Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Mouiller. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Philippe Mouiller. En raison de la crise sanitaire et économique due au covid-19 depuis 2020, un certain nombre de communes accusent des pertes de recettes importantes concernant les locaux qu’elles gèrent, un point qui a déjà été évoqué par un certain nombre de mes collègues. En effet, dans les zones rurales, de nombreuses petites communes disposent de commerces, de restaurants, dont elles ont confié la gestion à des structures privées. Compte tenu de la situation économique difficile subie par ces commerces, les communes ont été amenées à modérer, voire annuler, les loyers de ces commerces, ce qui a entraîné d’importantes pertes de recettes eu égard à la taille de ces communes, l’État ayant peu compensé ces pertes de recettes.
L’autre situation que je souhaite évoquer concerne les sites touristiques et « événementiels » gérés par les communes sous la forme de régie. Là aussi, les pertes de recettes pour les communes sont importantes ou totales, et aucun moyen de compensation par l’État n’a été prévu.
Dans mon département des Deux-Sèvres, de toutes petites communes qui gèrent des gîtes touristiques se retrouvent dans une situation financière critique et voient leur budget de fonctionnement fortement touché par ces pertes de recettes.
Les structures privées gestionnaires de sites touristiques ont été soutenues par l’État, mais pas les régies municipales.
Face à cette situation, l’État a-t-il prévu de nouveaux outils ou des mesures de soutien spécifiques pour ces petites communes, étant donné le recul dont vous disposez maintenant pour analyser la situation ?
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Joël Giraud, secrétaire d’État auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ruralité. Monsieur le sénateur Mouiller, j’ai répondu sur ce même sujet à beaucoup de vos collègues. Il y aura donc bien 200 millions d’euros dans le PLFR dont nous délibérerons demain, destinés à répondre aux interrogations qui sont les vôtres.
Vous avez raison, les recettes en diminution sont parfois localisées dans un certain nombre de communes. J’ai évoqué précédemment les communes extrêmement importantes disposant de nombreux équipements, ou les petites communes qui ont des équipements très spécifiques : j’ai cité les thermes, mais j’aurais pu mentionner d’autres activités, telles que celles que vous avez citées dans votre question. Je pense aux gîtes communaux, qui sont relativement importants par rapport au budget de fonctionnement de la commune.
Ce dispositif repose, je le dis et je le répète, sur une dotation budgétaire et non sur un système d’avances remboursables. Il concernera aussi bien les SPIC que les SPA – autrement dit, les services publics administratifs, ne croyez pas que je vous incite à faire de la balnéothérapie ! (Sourires.) Il s’agit de faire en sorte que les deux formes juridiques, dont les différences en termes de réalité économique sont d’ailleurs quelquefois ténues, soient prises en compte.
Ensuite, sur le problème spécifique des loyers que vous avez évoqué dans votre question, je vous rappelle que la loi de finances initiale pour 2021 a prévu un prélèvement exceptionnel sur les recettes de l’État de 10 millions d’euros au profit des collectivités et des groupements de communes qui procèdent à l’abandon ou à la renonciation définitive des loyers de novembre 2020, dans les mêmes conditions que le crédit d’impôt. Ce dispositif est strictement identique à celui qui a été mis en place pour le privé, ni plus ni moins : on reste dans un système parfaitement équitable. Mais, soyez rassuré, les cas que vous avez cités relèvent du dispositif que nous mettons en place.
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Mouiller, pour la réplique.
M. Philippe Mouiller. Monsieur le secrétaire d’État, j’ai entendu la réponse que vous aviez déjà faite à mes collègues. Je veux simplement apporter deux précisions.
Concernant les pertes de loyer, je pense que les 10 millions d’euros prévus ne sont pas forcément à la hauteur des besoins au niveau national. Vous avez fait un geste, mais si l’on fait l’état des lieux – vous avez maintenant les outils pour mesurer ce qui s’est passé –, on constate un décalage : dans de nombreux territoires, notamment dans mon département, on nous dit qu’il n’y a pas de fonds disponibles. L’outil juridique existe, mais les moyens financiers ne sont pas au rendez-vous.
