Mme la présidente. L’amendement n° 3, présenté par M. Sueur, Mme Conway-Mouret, MM. Cardon et Tissot, Mme de La Gontrie, MM. Durain, Kanner et Bourgi, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :

« Art. 20 bis. – Les jurys et comités de sélection constitués pour le recrutement ou la promotion des fonctionnaires de l’État comprennent au moins une personne qui n’appartient pas à l’administration, dans la limite de 50 % de l’effectif global du jury ou du comité de sélection.

« Les modalités d’application sont définies par décret. »

La parole est à M. Jean-Luc Fichet.

M. Jean-Luc Fichet. Sans revenir sur l’objectif d’assurer une composition des jurys et des comités de sélection pour le recrutement ou la promotion des fonctionnaires de l’État plus représentative de la diversité de la société, cet amendement tend à prévoir un dispositif remanié.

Ces jurys ou comités de sélection comprendraient au moins une personne n’appartenant pas à l’administration, sans que ces personnes extérieures comptent pour plus de la moitié de l’effectif global. Les modalités de désignation de ces personnes extérieures et les épreuves auxquelles ce dispositif s’applique, par priorité les épreuves orales, seront fixées par décret.

Je précise que toutes les associations sont favorables à cette nouvelle disposition, à cette ouverture, y compris celles qui ont été auditionnées par le rapporteur. Cela rendrait justice à des candidats qui ont besoin d’être mieux représentés au sein des jurys et de se sentir mieux soutenus.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Jacky Deromedi, rapporteur. Cet amendement vise à réduire la proportion de personnes extérieures à l’administration qui serait exigée dans la composition des jurys. La proportion de 50 % du panel serait remplacée par une personne au minimum, dans la limite de 50 % du jury.

Malgré tout, cette disposition resterait un facteur de complexification pour les organisateurs de concours. Elle devrait en outre être combinée avec le principe de nomination équilibrée de 40 % de personnes de chaque sexe.

Il semble préférable que cela reste une bonne pratique réservée à certaines épreuves, par exemple au grand oral.

L’avis est donc défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Amélie de Montchalin, ministre. Madame la sénatrice Artigalas, si vous considérez réellement que la ligne du Gouvernement est « restons entre nous et surtout que rien ne change », je vous invite à vous rapprocher des deux anciens Premiers ministres socialistes qui s’expriment ces derniers jours sur la réforme de la haute fonction publique que nous menons et qui semblent trouver que nous changeons trop et trop vite. Parfois, le conservatisme n’est pas là où certains l’imaginent !

Mmes Viviane Artigalas et Monique Lubin. Nous ne parlons pas de la même chose !

Mme Amélie de Montchalin, ministre. J’en viens à la composition des jurys. Depuis 2015, une circulaire, appliquée avec beaucoup d’exigence, précise d’ores et déjà que les autorités organisatrices des concours des trois versants de la fonction publique doivent diversifier la composition de leurs jurys en nommant obligatoirement des membres extérieurs à l’administration recruteuse.

Dans le cadre de la loi d’août 2019, nous avons clarifié la rédaction de la loi de 1983 qui fixe, comme vous savez, le statut et certains principes importants de la fonction publique, afin de garantir une composition équilibrée entre hommes et femmes des jurys. Une alternance à la présidence est également prévue de manière que, d’une cession à l’autre, l’exigence de parité s’applique.

Nous renouvelons également les membres des jurys pour que chacun d’entre eux n’exerce pas son mandat pendant plus de trois ou quatre sessions et nous les formons à un certain nombre de biais et de stéréotypes. Je porte cette action avec beaucoup de conviction, avec l’ensemble des écoles de service public et des organisateurs de concours.

L’enjeu, M. le sénateur de La Réunion le sait, est d’assurer l’ensemble des expériences et des regards, notamment des outre-mer, sur un certain nombre de recrutements, afin de garantir que ceux que nous recrutons sont pleinement formés aux missions qui vont être les leurs, mais également qu’ils sont recrutés pour leurs talents, leurs mérites et leurs vertus et qu’ils ne sont pas discriminés sur la base de stéréotypes.

Votre amendement me paraissant satisfait, je vous prie de bien vouloir le retirer.

Mme la présidente. La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret, pour explication de vote.

