M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Je maintiens mon amendement. Ce qui va sans le dire va encore mieux en le disant !
M. le président. Je m’en doutais… (Sourires.)
Je mets aux voix l’amendement n° 297.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 12 bis, modifié.
(L’article 12 bis est adopté.)
Article 12 ter
Le VI de l’article 140 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie est ainsi modifié :
1° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le fonds de dotation qui reçoit directement ou indirectement des avantages ou ressources mentionnés au second alinéa du I et au II de l’article 6 bis de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association, versés en numéraire ou consentis en nature par un État étranger, par une personne morale étrangère, par tout dispositif juridique de droit étranger comparable à une fiducie ou par une personne physique non résidente en France est tenu d’établir ses comptes conformément à un règlement de l’Autorité des normes comptables, qui prévoit notamment la tenue d’un état séparé de ces avantages et ressources. » ;
2° (nouveau) Le troisième alinéa est ainsi modifié :
a) À la première phrase, la référence : « au premier alinéa » est remplacée par la référence : « aux deux premiers alinéas » ;
b) Sont ajoutées deux phrases ainsi rédigées : « Le non-respect des obligations prévues au deuxième alinéa du présent VI est puni d’une amende de 3 750 euros, dont le montant peut être porté au quart de la somme sur laquelle a porté l’infraction. Les personnes physiques ou morales coupables de cette infraction encourent également, dans les conditions prévues à l’article 131-21 du code pénal, la peine complémentaire de confiscation de la valeur des avantages et ressources concernés. »
M. le président. L’amendement n° 615 rectifié, présenté par MM. Mohamed Soilihi et Richard, Mme Havet, MM. Patriat, Bargeton, Buis et Dennemont, Mmes Duranton et Evrard, MM. Gattolin, Hassani, Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lévrier, Marchand et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud et Rohfritsch, Mme Schillinger, MM. Théophile, Yung et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 3
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Les dispositions de l’article 4-2 de la loi n° 87-571 du 23 juillet 1987 sur le développement du mécénat sont applicables aux fonds de dotation bénéficiant directement ou indirectement d’avantages ou de ressources versés en numéraire ou consentis en nature par une personne morale étrangère, par tout dispositif juridique de droit étranger comparable à une fiducie ou par une personne physique non résidente en France. » ;
II. – Alinéa 6
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Abdallah Hassani.
M. Abdallah Hassani. La commission des lois a utilement aligné le régime de contrôle des financements étrangers des fonds de dotation sur celui qui est prévu par le projet de loi pour les associations loi 1901 bénéficiant de plus de 153 000 euros de dons.
En continuité, ainsi que dans un souci de cohérence et de lisibilité, nous proposons d’opérer, au sein de l’article 12 ter relatif aux fonds de dotation, un renvoi aux dispositions de la loi de 1987 sur le mécénat, dans laquelle notre précédent amendement à l’article 12 bis visait à introduire des dispositions relatives au contrôle des financements étrangers des associations.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Vérien, rapporteure. L’avis est favorable sur cet amendement, qui s’inscrit dans la continuité de l’action de la commission. Je rappelle que l’Assemblée nationale avait voulu imposer aux fonds de dotation les obligations incombant aux associations cultuelles ; nous les avons alignées sur celles qui s’appliquent aux obligations des associations loi 1901.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 12 ter, modifié.
(L’article 12 ter est adopté.)
Article additionnel après l’article 12 ter
M. le président. L’amendement n° 55 rectifié n’est pas soutenu.
Article 12 quater
I. – Le troisième alinéa de l’article 21 du code civil local applicable dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle est ainsi rédigé :
« Les registres des associations et les registres des associations coopératives de droit local sont tenus sous forme électronique, dans les conditions définies aux articles 1366 et 1367 du code civil. »
II (nouveau). – Le registre des associations inscrites dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle est tenu, sous le contrôle du juge, par le greffe du tribunal judiciaire, selon un modèle fixé par arrêté du ministre de la justice.