S’agissant des prévisions, notamment pour ce que nous allons voter, je l’espère, dans les jours qui viennent, l’idée est de faire preuve de réactivité, c’est-à-dire de disposer très rapidement des mécanismes de prise en considération et de fonctionnement. Il faut notamment indiquer qu’il ne faut pas, par facilité, traiter en priorité les plus grands territoires, parce qu’il faut revenir à la petite commune rurale. En effet, les plus grandes collectivités sont habituées à traiter de tels dossiers et disposent de services financiers et juridiques qui préparent les éléments.
Il faut donc faire preuve d’une double vigilance, en prévoyant, à la fois, des moyens financiers complémentaires pour les loyers et une forte capacité de réactivité vis-à-vis des plus petites communes.
Mme la présidente. La parole est à M. Bruno Rojouan. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Bruno Rojouan. Dans la lutte contre la double crise sanitaire et économique, les collectivités ont pris leur part à l’effort national de protection des Français. Pour n’en citer qu’une, la mienne, la région Auvergne-Rhône-Alpes s’est fortement mobilisée pour protéger ses habitants sur le plan sanitaire et sur le plan économique, avec près de 1 milliard d’euros investis pour protéger l’emploi.
Pour traverser cette crise, les communes, intercommunalités, départements et régions ont fait beaucoup pour suppléer l’État. Cependant, leur engagement n’a été que très peu compensé sur le plan financier. Le PLFR pour 2020 et le projet de loi de finances pour 2021 ont certes permis de faire des gestes à leur égard, mais cela reste globalement insuffisant. Comme mes collègues, j’espère que des mécanismes complémentaires seront mis en œuvre par le Gouvernement.
Par ailleurs, monsieur le secrétaire d’État, je veux appeler votre attention sur un point particulier en me faisant le porte-parole de mon département de l’Allier, terre de thermalisme.
La crise sanitaire et économique a plongé l’ensemble de la filière thermale dans une situation sans précédent. Les zones rurales sont particulièrement touchées, 70 % des établissements thermaux français se trouvant dans une commune de moins de 5 000 habitants.
Les secteurs d’activité complémentaires et fortement dépendants du thermalisme ont, eux aussi, beaucoup souffert de cette crise. À titre d’exemple, les seuls casinos drainent plus de 400 millions d’euros par an de recettes fiscales vers les collectivités territoriales, sans compter l’effet d’entraînement sur les loyers, la taxe de séjour ou encore les ressources liées aux animations.
Aussi, vous l’imaginez bien, la fermeture des établissements thermaux, des hôtels, des casinos, des restaurants a eu un impact considérable sur le budget des villes d’eau. Pourtant, les spécificités du thermalisme n’ont pas suffisamment été prises en compte dans le plan de relance pour fournir à ce secteur une aide adaptée.
Monsieur le secrétaire d’État, que comptez-vous faire pour accompagner ces communes qui doivent, peut-être plus durement que d’autres, traverser cette crise économique consécutive aux mesures sanitaires qui ont été décidées ?
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Joël Giraud, secrétaire d’État auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ruralité. Monsieur le sénateur Bruno Rojouan, je ne prévoirai pas de dotation spécifique pour l’Allier, même si votre département est cher à mon cœur. (Sourires.)
Au-delà de ce que je viens de dire à vos collègues sur des sujets connexes, la LFR de juillet 2020 a instauré un mécanisme garantissant à chaque commune et à chaque EPCI à fiscalité propre que ses recettes fiscales et domaniales ne seront pas inférieures en 2020 à celles perçues en moyenne entre 2017 et 2019 : l’État versera une dotation égale à la différence entre les recettes de 2020 et cette moyenne.
