Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État. Je partage l’argument qui vient d’être développé : l’outil est certes efficace – en Île-de-France, par exemple, il est déjà largement mobilisé –, mais la systématisation du classement ne me semble pas appropriée. Il faut plutôt faire selon les territoires, selon les espaces, selon la superficie des forêts. Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.
M. le président. Monsieur Labbé, l’amendement n° 1888 rectifié est-il maintenu ?
M. Joël Labbé. J’ai eu un jour la chance de faire un voyage d’études à Stockholm pour travailler sur la question des sociotopes, où peuvent cohabiter, précisément, l’humain et la biodiversité.
À Stockholm, toutes les forêts qui entourent la ville sont hyperprotégées depuis plus de cinquante ans. Elles jouent un rôle absolument magnifique, et des percées en ville font qu’aucun habitant ne vit à moins de deux cents mètres d’un couloir l’emmenant en forêt.
M. Philippe Pemezec. Eh bien, allez donc y vivre !
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 1427 rectifié est présenté par MM. Montaugé et Gillé, Mme M. Filleul, MM. J. Bigot et Kanner, Mme Bonnefoy, MM. Dagbert, Devinaz, Houllegatte et Jacquin, Mmes Préville, Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy et Tissot, Mme G. Jourda et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 1887 est présenté par MM. Labbé, Dantec, Salmon, Fernique et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 19 bis D
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À partir du 1er janvier 2022, les exportations de grumes non transformées sont interdites en dehors de l’Union européenne dans des conditions définies par décret.
La parole est à Mme Gisèle Jourda, pour présenter l’amendement n° 1427 rectifié.
Mme Gisèle Jourda. La rédaction actuelle de l’alinéa 5 de l’article 19 bis EB, introduit par la rapportrice pour avis et que nous examinerons dans quelques instants, prévoit que la politique forestière favorise la mobilisation des dispositifs incitatifs ou contractuels visant à ce que la transformation du bois d’œuvre se fasse sur le territoire de l’Union européenne.
Si nous partageons cet objectif, nous le considérons comme un minimum ; la situation actuelle exige une décision plus radicale. Il faut en effet rappeler qu’actuellement 17,5 % de la récolte de chêne français est exportée en Chine du fait du moindre coût de la main-d’œuvre dans ce pays.
À l’heure où nous nous accordons tous sur la nécessité de relocaliser nos productions comme l’ont fait d’autres pays comme l’Allemagne, la Bulgarie, la Croatie et la Hongrie, le présent amendement vise à mettre un terme à cette pratique afin notamment de garantir l’avenir des petites et moyennes scieries ainsi qu’un débouché solide pour le bois français.
L’adoption de cet amendement rendrait évidemment inopérant le dispositif prévu à l’article 19 bis EB, qui est moins-disant.
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour présenter l’amendement n° 1887.
M. Joël Labbé. Je précise, en complément de ce que vient de dire ma collègue, que le travail sur la grume génère des coproduits, qui représentent environ 50 % de la masse de la grume. Ces coproduits constituent un gisement de bois d’industrie et de bois énergie qui, contrairement à la récolte directe de bois en forêt, ne diminue pas le puits de carbone forestier.
Transformer les grumes en France, c’est donc conserver ces coproduits sur le territoire et contribuer, via leur valorisation, à diminuer l’empreinte carbone de la France. La transformation des grumes sur le territoire national est en outre créatrice d’emplois – on compte, par exemple, 26 000 emplois pour la seule essence du chêne.
L’exportation de bois brut induit par ailleurs une perte cumulée de valeur tout au long de la chaîne : TVA, cotisations, fiscalité locale.
Le départ des grumes hors Union européenne, qui est actuellement massivement pratiqué, est donc pénalisant pour les industries hexagonales, notamment pour les petites et moyennes, qui mériteraient de se développer mais sont privées de matières premières à transformer.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour avis. Nous partageons évidemment cette inquiétude. L’exportation massive de grumes non transformées menace en effet nos forêts, mais aussi l’approvisionnement durable de nos entreprises. Elle alourdit de surcroît notre bilan carbone, obérant la stratégie nationale bas-carbone.