III (nouveau). – Le I entre en vigueur à une date fixée par arrêté, et au plus tard le 1er janvier 2023.
M. le président. L’amendement n° 295 rectifié ter, présenté par MM. Kern et Haye, Mme Muller-Bronn, MM. Fernique et Masson, Mme Herzog, MM. Klinger et Reichardt et Mmes Drexler, Schalck et Schillinger, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Compléter cet alinéa par les mots :
, et sont rendus accessibles sous cette forme dans un standard ouvert, aisément réutilisable et exploitable par un système de traitement automatisé
La parole est à Mme Sabine Drexler.
Mme Sabine Drexler. Cet article, s’il fixe la tenue obligatoire sous forme électronique du registre des associations régies par le code civil applicable dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, n’en prévoit pas clairement l’accès en ligne. Cet amendement le précise.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Vérien, rapporteure. Favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée. L’avis est défavorable. Le déploiement d’un registre numérisé des associations inscrites en Alsace-Moselle appelle des travaux sur ses contours.
En revanche, il nous semble qu’une telle accessibilité en ligne de ces registres mériterait une expertise complémentaire à mener à la fois en lien avec les instances locales, mais aussi en interministériel. En effet, un registre des associations contient des données personnelles de ses membres. Il est, par conséquent, indispensable que nous puissions analyser la portée des données à rendre accessibles pour garantir le respect de la vie privée et du secret professionnel et bancaire, compte tenu des activités exercées par certaines associations de droit local.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Je ne connais pas grand-chose au droit local, néanmoins tous nos collègues mosellans et alsaciens ont signé cet amendement. Je pense qu’on peut leur faire confiance. (Sourires.)
Mme Sabine Drexler. Je le confirme !
M. le président. La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Dominique Vérien, rapporteure. En l’occurrence, ce dispositif s’applique déjà, dans la « vieille France », aux associations loi 1901. C’est donc parce que cela va dans le sens d’une uniformisation du droit national que la commission a émis un avis favorable.
M. le président. L’amendement n° 588 rectifié quater, présenté par MM. Kern et Haye, Mme Muller-Bronn, MM. Fernique et Masson, Mme Herzog, MM. Klinger et Reichardt et Mmes Drexler, Schalck et Schillinger, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Après le mot :
arrêté
insérer les mots :
qui prévoit également la dématérialisation des formalités incombant aux associations
La parole est à Mme Sabine Drexler.
Mme Sabine Drexler. La modernisation du registre des associations et associations coopératives d’Alsace et de Moselle, dont la tenue systématique sous forme électronique est prévue par cet article, ne prévoit pas la dématérialisation des formalités leur incombant.
Pour le moment, toutes les démarches liées à la vie statutaire d’une association de droit local se font encore par courrier postal, ce qui crée une certaine iniquité entre les associations de droit local et les associations loi 1901.
Or ces fonctionnalités étant particulièrement importantes pour les associations de droit local, cet amendement vise à leur mise en œuvre effective.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Vérien, rapporteure. Favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 12 quater, modifié.
(L’article 12 quater est adopté.)
Article 12 quinquies
(Supprimé)
Chapitre III
Dispositions relatives au respect des droits des personnes et à l’égalité entre les femmes et les hommes
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. François-Noël Buffet, président de la commission des lois. Nous abordons le chapitre III, qui porte sur le respect des droits des personnes et l’égalité entre les femmes et les hommes. Permettez-moi d’indiquer, de manière générale, la position de la commission en la matière.
La commission n’a pas adopté l’article 13, qui tend à rétablir un droit de prélèvement compensatoire sur les biens situés en France au profit d’enfants qui ne bénéficieraient pas d’une réserve successorale en application d’une loi étrangère.
À ses yeux, cet article ne présente qu’une faible plus-value au regard du droit existant, qui permet déjà de protéger les femmes contre des droits étrangers discriminants, ainsi qu’en raison du faible nombre de situations auxquelles il pourrait trouver à s’appliquer. Il aurait, en revanche, des effets évidents dans le cadre des successions internationales soumises au droit anglo-saxon, alors que ces droits ne sont pas connus pour être discriminants envers les femmes.
