendre réellement son essor, ce qui suppose de ne pas élargir sans cesse ses missions. Laissons-le s’installer.
Je suis défavorable à ces amendements.
M. le président. La parole est à M. Joël Bigot, pour explication de vote.
M. Joël Bigot. Madame la ministre, je vous remercie de cette réponse enflammée. Vous évoquez les attributions de l’OFB, mais il faudrait également revenir sur l’évolution de ses effectifs : de fait, il est difficile d’assumer des missions supplémentaires tout en subissant des suppressions de postes.
Dans le cadre de cette commission d’enquête, nous avons auditionné plusieurs organismes. Tous ont abouti au constat que les moyens étaient insuffisants pour analyser les sols en vue de leur dépollution et, donc, de leur remobilisation – j’ai déjà eu l’occasion de le dire.
Dans les mois qui viennent, il va falloir trouver des solutions afin de conjuguer l’artificialisation des sols, qui signifie leur inutilisation, et leur dépollution. À cette fin, le projet de loi de finances n’est pas le seul levier. Je pressens qu’au cours des débats budgétaires on nous opposera telle ou telle impossibilité ou bien on nous dira qu’il faut faire des choix – nous verrons…
Cela étant, vous affichez un certain nombre d’ambitions, notamment pour ce qui concerne l’artificialisation des sols : nous les mettrons en regard des enjeux de pollution des sols !
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. Merci à notre collègue Joël Bigot d’avoir relevé un axe important dans la réponse du Gouvernement. Si la ministre émet un avis défavorable, ce n’est pas, bien évidemment, parce qu’elle remet en cause les compétences des agents de l’Office français de la biodiversité, mais parce qu’elle pense que, si le Sénat adoptait ces amendements, ça ferait un appel d’air pour de nouveaux recrutements, ce qui est indispensable pour que l’OFB puisse agir avec réactivité et anticipation.
Madame la ministre, nous avons déjà débattu de cette question dans le cadre du projet de loi de finances et au sein de la commission d’enquête. Je ne vous mettrai pas au défi de me dire le nombre de structures qui accueillent des enfants et qui, d’après les deux bases de données que nous avons utilisées, mériteraient une analyse des sols, compte tenu de leurs utilisations passées.
Nous avons abordé ce problème dans l’hémicycle : faut-il consacrer 10, 20, 50 ou 60 millions d’euros pour rattraper le retard accumulé en la matière et, ce faisant, rassurer l’ensemble des personnes concernées ? Le sujet est assez grave pour qu’on s’efforce de trouver une solution. L’enjeu est à la fois sanitaire et écologique.
M. le président. La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour explication de vote.
Mme Sophie Taillé-Polian. Le ministère de la transition écologique a subi de nombreuses suppressions de postes ces dernières années : les chiffres sont si élevés que l’on peine à y croire.
On multiplie les fusions, on regroupe les structures et les offices. En définitive, on a tellement réorganisé qu’on a tout désorganisé ! Je viens de le vérifier : en trois ans, ce sont 4 900 postes que l’on a prévu de supprimer. Dans ces conditions, il est évidemment difficile d’assumer des missions supplémentaires.
Or, pour mettre en œuvre les ambitions de ce projet de loi, il faudrait revoir les plafonds d’emplois à la hausse : c’est une évidence. Toutes ces réorganisations aboutissent à des désorganisations et nuisent à la politique qui devrait être menée.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 963 rectifié bis, 1183 rectifié quater, 1239 rectifié bis, 1305 rectifié bis, 1733 rectifié bis et 1793 rectifié ter.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L’amendement n° 304 rectifié bis est présenté par MM. Requier, Corbisez, Bilhac et Cabanel, Mme N. Delattre, MM. Gold, Guiol et Roux, Mme M. Carrère, M. Guérini et Mmes Guillotin et Pantel.
L’amendement n° 604 rectifié bis est présenté par Mme Paoli-Gagin, MM. Chasseing, Decool, Guerriau et Lagourgue, Mme Mélot et MM. Menonville, A. Marc et Capus.
L’amendement n° 731 rectifié bis est présenté par Mme Préville, MM. Jeansannetas et Bourgi, Mme Poumirol, M. Pla, Mme Jasmin, M. Devinaz, Mme Bonnefoy, M. Michau et Mme Conway-Mouret.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 19 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
En application de l’article 72 de la Constitution, une expérimentation est engagée pour une période de cinq années à compter de la date de promulgation de la présente loi en vue de favoriser une meilleure traduction des stratégies de gestion des eaux pluviales à la source, telle que prévue par l’article L. 2224-10 du code général des collectivités territoriales dans les demandes d’autorisation d’occupation des sols.
Cette expérimentation est engagée par l’autorité compétente pour l’ensemble des autorisations et actes relatifs à l’occupation ou à l’utilisation du sol. La demande d’expérimentation est transmise au représentant de l’État dans le département concerné avant le 30 juin 2022. Les autorités demandant à participer à l’expérimentation en informent l’agence de l’eau ou, dans les départements d’outre-mer, l’office de l’eau.
Pour la mise en œuvre de l’expérimentation, l’autorité susmentionnée est autorisée à déroger pour les permis d’aménager aux articles R. 441-1 à R. 441-8-3 du code de l’urbanisme, pour les permis de construire aux articles R. 431-5 à R. 431-12 du même code, pour les déclarations préalables aux articles R. 431-35 à R. 431-37 dudit code en exigeant une pièce supplémentaire non visée, permettant de vérifier la conformité avec la gestion des eaux pluviales en vigueur sur le territoire en application de l’article L. 2224-10 du code général des collectivités territoriales.
Un organisme défini par décret est chargé du suivi et de l’évaluation de l’expérimentation. Il remet au Gouvernement, avant la fin de l’année 2027, un rapport décrivant les actions engagées dans le cadre de l’expérimentation et, avant la fin de l’année 2028, un rapport d’évaluation et de proposition.
Ces rapports sont transmis aux autorités qui ont participé à l’expérimentation pour observations. L’agence de l’eau et, dans les départements d’outre-mer, l’office de l’eau peuvent apporter des aides aux études de définition et de suivi de l’expérimentation, dans la limite de 80 % des dépenses.
La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour présenter l’amendement n° 304 rectifié bis.
M. Jean-Claude Requier. Avec cet amendement, nous proposons une expérimentation permettant aux collectivités territoriales de faire respecter la stratégie de gestion des eaux pluviales par les pétitionnaires d’autorisations d’urbanisme, en exigeant la preuve du bon respect des règles établies par le zonage pluvial.
Cet amendement vise à permettre aux collectivités chargées de l’urbanisme, en coordination avec la collectivité chargée de la compétence de la gestion des eaux pluviales urbaines, de simplifier et de systématiser ces procédures au service de l’eau et de l’équité de traitement entre les porteurs de projet.
M. le président. La parole est à Mme Colette Mélot, pour présenter l’amendement n° 604 rectifié bis.
Mme Colette Mélot. Les collectivités territoriales ont besoin d’un outil supplémentaire pour faire respecter leur stratégie de gestion des eaux pluviales par les pétitionnaires : il doit leur permettre d’intervenir suffisamment en amont pour simplifier la gestion des eaux pluviales, de la part des pétitionnaires et des services de la collectivité, au bénéfice des premiers comme des seconds, mais aussi au profit des habitants.
C’est cet outil que nous proposons de créer. L’adoption de cet amendement permettrait également de rationaliser les finances publiques, pour ce qui concerne la gestion des eaux pluviales urbaines, et de concourir à de nombreux autres objectifs majeurs liés à l’atténuation du changement climatique et à l’adaptation des territoires face à ces évolutions.
M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour présenter l’amendement n° 731 rectifié bis.
Mme Angèle Préville. Cet amendement vise à permettre aux collectivités chargées de l’urbanisme qui le souhaitent, en coordination avec la collectivité chargée de la compétence de la gestion des eaux pluviales urbaines, d’expérimenter diverses solutions pour simplifier et systématiser ces procédures au service de l’eau et de l’équité de traitement entre les porteurs de projet.
Grâce à ce dispositif, les collectivités territoriales pourraient exprimer leur créativité et l’intelligence collective pourrait s’exercer dans un but vertueux. Il s’agit non seulement de mener à bien des simplifications, mais d’accomplir des progrès dans la gestion des eaux pluviales. Nous le savons, les expériences grandeur nature seront précieuses dans la recherche de solutions aux problèmes que nous connaissons. Elles seront menées pour le bien de tous.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. Les auteurs de ces amendements proposent le lancement d’une expérimentation sur le fondement de l’article 72 de la Constitution, portant sur la gestion des eaux pluviales à la source.
Les autorisations d’urbanisme doivent d’ores et déjà respecter le zonage pluvial et les règles de gestion des eaux pluviales. Même si la vérification de leur respect ne fait pas l’objet d’une pièce spécifique dans le dossier de permis de construire, elles peuvent être contrôlées au titre des pièces existantes pouvant faire l’objet d’une demande de pièces complémentaires.
L’ajout d’une nouvelle pièce spécifique viendrait complexifier, renchérir et alourdir le dossier de demande d’autorisation d’urbanisme. En outre, cette question relève plutôt du pouvoir réglementaire : on pourrait donc la traiter par décret, sans passer par un dispositif expérimental.
Pour ces raisons, la commission est défavorable à ces trois amendements identiques.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Barbara Pompili, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable, pour les raisons que M. le rapporteur vient d’indiquer – cette question est effectivement de nature réglementaire.
Monsieur Savoldelli, vous avez évoqué la pollution des sols à proximité des écoles et des crèches qui, aujourd’hui, ne serait pas encore détectée.
Désormais, cette question relève des collectivités territoriales. À ce titre, la démarche arrêtée en 2016 peut être reprise par les collectivités qui le souhaitent.
Toutefois, un certain nombre de petites communes n’ont pas forcément les moyens d’engager ces procédures. Je saisis cette occasion pour le répéter : les petites collectivités qui veulent entreprendre une recherche de pollution des sols à proximité de friches industrielles jouxtant des écoles ou des crèches peuvent bénéficier d’une aide du ministère. Dans ce cadre, les coûts de diagnostic sont couverts à hauteur de 50 %.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 304 rectifié bis, 604 rectifié bis et 731 rectifié bis.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Article 20
I. – Le code minier est ainsi modifié :
1° A L’article L. 142-9 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Lorsque le titre minier est délivré, le représentant de l’État dans le département peut instaurer une commission spéciale de suivi selon les modalités prévues à l’article L. 125-2-1 du code de l’environnement. » ;
1° La première phrase de l’article L. 161-1 est ainsi modifiée :
a) Après la seconde occurrence du mot : « sécurité », sont insérés les mots : « , de la santé » ;
b) Après le mot : « terrestre », il est inséré le mot : « , littoral » ;
c) Après la référence : « L. 211-1, », est insérée la référence : « L. 219-7, » ;
d) Après le mot : « environnement, », sont insérés les mots : « l’intégrité des câbles, des réseaux ou des canalisations enfouis ou posés, » ;
e) Les mots : « , particulièrement de ceux mentionnés aux articles L. 621-7 et L. 621-30 du code du patrimoine » sont remplacés par les mots : « , à la conservation des monuments historiques classés ou inscrits, des abords de monuments historiques et des sites patrimoniaux remarquables mentionnés au livre VI du code du patrimoine » ;
f) Après le mot : « agricoles », sont insérés les mots : « et halieutiques » ;
1° bis L’article L. 162-2 est ainsi rédigé :
« Art. L. 162-2. – L’autorisation d’ouverture de travaux miniers est soumise à la constitution de garanties financières, sous réserve des dispositions prévues à l’article L. 516-1 du code de l’environnement.
« Ces garanties financières sont destinées à assurer, suivant la nature et l’importance des dangers ou inconvénients que ces travaux peuvent représenter :
« 1° Les mesures d’arrêt des travaux à réaliser dans le cadre de la procédure prévue au chapitre III du présent titre ;
« 2° La surveillance du site et le maintien en sécurité des installations ;
« 3° Les interventions éventuelles en cas d’accident avant ou après la fermeture du site.
« Dans les mines comportant des installations de gestion de déchets dont la défaillance de fonctionnement ou d’exploitation, telle que l’effondrement d’un terril ou la rupture d’une digue, pourrait causer un accident majeur, ces garanties financières sont également destinées à assurer, pour les installations de gestion de déchets concernées :
« a) Leur remise en état ;
« b) Leur surveillance et leur maintien en sécurité ;
« c) Les interventions éventuelles en cas d’accident avant ou après leur fermeture.
« Dans ce cas, les garanties financières sont calculées sur la base d’une évaluation du risque prenant en compte des facteurs tels que la taille, actuelle ou future, la localisation des installations de gestion des déchets et leur incidence sur l’environnement.
« Dans tous les cas, les garanties financières ne couvrent pas les indemnisations dues par l’exploitant aux tiers qui subiraient un préjudice du fait de pollutions ou d’accidents causés par les travaux ou les installations.
« L’autorité administrative compétente peut déterminer, après consultation de l’exploitant, la nature des garanties financières auxquelles elle subordonne la délivrance de l’autorisation d’ouverture des travaux miniers.
« Un décret en Conseil d’État définit la nature des garanties pouvant être constituées et les règles de fixation de leur montant. » ;
2° L’article L. 163-6 est ainsi rédigé :
« Art. L. 163-6. – La déclaration d’arrêt des travaux transmise par l’exploitant est soumise par l’autorité administrative à la procédure de participation du public prévue à l’article L. 123-19-2 du code de l’environnement.
« Lorsqu’une commission de suivi du projet minier a été constituée, elle rend un avis sur la déclaration d’arrêt des travaux transmise par l’exploitant. Cet avis est mis à la disposition du public sur le site internet des préfectures des départements concernés.
« Après avoir consulté les conseils municipaux des communes ou les organes délibérants des établissements publics de coopération intercommunale concernés, pris en considération les observations formulées lors de la procédure de participation, saisi pour avis, si elle l’estime utile au vu des enjeux, le conseil départemental de l’environnement et des risques sanitaires et technologiques ou, en Guyane, la commission départementale des mines et entendu l’explorateur ou l’exploitant, l’autorité administrative, au vu de la déclaration transmise, prescrit, en tant que de besoin, les mesures à exécuter et les modalités de réalisation qui auraient été insuffisamment précisées ou omises. Elle indique le délai dans lequel ces mesures doivent être exécutées.
« Lorsque, à défaut de transmission d’une déclaration d’arrêt des travaux, l’autorité administrative veut prescrire d’office les mesures nécessaires, en application de l’article L. 163-2, elle soumet préalablement les mesures envisagées à la même procédure de participation du public et aux mêmes consultations que celles prévues au troisième alinéa du présent article. » ;
3° L’article L. 163-9 est ainsi rédigé :
« Art. L. 163-9. – Lorsque les mesures envisagées par l’explorateur ou l’exploitant ou prescrites par l’autorité administrative ont été exécutées, cette dernière en donne acte à l’explorateur ou à l’exploitant. L’accomplissement de cette formalité met fin à l’exercice de la police des mines au titre des travaux miniers.
« Pendant une période de trente ans suivant l’accomplissement de cette formalité, l’explorateur ou l’exploitant, son ayant droit ou la personne qui s’y est substituée demeure tenu, à l’égard des intérêts énumérés à l’article L. 161-1, par les obligations de prévention, de remédiation et de surveillance découlant de l’arrêt des travaux miniers. À l’issue de cette période, l’ancien explorateur ou exploitant a la charge de mettre à la disposition de l’État tout élément qui lui serait nécessaire pour l’accomplissement de ses missions de prévention, de remédiation et de surveillance des anciennes concessions.
« Durant la période mentionnée au deuxième alinéa du présent article, afin de prévenir ou de faire cesser, sur un bien ou dans un site qui a été le siège d’activités régies par le présent code, des dangers ou des risques graves pour la préservation des intérêts énumérés à l’article L. 161-1, l’autorité administrative peut, à tout moment, exercer les pouvoirs de police qu’elle tient de l’article L. 173-2, dans des conditions, définies par décret en Conseil d’État, tenant compte de la situation telle qu’elle ressort des analyses conduites lors de l’arrêt des travaux.
« Le transfert prévu au deuxième alinéa de l’article L. 163-11 ou le transfert à l’État prévu à l’article L. 174-2 libère de ses obligations l’explorateur ou l’exploitant, son ayant droit ou la personne s’y étant substituée, dans la mesure toutefois où les installations ou équipements de sécurité sont effectivement transférés en application des mêmes articles L. 163-11 ou L. 174-2. » ;
4° Le chapitre Ier du titre VII du livre Ier est complété par un article L. 171-3 ainsi rédigé :
« Art. L. 171-3. – Lorsque l’explorateur ou l’exploitant est une société filiale d’une autre société au sens de l’article L. 233-1 du code de commerce et qu’une procédure de liquidation judiciaire a été ouverte ou prononcée à son encontre, le liquidateur, le ministère public ou le représentant de l’État dans le département peut saisir le tribunal ayant ouvert ou prononcé la liquidation judiciaire pour faire établir l’existence d’une faute caractérisée commise par la société mère qui a contribué à une insuffisance d’actif de la filiale et pour lui demander, lorsqu’une telle faute est établie, de mettre à la charge de la société mère tout ou partie du financement des mesures d’arrêt des travaux des sites en fin d’activité ou des mesures nécessaires à la réparation des dommages mentionnés à l’article L. 155-3 du présent code.
« Lorsque la société mère condamnée dans les conditions prévues au premier alinéa du présent article n’est pas en mesure de financer les mesures mentionnées au même premier alinéa incombant à sa filiale, l’action mentionnée audit premier alinéa peut être engagée à l’encontre de la société dont elle est la filiale au sens de l’article L. 233-1 du code de commerce, si l’existence d’une faute caractérisée commise par la société mère ayant contribué à une insuffisance d’actif de la filiale est établie. L’action peut être également engagée à l’encontre de la société dont la société condamnée en application du présent alinéa est la filiale au sens du même article L. 233-1, dès lors que cette dernière société n’est pas en mesure de financer les mesures mentionnées au premier alinéa du présent article incombant à sa filiale.
« Lorsque des mesures ont été exécutées d’office en application de l’article L. 163-7 du présent code, les sommes consignées sont déduites des sommes mises à la charge des sociétés condamnées en application des deux premiers alinéas du présent article. » ;
4° bis Après l’article L. 174-5, il est inséré un article L. 174-5-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 174-5-1. – Lorsque des travaux miniers ou des autorisations d’exploitation sont susceptibles de créer des dangers ou des risques très importants pour la santé ou la sécurité des populations ou pour l’environnement, protégés au titre de l’article L. 161-1, des servitudes d’utilité publique peuvent être instituées au cours de l’exploitation ou de la procédure d’arrêt des travaux, sans préjudice de l’article L. 264-1.
« Ces servitudes peuvent prévoir la limitation ou l’interdiction des modifications de l’état du sol ou du sous-sol, la limitation ou l’interdiction d’usages du sol, du sous-sol ou des nappes phréatiques ainsi que la subordination de ces usages ou de l’exécution de travaux soumis à permis de construire à la mise en œuvre de prescriptions particulières. Ces servitudes peuvent également prévoir la mise en œuvre de prescriptions relatives à la surveillance du site.
« Ces servitudes sont instituées par l’autorité compétente pour la délivrance de l’autorisation d’ouverture de travaux miniers, selon une procédure définie par décret en Conseil d’État.
« Elles sont rendues opposables et, le cas échéant, indemnisées dans les conditions prévues aux articles L. 515-9 à L. 515-11 du code de l’environnement. » ;
5° Le 4° de l’article L. 661-3 est ainsi modifié :
a) Les mots : « après avoir » sont supprimés ;
b) (nouveau) Après le mot : « intéressées », la fin est ainsi rédigée : « ou les organes délibérants des établissements publics de coopération intercommunale concernés, pris en considération les observations formulées lors de la procédure de participation, saisi pour avis, si elle l’estime utile au vu des enjeux, le conseil départemental de l’environnement et des risques sanitaires et technologies ou, en Guyane, la commission départementale des mines” sont supprimés ; ».
II. – (Non modifié) Par dérogation à l’article L. 163-9 du code minier, dans sa rédaction résultant du 3° du I du présent article, la période de trente ans est décomptée à partir de la fin du délai donné par l’autorité administrative pour exécuter les mesures envisagées ou prescrites en application de l’article L. 163-6 du même code, si l’autorité administrative n’a pas donné acte de l’exécution des mesures à la fin de ce délai mais constate, à l’occasion du donné acte de leur exécution, que les mesures ont bien été réalisées dans ce même délai.
L’article L. 163-9 du code minier, dans sa rédaction résultant du 3° du I du présent article, ne s’applique pas aux travaux dont la fin de la procédure d’arrêt des travaux a été actée depuis plus de trente ans.
III. – L’article L. 162-2 du code minier, dans sa rédaction résultant de la présente loi, est applicable aux demandes d’autorisation d’ouverture de travaux miniers ou d’extension d’autorisations en vigueur déposées après la promulgation de la présente loi. Le même article L. 162-2, dans sa rédaction antérieure à la présente loi, continue de s’appliquer aux installations de gestion de déchets existant avant cette promulgation.
M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, sur l’article.
M. Olivier Jacquin. Cette réforme du code minier se faisait attendre depuis si longtemps qu’elle en était devenue une Arlésienne !
Le code minier est extrêmement ancien. Ses prémices datent de la Révolution française. En 1810, il a connu d’importantes modifications. Les dernières réformes d’ampleur ont l’âge de la retraite – elles ont soixante-cinq ans –, et depuis onze ans on nous promet cette réforme.
Madame la ministre, merci de nous l’apporter. Mais le véhicule législatif est tout de même étonnant. Je ne crois pas que la Convention citoyenne pour le climat ait évoqué cette importante question. Vous décidez d’en traiter dans ce projet de loi relatif au climat.
Cette importante réforme est particulièrement attendue par de nombreuses collectivités territoriales et par les propriétaires qui ont souffert de graves dégâts miniers – j’évoque ici les questions de l’après-mine.
Vous nous proposez deux articles, notamment l’article 20, qui porte sur l’exploration et l’exploitation. Il a été significativement amélioré par l’Assemblée nationale, dont l’intention est plutôt bonne : il s’agit de rendre acceptables l’exploration et l’exploitation minières au XXIe siècle. Mais on ne saurait s’en tenir à une opération de greenwashing, pour tenter de verdir un peu les conditions d’exploitation. Il faut aller beaucoup plus loin pour rapprocher le code minier du code de l’environnement.
Nous sommes au XXIe siècle, nous ne sommes plus sous Napoléon ! Les conditions d’exploitation ont considérablement évolué, et les modes d’exploitation actuels peuvent entraîner beaucoup de dégâts. On ne va plus dans le sous-sol avec une pioche : on peut dissoudre du sel, créer des cavités de plusieurs dizaines d’hectares et affecter considérablement l’urbanisme de communes entières.
Celui qui vous parle vient de Lorraine, région qui a connu l’exploitation du sel, de la houille et du minerai de fer. Certaines communes ont été purement et simplement sinistrées, comme Rosbruck, en Moselle, chez Jean-Marc Todeschini, ou encore Moutiers, dans mon département. Des pans entiers de communes ont disparu ; des maisons ont dû être abandonnées ; on déplore d’immenses dégâts en matière d’urbanisme.
M. le président. Il faut conclure !
M. Olivier Jacquin. Plusieurs associations sont fortement mobilisées, comme l’ACOM,…
M. le président. Il faut conclure, cher collègue !
M. Olivier Jacquin. … le collectif de défense des bassins miniers lorrains ou encore SEL’idaire. Nous en reparlerons dans la suite de nos débats.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 1671 rectifié, présenté par MM. Jacquin, Dagbert, Todeschini, J. Bigot, Montaugé et Kanner, Mme Bonnefoy, M. Devinaz, Mme M. Filleul, MM. Gillé et Houllegatte, Mmes Préville, Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy et Tissot, Mmes Van Heghe, G. Jourda et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 1
Insérer dix-sept alinéas ainsi rédigés :
… Le titre Ier du livre Ier est complété par un chapitre ainsi rédigé :
« Chapitre …
« Dispositions générales relatives à la protection de l’environnement
« Art. L. …. – Les plans et programmes, ainsi que les décisions prises en application du présent code, respectent les principes issus de la Charte de l’environnement de 2004 et les principes de l’article L. 110-1 du code de l’environnement ci-après reproduit :
« I. – Les espaces, ressources et milieux naturels, les sites et paysages, la qualité de l’air, les espèces animales et végétales, la diversité et les équilibres biologiques auxquels ils participent font partie du patrimoine commun de la nation.
« II. – Leur protection, leur mise en valeur, leur restauration, leur remise en état et leur gestion sont d’intérêt général et concourent à l’objectif de développement durable qui vise à satisfaire les besoins de développement et la santé des générations présentes sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs. Elles s’inspirent, dans le cadre des lois qui en définissent la portée, des principes suivants :
« 1° Le principe de précaution, selon lequel l’absence de certitudes, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment, ne doit pas retarder l’adoption de mesures effectives et proportionnées visant à prévenir un risque de dommages graves et irréversibles à l’environnement à un coût économiquement acceptable ;
« 2° Le principe d’action préventive et de correction, par priorité à la source, des atteintes à l’environnement, en utilisant les meilleures techniques disponibles à un coût économiquement acceptable,
« 3° Le principe pollueur-payeur, selon lequel les frais résultant des mesures de prévention, de réduction de la pollution et de lutte contre celle-ci doivent être supportés par le pollueur ;
« 4° Le principe selon lequel toute personne a le droit d’accéder aux informations relatives à l’environnement détenues par les autorités publiques ;
« 5° Le principe de participation en vertu duquel toute personne est informée des projets de décisions publiques ayant une incidence sur l’environnement dans des conditions lui permettant de formuler ses observations, qui sont prises en considération par l’autorité compétente.
« III. – L’objectif de développement durable, tel qu’indiqué au II, répond, de façon concomitante et cohérente, à cinq finalités :
« 1° La lutte contre le changement climatique ;
« 2° La préservation de la biodiversité, des milieux et des ressources ;
« 3° La cohésion sociale et la solidarité entre les territoires et les générations ;
« 4° L’épanouissement de tous les êtres humains ;
« 5° Une dynamique de développement suivant des modes de production et de consommation responsables. » ;
La parole est à Mme Angèle Préville.
Mme Angèle Préville. Les principes réunis dans la Charte de l’environnement ont valeur constitutionnelle, qu’il s’agisse du principe de prévention, du principe de précaution, du principe de réparation – ancien principe du pollueur-payeur –, du principe d’information et de participation ou encore de l’objectif de développement durable. Pourtant, en matière d’après-mine, les dégâts miniers et leurs victimes ne sont reconnus que très rarement, au terme de procédures judiciaires extrêmement longues et coûteuses.
Même si le principe d’indépendance des législations ne peut plus être opposé à la pleine efficacité de la Charte constitutionnelle de l’environnement, il n’est pas inutile d’en rappeler la portée en précisant que les décisions prises dans le domaine du droit minier doivent tenir compte des principes structurant le droit de l’environnement.
De nombreux territoires souffrent encore, des décennies après la fin de l’exploitation de leurs sous-sols.
Pour tous les futurs bassins miniers, il est impératif d’avoir une meilleure gestion du risque environnemental qu’hier. Effondrements, pollution des nappes phréatiques, remontées toxiques, ennoyages et affaissements sont autant de conséquences observables de certaines exploitations minières.
M. Jacquin a évoqué la Lorraine. Une autre région très proche de la mienne, le Limousin, se souviendra encore très longtemps de l’exploitation de l’uranium. Les conséquences de cette activité y sont encore très prégnantes.
Il est indispensable que le principe de réparation s’applique aussi pour les exploitants miniers.
M. le président. L’amendement n° 1672 rectifié, présenté par MM. Jacquin, Dagbert, Todeschini, J. Bigot, Montaugé et Kanner, Mme Bonnefoy, M. Devinaz, Mme M. Filleul, MM. Gillé et Houllegatte, Mmes Préville, Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy et Tissot, Mmes Van Heghe, G. Jourda et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 1
Insérer six alinéas ainsi rédigés :
… Le titre Ier du livre Ier est complété par un chapitre ainsi rédigé :
« Chapitre …
« Dispositions générales relatives à la protection de l’environnement
« Art. L. 113-…. – Les plans et programmes, ainsi que les décisions prises en application du présent code, respectent les principes issus de la Charte de l’environnement de 2004 et les principes de l’article L. 110-1 du code de l’environnement. Elles s’inspirent notamment, dans le cadre des lois qui en définissent la portée, des principes suivants :
« 1° Le principe de précaution, selon lequel l’absence de certitudes, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment, ne doit pas retarder l’adoption de mesures effectives et proportionnées visant à prévenir un risque de dommages graves et irréversibles à l’environnement à un coût économiquement acceptable ;
« 2° Le principe pollueur-payeur, selon lequel les frais résultants des mesures de prévention, de réduction de la pollution et de lutte contre celle-ci doivent être supportés par le pollueur. » ;
La parole est à Mme Angèle Préville.
Mme Angèle Préville. Il s’agit d’un amendement de repli.
Le principe de prévention figure déjà dans le code minier, avec la référence aux mesures à prendre compte tenu des données acquises de la science.
L’objectif de développement durable doit être en filigrane de toute la réforme du code minier et du présent texte. Le principe d’information et de participation figurait dans l’avant-projet de réforme du code minier. En revanche, ce code ignore le principe de précaution et le principe de réparation tels que mentionnés dans le code de l’environnement. Nous proposons de les inscrire noir sur blanc dans le code minier.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. Ma chère collègue, les principes que tend à rappeler l’amendement n° 1671 rectifié figurent déjà dans ce projet de loi et dans le code minier.
Je vous le confirme, la Charte de l’environnement a valeur constitutionnelle : elle s’impose donc aux dispositions législatives du code minier, qui doivent en assurer le respect.
Certains des intérêts et principes que vous visez figurent déjà à l’article L. 161-1 du code minier, qui définit les intérêts protégés par ce code. Pour les carrières, l’article L. 511-1 du code de l’environnement permet d’assurer le respect des intérêts que vous visez. Aussi, rien n’impose d’introduire cette disposition dans le code minier.
Par ailleurs, l’article 20 bis A, délégué au fond à la commission des affaires économiques, met en place un régime d’analyse environnementale, économique et sociale préalable à l’octroi, à l’extension et à la prolongation d’un permis exclusif de recherches ou d’une concession.
Ce régime permet également de satisfaire votre amendement : dès lors que le ministre ou le préfet, selon les cas, aura un doute sérieux sur la possibilité de procéder à la recherche ou à l’exploitation d’un gisement sans porter une atteinte grave aux intérêts protégés par le code minier, la demande de l’exploitant sera refusée.
Je sollicite donc le retrait de ces amendements. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Barbara Pompili, ministre. En préambule, je tiens à vous dire combien je suis heureuse que l’on mène enfin cette réforme du code minier.
J’ai entendu les interrogations au sujet du véhicule législatif choisi. Pour ma part, je préfère être pragmatique. Cette réforme est attendue depuis très longtemps. Vous avez parlé de la Moselle et d’autres territoires. Ayant grandi à Liévin, je connais par cœur les questions de la fin des mines et de l’après-mine. C’est un sujet qui me touche énormément.
Or, du fait de l’encombrement de l’agenda législatif, je voyais venir un énième report de cette réforme : elle risquait même d’être différée au prochain quinquennat.
J’y insiste, il fallait être pragmatique. Nous avions la possibilité d’utiliser ce projet de loi comme véhicule législatif : je l’ai saisie, et j’en suis très heureuse. Nous allons enfin faire avancer ce droit, qui aujourd’hui n’est plus adapté à la protection de l’environnement et aux besoins de nos concitoyens.
Les membres de la Convention citoyenne pour le climat avaient souhaité que l’on ne puisse plus ouvrir de nouvelle mine industrielle, en écho au projet bien connu de la Montagne d’or. Nous avons pu utiliser cette préconisation pour raccrocher la réforme du code minier au présent texte.
En outre, nous avons fait en sorte que les parties les plus importantes de cette réforme figurent dans le dur du projet de loi au lieu d’être proposées par ordonnances, pour qu’un véritable débat puisse avoir lieu dans les deux chambres du Parlement.
Sur ces deux amendements, j’émets le même avis que M. le rapporteur : la réforme du code minier va permettre de satisfaire les demandes de leurs auteurs. J’émets donc un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.
M. Olivier Jacquin. Madame la ministre, vous avez raison : le droit n’est plus adapté. Cette discussion est la bienvenue, mais convenez que c’est un mini-débat et que ces questions auraient mérité un véhicule législatif particulier. En outre, sur l’article 21, le principe du recours aux ordonnances suscitera sans doute un certain nombre d’interventions.
Monsieur le rapporteur, vous nous dites que ces amendements sont partiellement satisfaits : c’est ce « partiellement » qui ne nous convient pas ! C’est pourquoi nous vous proposons de rapprocher le code minier du droit de l’environnement.
Tout est affaire d’appréciation. Vous avez cité quelques points sur lesquels l’amendement n° 1671 rectifié est satisfait, mais ses dispositions apportent bien d’autres garanties. Elles sont effectivement assez larges, mais celles de l’amendement n° 1672 rectifié traduisent un compromis tout à fait intéressant.
Madame la ministre, nous avions également proposé de vous confier l’entière gestion du code minier, en le plaçant sous la seule autorité de votre ministère. Cet amendement vous aurait plu ! (Sourires.) Mais, au motif qu’il élargissait le champ de l’environnement, il a été jugé irrecevable.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Corbisez, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Corbisez. Madame la ministre, j’ai été maire de la commune de Oignies, à quinze kilomètres de Liévin, dont vous êtes originaire. C’est à Oignies que l’on a trouvé les premiers gisements de charbon du Pas-de-Calais, au milieu du XIXe siècle, et c’est là que l’épopée minière du Nord-Pas-de-Calais a pris fin : la boucle était bouclée.
Mes chers collègues, j’ajoute que, par définition, les affaissements sont insidieux : c’est tout un territoire qui descend tout doucement. Ma commune a perdu plus de douze mètres en un demi-siècle. C’est un véritable enjeu quand on parle de responsabilité des exploitants : les conséquences s’observent au bout de cinquante ou cent ans !
Aujourd’hui, que se passe-t-il ? L’État, héritier des Charbonnages de France, a indemnisé les propriétaires de maisons lézardées. Or, vingt ou trente ans plus tard, certaines de ces maisons ont été vendues et d’autres fissures sont apparues dans les murs. Mais alors l’État a répondu : « On a déjà indemnisé un propriétaire. On n’indemnisera pas une seconde fois. »
Je comprends bien la position de M. le rapporteur, car ces amendements peuvent sembler satisfaits, mais prenons garde : nos votes auront des conséquences pour nos enfants, dans quelques dizaines d’années. Souvenons-nous du passé pour préparer le futur ! Je soutiendrai ces deux amendements.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 159, présenté par M. Gay, Mme Varaillas, M. Lahellec et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 1
Insérer sept alinéas ainsi rédigés :
…° Le chapitre Ier du titre Ier est complété par une section ainsi rédigée :
« Section …
« Interdiction de la recherche, de l’extraction et de l’exploitation aurifère et argentifère par l’utilisation de cyanure
« Art. L. 111-…. – I. – En application de la Charte de l’environnement de 2004 et du principe d’action préventive et de correction prévu à l’article L. 110-1 du code de l’environnement, l’utilisation du cyanure et de toute autre substance d’une toxicité similaire ou présentant des risques similaires pour l’environnement et la santé aux fins de recherche, d’extraction et d’exploitation minières est interdite sur le territoire national.
« Aucun nouveau permis non plus qu’aucune nouvelle concession ne sont délivrés à des exploitants utilisant ces substances pour leurs activités.
« Les exploitants disposant d’un permis doivent se mettre en conformité avec la loi n° … du … portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets dans un délai de deux ans à compter de sa promulgation.
« II. – Tout titulaire d’un permis exclusif de recherches ou d’une concession de mines se voit, après mise en demeure, retirer son titre ou son autorisation s’il ne respecte pas les dispositions prévues au I du présent article. » ;
La parole est à M. Fabien Gay.
M. Fabien Gay. Nous tenons beaucoup à cet amendement, issu d’une proposition de loi déposée par notre groupe en janvier 2019 visant à interdire l’utilisation de cyanure dans l’exploitation minière aurifère et argentifère.
J’y avais travaillé, à l’époque, avec beaucoup d’associations et d’ONG, dont Ingénieurs sans frontières, mais aussi avec les peuples autochtones, notamment avec les Kali’nas de Guyane, qui mènent le combat contre la Montagne d’or, que vous venez d’évoquer, madame la ministre.
Il serait incompréhensible, alors que nous avons interdit l’usage du mercure, que nous continuions d’autoriser l’utilisation le cyanure, lequel a d’ailleurs déjà été interdit par d’autres pays, notamment par l’Allemagne. Vous le savez, dans les mines industrielles, la cyanuration peut causer des dommages irréversibles au vivant et à la biodiversité, comme ce fut le cas en Roumanie en 2000 ou au Brésil en 2015, et l’on ne sait pas encore quel impact ont les boues cyanurées à long terme, notamment dans la forêt amazonienne.
Aujourd’hui, il y a une cinquantaine de projets de mines industrielles en Guyane, qui menacent directement 360 000 hectares de forêt amazonienne ; mais c’est beaucoup plus que cela, d’abord pour les peuples autochtones.
Alors, madame la ministre, puisque nous nous engageons dans une grande réforme du code minier, il est temps de le mettre en adéquation avec notre volonté écologique et sociale. Il serait incompréhensible que nous ne débattions pas de l’utilisation du cyanure. Je vous rassure, nous n’avons pas la volonté de toucher à la liberté d’entreprendre, puisqu’il existe des solutions de substitution, certes expérimentales et moins rentables que le cyanure, mais il en existe.
M. Fabien Gay. Nous devons donc débattre de l’utilisation du cyanure. Si vous nous affirmez que celle-ci est sûre et ne présente aucun risque pour le vivant, pour l’être humain et pour la biodiversité, je suis preneur des études sur lesquelles vous vous fondez, car tout démontre le contraire et, lorsqu’un accident se produit, il est dévastateur pour tout l’écosystème.
Je vous remettrai un exemplaire de notre proposition de loi ; nous serons toujours prêts à en débattre, y compris après l’examen de ce texte.
M. le président. L’amendement n° 413, présenté par Mme Poncet Monge, MM. Dantec, Fernique, Labbé, Salmon et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…– Un moratoire sur l’utilisation du cyanure dans l’industrie minière est instauré sur l’ensemble du territoire national à compter de la promulgation de la présente loi.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Si vous le permettez, je commencerai par présenter l’amendement n° 412 rectifié, car l’amendement n° 413 est un amendement de repli.
M. le président. L’amendement n° 412 rectifié, présenté par Mme Poncet Monge, MM. Dantec, Fernique, Labbé, Salmon et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 1
Insérer cinq alinéas ainsi rédigés :
… Le chapitre Ier du titre Ier du livre Ier du code minier est complété par une section … ainsi rédigée :
« Section …
« Interdiction de l’exploitation de minerais aurifère et argentifère par la lixiviation au cyanure en cuve ou en tas
« Art. L. 111-… – En application de la Charte de l’environnement de 2004 et du principe d’action préventive et de correction prévu à l’article L. 110-1 du code de l’environnement, la lixiviation au cyanure en cuve ou en tas aux fins d’exploitation de minerais aurifères ou argentifères est interdite sur le territoire national.
« Les conditions d’application du présent article sont définies par décret en Conseil d’État. » ;
Veuillez poursuivre, madame Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Ces dernières années, le projet de la Montagne d’or a mis en lumière les conditions dans lesquelles les matières premières sont extraites en France et dans le monde.
De fait, les activités extractives ont très souvent recours à des produits dangereux à la fois pour notre santé, pour la biodiversité et pour l’environnement, et dont les conséquences sont souvent irréversibles. C’est le cas du cyanure, pourtant utilisé dans l’exploitation de minerais aurifères et argentifères. Son utilisation pour la lixiviation est mise en cause depuis de nombreuses années, notamment depuis la catastrophe de 2000 en Roumanie, qualifiée de pire désastre écologique en Europe depuis Tchernobyl.
Ce déversement a contaminé l’eau potable de deux millions et demi d’Européens et a tué 100 tonnes de poissons et d’animaux sauvages, dont des espèces protégées. Il ne s’agit pas d’un accident isolé ; les cas de rupture de digues, de défauts de construction ou encore d’accidents de transport se sont multipliés ces dernières années. On en recense déjà vingt-cinq depuis 2000, soit plus d’un par an.
Ces événements aux conséquences catastrophiques suffisent à justifier, aujourd’hui, l’interdiction de l’exploitation de minerais aurifères et argentifères par lixiviation au cyanure, d’autant qu’il existe une douzaine de technologies de substitution moins dangereuses, parmi lesquelles la lixiviation au thiosulfate.
L’amendement que nous proposons ici répond non seulement aux ambitions de notre projet, mais également à celles de l’accord de Paris sur le climat ; de plus, il s’inscrit dans la continuité de la résolution du Parlement européen de 2017 demandant l’interdiction de l’usage du cyanure dans l’industrie minière en Europe. Certains pays européens l’ont déjà fait, comme l’Allemagne, qui a même anticipé cette résolution.
Vingt ans après la fermeture de la mine de Salsigne, dans l’Aude, les habitants paient encore lourdement le prix de l’utilisation du cyanure, entre autres, par l’industrie extractive. L’urgence environnementale implique de mettre un terme à l’utilisation de produits dont la toxicité n’est plus à prouver et de faire primer, par d’autres options, l’intérêt général de la santé humaine et de la préservation de notre planète.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. Mon commentaire sera commun aux trois amendements.
Ceux-ci portent sur l’interdiction du cyanure dans l’industrie minière, en particulier pour l’exploitation aurifère et argentifère. En France, cela concerne quasi exclusivement la Guyane.
Le stockage et l’utilisation du cyanure présentent bien entendu des risques pour l’environnement, mais notre pays dispose, pour assurer la protection de ce dernier, d’une législation parmi les plus ambitieuses. Le code minier et le droit européen prévoient l’utilisation des meilleures techniques disponibles. Ainsi, l’article L. 161–2 du code minier prévoit que tout exploitant de mine est tenu d’appliquer à l’exploitation des gisements les méthodes confirmées comme étant les plus propres.
Avant d’être interdit, le mercure était utilisé et il avait des inconvénients bien plus importants. Le cyanure présente des risques que je qualifierais aujourd’hui de moins élevés ; en outre, il n’existe pas actuellement de méthode de substitution – même si notre collègue Gay a fait référence à des expérimentations – dont il serait scientifiquement démontré qu’elle a un meilleur impact environnemental que l’utilisation du cyanure.
Des travaux sont menés sur le sujet – Mme la ministre pourra sans doute nous apporter des éléments complémentaires sur ce point –, mais, si nous adoptions ces amendements, nous ne pourrions pas continuer à mener des activités légales d’extraction d’or en Guyane de façon « convenable » ; je mets évidemment ce qualificatif entre guillemets.
Je le rappelle, le projet de loi durcit la lutte contre l’orpaillage illégal et donc contre les techniques et les pratiques minières qui portent une atteinte forte à l’environnement et à la santé.
La réforme du code minier qui nous est proposée me paraissant équilibrée et satisfaisante, je demande le retrait de ces amendements ; à défaut, l’avis serait défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mmes Laurence Cohen, Sophie Taillé-Polian et M. Fabien Gay. Ah non !
Mme Barbara Pompili, ministre. Dans l’absolu, si !
Néanmoins, il convient de regarder ce qui se passe dans la réalité et d’essayer de trouver les meilleures solutions.
Sans cyanure, on peut extraire l’or ou l’argent contenu dans le minerai. Jusqu’en 2006, on recourait au mercure, mais il me semble que personne ne souhaite y revenir. Certains opérateurs utilisent des méthodes mécaniques et font du tri physique, dont – il faut le savoir – le rendement est beaucoup plus faible que celui que l’on obtient avec le cyanure ; cela signifie que, pour obtenir autant d’or, il faut défricher des surfaces plus importantes de forêt, ce qui pose, vous en conviendrez, d’autres problèmes.
Le BRGM travaille à la production d’un référentiel listant les méthodes de substitution au cyanure. Quelques-unes sont testées, comme le thiosulfate, lequel emporte toutefois une conséquence : il peut donner lieu à des rejets de sulfate dans l’environnement, ce qui n’est pas terrible non plus ; de plus se pose un problème de rentabilité. Enfin, le thiosulfate n’est pas du tout adapté au sol guyanais ; or ces amendements concernent presque exclusivement la situation en Guyane. Nous n’avons donc pas, aujourd’hui, de substitut crédible au cyanure.
En revanche, la législation, notamment européenne, s’est considérablement renforcée depuis les événements de Roumanie, quand des débordements avaient en effet entraîné des pollutions. Les normes appliquées aujourd’hui en France et en Europe sont les plus dures et les plus contraignantes concernant la conservation et l’utilisation du cyanure dans les mines.
Bien sûr, nous devons parvenir, in fine, à ne plus utiliser ce type de produits, mais, aujourd’hui, nous n’avons pas de meilleure option. C’est cela, le sujet.
Vous pouvez tout à fait débattre d’un arrêt total de l’exploitation minière d’or en Guyane ; c’est une question. Toutefois, dès lors que l’on n’emprunte pas ce chemin, le cyanure est la solution « la moins pire ». C’est la raison pour laquelle, tant que l’on n’a pas d’autre solution, on ne peut pas l’interdire.
Bien entendu, nous parlons ici de l’orpaillage légal et non de l’orpaillage illégal, sur lequel nous reviendrons plus tard.
Le Gouvernement a donc émis un avis défavorable sur ces amendements.
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.