La difficulté est de proposer un dispositif qui soit compatible avec le droit européen – à cette condition seulement pourra-t-il prospérer – et qui ne fragilise pas les dispositifs que nous avons mis en place jusqu’à présent, notamment le label « Transformation UE » pour les forêts publiques, communales et domaniales. Quoique leur succès soit modéré, ces dispositifs fonctionnent. Il ne faudrait pas non plus porter préjudice à un certain nombre de démarches qui ne manqueront pas d’être engagées au niveau européen dans quelques mois, quand la France assurera la présidence de l’Union européenne – Mme la secrétaire d’État nous en parlera certainement.
Un nouvel outil vous sera proposé d’ici à quelques minutes ; nous y avons travaillé en concertation avec le Gouvernement. Vous le voyez, ce dossier est en construction, et je crains qu’une position trop frontale au regard du droit européen ne nous soit en définitive préjudiciable.
D’autres pistes seront explorées : quotas d’exportation, critères phytosanitaires, critères de réciprocité – comme vous l’avez très justement dit, ma chère collègue, ces mêmes pays qui achètent aujourd’hui massivement nos bois sont ceux qui ont fermé leurs frontières. Pour nous permettre d’atteindre notre objectif d’une meilleure maîtrise, il faut que nous fassions en sorte que ces outils soient compatibles avec le droit européen, condition de leur efficacité.
Je demande aux auteurs de ces amendements de bien vouloir les retirer ; à défaut, l’avis de la commission sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État. L’interdiction de l’exportation de grumes se heurte au traité sur le fonctionnement de l’Union européenne et aux règlements qui y sont associés. Vous le savez, les dispositifs d’exception relatifs à la prise de mesures de sauvegarde en réponse à des évolutions exceptionnelles du marché sont à la main de l’Union, et non à celle des États membres. Les restrictions prévues sont assorties de critères limités, qui tiennent essentiellement à l’ordre public et à la santé. La lutte contre la pénurie de bois ne peut pas entrer dans ces critères. La France ne peut donc pas, de son propre chef, édicter des mesures de restriction à l’exportation de bois vers des pays tiers.
J’ajoute que, malheureusement – vous le savez –, cette interdiction n’empêcherait pas l’exportation extracommunautaire de grumes, puisque l’essentiel des exports transite déjà par de grands ports situés en Europe du Nord, et ce au détriment de notre activité portuaire.
Nous sommes attentifs à la situation et aux alertes qui nous ont été adressées ; j’ai d’ailleurs longtemps travaillé sur le sujet avec le groupe d’études Forêt, bois, nouveaux usages et industrie du bois de l’Assemblée nationale lorsque j’étais députée. Dans la perspective d’une meilleure prise en compte des effets environnementaux induits par ces pratiques, nous vous renvoyons dès maintenant à l’amendement n° 2280, assorti d’un sous-amendement proposé par Mme la rapporteure pour avis, qui vise à réglementer la profession d’exploitant forestier et les activités d’export de grumes.
Sur les présents amendements, l’avis du Gouvernement est défavorable.
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.
M. Joël Labbé. J’ai un regret et une incompréhension : l’Allemagne, la Bulgarie, la Croatie et la Hongrie sont des pays européens ; eux ont pris de telles mesures d’interdiction ou de limitation des exportations de grumes. Si certains de nos voisins l’ont fait, et à supposer que nous en ayons la volonté politique, nous devons avoir l’audace de le faire aussi.
M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour explication de vote.
Mme Angèle Préville. Comme mon collègue Joël Labbé, je m’interroge : si d’autres pays ont interdit ces exportations, pourquoi ne le pouvons-nous pas ? J’ajoute que la Russie va interdire elle aussi, à partir du 1er janvier 2022, les exportations de grumes vers la Chine. Et nous, que faisons-nous ? Si nous ne faisons rien, puisqu’un marché s’ouvre, nous pouvons nous douter que, mécaniquement, nos exportations augmenteront.