Ce mécanisme a été reconduit en 2021 pour les recettes fiscales, parmi lesquelles figurent le produit des jeux et la taxe de séjour, des éléments extrêmement importants pour les communes que vous avez citées.
L’arrêté interministériel qui établit les montants définitifs de la dotation sera publié dans quelques jours. Je peux déjà vous indiquer que 4 168 communes et 51 EPCI à fiscalité propre ont perçu cette dotation pour un montant total de 200 millions d’euros. Les communes touristiques ont été bien évidemment les principales bénéficiaires de ce dispositif, notamment pour compenser les pertes de recettes fiscales qui sont liées à la taxe de séjour, au produit brut des jeux des casinos et également à la taxe sur les remontées mécaniques – un autre sujet, qui concerne néanmoins une commune de votre département.
Ainsi, plus de la moitié des communes qui accueillent un casino ont bénéficié de la dotation pour un montant de 62 millions d’euros. Dans l’Allier, par exemple, nous avons les villes thermales de Néris-les-Bains et Bourbon-l’Archambault, qui sont des bénéficiaires du dispositif. La ville de Vichy, en revanche, a perçu des recettes fiscales supérieures en 2020 à la moyenne de référence : elle n’est donc pas dans le dispositif.
Ce dispositif n’est que le principal d’une liste qui n’est pas exhaustive, puisque l’État a par exemple remboursé 215 millions d’euros aux collectivités locales au titre de l’achat des masques réutilisables ou à usage unique. Le Gouvernement a apporté un soutien inédit aux collectivités pour subventionner les dépenses d’investissement que j’ai évoquées précédemment.
En ce qui concerne plus spécifiquement les stations thermales, le Gouvernement est très conscient des difficultés que rencontrent les équipements, notamment ceux qui sont exploités en régie. C’est pourquoi il proposera au Parlement, dans le cadre du projet de loi de finances rectificative pour 2021, qui sera débattu à l’Assemblée nationale la semaine prochaine puis au Sénat, un dispositif de soutien face aux baisses de recettes tarifaires, dont bénéficieront les stations thermales.
En outre, beaucoup de ces dernières se trouvent en zone de montagne, donc elles disposeront, au travers du plan Avenir montagnes, d’éléments complémentaires extrêmement intéressants pour elles. Certes, ce n’est pas toujours le cas dans le département de l’Allier, je vous le concède, mais c’est quand même le cas dans beaucoup de départements de la région Auvergne-Rhône-Alpes.
Ainsi, avec tout cela, nous arriverons à quelque chose de très équilibré pour ces communes.
Mme la présidente. La parole est à Mme Elsa Schalck. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Elsa Schalck. Voilà un an que les collectivités sont fortement investies pour faire face à la crise sanitaire.
À l’heure où la campagne de vaccination bat son plein, les élus locaux sont à nouveau en première ligne.
Dans le Bas-Rhin, pas moins de 26 centres de vaccination, dont 18 portés par les collectivités territoriales, ont vu le jour, grâce à l’engagement de toutes les parties prenantes. Lors de chacune de mes visites dans des centres de vaccination, par exemple dans ceux d’Illkirch, de Saverne, de Sélestat ou encore de La Wantzenau, une réalité s’est imposée à moi : le travail colossal mis en œuvre par les élus locaux, accompagnés des agents, des équipes médicales et de très nombreux bénévoles. Tous s’investissent avec beaucoup de dévouement et ne comptent pas leurs heures pour que cette campagne de vaccination soit une réussite.
Ainsi, les communes et les intercommunalités ont dû mobiliser des agents afin d’aménager et d’entretenir les lieux, de prendre des rendez-vous et d’organiser la prise en charge des personnes. Des recrutements sont actuellement nécessaires pour faire face à la montée en puissance de la vaccination et pouvoir agir dans la durée. Tout cela engendre des coûts.