Mme Hélène Conway-Mouret. Madame la ministre, nous anticipons un peu sur ce que vous entendez faire.

Ce que nous proposons ici, c’est que des personnes qui auront été formées sur le terrain, et qui n’auront donc pas besoin d’une formation particulière, siègent dans les jurys afin de permettre aux jeunes concernés de se reconnaître en elles et d’en être reconnues.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 3.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 3.

(Larticle 3 nest pas adopté.)

Chapitre III

Accompagner et évaluer l’égalité des chances dans la fonction publique d’État

Article 3
Dossier législatif : proposition de loi pour un meilleur accès des jeunes dans la fonction publique et les entreprises
Article 5

Article 4

I. – Le chapitre IX bis de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée est ainsi rétabli :

« CHAPITRE IX BIS

« Autorité pour légalité des chances dans la fonction publique

« Art. 72. – Il est créé une Autorité pour l’égalité des chances dans la fonction publique, autorité publique indépendante, placée auprès du ministre chargé de la fonction publique.

« Cette autorité rassemble, analyse et diffuse les informations et données relatives à la promotion de l’égalité des chances dans l’accès à la fonction publique, aux modalités de promotion du personnel au sein de l’administration, aux garanties permettant un déroulement de carrière équitable entre les agents, à la diversité sociale de la fonction publique ainsi qu’aux politiques menées en ce domaine. Elle réalise des travaux d’études, de recherche et d’évaluation.

« Les administrations de l’État lui communiquent les éléments qui lui sont nécessaires pour la poursuite de ses missions, sous réserve de l’application des dispositions législatives imposant une obligation de secret.

« Elle rend un avis consultatif et public sur les nominations prévues à l’article 25 de la présente loi.

« Elle élabore chaque année, à destination du Premier ministre et du Parlement, un rapport rendant compte de son activité et synthétisant les travaux d’études, de recherche et d’évaluation. Il comprend également des évaluations, des avis et des recommandations sur les politiques de promotion de l’égalité des chances appliquées dans les administrations publiques. Ce rapport est rendu public.

« L’autorité est composée de membres nommés par décret dont 50 %, appartenant ou non à l’administration, exercent ou ont exercé une activité professionnelle pendant au moins cinq années dans un quartier prioritaire de la politique de la ville au sens de l’article 5 de la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine ou dans une zone de revitalisation rurale au sens de l’article 61 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d’orientation pour l’aménagement et le développement du territoire. »

II. – Un décret en Conseil d’État précise la composition, les missions et les modalités de fonctionnement de l’autorité instituée par le présent article.

Mme la présidente. La parole est à M. Rémi Cardon, sur l’article.

M. Rémi Cardon. L’article 4 prévoit la création d’une nouvelle autorité publique indépendante afin de garantir une égalité des chances dans la fonction publique. Le concours n’est pas suffisant pour lutter contre les discriminations.

La presse a relayé hier le grand succès des concours d’accès aux écoles en 2021 : il y a eu moins d’autocensure, moins de frais de déplacement. Ces concours à distance semblent être une piste à envisager, au-delà de la crise sanitaire actuelle.

Malgré les programmes d’études intégrés dans les instituts d’études politiques et dans les autres facultés, trop d’élèves n’achèvent pas leurs études universitaires ; ils sont souvent issus du même milieu social, comme le montrent les études de Stéphane Béaud et de Michel Pialoux.

Tout cela nuit à la méritocratie qui vous est si chère, madame la ministre. Les avertissements en ce sens sont constants, comme en témoignent les rapports L’Horty en 2014 ou Rousselle en 2017 sur le manque de diversité dans les écoles, ou, plus récemment, le rapport Borloo en 2018.

Cette autorité indépendante posera un regard neuf sur la situation et pourra disposer de données sur le sujet, alors que, actuellement, les processus de recrutement dans le public comme dans le privé sont opaques. Nous avons besoin d’une publicisation et d’une évaluation plus fines, vous l’avez compris.

Il y a urgence : combien de rapports vous faudra-t-il pour comprendre qu’il faut agir en ce sens pour favoriser l’égalité des chances dans la fonction publique ?

Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Lubin, sur l’article.