M. Fabien Gay. Madame la ministre, puisque vous citez le BRGM, sachez que, d’après cet organisme, le thiosulfate n’en est plus au stade de la recherche et développement ; cela fonctionne, mais, oui, c’est vrai, c’est moins rentable que la cyanuration. Vous privilégiez donc la rentabilité économique des opérateurs privés par rapport à la protection de l’environnement et des êtres vivants ; soit, mais il faut l’assumer !
Ensuite, pour que tout le monde entende bien, je rappelle que la cyanuration ne fonctionne pas seule, cela nécessite beaucoup d’autres produits.
Mme Laurence Cohen. Bien sûr !
M. Fabien Gay. Le projet de la Montagne d’or, par exemple, qui est abandonné – enfin, c’est un peu plus complexe que cela, dans la mesure où le projet Espérance suit –,…
M. Fabien Gay. … a besoin, pour fonctionner, de 140 000 litres d’eau par heure et 20 mégawatts d’électricité pour faire fonctionner la cyanuration, soit la consommation d’énergie de la population de Cayenne. La cyanuration requiert en outre nombre d’autres intrants : non seulement 1 200 tonnes de cyanure par an, mais aussi 6 600 tonnes de chaux, 100 tonnes de nitrate de plomb, 84 tonnes de soude, 1 800 tonnes de sodium, 60 tonnes de sulfates et 20 tonnes d’acide sulfurique.
Or tout cela, ensuite, on ne sait pas le traiter, on le met dans une fosse, qui représentera l’équivalent de trente-deux fois le stade de France, et on ne connaît pas les conséquences que cela aura à très long terme sur le vivant et sur les êtres humains. Nous l’avons malheureusement appris, parfois, les digues sautent et c’est un drame humain.
Il faut donc assumer, madame la ministre…
Enfin, nous débattrons plus tard de l’orpaillage illégal, mais vous savez très bien qu’un argument des mineurs consiste à affirmer que, là où il y a des mines illégales, il suffit d’en implanter une légale pour faire partir ces dernières. Pas du tout ! C’est le contraire qui se produit : les mines industrielles avec cyanuration attirent les orpailleurs illégaux, parce que ceux-ci peuvent récupérer des minerais. Ils accentuent alors les dégâts par l’utilisation du mercure. Par conséquent, plus nous développons la mine industrielle avec cyanuration, plus nous attirons des orpailleurs illégaux, qui utilisent du mercure ; c’est donc la double peine pour l’environnement et pour les peuples autochtones.
Je suis malheureux que vous refusiez cette interdiction, mais nous continuerons la lutte.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Monsieur le rapporteur, qu’est-ce que cela signifie, une exploitation « convenable », même avec plein de guillemets ?
Je vous encourage, mes chers collègues, madame la ministre, monsieur le rapporteur, à aller voir ce qui se passe en Amérique latine ; allez observer les résultats de l’extractivisme, allez interroger les populations ! Vous verrez l’état dans lequel sont laissés les sols lorsque les mines s’arrêtent, les populations qui souffrent de toutes les conséquences qu’a énoncées mon collègue : réchauffement climatique à cause des gaz à effet de serre et pollution extrême de l’eau, ce bien commun de l’humanité !
Je suis allée sur place, à Cajamarca, à 4 000 mètres d’altitude, une zone de lagunes absolument extraordinaires. L’eau était polluée et ne pouvait pas être consommée par les paysans, qui se sont mobilisés contre le projet Conga.
Des conséquences à peu près « admissibles », qu’est-ce que cela signifie ? Que c’est rentable ? Si l’on n’a pas de solution de remplacement du cyanure, qui empoisonne les sols et l’eau et emporte des impacts terribles sur l’environnement, sur l’élevage, sur la flore, sur la faune, alors on arrête la production, puis on cherche, on investit dans la recherche pour en trouver. On ne dit pas, quelque peu ennuyé aux entournures : « ça va aller ». Non, ça ne va pas aller pour les populations qui vivent là à demeure et qui sont encore appauvries par ce qui se passe dans leurs territoires.
Je vous appelle donc à réfléchir, mes chers collègues, et à adopter nos amendements !
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Madame la ministre, vous avez cité le rapport du Bureau de recherches géologiques et minières, mais je crains que vous ne l’ayez pas lu jusqu’à sa conclusion, à propos de l’usage du thiosulfate : « Des alternatives à l’utilisation du cyanure pour l’exploitation des minerais d’or existent à l’échelle industrielle » ; « le procédé basé sur l’utilisation du thiosulfate atteint un niveau de maturité qui s’approche de la cyanuration. »
Selon le BRGM, le problème qui demeure est le coût élevé de la méthode, qui rend l’extraction de l’or moins rentable. Voilà la seule raison qui est mise en avant et non les conséquences de ce procédé de substitution.
Dans son rapport de 2017, le Parlement européen fournit une liste de douze technologies susceptibles de remplacer le cyanure, parmi lesquelles figure le thiosulfate, que nous venons d’évoquer, qui est utilisé à grande échelle par la première compagnie aurifère mondiale, au sein de la plus grande mine d’or des États-Unis, la mine de Goldstrike, au Nevada.
Ce sont les conclusions de l’ensemble de ces études qui ont conduit plusieurs pays à interdire le cyanure dans les mines : l’Allemagne, la République tchèque, la Hongrie et la Slovaquie. C’est donc bien un problème de rentabilité…
Par ailleurs, je m’associe aux propos de Laurence Cohen : si vous n’êtes pas encore convaincus ou s’il faut encore mener quelques recherches, mon amendement n° 413 vise simplement à établir un moratoire ; on arrête l’utilisation du cyanure en attendant que la technique du thiosulfate soit mature, puisque, malgré les conclusions du BRGM, vous en doutez encore.
Vous soutiendrez donc sans aucune réticence, madame la ministre, ce moratoire sur l’utilisation du cyanure.
M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.
M. Olivier Jacquin. Cet article est symbolique de tout notre débat. Ma collègue Poncet Monge vient utilement de citer non pas une ONG, non pas des activistes écologistes, mais bien le BRGM, qui me semble tout à fait crédible et qui présente cette solution du thiosulfate. La plus grande mine d’or des États-Unis utilise cette technique.
Effectivement, celle-ci est moins rentable et tout le débat est là, madame la ministre : on fait la transition écologique, à condition que cela soit rentable.
Mme Raymonde Poncet Monge. Exactement !
M. Olivier Jacquin. Que vais-je dire à mes enfants, en rentrant ce soir, quand ils me demanderont : « qu’as-tu voté comme article, aujourd’hui ? Quel était le débat ? Qu’est-ce que la transition écologique ? La protection de l’environnement ou de l’économie ? » ? Nous devons prendre nos responsabilités !
Je tiens donc à saluer le travail de nos collègues du groupe CRCE sur la question du cyanure et du massacre de régions entières qu’il provoque. La moindre des choses, pour bien dormir ce soir, avec la conscience tranquille, serait, au moins, d’adopter l’amendement n° 413 de Mme Poncet Monge, qui vise, non pas l’interdiction immédiate, mais l’établissement d’un moratoire. Ce serait un pas dans le bon sens, pour une véritable protection de l’environnement.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Barbara Pompili, ministre. J’aime beaucoup les solutions miracles, j’adorerais que cela fonctionne, mais cela n’existe pas. J’ai beaucoup cherché la baguette magique dans mon ministère, mais je ne l’ai pas trouvée et j’ai arrêté de chercher…
Le thiosulfate n’est pas adapté au sol de Guyane, c’est le premier problème, et, quand bien même il le serait, il est peut-être un tout petit peu moins toxique que le cyanure à court terme, mais, à long terme, c’est pareil. De plus, comme le cyanure, il nécessite d’autres intrants et pose donc les mêmes problèmes. Enfin, on doit également stocker les résidus.
Par conséquent, arrêtons de croire que nous avons des solutions magiques, ce n’est malheureusement pas le cas, je le regrette. Le thiosulfate, en outre, quand bien même il pourrait être utilisé en Guyane, conduit à des « rendements » plus faibles et entraînerait donc plus de déforestation. Cela me pose un problème. Il n’y a donc pas de solution magique, je le répète.
En ce qui concerne le stockage des déchets cyanurés, pour répondre à Mme la sénatrice Cohen, nous n’avons précisément pas les mêmes règles que dans le reste de l’Amérique latine. (M. Fabien Gay lève les bras au ciel.) Aujourd’hui, en Guyane, le problème de l’empoisonnement des populations est lié au mercure (Mme Laurence Cohen et M. Fabien Gay protestent.) ; ce problème est très grave et touche notamment les populations amérindiennes, dont le régime alimentaire repose beaucoup sur la pêche de poissons, qui absorbent le mercure abandonné par des orpailleurs illégaux. C’est un problème grave de santé publique, mais ce n’est pas le sujet.
Pour ce qui concerne le cyanure, la législation impose aujourd’hui un traitement des déchets cyanurés pour faire baisser leur concentration et aboutir à des taux très faibles dans le stockage.
Ce n’est pas parfait, personne ne prétend cela, mais aujourd’hui, en responsabilité – parce qu’il faut regarder les choses dans leur ensemble –, je ne vois pas de solution moins mauvaise. On peut en discuter tant que vous voulez, mais voilà les raisons pour lesquelles je ne peux pas me ranger à votre avis, même si j’adorerais trouver une solution magique.
M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.
M. Ronan Dantec. Madame la ministre, vous indiquez que vous n’avez pas de solution miracle et qu’il faut regarder les choses dans leur globalité ; c’est bien ce que nous faisons ! Dès lors que vous n’avez pas de solution technologique, dès lors que, lorsque l’on considère les choses dans leur globalité, on constate que l’ensemble des coûts induits sur l’environnement et sur la santé des populations est bien supérieur à l’intérêt de l’extraction de l’or, on arrête, tout simplement ! C’est cela, la logique.
Il ne s’agit pas d’une activité aussi essentielle que d’autres, donc, si l’on considère les choses dans leur globalité, il faut arrêter ou, au moins, adopter un moratoire.
M. le président. L’amendement n° 2269, présenté par M. P. Martin, au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pascal Martin, rapporteur. Cet amendement vise à supprimer les dispositions relatives aux commissions de suivi, introduites au sein de cet article lors de l’examen du texte à l’Assemblée nationale mais réécrites en commission au Sénat et intégrées à l’article 20 bis, afin de les insérer à l’endroit le plus adapté du code minier.
Il s’agit donc d’un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 268 rectifié est présenté par MM. Gold, Corbisez, Cabanel et Bilhac, Mme N. Delattre, MM. Guiol, Requier et Roux, Mme M. Carrère, M. Guérini et Mmes Guillotin et Pantel.
L’amendement n° 1432 rectifié est présenté par Mme M. Filleul, MM. J. Bigot, Montaugé et Kanner, Mme Bonnefoy, MM. Dagbert, Devinaz, Gillé, Houllegatte et Jacquin, Mmes Préville, Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy et Tissot, Mme G. Jourda et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 9
Remplacer les mots :
et halieutiques
par les mots :
, halieutiques et forestiers
La parole est à M. Jean-Pierre Corbisez, pour présenter l’amendement n° 268 rectifié.
M. Jean-Pierre Corbisez. L’article 20 du projet de loi complète la liste des intérêts protégés par le code minier, laquelle paraissait clairement insuffisante, et procède à un verdissement très attendu de ce code. Ont été insérés la préservation de la santé publique, la protection du littoral et du milieu marin ou encore les intérêts halieutiques.
Le présent amendement vise à intégrer les intérêts forestiers à cette liste. Nous avons en particulier à l’esprit la Guyane, dont le territoire reste très convoité par les exploitants.
M. le président. La parole est à Mme Martine Filleul, pour présenter l’amendement n° 1432 rectifié.
Mme Martine Filleul. L’industrie guyanaise représente environ 3 000 emplois, dont plus de 500 dans le secteur minier, ce qui fait de ce secteur d’activité le deuxième employeur du territoire ; par ailleurs, la forêt guyanaise est également l’un des massifs forestiers français les plus importants, avec près de 8 millions d’hectares, et fait de la Guyane le département français le plus boisé.
Selon le WWF, l’Amazonie européenne connaît, depuis plus de vingt ans, une nouvelle ruée vers l’or, dont les conséquences se révèlent désastreuses pour l’état forestier guyanais, malgré l’encadrement légal des exploitants déclarés.
Il convient donc de renforcer la protection des forêts guyanaises contre les effets dommageables de l’activité minière française. Pour ce faire, cet amendement tend à compléter la liste des intérêts protégés requérant une demande d’autorisation d’ouverture des travaux en y intégrant les intérêts forestiers.
Cette mesure paraît essentielle pour éviter que les forêts guyanaises ne subissent les attentes des exploitations minières déclarées, l’orpaillage illégal provoquant d’ores et déjà des dégâts colossaux sur l’environnement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. Ces deux amendements me semblent satisfaits, dès lors que l’on considère que les intérêts agricoles couvrent également les intérêts sylvicoles, ce qui doit être le cas, à mon sens. Le fait de le dire expressément dans nos débats indiquera l’intention du législateur.
La rédaction de l’article L. 161–1 du code minier me semble déjà suffisamment étoffée, notamment avec les ajouts opérés à l’article 20 de ce projet de loi.
Je demande donc le retrait de ces amendements ; à défaut, l’avis sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 268 rectifié et 1432 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 1673 rectifié bis, présenté par MM. Jacquin, Dagbert, Todeschini, J. Bigot, Montaugé et Kanner, Mme Bonnefoy, M. Devinaz, Mme M. Filleul, MM. Gillé et Houllegatte, Mmes Préville, Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy et Tissot, Mmes Van Heghe, G. Jourda et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 25
Après le mot :
administrative
insérer les mots :
à une contre-expertise de celle-ci, financée par l’exploitant, ainsi qu’
II. – Alinéa 32
Après le mot :
analyses
insérer les mots :
qu’elle a elle-même
La parole est à M. Olivier Jacquin.
M. Olivier Jacquin. Au moment de l’arrêt d’une exploitation, l’exploitant propose à l’État une stratégie d’arrêt ; cet amendement, qui me semble pragmatique, vise à imposer une contre-expertise de l’État.
Celui qui vous parle a une douloureuse expérience de ces arrêts d’exploitation, dans le bassin houiller lorrain. Lors de l’arrêt de l’exploitation par Charbonnages de France, l’exploitant avait mené des études sur les risques liés aux remontées de nappes. Manque de bol, au bout de quinze ans, l’État, qui avait repris les installations, s’est rendu compte que les dispositifs adoptés étaient totalement insuffisants, et des dégâts absolument considérables se sont produits : effondrements de terrain, destructions de maisons ainsi que risques d’inondations et de pollution de nappes phréatiques. J’ai pris l’exemple du bassin lorrain, mais vous connaissez tous, dans d’autres régions, des situations analogues.
Faute d’une analyse sérieuse et indépendante des risques, les dommages miniers sont colossaux et non reconnus ou considérés seulement, dans le meilleur des cas, comme des catastrophes naturelles, ce qui pose des problèmes considérables d’indemnisation.
Il paraît donc impératif de s’assurer que les analyses produites par l’exploitant soient contre-expertisées par les services de l’État ou par une autorité indépendante.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. Cet amendement est satisfait, car l’administration procède à une contre-expertise de la déclaration d’arrêt des travaux transmise par l’exploitant. Cette contre-expertise administrative permet ensuite au préfet de prescrire la réalisation de mesures à l’exploitant, puis de les contrôler lorsqu’il a donné acte de leur réalisation.
Par ailleurs, il me paraît paradoxal et quelque peu problématique de faire financer cette contre-expertise par l’exploitant lui-même. Cela ne permet pas de garantir un respect du principe du contradictoire et de l’indépendance de notre administration ; l’exercice de la police des mines ne devrait pas être assimilé à un service payant.
Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis serait défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1673 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 2270, présenté par M. P. Martin, au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, est ainsi libellé :
Alinéa 27
1° Après le mot :
intercommunale
insérer le mot :
compétents
2° Après le mot :
participation
insérer les mots :
du public
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pascal Martin, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de deux amendements et d’un sous-amendement faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 229, présenté par M. Houllegatte, est ainsi libellé :
Alinéa 30, après la première phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
À compter de la réception du dossier de récolement attestant de l’accomplissement des mesures susmentionnées, l’autorité administrative dispose d’un délai de huit mois, renouvelable une fois, pour donner acte de l’exécution desdites mesures.
La parole est à M. Jean-Michel Houllegatte.
M. Jean-Michel Houllegatte. Cet amendement vise à fluidifier la procédure d’arrêt des travaux miniers.
Cette procédure extrêmement codifiée démarre avec la déclaration d’arrêt des travaux. Il est ensuite procédé à un premier « donné acte », puis à des prescriptions, à la réalisation de travaux complémentaires ainsi qu’à de nouvelles vérifications. Or, à ce stade, il n’est pas rare que le dialogue avec l’administration s’interrompe, celle-ci n’apportant plus de réponse.
Au travers de cet amendement, nous proposons que l’autorité administrative dispose d’un délai de huit mois, renouvelable, pour donner acte de l’exécution des mesures, ce qui permet de délivrer l’AP2 – l’arrêté préfectoral de second donné acte –, point de départ de la période trentenaire de prescription.
M. le président. Le sous-amendement n° 2266, présenté par M. P. Martin, au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, est ainsi libellé :
Amendement n° 229, alinéa 3
1° Après le mot :
attestant
insérer les mots :
et justifiant
2° Après le mot :
accomplissement
insérer les mots :
complet de l’ensemble
3° Après le mot :
pour
rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
se prononcer sur l’exécution desdites mesures.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pascal Martin, rapporteur. Ce sous-amendement vise à préciser et à sécuriser les dispositions que l’amendement n° 229 tend à introduire. Son adoption permettra d’assurer un meilleur équilibre au dispositif proposé.
M. le président. L’amendement n° 2123 rectifié bis, présenté par MM. Patient et Buis, Mme Duranton, M. Hassani, Mme Havet, M. Haye, Mmes Phinera-Horth et Schillinger et M. Théophile, est ainsi libellé :
Alinéa 30, après la première phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
À compter de la réception du dossier de récolement attestant et justifiant de l’accomplissement complet de l’ensemble des mesures susmentionnées, l’autorité administrative dispose d’un délai de huit mois, renouvelable une fois, pour se prononcer sur l’exécution desdites mesures.
La parole est à Mme Patricia Schillinger.
Mme Patricia Schillinger. Nous considérons qu’il est indispensable de préciser que les pouvoirs de police résiduelle qui s’appliquent durant les trente ans suivant l’arrêt des travaux miniers doivent s’exercer conformément à la législation en vigueur au moment de l’arrêt des travaux.
Par conséquent, afin de permettre à l’exploitant d’anticiper les mesures de mise en sécurité et les coûts associés, il est proposé qu’un délai soit imposé pour la délivrance de l’arrêté de second donné acte à compter du procès-verbal de récolement et de réalisation des travaux.
M. le président. Si le sous-amendement n° 2266 de la commission est adopté, l’amendement n° 229, ainsi modifié, deviendra identique à l’amendement n° 2123 rectifié bis.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. La commission a émis un avis favorable sur l’amendement n° 229, sous réserve de l’adoption de son sous-amendement n° 2266, et, par voie de conséquence, un avis favorable sur l’amendement n° 2123 rectifié bis.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 229, ainsi modifié, et l’amendement n° 2123 rectifié bis sont désormais identiques.
Je les mets aux voix.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 1674 rectifié, présenté par MM. Jacquin, Dagbert, Todeschini, J. Bigot, Montaugé et Kanner, Mme Bonnefoy, M. Devinaz, Mme M. Filleul, MM. Gillé et Houllegatte, Mmes Préville, Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy et Tissot, Mmes Van Heghe, G. Jourda et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 31, première phrase
Remplacer les mots :
Pendant une période de trente ans suivant
par le mot :
Après
La parole est à M. Olivier Jacquin.
M. Olivier Jacquin. Le présent amendement tend à revenir sur la prescription trentenaire.
Lorsque les mesures d’après-mine ont été exécutées, l’autorité administrative en donne acte, ce qui met fin à l’exercice de la police des mines.
Toutefois, malgré l’accomplissement de ces mesures, il arrive que des dommages importants surviennent. Dans ce cas, l’autorité administrative peut demander à l’exploitant de nouvelles mesures jusqu’à expiration du titre minier ou transfert à l’État.
Or la durée de la prescription, fixée par le présent projet de loi à trente ans après le second donné acte, peut être inférieure à la durée de validité du titre minier.
Au travers de cet amendement, nous proposons de supprimer la prescription de trente ans, afin qu’il n’y ait plus de délai de prescription pour des dommages qui peuvent survenir plusieurs décennies après les travaux miniers ; nous avons tous des exemples en tête.
M. le président. L’amendement n° 85 rectifié, présenté par MM. S. Demilly, Moga et Capo-Canellas, Mme Morin-Desailly, MM. Chauvet et Canévet, Mme Sollogoub, MM. Levi et J.M. Arnaud et Mmes Dumont et Garriaud-Maylam, est ainsi libellé :
Alinéa 31, première phrase
Après le mot :
période
insérer le mot :
maximale
La parole est à M. Stéphane Demilly.
M. Stéphane Demilly. Le présent amendement a pour objet de faire reconnaître la particularité propre à la filière géothermie en matière d’abandon des ouvrages, ces derniers étant déjà soumis à des procédures éprouvées et sécurisées d’un point de vue environnemental.
L’adoption de cet amendement, qui serait neutre du point de vue de l’impact financier, permettrait néanmoins de poursuivre le déploiement de la filière française de géothermie profonde. Au travers de son portefeuille de projets d’envergure, celle-ci contribue au développement d’une production nationale de chaleur à très faible émission de carbone, conformément aux objectifs fixés à la filière dans le cadre de la programmation pluriannuelle de l’énergie.
M. le président. L’amendement n° 367 rectifié, présenté par Mme Poncet Monge, MM. Dantec, Fernique, Labbé, Salmon et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :
Alinéa 31, première phrase
Remplacer le mot :
trente
par le mot :
cent
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Comme cela a été indiqué, la validité des titres miniers expire parfois bien avant que les sites ne soient véritablement dépollués.
Ainsi, le territoire français compte plus de 3 500 anciennes mines, qui continuent, plusieurs décennies après l’arrêt de leur exploitation, d’imprégner les sols et l’environnement d’une pollution aux métaux lourds – arsenic, cadmium, cyanure.
Ces dommages sur l’environnement affectent également les populations aux alentours du site pollué durant plusieurs décennies, après l’arrêt de l’exploitation. De plus, la reconstitution du milieu naturel, en l’état, peut prendre des centaines d’années. C’est notamment le cas des forêts vierges, nombreuses en Guyane, où les exploitations minières pourraient malheureusement se multiplier dans les décennies à venir.
Aussi le présent amendement vise-t-il à allonger la période de responsabilité des exploitants au regard des risques de l’après-mine, en tenant compte de la temporalité réelle de reconstitution des sols et des écosystèmes, notamment de la régénération du tissu végétal, qui s’étend sur des dizaines d’années.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. La suppression de la prescription trentenaire telle que vous la proposez au travers de l’amendement n° 1674 rectifié, cher collègue Jacquin, ne permet pas de garantir une sécurité juridique satisfaisante pour les explorateurs et exploitants.
Actuellement, la législation minière diffère de la législation relative aux installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE), qui prévoit que, à tout moment, dans la limite d’un délai fixé par la jurisprudence du Conseil d’État à trente ans après la remise en état, le préfet peut imposer à l’exploitant les prescriptions nécessaires à la protection des intérêts mentionnés à l’article L. 511-1 du code de l’environnement.
L’article 20 du présent projet de loi permet donc l’extension, pour une durée de trente ans, des conditions d’exercice de la police résiduelle des mines après l’arrêt des travaux, afin de permettre à l’État de rechercher la responsabilité des exploitants en cas d’apparition de nouveaux désordres ou dommages. J’estime qu’il s’agit d’un bon équilibre.
Je demande donc le retrait de l’amendement n° 1674 rectifié, ainsi que de l’amendement n° 367 rectifié. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
En revanche, j’émets un avis favorable sur l’amendement n° 85 rectifié, qui tend à préciser utilement l’alinéa 31.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Barbara Pompili, ministre. Ce texte prévoit l’extension de la durée d’exercice de la police résiduelle des mines, afin de pouvoir rechercher la responsabilité de l’exploitant, si des problèmes nouveaux surviennent après la procédure d’arrêt des travaux miniers. Il s’agit d’une avancée importante, qui permet, sur ce point, de rapprocher le code minier de la logique retenue dans le code de l’environnement.
Toutefois, prévoir que ces dispositions s’appliquent sans aucune limitation de durée ne serait ni réaliste ni opérant. En effet, dans son fameux arrêt Alusuisse-Lonza, qui fait référence en la matière, le Conseil d’État a considéré que, en l’absence de délai prévu dans la loi, le délai de trente ans s’appliquait et que, au-delà, il n’était plus possible de rechercher la responsabilité d’un ancien exploitant. C’est donc ce délai que le Gouvernement entend retenir et expliciter.
J’ajoute que ce délai s’entend à la date de la découverte d’éventuels désordres, non à la date de la fin des travaux visant à y remédier, qui peut intervenir bien au-delà de trente ans.
J’émets un avis défavorable sur ces trois amendements.
M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.
M. Olivier Jacquin. J’entends bien les arguments de M. le rapporteur et de Mme la ministre. Je retire donc mon amendement et je voterai pour l’amendement n° 367 rectifié, de Mme Poncet Monge, qui tend à fixer une limite dans le temps.
M. le président. L’amendement n° 1674 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 85 rectifié.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. L’amendement n° 230, présenté par M. Houllegatte, est ainsi libellé :
Alinéa 32
Compléter cet alinéa par les mots :
et de la méthodologie d’appréciation des risques miniers consacrée par le Bureau de recherches géologiques et minières et l’Institut national de l’environnement industriel et des risques
La parole est à M. Jean-Michel Houllegatte.
M. Jean-Michel Houllegatte. Cet amendement tend à préciser que l’autorité administrative exerce son pouvoir de police en prenant appui sur la méthodologie d’appréciation des risques miniers établie par le Bureau de recherches géologiques et minières et l’Institut national de l’environnement industriel et des risques (Ineris).
Vous allez sans doute trouver cela un peu bavard, mais il me paraît intéressant et important de consacrer, dans la loi, les missions du BRGM et de l’Ineris.
Je le rappelle, le BRGM est le service géologique national et emploie plus de 1 000 personnes, dont 700 ingénieurs, et l’Ineris, qui emploie 550 personnes, est notre expert public pour la maîtrise des risques industriels et environnementaux.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. Avis favorable !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 2271, présenté par M. P. Martin, au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 46
Supprimer les mots :
, dans sa rédaction résultant du 3° du I du présent article,
II. – Alinéa 47
Supprimer les mots :
, dans sa rédaction résultant du 3° du I du présent article,
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pascal Martin, rapporteur. Amendement rédactionnel !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 20, modifié.
(L’article 20 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 20
M. le président. L’amendement n° 1679 rectifié, présenté par MM. Jacquin, Dagbert, Todeschini, J. Bigot, Montaugé et Kanner, Mme Bonnefoy, M. Devinaz, Mme M. Filleul, MM. Gillé et Houllegatte, Mmes Préville, Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy et Tissot, Mmes Van Heghe, G. Jourda et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 20
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La deuxième phrase du troisième alinéa de l’article L. 515-11 du code de l’environnement est complétée par les mots : « ou un an avant la date des premières décisions d’interdiction de construire ou d’aménager, liées aux risques miniers ».
La parole est à M. Olivier Jacquin.
M. Olivier Jacquin. Je salue l’avancée que constitue l’introduction, par l’Assemblée nationale, à l’article L. 515-11 du code de l’environnement, d’une procédure d’indemnisation des biens situés au-dessus d’une exploitation en cours.
Je propose toutefois, au travers de cet amendement, d’apporter une précision importante, car il existe un risque : certains biens faisant l’objet d’une indemnisation peuvent déjà avoir fait l’objet d’une dévaluation à la suite de prescriptions d’urbanisme.
Cet amendement vise donc à préciser, à l’alinéa 3 de l’article L. 511-1, que la date retenue pour l’évaluation du bien est antérieure d’un an, non pas à l’enquête publique, mais aux premières décisions d’interdiction de construire ou d’aménager liées aux risques miniers. Ainsi les préjudices qui peuvent être intervenus entre la prescription d’urbanisme et la nouvelle enquête publique seront-ils pris en compte.
Je précise que cet amendement nous a été proposé par l’association SEL’idaire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. L’indemnisation que cet amendement tend à créer s’étendrait au-delà du préjudice que l’exploitant doit légitimement réparer.
Or l’indemnisation des servitudes, prévue au nouvel article L. 174-5-1 du code minier, introduit par l’article 20 du présent projet de loi, doit être en lien direct avec les travaux d’exploitation en cours. Elle ne peut donc prendre en compte des restrictions d’usage prises antérieurement.
Demande de retrait et, à défaut, avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.
M. Olivier Jacquin. Je ne veux pas rallonger les débats, mais je pense qu’il y a une incompréhension.
Prenons le cas de maisons situées au-dessus d’une exploitation en cours. La puissance publique peut émettre des prescriptions d’urbanisme ayant pour conséquence de dévaloriser ces maisons et, si l’exploitant demande une nouvelle autorisation d’exploiter, selon le dispositif adopté par l’Assemblée nationale, on prendra en compte la valeur des biens concernés par une éventuelle indemnisation un an avant la nouvelle enquête publique. Or il est possible que des prescriptions d’urbanisme antérieures aient déjà eu pour conséquence de dévaloriser ces biens, ce que nous proposons de prendre en compte.
M. le président. L’amendement n° 417, présenté par Mme Poncet Monge, MM. Dantec, Dossus, Labbé, Salmon et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :
Après l’article 20
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’action de l’État concourt à lutter contre les pollutions engendrées par l’activité minière industrielle et illégale, ses impacts sur la santé, l’environnement et la biodiversité, en Guyane et dans tous les départements et territoires d’outre-mer, par la mise en place d’un plan de lutte contre les pollutions engendrées par l’activité minière.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. L’exploitation minière industrielle et l’orpaillage illégal engendrent de nombreuses pollutions nocives pour la biodiversité et les populations, notamment en Guyane, au cours de l’exploitation, mais aussi de nombreuses années après la fin de celle-ci.
L’exploitation minière industrielle – cela a été indiqué à plusieurs reprises – utilise du cyanure et l’orpaillage illégal du mercure, qui se déversent dans les cours d’eau, étouffant toute vie sur leur passage.
Au regard des objectifs de ce projet de loi Climat, nous estimons qu’il convient de mesurer la pollution engendrée par l’exploitation minière, légale ou illégale et de lutter efficacement contre cette pollution.
Cet amendement vise donc à doter l’État des moyens nécessaires à la mise en œuvre d’un plan de lutte efficace contre les pollutions minières, afin de prévenir les ruptures de digue, de faire face aux conséquences sanitaires, de protéger les populations et de mener une évaluation publique des conséquences de l’activité minière, notamment en outre-mer.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. Cet amendement est satisfait ; les dispositions du code minier et l’action de l’État qui en découle dans le cadre de l’exercice de la police des mines et de la police résiduelle des mines permettent de lutter contre les pollutions que vous visez sur l’ensemble du territoire national, chère collègue.
Il ne me paraît donc pas nécessaire de mentionner dans la loi l’élaboration d’un tel plan de lutte contre les pollutions minières, d’autant que le contenu de celui-ci n’est pas détaillé.
Je demande donc le retrait de cet amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Barbara Pompili, ministre. Le code minier encadre les activités légales et prévient les exploitations illégales.
Les services de l’État sont extrêmement attentifs aux conditions dans lesquelles les opérations d’extraction ou le traitement des minerais ont lieu.
En ce qui concerne les activités illégales, notamment l’orpaillage illégal, l’opération Harpie, lancée en 2008, a été pérennisée en 2010. Même si l’on n’en fait jamais assez, les résultats obtenus sont incontestables ; néanmoins, nous observons une persistance de l’orpaillage illégal, qui se situe à un niveau très élevé.
C’est pourquoi le Gouvernement a décidé de renforcer le dispositif Harpie et de mobiliser l’ensemble des acteurs autour d’une stratégie unique, en articulant la répression avec des actions dans les domaines diplomatique, économique et social.
J’ajoute que mon ministère finance l’augmentation de plus de 50 % du nombre d’heures de vol en hélicoptère effectuées dans le cadre de l’opération Harpie, afin de détecter les sites d’orpaillage illégal.
J’émets donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. Mes chers collègues, pardonnez-moi ce petit clin d’œil, mais je constate, depuis que l’or parle, un certain mutisme dans une partie de l’hémicycle ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Sophie Primas. Avec toutes les mines que nous avons !
M. le président. Merci de cette remarque pertinente, mon cher collègue…
La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.
M. Fabien Gay. Depuis les origines de l’humanité, 165 000 tonnes d’or ont été extraites dans le monde. L’or étant l’un des rares minerais inoxydables, nous pourrions continuer à utiliser ce que nous avons extrait il y a 100 ou 200 ans. Si nous recyclions nos téléphones portables, par exemple, nous disposerions de suffisamment d’or pour couvrir l’ensemble de nos besoins, y compris de joaillerie.
Nous soutiendrons cet amendement, mais je souhaite insister sur un point. En effet, vous n’avez pas répondu à la question relative au lien entre orpaillage légal et orpaillage illégal, madame la ministre.
La très grande majorité des orpailleurs illégaux utilisent la méthode alluvionnaire, c’est-à-dire qu’ils cherchent l’or directement dans un cours d’eau à proximité d’une mine légale. En effet, la cyanuration permet d’extraire, non pas 100 %, mais environ 90 % de l’or. Les orpailleurs illégaux utilisent le mercure pour extraire le peu d’or présent dans les résidus rejetés par les mines légales.
La question est donc la suivante, madame la ministre : comment peut-on lutter efficacement contre l’orpaillage illégal tout en continuant d’autoriser des projets de mines légales utilisant le système de cyanuration ? J’attends votre réponse sur ce point.
Je salue l’engagement de nos militaires et de nos soldats mobilisés sur l’opération Harpie. Il faut leur donner les moyens de mener cette lutte complexe contre l’orpaillage illégal.
Pour compléter mon propos, j’ajoute que certains orpailleurs illégaux ne se contentent plus de l’orpaillage alluvionnaire, mais s’attaquent désormais au filon primaire, ce qui nécessite de creuser des puits extrêmement profonds. Nous devons également prendre ce fait en compte.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Barbara Pompili, ministre. Cette question du lien entre l’orpaillage légal et l’orpaillage illégal est récurrente et donne lieu à des discussions sans fin. Certains affirment que le fait d’autoriser l’installation d’orpailleurs légaux permet de figer la situation et de décourager l’orpaillage illégal. D’autres font valoir, comme vous, monsieur le sénateur, que les orpailleurs illégaux s’installent auprès des orpailleurs légaux afin de récupérer ce qui n’a pas été extrait.
Vous le savez sans doute, monsieur le sénateur, une commission d’enquête parlementaire, constituée à la demande du groupe de la Gauche démocrate et républicaine (GDR) de l’Assemblée nationale, mène actuellement des travaux sur ce sujet. Au cours des débats de cette commission, la question que vous soulevez a été posée. Soyez assuré que je serai très attentive aux conclusions de cette commission d’enquête, sur cette question et sur bien d’autres.
Par ailleurs, le texte que vous examinez prévoit des dispositions encadrant l’arraisonnement des embarcations qui acheminent du matériel à des fins d’orpaillage illégal. Nous renforçons ainsi un outil utile dans la lutte contre ce dernier.
M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.
M. Olivier Jacquin. J’ai également noté le mutisme total – si j’ose dire – d’une partie de l’hémicycle lorsque nous avons évoqué l’interdiction du cyanure, mais nous n’en sommes plus à cette question … (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Sophie Primas. Ce genre de remarques est inutile !
M. Olivier Jacquin. Mes chers collègues, vous souhaitez favoriser la transition écologique et notre collègue Raymonde Poncet Monge propose de mettre en place un plan de lutte contre les pollutions engendrées par l’activité minière ; ce n’est tout de même pas une affaire d’État ! En cette période, il nous semble au contraire tout à fait logique de faire de la prévention et de développer des solutions différentes.
M. le président. Je suis saisi de sept amendements identiques.
L’amendement n° 958 est présenté par Mme Taillé-Polian, MM. Benarroche, Dantec et Gontard, Mmes de Marco et Poncet Monge et M. Salmon.
L’amendement n° 1178 rectifié bis est présenté par Mme M. Carrère, MM. Corbisez et Cabanel, Mme N. Delattre, MM. Gold et Guérini, Mme Guillotin et MM. Guiol, Requier, Roux et Bilhac.
L’amendement n° 1234 rectifié est présenté par MM. Pellevat et Burgoa, Mmes Dumas et Garriaud-Maylam, M. de Nicolaÿ, Mme Deromedi, MM. Sido et D. Laurent, Mme Lassarade, MM. B. Fournier, Perrin, Rietmann, Laménie, Genet et Charon, Mmes Bellurot et Joseph, M. Houpert, Mme Gosselin, MM. Rojouan et Bouchet, Mme Dumont et MM. Brisson et Husson.
L’amendement n° 1301 est présenté par M. Savoldelli, Mme Varaillas et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 1728 est présenté par Mme G. Jourda, M. J. Bigot, Mme Van Heghe, MM. Tissot, Montaugé et Kanner, Mme Bonnefoy, MM. Dagbert et Devinaz, Mme M. Filleul, MM. Gillé, Houllegatte et Jacquin, Mmes Préville, Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 1745 rectifié est présenté par MM. Lafon et Delcros, Mme de La Provôté, M. Levi, Mme Sollogoub, M. Kern, Mme Perrot et MM. Détraigne et Moga.
L’amendement n° 1788 rectifié est présenté par M. Iacovelli, Mme Havet, M. Théophile, Mme Duranton, MM. Bargeton, Haye et Marchand, Mme Schillinger et M. Buis.
Ces sept amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 20
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le livre II du code de l’environnement est complété par un titre ainsi rédigé :
« Titre…
« Sols et sous-sols
« Chapitre unique
« Principes généraux de la protection des sols et des sous-sols
« Art. L. … – La politique nationale de prévention et de gestion des sites et sols pollués vise à prévenir et réduire la pollution des sols et des sous-sols et à assurer la gestion des pollutions existantes. Elle participe d’une gestion équilibrée et durable des sols et sous-sols et tient compte des adaptations nécessaires au changement climatique. Elle est définie et mise en œuvre conformément aux principes suivants :
« 1° La prévention et la remédiation des pollutions, et la gestion des risques associés ;
« 2° La spécificité et la proportionnalité, impliquant une appréciation au cas par cas de la situation de chaque site ;
« 3° L’évaluation du risque fondée sur les usages du site, la connaissance des sources, vecteurs et cibles d’exposition et le respect de valeurs de gestion conformes aux objectifs nationaux de santé publique.
« La prévention et la remédiation de la pollution des sols comprennent des mesures destinées à atténuer les effets des processus de dégradation des sols, à mettre en sécurité des sites dont les sols présentent, en surface ou dans le substratum rocheux, des substances dangereuses et à remettre en état et assainir les sols dégradés de manière à leur restituer un niveau de fonctionnalité au moins compatible avec les intérêts mentionnés à l’article L. 511-1, au regard de leur utilisation effective et de leur utilisation future autorisée. Ces mesures tiennent compte de l’impact d’une exploitation humaine des sols sur la libération et la diffusion dans l’environnement de substances dangereuses présentes naturellement dans ces sols. »
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du I est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
IV. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
V. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 958.
Mme Raymonde Poncet Monge. La commission d’enquête sur les problèmes sanitaires et écologiques liés aux pollutions des sols qui ont accueilli des activités industrielles ou minières, et sur les politiques publiques et industrielles de réhabilitation de ces sols a souhaité introduire une définition de la mise en œuvre d’une politique nationale de prévention et de gestion des sites et sols pollués.
Tel est l’un des objets de l’article 1er, que cet amendement tend à reprendre, de la proposition de loi issue des travaux de cette commission d’enquête.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Corbisez, pour présenter l’amendement n° 1178 rectifié bis.
M. Jean-Pierre Corbisez. Cet amendement tend à reprendre l’article 1er de la proposition de loi de notre collègue Gisèle Jourda. À la demande du président Longeot, nous présentons cet amendement en séance.
La rédaction élaborée par notre collègue a le mérite de clarifier la politique nationale de prévention et de gestion des sites et des sols pollués, en inscrivant les principes généraux de la protection des sols et des sous-sols au sein du code de l’environnement.
Elle prévoit ainsi la prévention et la gestion des pollutions, y compris celles qui existent, et, surtout, la remise en état des sols dégradés, de manière à restituer à ces derniers un niveau de fonctionnalité au moins compatible avec les intérêts protégés par le code de l’environnement dans le cadre de la législation relative aux ICPE : la santé, la sécurité et la salubrité publiques, l’agriculture ou encore l’environnement.
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour présenter l’amendement n° 1234 rectifié.
M. Marc Laménie. Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, cet amendement est présenté par Cyril Pellevat et par plusieurs collègues du groupe Les Républicains.
Je le considère comme défendu, car il est identique aux deux amendements précédents, mais je souhaite insister sur plusieurs points.
Cet amendement est le fruit du travail de la commission d’enquête précitée. Celle-ci a proposé plusieurs dispositions, notamment la création d’une politique nationale de prévention et de gestion des sites et sols pollués visant à remédier à un problème d’envergure, qui concerne – cela a été largement rappelé – un certain nombre de territoires. Sur ce sujet complexe, la tâche reste immense.
Telles sont les raisons pour lesquelles je défends cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour présenter l’amendement n° 1301.
M. Pascal Savoldelli. Au travers de cet amendement, nous mettons le doigt sur les lacunes de la définition légale des sols et des sous-sols. Les membres de la commission d’enquête sur la pollution des sols ont unanimement souhaité remédier à l’entremêlement juridique entourant la protection de cet élément naturel.
Cela rejoint le débat que nous avons eu précédemment sur la nécessité de mener une politique nationale. Nous préconisons la mise en œuvre d’actions, certes générales, mais louables que sont la prévention et la remédiation des pollutions et la gestion des risques associés, selon le double principe de spécificité et de proportionnalité permettant une appréciation au cas par cas et une évaluation du risque fondée sur les usages du site, conformément aux objectifs de santé publique.
Le groupe communiste républicain citoyen et écologiste prône également une compensation des pertes de recettes enregistrées par les acteurs qui sont affectés par la mise en œuvre de cette politique.
Ainsi, il est prévu de compenser la perte de recettes résultant de ces mesures pour les organismes de sécurité sociale, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts, et pour les collectivités locales, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
Nous proposons également de compenser la perte de recettes qui en résulterait pour l’État par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Comme vous pouvez le constater, notre proposition est constructive.
Madame la ministre, vous avez précédemment affirmé que l’État s’engageait auprès des communes, notamment les plus petites, en finançant 50 % des coûts de prévention et d’anticipation, mais, en la matière, un appel du pied à telle ou telle collectivité ne suffit pas : la santé publique et la préservation de l’environnement sont des prérogatives que l’État ne peut exercer qu’au travers de politiques nationales.
C’est la raison pour laquelle nous proposons d’inscrire ces dispositions dans la loi.
M. le président. La parole est à Mme Martine Filleul, pour présenter l’amendement n° 1728.
Mme Martine Filleul. Cet amendement de Mme Gisèle Jourda a pour objet de traduire l’une des ambitions de la proposition de loi précitée visant à refonder la politique de gestion et de protection des sites et des sols pollués en France.
L’article 1er de ce texte définit la pollution des sols, comme il existe une définition de la pollution de l’air et de l’eau. Il pose également les principes de la politique nationale de prévention et de gestion des sites et sols pollués, que nous appelons de nos vœux ; cet amendement tend à répondre à cette dernière ambition.
Quels sont les principes en jeu ? La prévention et la remédiation des pollutions ainsi que la gestion des risques associés ; la spécificité et la proportionnalité impliquant une appréciation au cas par cas de la situation de chaque site, ainsi que l’évaluation du risque fondée sur les usages du site ; la connaissance des sources, vecteurs et cibles d’exposition, et le respect de valeurs de gestion conformes aux objectifs nationaux de santé publique.
Mes chers collègues, les attentes de nos concitoyens sont fortes en la matière ; inscrire dans la loi ces principes généraux est un préalable indispensable.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Moga, pour présenter l’amendement n° 1745 rectifié.
M. Jean-Pierre Moga. Cet amendement de notre collègue Laurent Lafon est identique à ceux qui viennent d’être défendus.
M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour présenter l’amendement n° 1788 rectifié.
Mme Patricia Schillinger. Défendu !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. Ces amendements visent à traduire la proposition n° 10 du rapport de la commission d’enquête du Sénat relative à la pollution des sols, qui a – je tiens à le souligner de nouveau – réalisé un travail considérable sur ce sujet. Les dispositions que ces amendements tendent à introduire au sein du code de l’environnement me paraissent intéressantes.
La commission a donc émis un avis favorable sur ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. André Reichardt, pour explication de vote.
M. André Reichardt. Je souhaite simplement indiquer que, ce matin, a eu lieu une réunion de la commission des affaires européennes, qui portait précisément sur une autre recommandation de la commission d’enquête dont nous parlons. Celle-ci visait à mettre en œuvre une proposition de résolution européenne sur le même sujet. Les membres de la commission ont émis un avis favorable, à l’unanimité, sur cette proposition, qui pourra naturellement donner lieu, si le Sénat le décide, à une directive européenne, laquelle serait bienvenue.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 958, 1178 rectifié bis, 1234 rectifié, 1301, 1728, 1745 rectifié et 1788 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 20.
Je suis saisi de sept amendements identiques.
L’amendement n° 960 est présenté par Mme Taillé-Polian, MM. Benarroche, Dantec et Gontard, Mmes de Marco, Poncet Monge et M. Salmon.
L’amendement n° 1180 rectifié bis est présenté par Mme M. Carrère, MM. Corbisez et Cabanel, Mme N. Delattre, MM. Gold, Guérini et Guiol, Mme Pantel et MM. Requier, Roux et Bilhac.