Vous avez mentionné le Fonds d’intervention régional, mais le montant de celui-ci paraît très éloigné des charges réelles de fonctionnement d’un centre de vaccination. Vous évoquez une compensation allant jusqu’à 50 000 euros pour six mois de fonctionnement, mais les informations remontant du terrain font état d’un coût bien supérieur, selon l’estimation de la DGS.
Les collectivités locales sont déjà fortement asphyxiées par les baisses de dotations et de recettes, qui ne sont jamais entièrement compensées, mais, malgré ce contexte difficile, elles ont directement répondu présentes dans cette crise et ont agi de manière volontaire et réactive.
Monsieur le secrétaire d’État, les élus locaux ont besoin de visibilité ; ils ont également besoin d’être rassurés à propos des engagements financiers de l’État. Interrogé en mars dernier, le ministre de la santé indiquait qu’un travail était mené sur l’élargissement et l’assouplissement du financement des centres et que ce fonds serait réabondé autant que nécessaire ; qu’en est-il ?
Par ailleurs, pouvez-vous nous préciser aujourd’hui les modalités précises de remboursement du Fonds d’intervention régional ? Sous quel délai cette compensation sera-t-elle versée ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Joël Giraud, secrétaire d’État auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ruralité. Madame la sénatrice Elsa Schalck, j’ai répondu précédemment à votre collègue, le sénateur Daniel Gueret, sur ces questions.
Nous représentons ici le ministère de la cohésion des territoires ; nous n’avons donc pas forcément toutes les réponses sur la façon dont un fonds est mis en œuvre par le ministère de la santé, vous le comprendrez bien.
Simplement, puisque vous avez évoqué ce sujet, je rappellerai que, effectivement, le montant de 50 000 euros pour six mois, évoqué en février, correspond à un fonds d’amorçage ; cela n’est, en aucun cas, complètement définitif. Des discussions se poursuivent actuellement sur ce sujet, de façon à ce que la prise en compte soit différente.
Pour autant, le FIR, dont je ne connais pas les détails de la programmation ni de la mise en œuvre, existe et il permet d’instaurer un dialogue entre les ARS, les collectivités locales et, nécessairement, les associations d’élus ainsi que le ministère de la santé, afin que les dépenses engendrées au-delà de ce qui est estimable – je citais notamment la mobilisation du personnel en heures sup’ et d’agents recrutés spécifiquement à cette fin, ainsi que des charges de fonctionnement liées à une logistique extrêmement importante – puissent être prises en compte.
Je puis donc vous confirmer que l’État ne sera pas absent de ce défi majeur ; nous serons aux côtés des collectivités pour relever ensemble le défi de la campagne de vaccination.
En outre, il faut être très clair ; ces centres de proximité ont été extrêmement efficaces. On y trouve souvent des gens que l’on connaît : son médecin ou son médecin à la retraite, bref du personnel de proximité que l’on peut rencontrer tous les jours. Par ailleurs, je constate souvent que ces centres sont un peu chargés par la venue de personnes arrivant de grandes villes, où elles n’ont pas la même qualité d’accueil, ce qui provoque quelquefois, notamment dans les petites communes rurales, des dépenses complémentaires de personnel.
Cela dit, soyez sûre d’une chose, madame la sénatrice, le ministre de la santé, Olivier Véran, a bien pris en compte la spécificité des centres, notamment ruraux, où est mis en œuvre le processus de vaccination, très important pour nous parce qu’il faut aller « jusqu’au dernier kilomètre ».
Conclusion du débat
Mme la présidente. En conclusion de ce débat, la parole est à M. Jean-François Husson, pour le groupe auteur de la demande. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-François Husson, pour le groupe Les Républicains. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, il me revient de conclure ce débat, demandé par le groupe Les Républicains. Cela me permet de remercier Mathieu, Bernard, Alexandra, Daniel, Bruno, Philippe et Elsa ; vous n’aurez plus qu’à mettre, derrière ces prénoms, les noms de ceux qui sont intervenus afin de présenter leurs conclusions sur le coût de la crise sanitaire et économique pour les collectivités territoriales.