Mme Monique Lubin. Parmi les obstacles auxquels les jeunes peuvent être confrontés pour accéder à la fonction publique, Yannick L’Horty, dans son rapport au Premier ministre, citait, dans le cadre d’un reflux des recrutements et d’une sélectivité accrue, la montée de la qualité moyenne des candidats en termes de niveau de diplômes, de qualifications ou d’expérience.

Les candidats semblent être de plus en plus surqualifiés pour occuper les postes proposés. En conséquence, les candidats qui ont le niveau de formation et de diplôme requis pour passer les concours sont évincés par ceux dont les diplômes et les niveaux de formation excèdent ceux qui sont demandés. Les moins qualifiés semblent donc finalement exclus de l’accès à l’emploi public.

La part des femmes, majoritaires parmi les fonctionnaires de catégorie C, décroît au fur et à mesure que l’on progresse dans la hiérarchie. De nombreux travaux soulignent ainsi que les inégalités sociales dans l’accès à l’emploi public se sont développées.

En particulier, les enfants d’agents publics sont surreprésentés dans les recrutements publics. Alors que les enfants de cadres du public représentent 2,6 % des actifs occupés, ils constituent 10 % des cadres de la fonction publique d’État, soit quatre fois plus. Un tiers des agents de la fonction publique d’État sont des enfants de fonctionnaires et cette proportion s’élève à mesure que l’on monte dans la hiérarchie.

Par ailleurs, selon les enquêtes sur l’emploi, et comme le souligne la direction générale de l’administration et de la fonction publique, les immigrés représentaient, en 2010, 5 % des agents de chacun des versants de la fonction publique, contre 10 % de la population dite « d’âge actif ».

Ces éléments chiffrés soulignent l’acuité qui caractérise l’enjeu de promotion de la mixité sociale au sein de la fonction publique et la nécessité de l’égalité des chances. Cet accès inégal à l’emploi public selon le sexe, l’origine, le lieu de résidence ou selon tout autre critère constitue un véritable paradoxe pour la fonction publique, dont la voie d’entrée de référence reste le concours – vous venez de le réaffirmer, madame la ministre –, organisé dans la plus stricte égalité des candidats.

Ce n’est pas un petit sujet, comme en atteste le principe constitutionnel d’égale admissibilité aux emplois publics, posé par l’article VI de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. La mixité sociale et l’égalité des chances au sein de la fonction publique sont des enjeux indissociables du respect et de la vitalité du pacte républicain. Garantir leur existence relève d’une problématique extrêmement complexe, comme il nous est donné de le constater dans le cadre des auditions que nous menons au sein de la mission d’information sur la politique en faveur de l’égalité des chances et de l’émancipation de la jeunesse, dont je suis rapporteure.

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Laménie, sur l’article.

M. Marc Laménie. L’article 4 comme l’ensemble de cette proposition de loi ont le mérite de sensibiliser chacun à un certain nombre de problèmes, parmi lesquels celui que pointe l’intitulé du chapitre III, « Accompagner et évaluer l’égalité des chances dans la fonction publique d’État ».

De nombreux collègues se sont déjà exprimés sur la nécessité de faire respecter le principe d’égalité des chances, que ce soit dans les zones de revitalisation rurale ou dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville. Il faut sensibiliser les jeunes, mais ce combat est déjà mené depuis de nombreuses années.

Le texte traite de l’accès à la fonction publique d’État, mais il faut y associer la fonction publique territoriale et la fonction publique hospitalière.

Pour garantir l’accès aux concours, il est nécessaire de former les jeunes. À cet égard, l’éducation nationale est très engagée. Les enseignants jouent un rôle fondamental dès le premier cycle, puis au collège et au lycée.

Pour susciter des vocations, nous développons tous des expériences intéressantes, dans nos départements et territoires respectifs. Par exemple, sur un sujet dont on parle beaucoup, à savoir la défense des valeurs de la République et la connaissance des institutions, nous avons développé dans le département des Ardennes des classes de défense et de sécurité globale, au niveau du collège et du lycée.

Le département a la chance de compter encore un régiment, de sorte que, dans ces classes, les élèves se voient offrir un temps pour nouer des liens avec les militaires et explorer plus largement ceux qui lient l’armée à la Nation.

Les classes à option sapeur-pompier, qui existent au collège comme au lycée, peuvent également susciter des vocations.

Ce genre d’initiatives contribue à renforcer le lien que les jeunes peuvent entretenir avec tous les services de l’État qui œuvrent pour la sécurité intérieure, que ce soit la gendarmerie ou la police nationale, les sapeurs-pompiers ou les militaires.