L’amendement n° 1236 rectifié est présenté par MM. Pellevat et Burgoa, Mmes Dumas et Garriaud-Maylam, M. de Nicolaÿ, Mme Deromedi, MM. Sido et D. Laurent, Mme Lassarade, MM. B. Fournier, Perrin, Rietmann, Laménie, Genet et Charon, Mmes Bellurot et Joseph, M. Houpert, Mme Gosselin, MM. Rojouan et Bouchet, Mme Dumont et MM. Brisson et Husson.
L’amendement n° 1303 est présenté par M. Savoldelli, Mme Varaillas et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 1730 est présenté par Mme G. Jourda, M. J. Bigot, Mme Van Heghe, MM. Tissot, Montaugé et Kanner, Mme Bonnefoy, MM. Dagbert et Devinaz, Mme M. Filleul, MM. Gillé, Houllegatte et Jacquin, Mmes Préville, Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 1747 rectifié est présenté par MM. Lafon et Delcros, Mme de La Provôté, M. Levi, Mme Sollogoub, M. Kern, Mmes Billon et Perrot et MM. Détraigne et Moga.
L’amendement n° 1790 rectifié est présenté par M. Iacovelli, Mme Havet, M. Théophile, Mme Duranton, MM. Bargeton, Haye et Marchand, Mme Schillinger et M. Buis.
Ces sept amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 20
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L’article L. 161-1 du code minier est ainsi rédigé :
« Art. L. 161-1. – Les travaux de recherches ou d’exploitation minière respectent, sous réserve des règles prévues par le code du travail en matière de santé et de sécurité au travail éventuellement complétées ou adaptées par décret en Conseil d’État en application de l’article L. 180-1 du présent code, les contraintes et les obligations nécessaires à la préservation des intérêts suivants : la sécurité, la salubrité et la santé publiques, la solidité des édifices publics et privés, la conservation de la mine, des autres mines et des voies de communication, les caractéristiques essentielles du milieu environnant, terrestre, littoral ou maritime, l’intégrité des câbles, réseaux ou canalisations enfouis ou posés, la protection des espaces naturels et des paysages, de la faune et de la flore, des équilibres biologiques et des ressources naturelles, notamment ceux mentionnés aux articles L. 211-1, L. 219-7, L. 331-1, L. 332-1 et L. 341-1 du code de l’environnement, la conservation de l’archéologie et des immeubles classés ou inscrits, particulièrement ceux mentionnés aux articles L. 621-7 et L. 621-30 du code du patrimoine, les intérêts agricoles et halieutiques des sites et des lieux affectés par les travaux et les installations afférents à l’exploitation. Ils doivent en outre garantir la bonne utilisation du gisement et la conservation de la mine.
« Les travaux de recherches ou d’exploitation minière sont soumis à l’autorisation environnementale dans les conditions prévues au chapitre unique du titre VIII du livre Ier du code de l’environnement. »
II. - Après le 2° de l’article L. 181-1 du code de l’environnement, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° Travaux de recherches ou d’exploitation minière régis par le titre VI du livre Ier du code minier. »
III. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
IV. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
V. – La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du I est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
VI. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge pour présenter l’amendement n° 960.
Mme Raymonde Poncet Monge. La commission d’enquête dont nous avons parlé a souhaité mettre un terme aux asymétries existant entre le code minier et le code de l’environnement en matière de responsabilité des exploitants et de prévention des risques sanitaires et environnementaux.
Pour cela, elle a notamment procédé à l’extension, aux exploitants de sites miniers, de l’obligation de constitution de garanties financières pour la remise en état de la mine après fermeture ; à l’intégration de la protection de la santé publique dans les intérêts protégés par le code minier ; à l’extension aux sites miniers de la possibilité de rechercher la responsabilité de la société mère en cas de défaillance éventuelle de la filiale exploitante ; enfin, à l’intégration des travaux miniers dans l’autorisation environnementale, afin d’harmoniser les procédures administratives d’instruction, de contrôle et de sanction entre les sites miniers et les sites d’installations classées pour la protection de l’environnement.
Sur ce dernier point, cet amendement vise à reprendre en partie l’article 9 de la proposition de loi issue des travaux de la commission d’enquête précitée.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Corbisez, pour présenter l’amendement n° 1180 rectifié bis.
M. Jean-Pierre Corbisez. Cet amendement identique vise à reprendre en partie l’article 9 de la proposition de loi de notre collègue Gisèle Jourda, qui précise les responsabilités des exploitants et leurs obligations en matière de prévention des risques au sein du code minier.
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour présenter l’amendement n° 1236 rectifié.
M. Marc Laménie. Je veux apporter quelques précisions, à l’instar de Pascal Savoldelli, sur la notion de financement, car se pose la question des pertes de recettes induites, pour les collectivités territoriales, et de leur compensation à due concurrence par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
Il est important de le souligner, car la dépollution de certains sites ou friches industriels existant de longue date suscite de gros problèmes de financement pour l’ensemble des collectivités territoriales, dont l’État reste le principal partenaire.
Tel est l’objet de cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour présenter l’amendement n° 1303.
M. Pascal Savoldelli. Cet amendement identique aux précédents est de la même veine que ceux que nous venons d’adopter à l’unanimité. Nous verrons si nous sommes cohérents…
Il s’agit d’une asymétrie existant entre deux législations. La commission d’enquête sur les problèmes sanitaires et écologiques liés aux pollutions a axé ses travaux sur l’introduction dans la législation française d’un véritable droit de protection des sols. Notre constat a été, sans détour, celui d’une asymétrie entre le code de l’environnement et le code minier, en matière de responsabilité des exploitants.
C’est pourquoi le présent amendement a pour objet de modifier le code minier, afin de soumettre les travaux de recherches et d’exploitation minières à un certain nombre d’obligations, dont le respect de la santé publique, ce qui convient à tout le monde – une grande première –, et le respect des caractéristiques essentielles des sols. L’amendement vise surtout à harmoniser, pour la première fois, le régime de responsabilité des exploitants miniers, ce qui est une avancée importante.
J’insiste sur ces éléments. Nous avons tous des expériences à partager. Ma collègue Catherine Procaccia, ici présente, et moi-même connaissons bien un cas, dans le département du Val-de-Marne, où un collège, le collège Saint-Exupéry, s’est révélé pollué. Or, si notre amendement précédent était si constructif du point de vue des recettes, c’est parce que ce cas d’espèce a engendré un coût de construction transitoire de 15 millions d’euros pour la collectivité ! Certes, le département fera appel au Fonds pour le recyclage des friches et je serai attentif à la mobilisation de l’argent de l’État dans cette affaire, mais vous imaginez bien le traumatisme sanitaire que cette pollution représente pour tous les jeunes collégiens et pour leurs familles. Heureusement que les collectivités territoriales savent se montrer réactives.
Ainsi, dans la même logique que les amendements adoptés précédemment, l’objet de celui-ci est d’intégrer un régime d’autorisation environnementale et d’harmoniser les procédures d’instruction, de contrôle et de sanction entre les sites miniers et les sites d’ICPE, conformément à l’article 9 de la proposition de loi précitée.
M. le président. La parole est à M. Joël Bigot, pour présenter l’amendement n° 1730.
M. Joël Bigot. Je ne veux pas être redondant, l’objet est le même, il s’agit de mettre un terme aux asymétries existant entre le code minier et le code de l’environnement, en matière de responsabilité des exploitants et de prévention des risques sanitaires et environnementaux, conformément à ce qui a été promu par notre commission d’enquête sénatoriale.
Il s’agit, encore et toujours, de sécuriser la remise en état des sites et d’améliorer la surveillance des sols, car l’ambition, partagée par la quasi-unanimité des groupes politiques, est de mieux prévenir et de mieux gérer les pollutions des sols et les risques sanitaires et écologiques qui y sont associés.
J’ajoute que la commission d’enquête a eu l’occasion de visiter une mine d’or à Salsigne, qui a cessé d’être exploitée voilà une vingtaine d’années et dans laquelle on utilisait du cyanure. Or les dégâts causés par l’utilisation du cyanure sont encore visibles aujourd’hui.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Moga, pour présenter l’amendement n° 1747 rectifié.
M. Jean-Pierre Moga. Cet amendement de mon collègue Lafon est identique et il a été très correctement défendu.
M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour présenter l’amendement n° 1790 rectifié.
Mme Patricia Schillinger. Défendu !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. Ces différents amendements visent à reprendre la proposition n° 9 du rapport de la commission d’enquête du Sénat sur la pollution des sols.
L’article 20 du projet de loi, dans sa rédaction actuelle, permet de les satisfaire ; l’étude d’impact annexée au projet de loi cite d’ailleurs le rapport de la commission d’enquête. À l’alinéa 4 de cet article, la santé a été ajoutée au sein des intérêts protégés par l’article L. 161-1 du code minier.
Les intérêts halieutiques ont été également ajoutés dans ces intérêts protégés, à l’alinéa 9. Cet article permet désormais de rechercher la responsabilité des sociétés mères, grands-mères et arrière-grands-mères en cas de défaillance éventuelle de la filiale exploitante.
Le régime des garanties financières applicable à l’ouverture de travaux miniers a également été inscrit aux alinéas 11 à 23 de l’article 20.
L’article 20 bis A, traité par la commission des affaires économiques et son rapporteur pour avis Daniel Gremillet, met en place un régime d’analyse environnementale, économique et sociale pour l’octroi, l’extension et la prolongation des permis de recherche et des concessions.
L’article 20 sexies, que nous examinerons ultérieurement, fait entrer les activités minières dans le champ de la responsabilité environnementale, défini par le code de l’environnement.
Enfin, l’article 21, également traité par la commission des affaires économiques, habilite le Gouvernement à légiférer par ordonnance afin que, avec les adaptations nécessaires, l’autorisation d’ouverture de travaux miniers relève du régime de l’autorisation environnementale prévue dans le même code.
Ces amendements identiques sont donc pleinement satisfaits. Je salue une nouvelle fois le travail réalisé par Mme Gisèle Jourda, l’ensemble des collègues de cette commission d’enquête et le président Lafon, car leurs recommandations ont inspiré certaines mesures proposées par le Gouvernement dans ce projet de loi.
Par conséquent, je demande le retrait de tous ces amendements, faute de quoi j’émettrais un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Barbara Pompili, ministre. M. le rapporteur a devancé mes explications, en indiquant que les travaux de votre commission d’enquête ont inspiré le Gouvernement dans la rédaction de cette réforme du code minier. Les mesures que vous proposez ont donc déjà été intégrées dans le texte, notamment aux articles 20 et 21.
Par ailleurs, j’attire votre attention sur le fait que certains travaux de recherche sont soumis au régime de la déclaration. Or la rédaction que vous proposez compromettrait la recherche minière.
Ces amendements étant satisfaits, je vous demande de bien vouloir les retirer, faute de quoi j’émettrais un avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 960, 1180 rectifié bis, 1236 rectifié, 1303, 1730, 1747 rectifié et 1790 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 1681 rectifié bis, présenté par MM. Jacquin, Dagbert, Todeschini, J. Bigot, Montaugé et Kanner, Mme Bonnefoy, M. Devinaz, Mme M. Filleul, MM. Gillé et Houllegatte, Mmes Préville, Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy et Tissot, Mmes Van Heghe, G. Jourda et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 20
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le deuxième alinéa de l’article L. 163-11 du code minier, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« En cas de transfert d’un bien d’origine minière de l’exploitant, de l’État ou de tout ayant-droit à une collectivité territoriale, le transfert ne peut intervenir qu’après transfert effectif des équipements, des études et toutes les données nécessaires à l’accomplissement des missions de surveillance et d’entretien du bien, et après compensation intégrale, c’est-à-dire par l’attribution de ressources équivalentes à celles qui étaient consacrées à l’exercice des missions au titre de la surveillance et de l’entretien et ce de manière pérenne. »
La parole est à Mme Angèle Préville.
Mme Angèle Préville. Dans l’après-mine, il faut, d’une manière générale, éviter que l’État, en sa qualité d’ayant-droit de l’exploitant, se décharge sur les collectivités locales de ses responsabilités et surtout des dépenses y afférent, en ce qui concerne la surveillance et l’entretien des anciennes dépendances légales et, plus largement, des biens d’origine minière.
Nous proposons donc la création d’un article relatif au transfert de biens, faisant expressément référence à l’article 72-2 de la Constitution.
Cet amendement nous a été proposé par le collectif de défense des communes minières.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. Les collectivités territoriales disposent d’un droit de priorité pour récupérer certaines installations hydrauliques de sécurité. Actuellement, le code minier prévoit que le transfert de ces installations est assorti du versement, par l’exploitant, d’une somme correspondant au coût estimé des dix premières années de fonctionnement de ces installations et dont le montant est arrêté par l’autorité administrative.
Votre amendement vise à apporter une précision qui me semble intéressante au sein de l’article L. 163-11 du code minier, à propos du transfert de biens d’origine minière de l’exploitant, de l’État ou de tout ayant droit à une collectivité locale. Il tend ainsi à sécuriser financièrement la reprise de ces biens par les collectivités, grâce à une rédaction qui a été légèrement adaptée. Je partage cet objectif.
La commission a donc émis un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Barbara Pompili, ministre. Le présent amendement a pour objet de compenser intégralement le transfert de charges des installations hydrauliques de sécurité aux collectivités locales. Or celles-ci ne sont absolument pas obligées de récupérer ces installations hydrauliques. Elles ont un droit de priorité, qu’elles peuvent utiliser si elles le souhaitent et en toute connaissance de cause, en sachant notamment le montant de la soulte qui leur sera versé pour solde de tout compte.
Il est difficilement envisageable d’estimer une soulte qui correspondrait à un fonctionnement ad vitam æternam des installations, ainsi que les modalités de versement de cette soulte par l’exploitant.
Si les collectivités ne souhaitent pas ce transfert, l’État reprendra ces installations.
Le Gouvernement estime que la durée de dix ans fixée pour la soulte est proportionnée. Il n’y a donc pas lieu de compenser intégralement la reprise d’installations hydrauliques de sécurité par les collectivités, étant donné que celles-ci disposent du choix de refuser ce transfert.
Avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Corbisez, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Corbisez. Je suis quelque peu étonné de l’origine de la demande. Dans le bassin minier du Nord-Pas-de-Calais, les Charbonnages de France ont, à un moment, proposé aux collectivités de récupérer ce qu’on appelle les pompes d’exhaure, qui servent à pomper l’eau dans les galeries.
En effet, comme le niveau des terrains s’abaisse, la nappe phréatique remonte par endroits dans les communes minières, de sorte que, si l’on arrêtait ces pompes d’exhaure, certaines d’entre elles se retrouveraient en moins de deux mois sous l’eau. Une ville comme Oisy, à côté de Douai, deviendrait un lac !
À l’époque, on avait donc fortement recommandé aux maires de ne pas reprendre la responsabilité de la gestion de ces stations de pompage et de la laisser à l’État.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 20.
L’amendement n° 1678 rectifié, présenté par MM. Jacquin, Dagbert, Todeschini, J. Bigot, Montaugé et Kanner, Mme Bonnefoy, M. Devinaz, Mme M. Filleul, MM. Gillé et Houllegatte, Mmes Préville, Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy et Tissot, Mmes Van Heghe, G. Jourda et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 20
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 174-5 du code minier, il est inséré un article L. 174-5-… ainsi rédigé :
« Art. L. 174-5-… – Par exception aux règles du droit commun, les actes de prescription des plans de prévention des risques miniers sont susceptibles de recours pour excès de pouvoir, dans le délai de droit commun à compter de leur publication. »
La parole est à M. Olivier Jacquin.
M. Olivier Jacquin. Cet amendement vise à donner des possibilités complémentaires de recours aux collectivités territoriales dans la phase d’élaboration des plans de prévention des risques miniers.
Actuellement, les pouvoirs publics sortent un grand parapluie administratif pour imposer leurs prescriptions d’urbanisme. Il en est ainsi d’une directive territoriale d’aménagement dans mon secteur minier, qui est bien connu : autour de la commune de Jarny, toutes les mines de fer ont été considérées de la même manière pour élaborer les prescriptions d’urbanisme. Pourtant, alors que, dans d’autres communes, on a exploité jusqu’à cinq ou six couches de mine, de sorte que l’État a émis une prescription extrêmement forte, à Jarny, une seule couche a été exploitée et l’on ne constate aucun mouvement de terrain ni aucun problème particulier. L’urbanisme y est donc bloqué.
D’un point de vue contentieux, il est possible de déposer un recours mais uniquement contre les décisions préfectorales d’approbation définitive, non contre les arrêtés de simple prescription. Il en résulte un gel des zones concernées pendant plusieurs années, le temps que la procédure administrative avance.
Voilà pourquoi nous proposons une nouvelle possibilité de recours, qui ne bloquerait pas l’évolution du processus ni ne supprimerait le « parapluie », mais qui donnerait au maire ou au responsable de l’urbanisme dans la collectivité la possibilité de réagir rapidement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. Le plan de prévention des risques miniers (PPRM) permet d’assujettir les réalisations d’ouvrages et l’occupation des sols à des prescriptions ou à des restrictions, afin de protéger la population. Il vaut servitude d’utilité publique et est annexé au plan local d’urbanisme. Il est élaboré par l’État dans les conditions prévues par le code de l’environnement, sur le modèle du plan de prévention des risques naturels (PPRN), après une évaluation des aléas réalisée avec l’appui des établissements publics compétents.
L’arrêté de prescription d’un PPRM ne contient pas, en lui-même, de disposition opposable créant des interdictions de construction. Une fois l’étude des enjeux et le projet de règlement réalisés, des concertations sont menées, puis une enquête publique précède l’approbation du PPRM, par arrêté préfectoral, qui peut être contesté par un recours contentieux.
Dans le cas où le préfet a l’intention de rendre immédiatement opposables certaines prescriptions d’un projet de PPRM et qu’il prend un arrêté d’application anticipé, il peut également y avoir un recours distinct pour excès de pouvoir.
Je demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi j’émettrais un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.
M. Olivier Jacquin. Je suis désolé de devoir apporter à nouveau une précision. J’ai indiqué, en défense de mon amendement, qu’il existait une possibilité de recours lorsque la décision préfectorale d’approbation définitive du plan de prévention était rendue, mais cela peut prendre des années. Si le maire, pendant ce temps, veut contester une prescription, il ne le peut pas, ce qui bloque tout l’urbanisme.
Voilà pourquoi nous proposons d’ouvrir une nouvelle fenêtre !
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1678 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 20 bis A
I. – Le code minier est ainsi modifié :
1° Après l’article L. 100-2, sont insérés des articles L. 100-3 A, L. 100-3 et L. 100-4 ainsi rédigés :
« Art. L. 100-3 A (nouveau). – Les substances minérales ou fossiles assujetties au régime légal des mines n’appartiennent pas au propriétaire du sol et sont administrées par l’État sous réserve des compétences dévolues aux collectivités mentionnées aux titres XII et XIII de la Constitution et des dispositions spécifiques qui leur sont applicables.
« La gestion et la valorisation des substances minérales ou fossiles et des usages du sous-sol visés par le code minier sont d’intérêt général et concourent aux objectifs de développement durable des territoires et de la Nation.
« Ces gestion et valorisation ont pour objectifs de développer l’activité extractive sur le territoire national, de relocaliser les chaînes de valeur, de sécuriser les circuits d’approvisionnement, de garantir la connaissance et la traçabilité des ressources du sous-sol et de réduire la dépendance de la France aux importations.
« Art. L. 100-3. – Les décisions, titres et autorisations pris en application du présent code sont soumis au contentieux de pleine juridiction, sous réserve des dispositions prévues à l’article L. 181-17 du code de l’environnement et au premier alinéa du I de l’article L. 514-6 du même code.
« Par exception, la compatibilité de travaux miniers avec les dispositions d’un schéma de cohérence territoriale, d’un plan local d’urbanisme, d’un plan d’occupation des sols ou d’une carte communale est appréciée à la date de l’autorisation ou de la déclaration.
« Un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application du présent article.
« Il précise les délais dans lesquels les décisions, titres et autorisations pris en application du premier alinéa du présent article peuvent être déférés à la juridiction administrative.
« Art. L. 100-4 (nouveau). – I. – Sous réserve des dispositions de l’article L. 181-18 du code de l’environnement, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre une décision, un titre ou une autorisation mentionnés à l’article 100-3 du présent code estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés :
« 1° Qu’un vice n’affecte qu’une phase de l’instruction de la demande d’acte ou une partie de cet acte, peut limiter à cette partie la portée de l’annulation qu’il prononce et demander à l’autorité administrative compétente de reprendre l’instruction à la phase ou sur la partie qui a été entachée d’irrégularité ;
« 2° Qu’un vice entraînant l’illégalité de cet acte est susceptible d’être régularisé par un acte modificatif peut, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, surseoir à statuer jusqu’à l’expiration du délai qu’il fixe pour cette régularisation. Si un tel acte modificatif est notifié dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations.
« II. – En cas d’annulation ou de sursis à statuer affectant une partie seulement de l’acte, le juge détermine s’il y a lieu de suspendre l’exécution des parties de l’acte non viciées.
« Un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application du présent article. » ;
2° Après le titre Ier du livre Ier, il est inséré un titre Ier bis ainsi rédigé :
« TITRE IER BIS
« PRINCIPES RÉGISSANT LE MODÈLE MINIER FRANÇAIS
« Art. L. 114-1. – L’octroi, l’extension et la prolongation d’un permis exclusif de recherches ou d’une concession sont précédés d’une analyse environnementale, économique et sociale.
« Art. L. 114-2. – I. – L’analyse environnementale, économique et sociale est un processus constitué de l’élaboration, par le demandeur du titre, d’un mémoire environnemental, économique et social pour les recherches ou d’une étude de faisabilité environnementale, économique et sociale pour l’exploitation, de la réalisation des consultations prévues au présent article ainsi que de l’examen, par l’autorité compétente pour prendre la décision, de l’ensemble des informations présentées dans le mémoire ou l’étude de faisabilité et des informations reçues dans le cadre desdites consultations et des réponses données par le demandeur.
« L’analyse environnementale, économique et sociale présente les enjeux environnementaux, économiques et sociaux que représente le projet minier pour le territoire sur lequel il est envisagé et permet d’apprécier comment il s’inscrit dans la politique nationale des ressources et des usages du sous-sol prévue par le présent code. Elle permet enfin à l’autorité compétente de définir les conditions auxquelles l’activité de recherches ou d’exploitation devra être soumise ainsi que, le cas échéant, les obligations imposées dans le cahier des charges mentionné à l’article L. 114-3.
« II. – Le mémoire ou l’étude de faisabilité fait l’objet d’un avis environnemental de la formation d’autorité environnementale du Conseil général de l’environnement et du développement durable et d’un avis économique et social du Conseil général de l’économie, de l’industrie, de l’énergie et des technologies.
« Ces avis font l’objet d’une réponse écrite de la part du demandeur.
« III. – Le dossier de demande d’octroi, d’extension ou de prolongation d’un permis exclusif de recherches ou d’une concession, comprenant le mémoire ou l’étude de faisabilité, les avis mentionnés au II et la réponse écrite du demandeur à ces avis sont transmis pour avis au représentant de l’État dans le département ainsi qu’aux communes, établissements publics de coopération intercommunale, conseil départemental, conseil régional ainsi que les collectivités à statut particulier ou collectivités d’outre-mer concernés par le projet minier.
« Les avis des collectivités territoriales ou groupements mentionnés au premier alinéa du présent III, dès leur adoption, ou l’information relative à l’absence d’observations énoncées dans le délai fixé par décret en Conseil d’État sont mis à la disposition du public sur le site internet de la préfecture du département.
« IV. – Le demandeur met à la disposition du public, sur un site internet, son dossier de demande, éventuellement expurgé des informations couvertes par son droit d’inventeur ou de propriété industrielle, ainsi que sa réponse écrite aux avis prévus au II, avant l’ouverture de la consultation du public ou de l’enquête publique réalisées conformément au chapitre III du titre II du livre Ier du code de l’environnement.
« Art. L. 114-3. – I. – L’autorité compétente prend en compte l’analyse environnementale, économique et sociale pour prendre la décision d’octroi, d’extension ou de prolongation d’un permis exclusif de recherches ou d’une concession.
« La décision mentionnée au premier alinéa est soumise à une procédure contradictoire préalable, au cours de laquelle le demandeur est invité à présenter ses observations et, le cas échéant, à modifier la demande, par dérogation à l’article L. 121-1 du code des relations entre le public et l’administration.
« II. – La demande d’octroi, d’extension ou de prolongation d’un permis exclusif de recherches ou d’une concession est refusée si l’autorité compétente émet un doute sérieux sur la possibilité de procéder aux recherches ou à l’exploitation du type de gisement mentionné sans porter une atteinte grave aux intérêts mentionnés à l’article L. 161-1.
« La décision de refus mentionnée au premier alinéa du présent II est explicite et motivée, sous réserve du 7° de l’article L. 211-2 du code des relations entre le public et l’administration.
« III. – Un cahier des charges précisant les conditions spécifiques à respecter par le demandeur peut être annexé à l’acte octroyant le titre minier. Le demandeur est invité à présenter ses observations sur le projet de cahier des charges.
« Le cahier des charges peut, si la protection de l’environnement ou d’autres usages existants ou planifiés du sol ou du sous-sol le justifient, interdire le recours à certaines techniques de recherche ou d’exploitation sur tout ou partie du périmètre du titre.
« Le cahier des charges peut contenir les mesures économiques et sociales définies dans l’étude de faisabilité environnementale, économique et sociale prévue à l’article L. 114-2.
« Art. L. 114-3-1 (nouveau). – Les modalités d’instruction des décisions administratives à prendre en application du code minier, ainsi que les modalités d’information, de consultation et de participation préalables du public et des collectivités territoriales afférentes sont proportionnées, en l’état des connaissances notamment scientifiques et techniques à la date des demandes correspondantes, à l’objet desdites décisions, à leur durée, ainsi qu’à leur incidence sur l’environnement.
« Art. L. 114-3-2 (nouveau). – Les collectivités territoriales concernées sont informées du dépôt d’une demande de titre minier sur leur territoire dès sa réception par l’autorité compétente pour son instruction ou, le cas échéant, au moment de la publication de l’avis de mise en concurrence. Elles sont informées du ou des candidats retenus à l’issue de cette procédure de mise en concurrence.
« Art. L. 114-4. – Les conditions et les modalités d’application du présent titre sont fixées par décret en Conseil d’État. »
II. – Le 1° du I s’applique aux litiges engagés à compter de la date de promulgation de la présente loi à l’encontre des décisions, titres et autorisations pris ou accordés en application du code minier après cette même date ainsi qu’aux demandes de titres ou d’autorisations en cours d’instruction à cette date.
Le 2° du I s’applique aux demandes d’octroi, d’extension ou de prolongation d’un permis exclusif de recherche ou d’une concession déposées après la date de promulgation de la présente loi.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Avant d’entamer l’examen de l’article 20 bis A, je souhaite préciser la manière dont la commission des affaires économiques a abordé le volet du projet de loi relatif à la réforme du code minier.
Il s’agit d’une réforme attendue depuis dix ans, qui fait consensus parmi les professionnels et les associations de protection de l’environnement. En effet, l’avant-projet de réforme a reçu l’accord unanime du Conseil national de la transition écologique.
Il s’agit aussi d’un sujet consensuel entre commissions. Nous avons, en effet, travaillé ensemble et je tiens à remercier Pascal Martin, rapporteur de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, avec qui j’ai œuvré en symbiose.
Les enjeux de cette réforme sont multiples ; il faut, tout d’abord, actualiser un droit obsolète ; il faut aussi intégrer les enjeux environnementaux ; il faut enfin nous préparer à une concurrence mondiale pour l’accès aux ressources.
Sur la méthode, cette réforme devait intervenir via une très longue habilitation à légiférer par ordonnance. La commission a souhaité infléchir cette méthode en limitant l’habilitation dans le temps, en spécifiant les parties prenantes associées et en prévoyant une présentation devant le Parlement.
Surtout, la commission a supprimé ou encadré quinze habilitations qui sont satisfaites par son propre texte ou par le texte adopté à l’Assemblée nationale.
Plus encore, la commission a inscrit directement dans la loi cinq dispositions issues de l’avant-projet de réforme : le caractère d’intérêt général des ressources, le principe de proportionnalité des procédures, celui de l’information préalable des collectivités, le registre électronique des titres et la recodification des reconversions.
Elle a aussi conforté la sécurité juridique de certaines dispositions, à commencer par le contentieux minier, l’analyse environnementale et la lutte contre l’orpaillage illégal.
Enfin, elle a posé le débat de la réforme de la fiscalité minière, qui est mal répartie entre les communes et conçue par rapport au cours des matières premières, comme celui de l’or, sujet que nous venons largement d’évoquer. Je souhaite que ce volet, tout à la fois infléchi et enrichi, aboutisse, car il y va de notre souveraineté minière.
M. le président. L’amendement n° 2140, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. – Le code minier est ainsi modifié :
1° Après l’article L. 100-2, il est inséré un article L. 100-3 ainsi rédigé :
« Art. L. 100-3. – Les décisions, titres et autorisations pris en application du présent code sont soumis au contentieux de pleine juridiction. » ;
2° Après le titre Ier du livre Ier, il est inséré un titre Ier bis ainsi rédigé :
« Titre Ier bis
« Principes régissant le modèle minier français
« Art. L. 114-1. – L’octroi, l’extension et la prolongation d’un permis exclusif de recherches ou d’une concession sont précédés d’une analyse environnementale, économique et sociale.
« Art. L. 114-2. – I. – L’analyse environnementale, économique et sociale est un processus constitué de l’élaboration, par le demandeur du titre, d’un mémoire environnemental, économique et social pour les recherches ou d’une étude de faisabilité environnementale, économique et sociale pour l’exploitation, de la réalisation des consultations prévues au présent article ainsi que de l’examen, par l’autorité compétente pour prendre la décision, de l’ensemble des informations présentées dans le mémoire ou l’étude de faisabilité et des informations reçues dans le cadre desdites consultations et des réponses données par le demandeur.
« L’analyse environnementale, économique et sociale présente les enjeux environnementaux, économiques et sociaux que représente le projet minier pour le territoire sur lequel il est envisagé et permet d’apprécier comment il s’inscrit dans la politique nationale des ressources et des usages du sous-sol prévue par le présent code. Elle permet enfin à l’autorité compétente de définir les conditions auxquelles l’activité de recherches ou d’exploitation devra être soumise ainsi que, le cas échéant, les obligations imposées dans le cahier des charges mentionné à l’article L. 114-3.
« II. – Le mémoire ou l’étude de faisabilité fait l’objet d’un avis environnemental de la formation d’autorité environnementale du Conseil général de l’environnement et du développement durable et d’un avis économique et social du Conseil général de l’économie, de l’industrie, de l’énergie et des technologies.
« Ces avis font l’objet d’une réponse écrite de la part du demandeur.
« III. – Le dossier de demande d’octroi, d’extension ou de prolongation d’un permis exclusif de recherches ou d’une concession, comprenant le mémoire ou l’étude de faisabilité, les avis mentionnés au II du présent article et la réponse écrite du demandeur à ces avis sont transmis pour avis au représentant de l’État dans le département ainsi qu’aux collectivités territoriales et à leurs groupements concernés par le projet minier.
« Les avis des collectivités territoriales et de leurs groupements, dès leur adoption, ou l’information relative à l’absence d’observations énoncées dans le délai fixé par décret en Conseil d’État sont mis à la disposition du public sur le site internet de la préfecture du département.
« IV. – Le demandeur met à la disposition du public, sur un site internet, son dossier de demande, éventuellement expurgé des informations couvertes par son droit d’inventeur ou de propriété industrielle, ainsi que sa réponse écrite aux avis prévus au II du présent article, avant l’ouverture de la consultation du public ou de l’enquête publique réalisées conformément au chapitre III du titre II du livre Ier du code de l’environnement.
« Art. L. 114-3. – I. – L’autorité compétente prend en compte l’analyse environnementale, économique et sociale pour prendre la décision d’octroi, d’extension ou de prolongation d’un permis exclusif de recherches ou d’une concession.
« II. – La demande d’octroi, d’extension ou de prolongation d’un permis exclusif de recherches ou d’une concession est refusée si l’autorité compétente émet un doute sérieux sur la possibilité de procéder aux recherches ou à l’exploitation du type de gisement visé sans porter une atteinte grave aux intérêts mentionnés à l’article L. 161-1.
« III. – Un cahier des charges précisant les conditions spécifiques à respecter par le demandeur peut être annexé à l’acte octroyant le titre minier. Le demandeur est invité à présenter ses observations sur le projet de cahier des charges.
« Le cahier des charges peut, si la protection de l’environnement ou d’autres usages existants ou planifiés du sol ou du sous-sol le justifient, interdire le recours à certaines techniques de recherche ou d’exploitation sur tout ou partie du périmètre du titre.
« Le cahier des charges peut contenir les mesures économiques et sociales définies dans l’étude de faisabilité environnementale, économique et sociale prévue à l’article L. 114-1.
« Art. L. 114-4. – Les conditions et les modalités d’application du présent titre sont fixées par décret en Conseil d’État. » ;
3° Après l’article L. 121-5, sont insérés des articles L. 121-6 et L. 121-7 ainsi rédigés :
« Art. L. 121-6. – Le demandeur retenu, le cas échéant à l’issue du règlement de la concurrence, conduit une phase de concertation. La concertation permet de débattre de l’intérêt de la demande pour le territoire et l’économie nationale, des éventuels effets environnementaux, économiques, et sociaux du projet et des conditions préalables aux travaux miniers.
« La forme et la portée de la concertation sont proportionnées aux enjeux environnementaux, économiques et sociaux à l’intérieur du périmètre de la demande. Les modalités de cette concertation sont arrêtées par le représentant de l’État dans le département, sa durée minimale est de quinze jours et maximale de trois mois. Quinze jours avant le début de la concertation, le public est informé des modalités et de la durée de la concertation par voie dématérialisée et par voie d’affichage sur le ou les lieux concernés par la concertation ainsi que, selon l’importance et la nature du projet, par voie de publication locale.
« Les dépenses relatives à l’organisation matérielle de la concertation sont à la charge du demandeur.
« Art. L. 121-7. – Pour conduire la concertation, le demandeur peut demander à la Commission nationale du débat public de désigner un garant parmi ceux inscrits sur la liste nationale de garants mentionnée au I de l’article L. 121-1-1 du code de l’environnement.
« Le garant peut demander à la Commission nationale du débat public, qui en supporte le coût, une étude technique ou expertise complémentaire. La décision de la commission est portée à la connaissance du public sur le site internet prévu pour la concertation.
« Lorsqu’il est saisi d’une demande tendant à la réalisation d’une étude technique ou d’une expertise complémentaire, le garant motive, le cas échéant, sa décision de ne pas transmettre cette demande à l’examen de la Commission nationale du débat public.
« Sans préjudice des dispositions du chapitre Ier du titre Ier du livre III du code des relations entre le public et l’administration, il statue, dans les limites posées par l’article L. 311-5 du même code, sur l’opportunité de donner suite aux demandes de communication adressées, soit au demandeur, soit à l’autorité publique compétente pour prendre la décision. Il peut adresser toute demande au demandeur pour assurer une bonne information et participation du public.
« Le public peut adresser ses observations et propositions par voie électronique ou postale au garant pour publication sur le site internet prévu pour la concertation.
« Le garant établit dans le délai d’un mois, au terme de la concertation, un bilan de celle-ci et résume la façon dont elle s’est déroulée. Ce bilan comporte une synthèse des observations et propositions présentées et, le cas échéant, mentionne les évolutions du projet qui résultent de la concertation.
« Le garant informe le demandeur, la Commission nationale du débat public et le représentant de l’État du déroulement et du bilan de la concertation préalable.
« Le bilan de la concertation préalable est rendu public par le garant. » ;
4° À l’article L. 122-3, les mots : « initiale maximale de cinq ans » sont remplacés par les mots : « maximale de dix ans » ;
5° Après le même article L. 122-3, il est inséré un article L. 122-4 ainsi rédigé :
« Art. L. 122-4 – Les conditions et modalités d’application du présent chapitre sont fixées par décret en Conseil d’État. » ;
6° L’article L. 124-2-3 est ainsi modifié :
a) Les mots : « initiale maximale de cinq ans » sont remplacés par les mots : « maximale de dix ans » ;
b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Les articles L. 121-6 et L. 121-7 s’appliquent aux demandes d’octroi de permis exclusif de recherches de gîtes géothermiques. » ;
7° La sous-section 3 de la section 2 est ainsi rédigée :
« Sous-section 3
« Phase de développement des projets d’exploitation de gîtes géothermiques
« Art. L. 124-2-5. – Tout projet d’exploitation de gîtes géothermique est soumis à la phase de développement prévue aux articles L. 142-1 et L. 142-2. » ;
8° La sous-section 1 de la section 1 du chapitre II du titre IV du livre Ier est ainsi rédigée :
« Sous-section 1
« Phase de développement des projets
« Art. L. 142-1. – La phase de développement d’un projet d’exploitation a pour objectif d’étudier la faisabilité technique, environnementale, et sociale du projet d’exploitation en concertation avec les parties prenantes locales.
« Le titulaire d’un permis exclusif de recherches qui souhaite s’engager dans une phase de développement d’un projet d’exploitation doit au plus tard six mois avant l’échéance du permis exclusif de recherches demander à l’autorité administrative compétente l’autorisation de s’engager dans une telle phase. Il apporte la preuve de la découverte d’un gîte exploitable.
« L’administration statue de manière explicite dans un délai de trois mois, l’absence de réponse vaut acceptation.
« Lorsqu’elle se prononce favorablement sur la demande et si cela est nécessaire, l’autorité administrative prolonge la durée du permis exclusif de recherches de la durée de la phase de développement du projet d’exploitation. Cette nouvelle échéance ne peut avoir pour effet de prolonger la durée du permis exclusif de recherches au-delà de quinze ans.
« L’autorité administrative définit, en outre, les modalités de la concertation que conduit le titulaire du permis exclusif de recherches avec, éventuellement, le recours à un garant selon les dispositions de l’article L. 121-6.
« La concertation permet de débattre des différentes options de réalisation du projet minier et des aménagements nécessaires à l’extérieur du titre minier en examinant leurs effets sur les enjeux environnementaux, économiques et sociaux afin de définir les conditions optimales de réalisation du projet.
« La phase de développement d’un projet d’exploitation est close par le dépôt d’une demande de concession ou une déclaration d’abandon du projet d’exploitation. À défaut, l’abandon du projet est constaté, à l’échéance du permis exclusif de recherches.
« Art. L. 142-2. – La superficie d’un permis exclusif de recherches peut être réduite jusqu’à la moitié de son étendue précédente à l’échéance de la moitié de sa période de validité par l’autorité administrative. Le périmètre subsistant doit englober tous les gîtes reconnus. Il est fixé après que le titulaire a été entendu. »
9° La section 1 du chapitre unique du titre IV du livre II est ainsi rédigée :
« Section 1
« Phase de développement des projets d’exploitation de stockage souterrain
« Art. L. 241-1. – Tout projet d’exploitation de stockage souterrain est soumis à la phase de développement prévue aux articles L. 142-1 et L. 142-2. » ;
II. – Le 1° du I s’applique aux décisions, titres et autorisations pris ou accordés en application du code minier après la date de promulgation de la présente loi ainsi qu’aux demandes de titres ou d’autorisations en cours d’instruction à cette date.
Les dispositions énoncées aux 2° à 9° du I, à l’exception du II de l’article L. 114-3 du code minier, entrent en vigueur à la date d’entrée en vigueur du décret en Conseil d’État pris pour leur application, et au plus tard le 1er janvier 2024.
Elles sont applicables aux demandes d’octroi et d’extension de permis exclusif de recherches et d’octroi, d’extension et de prolongation de concession déposées auprès de l’autorité administrative postérieurement à cette date.
Toutefois, le II de l’article L. 114-3 du code minier entre en vigueur à la date de promulgation de la présente loi et ne s’applique pas aux demandes de prolongation de permis exclusif de recherches en cours d’instruction à cette date.
Les permis exclusifs de recherches en cours de validité à la date d’entrée en vigueur du décret en Conseil d’État mentionné au deuxième alinéa du II peuvent être prolongés à deux reprises, chaque fois, pour une durée de cinq ans au plus dans la limite d’une durée maximale de quinze ans sur le fondement des dispositions des articles L. 124-2-5 et L. 142-1 applicables lors de la délivrance du permis.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Barbara Pompili, ministre. Cet amendement vise à apporter des garanties quant aux mesures transitoires pour les détenteurs de titres. Il tend à donner de la lisibilité aux opérateurs miniers, à conforter la concertation en amont des projets et à consolider la réforme du code minier.
Il vise plus précisément à réformer la procédure de délivrance des permis exclusifs de recherche de gîtes contenant des substances de mines, en instaurant une phase de développement du projet avant la demande d’exploitation, afin de renforcer la concertation avec le territoire. Il tend aussi à instaurer une concertation du public pendant la phase d’instruction du permis exclusif de recherches et à adapter la durée du titre, désormais fixée à dix ans, à l’introduction des deux mesures précitées, ainsi qu’au processus d’évaluation environnementale, économique et sociale, prévu à l’article 20 bis.
Cet amendement a également pour objet d’introduire des dispositions transitoires pour l’application des nouveaux principes régissant le modèle minier français, énoncés à l’article 20 bis A, notamment la mise en place d’une analyse environnementale, économique et sociale.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis. La réécriture intégrale de l’article, à laquelle cet amendement tend à procéder, n’est pas souhaitable, pour plusieurs raisons.
D’une part, le Gouvernement rétablit sa rédaction initiale de l’article 20 bis A, en supprimant les apports de la commission des affaires économiques, lesquels consistent, pour le contentieux, en la prise en compte des documents d’urbanisme et en l’introduction d’une procédure de régularisation, et, pour l’analyse environnementale, en l’association des collectivités territoriales et en l’introduction des principes du contradictoire et de motivation. La commission a également adopté des dispositifs « en dur » issus de l’avant-projet de réforme, qui portent sur le caractère proportionné des procédures et sur l’information préalable des collectivités territoriales.
D’autre part, le Gouvernement introduit des dispositions très substantielles, qui ne sont pas inutiles sur le fond, mais qui n’ont pas été soumises dans leur forme consolidée à l’avis du Conseil national de la transition écologique, avec une concertation conduite par la Commission nationale du débat public et des phases de développement des projets de géothermie ou de stockage.
Surtout, il n’est pas de bon usage, madame la ministre, de soumettre des évolutions aussi importantes à la représentation nationale sans aucun échange préalable, alors que les auditions de la commission sur ce sujet ont débuté au début du mois d’avril dernier.
La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 2125 rectifié, présenté par MM. Patient et Buis, Mme Duranton, M. Hassani, Mme Havet, M. Haye, Mmes Phinera-Horth et Schillinger et M. Théophile, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Compléter cet alinéa par les mots :
mentionnés aux articles L. 162-3 et L. 162-10 du code minier pour les travaux d’ouverture et à la date de la déclaration de l’exploitant de l’arrêt des travaux miniers mentionnés à l’article L. 163-2 du même code pour l’arrêt des travaux
La parole est à Mme Patricia Schillinger.
Mme Patricia Schillinger. Cet amendement a pour objet de garantir une plus grande sécurité juridique des dossiers. Il tend, à ce titre, à distinguer deux situations qui concernent deux étapes différentes du projet minier : l’ouverture des travaux miniers dans le cadre de la recherche ou de l’exploitation et l’arrêt des travaux miniers.
Dans chacune de ces situations, les documents d’urbanisme qui doivent être pris en compte non seulement par l’exploitant, mais également par le juge, ne s’apprécient pas à la même date.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis. Sur l’initiative de la commission des affaires économiques et à l’issue d’échanges avec le Gouvernement a été introduite, dans le cadre du nouveau régime du plein contentieux applicable au code minier, une meilleure articulation entre les travaux miniers et les documents d’urbanisme. Dans la mesure où il faut éviter que l’évolution des seconds ne rende caducs les premiers, cette mesure constituait une sécurisation utile du nouveau régime contentieux.
En revanche, la précision introduite au travers de cet amendement ne semble pas nécessaire ; elle pourrait tout à fait intervenir au niveau réglementaire.
Demande de retrait et, à défaut, avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Patricia Schillinger. Je le retire !
M. le président. L’amendement n° 2125 rectifié est retiré.
L’amendement n° 1695 rectifié, présenté par MM. Jacquin, Michau, Todeschini, Dagbert, J. Bigot, Montaugé et Kanner, Mme Bonnefoy, M. Devinaz, Mme M. Filleul, MM. Gillé et Houllegatte, Mmes Préville, Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Pla, Redon-Sarrazy et Tissot, Mmes Van Heghe, G. Jourda et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 20
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
« L’analyse environnementale, économique et sociale définit le périmètre du cautionnement mentionné à l’article L. 155-1 du code minier.
« Elle identifie les propriétés devant bénéficier de la caution et précise le mode de calcul et le montant de celle-ci. »
La parole est à M. Olivier Jacquin.
M. Olivier Jacquin. Cet amendement traite de la question complexe des cautions. Il vise à insérer deux alinéas ainsi rédigés : « L’analyse environnementale, économique et sociale définit le périmètre du cautionnement mentionné à l’article L. 155-1 du code minier.
« Elle identifie les propriétés devant bénéficier de la caution et précise le mode de calcul et le montant de celle-ci. »
J’attire votre attention, monsieur le rapporteur : le code minier actuel prévoit bien, dans son article L. 155-1, des garanties financières sous forme de cautions, que l’exploitant doit, avant d’engager son exploitation sous des maisons ou des lieux d’habitation, donner aux propriétaires réunis en association, en application de l’article L. 154-1 du code minier, mais cela ne fonctionne pas : dans le département dont je suis élu, l’association SEL’idaire se bat depuis dix ans pour activer ce dispositif. L’affaire est allée jusqu’à la Cour de cassation, qui a reconnu, dans son arrêt du 23 mars 2017, que la garantie des propriétés n’était pas subordonnée à la démonstration d’un risque de dommage. Les textes restent toutefois imprécis et sujets à de larges interprétations, en particulier pour ce qui concerne la définition du périmètre à prendre en compte pour la constitution de la caution et la définition de son montant.