Cela a été rappelé, monsieur le secrétaire d’État, les communes ont été en première ligne pour répondre à la crise. Elles ont été des partenaires loyales de l’État et ont même, parfois, pallié certaines des insuffisances ou carences de celui-ci. Elles ont également consenti un effort très important pour soutenir les publics les plus précaires, que la crise a d’ailleurs fragilisés. Les communes et leurs groupements ont souvent augmenté leurs subventions aux centres communaux ou intercommunaux d’action sociale, voire ont mené des politiques nouvelles en faveur des publics cibles.
Cela a été indiqué, les départements ont vu leurs dépenses de RSA augmenter de près de 8 % en 2020, ce qui a des conséquences sur la situation financière d’un tiers de ces collectivités. D’autres collectivités territoriales – les intercommunalités, les communes, les régions – ont fourni un soutien important, notamment en matière économique.
Au total, le coût pour les collectivités locales a représenté de l’ordre de 4 milliards d’euros en 2020 – c’est le rapport Cazeneuve –, dont plus de 3 milliards d’euros seraient imputables à des dépenses supplémentaires. L’impact financier de la crise sur les dépenses des collectivités est, à cette heure, loin d’être définitif, puisque les collectivités continuent de mobiliser des dépenses, notamment – cela vient d’être abordé – dans les centres de vaccination.
Face à ce constat se pose nécessairement la question de la compensation, par l’État, de l’impact de la crise pour les collectivités territoriales, lesquelles n’ont pas, contrairement à l’État, la possibilité de s’endetter massivement. Elles ne le font d’ailleurs pas puisque, vous le savez, leurs comptes sont restés dans des normes tout à fait acceptables.
La position de la commission des finances du Sénat à ce sujet est constante : nous préférons privilégier la compensation des pertes de recettes plutôt que des dispositifs généraux et/ou automatiques de compensation des dépenses supplémentaires. Cette position ne nous empêche pas de regretter les dysfonctionnements. Les plus importants ont été et sont encore relatifs aux masques ; honnêtement, entre un discours qui a longtemps cherché le bon équilibre, la bonne voie, et la compensation, l’État a vraiment failli, là où la confiance devrait être solide.
Le Sénat a contribué au renforcement des mesures de compensation, notamment en introduisant le filet de sécurité pour les recettes du bloc communal en 2021 ; il a également obtenu la baisse, à 5,5 %, du taux de TVA sur les équipements de protection, ce qui réduit la facture pour les collectivités.
Si j’analyse avec lucidité la situation, je pense qu’il y a deux écueils à éviter.
Le premier est celui du catastrophisme. C’est vrai – vous l’avez dit, monsieur le secrétaire d’État –, certains, dont nous étions, avaient des craintes ; la situation a finalement été moins dramatique que ce que l’on aurait pu craindre.
Le second consisterait à croire que le problème est quasiment réglé, alors que restent encore devant nous bien des difficultés et que l’impact de cette crise est bien différent selon les collectivités. Ainsi, au sein du bloc communal – je le répète, même si cela a été beaucoup souligné –, les communes touristiques font partie des collectivités les plus affectées. C’est également vrai pour les régies.
Nous en avons souvent parlé ici, au Sénat, lors de l’examen du projet de loi de finances ; on nous avait promis que le problème serait résolu dans les deux mois. Vous avez pris quelques engagements, monsieur le secrétaire d’État, mais vous avez également compris que les 200 millions d’euros dont vous avez parlé seront manifestement insuffisants.
Il faudra donc être attentif, car le Gouvernement avait initialement affirmé que la compensation des pertes de revenus était techniquement impossible. Vous revenez sur cette affirmation, et c’est une bonne chose.
Il nous reviendra de nous assurer collectivement que l’impact de la crise n’obérera pas la capacité de nos collectivités locales à investir pour l’avenir ; ce serait vraiment regrettable, d’autant que 70 % de l’investissement public local procède des collectivités.