Néanmoins, je suivrai l’avis de la commission des lois sur cet article.

Mme la présidente. La parole est à Mme Michelle Meunier, sur l’article.

Mme Michelle Meunier. Le chapitre III a pour titre « Accompagner et évaluer l’égalité des chances dans la fonction publique d’État ». J’insisterai pour ma part sur l’enjeu que représente l’évaluation des politiques publiques.

En effet, comme vous le savez, le mérite républicain et la méritocratie, dont il est beaucoup question, s’arrêtent souvent aux portes des quartiers dits « prioritaires » de nos villes, en raison des barrières sociales et des disparités de moyens des services publics.

Les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain sont attachés à interroger aussi longtemps que nécessaire les mécanismes qui empêchent de passer de l’égalité formelle, celle qui est inscrite aux frontons des écoles, collèges, lycées et mairies, à l’égalité réelle, telle qu’elle est vécue par ces jeunes dans leur accès au monde du travail.

Nous avons été à l’initiative de la création d’une mission d’information sur la politique en faveur de l’égalité des chances et de l’émancipation de la jeunesse, dont les travaux sont rapportés par notre collègue Monique Lubin.

Dans ce cadre, nous avons entendu hier Louis Schweitzer, président du Comité d’évaluation de la stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté, ancien président de la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (Halde), et fin connaisseur des mécanismes de discrimination. Il a tenu des propos qui me sont revenus en écoutant vos interventions dans la discussion générale, mesdames les ministres, et la litanie des mesures que vous avez présentées.

Il a en effet dénoncé le « maquis des différents dispositifs et stratégies qui s’amoncellent » pour lutter contre la pauvreté et contre la discrimination, sans qu’aucune évaluation des politiques engagées ne soit formellement menée. C’est un maquis que l’on impose non seulement aux décideurs, mais aussi aux individus concernés.

L’article 4, s’il était adopté, permettrait de combler ce manque, en prévoyant dans la loi une mission d’évaluation de l’égalité des chances dans la fonction publique, confiée à une nouvelle autorité publique indépendante.

Mme la présidente. La parole est à M. Teva Rohfritsch, sur l’article.

M. Teva Rohfritsch. J’ai fait part dans la discussion générale de l’intérêt que le groupe RDPI porte à cette proposition de loi, qui nous semble néanmoins mériter d’être davantage travaillée.

En effet, encore faut-il s’entendre sur l’objectif de la création d’une Autorité pour l’égalité des chances dans la fonction publique. Si nous sommes d’accord pour défendre l’égalité des chances, nous sommes surtout convaincus par les propos qu’a tenus Mme de Montchalin sur l’égalité des choix.

Je viens d’un territoire français situé à 16 000 kilomètres de la métropole, que je me permettrai de désigner comme un « quartier prioritaire de la ville très éloigné de la métropole » (QPVTEM), mais qui reste au sein de la République. Les jeunes de ce territoire doivent « monter à Paris » pour « faire leur prépa », c’est-à-dire préparer l’accès aux différents concours.

Qu’est-ce que le mérite ? Celui que nous appelons de nos vœux, dans les outre-mer comme dans les régions métropolitaines, c’est de passer les mêmes concours et de les réussir sans quotas.

Pour tenir la promesse républicaine, il est important d’aider les candidats de ces territoires à préparer ces concours et de faire en sorte que des talents puissent émerger. Les candidats issus des « QPVTEM » doivent pouvoir avoir la fierté de réussir les concours dans les mêmes conditions que tout le monde, afin qu’il ne leur soit jamais reproché dans la suite de leur carrière d’avoir bénéficié de quotas.

Le mérite, c’est le talent, et le talent ne doit pas être tiré vers le bas, à cause de dispositions particulières, telles que celles que ce texte propose. Je vous remercie au nom des Polynésiens, des Réunionnais, des Martiniquais, mais aussi des Bretons et des Alsaciens, de faire en sorte que cette promesse républicaine soit la même pour tous.