Au travers de cet amendement, nous proposons d’apporter les précisions nécessaires, dès la réalisation de l’analyse environnementale, économique et sociale. Cela permettrait d’informer et de rassurer les propriétaires d’habitation située au-dessus de la future exploitation minière, sur leur droit de bénéficier d’une garantie financière sous la forme d’une caution.
Vous nous l’avez dit, madame la ministre, au XXIe siècle, l’objectif est de rassurer et de rendre les exploitations minières plus tolérables. Cette proposition technique nous permettrait d’avancer en ce sens.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis. L’évolution que vise à introduire cet amendement est doublement satisfaite. D’une part, les garanties financières ont été étendues, à l’article 20, à l’ensemble du projet minier, grâce au travail du rapporteur Pascal Martin, avec l’appui de la commission des affaires économiques. D’autre part, l’analyse environnementale, économique et sociale prévue dans le présent article précédera tout octroi, prolongation ou renouvellement de permis de recherche ou de concession.
La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 421, présenté par Mme Poncet Monge, MM. Dantec, Fernique, Labbé, Salmon et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :
Alinéa 21,
Après le mot :
durable
insérer les mots :
et de l’Office national des forêts, lorsqu’il s’agit du domaine forestier de l’État,
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Au travers de cet amendement, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires souhaite maintenir un contrôle de l’Office national des forêts (ONF) sur les activités minières en Guyane.
L’ONF est, on l’a dit précédemment, une institution qui a, en Guyane, une expertise pointue sur le sujet, depuis des décennies. Il joue le rôle de garant de la gestion et de la conservation du domaine forestier guyanais pour le compte de l’État. Il possède donc une expérience précieuse pour garantir une analyse et un accompagnement éclairé des dossiers. Compte tenu de cela et de la spécificité du territoire français en Guyane, nous pensons que l’ONF apportera un éclairage pertinent à l’octroi de titres miniers.
C’est pourquoi le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires propose que l’ONF soit associé à l’instruction des autorisations d’exploitation.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis. L’amendement tend à prévoir l’émission d’un avis de l’Office national des forêts sur le mémoire ou l’étude de faisabilité accompagnant une demande de travaux miniers, lorsqu’il s’agit du domaine forestier de l’État.
Tout d’abord, la suppression de l’avis conforme actuellement émis par l’ONF en Guyane sur les autorisations d’exploitation n’est prévue par aucune des dispositions relatives au code minier qui sont examinées dans le cadre de ce texte, pas même celui de l’article 21 qui vise pourtant à autoriser le Gouvernement à prendre une habilitation à légiférer par ordonnances pour réformer ledit code.
Le Gouvernement a en revanche lancé une mission d’évaluation des activités de l’ONF qui n’a, pour l’heure, remis aucune préconisation sur cet avis.
Par ailleurs, ma chère collègue, vous ne prévoyez qu’un avis simple et visez le cadre général de l’analyse environnementale, économique et sociale : il y a donc un décalage entre l’objet et le dispositif de votre amendement.
Pour ces raisons, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, j’y serai défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 1833, présenté par M. Gremillet, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Alinéa 23
Remplacer les mots :
ainsi que les
par le signe :
,
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Mon amendement vise à apporter une précision rédactionnelle.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 1834, présenté par M. Gremillet, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 33
Après le mot :
territoriales
insérer les mots :
ou de leurs groupements
II. – Alinéa 34
1° Première phrase
Remplacer les mots :
concernées sont informées
par les mots
ou leurs groupements concernés sont informés
2° Seconde phrase
Remplacer les mots :
Elles sont informées
par les mots :
Ils sont informés
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Sur l’initiative de la commission des affaires économiques, deux principes ont été inscrits « en dur » dans le présent article : le caractère proportionné des modalités d’instruction, d’information, de consultation ou de participation, et l’information préalable des collectivités territoriales du dépôt d’une demande de titre minier sur leur territoire. Il s’agit d’une demande très forte des collectivités.
Mon amendement vise à intégrer à ces dispositifs les groupements de collectivités territoriales, afin d’associer pleinement les acteurs locaux aux projets miniers, ce qui est un gage de leur acceptabilité sociale.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de deux amendements et d’un sous-amendement faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 758, présenté par M. Gay, Mme Varaillas et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 34
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Art. L. 114-3-… – Sans préjudice des dispositions de l’article L. 142-4, pendant la durée de validité d’un permis exclusif de recherches, son titulaire est seul à pouvoir présenter, sans mise en concurrence, une demande de concession portant, à l’intérieur du périmètre du permis exclusif de recherches, sur des substances mentionnées par celui-ci.
La parole est à M. Fabien Gay.
M. Fabien Gay. Cet amendement a pour objet de supprimer le « droit de suite », qui confère au titulaire d’un permis exclusif de recherche le droit automatique à l’octroi de concessions sur le gisement qu’il a découvert, sans que l’autorité compétente puisse s’y opposer.
Nous avions déjà formulé une proposition identique lors de l’examen, en 2017, du projet de loi mettant fin à la recherche ainsi qu’à l’exploitation des hydrocarbures et portant diverses dispositions relatives à l’énergie et à l’environnement. En effet, nous considérons qu’un code minier réformé ne peut entériner l’existence d’un droit automatique à obtenir une concession. L’autorité compétente doit pouvoir refuser l’octroi d’une concession pour sauvegarder les intérêts visés à l’article L. 161-1 du code minier, au premier rang desquels figure la protection d’un environnement équilibré et respectueux de la santé, constitutionnellement garantie.
Toutefois, dans l’hypothèse où le gisement découvert peut être exploité dans le respect des intérêts mentionnés à l’article précité, le titulaire du permis exclusif de recherche doit être le seul à pouvoir présenter, sans mise en concurrence, une demande de titre exclusif d’exploitation.
La nouvelle rédaction de l’article L 132-6 du code minier dérive d’un article du projet de loi portant réforme du code minier et portant habilitation du Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures législatives nécessaires à l’actualisation et à l’adaptation du droit minier, sur lequel le Conseil national de la transition écologique a émis un avis favorable.
M. le président. Le sous-amendement n° 2255, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Amendement n° 758
I. – Alinéa 1
Remplacer le nombre :
34
par le nombre :
35
II. – Après l’alinéa 2
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
3° L’article L. 132-6 est ainsi rédigé :
III. – Alinéa 3
Remplacer la référence :
L. 114-3
par la référence :
L. 132-6
IV. – Compléter cet amendement par un alinéa et un paragraphe ainsi rédigés :
« Les conditions et les modalités d’application du présent article sont fixées par décret en Conseil d’État. »
… – Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Le 3° du I entre en vigueur à la date d’entrée en vigueur du décret en Conseil d’État pris pour son application, et au plus tard le 1er janvier 2024. Il est applicable aux demandes d’octroi de permis exclusif de recherches déposées auprès de l’autorité administrative postérieurement à cette date.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Barbara Pompili, ministre. Monsieur le sénateur, la disposition que vous proposez correspond à l’approche que nous entendions défendre dans notre ordonnance, à savoir que le titulaire d’un permis exclusif de recherche est le seul à pouvoir présenter, sans mise en concurrence, une demande de concession sur le périmètre du permis exclusif de recherche qui lui a été accordé.
Toutefois, il est nécessaire de déplacer ce nouveau dispositif dans la partie du code relative aux concessions, mieux adaptée, c’est-à-dire à l’article L. 132-6 du code minier.
Par ailleurs, il est nécessaire de prévoir des dispositions transitoires pour les permis exclusifs de recherche déjà accordés.
Tel est l’objet de mon sous-amendement qui, s’il était adopté, me permettrait d’émettre un avis favorable sur votre amendement.
M. le président. L’amendement n° 1978 rectifié quater, présenté par MM. Corbisez, Cabanel, Gold, Guérini, Guiol, Requier et Roux, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 35
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
3° L’article L. 132-6 est ainsi rédigé :
« Art L. 132-6. – Sans préjudice des dispositions de l’article L. 142-4, pendant la durée de validité d’un permis exclusif de recherches, son titulaire est seul à pouvoir présenter, sans mise en concurrence, une demande de concession portant, à l’intérieur du périmètre du permis exclusif de recherches, sur des substances mentionnées par celui-ci.
« Les conditions et les modalités d’application du présent article sont fixées par décret en Conseil d’État. »
II. – Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Le 3° du I entre en vigueur à la date d’entrée en vigueur du décret en Conseil d’État pris pour son application, et au plus tard le 1er janvier 2024. Il est applicable aux demandes d’octroi de permis exclusif de recherches déposées auprès de l’autorité administrative postérieurement à cette date.
La parole est à M. Jean-Pierre Corbisez.
M. Jean-Pierre Corbisez. Mon amendement est identique à l’amendement n° 758, tel qu’il serait modifié par le sous-amendement du Gouvernement, que nous ne pouvons donc que soutenir.
M. le président. Si le sous-amendement n° 2255 du Gouvernement est adopté, l’amendement n° 758, ainsi modifié, deviendra en effet identique à l’amendement n° 1978 rectifié quater.
Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis. Les amendements nos 758 et 1978 rectifié quater ont le même objet : faire évoluer le droit de suite. Cette évolution est prévue par l’avant-projet de réforme adopté à l’unanimité par le Conseil national de la transition écologique, à l’automne dernier.
Je me réjouis que le travail réalisé depuis l’examen du texte en commission ait permis d’aboutir à une rédaction satisfaisante, celle de l’amendement n° 758. Le sous-amendement n° 2255 du Gouvernement contribue en outre à renforcer la lisibilité et la sécurité juridique du dispositif.
Dans sa version initiale, le dispositif de l’amendement n° 1978 rectifié quater ne pouvait pas être conservé. En l’état, il faisait référence à une terminologie obsolète du code minier, comme les titres de recherche et les titres d’exploitation, alors que le nouveau code minier s’en rapporte aux permis de recherche et aux concessions.
La commission est favorable au sous-amendement n° 2255, ainsi qu’à l’amendement n° 758, ainsi modifié. Elle est donc également favorable à l’amendement n° 1978 rectifié quater qui, comme l’a dit son auteur, est identique à l’amendement n° 758, tel qu’il serait modifié par le sous-amendement du Gouvernement.
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.
M. Fabien Gay. Madame la ministre, je veux être sûr de bien comprendre : votre sous-amendement réduit-il la portée de notre amendement ? Si j’ai bien compris, la mesure ne s’appliquerait en effet qu’aux nouveaux bénéficiaires. Est-ce bien cela ?
Autre sujet sur lequel je me permets de revenir, madame la ministre, puisque vous l’avez abordé : la Montagne d’or.
L’une des difficultés rencontrées par le Gouvernement est justement que le droit de suite s’appliquait. L’exécutif n’avait donc aucune raison juridique valable de s’opposer à ce projet. D’ailleurs, à Noël dernier, le tribunal administratif de Cayenne vous a enjoint de prolonger la concession. L’État n’était pas représenté lors de ce jugement, mais je crois savoir que vous avez fait appel de cette décision.
Je me pose donc une petite question : comment va-t-on pouvoir s’opposer à des projets miniers, tels que celui de la Montagne d’or, le projet Espérance ou tant d’autres, si nous refusons d’interdire le cyanure et d’encadrer le droit de suite ?
Vous nous avez dit que vous vouliez réformer le code minier et pouvoir vous référer à de nouvelles normes environnementales pour être en mesure de refuser ce type de projets, mais, dans les faits, je le répète, vous rejetez l’interdiction du cyanure et êtes plus ou moins défavorable à l’encadrement du droit de suite.
J’en reviens à notre débat. Si nous maintenons notre amendement dans sa rédaction actuelle, j’ai bien compris qu’il ne serait pas adopté. Par conséquent, nous allons voter votre sous-amendement pour avoir une chance de voir notre dispositif adopté, tout en espérant que, au minimum, la réglementation s’appliquant aux nouveaux bénéficiaires de permis sera plus stricte et que nous réussirons à encadrer le droit de suite pour l’avenir.
M. le président. La parole est à Mme Viviane Artigalas, pour explication de vote.
Mme Viviane Artigalas. Comme mon collègue, je vois bien que le sous-amendement du Gouvernement tend à réduire la portée de l’amendement n° 758. Cela étant, comme l’a dit M. le rapporteur, je comprends aussi la nécessité de sécuriser le système. C’est pourquoi, même si ce n’était pas tout à fait ce que nous aurions voulu, nous voterons également le sous-amendement puis l’amendement ainsi modifié.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Barbara Pompili, ministre. Par ce sous-amendement, le Gouvernement ne réduit pas la portée de votre amendement, monsieur Gay, mais fait en sorte que le droit soit le plus rationnel possible.
Votre amendement, modifié par notre sous-amendement, s’appliquera aux nouveaux permis exclusifs de recherche et non aux anciens, tout simplement parce que les anciens bénéficiaires disposent de droits acquis. On ne peut pas changer les choses en cours de route, car cela créerait une forme d’insécurité juridique. Il est toujours un peu compliqué d’envisager de créer des dispositions rétroactives.
M. Fabien Gay. Et la Montagne d’Or ?
Mme Barbara Pompili, ministre. Monsieur le sénateur, ce projet n’a rien à voir avec notre discussion.
M. Fabien Gay. Ah bon ?
Mme Barbara Pompili, ministre. Vous confondez avec une autre mesure du texte qui permet de refuser un nouveau permis pour des raisons environnementales. Il s’agit d’un tout autre aspect de la réforme du code minier.
M. le président. L’amendement n° 758, ainsi modifié, et l’amendement n° 1978 rectifié quater sont désormais identiques.
Je les mets aux voix.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 20 bis A, modifié.
(L’article 20 bis A est adopté.)
Articles additionnels après l’article 20 bis A
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 1676 rectifié bis, présenté par MM. Jacquin, Dagbert, Todeschini, J. Bigot, Montaugé et Kanner, Mme Bonnefoy, M. Devinaz, Mme M. Filleul, MM. Gillé et Houllegatte, Mmes Préville, Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy et Tissot, Mmes Van Heghe, G. Jourda et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 20 bis A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 151-1 du code minier, il est inséré un article L. 151-… ainsi rédigé :
« Art. L. 151-… – Les collectivités territoriales et leurs groupements territorialement concernés peuvent demander au juge administratif l’annulation de toute décision administrative relative à l’exploration ou à l’exploitation d’une mine. La requête en annulation peut être accompagnée d’une demande de suspension. Le juge administratif fait droit à la demande de suspension si elle comporte un moyen propre à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité de celle-ci. Saisi d’une requête en ce sens, le juge des référés se prononce dans un délai d’un mois. »
La parole est à M. Olivier Jacquin.
M. Olivier Jacquin. Monsieur le président, si vous le permettez, je présenterai en même temps les amendements nos 1676 rectifié bis et 1677 rectifié bis.
M. le président. L’amendement n° 1677 rectifié bis, présenté par MM. Jacquin, Dagbert, Todeschini, J. Bigot, Montaugé et Kanner, Mme Bonnefoy, M. Devinaz, Mme M. Filleul, MM. Gillé et Houllegatte, Mmes Préville, Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy et Tissot, Mmes Van Heghe, G. Jourda et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 20 bis A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 151-1 du code minier, il est inséré un article L. 151-… ainsi rédigé :
« Art. L. 151-… – Les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les faits portant un préjudice direct ou indirect au territoire sur lequel ils exercent leur compétence et constituant une infraction aux dispositions législatives ou réglementaires du code minier. »
Veuillez poursuivre, monsieur Jacquin.
M. Olivier Jacquin. Ces amendements visent à donner la possibilité aux collectivités territoriales et à leurs groupements d’intervenir devant la justice de façon plus efficace.
L’amendement n° 1676 rectifié bis tend à créer un mécanisme de référé suspension dérogatoire.
L’amendement n° 1677 rectifié bis a simplement pour objet de permettre à la collectivité d’agir en tant que partie civile.
Il est important de pouvoir à la fois contester certaines décisions, qui concernent tant l’exploration que l’exploitation minière, et demander réparation des préjudices qui en résultent.
Je vais citer l’exemple de la commune de Rosbruck en Moselle, l’une des communes les plus sinistrées du bassin houiller lorrain. En 2017, après une bataille de onze ans devant des tribunaux pour obtenir une indemnisation à hauteur de 5,9 millions d’euros, soit des deux tiers du préjudice subi, estimé à 8,5 millions d’euros, son maire pensait obtenir une belle victoire, mais la société a fait appel, si bien que le calvaire se poursuit encore aujourd’hui.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis. Tel qu’il est rédigé, l’amendement n° 1676 rectifié bis produirait des effets de bord juridiques considérables.
Les collectivités territoriales ou leurs groupements peuvent déjà saisir le juge administratif dans le cadre du droit commun. Par ailleurs, le projet de loi prévoit tout à la fois la modernisation du contentieux minier et l’association des collectivités territoriales à tous les stades de la procédure.
Pour ce qui concerne l’amendement n° 1677 rectifié bis, le champ de l’article L. 142-4 du code de l’environnement, qui précise que les collectivités territoriales ou leurs groupements peuvent exercer les droits reconnus à la partie civile en cas de préjudice direct ou indirect, n’est pas limité audit code. Il n’y a donc pas lieu de viser spécifiquement les activités minières.
En outre, l’article 20 sexies du présent projet de loi a étendu la responsabilité environnementale aux activités minières. Quant à l’article 21, il prévoit également d’étendre, via une habilitation à légiférer par ordonnances, la définition et la réparation des dommages miniers.
En conséquence, la commission vous demande de bien vouloir retirer vos amendements, mon cher collègue, faute de quoi elle y sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Jacquin, les amendements nos 1676 rectifié bis et 1677 rectifié bis sont-ils maintenus ?
M. Olivier Jacquin. Je les maintiens, parce que vous venez de nous dire, monsieur le rapporteur pour avis, que l’ordonnance précisera le dispositif de réparation des préjudices miniers. Or je préfère le débat public, tel que nous l’avons aujourd’hui, à une ordonnance.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1676 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1677 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 1680 rectifié bis, présenté par MM. Jacquin, Dagbert, Todeschini, J. Bigot, Montaugé et Kanner, Mme Bonnefoy, M. Devinaz, Mme M. Filleul, MM. Gillé et Houllegatte, Mmes Préville, Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy et Tissot, Mmes Van Heghe, G. Jourda et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 20 bis A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 155-1 du code minier, il est inséré un article L. 155-1-… ainsi rédigé :
« Art. L. 155-1-… – Un dommage ou un risque minier se définit au sens du présent code comme le dommage ou le risque ayant pour cause déterminante, directe ou indirecte, l’existence de l’activité minière ou des installations, ouvrages et modifications de l’environnement qui en résultent. »
La parole est à M. Jean-Claude Tissot.
M. Jean-Claude Tissot. Je profite de ma première prise de parole sur cet article pour m’adresser à vous, madame la ministre, et vous faire part de ma satisfaction de débattre sur le code minier. J’ai interrogé les différents ministres de l’écologie qui vous ont précédée, Nicolas Hulot, François de Rugy, Élisabeth Borne : chaque fois, on m’annonçait une réforme du code minier, mais rien n’a été fait.
Force est de constater que l’on risque de se retrouver aujourd’hui avec une « réformette », si j’en juge par les débats sur les premiers amendements. Je pense aux discussions sur le droit de suite, le cyanure ou le projet de la Montagne d’or : j’ai l’impression que vous allez un peu vite lorsqu’il s’agit de proposer des solutions…
J’en viens à mon amendement. Celui-ci vise à définir avec précision les notions de dommage et de risque dans le code minier, afin de permettre une meilleure application du droit minier et de lever certaines incertitudes.
Le phénomène des cuvettes provoquées par les affaissements miniers illustre de manière pertinente la nécessité de cette clarification. Certaines zones sont parfois devenues inondables du fait d’un affaissement minier. Or le risque y reste considéré par les services de l’État comme un risque naturel. Pourtant, sans les travaux miniers, la zone ne serait pas inondable : ces derniers sont la cause déterminante du dommage.
Aussi, une définition précise du dommage minier permettra de clarifier les responsabilités liées à l’exploitation minière. Pour que l’État cesse de jouer la montre avec les victimes de préjudices miniers, il convient aujourd’hui de clarifier la loi.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis. Là encore, l’amendement, s’il était adopté, créerait de graves effets de bord.
Par ailleurs, l’article 21 du présent projet de loi prévoit déjà une habilitation à légiférer par ordonnances pour modifier la notion de dommage minier.
La commission des affaires économiques a, de surcroît, institué deux garde-fous protégeant les collectivités ou les citoyens concernés : d’une part, elle a introduit dans l’habilitation à légiférer par ordonnances l’exigence, pour l’État, de se porter garant de la réparation des dommages en cas de disparition ou de défaillance de l’industriel ; d’autre part, elle a prévu que chacune des ordonnances, dont celle sur le dommage minier, associe les parties prenantes, à commencer par les élus locaux.
Il s’agit de deux dispositions importantes, qui s’appuient sur l’expérience tirée des régions sinistrées que l’on vient d’évoquer. La problématique des dommages miniers, éminemment importante, est lourde et complexe : elle mérite un examen approfondi dans le cadre de l’habilitation.
C’est pourquoi la commission vous demande de bien vouloir retirer votre amendement, mon cher collègue ; à défaut, elle y sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1680 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 20 bis
Le titre Ier du livre Ier du code minier est complété par un chapitre III ainsi rédigé :
« CHAPITRE III
« Politique nationale des ressources et des usages du sous-sol
« Art. L. 113-1. – La politique nationale des ressources et des usages du sous-sol a pour objectif de déterminer, sur la base d’un recensement, élaboré puis mis à jour au moins tous les cinq ans, des substances susceptibles d’être présentes dans le sous-sol, les orientations nationales de gestion et de valorisation des substances mentionnées à l’article L. 100-1 et des usages du sous-sol prévus au présent code pour servir les intérêts économiques, sociaux et environnementaux des territoires et de la Nation. Elle a également pour objectif de fixer des orientations assurant que les approvisionnements en ressources primaires et secondaires en provenance d’un État non membre de l’Union européenne répondent à des exigences sociales et environnementales équivalentes à celles applicables en France.
« Son élaboration prend en compte :
« 1° La stratégie nationale de transition vers l’économie circulaire et le plan de programmation des ressources prévus à l’article 69 de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte ;
« 2° Les objectifs de la politique énergétique nationale fixés aux articles L. 100-1 A et L. 100-4 du code de l’énergie ;
« 3° La programmation pluriannuelle de l’énergie définie aux articles L. 141-1 à L. 141-6 du même code.
« Son élaboration associe notamment des représentants des collectivités territoriales et de leurs groupements, les professionnels des industries extractives, des représentants des associations de protection de l’environnement, les acteurs socio-économiques, notamment les petites et moyennes entreprises ainsi que des membres de la communauté scientifique.
« Le schéma départemental d’orientation minière défini à la section 1 du chapitre Ier du titre II du livre VI du présent code est compatible avec la politique nationale des ressources et des usages du sous-sol.
« Art. L. 113-2. – La politique nationale des ressources et des usages du sous-sol définit une stratégie, formalisée dans un rapport élaboré, puis mis à jour au moins tous les cinq ans, par l’autorité administrative compétente, avec l’assistance des établissements publics et des instituts de recherche compétents.
« Une notice décrivant les techniques envisageables pour la recherche et l’exploitation des substances identifiées ainsi que les impacts, en particulier environnementaux et sanitaires, associés et les moyens de les réduire est annexée au rapport mentionné au premier alinéa.
« Cette notice décrit également les mesures et techniques permettant d’assurer la protection des intérêts mentionnés à l’article L. 161-1.
« Art. L. 113-3. – Le rapport prévu à l’article L. 113-2 est transmis au Parlement et fait l’objet d’une présentation par le ministre chargé des mines devant le Parlement sans vote. Il est mis à la disposition du public par voie dématérialisée.
« Art. L. 113-4 (nouveau). – Les caractéristiques principales des demandes de titres miniers en cours d’instruction, les titres miniers et les autres autorisations minières en cours de validité ainsi qu’une carte présentant leur périmètre sur le territoire national sont mis à la disposition du public sous forme électronique dans un standard ouvert librement réutilisable et exploitable. La mise à disposition de ces informations est réalisée conformément aux dispositions du chapitre IV du titre II du livre Ier du code de l’environnement et actualisée tous les trimestres.
« Art. L. 113-5 (nouveau). – Lorsque la demande relative à un titre minier est déclarée recevable par l’autorité compétente, le représentant de l’État dans le département peut instaurer une commission de suivi de site sur tout ou partie du périmètre du titre.
« Les moyens de la commission et l’appel aux compétences d’experts reconnus sont régis par l’article L. 125-2-1 du code de l’environnement. Cette commission peut être conjointe avec la commission de suivi de site prévue au même article L. 125-2-1 lorsque des installations classées pour la protection de l’environnement sont connexes aux travaux miniers.
« Les conditions d’application du présent article sont fixées par décret en Conseil d’État. »
M. le président. L’amendement n° 937 rectifié, présenté par MM. S. Demilly, Moga et les membres du groupe Union Centriste, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Compléter cet alinéa par les mots :
pour une gestion minière durable
La parole est à M. Jean-Pierre Moga.
M. Jean-Pierre Moga. Mon amendement a pour objet d’inscrire la notion de « mine durable » « dans le dur » de la loi.
L’ensemble de la réforme du code minier vise à garantir la durabilité de l’exploitation des ressources du sol et du sous-sol. Pour contrebalancer les activités minières peu respectueuses des écosystèmes et des milieux naturels, dont les effets sont parfois encore catastrophiques sur le plan environnemental – les débats que nous venons d’avoir l’ont d’ailleurs prouvé, si besoin en était –, cette transition doit s’articuler autour du concept central de mine durable.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. Cet amendement tend à apporter une précision bienvenue sur la dénomination de notre politique nationale des ressources et des usages du sous-sol. C’est pourquoi la commission y est favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Barbara Pompili, ministre. Le Gouvernement est défavorable à l’amendement.
Franchement, monsieur le sénateur, ne trouvez-vous pas, comme moi, que la notion de « mine durable » sonne mal à l’oreille ?
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.
M. Fabien Gay. Pour une fois, je suis d’accord avec Mme la ministre : qu’est-ce que c’est exactement qu’une mine « durable » ? J’ai pourtant bien entendu votre explication, mais je ne la comprends pas. Pouvez-vous nous donner une définition claire ? À défaut, il me semble compliqué de l’inscrire « dans le dur de la loi » !
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires économiques.
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Je comprends tout à fait l’objet de l’amendement de notre collègue Moga : une mine durable s’appuie sur les trois piliers du développement durable, c’est-à-dire une exploitation économique, un bien-être et une attention particulière sur le plan social, et la préservation, tant que faire se peut, de l’environnement.
On a parlé précédemment du cyanure. Je me dis qu’en finançant des investissements qui empêchent les fuites de cyanure dans les eaux, il existe peut-être une manière intéressante économiquement et respectueuse des exigences environnementales d’exploiter ces mines. C’est aussi simple que cela.
Par conséquent, j’apporte mon soutien à M. le rapporteur, qui n’est pourtant pas celui de ma commission. (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Moga, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Moga. Je suis assez surpris que Fabien Gay ne comprenne pas ce qu’est une mine durable. J’ai écouté ses critiques sur l’exploitation de certaines mines d’or : j’ai du mal à comprendre que le terme « durable » ne sonne pas bien à son oreille, comme à celle d’ailleurs de Mme la ministre. Le respect de l’environnement doit être le souci de tous, ainsi que l’a très bien expliqué la présidente de la commission des affaires économiques.
M. le président. L’amendement n° 415, présenté par Mme Poncet Monge, MM. Dantec, Fernique, Labbé, Salmon et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 4
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Cette politique est soumise aux enjeux environnementaux de luttes contre le changement climatique et de protection de la biodiversité. Elle ne peut pas s’effectuer aux dépens des populations les plus vulnérables, y compris des populations autochtones, dont elle tient compte sur la base d’un recensement des populations autochtones présentes sur son territoire, et en respectant leur droit au consentement libre, informé et préalable (CLIP) avant l’approbation de tout projet d’exploitation industriel et la délivrance de tous titres miniers ayant des incidences sur leurs terres ou territoires et autres ressources.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Les territoires français abritent de nombreux peuples autochtones : les Maohis en Polynésie française, les Kanaks en Nouvelle-Calédonie et, en Guyane, les Wayanas, les Lokono, les Tekos, les Kali’nas, et bien d’autres populations, dont je ne me risquerai pas à prononcer le nom. (Sourires.)
Malheureusement, ces peuples et populations autochtones sont parfois les premières victimes des projets industriels qui s’imposent sur leur territoire, ainsi que de l’orpaillage illégal. Les modifications des écosystèmes engendrées par l’exploitation minière peuvent avoir des conséquences graves pour le maintien de leur mode de vie.
Or la déstabilisation des structures sociales autochtones, à travers la destruction de leur espace de vie, aboutit souvent à l’effondrement de ces peuples, qui ne peuvent plus survivre. Il faut donc les protéger.
D’ailleurs, leurs droits fondamentaux sont garantis par le droit international, qui dispose que les projets touchant les territoires des peuples et populations autochtones doivent recueillir préalablement leur consentement libre, informé et préalable.
Mon amendement a donc pour objet d’introduire ces garanties internationales dans la loi, afin que le consentement libre, informé et préalable des populations et peuples autochtones soit pris en compte avant la délivrance de tout titre minier. Il s’agit simplement de respecter les droits humains et de se conformer au droit international.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. Cet amendement me paraît satisfait à deux titres.
D’abord, la réforme du code minier permettra de soutenir la relocalisation d’activités industrielles sur notre sol et, donc, contribuera à la maîtrise globale de notre empreinte nationale de dioxyde de carbone.
Ensuite, l’article L. 161-1 du code minier, qui est modifié par l’article 20 du présent projet de loi, prévoit notamment que les travaux de recherches ou d’exploitation minières respectent les contraintes et les obligations nécessaires à la préservation des caractéristiques essentielles du milieu environnant terrestre ou maritime et, plus généralement, à la protection des espaces naturels et des paysages de la faune et de la flore. Il renvoie également au code de l’environnement.
Par ailleurs, les procédures préalables à l’exploitation minière permettent d’assurer un équilibre entre l’information des populations, la protection de l’environnement et le développement économique, notamment avec la procédure d’enquête publique et les concertations préalables.
Enfin, je l’évoquais à l’instant, les commissions de suivi de sites permettront de garantir une bonne association du public durant la phase d’exploitation et, ensuite, lors de la phase d’arrêt des travaux.
Je vous demande donc, ma chère collègue, de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, j’y serai défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je suis désolée, mais il ne s’agit pas du tout de cela.
En droit international, la notion de consentement libre, informé et préalable des populations est bien différente de ce que vous venez d’exposer, monsieur le rapporteur. Les normes de droit international sont trop rarement transposées en droit interne : elles devraient pourtant constituer une source de droit s’imposant à nos règles nationales.
Tout ce dont vous avez parlé ne recoupe en rien la notion de consentement libre, informé et préalable des populations autochtones. Cette exigence est vraiment liée à la spécificité des peuples qui vivent sur ces territoires. Vous avez notamment parlé d’une consultation des populations, au sens classique du terme : j’évoque un droit tout à fait particulier, qu’il est important d’inclure dans la loi.
Les mines se situent en Guyane ; je ne vous parle pas des peuples autochtones de Paris ! Dès lors que ces mines se situent dans les outre-mer, il convient d’intégrer cette règle de droit international dans notre droit. J’y insiste beaucoup, mon amendement n’est en aucune façon satisfait !
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.
M. Fabien Gay. Je veux simplement dire à M. le rapporteur que cet amendement n’est pas du tout satisfait.
Comme la France refuse toujours de signer la Convention 169 de l’Organisation internationale du travail (OIT) relative aux peuples indigènes et tribaux, qui reconnaît notamment les droits fonciers des peuples autochtones, il est même très loin d’être satisfait, y compris par la réforme du code minier que nous sommes en train d’adopter.
Puisque Mme la ministre a pris l’exemple de la Montagne d’or, je précise que je me suis rendu sur place, en Guyane.
M. Fabien Gay. Les peuples autochtones, notamment les Kali’nas qui habitent autour de la mine, étaient résolument opposés à ce projet et l’ensemble des chefs coutumiers y étaient défavorables. Or leur avis n’a pas été pris en compte.
Nous soutiendrons donc l’amendement du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires qui va, à notre avis, dans le bon sens.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 1433 rectifié, présenté par MM. Dagbert, Michau, Jacquin, Todeschini, J. Bigot, Montaugé et Kanner, Mme Bonnefoy, M. Devinaz, Mme M. Filleul, MM. Gillé et Houllegatte, Mmes Préville, Van Heghe, Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Pla, Redon-Sarrazy et Tissot, Mme G. Jourda et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Compléter cet article par douze alinéas ainsi rédigés :
« Chapitre…
« Conseil national des mines
« Art. L. 113-… – Il est instauré un Conseil national des mines qui rassemble les parties prenantes. Sa composition respecte le principe de parité entre les femmes et les hommes. Outre son président et deux vice-présidents, le Conseil national des mines est composé de trois députés, de deux sénateurs et de dix-huit membres nommés par décret pour cinq ans, représentant les différentes parties prenantes aux activités régies par le présent code. Le mandat des membres est renouvelable une fois. En cas d’égalité des voix, celle du président est prépondérante.
« Les fonctions de membre du Conseil national des mines ne donnent pas lieu à rémunération.
« Son fonctionnement et sa composition sont fixés par arrêté du ministre chargé des mines.
« Une commission composée des parlementaires, des représentants des collectivités et des représentants des associations est consultée concernant le fonctionnement et la composition du Conseil national des mines.
« Art. L. 113-… – Le Conseil national des mines est consulté sur :
« 1° L’élaboration de la politique nationale des ressources et des usages du sous-sol ;
« 2° L’ensemble des actes de nature réglementaire émanant du Gouvernement, intéressant le secteur minier ;
« 3° Les mesures de prévention liées aux risques miniers ;
« 4° Le recyclage des métaux.
« Il veille également à l’intégration des parties prenantes lors des consultations publiques et peut, le cas échéant, apporter son expertise dans la conduite de ces consultations. »
La parole est à M. Jean-Claude Tissot.
M. Jean-Claude Tissot. Cet amendement, comme ceux de nos collègues des groupes du RDSE et CRCE, vise à créer, dans le code minier, un conseil national des mines.
Cette disposition avait été adoptée en commission à l’Assemblée nationale, avant d’être supprimée en séance publique, au motif qu’il ne faut pas entraver nos efforts de simplification de l’action publique.
Nous regrettons ce choix d’autant plus que, si nous partageons l’objectif global de simplification, nous constatons également que son application est très variable selon les sujets. Il est donc fâcheux que cet argument ait été mis en avant à l’Assemblée nationale.
Le présent amendement vise à revenir sur cette décision. Le conseil devrait être consulté sur l’élaboration de la politique nationale des ressources et des usages du sous-sol, l’ensemble des actes de nature réglementaire intéressant le secteur minier, les mesures de prévention liées aux risques miniers et le recyclage des métaux.
À la différence des amendements nos 208 rectifié et 554 rectifié, notre amendement tend à associer les parlementaires, collectivités et associations à l’élaboration de l’arrêté ministériel fixant le fonctionnement et la composition du conseil national des mines.
Nous réaffirmons, au travers de cet amendement, que la création d’un tel conseil a toute son utilité, notamment au regard du manque de concertation et d’association des diverses parties prenantes dans le secteur des activités minières. Il répond à une véritable attente des élus locaux et des populations.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 208 rectifié est présenté par Mmes Apourceau-Poly et Gréaume, M. Gay et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 554 rectifié est présenté par MM. Corbisez et Bilhac, Mme N. Delattre, MM. Gold, Guiol, Requier, Roux et Cabanel, Mme M. Carrère, M. Guérini et Mme Guillotin.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Compléter cet article par onze alinéas ainsi rédigés :
« Chapitre…
« Conseil national des mines
« Art. L. … – Il est instauré un Conseil national des mines qui rassemble les parties prenantes. Sa composition respecte le principe de parité entre les femmes et les hommes. Outre son président et deux vice-présidents, le Conseil national des mines est composé de trois députés, de deux sénateurs et de dix-huit membres nommés par décret pour cinq ans, représentant les différentes parties prenantes aux activités régies par le présent code. Le mandat des membres est renouvelable une fois. En cas d’égalité des voix, celle du président est prépondérante.
« Les fonctions de membre du Conseil national des mines ne donnent pas lieu à rémunération.
« Son fonctionnement et sa composition sont fixés par arrêté du ministre chargé des mines.
« Art. L. … – Le Conseil national des mines est consulté sur :
« 1° L’élaboration de la politique nationale des ressources et des usages du sous-sol ;
« 2° L’ensemble des actes de nature réglementaire émanant du Gouvernement, intéressant le secteur minier ;
« 3° Les mesures de prévention liées aux risques miniers ;
« 4° Le recyclage des métaux.
« Il veille également à l’intégration des parties prenantes lors des consultations publiques et peut, le cas échéant, apporter son expertise dans la conduite de ces consultations. »
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour présenter l’amendement n° 208 rectifié.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Nous sommes en train d’aborder la question minière et ses conséquences particulièrement visibles dans les anciens bassins houillers. Je sais que vous les connaissez, madame la ministre, puisque vous avez vous-même rappelé que vous étiez née à Liévin.
Dès lors, il est bien dommage que vous connaissiez aussi bien cette problématique et que vous n’écoutiez pas ce que l’on vous dit.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Alors que les acteurs locaux lancent l’alerte depuis longtemps, et de façon encore plus insistante ces dernières années, vous ne semblez pas les avoir entendus : où est cette réforme du code minier pourtant si nécessaire ?
Mme Cathy Apourceau-Poly. Vous allez me dire que l’article 21 prévoit d’apporter toutes les réponses aux questions que l’on se pose, madame la ministre, sauf que vous prévoyez de légiférer par ordonnances.
Je suis engagée et élue du bassin minier du Pas-de-Calais. À ce titre, je rencontre les maires, les associations, les citoyens d’un territoire cohérent par son histoire et par son lien avec les mines. Comme vous le savez, nous tirons une fierté de cet héritage, celui des « gueules noires », ces hommes, ces femmes, ces enfants qui ont donné leur vie pour la prospérité nationale, ceux-là mêmes qui ont été réprimés en 1948 après avoir – faut-il le rappeler ? – gagné la bataille du charbon (Mmes Esther Benbassa et Raymonde Poncet Monge acquiescent.), ceux-là mêmes qui ne travaillent plus à la mine, mais dont les maisons et les vies restent intimement liées à celle-ci.
Vous êtes au courant des affaissements miniers, des risques d’inondation et des pollutions, madame la ministre. Vous savez donc ce que représente l’absence d’une réforme du code minier pour tous les habitants du Nord-Pas-de-Calais et de l’Est, qui se retrouvent seuls face à un État qui joue la montre pour ne pas indemniser ces biens, ces vies fissurées par l’impunité des anciens exploitants.
Nous vous proposons donc de rétablir, à l’article 20 bis, le conseil des mines, tel qu’il avait été proposé par la commission spéciale chargée de cette partie du texte. Il est indispensable d’entendre la voix des parties prenantes sur les questions minières passées et à venir. À défaut de pouvoir rattraper les fautes commises, madame la ministre, essayons d’en tirer les leçons !
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Corbisez, pour présenter l’amendement n° 554 rectifié.
M. Jean-Pierre Corbisez. Tout d’abord, je veux réagir aux propos de Mme la ministre, qui s’est interrogée sur ce qu’était une « mine durable ».
Pour ma part, je vois bien ce dont il s’agit : il existe en Belgique et en Pologne des mines de sel que l’on peut visiter. Après leur exploitation industrielle, ces mines sont utilisées pour attirer les touristes et contribuent à la création d’une activité économique.
La présidente de la commission nous a dit qu’une mine durable, c’était d’abord une activité industrielle ; j’y suis personnellement favorable. Elle a ajouté qu’il fallait maintenant essayer de protéger l’environnement ; j’y suis très favorable. Elle a aussi parlé de santé et je défie quiconque connaît la grande nomenclature française des professions et catégories socioprofessionnelles d’y trouver le métier de mineur de fond, tout simplement parce qu’il n’existe plus !
Le métier de mineur de fond était le plus dangereux au monde, notamment en raison des poussières que ces personnes respiraient. C’est pourquoi je comprends tout à fait que l’on puisse douter, du point de vue de la santé, de l’existence d’une « mine durable ».
J’en reviens à mon amendement. Il est important de mettre en place un conseil national des mines. C’est un peu comme le fameux médiateur dont on a parlé précédemment, quand on a abordé la question des moulins, dont le rôle consisterait à tenter de trouver un consensus entre industriels, collectivités et associations environnementales : le conseil des mines serait chargé de faciliter les négociations en interne entre industriels, associations, élus locaux et parlementaires, afin d’éviter les mauvais procès.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. J’avais déjà émis un avis défavorable sur ces trois amendements en commission.
La filière minière est représentée au sein du Conseil national de l’industrie (CNI). La commission a réécrit les dispositions relatives aux commissions de suivi de site, qui sont compétentes sur tout ou partie du périmètre d’un titre minier, dès lors que la demande relative à un tel titre a été déclarée recevable, afin de garantir l’information et une association large des publics concernés par l’exploitation minière.
Ces commissions associent des représentants de l’État, des élus et des riverains, ainsi que les exploitants et les salariés des installations. Par ailleurs, mon collègue rapporteur pour avis Daniel Gremillet et moi-même avons introduit, au sein de l’article 20 bis, un alinéa 9, qui, d’une part, précise les modalités d’élaboration de la politique nationale des ressources et des usages du sous-sol et, d’autre part, garantit l’association à ce processus des collectivités, des professionnels de l’industrie, des représentants d’associations de protection de l’environnement, des acteurs représentatifs du monde économique et de la société civile, ainsi que des membres de la communauté scientifique.
Ces deux ajouts permettent de satisfaire l’objectif, que je partage, d’une politique minière définie et pilotée en concertation avec les acteurs principalement concernés.
J’ajoute que la loi du 7 décembre 2020 d’accélération et de simplification de l’action publique (ASAP) a conduit à la suppression d’un certain nombre de comités, de conseils et de commissions dont l’utilité n’était pas avérée. À mon sens, il faut maintenir cette logique de simplification. Or la création d’un conseil national des mines ne me semble pas nécessaire à ce jour ou, en tout cas, paraît prématurée.
En conséquence, la commission demande le retrait de l’amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Barbara Pompili, ministre. Madame la sénatrice Apourceau-Poly, ce que je constate, c’est que cela fait des années que l’on attend la réforme du code minier. Dès ma nomination, il y a un an, j’ai essayé de trouver des solutions pour faire bouger les choses et, maintenant, cette réforme se fait, elle est là !
Franchement, que cette réforme soit réalisée par ordonnances ou non, les élus que j’ai rencontrés s’en moquent ! Ce qu’ils veulent, c’est disposer enfin des instruments juridiques pour pouvoir avancer sur leurs sujets. Bien entendu, en tant qu’ancienne parlementaire, je préfère que la plus grande partie de cette réforme passe par les hémicycles de nos chambres, car cela permet d’avoir de vrais débats ; c’est d’ailleurs pourquoi les parties les plus structurantes de cette réforme sont inscrites « dans le dur » de la loi et font l’objet de débats. Pour le reste, des ordonnances suffisent ; débattre du nettoyage légistique n’est pas d’un grand intérêt pour les chambres, qui ont, je pense, des choses plus intéressantes à faire…
En ce qui concerne la mise en place d’un conseil national des mines, il est bien évidemment nécessaire d’organiser un débat entre les différentes parties prenantes sur la politique minière et de l’usage des ressources du sous-sol, qui est d’une importance primordiale, tant pour assurer l’approvisionnement stratégique de la France en métaux que pour contribuer à la transition écologique et énergétique.
Cela dit, je ne vois pas ce que la création d’un tel conseil apporterait en la matière. Il existe déjà de nombreux comités et instances de débat – le Conseil national de la transition écologique (CNTE), le Conseil économique, social et environnemental (CESE), le Comité pour les métaux stratégiques (Comes) – et créer un nouveau conseil ne servira à rien d’autre qu’à alourdir les procédures, dans un sens contraire à la politique de simplification voulue et engagée par le Gouvernement.
Par conséquent, j’émets un avis défavorable sur ces amendements.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 208 rectifié et 554 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Corbisez, pour explication de vote sur l’article.
M. Jean-Pierre Corbisez. Malgré le rejet de ces amendements, je voterai en faveur de l’article 20 bis.
Je tiens tout de même à vous alerter sur un point. La visite des travaux du projet de canal Seine-Nord Europe que j’ai effectuée dans le Pas-de-Calais, à l’occasion d’une mission d’information, m’a donné à voir que plus on prépare le terrain en amont, via un comité stratégique réunissant les élus locaux, les populations et les associations environnementales, moins il y a de problèmes qui surgissent au moment de la construction.
En Bretagne et dans le Massif central, on commence à réfléchir à l’implantation de mines afin d’extraire des terres rares pour la réalisation des fameux semi-conducteurs. Or c’est en Bretagne qu’il y a eu une ZAD, une zone à défendre, contre un projet d’aéroport, qui avait défrayé la chronique ; d’ailleurs, heureusement qu’un parlementaire – Ronan Dantec, pour ne pas le nommer – était sur place pour calmer le jeu, car la situation aurait pu dégénérer davantage ! (M. Didier Mandelli s’exclame.)
Ainsi, plus on fera en sorte, grâce à un organisme dédié, de préparer très en amont le terrain à de futures industries minières, mieux on se portera sur le terrain !