Enfin, nous devrons veiller à ce que la prochaine loi de programmation des finances publiques intègre, sans rien céder à l’impératif du sérieux budgétaire qui doit nous animer, le rôle décisif que les collectivités auront à jouer dans l’investissement. Les collectivités locales doivent pouvoir participer prioritairement à la relance et à l’aménagement équilibré de et pour tous nos territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. Nous en avons terminé avec le débat sur le coût pour les collectivités territoriales de la crise sanitaire et économique.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures dix, est reprise à seize heures quinze.)
Mme la présidente. La séance est reprise.
4
Modification du règlement du Sénat
Adoption d’une proposition de résolution dans le texte de la commission modifié
Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de résolution visant à améliorer le suivi des ordonnances, rénover le droit de pétition, renforcer les pouvoirs de contrôle du Sénat, mieux utiliser le temps de séance publique et renforcer la parité, présentée par M. Gérard Larcher, président du Sénat (proposition n° 545, texte de la commission n° 629, rapport n° 628).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.
M. François-Noël Buffet, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale, rapporteur. Madame la présidente, mes chers collègues, la proposition de résolution visant à améliorer le suivi des ordonnances, rénover le droit de pétition, renforcer les pouvoirs de contrôle du Sénat, mieux utiliser le temps de séance publique et renforcer la parité fait suite au groupe de travail sur la modernisation des méthodes de travail du Sénat, qui a réuni tous les groupes politiques, de décembre 2020 à mars 2021, sous la présidence de Gérard Larcher.
Sur le rapport de Pascale Gruny, vice-président du Sénat, ce groupe de travail a adopté trente-neuf propositions, dont quatorze nécessitaient une modification de notre règlement. Tel est l’objet de la proposition de résolution, déposée par le président du Sénat, qui a cinq objectifs.
Le premier est d’améliorer le suivi des ordonnances prises sur le fondement des dispositions de l’article 38 de la Constitution. La proposition de résolution ajoute aux missions des commissions permanentes le suivi des ordonnances, consacre la compétence de la commission saisie au fond pour déclarer irrecevables les amendements présentés par les sénateurs et contraires à l’article 38 de la Constitution et renforce l’information du Sénat sur les intentions du Gouvernement en matière de publication et de ratification d’ordonnances.
Le deuxième objectif est de rénover les modalités d’exercice du droit de pétition. S’inspirant des modalités expérimentales mises en œuvre depuis janvier 2020, la proposition de résolution rénove les modalités d’exercice de ce droit. Toute pétition déposée par principe sur une plateforme électronique qui atteindrait un seuil de signatures fixé par le bureau du Sénat serait évoquée en conférence des présidents, laquelle déciderait des suites à lui donner. Par dérogation, cette instance pourrait également se saisir d’une pétition n’ayant pas atteint ce seuil, au vu de certains critères définis par le bureau.
Le troisième objectif est de renforcer les pouvoirs de contrôle du Sénat. À cet effet, la proposition de résolution prévoit la désignation d’un rapporteur pour les nominations dont les commissions sont saisies en application de la procédure de l’article 13 de la Constitution, la simplification de l’attribution des prérogatives de commission d’enquête à une commission permanente ou spéciale, lorsque le Sénat ne siège pas, la fixation à vingt-trois du plafond des membres des commissions d’enquête et missions d’information, tout en permettant d’y déroger sur décision de la conférence des présidents pour les structures créées hors droit de tirage des groupes politiques, et l’accélération de l’examen en séance d’une question écrite restée sans réponse, alors transformée en question orale.
Le quatrième objectif est de mieux utiliser le temps de séance publique ; c’est peut-être là que les choses se gâtent un peu…
La proposition de résolution réduit de deux minutes et demie à deux minutes la durée de droit commun des interventions des sénateurs et de dix à trois minutes la durée de présentation des motions de procédure qui n’émanent ni du Gouvernement, ni de la commission, ni d’un groupe politique, ainsi que celle de l’intervention de l’orateur d’opinion contraire.