Chez nous, les scieries ont fermé massivement : de 15 000 scieries dans les années 1960, nous sommes passés à 1 500 aujourd’hui. On parle beaucoup de réindustrialisation de notre pays ; en l’espèce, il y a un vrai sujet.
J’ai cru comprendre également que les machines dont nous disposions actuellement étaient développées par les pays nordiques et adaptées aux troncs d’arbre beaucoup plus fins des essences venant de ces pays. Autrement dit, nous avons perdu la capacité de traiter des arbres plus gros. Nous devons absolument nous pencher sur ce problème et trouver des solutions.
Il y va aussi, tout simplement, d’une perte de richesse : les grumes de chêne sont après tout une matière noble, qui finit par nous revenir transformée. Là encore, penchons-nous sur cette question de la ressource que nous perdons et des conditions dans lesquelles, en bout de chaîne, nous la récupérons.
M. le président. La parole est à Mme Gisèle Jourda, pour explication de vote.
Mme Gisèle Jourda. Mon intervention s’inscrit dans le droit fil de ce que viennent de dire mes collègues Joël Labbé et Angèle Préville.
Alors que l’Union européenne vient de suspendre, pour divers motifs, le processus de ratification de l’accord global sur les investissements, comment se fait-il que certains pays européens puissent prendre des mesures en matière d’exportations vers la Chine et que nous ne puissions en faire de même ? Vous arguez que c’est impossible et qu’il faut s’accommoder du statu quo. C’est incompréhensible !
Notre rapportrice pour avis a travaillé de manière positive. Quant à nous, ce n’est pas une révolution que nous proposons : nous souhaitons simplement garantir la préservation de nos filières, ce qui n’est pas du tout incompatible, à mon sens, avec ce qui se passe au niveau de l’Union européenne. L’Union a d’ailleurs pris conscience de ce que représente la Chine par rapport aux marchés contractés à l’échelle mondiale. Et si l’on observe aujourd’hui une prise de conscience et la naissance d’un regard distancié sur la Chine, le Gouvernement n’y est pas étranger. Tout en l’accompagnant dans sa transformation énergétique, il faut faire attention à la Chine comme rival systémique.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 1427 rectifié et 1887.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 1829, présenté par Mme Loisier, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Après l’article 19 bis D
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport évaluant l’impact de la mise en œuvre de l’action 24 du plan Biodiversité, prévoyant que les agences de l’eau consacrent 150 millions d’euros d’ici 2021 à de nouveaux outils de paiement pour services environnementaux. Ce rapport évalue la faisabilité de l’extension de ces nouveaux outils aux bois et forêts et évalue l’impact qu’aurait une telle extension sur la préservation des écosystèmes forestiers. Il propose des orientations sur les modalités de financement et de gestion de ces paiements pour services environnementaux étendus aux bois et forêts.
La parole est à Mme la rapporteure pour avis.
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques. Une expérimentation lancée en 2018 a permis de payer des agriculteurs afin de rétribuer leurs pratiques vertueuses et respectueuses de l’environnement. Cet amendement vise à évaluer cette expérimentation et à étudier l’opportunité de l’étendre aux exploitants forestiers, comme l’une de nos collègues l’a proposé précédemment.
L’objectif est donc à la fois de pérenniser les paiements pour services environnementaux versés aux agriculteurs et de réfléchir à de nouveaux PSE dont pourraient bénéficier les forestiers, ce qui les aiderait à financer toutes les aménités de la forêt.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État. L’amendement de Mme la rapporteure pour avis vise à ce que le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur les paiements pour services environnementaux. Prévus par le plan Biodiversité pour rémunérer les agriculteurs en proportion du service qu’ils rendent à la collectivité et des résultats effectifs qu’ils obtiennent grâce à leurs changements de pratiques, ces PSE sont en cours de déploiement sur l’ensemble du territoire. L’accompagnement technique et financier des agences de l’eau est financé via un budget de 150 millions d’euros engagé sur trois ans, les contrats passés avec les agriculteurs étant d’une durée de cinq ans.