M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour explication de vote sur l’article.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Madame la ministre, vous dites avoir lancé la réforme du code minier lorsque vous êtes entrée en fonction il y a un an, mais cette réforme va se faire par ordonnances…
À quoi sert donc le Parlement si, dès lors que l’on est confronté à un problème ou qu’il faut réformer quelque chose, les élus ne peuvent pas discuter et donner leur avis ? Dès que le gouvernement auquel vous appartenez peut légiférer par ordonnances, il le fait ! Cela pose un véritable problème de démocratie ! Le Parlement, en définitive, ne sert plus à rien…
Nous ne sommes pas à six mois près : vous auriez pu prendre le temps de venir dans le département du Pas-de-Calais, que vous aimez tant, rencontrer non seulement les élus miniers, les maires et les présidents de conseil départemental – car ils ont des choses à dire –, mais aussi les citoyens. C’est cela, la démocratie ! La démocratie ne consiste pas à légiférer par ordonnances chaque fois qu’il y a une décision à prendre, comme vous le faites de plus en plus.
M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote sur l’article.
M. Olivier Jacquin. Je tiens à apporter une précision. M. le rapporteur nous dit qu’un conseil national des mines ne serait pas utile, car il existe déjà le CNI, mais ce dernier s’occupe de tout ! Or la question des mines est tout à fait spécifique au sein des différentes missions de ce conseil.
Quant à vous, madame la ministre, vous dites vouloir simplifier et vous demandez à quoi cette instance servirait ; eh bien, l’élaboration de la politique nationale des ressources et des usages du sous-sol, l’ensemble des actes de nature réglementaire émanant du Gouvernement, les mesures de prévention liée aux risques miniers ou encore le recyclage des métaux : voilà des éléments clairs et précis !
Voilà plus de cinq ans que, sur l’ancien bassin houiller lorrain, le comité interdépartemental de l’après-mine ne s’est pas réuni. J’ai écrit plusieurs fois au préfet de région à ce sujet, mais je n’ai jamais reçu de réponse… Vous cherchez tellement à simplifier que les choses ne fonctionnent plus ! Si vous en êtes d’accord, je vous adresserai un courrier à ce sujet, madame la ministre… (Mme la ministre opine.)
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote sur l’article.
M. Pascal Savoldelli. Je souhaite soutenir la réponse, modérée et de proximité, de ma collègue Cathy Apourceau-Poly.
On ne cesse de répéter que cette réforme du code minier est très attendue depuis longtemps, mais ce n’est pas un argument ! Tous, ici, nous avons notre histoire politique et nous assumons nos erreurs et nos retards, mais dire, madame la ministre, qu’aucune réforme n’a pu être lancée plus tôt, alors que l’on était secrétaire d’État à la biodiversité de 2016 à 2017, n’est pas acceptable ! (Mme Cathy Apourceau-Poly applaudit.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 20 bis, modifié.
(L’article 20 bis est adopté.)
Article 20 ter
Le code minier est ainsi modifié :
1° L’article L. 511-1 est ainsi modifié :
a) Après le mot : « État », la fin du premier alinéa est supprimée ;
b) (Supprimé)
2° La section 2 du chapitre Ier du titre II du livre VI est complétée par un article L. 621-8-4 ainsi rédigé :
« Art. L. 621-8-4. – Outre les personnes mentionnées à l’article L. 511-1, sont habilités à constater les infractions aux dispositions législatives du présent code ainsi qu’aux dispositions prévues par les textes pris pour leur application, sur tout le territoire de la Guyane, les inspecteurs de l’environnement commissionnés et assermentés mentionnés à l’article L. 172-1 du code de l’environnement, après habilitation expresse par le procureur de la République de Cayenne.
« Sont également habilités à constater les infractions prévues au I bis de l’article L. 512-1 et à l’article L. 512-2 du présent code, sur tout le territoire de la Guyane, dans le cadre exclusif de la lutte contre l’orpaillage illégal, les agents commissionnés et assermentés de l’Office national des forêts en application de l’article L. 161-4 du code forestier et les agents commissionnés et assermentés des réserves naturelles nationales en application du I de l’article L. 332-2 du code de l’environnement, après habilitation expresse par le procureur de la République de Cayenne.
« Le dernier alinéa de l’article L. 511-1 du présent code est applicable. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 1308 est présenté par Mme Poncet Monge, MM. Dantec, Fernique, Labbé, Salmon et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
L’amendement n° 2090 est présenté par M. Rambaud, Mme Havet, MM. Marchand et Lévrier et Mme Schillinger.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 7
Supprimer les mots :
à constater les infractions prévues au I bis de l’article L. 512-1 et à l’article L. 512-2 du présent code,
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 1308.
Mme Raymonde Poncet Monge. Le présent amendement a pour objet de supprimer la restriction des infractions que les agents de l’Office national des forêts (ONF) et des réserves naturelles nationales peuvent constater, qui se limitent aux infractions prévues au I bis de l’article L. 512-1 et à l’article L. 512-2 du code minier.
Ces infractions consistant majoritairement en l’activité d’orpaillage illégal, cette approche nous paraît trop restrictive : de nombreuses autres infractions mentionnées à la suite du code minier pourraient également être constatées par les agents de l’ONF, notamment celles qui sont afférentes à la détention de substances illégales permettant l’exploitation minière, prévues à l’article L. 512-5 de ce code.
Il nous semble qu’il y a peu de sens à restreindre les pouvoirs des agents de l’ONF, compte tenu du nombre d’infractions prévues par le code minier, de l’étendue des forêts concernées en Guyane et de l’expertise de l’ONF, eu égard à la gestion et au maintien de ces forêts.
C’est pourquoi nous proposons que l’ONF puisse constater l’ensemble des infractions prévues dans le code minier, et non seulement celles qui sont listées à l’alinéa 7.
M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour présenter l’amendement n° 2090.
Mme Patricia Schillinger. Il est proposé, au travers de cet amendement, d’élargir les compétences des agents de l’ONF et des réserves naturelles nationales.
S’il est permis à ces agents de constater certaines infractions prévues dans le code minier actuel, l’approche du champ des infractions est trop restrictive, notamment en ce qui concerne la recherche illégale de substances minières.
C’est pourquoi le présent amendement vise à supprimer la référence à des articles du code minier.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis. La commission des affaires économiques a souhaité préciser les infractions pouvant être recherchées ; il s’agit non pas d’une restriction mais d’une sécurisation.
Je rappelle que le dispositif initial ne comprenait aucune référence à quelque infraction que ce soit. Les infractions mentionnées correspondent à celles qui figurent dans tous les autres articles du projet de loi relatifs à la lutte contre l’orpaillage illégal.
Cette mention a d’ailleurs été introduite en lien avec les personnes entendues au Sénat, mais aussi avec le Gouvernement. Le champ des infractions est très large puisque sont concernés le fait d’exploiter une mine ou encore la détention ou le transport d’une substance concessible, de mercure ou de certains outils.
La commission demande donc le retrait de ces amendements, faute de quoi elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Barbara Pompili, ministre. Le Gouvernement émet un avis favorable. (Ah ! sur les travées du groupe CRCE.)
M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.
M. Ronan Dantec. Aujourd’hui, la lutte contre l’orpaillage illégal en Guyane représente un enjeu majeur : cette activité d’extraction expose les populations à des problèmes de santé publique et engendre d’énormes coûts environnementaux.
Près de 600 gendarmes et militaires sont aujourd’hui déployés en Guyane pour combattre l’orpaillage illégal. Face à ce fléau, il est nécessaire que la totalité de l’appareil d’État soit mobilisée. À partir du moment où le Gouvernement lui-même estime que nos propositions permettront de renforcer la lutte contre cette activité illégale, je pense que l’on devrait pouvoir trouver un consensus, car le Gouvernement sait cela mieux que quiconque !
M. le président. La parole est à Mme Viviane Artigalas, pour explication de vote.
Mme Viviane Artigalas. Je voterai ces amendements, mais je tenais à appeler votre attention sur le fait que l’ONF souffre d’une mauvaise gestion et voit ses effectifs diminuer, ce qui place ses agents en difficulté.
Ainsi, si l’on veut attribuer à ces agents des missions supplémentaires ou leur permettre de conserver leurs missions – ils sont très compétents –, encore faudrait-il, madame la ministre, travailler à une meilleure gestion de l’ONF et augmenter ses effectifs.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 1308 et 2090.
(Les amendements sont adoptés.) – (Marques de satisfaction sur les travées du groupe CRCE.)
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt heures, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de M. Roger Karoutchi.)
PRÉSIDENCE DE M. Roger Karoutchi
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
Article 20 quater
(Non modifié)
Le code minier est ainsi modifié :
1° A À l’article L. 121-4, après la référence : « 4° », sont insérés les mots : « du I de » ;
1° L’article L. 512-1 est ainsi modifié :
a) Le I est ainsi modifié :
– au premier alinéa, les mots : « d’une peine d’emprisonnement de deux ans et d’une amende de 30 000 euros » sont remplacés par les mots : « de deux ans d’emprisonnement et de 100 000 euros d’amende » ;
– les 1°, 11° et 12° sont abrogés ;
– il est ajouté un 13° ainsi rédigé :
« 13° De méconnaître les dispositions de l’article L. 111-13. » ;
b) Le I bis est ainsi rédigé :
« I bis. – Est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 100 000 euros d’amende le fait :
« 1° D’exploiter une mine ou de disposer d’une substance concessible sans détenir un titre d’exploitation ou une autorisation prévus, respectivement, aux articles L. 131-1 et L. 131-2 ;
« 2° De détenir du mercure ou tout ou partie d’un concasseur ou d’un corps de pompe, depuis plus d’un mois, sans détenir le récépissé de déclaration prévu à l’article L. 621-13 ;
« 3° De transporter du mercure ou tout ou partie d’un concasseur ou d’un corps de pompe sans détenir la copie du récépissé de déclaration prévue à l’article L. 621-14. » ;
2° L’article L. 512-2 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa du I, la référence : « I » est remplacée par la référence : « I bis » et le montant : « 75 000 € » est remplacé par le montant : « 375 000 € » ;
b) Le II est ainsi rédigé :
« II. – La peine mentionnée au premier alinéa du I est portée à :
« 1° Sept ans d’emprisonnement et un million d’euros d’amende lorsque les faits ont eu lieu en tout ou partie dans le périmètre d’un parc ou d’une réserve régi par le titre III du livre III du code de l’environnement ou d’une réserve biologique créée dans une zone identifiée par un document d’aménagement en application des articles L. 212-1 à L. 212-3 du code forestier ;
« 2° Dix ans d’emprisonnement et 4,5 millions d’euros d’amende lorsque l’infraction est commise en bande organisée. » ;
3° Au premier alinéa de l’article L. 615-1, la référence : « I » est remplacée par la référence : « I bis » ;
3° bis L’article L. 615-2 est ainsi modifié :
a) Au début du deuxième alinéa, la référence : « 13° » est remplacée par la référence : « 14° » ;
b) Au début du dernier alinéa, la référence : « 14° » est remplacée par la référence : « 15° » ;
3° ter Au premier alinéa de l’article L. 621-8-1, les références : « 11° et 12° » sont remplacées par les références : « 2° et 3° du I bis » ;
4° Au second alinéa de l’article L. 621-8-3, le montant : « 45 000 € » est remplacé par le montant : « 100 000 € ».
M. le président. L’amendement n° 161, présenté par M. Gay, Mme Varaillas, M. Lahellec et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 8
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
- sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :
« …° De détenir ou de transporter une quantité importante de carburant sur le domaine privé et domaine public fluvial de l’État sur le territoire de la Guyane sans détenir de justificatif de détention et de destination.
« Un décret détermine la quantité seuil et les justificatifs recevables. » ;
La parole est à M. Fabien Gay.
M. Fabien Gay. L’article 20 quater est, pour nous, extrêmement important. Dans le cadre de la lutte contre l’orpaillage illégal en Guyane, cet amendement vise à créer une infraction de détention et de transport non justifié d’une grande quantité de carburant.
En effet, le carburant est le nerf de la guerre. Son transport sur les fleuves frontaliers Oyapock et Maroni ne peut être contrôlé du fait du régime juridique particulier qui y est appliqué. En revanche, les cours d’eau intérieurs, pour la plupart, ne conduisent qu’à très peu de bassins de vie justifiant l’acheminement de carburant en très grande quantité. L’essentiel du carburant qui transite sur ces cours d’eau est destiné à l’orpaillage, parfois légal – auquel cas le transport de carburant est justifié –, mais souvent illégal.
Nous proposons donc de créer une infraction permettant de saisir le carburant avant même que celui-ci ne soit livré à un site d’orpaillage illégal et de poursuivre le détenteur ou le transporteur, dans le but de juguler les trafics qui approvisionnent les exploitants clandestins.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. Cet amendement vise à punir d’une peine de 100 000 euros et de deux ans d’emprisonnement le fait de détenir ou de transporter une quantité importante de carburant, définie par décret.
Ce dispositif permet d’accentuer la lutte contre l’orpaillage illégal en Guyane, dans la mesure où le transport d’une grande quantité de carburant peut être vu comme l’indice d’une activité illégale d’extraction.
La commission émet donc un avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Barbara Pompili, ministre. Votre amendement est satisfait puisque, d’une part, le droit européen et le code des transports fixent les règles pour le transport de matières dangereuses pour les professionnels et pour les particuliers et, d’autre part, l’approvisionnement de l’orpaillage illégal tombe sous le coup de la réglementation visant les particuliers, qui prévoit déjà des seuils précis que le préfet peut réduire en fonction des critères locaux.
En conséquence, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement, qui est satisfait.
M. le président. Monsieur Gay, l’amendement n° 161 est-il maintenu ?
M. Fabien Gay. Oui, je le maintiens, monsieur le président.
Madame la ministre, il ne faut pas plus de cinq minutes en pirogue depuis Saint-Laurent-du-Maroni, en Guyane, pour rejoindre Albina, cette ville du Suriname où se servent tous les orpailleurs clandestins ; j’ai moi-même parcouru ce chemin. Nous devons, pour commencer, intensifier notre relation diplomatique avec le Suriname. Par ailleurs, lorsqu’on les interroge, ceux qui sont supposés faire régner l’ordre nous disent que les choses sont extrêmement complexes : je suis resté cinq ou six jours là-bas et j’ai pu voir, toute la journée, plusieurs dizaines de pirogues transportant une quantité incroyable de carburant, à cinq minutes de la France, tout cela dans le but d’alimenter l’orpaillage illégal.
La sanction que nous proposons de créer donnerait un outil supplémentaire aux forces de l’ordre pour saisir le carburant très rapidement et ainsi empêcher l’alimentation des sites d’orpaillage illégal, car, sans carburant, il devient plus difficile de faire tourner la machine. Cette arme supplémentaire permettrait de lutter plus efficacement contre l’orpaillage illégal.
Je maintiens donc notre amendement et je remercie le rapporteur d’avoir émis un avis favorable.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 161.
(L’amendement est adopté.) – (Bravo ! sur les travées des groupes CRCE et GEST.)
M. le président. L’amendement n° 2138 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 13
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« 4° De contrevenir à l’article L. 621-16. » ;
II. – Alinéas 24 et 25
Remplacer ces alinéas par quatre alinéas ainsi rédigés :
3° ter L’article L. 621-8-1 est ainsi rédigé :
« Art. L. 621-8-1. − Dans les cas prévus aux 2°, 3° et 4° du I bis de l’article L. 512-1 et à l’article L. 621-8-3, le tribunal peut prononcer la confiscation des biens ayant servi à la commission de l’infraction. » ;
4° L’article L. 621-8-3 est ainsi rédigé :
« Art. L. 621-8-3. − Sur les eaux intérieures en Guyane, est puni de trois ans d’emprisonnement et de 100 000 € d’amende le fait, dans le cadre d’une activité d’orpaillage illégal, de charger, décharger ou transborder un bateau, un engin flottant ou un matériel flottant, tels que définis à l’article L. 4000-3 du code des transports. Ces peines sont également applicables lorsque le chargement ou le déchargement sont effectués au moyen d’un véhicule terrestre à moteur. »
La parole est à Mme la ministre.
Mme Barbara Pompili, ministre. Cet amendement tend à réviser certaines sanctions et peines prévues pour l’appui logistique des chantiers d’orpaillage illégal en Guyane. L’amendement vise non seulement à punir de 100 000 euros d’amende et de deux ans d’emprisonnement le fait de transporter du matériel spécifiquement destiné à l’exploitation aurifère sans être en mesure de fournir la référence du permis, de l’autorisation ou du titre minier dans lequel ce matériel est destiné à être utilisé, mais aussi à confisquer le matériel en question.
En outre, l’amendement vise à punir de trois ans d’emprisonnement et de 100 000 euros d’amende le fait, dans le cadre d’une activité d’orpaillage illégal, de charger, de décharger ou de transborder un bateau, un engin flottant, un matériel flottant ou un véhicule terrestre à moteur.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. La commission a émis un avis favorable.
M. le président. L’amendement n° 160, présenté par M. Gay, Mme Varaillas, M. Lahellec et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 15
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…) Le même I est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« …° Soit lorsqu’elle est commise en zone cœur de parc national, dans une réserve naturelle nationale ou régionale, dans une réserve biologique intégrale ou dans une zone couverte par un arrêté préfectoral de protection du biotope. » ;
La parole est à M. Fabien Gay.
M. Fabien Gay. Cet amendement procède de la même veine que les deux précédents.
Dans le cadre de la lutte contre l’orpaillage illégal en Guyane, cet amendement, travaillé en lien avec l’État-major de lutte contre l’orpaillage et la pêche illicites, vise à introduire un nouveau facteur aggravant de la sanction pénale pour l’exploitation de mine sans titre dans les espaces naturels protégés.
En effet, si le code minier prévoit actuellement une aggravation de la peine pour les infractions d’exploitation de mine sans titre, en raison du rejet ou du déversement de substances nocives pour la santé ou à l’environnement, de l’émission de substances constitutives d’une pollution atmosphérique, de la coupe de bois ou de forêts, de la production ou de la détention de déchets dans des conditions de nature à porter atteinte à la santé et à l’environnement, il ne traite pas de la question de l’exploitation de mine sans titre dans les espaces naturels protégés.
Or l’orpaillage illégal touche de plus en plus les zones faisant l’objet de mesures de protection du patrimoine naturel, en particulier le parc amazonien de Guyane ; ainsi, 145 chantiers alluvionnaires, 11 zones de puits, 135 campements et 4 villages d’orpailleurs ont été repérés lors des derniers survols de contrôle ; il ne s’agit que d’une estimation, dans la mesure où il est toujours difficile d’obtenir des chiffres précis sur des activités illégales.
C’est pourquoi nous proposons d’ajouter à la liste des facteurs d’aggravation de la peine encourue en cas d’exploitation de mine illégale, le fait de prospecter sans titre dans un espace naturel protégé, ce qui permettra d’augmenter l’exemplarité de la sanction pénale et de renforcer la cohérence de la lutte contre l’orpaillage illégal avec la politique de protection de l’environnement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. Cet amendement, qui a pour objet d’aggraver la sanction pénale applicable en cas d’exploitation de mine sans titre dans les espaces naturels protégés, est satisfait par l’alinéa 18 de l’article 20 quater, qui prévoit une peine plus élevée que celle qui est prévue aux termes de cet amendement, à savoir sept ans d’emprisonnement et 1 million d’euros d’amende lorsque les faits ont lieu dans le périmètre d’un parc ou d’une réserve protégés.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Gay, l’amendement n° 160 est-il maintenu ?
M. Fabien Gay. Comme on a adopté notre précédent amendement, je retire celui-ci, monsieur le président… (Sourires.)
M. le président. L’amendement n° 160 est retiré.
Je mets aux voix l’article 20 quater, modifié.
(L’article 20 quater est adopté.)
Article 20 quinquies A
(Non modifié)
Après l’article L. 512-3 du code minier, il est inséré un article L. 512-3-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 512-3-1. – Les étrangers coupables de l’une des infractions définies au I bis de l’article L. 512-1 et à l’article L. 512-2 encourent également la peine complémentaire d’interdiction du territoire français, suivant les modalités prévues à l’article 131-30 du code pénal, soit à titre définitif, soit pour une durée de dix ans au plus. »
M. le président. L’amendement n° 416, présenté par Mme Poncet Monge, MM. Dantec, Fernique, Labbé, Salmon et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Cet article, que le présent amendement vise à supprimer, permet aux autorités de délivrer une peine d’interdiction du territoire français aux personnes reconnues coupables d’orpaillage illégal.
Nous avons déposé cet amendement pour plusieurs raisons.
Premièrement, une grande partie du texte renforce considérablement les peines pénales pour lutter contre l’orpaillage illégal.
Deuxièmement, l’effet dissuasif d’une interdiction du territoire français n’est absolument pas prouvé. La frontière guyanaise est d’abord une rivière, puis une jungle, difficile si ce n’est impossible à surveiller. En outre, on s’adresse à des personnes qui, vraisemblablement, traversent les frontières plusieurs fois par jour sans se soucier de savoir si le territoire français leur est interdit ou non.
Troisièmement, cet article va à l’encontre du droit d’asile. Or la région entourant la Guyane n’est pas à l’abri de déstabilisations politiques profondes, comme nous le voyons au Brésil, en Colombie et au Venezuela. Cet article signifie donc qu’un individu reconnu coupable d’orpaillage illégal et dont la situation changerait gravement dans son pays d’origine ne pourrait pas demander l’asile en France parce qu’il serait frappé d’une interdiction du territoire français.
Une telle disposition semble en outre aller à l’encontre du principe de non-refoulement issu de la convention de Genève de 1951 et de toutes les dispositions légales nationales relatives au droit d’asile à la frontière, que la France, au-delà de ce délit, doit respecter.
Toutes ces contradictions juridiques rendent cet article difficilement applicable, voire « illégal ». C’est pourquoi nous vous en proposons la suppression, sans que cela altère et atteigne par ailleurs les dispositions pénales renforcées déjà prévues en amont de ce texte, que nous approuvons.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis. La suppression de l’article n’est pas souhaitable. Les peines complémentaires d’interdiction du territoire ne sont en rien inédites.
Les étrangers coupables d’orpaillage illégal sont sanctionnés non pas par une peine complémentaire, mais par une mesure administrative. Le CNTE a suggéré que d’autres mesures pour lutter contre l’orpaillage illégal soient intégrées au projet de loi, telles que l’aggravation des sanctions pénales. Je rappelle que l’orpaillage illégal est réalisé à 95 % par des chercheurs d’or étrangers.
La commission demande donc le retrait de l’amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 20 quinquies A.
(L’article 20 quinquies A est adopté.)
Article 20 quinquies
La première phrase de l’article L. 621-8 du code minier est ainsi modifiée :
1° Les mots : « l’infraction prévue à l’article L. 615-1 est commise dans les conditions définies au I ou au II de l’article L. 512-2 » sont remplacés par les mots : « une infraction prévue au I bis de l’article L. 512-1, à l’article L. 512-2 ou à l’article L. 621-8-3 du présent code ou à l’article 414-1 du code des douanes est commise » ;
2° Après la seconde occurrence du mot : « vue », sont insérés les mots : « ou la retenue douanière ». – (Adopté.)
Article 20 sexies
I. – L’article L. 162-1 du code de l’environnement est ainsi modifié :
1° Au 1°, après la référence : « L. 165-2 », sont insérés les mots : « ou par les activités régies par le code minier relevant du régime légal des mines ou du régime légal des stockages souterrains et dont la liste est fixée par le même décret » ;
2° Au 2°, après la référence : « L. 161-1 », sont insérés les mots : « du présent code ».
II (nouveau). – Après le 1° de l’article L. 165-2 du code de l’environnement, il est inséré un 1° bis ainsi rédigé :
« 1° bis Fixe la liste des activités relevant du régime légal des mines ou du régime légal des stockages souterrains mentionnées à l’article L. 165-2 ; ».
III (nouveau). – Le présent article est applicable aux dommages intervenus à compter de la date de promulgation de la loi n° … du … portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.
M. le président. L’amendement n° 2268, présenté par M. P. Martin, au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 3
Supprimer cet alinéa.
II. – Alinéa 5
Remplacer la référence :
L. 165-2
par la référence :
L. 162-1
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pascal Martin, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Barbara Pompili, ministre. Monsieur le rapporteur, la suppression que vous proposez au travers du I de votre amendement ne pose pas de difficulté.
En revanche, au travers du II de votre amendement, vous souhaitez sans doute introduire la référence à l’article L. 162-1 du code minier, ce qui conviendrait au Gouvernement, mais, en réalité, votre rédaction renvoie à l’article L. 162-1 du code de l’environnement.
Par conséquent, le Gouvernement a émis un avis défavorable sur cet amendement, qui ne permet pas au dispositif initialement envisagé d’être opérant sur le fond.
M. le président. Monsieur le rapporteur, l’amendement n° 2268 est-il maintenu ?
M. Pascal Martin, rapporteur. Oui, je le maintiens, monsieur le président.
M. le président. Je mets aux voix l’article 20 sexies, modifié.
(L’article 20 sexies est adopté.)
Article additionnel après l’article 20 sexies
M. le président. L’amendement n° 1675 rectifié bis, présenté par MM. Jacquin, Dagbert, Todeschini, J. Bigot, Montaugé et Kanner, Mme Bonnefoy, M. Devinaz, Mme M. Filleul, MM. Gillé et Houllegatte, Mmes Préville, Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy et Tissot, Mmes Van Heghe, G. Jourda et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 20 sexies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 155-3 du code minier est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les activités d’exploration et d’exploitation des mines sont soumises aux dispositions du titre VI du livre Ier du code de l’environnement. »
La parole est à M. Jean-Claude Tissot.
M. Jean-Claude Tissot. De nombreux habitants de bassins miniers ont, malheureusement, vu leurs paysages et leur environnement être largement transformés par les exploitations minières, sans qu’aucun recours soit possible pour obtenir réparation.
Le présent amendement vise à transposer des dispositions du code de l’environnement dans le code minier, afin d’instaurer un mécanisme de prévention et de responsabilité objective pour les activités d’exploration et d’exploitation des mines. Par cette transposition, les dommages causés à l’environnement par les exploitants pourront être plus efficacement jugés et dédommagés.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. Cet amendement est pleinement satisfait par l’article 20 sexies du présent projet de loi, introduit en séance à l’Assemblée nationale. Il intègre les activités régies par le code minier dans le champ de la responsabilité environnementale. La commission l’a validé avec plusieurs précisions.
La commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Tissot, l’amendement n° 1675 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Jean-Claude Tissot. Oui, je le maintiens, monsieur le président.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1675 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 20 septies
I. – Après l’article L. 164-1-1 du code minier, il est inséré un article L. 164-1-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 164-1-2. – Les demandes d’autorisation d’ouverture de travaux de recherches ou d’exploitation sont accompagnées d’un mémoire précisant les mesures mises en œuvre et celles envisagées pour connaître la géologie du sous-sol impacté par les travaux et comprendre les phénomènes naturels, notamment sismiques, susceptibles d’être activés par les travaux, afin de minimiser leur probabilité, leur intensité ainsi que les risques de réapparition de tels phénomènes après leur survenance éventuelle, en vue de protéger les intérêts mentionnés à l’article L. 161-1.
« L’autorité administrative peut demander l’actualisation de ce mémoire et sa transmission. En tout état de cause, le mémoire est actualisé et transmis à l’autorité administrative au plus tard trois ans après le démarrage effectif des travaux et au moment de la déclaration d’arrêt des travaux. »
II (nouveau). – A. – Le présent article est applicable aux demandes d’autorisation d’ouverture de travaux de recherches ou d’exploitation de gîtes géothermiques déposées après la date de promulgation de la loi n° … du … portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.
B. – Par dérogation au A, l’autorité administrative peut demander, dans un délai qu’elle détermine, la production et la transmission du mémoire mentionné au premier alinéa de l’article L. 164-1-2 du code minier aux exploitants ou aux explorateurs de gîtes géothermiques auxquels une autorisation d’ouverture des travaux de recherches ou d’exploitation a été accordée avant la date de promulgation de la loi n° … du … portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, jusqu’à la déclaration d’arrêt de travaux.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 1310 rectifié est présenté par Mme Poncet Monge, MM. Dantec, Fernique, Labbé, Salmon et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
L’amendement n° 1835 est présenté par M. Gremillet, au nom de la commission des affaires économiques.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 5
Remplacer les mots :
la déclaration d’arrêt de travaux
par les mots :
l’arrêt des travaux
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Cet amendement vise à clarifier les délais de transmission à l’autorité administrative de l’étude de faisabilité, au regard du contexte géologique, à l’arrêt effectif des travaux et non seulement à la déclaration de l’arrêt. L’objectif est de garantir une meilleure sécurité lors des travaux de recherche et d’exploitation de géothermie.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour présenter l’amendement n° 1835.
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Le présent amendement a pour objet d’étendre la possibilité, pour l’autorité administrative, de demander aux exploitants d’installations géothermiques existantes la production et l’actualisation d’un mémoire sur le risque de sismicité. Cette faculté serait ainsi autorisée jusqu’à l’arrêt des travaux, dans un souci de prévention des risques.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 1310 rectifié et 1835.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 20 septies, modifié.
(L’article 20 septies est adopté.)
Article 20 octies
L’article L. 171-1 du code minier est ainsi rédigé :
« Art. L. 171-1. – L’État exerce une police des mines, qui a pour objet de contrôler et d’inspecter les activités de recherches et d’exploitation minières ainsi que de prévenir et de faire cesser les dommages et les nuisances qui leur sont imputables, d’assurer la bonne exploitation du gisement et de faire respecter les exigences et les intérêts mentionnés à l’article L. 161-1 et les obligations mentionnées à l’article L. 161-2 et par les textes pris pour leur application. Pour l’exercice de cette police, l’autorité administrative s’appuie sur les inspecteurs de l’environnement bénéficiant des attributions mentionnées au 2° du II de l’article L. 172-1 du code de l’environnement. » – (Adopté.)
Article 20 nonies
(Non modifié)
L’article L. 174-2 du code minier est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsqu’un nouvel explorateur ou exploitant souhaite utiliser des équipements de surveillance et de prévention des risques transférés à l’État au titre des deux premiers alinéas du présent article, il l’indique dans sa demande d’autorisation d’ouverture de travaux de recherches ou d’exploitation. Le transfert de ces équipements n’est autorisé par l’autorité administrative compétente que s’ils permettent la surveillance et la prévention de l’ensemble des risques sur une zone géologiquement cohérente. Le demandeur reprend alors l’intégralité des responsabilités dévolues à l’État par le présent article sur l’ensemble de la zone considérée. » – (Adopté.)
Article 20 decies
La section 2 du chapitre Ier du titre II du livre VI du code minier est complétée par un article L. 621-8-5 ainsi rédigé :
« Art. L. 621-8-5. – I. – Sur réquisitions écrites du procureur de la République, sur le territoire de la Guyane et pour la période de temps que ce magistrat détermine et qui ne peut excéder vingt-quatre heures, renouvelables sur décision expresse et motivée selon la même procédure, les officiers de police judiciaire et, sur l’ordre et sous la responsabilité de ceux-ci, les agents de police judiciaire et les agents de police judiciaire adjoints mentionnés aux 1°, 1° bis et 1° ter de l’article 21 du code de procédure pénale peuvent procéder aux contrôles d’identité prévus au septième alinéa de l’article 78-2 du même code, aux fins de recherche et de poursuite des infractions suivantes :
« 1° Infractions en matière d’exploitation de mine ou de détention de substance concessibles sans titre ou autorisation, mentionnées au 1° du I bis de l’article L. 512-1 et à l’article L. 512-2 du présent code ;
« 2° Infractions en matière de détention ou de transport de mercure, de tout ou partie d’un concasseur ou d’un corps de pompe sans récépissé de déclaration, mentionnées aux 2° et 3° du I bis de l’article L. 512-1 et à l’article L. 512-2 ;
« 3° Infractions en matière d’export, de détention ou de transport d’or natif sans déclaration ou justificatif, mentionnées aux 1° et 2° de l’article 414-1 du code des douanes ;
« 4° Infractions en matière de chargement, de déchargement ou de transbordement d’un bateau, d’un engin flottant ou d’un matériel flottant, dans le cadre d’une activité d’orpaillage illégale, mentionnées à l’article L. 621-8-3 du présent code.
« II. – Dans les mêmes conditions, pour les mêmes lieux et pour les mêmes infractions que celles prévues au I, les officiers de police judiciaire et, sur l’ordre et sous la responsabilité de ceux-ci, les agents de police judiciaire et les agents de police judiciaire adjoints mentionnés aux 1°, 1° bis et 1° ter de l’article 21 du code de procédure pénale peuvent procéder à la visite des véhicules circulant, arrêtés ou en stationnement ainsi que des embarcations navigantes, arrêtées, amarrées ou échouées.
« Les véhicules en circulation ne peuvent être immobilisés que le temps strictement nécessaire au déroulement de la visite, qui doit avoir lieu en présence du conducteur. Lorsqu’elle porte sur un véhicule à l’arrêt ou en stationnement, la visite se déroule en présence du conducteur ou du propriétaire du véhicule ou, à défaut, d’une personne requise à cet effet par l’officier ou l’agent de police judiciaire et qui ne relève pas de son autorité administrative. La présence d’une personne extérieure n’est toutefois pas requise si la visite comporte des risques graves pour la sécurité des personnes et des biens.
« En cas de découverte d’une infraction ou si le conducteur ou le propriétaire du véhicule ou de l’embarcation le demande ainsi que dans le cas où la visite se déroule en leur absence, il est établi un procès-verbal mentionnant le lieu et les dates et heures de début et de fin de ces opérations. Un exemplaire en est remis à l’intéressé et un autre exemplaire est transmis sans délai au procureur de la République. Toutefois, la visite des véhicules spécialement aménagés à usage d’habitation et effectivement utilisés comme résidence ne peut être faite que conformément aux dispositions relatives aux perquisitions et visites domiciliaires.
« III. – Dans les mêmes conditions, pour les mêmes lieux et pour les mêmes infractions que ceux prévus au I, les officiers de police judiciaire et, sur l’ordre et sous la responsabilité de ceux-ci, les agents de police judiciaire et les agents de police judiciaire adjoints mentionnés aux 1°, 1° bis et 1° ter de l’article 21 du code de procédure pénale peuvent procéder à l’inspection visuelle ou à la fouille des bagages ou du contenu des véhicules et des embarcations. Les détenteurs de ces derniers ne peuvent être retenus que le temps strictement nécessaire au déroulement de l’inspection visuelle ou de la fouille. L’inspection visuelle ou la fouille doit avoir lieu en présence du détenteur.
« En cas de découverte d’une infraction ou si le détenteur le demande, il est établi un procès-verbal mentionnant le lieu et les dates et heures de début et de fin de ces opérations. Un exemplaire en est remis à l’intéressé et un autre exemplaire est transmis sans délai au procureur de la République.
« IV. – Dans les mêmes conditions et pour les mêmes infractions que celles prévues au I, les officiers de police judiciaire et, sur l’ordre et sous la responsabilité de ceux-ci, les agents de police judiciaire et les agents de police judiciaire adjoints mentionnés aux 1°, 1° bis et 1° ter de l’article 21 du code de procédure pénale peuvent accéder à bord et procéder à une visite des navires présents en mer territoriale, se dirigeant ou ayant déclaré leur intention de se diriger vers un port ou vers les eaux intérieures ou présents en amont de la limite transversale de la mer, ainsi que des bateaux, engins flottants, établissements flottants et matériels flottants se trouvant dans la mer territoriale ou en amont de la limite transversale de la mer ainsi que sur les lacs et plans d’eau.
« La visite se déroule en présence du capitaine ou de son représentant. Est considérée comme le capitaine la personne qui exerce, de droit ou de fait, le commandement, la conduite ou la garde du navire, du bateau, de l’engin flottant, de l’établissement flottant ou du matériel flottant lors de la visite.
« La visite comprend l’inspection des extérieurs ainsi que des cales, des soutes et des locaux.
« La visite des locaux spécialement aménagés à usage d’habitation et effectivement utilisés comme résidence ne peut être faite que conformément aux dispositions relatives aux perquisitions et visites domiciliaires.
« Le navire, le bateau, l’engin flottant, l’établissement flottant ou le matériel flottant ne peut être immobilisé que le temps strictement nécessaire au déroulement de la visite, dans la limite de douze heures.
« L’officier de police judiciaire responsable de la visite rend compte du déroulement des opérations au procureur de la République et l’informe sans délai de toute infraction constatée.
« V. – Le fait que les opérations mentionnées aux I à IV révèlent des infractions autres que celles visées dans les réquisitions du procureur de la République ne constitue pas une cause de nullité des procédures incidentes. »
M. le président. L’amendement n° 2139, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 4
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« …°Infractions en matière de transport de matériel spécifiquement destiné l’exploitation aurifère mentionnées au I bis de l’article L. 512-1 ;
II. – Alinéa 6
Remplacer les mots :
d’un engin flottant ou d’un matériel flottant
par les mots :
d’un engin flottant, d’un matériel flottant ou d’un véhicule terrestre
La parole est à Mme la ministre.
Mme Barbara Pompili, ministre. Il s’agit d’un amendement de coordination avec l’amendement gouvernemental n° 2138 rectifié adopté à l’article 20 quater. Il s’agit d’instaurer une nouvelle sanction pénale pour le fait de transporter du matériel spécifiquement destiné à l’exploitation aurifère sans être en mesure de fournir la référence du permis, de l’autorisation ou du titre minier dans lequel ce matériel est destiné à être utilisé.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis. L’évolution proposée permet d’instituer une nouvelle infraction, dans le cadre des pouvoirs de contrôle, de vérification ou de relevé d’identité confiés aux officiers de police judiciaire.
Cette infraction pénaliserait davantage le transport fluvial non autorisé de matériel utilisé pour l’exploitation aurifère et concourrait à conforter le volet du texte lié à la répression de l’orpaillage illégal en Guyane.
La commission émet donc un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l’article 20 decies, modifié.
(L’article 20 decies est adopté.)
Article additionnel après l’article 20 decies
M. le président. L’amendement n° 2137 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 20 decies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La section 4 du chapitre premier du titre II du livre VI du code minier est complétée par un article L. 621-16 ainsi rédigé :
« Art. L. 621-16. - Sans préjudice de l’article L. 621-14, en amont hydrographique de toute zone habitée, le transporteur fluvial de tout matériel pouvant être utilisé dans le cadre d’une exploitation aurifère dont la liste est définie par décret doit être en mesure de fournir la référence du permis, de l’autorisation ou du titre minier dans lequel ce matériel est destiné à être utilisé ou de la déclaration prévue à l’article L. 621-13 s’il n’a pas vocation à être utilisé à des fins d’orpaillage.
« Le premier alinéa est applicable sur tout le périmètre défini à l’article L. 621-12 pour le transport de matériel spécifique à l’exploitation aurifère. »
La parole est à Mme la ministre.
Mme Barbara Pompili, ministre. Il s’agit, là encore, d’un amendement de coordination avec les amendements adoptés précédemment. Il vise à prévoir que tout transporteur de matériel destiné à l’exploitation aurifère doit pouvoir fournir la référence du permis de l’autorisation du titre minier dans lequel ce matériel est destiné à être utilisé.
Une liste spécifique du matériel aurifère visé sera définie par décret, afin de bien encadrer les conditions d’application de cette nouvelle obligation.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis. Cet amendement tend à définir la nouvelle infraction prévue par le code minier, permettant de réprimer le transport fluvial non autorisé de matériel utilisé pour l’exploitation aurifère.
S’agissant d’une évolution plutôt positive, la commission a émis un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 20 decies.
Article 20 undecies
Le chapitre Ier du titre II du livre VI du code minier est complété par une section 5 ainsi rédigée :
« Section 5
« Substances soumises à un régime particulier
« Art. L. 621-15. – En Guyane, les explorateurs et les exploitants de mines d’or tiennent à jour un registre destiné à enregistrer la production et les transferts, y compris à l’intérieur d’un site minier ou entre plusieurs sites miniers, d’or sous toutes ses formes.
« Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’application du présent article. » – (Adopté.)
Articles additionnels après l’article 20 undecies
M. le président. L’amendement n° 414 rectifié, présenté par Mme Poncet Monge, MM. Dantec, Fernique, Labbé, Salmon et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :
Après l’article 20 undecies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au plus tard six mois après la promulgation de la présente loi, un moratoire sur l’exploitation minière industrielle aurifère est instauré en Guyane et dans tous les territoires et départements d’outre-mer.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Partout dans le monde, l’extraction de l’or se révèle destructrice pour l’environnement. Une mine d’or est d’abord une usine chimique au milieu de la nature, en raison notamment de l’usage de composants extrêmement toxiques comme le mercure, voire, de nos jours, le cyanure.
Quelque 182 000 tonnes de cyanure sont utilisées dans les mines d’or à travers le monde et sont parfois déversées volontairement dans les océans, quand ce ne sont pas les cuves qui débordent en pleine forêt amazonienne, comme ce fut le cas de nombreuses fois.
L’extraction aurifère industrielle nécessite, par ailleurs, des quantités astronomiques d’eau. En moyenne, 140 000 litres d’eau par heure sont nécessaires, ce qui correspond à la consommation d’eau annuelle d’un foyer de trois personnes en Allemagne. À cela s’ajoute l’abattage d’arbres géants dans les forêts vierges : des pelleteuses creusent la terre, laissant derrière elles des paysages lunaires. En outre, 1 000 kilogrammes de déchets toxiques et de déblais sont produits pour obtenir seulement 0,24 gramme d’or. Ainsi, la production d’une seule bague en or engendre, à elle seule, 20 tonnes de déchets hautement toxiques.
En Guyane, les projets de recherches se multiplient, au détriment de la protection de la biodiversité exceptionnelle de ce territoire, et sans que la rentabilité des projets – je ne parle pas de rentabilité privée – soit toujours au rendez-vous.
S’il s’était réalisé, le projet de la Montagne d’or aurait englouti 420 millions d’euros de subvention publique, pour seulement douze ans d’exploitation, laissant derrière lui un territoire déboisé et pollué pour plusieurs décennies. À lui seul, il aurait représenté une augmentation d’environ 50 % de l’ensemble des émissions de gaz à effet de serre de la Guyane.
Au total, plus de 300 000 hectares de forêt guyanaise sont aujourd’hui menacés par l’exploration minière industrielle. Nos territoires et départements d’outre-mer sont des espaces abritant une biodiversité unique. Nous ne pouvons les sacrifier au nom de projets hasardeux et en vue de l’exploitation d’un métal qui, comme l’a dit notre collègue Fabien Gay, se recycle parfaitement et dont nous ne manquons pas.
Cet amendement vise donc à proposer un moratoire sur l’exploitation minière industrielle aurifère en Guyane, en vue d’entamer les mesures nécessaires à son interdiction sur le territoire français, comme le réclamait la Convention citoyenne pour le climat.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis. Ce moratoire sur l’exploitation aurifère industrielle en Guyane et dans les collectivités ultramarines n’est pas souhaitable. Si cela a effectivement fait l’objet d’une demande de la Convention citoyenne pour le climat, cette recommandation a été émise avant l’abandon, par le Gouvernement, du projet de la Montagne d’or.
Permettez-moi, en outre, de rappeler plusieurs éléments. Tout d’abord, l’exploitation légale de l’or en Guyane représente une production de 1 tonne d’or par an, contre 10 tonnes produites par l’exploitation illégale ; c’est dire le différentiel de production entre l’une et l’autre. Ensuite, le projet de loi apporte des modifications importantes pour minimiser l’impact de l’exploitation industrielle aurifère, en particulier en Guyane. Enfin, au cours des auditions que j’ai pu réaliser, aucun élu local guyanais n’a émis le souhait d’interdire toute exploitation aurifère.
Je veux ajouter, pour conclure, que viser l’ensemble des collectivités ultramarines dans le cadre de ce moratoire serait peu adapté, car seule la Guyane dispose de gisements aurifères.
La commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Barbara Pompili, ministre. Madame la sénatrice, votre amendement vise à instaurer un moratoire sur l’exploitation aurifère en Guyane et dans les départements d’outre-mer.
La Guyane est un département singulier en matière d’exploitation minière, en raison de la richesse des gisements aurifères qui y sont présents et de l’activité structurante qui en découle. La filière aurifère est ainsi le deuxième secteur industriel du département, après l’aérospatiale, et représente 40 TPE et 5 PME, pour environ 600 emplois directs.
C’est pourquoi le Gouvernement a lancé une mission d’inspection afin d’étudier l’avenir de cette filière et de déterminer les engagements volontaires qui permettraient d’en faire une filière pleinement responsable sur le plan environnemental.
Je souhaite que cette mission d’inspection puisse faire son travail, que l’on puisse examiner ce qu’il est possible de faire. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.
M. Fabien Gay. M. le rapporteur et Mme la ministre affirment tous deux que le projet de la Montagne d’or est abandonné.
D’après ce que j’en sais, madame la ministre – c’est peut-être le bon moment pour que vous nous en disiez un mot –, ce projet n’est pas abandonné ; j’ai eu un échange, sinon chaleureux, du moins franc, à ce sujet, avec Pierre Paris, président de la compagnie Montagne d’or. En outre, les personnes qui sont sur place et avec lesquelles je communique me précisent que les bureaux de la compagnie n’ont toujours pas fermé, qu’ils sont toujours actifs.
Le jour de Noël dernier, le tribunal administratif de Cayenne a obligé le Gouvernement à prolonger le bail de la compagnie ; certes, vous avez fait appel, mais on est loin de l’abandon. Pour l’instant, il y a un contentieux et une volonté politique affichée de ne pas mener le projet, mais ne disons pas que le projet est « abandonné » ; on en est bien loin !
Enfin, permettez-moi de rappeler qu’une quarantaine de projets miniers utiliseraient la cyanuration, dont le projet Espérance et tant d’autres, qui menacent la forêt amazonienne.