Nous sommes défavorables à cet article.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Amélie de Montchalin, ministre. Je comprends qu’une mission d’information sénatoriale mène actuellement des travaux sur la politique en faveur de l’égalité des chances. J’imagine que d’autres travaux sont en cours. Cela montre l’intérêt que vous portez à ce sujet, mesdames, messieurs les sénateurs. Comme le Gouvernement, vous travaillez par étapes. Nous plaçons les briques les unes après les autres, et c’est aussi votre méthode.

L’article 4 pose plusieurs difficultés d’ordre différent. Premièrement, votre objectif de créer une Autorité pour l’égalité des chances dans la fonction publique, qui ne serait pas indépendante comme le serait une AAI nouvelle, me semble satisfait par les mesures que nous prenons.

En effet, la direction générale de l’administration de la fonction publique (DGAFP), dont j’ai l’honneur d’être la ministre, publie avec le Défenseur des droits, sur un rythme biannuel, un rapport relatif à la lutte contre les discriminations et à la prise en compte de la diversité de la société française dans la fonction publique, dont il couvre les trois versants. Celui qui paraîtra à l’été 2021, faisant suite à celui de 2019, présentera tous les éléments sur le testing et sur l’évolution des travaux de Yannick L’Horty, que nous continuons à financer, année après année, parce que nous pensons qu’il est utile de disposer de ce regard extérieur, d’une grande rigueur académique, pour alimenter nos travaux.

Toutes les données que produit le service statistique de la DGAFP sont rendues publiques. Je vous propose que la direction interministérielle du numérique (Dinum), également placée sous ma tutelle, travaille avec la DGAFP afin que le maximum de données soient accessibles en open data et facilement consultables sur des séries longues afin de permettre de suivre les évolutions en cours.

Selon moi, il est plus utile qu’une direction existante s’attelle à produire des données de qualité pour les Français que de créer une autorité indépendante, qui aggravera le démembrement de l’action publique et alourdira potentiellement les coûts.

Par ailleurs, je tiens à vous dire que l’ensemble des ministères des employeurs publics mène avec nous une démarche très volontariste sur le Label Diversité. Ce label permet à chacun de professionnaliser les procédures de recrutement pour être plus transparent et pour lutter contre les discriminations. Il fait l’objet d’un audit externe tous les deux ans. Nous pourrons mener avec les parlementaires un travail conjoint de suivi de l’évaluation de ce dispositif.

Enfin, dans le cadre de la loi de 2019, vous avez voté un mécanisme de signalement des actes de discrimination beaucoup plus fort que précédemment, puisque désormais il intervient systématiquement hors des hiérarchies, afin que chacun puisse faire remonter d’éventuelles difficultés liées à une situation de discrimination. Je m’assure d’avoir un suivi quantitatif et qualitatif de ce mécanisme pour être certaine qu’il fonctionne bien.

Pour toutes ces raisons, il me semble que les dispositions de cet article sont déjà satisfaites. Je m’engage à aller plus loin, comme nous en sommes convenus lors de nos échanges, madame la sénatrice, et je vous associerai pleinement à cette évolution, selon votre souhait, pour que nous disposions d’une meilleure photographie et d’une vision plus précise de la dynamique à l’œuvre afin de repérer puis de résorber les discriminations qui existeraient.

Mme la présidente. La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret, sur l’article.

Mme Hélène Conway-Mouret. Permettez-moi simplement de vous faire part de mes regrets, madame la ministre. Vous nous dites que des mesures qui satisferont l’objectif que nous visons seront mises en place. Nous ne pourrons que nous réjouir si cette proposition de loi vous a donné des idées, dans un esprit constructif.

Cependant, vous venez d’énumérer l’ensemble des entités qui travaillent déjà à fournir des statistiques et des rapports sur les discriminations, alors que nous proposons dans ce texte de créer une entité qui rassemblerait toutes les données existantes afin de produire un seul rapport plutôt qu’une multitude d’études.

Ainsi, le Gouvernement pourrait mesurer de manière annuelle ou biannuelle les progrès réalisés, ce qui aiderait à contrer le sentiment largement partagé selon lequel les mesures prises ne seraient pas suffisantes. En nous fixant un objectif statistique, nous pourrions prouver le contraire et voir l’évolution de la société. Par conséquent, il est dommage de rejeter la création de cet outil, qui n’existe pas aujourd’hui.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 4.

(Larticle 4 nest pas adopté.)