L’impact de ce dispositif ne sera donc pas évaluable dès l’année prochaine. À ce stade, plus de 130 projets de paiements pour services environnementaux impliquant 400 agriculteurs ont déjà été engagés par les agences de l’eau et les collectivités. Nous publierons un bilan de cette expérimentation, qui a d’ailleurs pleinement vocation à inspirer la prochaine PAC. Cette évaluation comprendra des pistes de réflexion concernant notamment l’opportunité d’étendre les PSE à d’autres objets, y compris la forêt ; mais nous ne sommes pas encore en mesure de le faire.
Je demande donc le retrait de l’amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 19 bis D.
L’amendement n° 1423, présenté par Mme M. Filleul, MM. J. Bigot, Montaugé et Kanner, Mme Bonnefoy, MM. Dagbert, Devinaz, Gillé, Houllegatte et Jacquin, Mmes Préville, Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 19 bis D
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’adéquation des moyens financiers et humains apportés par l’État et nécessaires à l’accomplissement des objectifs qu’il se fixe en matière de politique forestière.
La parole est à Mme Martine Filleul.
Mme Martine Filleul. Je souhaite aborder un sujet qui me semble absolument déterminant pour l’avenir des travaux que nous menons ici et pour l’avenir de la forêt française : je veux parler de l’Office national des forêts, gestionnaire unique de nos forêts publiques, qui joue un rôle essentiel dans la préservation et l’administration de ces espaces naturels.
Chacun le sait, les missions de l’Office sont nombreuses, variées, diverses : elles vont de la protection des milieux naturels et de la biodiversité à l’accueil du public en passant par la prévention des risques naturels et le développement de la filière bois énergie. Or des missions non rémunérées lui ont été confiées, rendant l’équilibre budgétaire de cet organisme difficile à atteindre. Plusieurs réformes et réorganisations successives de l’ONF ont été mises en œuvre dans l’objectif d’y pourvoir. Elles ont généré des tensions et même des conflits internes, la rentabilité étant difficilement conciliable avec l’exercice de missions d’intérêt général et de service public.
L’hypothèse d’une procédure de filialisation de certaines activités suscite actuellement de vives inquiétudes. Les organisations syndicales, ainsi que d’autres parties prenantes, y voient un risque de démantèlement, à terme, de l’établissement.
De surcroît, l’ONF, comme l’ensemble des autres opérateurs de l’État, est chaque année mis en difficulté et davantage affaibli par la poursuite de la diminution draconienne de ses effectifs. Près de 40 % de ses effectifs ont ainsi disparu en vingt ans, générant un malaise notable chez de nombreux salariés. Pourtant, pour que la France soit en mesure d’atteindre les objectifs qu’elle se fixe en matière de politique forestière, elle doit mobiliser les moyens humains et financiers adéquats. Pour que l’ONF soit en mesure d’accomplir l’ensemble de ses missions, qui vont croissant, il doit donc disposer de moyens renforcés.
Tous les ans, dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances, nous présentons des amendements visant à maintenir le plafond d’emploi de ces opérateurs dont fait partie l’ONF. Nous ne pouvons évidemment pas le faire dans le cadre de ce texte, mais nous considérons que c’est un sujet primordial. Nous demandons donc, par cet amendement d’appel, que soit remis au Parlement un rapport sur l’adéquation des moyens financiers et humains mobilisés par l’État avec les objectifs qu’il se fixe en matière de politique forestière.
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour avis. Comme vous le savez, ma chère collègue, votre préoccupation est partagée, mais il y a déjà eu de très nombreux rapports sur les moyens consacrés à la forêt et à l’ONF ces dernières années. Le diagnostic est désormais bien connu : le bois n’a jamais suffi à payer l’ensemble des missions de l’ONF.