Il serait donc opportun que vous nous disiez un mot, ce soir, madame la ministre, de ce qui va arriver du projet Montagne d’or, afin que nous ayons les idées claires.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Barbara Pompili, ministre. Monsieur le sénateur, que les choses soient bien claires : avec l’ancienne rédaction du code minier, un projet comme la Montagne d’or pouvait être mis en œuvre. C’est d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles nous sommes, aujourd’hui, en train de travailler à une nouvelle version de ce code : il faut que, à l’avenir, grâce à de nouveaux outils juridiques, ce type de projet ne puisse plus être mis en œuvre.
Or, vous le savez, puisque vous êtes un législateur, la loi n’est pas rétroactive. Aussi, l’industriel peut engager des contentieux, puisqu’il a l’ancien droit de son côté. Nous avons tout mis en œuvre, notamment par la rédaction de ce nouveau code minier, pour expliquer l’intention du Gouvernement et dire clairement que nous refuserons désormais ce genre de projet.
Oui, un contentieux est en cours, ce n’est pas surprenant, mais nous l’assumons car nous sommes contre ce projet, nous ne souhaitons pas qu’il voie le jour et nous mettons tout en œuvre dans ce sens.
M. le président. Mes chers collègues, je donne la parole à qui la demande, mais je vous rappelle tout de même qu’il reste 1 254 amendements à examiner, que nous ne siégerons que jusqu’à 18 heures demain et que, à la demande générale des groupes, nous ne siégerons pas lundi prochain.
En outre, la semaine prochaine, nous devrons examiner, en sus de ce texte, le projet de loi bioéthique ainsi que débattre de la loi de programmation militaire. Ce n’est pas moi qui présiderai samedi et dimanche de la semaine prochaine, je n’ai donc pas d’état d’âme à prolonger les débats, mais chacun doit savoir ce qu’il fait. (Marques d’approbation sur les travées du groupe Les Républicains. – Protestations sur les travées du groupe CRCE.)
La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.
M. Ronan Dantec. Monsieur le président, il me semble que nous avons bien travaillé, aujourd’hui ; nous ne sommes pas loin du rythme d’examen requis pour terminer vendredi en huit. (Non ! sur les travées du groupe Les Républicains.)
Le chiffre indiqué par le rapporteur est important. L’orpaillage légal représente une tonne d’or par an, soit, sur le marché, 50 millions d’euros. Si l’on enlève les gains des intermédiaires, la recette s’élève à 25, 30 ou peut-être 35 millions d’euros, en contrepartie d’atteintes majeures à l’environnement. Est-ce raisonnable ? C’est à cette question, madame la ministre, que nous vous demandons de répondre aujourd’hui.
À l’échelle même de la Guyane, l’exploitation aurifère légale ne représente pas une très grosse activité économique, tout en occasionnant des dégâts énormes que la puissance publique doit réparer, notamment du point de vue de la santé publique.
La question est donc, en se fondant sur des chiffres rationnels de flux économiques : tout cela est-il justifié ? D’après vos propos, l’idée n’est pas d’augmenter la production d’or en Guyane, donc, vu les sommes en jeu, il reviendrait probablement moins cher à la puissance publique d’y mettre un terme. Cela permettrait en outre de lutter plus facilement contre l’orpaillage clandestin.
M. le président. L’amendement n° 1115 rectifié, présenté par Mme Benbassa, MM. Dantec, Fernique, Labbé, Salmon et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :
Après l’article 20 undecies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport sur l’impact économique, sanitaire et environnemental de l’orpaillage en Guyane française, précisant, notamment, la définition et le cadre légal qu’il entend apporter à l’exploitation minière industrielle ainsi que la distinction qu’il entend faire, dans la législation minière, entre orpaillage industriel et orpaillage artisanal. Ce rapport fera précisément état des conséquences sanitaires de l’orpaillage sur les peuples de l’intérieur de la Guyane (populations autochtones amérindiennes et bushinenguées) ; des produits chimiques qu’il convient de mieux encadrer voire de proscrire dans la législation minière, afin de mieux protéger l’environnement et les populations environnantes de ces exploitations et des standards environnementaux clairs qu’il entend mettre en place au moment de l’octroi d’un permis exclusif de recherches ou d’une concession minière, autant que des moyens dévolus à leur respect.
La parole est à Mme Esther Benbassa.
Mme Esther Benbassa. Nous venons d’avoir une réponse : le projet Montagne d’or a été, provisoirement ou non, arrêté. Toutefois, si ce projet continue, il conduira à un désastre environnemental, comme le souligne l’association France Nature Environnement.
Il reste évident – mes collègues l’ont indiqué – que l’orpaillage, particulièrement non régulé, entraîne de nombreuses conséquences négatives pour l’environnement et pour l’être humain, c’est-à-dire pour les sociétés locales.
En effet, l’exploitation aurifère industrielle a recours au cyanure et à la soude caustique, au travers d’un procédé extrêmement nocif pour l’environnement. L’extraction d’une tonne d’or nécessite 150 tonnes de cyanure en moyenne ; en outre, il est parfois fait utilisation du mercure. Cyanure et mercure contaminent les sols et les nappes phréatiques à jamais.
Par ailleurs, les populations autochtones vivant au bord des fleuves, particulièrement exposées à ces produits toxiques, en subissent directement les conséquences. Ainsi, selon l’Institut de veille sanitaire, la concentration moyenne de mercure détectée dans les cheveux de la population amérindienne du Haut-Maroni était passée, de 1997 à 2005, de 10,6 à 12,2 microgrammes par gramme de cheveu, le seuil tolérable fixé par l’OMS étant de 10 microgrammes.
Il revient donc au Gouvernement de rendre au Parlement un rapport sur l’impact économique, sanitaire et environnemental de l’orpaillage en Guyane française, afin de mettre en place une politique plus respectueuse de l’environnement et de mettre en lumière les conséquences sanitaires que subissent les populations concernées, notamment à des fins d’indemnisation, pour ce qui constitue, à tout le moins, une imprudence de la part de la puissance publique et, au pire, un crime d’écocide.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis. Cet amendement a pour objet de demander un rapport. Or, par principe, la commission des affaires économiques n’est pas favorable aux demandes de rapport. (Mme Éliane Assassi proteste.)
Par ailleurs, les sujets soulevés ont vocation à être débattus dans le cadre de la préparation de l’habilitation à légiférer par ordonnances, à laquelle notre commission a souhaité associer l’ensemble des parties prenantes, dont, au premier chef, les associations d’élus locaux et les associations de protection de l’environnement.
La commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Barbara Pompili, ministre. Madame la sénatrice, la concentration de mercure dans les cheveux ou dans les organismes des populations amérindienne ou bushinenguée dont vous parlez est la conséquence de l’orpaillage illégal, puisque l’usage du mercure est interdit, en France, pour l’orpaillage légal.
Or votre amendement, tel qu’il est rédigé, a pour objet, me semble-t-il, de demander un rapport sur les conséquences de l’orpaillage non pas illégal mais légal. (Mme Esther Benbassa proteste.) Or ce sujet sera traité dans le cadre des travaux de la mission d’inspection que j’ai évoquée précédemment.
C’est la raison pour laquelle le Gouvernement a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1115 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 20 duodecies (nouveau)
Le code minier est ainsi modifié :
1° La section 3 du chapitre Ier du titre Ier du livre Ier est complétée par un article L. 111-12-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 111-12-1. – Cinq ans avant la fin de sa concession et dans des conditions prévues par décret en Conseil d’État, l’exploitant remet à l’autorité administrative un dossier présentant le potentiel de reconversion de ses installations ou de leur site d’implantation pour d’autres usages du sous-sol, notamment la géothermie, ou pour d’autres activités économiques, en particulier l’implantation d’énergies renouvelables. » ;
2° L’article L. 132-12-1 est abrogé. – (Adopté.)
Article 20 terdecies (nouveau)
I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le V de l’article 1519 est complété par une phrase ainsi rédigée : « La fraction du produit de la redevance communale des mines répartie entre les communes où se trouvent domiciliés les ouvriers ou employés occupés à l’exploitation des mines et aux industries annexes ne peut excéder 40 %. » ;
2° Au 2° du II de l’article 1599 quinquies B, le pourcentage : « 2 % » est remplacé par le pourcentage : « 4 % ».
II. – La perte éventuelle de recettes résultant pour les communes du I du présent article est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
III. – La perte éventuelle de recettes résultant pour l’État du II est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, sur l’article.
M. Olivier Jacquin. Madame la ministre, je vais aller dans votre sens, puisque vous proposez, au travers de votre amendement n° 2191, de supprimer cet article, issu d’un ajout de la commission.
J’ai un gros souci concernant les communes, très peu nombreuses, de mon département qui bénéficient de la redevance des mines. Il s’agit d’une redevance obsolète, qu’il conviendrait de réformer et qui concerne quelques dizaines de communes en France : quelques-unes sont situées en Guyane, pour l’or, et les autres sont éparses, dans le pays, pour les hydrocarbures. Dans mon département, la plupart des communes concernées le sont au titre de l’exploitation du sel, dans le « bassin du sel ».
À cet égard, dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances pour 2019, nous avons adopté, à l’unanimité, un amendement, ayant recueilli un avis de sagesse du ministre des finances, visant à réformer cette redevance.
Pourquoi ce prélèvement est-il obsolète ? Il se compose de trois parts. Les deux premières concernent les communes hébergeant un site d’exploitation ou bénéficiant d’un tonnage de sel. La troisième part, qui fait l’objet de cet article, est liée à la domiciliation, dans la commune, de mineurs de fond : une commune dans laquelle sont domiciliés dix mineurs touche la redevance ; si elle en compte moins de dix, elle ne la touche pas.
Or la mécanisation a fait qu’il n’y a presque plus de mineurs de fond. On se retrouve donc dans une situation assez incroyable dans laquelle certaines communes fortement concernées par l’exploitation minière et par ses contraintes – je pense notamment aux affaissements – ne touchent plus la redevance des mines.
C’est la raison pour laquelle, lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2019, tout le monde, ici, était convenu de la nécessité de réformer cette redevance des mines. J’ai donc été étonné de voir que, en commission, le rapporteur proposait de faire passer cette troisième part de 55 % du total de la redevance à 40 %, pérennisant ainsi, en quelque sorte, le système de la redevance des mines, en changeant légèrement les proportions. Cela a pour effet de conforter le dispositif alors qu’un travail s’était engagé avec le Gouvernement pour le réformer profondément, autour d’une idée intéressante : faire en sorte que la troisième tranche bénéficie aux communes touchées par l’exploitation minière, c’est-à-dire dans lesquelles ont lieu des prélèvements directs de sel.
Je voulais attirer votre attention à tous sur ce sujet.
M. le président. L’amendement n° 2191, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Barbara Pompili, ministre. Je rejoins les propos du sénateur Jacquin. Le présent amendement vise à supprimer l’article 20 terdecies, qui modifie certains aspects de la fiscalité minière.
La fiscalité minière française repose actuellement sur trois redevances au profit des collectivités locales : la redevance communale des mines, dont parlait M. Jacquin, la redevance départementale des mines et la taxe spéciale sur l’or, applicable en Guyane.
Le Gouvernement est convaincu qu’il convient de faire évoluer cette fiscalité, afin que celle-ci puisse être mieux répartie au profit des communes concernées par les activités minières.
Ce qui a été adopté en commission n’a pas fait l’objet d’une concertation avec les communes concernées. Les sommes en jeu ne sont pas énormes, mais elles peuvent représenter des retombées importantes pour certaines communes. On ne peut faire cette modification sans un minimum de concertation avec les collectivités.
Aussi, je propose de supprimer l’article et d’étudier une réforme plus complète de la fiscalité minière lors de l’examen du prochain projet de loi de finances. Le travail de concertation a déjà commencé ; je propose qu’il soit poursuivi.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis. L’amendement n° 2191 tend à supprimer l’article introduit par la commission des affaires économiques.
Je suis surpris, madame la ministre, car nous avons mené de nombreuses auditions, notamment des collectivités. Je puis vous assurer que le travail de la commission économique du Sénat reflète l’attente des collectivités sur le terrain.
Nous devons donc légiférer sur ce point et rapidement. Il ne faudrait pas que la reconquête de notre souveraineté minière ne bénéficie pas, faute d’une fiscalité inadaptée, aux collectivités territoriales.
La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 1358 rectifié, présenté par MM. Jacquin et Todeschini, Mme G. Jourda, M. Pla, Mme Conway-Mouret et MM. Michau, Antiste, Tissot et Cozic, est ainsi libellé :
Alinéas 2 et 4
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Olivier Jacquin.
M. Olivier Jacquin. Je serai rapide ; j’ai exprimé ma position lors de ma prise de parole sur article.
Monsieur le rapporteur, vous affirmez avoir entendu en audition les associations de collectivités. Pourtant, la principale association concernée, l’Association des communes du bassin salifère, n’a pas été consultée.
Effectivement, il s’agit de petites sommes à l’échelle nationale, mais on va créer des dégâts importants et pénaliser fortement certaines collectivités.
Je suis très étonné de votre position, monsieur le rapporteur, d’autant que vous connaissez le secteur, puisque vous avez été vice-président et rapporteur général du budget de la région Grand Est. Vous laissez faire, dans mon département, quelque chose qui créera du tort, alors que le Gouvernement, Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances, et moi-même avions engagé un travail intéressant pour concevoir une fiscalité ayant du sens.
M. le président. L’amendement n° 1836, présenté par M. Gremillet, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer le mot :
La
par les mots :
Pour les substances minérales autres que les hydrocarbures liquides et gazeux, la
La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour le présenter et pour donner l’avis de la commission des affaires économiques sur l’amendement n° 1358 rectifié.
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Mon cher collègue Jacquin, j’ai également entendu en audition les organisations minières et un président issu de ce bassin salifère, mais je n’entrerai pas plus avant dans ce débat, qui n’est pas l’objet de notre discussion.
Le présent amendement a pour objet de préciser que le rééquilibrage du produit de la redevance communale des mines concerne les substances minérales et non les hydrocarbures liquides ou gazeux, dont l’extraction est en voie d’extinction sur le territoire national d’ici à 2040, en application de la loi du 30 décembre 2017 sur les hydrocarbures.
Quant à l’amendement n° 1358 rectifié, qui tend à supprimer les dispositions relatives à la répartition de la redevance communale des mines, la commission en demande le retrait ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Barbara Pompili, ministre. En cohérence avec ce que j’ai indiqué à l’instant, le Gouvernement a émis un avis favorable sur l’amendement n° 1358 rectifié et un avis défavorable sur l’amendement n° 1836.
M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.
M. Olivier Jacquin. Je souhaite simplement dire que le président de l’Association des communes du bassin salifère est M. Yannick Fagot ; j’ai ici la confirmation qu’il n’a pas été consulté, ce que je regrette vraiment.
M. le président. Je mets aux voix l’article 20 terdecies, modifié.
(L’article 20 terdecies est adopté.)
Exception d’irrecevabilité
M. le président. Je suis saisi, par M. Gremillet, au nom de la commission des affaires économiques, d’une motion n° 2254.
Cette motion est ainsi rédigée :
Constatant que les amendements nos 1212, 1359 rectifié, 1697 rectifié et 1698 rectifié visent à rétablir une habilitation à légiférer par ordonnances ou à en étendre le champ et qu’ils sont donc contraires au premier alinéa de l’article 38 de la Constitution, le Sénat les déclare irrecevables en application de l’article 44 bis, alinéa 10, de son règlement.
En application du dernier alinéa de l’article 44 bis, alinéa 10, du règlement, ont seuls droit à la parole l’auteur de la demande d’irrecevabilité, un orateur d’opinion contraire, la commission saisie au fond – chacun disposant de deux minutes et demie –, ainsi que le Gouvernement.
Aucune explication de vote n’est admise.
La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour la motion.
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Dans la mesure où ces amendements visent à étendre le champ de l’habilitation de l’article 21 du projet de loi, j’invite le Sénat à les déclarer irrecevables en adoptant cette motion.
M. le président. Je mets aux voix la motion n° 2254, tendant à opposer l’exception d’irrecevabilité.
(La motion est adoptée.)
M. le président. En conséquence, les amendements nos 1212, 1359 rectifié, 1697 rectifié et 1698 rectifié sont déclarés irrecevables.
Article 21
I. – Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnances, dans un délai de douze mois à compter de la promulgation de la présente loi, toute mesure relevant du domaine de la loi afin :
1° De transformer les fondements juridiques et les objectifs du modèle minier français ;
2° D’améliorer la prise en compte des enjeux environnementaux liés aux activités minières à tous les stades et de rénover la participation du public et des collectivités territoriales en :
a) Révisant les conditions d’octroi, de prolongation ou de refus des demandes de titres miniers, de recherches ou d’exploitation, afin, notamment, de pouvoir refuser une demande de titre en cas de doute sérieux sur la possibilité de conduire l’exploration ou l’exploitation du gisement sans porter une atteinte grave aux intérêts protégés au titre de la réglementation minière ;
b) Renforçant les modalités d’information et de participation des collectivités territoriales et, dans le respect du principe de proportionnalité, du public aux différentes étapes de la procédure, de l’instruction des demandes en matière minière à la fin de l’exploitation ;
c) Adaptant aux activités de géothermie la réalisation d’une analyse environnementale, économique et sociale préalablement à la prise des décisions relatives aux demandes de titres miniers ;
d) Prévoyant la possibilité d’assortir les décisions sur les demandes de titres miniers de prescriptions environnementales, économiques et sociales ;
e) (Supprimé)
f) Faisant relever, avec les adaptations nécessaires, l’autorisation d’ouverture de travaux miniers du régime de l’autorisation environnementale prévue au même code ;
g) Révisant l’objet, les modalités et les sanctions de la police des mines afin, notamment, de rendre applicables aux travaux miniers soumis à autorisation environnementale les sanctions administratives prévues au même code et en précisant les obligations incombant aux exploitants ;
h et i) (Supprimés)
j) Modifiant et simplifiant les procédures de retrait d’un titre minier afin, notamment, de prévenir les situations dans lesquelles le responsable d’un site minier est inconnu, a disparu ou est défaillant ;
k) (Supprimé)
3° De moderniser le droit minier en :
a) Révisant la terminologie des titres et autorisations miniers ainsi que les modalités d’instruction des demandes ;
b) Clarifiant les cas et les modalités de mise en concurrence des demandeurs relevant du régime légal des mines, sans mettre en cause la dispense reconnue à l’inventeur d’un gisement déclaré avant l’expiration de son titre ;
c) Adaptant le régime juridique applicable à la géothermie, notamment en ce qui concerne son articulation avec le stockage d’énergie et les exigences en matière d’études exploratoires, dans le respect des dispositions applicables aux gîtes géothermiques issues de l’ordonnance n° 2019-784 du 24 juillet 2019 modifiant les dispositions du code minier relatives à l’octroi et à la prolongation des titres d’exploration et d’exploitation des gîtes géothermiques ;
d) Précisant les régimes légaux des stockages souterrains et des mines afin, notamment, de définir les modalités de leur extension à d’autres substances, comme l’hydrogène, ou de faciliter l’octroi de titres miniers pour la reconversion de sites d’extraction en sites de stockage, dans le respect des dispositions applicables aux stockages d’énergie calorifique introduites par l’article 45 de la loi n° 2020-1525 du 7 décembre 2020 d’accélération et de simplification de l’action publique ;
e) Révisant les régimes juridiques applicables aux autorisations et aux permis d’exploitation ainsi qu’aux procédures d’arrêt des travaux dans les collectivités d’outre-mer, notamment en ce qui concerne les projets miniers de petite taille, et en révisant l’encadrement juridique des projets miniers comportant l’utilisation du domaine public ou privé de l’État. Ces révisions ont notamment pour objectif de réduire les délais d’instruction sans réduire le niveau de protection de l’environnement ;
f) (Supprimé)
g) Modifiant les modalités de passage des substances de carrières dans la catégorie des substances de mines ;
h) Abrogeant la redevance tréfoncière lorsqu’elle est perçue par l’État ;
i) (Supprimé)
4° D’adopter des mesures destinées à mieux encadrer l’activité minière en matière d’or, en :
a) Révisant les dispositions relatives au schéma départemental d’orientation minière de Guyane, pour prévoir notamment son élaboration conjointe par le président de la collectivité territoriale de Guyane et le représentant de l’État dans le département, et en renforçant l’association des communautés d’habitants aux décisions sur les demandes de titres ou d’autorisations miniers en Guyane ;
b) Révisant les obligations auxquelles sont tenus les opérateurs en matière de traçabilité de l’or ainsi qu’en matière de traçabilité de l’étain, du tungstène et du tantale ;
c) (Supprimé)
d) Prenant toutes dispositions de nature à faciliter la réhabilitation des sites ayant été le siège d’activités illégales d’orpaillage ;
5° De clarifier les dispositions du code minier en :
a) Révisant et harmonisant les modalités de prorogation des droits miniers ;
b) Précisant les effets attachés au droit d’inventeur ;
c) Permettant la fusion des titres miniers d’exploitation de mines ;
d) Modifiant l’autorité compétente pour l’octroi et la prolongation des titres d’exploitation ou pour leur rejet explicite ;
e) Complétant la définition des substances connexes et permettant l’extension des titres miniers à ces substances ;
f) Précisant le cadre juridique s’appliquant à la recherche et à l’exploitation des granulats marins dans les fonds marins du domaine public, notamment pour garantir un haut niveau de protection des écosystèmes marins et en assurer une meilleure connaissance scientifique ;
g) (Supprimé)
h) Abrogeant l’article L. 144-4 du code minier relatif aux concessions anciennement à durée illimitée ;
6° De prendre les dispositions relatives à l’outre-mer permettant :
a) L’extension de l’application, l’adaptation et la coordination, sous réserve de la compétence de la loi organique, des dispositions issues des ordonnances prises sur le fondement de la présente loi ou de toute autre disposition législative relevant de la compétence de l’État en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises, sous réserve, en ce qui concerne le district de Terre Adélie, de la mise en œuvre du protocole, relatif à la protection de l’environnement dans l’Antarctique signé à Madrid le 4 octobre 1991, au traité sur l’Antarctique conclu à Washington le 1er décembre 1959 ;
b) L’adaptation et la coordination de ces mêmes dispositions pour leur application en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion, à Mayotte, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon ;
7° De permettre l’application des dispositions issues des ordonnances prises sur le fondement de la présente habilitation aux demandes, initiales et concurrentes, présentées avant leur publication ;
7° bis De préciser et renforcer le dispositif d’indemnisation et de réparation des dommages miniers, notamment en définissant la notion de dommage causé par les activités régies par le code minier, en conservant la possibilité pour l’explorateur ou l’exploitant minier de s’exonérer de sa responsabilité en cas de cause étrangère et l’obligation pour l’État de se porter garant de la réparation des dommages causés par l’activité minière en cas de disparition ou de défaillance du responsable ;
8° De prendre les mesures de mise en cohérence, de coordination, de réorganisation, notamment de renumérotation, et de correction des erreurs matérielles nécessaires au sein des codes concernés par la présente habilitation.
II. – Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de chacune des ordonnances prévues au I.
III (nouveau). – Les associations d’élus locaux, les représentants des professionnels et des personnels du secteur minier ainsi que les associations de protection de l’environnement sont associés à l’élaboration des projets d’ordonnances mentionnées aux I et II.
IV (nouveau). – La mise en œuvre des ordonnances mentionnées aux I et II fait l’objet d’une présentation par le Gouvernement, au plus tard un an après leur publication, devant les commissions permanentes compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat.
M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, sur l’article.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Nous sommes fondamentalement opposés au principe des habilitations à légiférer par ordonnances, raison pour laquelle nous proposerons la suppression pure et simple de l’article 21.
Nous adhérons pleinement aux considérants de la motion du rapporteur Gremillet que nous venons d’adopter, selon lesquels les amendements visant à élargir le champ de l’habilitation sont inconstitutionnels.
Les dispositions de ces amendements revenaient à accompagner le travail de l’ordonnance – certes en l’encadrant –, alors que le principe même en est contestable : il s’agit de dessaisir le Parlement de sa compétence, laissant ainsi les mains libres au Gouvernement pour répondre aux problématiques soulevées, sans aucune garantie.
Sur un sujet aussi vaste, nous ne pouvons accepter de laisser le Gouvernement agir seul, même avec quelques injonctions, qui ne l’engageront qu’à la marge.
Ce principe de législation par ordonnances est un contresens par rapport à l’esprit de Convention citoyenne, dont les travaux ne sauraient se traduire par le musellement du Parlement. La Convention ne vous a d’ailleurs pas demandé de prendre cette initiative, a fortiori par ordonnance.
Madame la ministre, plus que jamais, il faut écouter les maires, les élus des territoires et les citoyens, qui doivent participer aux travaux menant à une réforme en profondeur du code minier. C’est pour cette raison que le groupe communiste républicain citoyen et écologiste a voté pour la motion.
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements identiques.
L’amendement n° 109 rectifié est présenté par MM. Mizzon et Bonneau, Mmes Sollogoub et Perrot, MM. Kern et Masson, Mme Vermeillet, MM. Moga et Détraigne, Mme Chain-Larché, M. Cuypers, Mmes Thomas et Férat, M. Bouchet, Mme Herzog, M. Canévet, Mme C. Fournier, M. Bonnecarrère, Mme Billon, MM. Laugier, Maurey et Chauvet, Mme Vérien, MM. Louault, Duffourg, Marseille, Calvet et Cigolotti, Mmes Belrhiti et Létard et MM. S. Demilly, Cazabonne et Poadja.
L’amendement n° 162 est présenté par M. Gay, Mmes Apourceau-Poly et Varaillas, M. Lahellec et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 418 est présenté par Mme Poncet Monge, MM. Dantec, Fernique, Labbé, Salmon et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
L’amendement n° 623 rectifié est présenté par MM. Corbisez et Cabanel, Mmes M. Carrère et N. Delattre, MM. Gold et Guérini, Mme Guillotin et MM. Guiol, Requier et Roux.
L’amendement n° 1604 rectifié est présenté par MM. Michau, Dagbert et Jacquin, Mme Van Heghe, MM. Montaugé, J. Bigot et Kanner, Mmes Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Pla, Redon-Sarrazy et Tissot, Mme Bonnefoy, M. Devinaz, Mme M. Filleul, MM. Gillé et Houllegatte, Mmes Préville, G. Jourda et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Ces cinq amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Michel Canévet, pour présenter l’amendement n° 109 rectifié.
M. Michel Canévet. Nous pouvons avoir des convergences de vue entre groupes, puisque nous proposons également de supprimer les habilitations à légiférer par ordonnance, car nous considérons que le Parlement doit jouer tout son rôle et exercer toutes ses responsabilités. Il doit donc examiner le projet de code minier que pourrait élaborer le Gouvernement.
De manière générale, le dispositif des ordonnances pose problème, notamment quand celles-ci ne sont pas ratifiées. Dès lors que le Parlement confie au Gouvernement le soin de légiférer par ordonnance, il devrait être systématiquement saisi pour valider les propositions de l’exécutif. Or il arrive trop souvent qu’il ne le soit pas, ce que nous ne pouvons que déplorer.
Il convient de mettre en place, dans notre pays, un régime parlementaire dans lequel le Parlement rédige et vote ou confirme la loi. Tant que ce ne sera pas le cas, vous comprendrez bien que nous ne pouvons accepter cette façon de procéder par ordonnances.
M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour présenter l’amendement n° 162.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Madame la ministre, nous refusons de vous accorder un blanc-seing pour la réforme du code minier. Cette dernière doit être menée ici, par les parlementaires, après avoir entendu les citoyens et les élus de nos circonscriptions et après avoir constaté, in situ, ce que l’après-mine signifie.
Depuis 2017, 275 ordonnances ont été promulguées ; en dix ans, le président de Gaulle en avait pris 39 ! Quelle conception du parlementarisme ce gouvernement a-t-il ?
Lors des débats à l’Assemblée nationale, vous avez systématiquement appelé nos collègues à faire confiance au Gouvernement, en précisant même que les ordonnances seraient le moyen le plus rapide d’obtenir cette réforme du code minier – vous l’avez d’ailleurs répété à l’instant. Or le délai d’habilitation octroyé est de dix-huit mois, ce qui nous mène à après l’élection présidentielle.
Nous nous opposons formellement à cet article 21, qui signe votre mépris de la représentation nationale, des citoyens et des élus locaux.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 418.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je partage les remarques exprimées sur le recours aujourd’hui démesuré aux ordonnances.
L’article 21 est constitué d’une série de déclarations d’intentions du Gouvernement sur lesquelles nous n’avons aucune prise, alors même que la réforme du code minier est un enjeu écologique et stratégique fondamental.
Pouvons-nous passer outre à la démocratie parlementaire sur un sujet qui aura des répercussions sur des territoires très précis, dont nous sommes les représentants légitimes ?
Aussi, par respect pour la démocratie et pour le Parlement et parce que nous voulons une réelle discussion sur un enjeu écologique et stratégique important, nous demandons la suppression de l’article 21, qui habilite le Gouvernement de légiférer par ordonnances.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Corbisez, pour présenter l’amendement n° 623 rectifié.
M. Jean-Pierre Corbisez. Au regard des enjeux qu’elle représente en matière de santé publique et d’environnement, la réforme du code minier doit faire l’objet, dans son intégralité, d’un débat au Parlement.
Vous avez raison, madame la ministre, nous attendons cette réforme historique depuis plus de dix ans et nous pouvons nous féliciter qu’elle reste consensuelle, comme l’a souligné M. le rapporteur pour avis.
Grâce au travail de l’Assemblée nationale puis de notre commission, nous avons pu faire sortir du champ de l’habilitation un certain nombre de dispositions essentielles : l’instauration d’une analyse environnementale, économique et sociale pour l’octroi d’un titre, l’extension et la prolongation d’un titre minier auxquelles l’autorité compétente pourra s’opposer en cas de doute sérieux, la création d’une commission de suivi des projets miniers, la constitution de garanties financières pour l’arrêt des travaux miniers ou encore la surveillance des sites à long terme.
Toutefois, j’ai un peu l’impression de revivre le débat, cher à mon collègue Gremillet, sur les moulins : vous aviez vous-même défendu, monsieur le rapporteur pour avis, la possibilité de recourir à un médiateur. Légiférer par ordonnance sur un sujet aussi sérieux que le code minier me paraît anormal : mieux vaut faire confiance au Parlement.
Cet amendement vise donc à supprimer l’habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance pour modifier des pans entiers du code minier. Nous invitons l’exécutif à intégrer directement ces dispositions au sein de ce projet de loi, pour éviter de retarder leur mise en œuvre.
M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour présenter l’amendement n° 1604 rectifié.
M. Olivier Jacquin. Nous aussi souhaitons la suppression de cet article.
En tant que parlementaires, les ordonnances ne nous conviennent pas, surtout sur cette question. Le code minier a besoin d’être réformé, mais il doit l’être en pleine concertation avec les acteurs, notamment avec les collectivités et leur population.
La réforme est très attendue dans les régions minières, qui, aujourd’hui encore, dans l’après-mine, souffrent de nombreux problèmes et sont en grande difficulté. Or il est précisément nécessaire de réformer les dispositions concernant l’après-mine, les dispositifs existants méritant d’être largement améliorés, notamment en matière d’indemnisation des dégâts miniers et de gestion des risques miniers résiduels.
J’appelle votre attention sur la mobilisation des associations, dont certaines sont bien connues comme l’Association des communes minières et, plus localement, chez moi, en Meurthe-et-Moselle, l’association SEL’idaire ou l’Association des communes du bassin minier lorrain, qui travaillent activement sur ces questions depuis longtemps.
On cherche à rendre l’activité minière plus contemporaine et les mines plus acceptables, mais les dispositions actuellement applicables quand on est victime de dégâts miniers ne font vraiment pas envie… Ainsi, lorsque la responsabilité de l’exploitant ne peut pas être engagée ou qu’il y a prescription, c’est un fonds de garantie, financé par une partie de nos cotisations d’assurance dommages, comme l’assurance automobile, par exemple, qui indemnise ; ce dispositif n’a plus aucun sens au XXIe siècle ! Et vous entendez nous confisquer ce débat, madame la ministre.
J’ajoute que l’un des amendements visés par la motion d’irrecevabilité qui a été adoptée tendait à faire du ministère de la transition écologique le principal responsable du code minier ; un autre, également déclaré irrecevable en ce qu’il tendait à élargir l’ordonnance, visait à insérer des clauses de responsabilité sociétale des entreprises (RSE) pour l’octroi des concessions et des droits exploités.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis. Ces cinq amendements visent à supprimer l’habilitation à légiférer par ordonnances prévue à l’article 21. Pour ma part, je me réjouis, madame la ministre, que la réforme du code minier, attendue depuis longtemps, arrive enfin.
La commission des affaires économiques a adopté un cadre protecteur pour ces habilitations, puisqu’elle a encadré ou supprimé quinze habilitations et a inscrit cinq dispositifs « dans le dur » du texte ; elle a en outre réduit de dix-huit à douze mois le délai d’habilitation et de douze à trois mois le délai de dépôt du projet de loi de ratification ; enfin, elle a imposé au Gouvernement d’associer l’ensemble des parties prenantes – élus locaux, acteurs économiques, associations de protection de l’environnement – et de rendre compte de la mise en œuvre des ordonnances, une fois celles-ci adoptées.
Cette réforme a trop tardé : mieux vaut saisir cette occasion de la mener plutôt que de risquer de la voir échouer une nouvelle fois. La commission demande le retrait de ces amendements ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Barbara Pompili, ministre. Il faut savoir ce que l’on veut. Pour ma part, j’assume totalement ma volonté de faire passer cette réforme, parce qu’on en a besoin et qu’on l’attend depuis trop longtemps. Or il est nécessaire de passer par une ordonnance pour certaines de ces dispositions, d’où notre proposition.
Par souci de transparence et à la différence de ce qui a pu se faire par le passé – en tant qu’ancienne parlementaire, je sais de quoi je parle –, l’immense majorité des dispositions de l’ordonnance a été présentée dès le départ aux parties prenantes, notamment au CNTE : les contenus sont donc connus de tous, il n’y a pas de surprise.
En outre, nous avons accepté les demandes des parlementaires, tant à l’Assemblée nationale qu’en commission, au Sénat, de sortir certaines dispositions de l’ordonnance – quatorze articles, ce qui n’est pas rien – pour les inscrire « dans le dur » du projet de loi. Les dispositions restantes concernent des mises en cohérence techniques entre le code minier et le code de l’environnement. Nous avons besoin de cette habilitation pour éviter de nous retrouver avec un droit bancal en raison de certaines incohérences.
Pour ces raisons, le gouvernement est défavorable à ces cinq amendements identiques.
Monsieur Jacquin, une petite précision : le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages (FGAO) que vous avez évoqué avance l’argent, mais ce ne sont pas les assureurs qui remboursent in fine, c’est l’État.
M. le président. La parole est à Mme Viviane Artigalas, pour explication de vote.
Mme Viviane Artigalas. Madame la ministre, vous ne nous avez pas convaincus.
Nous entendons l’intérêt de cette réforme et, comme l’a souligné M. le rapporteur pour avis, la commission a bien encadré les choses.
Toutefois, je crains que vous n’alliez pas au bout de cette ordonnance et que des pans entiers du code minier restent inchangés. Il me semble que vous cherchez plus à gagner du temps qu’à avancer ; nous ne vous faisons pas confiance sur ce point.
Nous attendons tous cette réforme, mais nous ne voulons pas qu’elle se fasse n’importe comment ni n’importe quand. J’aimerais vraiment que vous puissiez aller au bout de cette réforme, mais j’en doute.
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires économiques.
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Mes chers collègues, je n’aime pas les ordonnances, pas du tout : elles dessaisissent le Parlement, ne permettent pas d’aller plus vite que le fait de légiférer directement et donnent l’impression de soustraire le débat à la représentation nationale. Mais… (Ah ! sur les travées des groupes CRCE et SER.)
M. Fabien Gay. « En même temps »… ?
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Non, monsieur Gay, le « en même temps » n’est pas du tout mon genre !
Mais, en l’espèce, Mme la ministre a raison : il s’agit de données techniques. Si nous balayons cette habilitation à légiférer par ordonnances, nous allons retarder la réforme du code des mines à laquelle vous tenez beaucoup, monsieur Gay, et que va-t-il se passer ? Comme nous sommes en fin de mandat, tout s’arrêtera et nous attendrons cette réforme encore dix ans…
Ainsi, une fois n’est pas coutume, je crois que nous devons accepter de voir ces mesures d’ordre technique passer par ordonnances. Les principales dispositions ont été transcrites « en dur » dans le texte à l’Assemblée nationale et au Sénat, en commission. Ne perdons donc pas plus de temps pour faire avancer cette réforme aux implications importantes, notamment pour nos concitoyens de Guyane.
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.
M. Fabien Gay. J’entends les propos de Mme la présidente de la commission des affaires économiques, il y a urgence à réformer le code minier, mais réformer par ordonnances, madame Primas, c’est plus long qu’avec le débat parlementaire !
Si le seul argument est d’aller vite, le recours aux ordonnances est inutile. Et ce n’est pas le groupe communiste, républicain citoyen et écologiste qui le dit, c’est le président Larcher qui a rappelé, voilà quelques semaines, que l’argument de la rapidité ne tenait pas pour justifier l’inflation des ordonnances, dont le délai de ratification dépasse dix-huit mois.
Mme Viviane Artigalas. Tout à fait !
M. Fabien Gay. M. le président de séance invite à aller vite ce soir, eu égard au grand nombre d’amendements restant à examiner, mais ni nous ni la Convention citoyenne pour le climat n’avons demandé d’intégrer la réforme du code minier dans ce texte, faisant de cette réforme un cavalier législatif.
Toutes les questions qui se posent à ce sujet auraient mérité un véritable texte ; nous aurions eu le temps d’analyser, de mener des auditions et d’aller au bout du débat, qu’il s’agisse de la Guyane ou de l’après-mine dans l’Hexagone. Trois jours de séance n’auraient pas été de trop pour enfin mener à bien cette réforme du code minier.
Je le répète, l’argument de la rapidité ne tient pas : tout le monde le sait, les ordonnances, c’est plus long !
Nous avons demandé un scrutin public sur ces amendements ; tout le monde pourra ainsi donner son avis en pleine connaissance de cause.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 109 rectifié, 162, 418, 623 rectifié et 1604 rectifié.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 134 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 343 |
Pour l’adoption | 126 |
Contre | 217 |
Le Sénat n’a pas adopté.
L’amendement n° 2142, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 1
Remplacer le mot :
douze
par le mot :
dix-huit
II. – Alinéa 45
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Barbara Pompili, ministre. Cet amendement vise à accorder au Gouvernement un délai de dix-huit mois pour publier les ordonnances réformant le code minier.
Le Gouvernement s’est en effet engagé à mener cette réforme dans les meilleures conditions de transparence. Ainsi, de nombreuses mesures clés ont été inscrites « en dur » dans ce projet de loi pour qu’elles fassent l’objet d’un débat parlementaire.
En revanche, les dispositions restantes doivent faire l’objet de travaux techniques, notamment d’articulation entre la partie réglementaire du code minier et le code de l’environnement et de consultation d’un large panel représentatif de parties prenantes.
Pour aboutir à des textes de qualité permettant de mettre un terme cette réforme du code minier dans les meilleures conditions de concertation, le délai de douze mois ne paraît pas suffisant.
M. Fabien Gay. À part ça, les ordonnances, c’est pour aller plus vite…
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis. L’amendement du Gouvernement tend à rétablir le délai de dix-huit mois et à supprimer l’association des parties prenantes, y compris des élus locaux.
Or un projet aussi important mérite une méthodologie aboutie, consensuelle et inclusive. Par conséquent, la commission, estimant que ses apports doivent être préservés, a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 1627 rectifié, présenté par MM. Michau, Dagbert et Jacquin, Mme Van Heghe, MM. Montaugé, J. Bigot et Kanner, Mmes Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Pla, Redon-Sarrazy et Tissot, Mme Bonnefoy, M. Devinaz, Mme M. Filleul, MM. Gillé et Houllegatte, Mmes Préville, G. Jourda et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 45
Compléter cet alinéa par les mots :
et consultés sur les décrets d’application relatifs au système d’indemnisation et de réparation des dommages miniers
La parole est à M. Jean-Claude Tissot.
M. Jean-Claude Tissot. Les régions minières attendent beaucoup de la réforme du code minier pour améliorer l’après-mine, notamment le système d’indemnisation et de réparation des dommages miniers.
En effet, le système actuel a largement démontré ses limites, plaçant certains administrés en situation de précarité.
L’amélioration du système d’indemnisation est la première des préoccupations des collectivités et de leur population. Aussi, il paraît indispensable que les associations d’élus locaux, les représentants des professionnels et du personnel du secteur minier ainsi que les associations de protection de l’environnement soient consultés sur les décrets d’application relatifs au système d’indemnisation et de réparation des dommages miniers.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis. La commission s’en remet à la sagesse du Sénat pour cet amendement visant à élargir le champ des consultations.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Barbara Pompili, ministre. Les décrets d’application feront bien évidemment l’objet d’une large consultation des parties prenantes, comme il est de coutume pour des textes de cette nature. Votre amendement est donc satisfait, monsieur le sénateur, et je vous demande de bien vouloir le retirer ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements et d’un sous-amendement faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 1837, présenté par M. Gremillet, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Cet amendement vise à supprimer l’alinéa 2 de l’article 21, qui prévoit une habilitation à légiférer par ordonnances destinée à « transformer les fondements juridiques et les objectifs du modèle minier français ».
M. le président. L’amendement n° 2141, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 2
Remplacer le signe :
;
par le mot et le signe :
en :
II. – Après l’alinéa 2
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
a) Définissant une politique nationale de valorisation durable des ressources et usages du sous-sol axée, notamment, sur les besoins de la transition énergétique et de l’industrie numérique, en se fondant sur le recensement actualisé des substances utiles susceptibles d’être présentes dans le sous-sol, ainsi que sur le recyclage des matières premières secondaires ;
b) Détaillant les modalités de fonctionnement du registre national minier, numérique et cartographique, ouvert au public, aux entreprises et à l’administration ;
III. – Après l’alinéa 4
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…) Améliorant la collecte et la diffusion au public des données disponibles concernant la constitution du sol et du sous-sol national, ainsi que du plateau continental relevant de la souveraineté française et les données techniques des ouvrages souterrains ;
IV. – Alinéa 5
Supprimer les mots :
, dans le respect du principe de proportionnalité,
V. – Alinéa 6
Remplacer les mots :
Adaptant aux activités de géothermie
par le mot :
Imposant
VI. – Alinéa 8
Rétablir le e dans la rédaction suivante :
e) Détaillant les modalités de fonctionnement des commissions de suivi de site s’inspirant des commissions prévues à l’article L. 125-2-1 du code de l’environnement ;
VII. – Alinéa 17
Supprimer les mots :
, dans le respect des dispositions applicables aux gîtes géothermiques issues de l’ordonnance n° 2019-784 du 24 juillet 2019 modifiant les dispositions du code minier relatives à l’octroi et à la prolongation des titres d’exploration et d’exploitation des gîtes géothermiques
VIII. – Alinéa 18
Supprimer les mots :
, ou de faciliter l’octroi de titres miniers pour la reconversion de sites d’extraction en sites de stockage, dans le respect des dispositions applicables aux stockages d’énergie calorifique introduites par l’article 45 de la loi n° 2020-1525 du 7 décembre 2020 d’accélération et de simplification de l’action publique
IX. – Alinéa 27
Rétablir le c dans la rédaction suivante :
c) Renforçant et adaptant le dispositif pénal de répression de l’orpaillage illégal en Guyane, notamment les modalités des contrôles d’identité, des visites et des fouilles de véhicules et d’embarcations ainsi que le périmètre des infractions autorisant le report de la garde à vue et de la rétention douanière ;
X. – Alinéa 35
Remplacer les mots :
granulats marins
par les mots :
substances de mines et de carrières
La parole est à Mme la ministre.
Mme Barbara Pompili, ministre. Le présent amendement vise à permettre au Gouvernement de compléter des dispositions législatives partiellement satisfaites par certains articles du projet de loi. Ainsi la mise en place d’un cadastre minier numérique ouvert au public est-elle désormais inscrite « en dur » dans le texte sans que soient précisées les modalités de fonctionnement de cette plateforme, qui permettra de dématérialiser certaines procédures liées à la gestion des titres.
Cet amendement tend en outre à élargir l’habilitation à de nouvelles mesures consistant, par exemple, à réduire la redondance des informations demandées aux entreprises et aux particuliers, dans un souci de simplification administrative, ou à optimiser et à massifier les flux d’information vers la banque du sous-sol afin d’améliorer la connaissance des ressources disponibles.
Il a par ailleurs pour objet de compléter l’habilitation afin de préciser le cadre juridique s’appliquant à la recherche et à l’exploitation des substances de carrières et de mines dans les fonds marins du domaine public.
M. le président. L’amendement n° 1042, présenté par Mme Benbassa, MM. Dantec, Fernique, Labbé, Salmon et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Rédiger ainsi cet alinéa :
b) Mettant en place les modalités de consultation publique et obligatoire des collectivités territoriales et, dans le respect du principe de proportionnalité, du public aux différentes étapes de la procédure, de l’instruction des demandes en matière minière à la fin de l’exploitation ;
La parole est à Mme Esther Benbassa.
Mme Esther Benbassa. Le présent article prévoit le renforcement des modalités d’information et de participation des collectivités territoriales et du public en matière minière.
Le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires estime toutefois que cette rédaction manque de clarté, s’agissant de renforcer le droit de regard des collectivités et des populations locales quant au potentiel lancement de grands projets miniers. Le présent amendement a donc pour objet de clarifier l’obligation de consultation publique des collectivités territoriales et des populations concernées en matière minière, à toutes les étapes de la procédure, de l’instruction des demandes à la fin de l’exploitation.
Il nous semble en effet que les enjeux sociétaux, environnementaux et sanitaires inhérents à l’octroi d’un permis exclusif de recherches ou d’une concession minière ou à l’exploitation minière en elle-même sont beaucoup trop importants pour qu’il soit envisageable de passer outre à la consultation des collectivités et du public.