Toutefois, la commission a approuvé les articles 14 et 15, qui visent à renforcer la lutte contre la polygamie, comportement qui, naturellement, n’a pas sa place sur notre territoire.
Nous affirmons clairement que vivre en état de polygamie en France doit faire obstacle au séjour.
Dans le même esprit, nous proposons d’adopter un amendement de M. Roger Karoutchi, qui permettrait, en totale cohérence avec l’objet du projet de loi, de faire obstacle à la délivrance d’un document de séjour lorsqu’un étranger a manifesté « un rejet des principes de la République ».
Notre commission s’est prononcée en faveur de l’interdiction et de la pénalisation de l’établissement, par les professionnels de santé, de certificat de virginité, objet de l’article 16. La commission a précisé dans le texte que les professionnels de santé devraient expressément informer leurs patientes de l’interdiction de cette pratique.
Elle a également adopté l’article 16 ter relatif au délit d’incitation et de contrainte à se soumettre à un examen de virginité, voté par les députés, pour poursuivre les « commanditaires » appartenant à l’entourage de la jeune fille – parents, futur mari, future belle-fille.
Pour compléter le dispositif de lutte contre les tests de virginité, la commission a créé un délit spécifique visant toute personne qui procéderait à ces tests, et non pas les seuls professionnels de santé, étant précisé que les poursuites pour viol ou agression sexuelle devaient être privilégiées si les éléments constitutifs de ces infractions devaient être réunis.
La commission a également conforté le dispositif de lutte contre l’excision en prévoyant une meilleure proportionnalité de la peine en cas d’incitation et de contrainte exercée sur une mineure pour qu’elle se soumette à ces mutilations sexuelles.
Enfin, elle a renforcé le dispositif de signalement des mariages forcés ou frauduleux en prévoyant la constitution d’une base de données nationale recensant l’ensemble des décisions d’opposition et de sursis prononcées par le parquet, afin d’éviter que les futurs époux n’ayant pu se marier dans une commune ne « tentent leur chance » dans une autre commune ou à l’étranger.
Voilà de quelle façon la commission des lois a abordé ce chapitre III.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 548 rectifié, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, MM. Bocquet, Savoldelli et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
I. – Le chapitre III du titre II du livre III du code civil est ainsi modifié :
1° L’article 913 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque le défunt ou au moins l’un de ses enfants est, au moment du décès, ressortissant d’un État membre de l’Union européenne ou y réside habituellement et lorsque la loi étrangère applicable à la succession ne connaît aucun mécanisme réservataire protecteur des enfants, chaque enfant ou ses héritiers ou ses ayants cause peuvent effectuer un prélèvement compensatoire sur les biens existants, situés en France au jour du décès, de façon à être rétablis dans les droits réservataires que leur octroie la loi française, dans la limite de ceux-ci. » ;
2° L’article 921 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque le notaire constate, lors du règlement de la succession, que les droits réservataires d’un héritier sont susceptibles d’être atteints par les libéralités effectuées par le défunt, il informe chaque héritier concerné et connu, individuellement et, le cas échéant, avant tout partage, de son droit de demander la réduction des libéralités qui excèdent la quotité disponible. »
II. – Les dispositions du présent article entrent en vigueur le premier jour du troisième mois suivant la publication de la présente loi. Elles s’appliquent aux successions ouvertes à compter de leur entrée en vigueur, y compris si des libéralités ont été consenties par le défunt avant cette entrée en vigueur.
La parole est à Mme Michelle Gréaume.
Mme Michelle Gréaume. Il apparaît très clairement, à la lecture du rapport, que la commission des lois s’en est prise non pas au dispositif proposé par le Gouvernement, mais au concept même de mécanisme réservataire.
Les rapporteures y indiquent qu’elle porterait atteinte à la liberté individuelle et à la propriété privée, serait une entrave à la circulation de capital ou au développement de la philanthropie, ne prendrait pas en compte des familles recomposées. La cible serait manquée du fait de l’exonération de ce qu’elles appellent « les pays de droit musulman » et de l’application au détriment des pays anglo-saxons – États-Unis, Angleterre, Canada ou Australie.