Il faut une meilleure reconnaissance des aménités de la forêt. C’est le sens de la demande de rapport que j’ai formulée dans l’amendement précédent, et qui a été adopté. Il faut aussi une revalorisation globale des missions d’intérêt général qui sont aujourd’hui confiées à l’ONF. Il faut surtout, madame la secrétaire d’État, car des bruits courent en ce moment, ne pas faire peser encore plus sur les communes forestières le prix des efforts supplémentaires qui servent l’intérêt général, au risque de les voir quitter massivement le régime forestier.
Je demande le retrait de cet amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable. En tout état de cause, je serais très intéressée d’entendre Mme la secrétaire d’État sur les perspectives de financement et d’accompagnement de l’ONF par l’État.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État. Au cours du conseil d’administration du 2 juillet de l’ONF sera présenté le nouveau contrat d’objectifs et de performance. Le soutien de l’État en faveur de l’ONF sera renforcé, avec un triplement de la contribution du ministère de la transition écologique. Il n’est question ni d’une filialisation ni d’une privatisation, mais simplement d’une réflexion sur la pérennité du modèle de financement, qui est nécessaire.
Vous me demandez de vous éclairer sur ce sujet. Je crois que nous avons déjà entre les mains beaucoup d’éléments. Votre demande de rapport sur l’adéquation des moyens financiers et humains est déjà en partie satisfaite par les rapports sur la politique forestière, notamment celui très récent de la députée Cattelot. Par ailleurs, la Cour des comptes a remis il y a peu un rapport qui contient l’essentiel des éléments attendus. De surcroît, en préparation de la loi de finances, nous disposons annuellement des différents questionnaires et documents d’accompagnement qui traitent de ces questions.
Votre interrogation, il me semble, porte davantage sur la pérennité de ce modèle. Les travaux en cours avec l’Office national des forêts y répondront très rapidement.
En l’état, j’émets un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.
M. Marc Laménie. Je comprends notre collègue qui a présenté cet amendement d’appel. Nous sommes toutes et tous conscients de l’importance de l’ONF. Malheureusement, les effectifs de l’Office diminuent, comme c’est le cas pour d’autres opérateurs de l’État et d’autres services. Le ministère de l’écologie a perdu des postes localement, ainsi que les directions départementales de l’agriculture et de la forêt.
L’ONF joue un rôle important dans le département que je représente, qui est également un département forestier. Les communes forestières prennent leur part, mais les personnels de l’ONF apportent une aide considérable aux élus locaux de proximité, que ce soit pour les forêts communales ou les forêts domaniales. L’ONF est aussi un partenaire institutionnel essentiel.
Même si je comprends le sens de cet amendement d’appel, je me rallie à l’avis de Mme le rapporteur pour avis. Ce texte sur la lutte conte le dérèglement climatique est très large et recouvre beaucoup de sujets d’importance. La question de l’ONF, évoquée en loi de finances chaque année, pourrait être abordée au travers d’un texte dédié.
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.
M. Joël Labbé. Nous allons soutenir cet amendement. Certes, il s’agit d’un amendement d’appel, comme cela a été souligné, mais il est absolument nécessaire. Même si un certain nombre de rapports ont été rendus, nul n’a jamais tenu compte de leurs conclusions.
Madame la secrétaire d’État, en parlant de la remise en question du modèle économique, vous avez tout dit ! Aujourd’hui, l’ONF est quasiment en perdition. En vingt ans, 40 % des emplois ont été supprimés, et les employés actuels souffrent à plusieurs points de vue. C’est pourtant un organisme noble, qui a fait ses preuves dans l’ensemble du pays et qui a encore bien du travail à réaliser, comme l’ensemble de nos travaux le démontrent.
Je suis désolé de vous le dire, mais nous avons auditionné il y a deux ou trois ans un candidat pour présider l’ONF. Au Sénat, il avait fait pratiquement l’unanimité contre lui. Or c’est lui qui a été retenu : il faut enfin dire les choses !
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.