Nous proposons donc d’adopter une rédaction plus claire en remplaçant les mots « renforçant les modalités d’information et de participation des collectivités territoriales et du public » par les mots « mettant en place les modalités de consultation publique et obligatoire des collectivités territoriales et […] du public ».
M. le président. L’amendement n° 861 rectifié, présenté par Mme Saint-Pé, MM. J.M. Arnaud, Bonnecarrère, Brisson, Cazabonne, Canévet, Détraigne et de Nicolaÿ, Mme Dumont, M. Genet, Mme Garriaud-Maylam, MM. Guerriau, Kern et Menonville, Mme Vermeillet et MM. Le Nay et Moga, est ainsi libellé :
Alinéa 18
1° Remplacer les mots :
sites d’extraction
par les mots :
sites de stockage souterrain de gaz naturel, d’hydrocarbures liquides, liquéfiés ou gazeux ou de produits chimiques ou de sites d’extraction
2° Après les mots :
sites de stockage
insérer les mots :
souterrain d’hydrogène
3° Compléter cet alinéa par les mots :
en ce qui concerne la reconversion de sites d’extraction
La parole est à Mme Denise Saint-Pé.
Mme Denise Saint-Pé. La programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) donne toute son importance au stockage massif et intersaisonnier de l’hydrogène et prévoit de faciliter la réutilisation de cavités salines comme solution de stockage et de déstockage de l’électricité renouvelable.
Il convient de rappeler qu’actuellement aucun site de stockage souterrain d’hydrogène n’existe en France, en métropole comme en outre-mer. Ainsi, pour un projet relatif à l’exploitation d’un site de stockage d’hydrogène, l’exploitant devrait obtenir un permis exclusif de recherches plus une autorisation d’ouverture des travaux miniers plus une concession de stockage souterrain, pour un délai d’instruction pouvant être compris entre quatre et six ans.
Néanmoins, de nombreux sites de cavités salines ou aquifères sont aujourd’hui répertoriés comme techniquement susceptibles d’accueillir un site de stockage d’hydrogène, notamment en reconversion de sites existants de stockage de gaz naturel, d’hydrocarbures ou de produits chimiques.
Ainsi convient-il d’habiliter le Gouvernement à envisager un cadre réglementaire spécifique pour le stockage souterrain de l’hydrogène, afin de raccourcir ces délais d’autorisation, pour des cavités salines déjà répertoriées par exemple, et d’ainsi permettre le développement de capacités de stockage de l’hydrogène dans des délais raisonnables.
M. le président. L’amendement n° 125 rectifié bis, présenté par M. Menonville, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Chasseing, Decool, Wattebled, Bonnecarrère, Kern et Moga, Mme Saint-Pé, M. Capus, Mme Paoli-Gagin et MM. Chauvet, Hingray et Malhuret, est ainsi libellé :
Alinéa 18
1° Après le mot :
reconversion
insérer les mots :
sites de stockage souterrain de gaz naturel, d’hydrocarbures liquides, liquéfiés ou gazeux ou de produits chimiques ou
2° Après le mot :
stockage
insérer les mots :
souterrain d’hydrogène
3° Compléter cet alinéa par les mots :
en ce qui concerne la reconversion de sites d’extraction
La parole est à M. Jean-Pierre Moga.
M. Jean-Pierre Moga. Je présente cet amendement au nom de notre collègue Franck Menonville. Il est tout à fait similaire à celui que vient de défendre Mme Saint-Pé ; je le considère donc comme défendu.
M. le président. Le sous-amendement n° 2247, présenté par M. Gremillet, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Amendement n° 125 rectifié bis, alinéas 10 et 11
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour le présenter et pour donner l’avis de la commission des affaires économiques sur les amendements nos 2141, 1042, 861 rectifié et 125 rectifié bis.
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Le sous-amendement n° 2247 vise à apporter une précision rédactionnelle.
J’en viens à la présentation des avis de la commission.
Adopter l’amendement n° 2141 équivaudrait à revenir sur la plupart des suppressions ou modifications apportées par notre commission.
Un tel vote, en effet, rétablirait plusieurs habilitations à légiférer par ordonnances satisfaites par des dispositions « en dur » introduites dans le texte soit par l’Assemblée nationale soit par le Sénat ; il supprimerait les références au nécessaire respect des apports des dernières réformes minières issues des lois du 10 août 2018 pour un État au service d’une société de confiance (Essoc) et du 7 décembre 2020 d’accélération et de simplification de l’action publique (ASAP) ; il remplacerait la référence aux « granulats marins » par la notion de « substances de mines ou de carrières » ; et il ajouterait dans le projet de loi une habilitation à légiférer par ordonnance sur la collecte des données publiques.
La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
Quant à l’amendement n° 1042, il vise à réécrire l’habilitation à légiférer par ordonnance relative à la consultation des collectivités territoriales et du public. J’en demande le retrait, ainsi que de l’amendement n° 861 rectifié ; à défaut, l’avis de la commission serait défavorable sur ces deux amendements.
Avis favorable, en revanche, sur l’amendement n° 125 rectifié bis sous réserve qu’il soit sous-amendé dans le sens souhaité par la commission.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Barbara Pompili, ministre. L’amendement n° 1837 vise à retirer au Gouvernement des habilitations concernant des dispositions législatives partiellement satisfaites ; or font défaut les dispositions législatives permettant la mise en place d’un cadastre minier numérique ou relatives au processus de définition et de mise à jour de la politique nationale de valorisation durable des ressources. Manquent aussi les mesures qui établiraient un lien entre la politique nationale et les autres plans et programmes. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Pour ce qui concerne l’amendement n° 1042, je souhaite attirer votre attention sur la question des consultations. Les consultations entraînent des délais, notamment lorsqu’il s’agit de réformes concernant des collectivités, en métropole ou en outre-mer. C’est pourquoi le Gouvernement souhaite se voir accorder dix-huit mois de délai, parce que cela prend du temps. Ajouter des consultations, c’est ajouter du temps, d’autant que ce n’est pas la première fois qu’on adjoint d’autres consultations à celles qui étaient initialement prévues. Je pointe donc la légère contradiction qu’il y a à demander en même temps des délais raccourcis pour les ordonnances et toujours davantage de consultations. Cela finit par être tout simplement infaisable !
Nous allons mener les consultations : comme je vous l’ai dit, elles ont toute leur place dans la méthode que nous construisons. Votre amendement, en ce sens, est satisfait.
Le Gouvernement a donc émis un avis défavorable.
Quant aux amendements nos 861 rectifié et 125 rectifié bis, ils visent à compléter une mesure d’habilitation introduite en commission des affaires économiques du Sénat dont l’objet est de réduire les délais d’instruction pour les demandes de titres et l’autorisation de travaux de stockage souterrain d’hydrogène.
Une ordonnance du 17 février 2021 relative à l’hydrogène permet déjà l’extension des titres d’exploitation de stockage souterrain de gaz combustible ou de gaz naturel en cours de validité à l’hydrogène. Toutefois, en l’absence de titre d’exploitation en cours de validité, la reconversion de sites en stockage souterrain d’hydrogène ne peut être envisagée que par une demande d’octroi d’un titre d’exploration. Si les travaux ont fait la preuve que le stockage d’hydrogène est réalisable, le titulaire du titre d’exploration pourra déposer une demande d’octroi d’un titre d’exploitation.
Il est nécessaire d’appliquer à cette activité le cadre juridique protecteur du régime légal des stockages souterrains dès lors qu’elle comporte des enjeux environnementaux et de sécurité bien particuliers. Il ne me paraît donc pas souhaitable de réduire les délais d’instruction qui, je le rappelle, sont des délais maximaux d’examen des demandes. Je suis par conséquent défavorable à ces amendements, ainsi qu’au sous-amendement n° 2247.
M. le président. La parole est à M. Michel Canévet, pour explication de vote.
M. Michel Canévet. Ces différents amendements visent à modifier le champ des ordonnances que nous venons d’évoquer.
Le problème, avec les ordonnances, c’est qu’elles ne sont pour ainsi dire jamais ratifiées par le Parlement. Or il s’agit bien, chaque fois, de la part du Parlement, d’une délégation de compétence. À lire le dernier bilan annuel de l’application des lois, qui a été examiné récemment par le Sénat, on constate que sur cent ordonnances prises au cours de l’année écoulée huit seulement ont été effectivement ratifiées.
Je dis que c’est totalement anormal ! Si l’on confie au Gouvernement le soin de légiférer par ordonnances, il faut malgré tout que les ordonnances ainsi élaborées finissent par être ratifiées par le Parlement. Il est inacceptable qu’il n’en soit pas ainsi.
M. le président. En conséquence, l’amendement n° 2141 n’a plus d’objet.
Je mets aux voix l’amendement n° 1042.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 125 rectifié bis, modifié.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. Je rappelle que les amendements nos 1359 rectifié, 1697 rectifié, 1698 rectifié et 1212 ont été déclarés irrecevables.
L’amendement n° 1743 rectifié bis, présenté par M. Chaize, Mme Chauvin, MM. Daubresse, Bouchet et Karoutchi, Mmes Jacques, Demas et Puissat, MM. Bonhomme, Piednoir, de Nicolaÿ et H. Leroy, Mme Lassarade, MM. Burgoa, Laménie et Genet, Mme Dumont et MM. Brisson, D. Laurent et Klinger, est ainsi libellé :
Alinéa 18
Compléter cet alinéa par les mots :
ainsi que des dispositions relatives aux stockages souterrains figurant au titre Ier du livre V du code de l’environnement
La parole est à M. Patrick Chaize.
M. Patrick Chaize. Cet amendement vise à sécuriser juridiquement l’arrêt définitif des travaux miniers dans le cadre de la fin d’un titre minier.
Le texte adopté par la commission couvre l’essentiel de ces travaux en précisant que les dispositions à prendre par ordonnances devront « faciliter l’octroi de titres miniers pour la reconversion de sites d’extraction en sites de stockage, dans le respect des dispositions applicables aux stockages d’énergie calorifique introduites par l’article 45 de la loi [dite ASAP] ».
Or l’article 45 de cette loi ne modifie que le code minier, si bien que ses dispositions transitoires, en l’occurrence son II, n’ont vocation à s’appliquer qu’à l’égard de dispositions du code minier. Ne sont donc pas concernées les dispositions relatives aux stockages souterrains contenues dans le code de l’environnement. Il en résulte un « angle mort », objet du présent amendement.
Cet amendement vise exclusivement à combler ce « vide juridique » pour les stockages souterrains qui sont soumis au titre Ier du livre V du code de l’environnement ; ainsi sera-t-il possible d’envisager l’exploitation minière des sites concernés, ainsi que la réalisation des travaux afférents, pendant une période juridiquement encadrée.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis. L’amendement de M. Chaize est totalement satisfait par l’adoption de celui de Franck Menonville, que nous venons d’adopter. À défaut d’un tel vote, j’aurais émis une demande de retrait ; en l’état de notre discussion, je me contente de dire qu’il est satisfait.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Chaize, l’amendement n° 1743 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Patrick Chaize. Je vais le retirer, monsieur le président, mais je ne suis pas complètement convaincu par les explications de notre rapporteur pour avis, étant entendu que mon amendement vise vraiment la fin d’une exploitation et non le transfert, par exemple, vers des stockages d’hydrogène.
Cela dit, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 1743 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 422, présenté par Mme Poncet Monge, MM. Dantec, Fernique, Labbé, Salmon et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :
Alinéa 19
Remplacer les mots :
et en révisant l’encadrement juridique des projets miniers de petite taille, comportant l’utilisation du domaine public ou privé de l’État. Ces révisions ont notamment pour objectif de réduire ces délais d’instruction sans réduire le niveau de protection de l’environnement
par les mots :
en y fixant de nouveaux critères en vue de l’arrêt de projet minier industriel aurifère en Guyane et dans tous les territoires et départements d’outre-mer dans le cadre de la lutte contre les changements climatiques en application de l’accord de Paris
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Nous demandons que la modification des régimes juridiques applicables aux autorisations et aux permis d’exploitation dans les collectivités d’outre-mer s’assortisse de nouveaux critères en vue de l’arrêt, à terme, des projets miniers industriels aurifères en Guyane et dans tous les territoires et départements d’outre-mer, dans le cadre de la lutte contre le changement climatique et en application de l’accord de Paris.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis. L’évolution proposée, qui consiste à supprimer la possibilité pour le Gouvernement de réviser l’encadrement juridique des projets miniers de petite taille en Guyane, n’est pas demandée par les premiers acteurs concernés ; je pense notamment aux élus locaux guyanais.
Demande de retrait, donc ; à défaut, l’avis de la commission serait défavorable, d’autant que la Guyane est le seul territoire français doté de gisements aurifères.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 1700 rectifié, présenté par MM. Jacquin, Michau, Todeschini, Dagbert, J. Bigot, Montaugé et Kanner, Mme Bonnefoy, M. Devinaz, Mme M. Filleul, MM. Gillé et Houllegatte, Mmes Préville, Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Pla, Redon-Sarrazy et Tissot, Mmes Van Heghe, G. Jourda et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 22
Compléter cet alinéa par les mots :
et réévaluant le montant de cette redevance en prenant en compte la nécessité de conserver la notion de juste indemnisation du propriétaire des terrains situés au-dessus de la future mine au regard des contraintes engendrées par cette privation de la propriété du sous-sol
La parole est à M. Olivier Jacquin.
M. Olivier Jacquin. Je vais vous parler de la redevance tréfoncière.
Si vous êtes propriétaire d’un terrain dont le sous-sol abrite une exploitation minière, vous toucherez en une fois, en guise d’indemnisation, 15 euros par hectare, soit – je traduis en mètres carrés, puisque vous avez tous en tête le prix du terrain à bâtir – 0,0015 euro par mètre carré, c’est-à-dire beaucoup moins d’un centime d’euro.
Pourquoi une indemnisation si faible ? Quand le droit minier a commencé d’être esquissé, à partir du XVIIIe siècle, l’idée était bien que l’État puisse, pour raisons d’intérêt général, faire exploiter le sous-sol afin de satisfaire aux besoins de la Nation, une telle atteinte au droit de propriété étant considérée comme salutaire du point de vue de l’intérêt public. C’est ce qui explique que le niveau de l’indemnité soit si faible. Vous imaginez bien que la valeur du titre minier est très supérieure à la redevance tréfoncière…
L’idée serait de rendre plus acceptable, en le réévaluant, le montant de cette indemnisation. Nous sommes au XXIe siècle et non plus au XVIIIe ! Cette réévaluation se ferait « en prenant en compte la nécessité de conserver la notion de juste indemnisation du propriétaire des terrains situés au-dessus de la future mine au regard des contraintes engendrées par cette privation de la propriété du sous-sol ».
Il s’agirait de faire un pas vers les propriétaires du sol afin de rendre plus acceptable l’exploitation minière, qui peut causer des dommages assez importants.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis. La réévaluation de la redevance tréfoncière n’a pas à figurer dans la présente habilitation à légiférer par ordonnances ; elle relève du domaine réglementaire.
Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.
Et, je le dis en passant à M. Jacquin, les travaux que nous avons menés tout à l’heure ont conforté la position du Sénat en la matière.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Barbara Pompili, ministre. Le montant de cette redevance tréfoncière payable en une fois est effectivement, monsieur Jacquin, de 15 euros par hectare, mais – attention – n’oublions pas que l’octroi d’une concession définit un périmètre où l’on peut extraire, mais où l’on n’extrait pas forcément. Les 15 euros par hectare s’appliquent au territoire de la concession dans son ensemble : si vous possédez une concession de cent hectares dont vous exploitez un hectare, vous aurez bien 1 500 euros à verser au propriétaire du sol – je fais ce rappel pour que tout le monde ait bien les choses en tête.
Le Gouvernement envisageait initialement de supprimer cette redevance, mais nous sommes sensibles aux arguments exposés par M. le sénateur Jacquin quant à la nécessité de préserver cette indemnisation versée au titre de l’institution d’une concession minière, bien que son rendement reste extrêmement faible.
J’émets donc un avis de sagesse sur cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 420, présenté par Mme Poncet Monge, MM. Dantec, Fernique, Labbé, Salmon et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :
Alinéa 25
Compléter cet alinéa par les mots :
, en vue de l’interdiction de l’exploitation aurifère industrielle en Guyane
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je vais me répéter ; après tout, la pédagogie n’est-elle pas l’art de la répétition ?
Je tiens à le redire solennellement : la Guyane abrite une biodiversité unique qu’on ne saurait sacrifier au nom de projets hasardeux, coûteux, sans bénéfices sociaux et dévastateurs pour l’environnement.
Nous proposons donc, une fois encore, que le Gouvernement s’oriente, dans la rédaction des ordonnances prévues par le texte, vers l’interdiction de l’exploitation aurifère industrielle en Guyane, comme le réclament de nombreuses associations du territoire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis. C’est bien l’orpaillage illégal, et non l’orpaillage légal, qui a l’impact écologique le plus important ; nous avons déjà eu ce débat.
Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis de la commission serait défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 1696 rectifié, présenté par MM. Jacquin, Michau, Todeschini, Dagbert, J. Bigot, Montaugé et Kanner, Mme Bonnefoy, M. Devinaz, Mme M. Filleul, MM. Gillé et Houllegatte, Mmes Préville, Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Pla, Redon-Sarrazy et Tissot, Mmes Van Heghe, G. Jourda et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Dans les six mois suivant la promulgation de la présente loi et avant la rédaction de l’ordonnance portant sur les garanties financières prévue par le I, le Gouvernement remet au Parlement un rapport d’évaluation du système de garantie par caution des dommages occasionnés aux propriétés situées à la surface d’une exploitation minière souterraine, tel que mentionné à l’article L. 155-1 du code minier.
La parole est à Mme Angèle Préville.
Mme Angèle Préville. Le code minier prévoit bien actuellement, à l’article L. 155-1, des garanties financières sous forme de caution que l’exploitant de mines doit, avant d’engager des travaux sous des maisons ou des lieux d’habitation, donner aux propriétaires réunis en association en application de l’article L. 154-1.
Or, dans les faits, l’application de ces deux articles ne fonctionne pas. Certaines associations se battent depuis plus de dix ans pour faire valoir leurs droits en justice. Bien que la Cour de cassation, dans une décision du 23 mars 2017, ait statué sans équivoque que la garantie des propriétés n’est pas subordonnée à la démonstration d’un risque de dommage, les textes actuels restent imprécis.
L’adoption de cet amendement permettrait l’évaluation de l’application de cette disposition du code minier via un rapport publié avant la rédaction de l’ordonnance portant sur les garanties financières. Cet amendement nous a été suggéré par l’association SEL’idaire, collectif de défense des propriétaires concernés par l’exploitation minière du sel gemme sous la ville de Varangéville.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis. La commission des affaires économiques est par principe défavorable aux demandes de rapport.
Surtout, il est déjà prévu un processus de concertation dans le cadre de l’élaboration des ordonnances.
De surcroît, l’habilitation à légiférer par ordonnance sur les garanties financières a été supprimée en commission.
Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 21, modifié.
(L’article 21 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 21
M. le président. L’amendement n° 793 rectifié, présenté par Mme Taillé-Polian, MM. Dantec, Fernique, Labbé, Salmon et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :
Après l’article 21
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 100-4 du code de l’énergie est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« … – En cohérence avec les objectifs de long terme définis au 1° du I et dans le cadre de la politique mise en œuvre pour lutter contre le changement climatique conformément à la loi n° 2016-786 du 15 juin 2016 autorisant la ratification de l’accord de Paris adopté le 12 décembre 2015, compte tenu des incidences environnementales de la production et de la consommation des hydrocarbures, notamment en matière d’émissions de gaz à effet de serre, l’État n’apporte aucun concours à l’exportation des activités de recherche et d’exploitation des hydrocarbures. Il peut interdire les importations de carburants dont l’intensité d’émissions de gaz à effet de serre unitaire sur l’ensemble du cycle de vie par unité d’énergie dépasse un seuil fixé par décret. »
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Cet amendement a pour objet de mettre fin au concours de l’État aux activités de recherche et d’exploitation d’hydrocarbures et d’autoriser l’interdiction des importations d’énergies fossiles, telles que les sables bitumineux, très émetteurs de gaz à effet de serre.
La fin progressive des aides publiques directes ou indirectes aux combustibles fossiles est l’une des recommandations émises par la Commission européenne à l’attention de la France concernant son projet de plan national intégré en matière d’énergie et de climat.
La France est aujourd’hui le deuxième exportateur mondial d’équipements et de services à l’industrie des hydrocarbures ; ce secteur réalise à l’étranger près de 70 % de son chiffre d’affaires.
Persévérer dans cette voie nous rendrait complices de l’accélération violente du changement climatique en cours. La puissance publique doit donc cesser d’accorder des aides, directes ou indirectes, à la création de nouvelles centrales à charbon et à l’exploitation des hydrocarbures, conventionnels ou non, aux quatre coins de la planète. Nous devons également cesser de soutenir, par nos importations, ces activités et les catastrophes écologiques qu’elles provoquent.
C’est pourquoi nous souhaitons mettre fin au concours de l’État aux activités induisant l’augmentation de l’utilisation des énergies fossiles.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis. Les interdictions proposées, qui visent les exportations et importations d’hydrocarbures, ne sont pas opportunes.
Pour ce qui concerne le concours de l’État à l’exportation des activités de recherche ou d’exploitation d’hydrocarbures, il faut rappeler que la France est déjà engagée dans cette voie depuis la loi du 30 décembre 2017 mettant fin à la recherche ainsi qu’à l’exploitation des hydrocarbures.
Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis de la commission serait défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Barbara Pompili, ministre. En la matière, nous avons déjà pris un certain nombre de mesures, notamment dans la loi de finances pour 2021 : le Gouvernement a justement prévu de mettre fin aux garanties à l’export ayant pour objet l’exploration ou l’exploitation de gisements d’hydrocarbures liquides dans le cadre de permis correspondant à des gisements non encore exploités à compter du 1er janvier 2025, ainsi que de ne plus accorder cette garantie pour l’exportation de biens et services liée à des opérations ayant pour objet l’exploration ou l’exploitation de gisements gaziers dans le cadre de permis correspondant à des gisements non encore exploités à compter du 1er janvier 2035, délai qui pourrait – nous l’avons d’ores et déjà indiqué – être raccourci.
Nous disposons en effet de nouveaux éléments ; je pense au rapport de l’Agence internationale de l’énergie (AIE), sur lequel, comme tous ceux qui l’ont reçu, nous sommes en train de travailler.
Par ailleurs, pour ce qui est des importations, une telle interdiction ne pourrait être prévue qu’à l’échelon européen, la réglementation en matière d’importation s’appuyant sur la législation européenne.
Avis défavorable.
M. le président. L’amendement n° 796 rectifié, présenté par Mme Taillé-Polian, MM. Dantec, Fernique, Labbé, Salmon et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :
Après l’article 21
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 100-4 du code de l’énergie est complété par deux paragraphes ainsi rédigés :
« … – Les sociétés de gestion de portefeuille définies à l’article L. 532-9 du code monétaire et financier et les établissements de crédit et les sociétés de financement définis à l’article L. 511-1 du même code mesurent chaque année les émissions de gaz à effet de serre dont sont responsables leurs actifs détenus dans les entreprises se livrant à des activités d’exploration et d’exploitation des hydrocarbures et du charbon et rendent cette information publique. À compter du 1er janvier 2022, elles réduisent progressivement la part de leurs actifs détenus dans les entreprises se livrant à des activités d’exploration et d’exploitation des hydrocarbures et du charbon pour la porter à zéro d’ici à 2027.
« … – À partir du 1er janvier 2022, les sociétés de gestion de portefeuille définies à l’article L. 532-9 du code monétaire et financier et les établissements de crédit et les sociétés de financement définis à l’article L. 511-1 du même code ne peuvent plus détenir d’actifs dans les entreprises se livrant à des activités d’exploration et d’exploitation des hydrocarbures et du charbon. »
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Cet amendement vise à organiser le désengagement des énergies fossiles de la part des investisseurs.
Selon Oxfam, les crédits accordés par les grandes banques françaises aux seules entreprises actives dans le secteur du pétrole et du gaz représenteraient plus de 40 % des émissions de CO2 de leurs portefeuilles de crédits aux entreprises.
Cet amendement vise à obliger les établissements de crédit et les sociétés de gestion de portefeuille à mesurer les émissions de gaz à effet de serre dont sont responsables leurs investissements dans les entreprises se livrant à des activités d’exploration et d’exploitation d’hydrocarbures et de charbon, et à mettre fin à de tels investissements d’ici au 1er janvier 2027.
La France a signé l’accord de Paris, mais elle ne respecte pas ses engagements. Le c du 1° de l’article 2 de cet accord prévoit de « rend[re] les flux financiers compatibles avec un profil d’évolution vers un développement à faible émission de gaz à effet de serre et résilient aux changements climatiques ».
Las ! les banques françaises ont financé les énergies fossiles pour 295 milliards de dollars depuis la signature de l’accord. Encore plus surprenant, alors que la récession suscitée par la pandémie a entraîné une baisse de près de 9 % des financements aux énergies fossiles à l’échelon international, les banques françaises – nos banques –, elles, ont accru leurs financements en ce domaine, en moyenne, de 19 % par an entre 2016 et 2020 !
Face à cette contradiction, nous souhaitons rappeler que la transition écologique ne pourra s’opérer par la seule bonne volonté affichée des principaux acteurs financiers. Par sa permissivité, le cadre réglementaire actuel, qui organise l’absence de régulation, favorise les banques qui financent les énergies brunes au détriment des acteurs les plus exemplaires. Il est donc temps d’obliger les acteurs financiers à désinvestir dans les énergies fossiles.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis. L’évolution proposée par les auteurs de l’amendement est satisfaite.
Dans le cadre de la loi de 2019 relative à l’énergie et au climat, c’est la commission des affaires économiques du Sénat qui a fait adopter le principe selon lequel les sociétés de gestion de portefeuille conçoivent et rendent publique une information sur les risques liés au changement climatique et à la biodiversité.
Elles doivent y retracer toute leur stratégie d’investissement, les moyens pour y parvenir, les critères et les méthodologies, ainsi que les droits de vote. Doivent notamment y figurer les investissements de ces sociétés qui contribuent à l’atteinte de nos engagements climatiques.
Par ailleurs, le dispositif va bien plus loin que les seules sociétés de gestion puisque sont également visés les organismes mutualistes ou de sécurité sociale.
Demande de retrait, sinon avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Barbara Pompili, ministre. Les prestataires de services financiers que vise cet amendement devront publier, au titre de l’article 29 de la loi relative à l’énergie et au climat et de son décret d’application, paru récemment, ainsi que du droit européen, la part de leur encours alignée sur les énergies fossiles.
Cet amendement doublonne donc des exigences qui sont déjà prévues par le droit.
Ces mêmes acteurs de marché devront publier également d’importantes informations relatives à leur stratégie d’alignement sur les objectifs de température de l’accord de Paris : la mesure de l’exposition de leur portefeuille, la manière dont leur politique d’engagement et de vote répond à ces objectifs, ainsi que les mesures correctrices mises en place.
De telles exigences viennent compléter un droit européen en cours de développement, qui est déjà ambitieux, et permettent de positionner la place de Paris comme pionnière en termes d’alignement sur l’accord de Paris.
La taxonomie européenne va en effet contraindre les établissements bancaires, par exemple, à publier la part de leur encours ou de leur bilan alignée sur la neutralité carbone dès 2022.
Enfin, les mesures mises en œuvre dans le cadre de l’engagement de la place de Paris sur le climat répondent également à votre objectif, madame la sénatrice, puisque l’ensemble des acteurs du marché doivent ainsi publier et rendre publique une politique de désengagement financier du charbon visant à une sortie à l’horizon de 2030 dans l’Union européenne et les pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), et à l’horizon de 2040 dans le reste du monde, en ligne avec les recommandations du groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC).
C’est donc tout un cadre de recevabilité qui est en train de se mettre en place aux niveaux national et européen afin que les acteurs du marché français se désengagent des énergies fossiles, tout en accompagnant la transition énergétique en conformité avec les objectifs de l’accord de Paris.
Cet amendement me semble donc satisfait, c’est pourquoi j’en demande le retrait. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je ne pense pas que cet amendement soit satisfait. Peut-être me suis-je mal exprimée ou n’ai-je pas assez développé mes arguments, mais il ne s’agit pas uniquement de publier des informations – cela, tout le monde peut le faire !
Dans l’article que je propose, une trajectoire est imposée. Peu importe donc que les informations soient rendues publiques, ce qui est fondamental c’est qu’à compter du 1er janvier 2022 les entreprises financières réduisent « progressivement la part de leurs actifs détenus dans les entreprises se livrant à des activités d’exploration et d’exploitation des hydrocarbures et du charbon pour la porter à zéro d’ici à 2027 ». J’ai évoqué l’horizon de 2027 dans la présentation de mon amendement.
Ce que je souhaite, c’est qu’« à partir du 1er janvier 2022, les sociétés de gestion de portefeuille définies à l’article L. 532-9 du code monétaire et financier […] ne peuvent plus détenir d’actifs dans les entreprises se livrant à des activités d’exploration et d’exploitation des hydrocarbures et du charbon ». Il s’agit non pas de déclarer des chiffres, mais bien de suivre une trajectoire alignée sur l’accord de Paris.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 796 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 21 bis (nouveau)
Au premier alinéa de l’article L. 341-6 du code forestier, après les mots : « même code », sont insérés les mots : « , dans un espace mentionné à l’article L. 113-8 du code de l’urbanisme ». – (Adopté.)
Chapitre IV
Favoriser les énergies renouvelables
Articles additionnels avant l’article 22
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 63 rectifié est présenté par Mmes Thomas, Pluchet et Chain-Larché, MM. Burgoa et Cardoux, Mme Garriaud-Maylam, MM. Lefèvre et Favreau, Mme Lassarade, M. Savary, Mmes Deromedi, Di Folco et Dumont et MM. Brisson et Babary.
L’amendement n° 822 est présenté par M. Gay, Mme Varaillas et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Avant l’article 22
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 181-3 du code de l’environnement est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« …. – L’autorisation environnementale ne peut être accordée pour les projets d’installations de production d’électricité à partir de l’énergie mécanique du vent, lorsqu’au moins une des communes consultées en application des articles R. 181-38 et R. 181-54-4 du présent code émet un avis défavorable. »
La parole est à Mme Catherine Di Folco, pour présenter l’amendement n° 63 rectifié.
Mme Catherine Di Folco. Cet amendement vise à prévoir que l’implantation d’un parc éolien ne puisse se faire sans l’accord explicite de l’ensemble des communes concernées.
Les maires se sentent souvent démunis face à l’implantation d’éoliennes qui suscite de plus en plus d’opposition de la part de leurs administrés. Aujourd’hui, leur avis n’est plus que consultatif. Cela n’est pas acceptable, car ils sont aménageurs du territoire et doivent avoir un rôle décisionnel sur tout projet de construction : ils doivent définir des conditions d’installation acceptables pour les citoyens et positives pour le territoire.
M. le président. La parole est à M. Gérard Lahellec, pour présenter l’amendement n° 822.
M. Gérard Lahellec. L’objet de cet amendement est de renforcer le rôle des élus locaux et des populations dans tous les projets éoliens, en convergence avec ce que vient de rappeler notre collègue Catherine Di Folco.
Il faut bien reconnaître que, durant ces dernières années, voire ces dernières semaines encore, la multiplication de ces installations d’électricité a posé de sérieux problèmes. Cela engendre d’ailleurs parfois des conflits et des incompréhensions. Or la qualité des implantations dépend de la qualité de la concertation et de l’acceptation par les populations et les élus des projets en question.
L’objectif, encore une fois, est de renforcer le rôle des élus locaux dans l’implantation des éoliennes afin de rendre leur avis plus déterminant quand il s’agit d’opérer de tels choix.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marta de Cidrac, rapporteure de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Ces deux amendements identiques visent à renforcer les pouvoirs de contrôle des élus locaux sur les décisions d’implantation d’éoliennes.
Je suis d’accord avec l’objectif visé ; toutefois, je vous proposerais plutôt, mes chers collègues, d’adopter l’amendement n° 860 rectifié de M. Courtial, que nous examinerons ultérieurement, qui vise à instituer un droit de veto de la commune pour l’ensemble des projets, et pas uniquement pour ceux soumis à une enquête publique.
L’amendement n° 860 rectifié me semble satisfaire l’objectif porté par ces amendements identiques de manière encore plus large et opérante.
Je propose donc à leurs auteurs de les retirer au profit de l’amendement n° 860 rectifié. À défaut, l’avis de la commission sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Barbara Pompili, ministre. Le Gouvernement émettra un avis défavorable.
De nombreux débats ont lieu sur la question des implantations d’éoliennes. Je suis absolument convaincue qu’il convient d’y mettre davantage de raison et un peu moins de passion. Il est impossible de discuter sérieusement d’un sujet en se fondant sur des faits inexacts ou sur des sentiments. Le sujet est trop important, puisqu’il s’agit de notre politique énergétique globale.
Nous prenons en ce moment des mesures pour favoriser l’acceptabilité des éoliennes, car il y existait à certains endroits des problèmes de luminosité et de balisage des éoliennes. À une époque, maintenant bien révolue, les socles des éoliennes posaient également problème, car ils restaient en terre, sans obligation de les enlever. Maintenant, en cas de repowering, on enlève les socles. Il existe aussi des obligations de recyclage et d’autres mesures, à l’inverse de tout ce que l’on peut entendre dire.
Néanmoins, à certains endroits, il a pu se développer, à juste titre, un sentiment d’encerclement lié à un manque de concertation en matière d’implantation des éoliennes. Nous tirons les leçons de ces expériences pour essayer de concilier, comme il se doit, nos impératifs – j’insiste bien sur ce point – d’évolution du mix électrique et de développement de l’électricité en France, car nous avons des besoins, avec nos impératifs de préservation du patrimoine, aussi bien culturel que naturel – je pense à la biodiversité, à laquelle je suis particulièrement attachée.
Pour ce faire, nous nous sommes appuyés sur une méthode qui consiste à réaliser une cartographie des lieux. Je prends du temps pour répondre à ces amendements, afin de poser le cadre du débat, ce qui me permettra d’être plus rapide sur les amendements suivants. Les préfets ont reçu une circulaire en ce sens afin de déterminer précisément dans chaque département à quel endroit il est possible d’implanter des éoliennes et où il est impossible de le faire, pour des raisons variées, mais cumulatives.
Il faut évidemment qu’il y ait du vent pour implanter des éoliennes, et il ne doit pas y avoir de radars, notamment militaires. L’implantation ne doit pas créer de difficulté au niveau aérien, et il ne doit pas y avoir non plus de problème de biodiversité. Il importe, notamment, d’identifier les couloirs de migration d’oiseaux ou de faire attention à la présence de chauves-souris, car on sait que celles-ci sont très perturbées par la présence d’éoliennes. Il faut également tenir compte des éléments de patrimoine remarquables que nous souhaitons préserver.
Bref, tous ces points vont permettre d’établir une cartographie assez précise, qui sera une aide à la décision pour tout un chacun.
Nous déclinerons ensuite par région, et c’est l’objet des mesures présentées dans ce projet de loi, nos objectifs de programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE). Pourquoi ? Tout simplement parce que la PPE fixe des objectifs par type d’énergie, mais ne définit pas du tout les moyens pour les mettre en place sur les territoires. Le problème est simple : comme le disait mon père, ce n’est pas en lançant en l’air l’alphabet que va retomber une Bible ! Il faut donc bien, à un moment, fixer une méthode pour que nous puissions respecter nos propres engagements.
Cela permettra également à chaque région de prendre sa part à l’effort collectif. C’est une programmation qui concerne notre pays tout entier, il n’y a pas de raison que certaines régions fassent une grosse part de l’effort et d’autres moins. Il est normal qu’il y ait une répartition.
Une fois que nous disposerons de cette cartographie et que nous connaîtrons les objectifs région par région, il sera plus facile de déterminer, en concertation avec les uns et les autres, les zones d’implantation d’éoliennes. Nous disposerons ainsi également d’une visibilité dans le temps. Certains de nos concitoyens n’auront alors plus ce sentiment, qu’ils peuvent ressentir, de voir pousser partout des éoliennes, sans trop comprendre pourquoi ni comment, et en se demandant jusqu’où cela va aller. Le processus sera plus clair.
Il est important, à mon sens, de donner de la visibilité, de se concerter et d’avancer. Il ne faut pas non plus oublier les aides fiscales autorisées.
Dernier point, je suis très attentive à ce que l’on puisse aussi accroître la participation citoyenne au développement des énergies renouvelables. Dans les endroits où cette participation a lieu en France, les choses fonctionnent très bien. Nos concitoyens investissent dans l’éolienne située près de chez eux et perçoivent des revenus quand celle-ci fonctionne. C’est plus intéressant que le livret A !
C’est tout cela qu’il faut développer. À ceux d’entre vous qui veulent prévoir un droit de veto des communes je dis : attention ! Aujourd’hui, seulement 20 % du territoire peut recevoir des éoliennes. C’est un problème : j’essaie d’agrandir ce périmètre car, avec un tel taux, il semble normal que certaines zones se sentent encerclées ! Il importe de trouver la bonne mesure.
Or accorder un droit de veto n’encourage pas à la concertation ni à la recherche collective de solutions. Dans certains endroits, les choses vont bien se passer, mais dans d’autres cela peut entraîner un phénomène de « Nimby » (not in my backyard) : certains seront favorables à l’électricité verte, mais pas chez eux !
Le problème que nous avons aujourd’hui avec les éoliennes se rencontrera ensuite avec les panneaux photovoltaïques et la méthanisation. Si plus personne ne veut d’éoliennes, qui voudra des centrales nucléaires qu’il faudra reconstruire pour faire face à nos besoins d’ici à trente ans ? Là aussi, il y aura des difficultés d’acceptabilité.
Il importe donc que nous nous montrions tous raisonnables et que nous essayions d’avancer. D’une manière ou d’une autre, il est toujours dangereux d’accorder un droit de veto, car cela nuit à la concertation.
Voilà pourquoi je suis défavorable aux amendements qui visent à mettre en place des droits de veto, quelle que soit leur forme. Je préfère la concertation.
M. le président. La parole est à Mme Viviane Artigalas, pour explication de vote.
Mme Viviane Artigalas. Vous avez sans doute raison, madame la ministre, nous devons travailler dans la concertation sur cette problématique de l’éolien, mais on ne peut pas nier qu’il existe une saturation dans certains territoires où nous sommes confrontés à l’opposition des populations. Ce n’est pas pour cela qu’il ne faut rien faire, mais le travail doit être fait avec beaucoup de précaution.
Je ne suis pas certaine qu’il faille aller aussi loin que vous le proposez en matière de planification et de cartographie. Nous devons agir en concertation avec les territoires et les associations. (Mme la ministre renchérit.)
Il s’agit d’une question très problématique. Certes, cela ne doit pas nous empêcher d’aller vers des énergies renouvelables, mais, j’y insiste, il est essentiel de tenir compte aussi de l’acceptabilité sociale de ce sujet.
M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.
M. Ronan Dantec. En commission, on nous avait opposé l’article 45 de la Constitution, mais ici nous allons pouvoir consacrer plus de temps à l’examen de cette question…
Le Sénat, longtemps considéré comme quelque peu jacobin, porteur d’une vision pompidolienne de la France et de la planification, est tout d’un coup saisi d’une frénésie de municipalisme libertaire ! C’est assez nouveau, mais c’est une évolution idéologique de notre assemblée qu’il importe de relever…
Mme la ministre l’a rappelé avant moi, cette logique risque de vous entraîner très loin, mes chers collègues. Si à chaque projet d’installation d’éoliennes soumis à enquête publique, on a soit un référendum, soit un droit de veto de la commune, vous n’allez plus rien faire !
Je ne voudrais pas être maire d’une commune française : plus de méthanisation, plus de routes à deux fois deux voies si la commune est uniquement traversée, plus de centrale nucléaire – mais là, ce n’est pas très grave car on est tous d’accord : c’est beaucoup trop cher pour que nous investissions dans ce type de projet ! (Sourires sur les travées du groupe GEST.)
Quoi qu’il en soit, êtes-vous sérieux ? Croyez-vous vraiment en une telle proposition ?
Oui, il y a un problème d’acceptabilité de l’éolien dans un certain nombre d’endroits, mais j’en connais d’autres dans mon département – j’ai inauguré un site il y a quelques mois – où aucun recours n’est déposé. Je connais aussi des endroits où la population est favorable au projet et où le recours est déposé par des personnes qui ne vivent pas sur place.
Mme Sophie Primas. Comme les zadistes de Notre-Dame-des-Landes ?
M. Ronan Dantec. Aucun pays ne fonctionne avec des mesures de ce genre, vous le savez comme moi !
Ce type d’amendements met à terre toute la stratégie énergétique française, ce n’est pas raisonnable. Ces amendements répondent à l’air du temps : au lieu de traiter sérieusement les questions qui se posent à nous, vous déposez des amendements qui ne survivront à aucune commission mixte paritaire – nous le savons tous – pour faire plaisir à certains électeurs.
J’en reparlerai plus loin, Réseau de transport d’électricité (RTE) vient de déposer ses dossiers pour 2050 : sans l’éolien, nous ne pourrons pas atteindre nos objectifs !
M. le président. La parole est à M. Stéphane Demilly, pour explication de vote.
M. Stéphane Demilly. Au risque de déplaire à M. Dantec, je voterai l’amendement de Mme Taillé-Polian et celui qui est identique au sien. Je ne crois pas que nous parviendrons à développer une transition écologique contre les élus du territoire. On ne pourra pas non plus développer l’acceptabilité sociale des projets contre les habitants. Il faut savoir écouter les populations, c’est le rôle essentiel d’un conseil municipal.
Savez-vous que l’on peut défigurer un village avec des mâts éoliens de 60 à 140 mètres de hauteur contre l’avis d’un conseil municipal ? À côté de cela, les services de l’État font démonter une fenêtre en PVC dans une zone classée ABF, qui nécessite l’intervention d’un architecte des bâtiments de France !
Il importe de redonner un peu de pouvoir aux conseils municipaux. Je le redis, je voterai ces amendements : s’ils sont retirés, je voterai tout à l’heure celui de M. Courtial.
M. le président. La parole est à M. Alain Cazabonne, pour explication de vote.
M. Alain Cazabonne. J’irai dans le même sens. Il faut choisir entre la légitimité des élus et celle de quelques personnes. On ne va pas ici rejouer l’histoire des 150 citoyens qui ont une légitimité exceptionnelle parce qu’ils ont été tirés au sort !
Un maire ne va pas contre ses habitants. J’ai été maire pendant vingt-quatre ans, je n’ai jamais mené une seule opération qui allait contre le souhait de la population : en cas de différend, nous en discutions et nous dégagions une position. Mais dire aux habitants qu’ils peuvent s’opposer à ce que le maire veut décider, je trouve cela anormal… Il existe une légitimité, elle est républicaine !
M. le président. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.
M. Daniel Salmon. Je vais attaquer la question sous un autre angle. Il me semble que nous avons une programmation pluriannuelle de l’énergie et des objectifs qu’il faut essayer d’atteindre.
L’énergie éolienne, comme toute énergie, n’a pas tous les atouts. Il n’existe pas d’énergie propre, sans aucun impact. Nous sommes face à un principe de responsabilité : quelle est l’énergie qui nous apportera des bénéfices à court terme sans impact pour les générations futures ?
Une éolienne rachète son énergie grise en huit mois, aucune autre source d’énergie, aucune autre technologie, n’en fait autant, il faut le rappeler !
Tout à coup, nous assistons à une campagne de dénigrement assez incroyable contre les éoliennes. On se pose tout un tas de questions qu’on ne s’est jamais posées pour aucune autre installation ou infrastructure. On entend parler du béton. Mais nous en coulons pas mal de mètres cubes tous les ans ! Les éoliennes ne représentent que 0,5 % du béton utilisé aujourd’hui en France. C’est beaucoup de bruit pour presque rien !
Quant à leur impact magnétique ou paysager, nous sommes-nous posé toutes ces questions pour les lignes de 400 000 volts qui partent de Flamanville et qui courent sur des centaines de kilomètres ?
M. Philippe Pemezec. C’est du baratin !
M. Daniel Salmon. On est exactement ici dans une logique du « pas dans mon jardin », du « oui, mais chez les autres », et du « nous verrons plus tard ». Tout cela n’est pas sérieux !
Certains évoquent aussi la protection des oiseaux. Vous posez-vous autant de questions sur les millions d’oiseaux tués tous les jours par les voitures ? Quid des chats également ? Ils en mangent pourtant 20 millions par an ! À titre de comparaison, les éoliennes ne tuent au maximum qu’une dizaine d’oiseaux par an : un peu de raison !
On est complètement dans l’irrationnel, on surfe sur une espèce de populisme. Il faut le dire, c’est assez pitoyable !
Effectivement, on a loupé quelque chose. Pour qu’il y ait de l’acceptabilité, il faut que ce soient les citoyens, l’État ou les collectivités territoriales qui s’engagent. Ce travail n’a pas fait. Aujourd’hui, les fonds de pension arrivent. Or quand on est confronté aux fonds de pension, quand l’argent ne reste pas dans le pays, cela pose problème !
En mettant tous nos œufs dans un même panier, nous avons complètement raté l’objectif de l’éolien en France. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. le président. La parole est à M. Didier Mandelli, pour explication de vote.
M. Didier Mandelli. Si nous avons ce débat ce soir et si ces amendements sont présentés, c’est sans doute que nous avons eu un effet de balancier beaucoup trop important, avec un développement anarchique des éoliennes, sans aucune concertation et sans que les élus locaux puissent dire leur mot sur les implantations potentielles.
Je rappelle simplement à mes collègues du groupe GEST que nous avons voté ce matin un amendement – et je suis intervenu pour qu’il soit adopté – visant à intégrer la qualité de l’eau dans les textes essentiels, au motif qu’il s’agissait d’un patrimoine commun.