Le texte supprime en outre le renvoi en fin de « tourniquet » de l’orateur du groupe auquel appartient le rapporteur lors de la discussion générale et institue une procédure allégée d’examen du texte élaboré par une commission mixte paritaire.
Par ailleurs, la proposition de résolution crée une motion de procédure ad hoc, « tendant à ne pas examiner une proposition de loi déposée en application de l’article 11 de la Constitution », afin de permettre au Sénat d’obtenir l’organisation d’un référendum d’initiative partagée, les motions existantes ne répondant pas complètement à cette exigence.
Enfin, le cinquième objectif est d’assurer la parité au sein du bureau du Sénat. L’article 14 de la proposition de résolution prévoit que les listes établies par les groupes en vue de l’élection des membres du bureau du Sénat « s’efforcent d’assurer une représentation équilibrée entre les femmes et les hommes pour chacune de ces fonctions ».
L’ensemble de ces dispositions seraient susceptibles d’entrer en vigueur pour l’ouverture de la prochaine session ordinaire, le 1er octobre 2021, après avoir été, naturellement, soumises au contrôle du Conseil constitutionnel.
La commission des lois a approuvé cette démarche présentée par le président Larcher et n’a apporté que quelques précisions et compléments à la proposition de résolution.
Nous avons ainsi prévu que la transmission du calendrier de publication des ordonnances par le Gouvernement porte sur le semestre, sans se limiter à la session ordinaire. Nous avons également intégré, par cohérence, au sein de l’article 44 bis de notre règlement, la compétence de la commission saisie au fond pour déclarer irrecevables les amendements présentés par les sénateurs et contraires à l’article 38 de la Constitution.
En ce qui concerne les pétitions, la commission des lois a approuvé l’exclusion de toute automaticité liée à un seuil de signatures pour préserver, en dernier ressort, le pouvoir d’appréciation des instances du Sénat. Elle a clarifié les compétences entre, d’une part, le bureau du Sénat, habilité à déterminer les règles de recevabilité, de caducité et de publicité des pétitions, et, d’autre part, la conférence des présidents, seule juge de l’opportunité des suites à leur donner. Ainsi, le rôle de chacune de ces instances serait parfaitement déterminé.
Pour ce qui concerne les pouvoirs de contrôle du Sénat, la commission a modifié la procédure prévue à l’article 6 de la proposition de résolution, relatif à l’approbation tacite, par le Sénat, de l’attribution des prérogatives de commission d’enquête à une commission permanente ou spéciale, lorsque le Sénat ne siège pas. Dans cette hypothèse, il reviendrait au seul président de la commission des lois – indépendamment de la personnalité qui occupe cette fonction (Sourires.) – d’examiner la conformité de cette demande avec l’article 6 de l’ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, après consultation des autres membres de la commission.
Enfin, la commission a adopté trois amendements tendant à insérer des articles additionnels clarifiant ou corrigeant diverses dispositions du règlement, notamment sur le dépôt et l’examen des questions orales, l’objectif étant de simplifier les choses.
Dans le cadre de ma mission, j’ai reçu un certain nombre de contributions de collègues – présidents de groupe ou de commission – et j’ai reçu d’autres collègues en rendez-vous, afin d’échanger sur le texte. Néanmoins – je le dis très gentiment –, d’autres n’ont rien demandé, ni à être reçus ni à contribuer par écrit. Je le dis sincèrement et sans aucune acrimonie, c’est dommage, car cela aurait permis d’approfondir la discussion.
Un peu plus d’une cinquantaine d’amendements ont été déposés sur ce texte. La très grande majorité d’entre eux vont à l’encontre de la position de la commission ; nous aurons l’occasion de nous en expliquer lors de leur examen. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.)