M. Guillaume Gontard. J’irai dans le même sens que mon collègue Labbé.
Cela a été souligné, c’est un amendement d’appel, mais, ce qui est particulièrement intéressant, c’est la réponse de Mme la secrétaire d’État. Effectivement, il y a déjà eu de nombreux rapports, mais tous démontrent la même chose. J’espère donc que, pour une fois, le Gouvernement ira dans le sens de leurs conclusions.
La problématique a été rappelée par Joël Labbé : 805 postes ont été supprimés entre 2016 et 2020 à l’ONF. Ce sont autant d’hommes et de femmes en moins pour accomplir un travail d’accompagnement forestier et aider nos collectivités. Or nous avons besoin de cette présence humaine dans nos forêts.
Il existe un lien de confiance entre les communes et l’ONF. Gérer une forêt, ce n’est pas uniquement vendre du bois. À l’heure où nous parlons de réchauffement climatique et d’adaptation, il convient de rappeler que les élus ont besoin de cette ingénierie, de ces conseils.
Il serait bon, madame la secrétaire d’État, que vous ayez bien présent à l’esprit que l’ONF n’est pas une entreprise et que nous avons bel et bien besoin d’un service public de la forêt.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable.
M. Jean-François Longeot, président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Comme vient de le souligner Guillaume Gontard, nous avons besoin, surtout en ce moment, de conseils et de travaux dans nos forêts. Les forêts de mon département, par exemple, sont ravagées par les scolytes, c’est à la fois une catastrophe pour l’environnement, une catastrophe pour le paysage, une catastrophe pour le tourisme et une catastrophe financière pour les communes.
Il est donc important d’augmenter les moyens de l’ONF, mais il ne faut pas que ce soit au détriment des communes forestières. Ce ne sont pas aux communes forestières d’amener une manne financière. Il m’a été rétorqué qu’il s’agissait de communes riches. Moi, je ne sais pas ce que cela veut dire : oui, ce sont des communes qui ont des bois dont elles tirent des recettes, mais ce ne sont pas pour autant des communes riches. Je ne citerai qu’un seul exemple, celui d’une commune de 1 500 habitants dans mon département à qui il restait auparavant environ 250 000 euros une fois les dépenses payées et les recettes encaissées. Cette année, il lui restera peut-être 50 000 euros. Sa forêt est devenue pour elle une source de dépenses. Comment fera-t-elle pour procéder à son entretien ?
L’ONF a besoin d’être accompagné financièrement, mais les communes ne pourront pas augmenter leur participation. C’est un point sur lequel je tiens véritablement à appeler votre attention, madame la secrétaire d’État. Nous devons faire face au problème sanitaire des forêts et au problème environnemental, mais nous devons aussi tenir compte des problèmes financiers des collectivités.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1423.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 19 bis EA (nouveau)
I. – La loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt est ainsi modifiée :
1° Les 2° à 5° du I de l’article 69 sont abrogés ;
2° Les XII, XIX et XX de l’article 93 sont abrogés.
II. – La section 2 du chapitre III du titre Ier du livre III du code forestier est complétée par un article L. 313-4 ainsi rédigé :
« Art. L. 313-4. – Lorsqu’il adhère au code des bonnes pratiques sylvicoles, le propriétaire forestier soumet à l’approbation du centre national de la propriété forestière un programme des coupes et travaux. »
III. – Les bois et forêts dont les propriétaires ont adhéré aux codes des bonnes pratiques sylvicoles mentionnés à l’article L. 122-3 du code forestier avant la promulgation de la présente loi continuent à présenter une présomption de gestion durable dans les conditions prévues à l’article L. 124-2 du même code, même si leurs propriétaires n’ont pas fait approuver un programme des coupes et travaux. Cette présomption de gestion durable est caduque à l’expiration d’un délai de deux ans si les propriétaires ayant adhéré aux codes des bonnes pratiques sylvicoles avant la promulgation de la présente loi n’ont pas soumis à l’approbation du centre national de la propriété forestière un programme des coupes et travaux.