Eh bien je suis désolé, mais le paysage est aussi un patrimoine commun naturel que chacun d’entre nous doit pouvoir apprécier. (M. Philippe Pemezec approuve.) Dans le Puy-de-Dôme, les éoliennes, qui sont implantées en limite du parc naturel – à l’intérieur, ce n’était heureusement pas possible –, sont visibles de partout : c’est un problème, car le paysage appartient à tous !
Nous sommes tous favorables au développement des énergies renouvelables. Il en existe qui sont beaucoup moins visibles que les éoliennes. Je ne traite pas des aspects techniques ou financiers, mais simplement de l’impact visuel. Le parc éolien mite nos paysages en raison de son développement anarchique. (M. Stéphane Demilly opine.) Il existait des zones de développement de l’éolien. Aujourd’hui, il s’agit de donner aux préfets la capacité de décider seuls. Ce n’est pas satisfaisant selon moi, comme en témoignent les débats que nous avons ce soir.
M. le président. La parole est à M. Jean Bacci, pour explication de vote.
M. Jean Bacci. Madame la ministre, j’ai bien entendu vos remarques sur les démarches actuellement menées pour déterminer dans quels territoires ces énergies renouvelables seront éventuellement développées.
Permettez-moi d’ajouter un critère de sélection à ceux que vous avez définis. La production d’énergies renouvelables obéit à un impératif de décarbonation. Or le kilowattheure le moins carboné est celui que l’on n’a pas besoin d’utiliser ! (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – Mme Angèle Préville applaudit également.)
Pourquoi ne pas prévoir d’y consacrer des terrains communaux ? Cela donnerait à la collectivité l’opportunité, d’une part, de développer des produits participatifs et, d’autre part, d’engager des politiques de maîtrise de l’énergie sérieuses. Ce serait un critère supplémentaire pour atteindre l’objectif de neutralité totale du kilowattheure.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Di Folco, pour explication de vote.
Mme Catherine Di Folco. Étant porte-parole de Mme Claudine Thomas pour défendre son amendement, je vais le retirer, et ce pour plusieurs raisons.
Premièrement, j’ai été convaincue par les arguments de Mme la rapporteure.
Deuxièmement, M. Blanc défendra l’amendement de M. Courtial, qui va dans le même sens que celui que je vous ai présenté. Je n’ai donc pas de souci à me faire.
Troisièmement, Mme la ministre a parlé de cartographie et de concertation, y compris citoyenne. Je lui rappelle que les conseils municipaux sont composés de citoyens, à savoir les conseillers municipaux. Ces derniers sont aussi en capacité de donner des avis. N’ont-ils pas été élus pour prendre des responsabilités ?
En matière de concertation, n’oublions pas l’accord des communes. Si celles-ci n’approuvent pas un projet, pourquoi installerions-nous en place un parc éolien ?
Je retire donc l’amendement n° 63 rectifié.
M. le président. L’amendement n° 63 rectifié est retiré.
La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.
M. Guillaume Gontard. Je suis étonné de ce débat, je pensais que nous travaillions dans le sens de l’intérêt général. Or une telle proposition va selon moi totalement à l’encontre de l’intérêt général !
Il est en effet question ici de permettre à un élu ou à un conseil municipal de décider pour tous les autres. Une éolienne ne sert pas au village ou à la commune sur laquelle elle est implantée, elle sert à tout le territoire. C’est le principe de base de l’aménagement du territoire, et ne sommes-nous pas l’assemblée des territoires ?
Un orateur a dit qu’une éolienne, ça se voyait. Eh bien oui, produire de l’énergie, cela a un impact ! Citez-moi un seul moyen de production d’énergie qui n’aurait aucun impact, qu’il soit visuel ou environnemental. Cela n’existe pas !
Une centrale nucléaire a un impact pendant 100 000 ans. L’hydroélectricité a un impact. Si une commune avait refusé la construction du barrage de Grand’Maison, à côté de chez moi, qui représente deux centrales nucléaires, on serait mal aujourd’hui !
Mme Sophie Primas. Vous auriez été contre !
M. Guillaume Gontard. Heureusement, donc, que nous avons fait le choix, à l’époque, de l’intérêt général !
Oui, la production d’énergie a un impact, et il est bon de nous poser la question de la sobriété. Mais ce qui est intéressant, avec l’éolienne, c’est qu’il s’agit d’une production d’énergie locale que l’on voit, qui est à côté de chez soi.
M. Stéphane Piednoir. L’EPR aussi !
M. Guillaume Gontard. Je trouve cela plutôt pédagogique !
On nous dit qu’il faut que les élus reprennent la main. Qu’est-ce qui les en empêche ? Dans ma communauté de communes, qui représente 10 000 habitants, nous avons été confrontés à cette problématique. Des opérateurs sont arrivés et nous avons réalisé avec eux un travail pour parvenir à la neutralité de notre territoire. On a de l’hydroélectricité, mais on avait aussi besoin de l’éolien.
En travaillant sur cette question, nous nous sommes dit : « Voilà où nous sommes prêts à installer de l’éolien, de quelle manière et comment. »
Mme Sophie Primas. Donc, vous allez voter !
M. Guillaume Gontard. On nous avait dit que ce document n’avait aucune valeur juridique. Or lorsque l’on élabore un tel texte, qui est voté par l’ensemble de la communauté de communes, les opérateurs nous écoutent. Nous avions également ajouté un critère citoyen.
Il est donc tout à fait possible de procéder ainsi. Il s’agit d’un travail en faveur non pas d’une commune mais de l’intérêt général, et d’un travail de territoire. Voilà ce que nous devrions plutôt proposer, me semble-t-il. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. le président. La parole est à M. Gérard Lahellec, pour explication de vote.
M. Gérard Lahellec. Après avoir suivi le débat et pris connaissance des propositions avancées, nous allons retirer notre amendement. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – Mme Viviane Artigalas applaudit également.)
Mais je tiens aussi à préciser – pardonnez-moi de prolonger le débat – ce que nous voulions défendre en le présentant : si nous voulons réussir en matière d’éolien, alors les populations, les citoyens et leurs représentants devront être en situation de se l’approprier. (M. Michel Canévet opine.) Tel était le sens de notre amendement.
Enfin, je veux ajouter que nous avons failli. Considérer qu’il suffisait de faire des appels à manifestation d’intérêt (AMI) pour régler le problème de l’énergie dans notre pays était une lourde erreur.
Je suis confronté à une situation assez complexe en Bretagne, s’agissant de l’éolien en mer. Il n’est pas du tout certain que les méthodologies imaginées en 2011 dans le cadre du bouquet énergétique permettent d’aborder le contexte d’aujourd’hui. Or nous avons besoin d’énergie !
M. le président. L’amendement n° 822 est retiré.
M. Jean-Michel Houllegatte. Je demande la parole, monsieur le président !
M. le président. Ces deux amendements identiques ayant été retirés, vous ne pouvez plus expliquer votre vote, mon cher collègue.
Nous venons tout de même de passer une petite demi-heure sur deux amendements qui ne sont pas soumis au vote… Mais il n’y a aucun problème ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.) Je précise simplement que je lèverai la séance dans quarante minutes, car nous siégerons demain matin à neuf heures trente.
L’amendement n° 823, présenté par M. Gay, Mme Varaillas et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Avant l’article 22
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 341-3 du code forestier est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« …° A reçu un avis favorable à l’issue d’une délibération des conseils municipaux ou de la collectivité territoriale concernée. Dans le cas où il a pour objet l’installation ou l’agrandissement d’une installation de production d’énergie électrique d’origine éolienne dépassant les seuils établis à l’article R. 311-2 du code de l’énergie. »
La parole est à M. Fabien Gay.
M. Fabien Gay. Il est retiré, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 823 est retiré.
L’amendement n° 860 rectifié, présenté par MM. Courtial et Houpert, Mme Joseph, MM. Belin, Bouloux, Babary, Somon et Panunzi, Mme Puissat, MM. Reichardt et Daubresse, Mmes Gruny et Drexler, M. Grand, Mme Raimond-Pavero, MM. Mouiller, Lefèvre, Chaize, D. Laurent et Chatillon, Mme Lassarade, MM. Vogel et E. Blanc, Mme Bourrat, MM. J.M. Boyer et Bouchet, Mme Deromedi, M. Piednoir, Mme F. Gerbaud, M. B. Fournier, Mme V. Boyer, MM. Bas et Meurant, Mme Garriaud-Maylam, MM. Rapin et Saury, Mme L. Darcos, M. Genet, Mme Deroche, MM. Rietmann, Perrin et Bacci, Mme Canayer, M. Sautarel, Mme Imbert, M. Brisson, Mme Berthet, MM. Longuet et Savary, Mme Belrhiti, M. Le Rudulier, Mmes Lherbier et Pluchet, M. C. Vial, Mme Garnier, MM. Bascher et Charon, Mmes Schalck, Bellurot et Malet, MM. de Nicolaÿ et Cardoux, Mme Gosselin, MM. Cadec et Karoutchi et Mme Dumont, est ainsi libellé :
Avant l’article 22
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de l’environnement est ainsi modifié :
1° L’article L. 515-47 est abrogé ;
2° La section 6 du chapitre unique du titre VIII du livre Ier est complétée par une sous-section ainsi rédigée :
« Sous-section
« Installations de production d’électricité à partir de l’énergie mécanique du vent
« Art. L. 181-28-…. – Sans préjudice des dispositions de l’article L. 181-5, le porteur d’un projet concernant une installation de production d’électricité à partir de l’énergie mécanique du vent adresse au maire de la commune concernée, un mois au moins avant le dépôt de la demande d’autorisation environnementale, un avant-projet dont les éléments sont fixés par le décret en Conseil d’État prévu par l’article L. 181-32 et qui comprend notamment l’étude d’impact prévue au III de l’article L. 122-1.
« Le conseil municipal se prononce par délibération motivée, dans un délai de quinze jours à compter de la réception de l’avant-projet, soit en rendant un avis favorable, qui autorise le dépôt de la demande d’autorisation environnementale, soit en rendant un avis défavorable qui en interdit le dépôt, soit en décidant de soumettre à référendum local le projet d’implantation d’installations de production d’électricité à partir de l’énergie mécanique du vent, dans les conditions prévues aux articles LO 1112-1 à LO 1112-14-2 du code général des collectivités territoriales.
« En l’absence de délibération dans le délai imparti, l’avis est réputé favorable. »
La parole est à M. Étienne Blanc.
M. Étienne Blanc. Le moins que l’on puisse dire, c’est que l’implantation des éoliennes pose un problème majeur d’acceptabilité – cela a été dit et répété.
La raison en est peut-être qu’au moment où l’on a décidé de la stratégie éolienne, on n’a pas suffisamment expliqué qu’il y aurait une pollution lumineuse et sonore, et un impact sur les couloirs de migration des oiseaux. Par ailleurs, dans le calcul de l’amortissement des installations, on n’avait pas suffisamment pris en compte le recyclage des éoliennes en tant que telles, mais aussi celui du béton.
Ce problème d’acceptabilité a motivé le dépôt du présent amendement. De quoi s’agit-il ? L’objectif est de mieux établir la concertation et la consultation.
Premièrement, avant le dépôt de l’autorisation environnementale, le dossier doit être remis à la commune d’implantation et à son maire. Nous avons prévu pour cela un délai d’un mois, afin que le maire puisse consulter le conseil municipal, les associations et les habitants, mais aussi préparer le dossier, poser des questions et recourir éventuellement aux services de l’État pour comprendre tous les tenants et les aboutissants des conséquences de l’installation de l’éolienne.
Deuxièmement, il s’agit bien de donner un droit de veto à la commune. C’est le conseil municipal qui doit délibérer, car qui mieux que lui peut prendre, dans une commune, une décision de cette nature ?
En effet, mes chers collègues, il est tout de même curieux que, lorsqu’il s’agit d’éoliennes, on ne veuille pas voir la commune donner son avis, délibérer et, a fortiori, exercer un droit de veto…
En revanche, lorsqu’il s’agit d’autres équipements – les installations nucléaires, mais aussi bien d’autres –, vous dites à l’envi qu’il faut absolument une démocratie renforcée, qu’il convient de consulter davantage et de mieux associer les conseils municipaux ! (M. Guillaume Gontard opine.)
On ne peut pas être pour la consultation lorsqu’il est question du nucléaire, et contre en matière d’éolien. Il faut être cohérent ! Et la cohérence, c’est de donner le pouvoir au conseil municipal. (M. Philippe Pemezec applaudit.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. Cet amendement répond à une demande très forte des élus locaux, qui sont souvent démunis face à l’implantation de parcs éoliens sur leur territoire, malgré le rôle fondamental qu’ils jouent en matière d’aménagement.
Les maires réclament davantage de visibilité, mais aussi la possibilité de jouer un rôle décisif dans ces projets d’implantation.
Je note que, s’agissant de l’information des communes concernées, un régime est déjà prévu à l’article L. 181-28-2 du code de l’environnement, lequel a d’ailleurs été introduit au Sénat par un amendement au projet de loi d’accélération et de simplification de l’action publique, dite loi ASAP, en 2020. Le périmètre n’est toutefois pas tout à fait identique à celui qui est préconisé dans l’amendement, puisque l’article que je viens de citer prévoit une information de l’ensemble des communes limitrophes.
Nous pourrions retravailler la rédaction en commission mixte paritaire, afin de clarifier le régime d’information des communes.
L’avis est donc favorable sur cet amendement, et je remercie les collègues qui ont retiré leurs amendements au profit de celui-ci.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Barbara Pompili, ministre. L’avis du Gouvernement reste inchangé. Je ne voudrais pas que l’on se perde dans des débats qui ne sont pas à la hauteur de l’enjeu.
Je vous invite à prendre connaissance d’un article très intéressant que j’ai lu dans Les Échos de ce matin. Il s’agit d’un entretien avec le président de la Commission de régulation de l’énergie (CRE), lequel connaît très bien ces sujets et pose les débats simplement. Permettez-moi de citer ses propos.
« À l’horizon 2050, dit-il – car une politique énergétique, c’est long ! –, tous nos réacteurs se seront arrêtés et nous ne sommes pas en capacité de construire 62 gigawatts, que ce soit pour des raisons industrielles mais aussi d’acceptabilité. » J’ajoute que le droit ne prévoit pas de moratoire des conseils municipaux sur les centrales nucléaires…
Il poursuit : « Sur le plan économique, les énergies renouvelables atteignent aussi le même niveau de prix que l’électricité nucléaire historique. On aurait tort de s’en priver. Il nous faut donc doucement baisser la part du nucléaire et trouver des substituts.
« Le premier substitut au nucléaire, c’est la maîtrise de la consommation, grâce à l’efficacité énergétique croissante. Mais attention, au global la consommation d’électricité va augmenter car nous devons décarboner le transport et le chauffage. Le deuxième, c’est la flexibilité des réseaux […]. »
L’éolien est incontournable parce que « toutes les énergies renouvelables ne se valent pas. L’hydrogène est aujourd’hui hors de prix, l’hydrolien également, et on ne disposera pas d’assez de gaz vert pour décarboner le gaz et produire de l’électricité. Il nous faut donc faire du solaire et de l’éolien. Le solaire est bon marché, mais prend beaucoup de place : pour construire l’équivalent d’un réacteur nucléaire EPR, il faudrait disposer des panneaux photovoltaïques sur l’équivalent de 7 500 terrains de football ! Nous allons continuer à chercher de l’espace et poursuivre la recherche pour augmenter la productivité, mais le solaire seul ne suffira pas. Il nous faut donc absolument développer l’éolien.
« La France a cinq fois moins d’éoliennes au kilomètre carré que l’Allemagne, et 3,3 fois moins que le Danemark. Il y a encore de la place. Il faut que chacun fasse un effort. »
Je vous invite à lire la suite de cet entretien, qui est très intéressant.
Nous avons des objectifs d’intérêt national, qui sont délimités dans la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), pour laquelle il existe une remise à jour.
L’un d’entre vous a dit précédemment que l’on avait pris des décisions il y a déjà un certain temps et que, depuis, les choses avaient évolué. Voilà pourquoi cette remise à jour est nécessaire.
Les parlementaires ont obtenu – nous nous étions battus à l’Assemblée nationale pour cela – que les remises à jour soient faites au niveau du Parlement et que celui-ci ait le droit de voter la PPE.
Dès lors que vous, parlementaires, votez la PPE, vous devez avoir à cœur de voir appliquer ce que vous adoptez, car cela me paraît être la base. La PPE doit être mise en œuvre dans les territoires.
Il ne faut donc pas que, sur lesdits territoires, on prévoie des verrous qui empêcheront d’appliquer les politiques votées par la représentation nationale. Il convient, par conséquent, de mettre en place une concertation.
Il faut aussi prévoir une cartographie, qui est la reprise, souhaitée par tout le monde, des zones de développement éolien. C’est ce qu’il faut faire avant la concertation.
Chaque fois qu’on ajoute un verrou, on met une pierre dans notre jardin. Voilà pourquoi je suis défavorable à l’amendement.
M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.
M. Ronan Dantec. Comme l’a dit Mme la ministre, même en imaginant que l’EPR fonctionne à un prix raisonnable, ce qui est très loin d’être démontré, on ne pourra pas réussir la transition énergétique et le développement de la mobilité électrique sans l’éolien terrestre. Ce n’est pas possible, comme le montrent les scénarios de RTE présentés la semaine dernière.
M. Stéphane Piednoir. Un des scénarios !
M. Ronan Dantec. Pas du tout ! À un moment donné, il faut être un peu sérieux, cesser d’invoquer de faux arguments et se pencher sur les chiffres.
Mme Sophie Primas. Vous n’avez pas le monopole du sérieux !
M. Ronan Dantec. Aucun scénario de RTE ne fait l’impasse sur l’éolien terrestre !
En participant à des oppositions qui sont réelles et que personne ne conteste, vous préparez le terrain pour que l’on achète notre électricité ailleurs ! Le câble irlandais est d’ailleurs en train d’arriver.
Regardez, madame Primas, ce qu’a fait Engie en vendant Suez : elle avait besoin de ces milliards pour investir massivement dans les énergies renouvelables, et en premier lieu dans l’éolien. Et s’il n’est pas possible de faire de l’éolien en France, cela se fera ailleurs…
Votre proposition me semble totalement décliniste. Elle correspond à un pays qui n’assume plus ses stratégies, qui tourne le dos à son histoire gaulliste (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.) et qui est incapable d’avoir une politique nationale, avec des élus totalement perdus qui vont dans le sens du vent… (Manifestations agacées sur les travées du groupe Les Républicains.) Oui, je le dis !
Je crois, pour ma part, qu’un pays a besoin d’avoir une stratégie énergétique ; si l’on vous suivait, il n’y en aurait plus.
Dernier point, votre amendement est tout même sacrément dangereux ! Une commune qui sera preneuse d’un projet après avoir fait ses calculs en termes d’imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux (IFER) et de retombées décidera pour tout le périmètre alentour : croyez-vous que l’on crée de la cohésion territoriale avec de telles logiques ? C’est impossible !
Nous parlerons plus tard du référendum, lequel ne constitue pas la bonne maille. Je rappelle que, parmi les personnes les plus concernées, si l’on resserre le périmètre sur Notre-Dame-des-Landes, c’est le non qui l’a emporté.
M. le président. Plusieurs orateurs sont encore inscrits. Je ne suis pas certain que nous puissions parvenir à l’article 22 avant la levée de la séance. Mais il n’y a, là encore, aucun problème ! (Sourires.)
La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.
M. Daniel Salmon. Je ne suis pas un admirateur béat des éoliennes. Effectivement, chacun peut avoir son avis sur le paysage.
Il est indéniable qu’une éolienne ne passe pas inaperçue, surtout dans un paysage très ouvert d’openfield. Dans le bocage, en revanche, cela se voit moins.
Vous nous reprochez notre incohérence. Or nous avons une cohérence et des objectifs : nous voulons nous passer du fossile et du fissile, et nous disposons de moyens pour y parvenir dès 2050 : des programmes d’énergies renouvelables. C’est possible, ce ne sont pas des élucubrations ! Il est vrai qu’il faut s’en donner les moyens. À cet égard, l’éolienne est un moyen responsable de produire de l’énergie.
J’ai entendu parler de recyclage. C’est amusant, et je suis content de vous entendre aborder ce sujet… Mais peu d’entre vous se sont posé des questions sur le recyclage des déchets nucléaires ! (Protestations sur des travées du groupe Les Républicains.)
J’en viens au sujet des communes. Si, chaque fois que l’on construit une rocade ou une 4 voies, chaque commune était en mesure de refuser l’ouvrage sur son territoire, la continuité ne serait pas exceptionnelle en France ! Je pense donc que la cohérence est complètement de notre côté.
À un moment donné, il faut regarder l’avenir en face.
En huit mois, une éolienne a racheté sa dette énergétique.
Mme Sophie Primas. Au tarif de rachat actuel !
M. Daniel Salmon. On ne peut en dire autant d’aucune autre source d’énergie !
Par ailleurs, une éolienne se monte en quelques jours, de même qu’elle pourra se démonter dans le même laps de temps, sans qu’il en reste rien. C’est une question de responsabilité pour les générations futures, pour nos enfants.
Admettons que la présence d’une éolienne dans le paysage nous gêne. Il faut donc se demander si l’on peut se passer de ces installations. Demain, on trouvera peut-être d’autres moyens, sobres, de produire de l’énergie, qui seront le résultat de découvertes scientifiques. Si tel était le cas, alors on démonterait les éoliennes, dont le démantèlement ne coûte rien parce qu’elles sont fabriquées en grande partie avec des matériaux très nobles, comme le cuivre – un matériau qui, à lui seul, paye ce démantèlement.
On ne peut pas dire la même chose du nucléaire, et j’assume ce propos. Je vous appelle donc à un peu de cohérence.
Je l’affirme encore une fois, la cohérence est de notre côté !
M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Houllegatte, pour explication de vote.
M. Jean-Michel Houllegatte. On s’aperçoit, au travers de ce débat, qu’il n’y a pas de système énergétique parfait, et que chaque système comporte des contraintes ; il nous faut l’admettre. Au vu de ces contraintes, nous devrons trouver le chemin nous permettant de satisfaire nos besoins et les objectifs de la PPE.
Pour ce qui concerne l’éolien terrestre, il faut savoir qu’il y a sur le territoire actuellement entre 6 500 et 7 000 éoliennes, et nous devrons multiplier ce nombre par deux. Pour cela, il est nécessaire de trouver des sites à même d’accueillir ces nouvelles installations.
Il faut prendre garde à ne pas faire de confusion : entre la puissance installée d’une éolienne terrestre et son rendement, il y a un écart. Ce rendement est de 20 %, car le vent ne souffle pas toujours. Pour l’éolien offshore, en revanche, on atteindra des rendements de l’ordre de 67 %. C’est une véritable différence.
Quelle est la bonne méthode ? Avant d’y venir, j’ouvre une parenthèse : le scénario 100 % énergies renouvelables élaboré par RTE n’est pas le scénario idéal. Il comporte en effet d’énormes contraintes en termes d’intermittence.
Pour résoudre le problème de l’intermittence, nous devrons – il faut le savoir – rénover complètement le réseau de distribution et installer des centaines de kilomètres de lignes à haute tension afin d’équilibrer les réseaux.
La bonne méthode, c’est en effet, madame la ministre – et cela se dessine au travers de l’examen du présent projet de loi –, d’établir une cartographie, avec des objectifs régionaux.
Les préfets ont reçu pour mission d’identifier des sites. Pour ma part, je suis tout à fait satisfait de ce qui se passe en matière d’éolien offshore : on essaie de trouver un consensus autour des zones de moindre contrainte. Par le débat public, la concertation, le dialogue avec les maires et l’ensemble des acteurs, on parvient ainsi à trouver les meilleures solutions.
Je partage les propos tenus précédemment : il faut être extrêmement vigilant, laisser la planification se faire et éviter que le secteur privé n’impose ses propres sites, comme il le fait souvent lors de concertations quelque peu malsaines avec les maires.
M. le président. La parole est à M. Stéphane Piednoir, pour explication de vote.
M. Stéphane Piednoir. Je sais qu’il est tard, monsieur le président, et que vous nous avez invités à la sobriété en termes de prise de parole, mais il y a des choses que l’on ne peut pas laisser passer sans réagir un minimum.
Mes chers collègues, c’est un débat à front renversé !
On entend invoquer, à propos de la politique énergétique de notre pays, le général de Gaulle, qui a été pionnier pour le nucléaire, alors que l’on a laissé pendant des années des lobbies antinucléaires démanteler l’ensemble de cette filière !
On nous explique que la Convention citoyenne pour le climat, ce tirage au sort de gens qui n’ont aucune compétence à la base – ce n’est pas moi qui le dis, c’était écrit partout –, c’est formidable… On promeut la démocratie participative, mais, en revanche, la démocratie représentative, cela n’existe pas !
De quoi parlons-nous aujourd’hui ? De la possibilité donnée aux conseils municipaux de se saisir d’un sujet qui concerne leur territoire.
Mme Catherine Di Folco. Eh oui !
M. Stéphane Piednoir. Vous nous expliquez, monsieur Dantec, qu’aucun maire de France ne serait capable de convaincre ses conseillers municipaux et ses concitoyens du bien-fondé d’un projet éolien sur sa commune. (M. Ronan Dantec le conteste.)
C’est inquiétant ! Cela signifie qu’il se passe des choses extrêmement puissantes dans notre pays…
Vous masquez cette réalité. Pour ma part, je préfère une consultation sur cette base, plutôt qu’une autre avec des acharnés qui bloquent les projets, comme celui de Notre-Dame-des-Landes. (Bravo ! sur des travées du groupe Les Républicains. – Rires sur les travées du groupe GEST. – M. Ronan Dantec mime une brasse coulée.)
M. le président. Mes chers collègues, on se calme ! Il ne sert à rien de vous invectiver ; ce n’est ni mieux ni pire d’un côté ou de l’autre… (Sourires sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
La parole est à Mme Sophie Primas, pour explication de vote.
Mme Sophie Primas. Nous avons un débat quelque peu surréaliste ! (M. Ronan Dantec s’exclame.) Je veux essayer de calmer les choses…
Nous ne sommes pas des anti-éoliens, et j’espère que vous n’êtes pas des antinucléaires. (Mais si ! sur les travées du groupe GEST.) Il faut un équilibre.
Mme Françoise Gatel. Très bien !
Mme Sophie Primas. Dans la PPE, il y a de tout : 50 % d’énergie nucléaire, et d’autres énergies alternatives bas-carbone et renouvelables.
Ces amendements, dont nous débattons depuis une heure, visent à dire qu’il y a un problème d’implantation ; on peut tomber d’accord sur ce point.
Dans le département des Yvelines – disant cela, je me tourne vers ma collègue Toine Bourrat –, sur le territoire de la « petite Beauce », des éoliennes ont poussé sans que personne soit au courant. Se pose donc un problème de programmation et de concertation, ce qui place les élus locaux en porte-à-faux.
Si une carte devait être élaborée, j’aimerais qu’elle le soit avec les élus locaux, plutôt que directement par les préfets : ceux-ci doivent prendre l’attache de ces élus. Peut-être la bonne maille est-elle, à cet égard, celle des schémas de cohérence territoriale (SCoT) ou des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), et non pas nécessairement celle de la commune.
Je souhaite que les maires, lesquels sont volontaires pour élaborer des projets parfois difficiles dans leur commune, puissent travailler sur un schéma d’implantation, en concertation avec la population. C’est ainsi que l’on parviendra à installer des éoliennes en évitant les recours.
Aujourd’hui, en effet, des recours sont introduits dans tous les sens et on n’avance pas !
Je ne suis pas choquée par la participation représentative s’il s’agit de donner mandat aux élus locaux de travailler avec l’État, avec le Gouvernement, dans le cadre d’une trajectoire, et avec leur population. Ils ont été élus pour cela ; ils en ont la responsabilité et le devoir.
Voilà quel est le sens de nos amendements. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.
M. Fabien Gay. Ce débat est extrêmement intéressant, mais j’ai un peu de mal à m’y inscrire. En effet, plusieurs questions sont soulevées, mais beaucoup sont évitées.
Je ne suis pas intervenu sur la question des éoliennes. Le principal problème, selon moi, c’est que nous laissons depuis un bon moment la part belle au privé pour décider des implantations, et ce non pas pour alimenter le réseau électrique et répondre aux besoins des usagers mais dans l’unique objectif de faire du profit et d’obtenir la plus grande rentabilité.
Si l’intérêt général seul était en jeu, cela me conviendrait très bien. Mais, pour cela, il faudrait une maîtrise publique et de l’aménagement du territoire – j’ai même entendu le mot « planification » –, un projet dans lequel je m’inscris.
La force du modèle français, c’était cela pendant très longtemps. Ce n’est pas un hasard si l’on a évoqué le nom du général de Gaulle… Une entreprise publique, ayant un monopole public, construisait des installations de production – nucléaire, géothermie, barrages hydroélectriques, énergies renouvelables – en complémentarité, pour répondre aux besoins des usagers.
Or on a décidé de confier les énergies renouvelables au privé, qui implante là où il veut et là où c’est le plus rentable pour lui. J’y insiste, c’est cela, le problème !
Par ailleurs – je souhaitais prendre la parole sur l’article 22, j’interviens maintenant à la place –, nous allons avoir un grand débat sur les énergies renouvelables et le nucléaire…
Pardonnez-moi, madame la ministre, mais le projet de loi évite les véritables sujets.
Lors du débat sur l’agriculture et l’alimentation, nous n’avons jamais évoqué les accords de libre-échange. Et nous aurons un grand débat sur l’énergie sans parler du projet de « grand EDF » ! Je sais bien que ce dossier relève non plus de votre ministère mais de celui de Bruno Le Maire ; celui-ci annonce d’ailleurs aux syndicats qu’il faut aller vite, avant que le président Macron ne prenne la présidence de l’Union européenne !
Tout ce débat reviendra aux mois d’octobre et novembre. Nous saurons alors si vous allez démanteler et privatiser une partie des activités d’EDF, notamment les énergies renouvelables et Enedis.
Enfin, je suis favorable au développement des énergies renouvelables. Pour autant, le scénario 100 % énergies renouvelables de RTE pose de nombreuses questions. Il nécessitera de gros investissements dans la distribution et l’interconnexion des réseaux, et il faudra aller encore plus loin.
Or les énergies renouvelables ne sont aujourd’hui pas pilotables. Il sera donc nécessaire de consacrer beaucoup d’argent à la recherche et au développement, notamment en matière d’hydrogène et de stockage de l’électricité.
M. le président. La parole est à M. Patrick Chaize, pour explication de vote.
M. Patrick Chaize. Je souhaite réagir aux propos qui ont été tenus et faire un clin d’œil.
Le débat que nous avons est stérile car chacun campe sur ses positions et défend ses arguments sans forcément écouter les autres.
Il nous manque aujourd’hui, pour avoir une discussion plus sereine, une analyse précise. Je ferai un parallèle – d’où le clin d’œil – avec les travaux qui ont été faits sur le numérique, notamment sur son empreinte environnementale.
Je pense très sincèrement que nous aurions tous à gagner à ce que des travaux soient engagés au Sénat, par nos commissions, sur l’empreinte environnementale de toute la chaîne des énergies renouvelables.
M. Ronan Dantec. Et du nucléaire ?
M. Patrick Chaize. Et pourquoi pas du nucléaire, en effet. (M. Ronan Dantec et Mme Kristina Pluchet applaudissent.)
Ces travaux éclaireraient utilement nos débats et nous permettraient de travailler plus sereinement.
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.
M. Guillaume Gontard. Mes chers collègues, la question n’est pas : êtes-vous pour ou contre le nucléaire, l’éolien ou quoi que ce soit d’autre ? Il s’agit d’être réaliste : on voit bien, d’une part, que le nucléaire coûte beaucoup trop cher et, d’autre part, que l’éolien est un moyen d’atteindre les objectifs de la PPE.
En outre, ces débats m’étonnent un peu : j’ai l’impression que la droite de cet hémicycle s’est ralliée à la décroissance ! (Sourires sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE.) Cela m’inquiète. Je me dis : que se passe-t-il ? Où en sommes-nous ? (Nouveaux sourires.)
Nous débattrons bientôt du moteur à hydrogène et des véhicules électriques : nous leur consacrerons certainement de longues discussions. Quel que soit le domaine, il faut de l’énergie, notamment de l’électricité. Il faudra donc réfléchir aux modes de production d’électricité !
Si l’on regarde avec réalisme le coût de ces différents modes de production,…
Mme Sophie Primas. On garde le nucléaire !
M. Guillaume Gontard. … on voit bien que l’éolien a toute sa place.
Fabien Gay disait que l’on était en train de faire la part belle au privé : évidemment, et c’est bien le problème !
C’est exactement ce que sont en train de faire les auteurs des amendements dont nous discutons. Si une seule commune a la main, que feront les opérateurs ? Ils « dealeront » avec les communes et feront jouer la concurrence entre elles.
C’est précisément ce qui s’est passé là où l’on rencontre des problèmes, là où des champs éoliens n’ont pas été gérés. Des opérateurs sont allés voir certains conseils municipaux en leur disant : « Vos terrains, je vous les achète tant » et en leur promettant monts et merveilles. Voilà le résultat, et votre proposition est encore pire !
La solution, c’est bien sûr de reprendre la main pour aller vers un véritable service public de l’énergie, car une régulation est indispensable. C’est bien sûr d’assurer une planification en élaborant une cartographie. La PPE est très claire : traduisons-la sur une carte, que l’on pourra ensuite développer.
On a évoqué les schémas de cohérence territoriale (SCoT) : à mon sens, il peut être particulièrement intéressant de réfléchir à cette échelle pour répartir les différents modes de production d’énergie. Dès lors, on pourra mener une véritable concertation ; mais l’impact d’un champ éolien va bien au-delà d’une seule commune ! (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – M. Jean-Michel Houllegatte applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. Beaucoup de choses intéressantes ont été dites et je rejoins un certain nombre de réflexions développées. Cela étant, je tiens à réagir aux propos du dernier orateur, Guillaume Gontard.
Mon cher collègue, vous suggérez que certains, à la droite de l’hémicycle, seraient partisans de la décroissance. Je ne peux pas vous laisser dire cela !
M. Guy Benarroche. Ce n’est pas une insulte !
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. Cette mise au point étant faite, je reviens à l’amendement n° 860 rectifié en déplorant la longueur excessive de ce débat.
En réalité, vos propos trahissent une grande méfiance envers ceux que vous êtes censé représenter ! C’est assez étonnant : nous proposons tout simplement de considérer les élus locaux comme parties prenantes de la décision. Il ne s’agit en aucun cas d’installer des éoliennes au nord, au sud, à l’est ou à l’ouest, mais de donner un peu plus de pouvoir à ces élus : une nouvelle fois, il faut recentrer le débat.
Je souhaite que l’on puisse voter cet amendement le plus rapidement possible. Nous ne manquerons pas d’occasions de poursuivre les discussions entamées ; pour ma part, je souscris totalement à la proposition de notre collègue Patrick Chaize.
M. le président. En effet, madame la rapporteure, nous aurons d’autres occasions : il reste tout de même un peu plus de 1 200 amendements ! (Sourires.)
Je mets aux voix l’amendement n° 860 rectifié.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l’article 22.
L’amendement n° 1519 rectifié, présenté par MM. Tissot, Montaugé, J. Bigot et Kanner, Mmes Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla et Redon-Sarrazy, Mme Bonnefoy, MM. Dagbert et Devinaz, Mme M. Filleul, MM. Gillé, Houllegatte et Jacquin, Mme Préville et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Avant l’article 22
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 222-1 du code de l’énergie, il est inséré un article L. 222-1-… ainsi rédigé :
« Art. L. 222-1-…. – Les schémas de cohérence territoriale ou, à défaut, les plans locaux d’urbanisme intercommunaux, comportent un document annexé prescriptif et opposable fixant les zones d’implantation potentielle des installations de production d’électricité par l’énergie mécanique du vent en fonction de leur potentiel éolien, des possibilités de raccordement aux réseaux électriques, de la protection des paysages, des monuments historiques et des sites remarquables et protégés et des objectifs d’aménagement et de développement économique définis par les collectivités locales. Il met en œuvre une juste répartition entre les collectivités locales concernées, notamment au regard des installations existantes.
« Ce document annexé est compatible avec les schémas régionaux d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires ou, en Île-de-France, avec le schéma régional du climat, de l’air et de l’énergie, révisés en application du V de l’article L. 222-1 et dont il assure la déclinaison territorialisée. »
La parole est à Mme Viviane Artigalas.
Mme Viviane Artigalas. Les dispositions de cet amendement me permettront peut-être de synthétiser ce qui vient d’être dit sur certaines travées.
Nous proposons d’annexer au SCoT ou, à défaut, au plan local d’urbanisme intercommunal (PLUi) un document traduisant les objectifs quantitatifs régionaux de production d’énergie éolienne de manière territorialisée. Bien sûr, ce document devrait être compatible avec le schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (Sraddet).
L’objectif est de favoriser un développement harmonieux de l’éolien par une juste répartition de cet effort de production entre les territoires, dans un esprit de dialogue avec la population et les élus locaux.
Mes chers collègues, dans nos territoires respectifs, nous avons tous à l’esprit le cas d’un parc éolien dont l’installation a suscité une vive polémique ou qui, aujourd’hui encore, provoque des nuisances pour les populations et les collectivités.
J’insiste sur l’idée de planification ou de cartographie – peu importe le nom qu’on lui donne. Cet effort permettrait d’éviter les excès dans certains territoires et, ainsi, de poursuivre le développement territorialisé de l’éolien de manière réfléchie et acceptable par tous.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. Telles qu’elles sont rédigées, ces dispositions peuvent susciter quelques interrogations. Le document fixant les zones d’implantation est censé être « prescriptif et opposable ». De plus, il doit déterminer la « juste répartition » de ces implantations « entre les collectivités locales ». Tout cela me semble un peu ambigu.
Pour cette raison, j’émets un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 567 rectifié bis, présenté par Mme C. Fournier, M. Moga, Mmes Létard, Morin-Desailly, Gatel et Billon, MM. Mizzon, Le Nay et Laugier, Mmes de La Provôté, Jacquemet, Sollogoub, Vérien, Vermeillet et Saint-Pé et M. Prince, est ainsi libellé :
Avant l’article 22
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 222-1 du code de l’environnement, il est inséré un article L. 222-1-… ainsi rédigé :
« Art. L. 222-1-…. – Les zones de développement de l’éolien sont arrêtées par le représentant de l’État dans le département en fonction :
« 1° Des délimitations territoriales inscrites au schéma régional éolien ;
« 2° De leur potentiel éolien ;
« 3° Des possibilités de raccordement aux réseaux électriques ;
« 4° De la possibilité pour les projets à venir de préserver la sécurité publique, les paysages, la biodiversité, les monuments historiques et les sites remarquables et protégés ainsi que le patrimoine archéologique.
« Elles sont proposées, dans le respect du schéma régional éolien, par le ou les établissements publics de coopération intercommunale ayant la compétence en matière d’urbanisme dont tout ou partie du territoire est compris dans le périmètre proposé, après avis de la ou des communes membres dont tout ou partie du territoire est compris dans le périmètre proposé.
« La proposition de zones de développement de l’éolien en précise le périmètre et définit la hauteur maximale des installations produisant de l’électricité à partir de l’énergie mécanique du vent.
« Lorsque le territoire concerné par la zone de développement éolien est couvert par un plan local d’urbanisme ou un plan local d’urbanisme intercommunal, la zone de développement éolien, une fois approuvée, est annexée au plan local d’urbanisme ou au plan local d’urbanisme intercommunal. »
La parole est à M. Jean-Pierre Moga.
M. Jean-Pierre Moga. Cet amendement de notre collègue Catherine Fournier tend à rétablir les zones de développement de l’éolien (ZDE), lesquelles ont été supprimées par la loi du 15 avril 2013, dite loi Brottes.
Cet outil permettait aux collectivités territoriales et aux élus de réfléchir pour planifier le développement éolien dans leur territoire de manière indépendante, en lien avec les services de l’État. Ce faisant, il permettait d’engager une véritable planification tout en assurant à la fois visibilité et prévisibilité aux populations et aux porteurs de projet.
Nous proposons par ailleurs de retenir le périmètre de l’intercommunalité, compte tenu des transferts des compétences liées à l’urbanisme opérés à cet échelon.
Nul ne pourra le nier : compte tenu de la taille des projets, un parc éolien doit se concevoir à l’échelle intercommunale. Ainsi, on évitera qu’une commune n’implante un champ éolien en périphérie de son territoire, en faisant subir un grand impact aux habitants de communes voisines.
Mes chers collègues, au terme de ces longs débats, de telles dispositions pourraient faire l’unanimité !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. Monsieur Moga, je vais vous décevoir !
Cette mesure ne m’inspire aucune opposition de principe : on peut tout à fait envisager de donner un rôle moteur aux collectivités territoriales pour la planification des implantations d’éoliennes.
Toutefois, je m’interroge sur l’articulation de ce dispositif avec le droit existant, notamment avec le schéma régional éolien (SRE). D’ailleurs, si la loi visant à préparer la transition vers un système énergétique sobre a supprimé les ZDE en 2013, c’était pour éviter toute redondance avec ce schéma.
Aussi, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Barbara Pompili, ministre. Monsieur le sénateur, si les ZDE ont été supprimées, c’est pour une bonne raison : elles présentaient un caractère hybride, car elles traitaient à la fois d’aspects énergétiques et d’aspects environnementaux, et de nombreux arrêts préfectoraux de création de zones de développement de l’éolien terrestre ont été annulés par les tribunaux administratifs. Ce dispositif nous exposait à une grande insécurité juridique.
Bref, les ZDE ne fonctionnaient pas bien : le principe était bon, mais l’outil n’était pas pertinent juridiquement.
Aussi, nous avons repris la réflexion. Avec l’article 22 et avec les différentes mesures que j’ai détaillées précédemment, nous proposons précisément de conserver l’esprit de ce dispositif, qui me semble digne d’intérêt, tout en élaborant un outil juridique plus solide et plus adapté.
C’est pour cette raison que je suis défavorable à votre amendement. L’enjeu, c’est simplement de trouver la meilleure méthode juridique pour atteindre l’objectif que vous défendez !
M. le président. Monsieur Moga, l’amendement n° 567 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Jean-Pierre Moga. Oui, je le maintiens, monsieur le président !
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 567 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 821, présenté par M. Gay, Mme Varaillas et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Avant l’article 22
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le titre Ier du livre III du code de l’énergie est complété par un chapitre ainsi rédigé :
« Chapitre …
« Dispositions particulières à l’électricité produite par l’énergie mécanique du vent
« Art. L.… – Dans un délai de six mois à compter de la publication ou de la révision de la programmation pluriannuelle de l’énergie, un arrêté conjoint des ministres chargés de l’énergie et des collectivités locales fixe les objectifs de production d’électricité par l’énergie mécanique du vent assignés à chaque région à l’issue de la deuxième période de cinq ans, au sens de l’article L. 141-3, pour atteindre les objectifs définis en application du 3° de l’article L. 141-2.
« Cet arrêté, pris après avis conforme de la commission de régulation de l’énergie, tient compte :
« 1° Du potentiel éolien au regard de la cartographie des vents, du potentiel maritime et des possibilités de raccordement aux réseaux électriques ;
« 2° De la protection des paysages, des monuments historiques et des sites remarquables et protégés ;
« 3° De la capacité contributive de chaque région au regard des capacités de production existantes et des règles d’implantation définies en application de l’article L. 515-44 et L. 515-45 du code de l’environnement.
« Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’application du présent article. »
La parole est à M. Fabien Gay.
M. Fabien Gay. Je retire cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 821 est retiré.
Mes chers collègues, nous avons examiné 199 amendements au cours de la journée ; il en reste 1 219.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
6
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, vendredi 18 juin 2021 :
À neuf heures trente, quatorze heures trente et le soir :
Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets (texte de la commission n° 667, 2020-2021).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée le vendredi 18 juin 2021, à zéro heure vingt-cinq.)
nomination de membres d’une commission mixte paritaire
La liste des candidats désignés par la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées pour faire partie de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de programmation relatif au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales a été publiée conformément à l’article 8 quater du règlement.
Aucune opposition ne s’étant manifestée dans le délai d’une heure prévu par l’article 8 quater du règlement, cette liste est ratifiée. Les représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire sont :
Titulaires : MM. Christian Cambon, Hugues Saury, Rachid Temal, Pascal Allizard, Jacques Le Nay, Mme Marie-Arlette Carlotti et M. Richard Yung ;
Suppléants : MM. Bruno Sido, Édouard Courtial, Jean-Pierre Grand, Olivier Cadic, Mme Hélène Conway-Mouret, MM. Jean-Claude Requier et Pierre Laurent.
nomination de membres d’une mission d’information
Aucune opposition ne s’étant manifestée dans le délai d’une heure prévu par l’article 8 du règlement, la liste des candidatures préalablement publiée est ratifiée.
Mission d’information sur le thème « Uberisation de la société : quel impact des plateformes numériques sur les métiers et l’emploi ? »
M. Stéphane Artano, Mmes Martine Berthet, Anne Chain-Larché, MM. Michel Canévet, Emmanuel Capus Patrick Chaize, Pierre Cuypers, Mmes Jacky Deromedi, Chantal Deseyne, M. Jean-Luc Fichet, Mme Pascale Gruny, M. Ludovic Haye, Mme Christine Herzog, M. Olivier Jacquin, Mme Monique Lubin, MM. Jean-Pierre Moga, Philippe Mouiller, Mmes Émilienne Poumirol, Frédérique Puissat, MM. Bruno Rojouan, Pascal Savoldelli, Mmes Sophie Taillé-Polian et Dominique Vérien.
Pour la Directrice des comptes rendus du Sénat,
le Chef de publication
ÉTIENNE BOULENGER