TITRE II

Accessibilité renforcée au marché du travail

Chapitre Ier

Accentuer la lutte contre les discriminations

Article 4
Dossier législatif : proposition de loi pour un meilleur accès des jeunes dans la fonction publique et les entreprises
Article 6

Article 5

À l’article L. 1132-1 du code du travail, après le mot : « résidence », sont insérés les mots : « , de son lieu d’origine ».

Mme la présidente. La parole est à M. Rémi Cardon, sur l’article.

M. Rémi Cardon. Nous souhaitons ajouter le lieu d’origine aux vingt-cinq motifs de discrimination qui figurent actuellement dans le code du travail. En effet, on constate que celui-ci peut servir à contourner les règles de non-discrimination liées à l’appartenance à une prétendue race ou parfois même à une Nation. Son ajout aux motifs mentionnés dans le code du travail permettra d’empêcher de manière plus fine les discriminations à l’embauche dont sont victimes une partie de nos concitoyens.

Ces Français subissent une véritable injustice. J’ai reçu de nombreux témoignages de jeunes qui vont jusqu’à modifier leur adresse postale sur leur CV pour avoir une chance d’obtenir un entretien d’embauche, car cette adresse peut constituer un frein.

Nous ne voulons pas encourager les saisines des conseils des prud’hommes ni créer une surcharge de travail pour les TPE-PME, comme vous nous le reprocherez certainement.

Nous voyons dans cette disposition une formidable opportunité de repenser le modèle de recrutement des entreprises. Voulons-nous des jeunes bien formés et motivés, issus d’un quartier modeste, ou bien un jeune dont le réseau familial a facilité l’embauche ? Nous ne pouvons pas ignorer ce sujet, qu’il se pose dans les quartiers populaires ou dans les zones plus rurales, puisque les sièges des entreprises tendent à s’éloigner.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 5.

(Larticle 5 nest pas adopté.)

Article 5
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Article 7 (début)

Article 6

Après l’article L. 1221-8 du code du travail, il est inséré un article L. 1221-8-1 ainsi rédigé :

« Art. L.1221-8-1. – En cas de refus de recrutement d’un candidat, l’entreprise indique, par tout moyen et dans un délai raisonnable, les motifs de sa décision. »

Mme la présidente. La parole est à M. Rémi Cardon, sur l’article.

M. Rémi Cardon. En cas de refus de recrutement, il est important que les jeunes, en particulier ceux qui sont issus des quartiers prioritaires de la politique de la ville et des zones de revitalisation rurale, reçoivent une décision motivée de la part de l’entreprise. Elle leur permettra de connaître les aspects positifs et négatifs de leur candidature et de travailler leurs points faibles.

Pour éviter que l’on nous taxe d’idéalisme ou que l’on nous reproche de méconnaître la réalité du terrain, nous présenterons un amendement n° 4 qui aura pour objet de restreindre l’obligation faite aux entreprises de transmettre leur décision motivée aux candidats refusés qui auront été reçus en entretien et qui en auront fait la demande.

Mme la présidente. L’amendement n° 4, présenté par M. Sueur, Mme Conway-Mouret, MM. Cardon et Tissot, Mme de La Gontrie, MM. Durain, Kanner et Bourgi, Mme Harribey, MM. Leconte, Marie, Kerrouche et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Art. L. 1221-8-1. – En cas de refus de recrutement d’un candidat auditionné par les instances chargées des recrutements au sein de l’entreprise, celle-ci lui communique par écrit, s’il en fait la demande, les motifs de sa décision. »

La parole est à Mme Martine Filleul.

Mme Martine Filleul. Comme vient de le dire M. Cardon, cet amendement tend à préciser l’obligation faite à l’entreprise d’informer le candidat des motifs de son non-recrutement. Cette information devra se faire par écrit, ce qui ne constitue pas une charge importante pour l’entreprise, dès lors que le périmètre des candidats concernés a été restreint à ceux qui ont été reçus en entretien et qui en font la demande.

L’objectif de cet amendement est de faire progresser les candidats en leur permettant de savoir ce qui n’a pas fonctionné au cours de leur entretien. Il s’agit également de faire en sorte que l’entreprise soit partie prenante de manière positive dans le processus de recrutement.

Enfin, comme l’a dit M. Sueur, nous pensons que le débat aurait été différent si cet amendement avait réellement été intégré à la discussion et à la réflexion.