Sur ce dernier point, et sur le fait que les pays occidentaux ne connaîtraient pas d’inégalités entre les sexes lors des successions, il est heureux que les inégalités sociales entre les enfants puissent être résorbées par ce mécanisme.
Sur l’égale protection entre les héritiers sur une partie de la succession, vous connaissez la position du groupe CRCE. Nous soutenons ces dispositions, qui constituent, certes, une entrave à la libre circulation du capital, mais, surtout, l’une des garanties possibles du respect de l’égalité entre les sexes.
Le droit français ne vient pas s’immiscer de manière impudique dans la vie des familles. Au contraire, c’est parce que l’on connaît rarement l’intention d’un légataire, parce que « le testateur habile sait taire ou travestir la cause de sa préférence coupable » que la réserve héréditaire permet de ne pas s’encombrer de telle ou telle interprétation. L’égalité est proclamée sans interprétation. Elle est de droit et effective.
En 2020, la Banque mondiale a mis à disposition un jeu de données qui met au jour que, dans 43 pays, les fils et les filles n’ont pas les mêmes droits de succession quand il s’agit d’hériter des biens de leurs parents. Dans 44 pays, les conjoints survivants n’ont pas les mêmes droits pour hériter des biens de leur époux décédé.
Même si nous regrettons que cet article s’applique uniquement lorsque la loi étrangère ne prévoit aucun mécanisme réservataire, il constitue une avancée. Il faut le rétablir.
M. le président. L’amendement n° 637, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
I. – Le chapitre III du titre II du livre III du code civil est ainsi modifié :
1° L’article 913 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque le défunt ou au moins l’un de ses enfants est, au moment du décès, ressortissant d’un État membre de l’Union européenne ou y réside habituellement et lorsque la loi étrangère applicable à la succession ne permet aucun mécanisme réservataire protecteur des enfants, chaque enfant ou ses héritiers ou ses ayants cause peuvent effectuer un prélèvement compensatoire sur les biens existants, situés en France au jour du décès, de façon à être rétablis dans les droits réservataires que leur octroie la loi française, dans la limite de ceux-ci. » ;
2° L’article 921 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque le notaire constate, lors du règlement de la succession, que les droits réservataires d’un héritier sont susceptibles d’être atteints par les libéralités effectuées par le défunt, il informe chaque héritier concerné et connu, individuellement et, le cas échéant, avant tout partage, de son droit de demander la réduction des libéralités qui excèdent la quotité disponible. »
II. – Les dispositions du présent article entrent en vigueur le premier jour du troisième mois suivant la publication de la présente loi. Elles s’appliquent aux successions ouvertes à compter de leur entrée en vigueur, y compris si des libéralités ont été consenties par le défunt avant cette entrée en vigueur.
La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée. La commission des lois a supprimé l’article 13 du présent projet de loi, qui avait été voté en l’état par l’Assemblée nationale. Elle estime, en effet, que le texte n’apporte pas de réelle plus-value par rapport à l’état du droit actuel.
Permettez-moi de vous dire, mesdames, messieurs les sénateurs, que nous ne partageons pas son point de vue.
Par exemple, un père ou une mère de famille peut actuellement décider de déshériter ses enfants si la loi étrangère applicable à sa succession le permet. Il ou elle peut, par exemple, décider de tout laisser à son fils, et rien à sa fille, déshériter des enfants nés d’une précédente union ou des enfants dits « adultérins », etc. Ces enfants ne sont pas protégés.
Le présent amendement vise non seulement à combler ce vide juridique, qui permet des discriminations potentielles, mais aussi à rendre la protection tout à fait concrète et effective.
Grâce à cette disposition, l’enfant déshérité pourra récupérer sa part de réserve sur les biens situés en France directement devant le notaire, à l’occasion du partage, sans avoir à recourir au juge – je me permets d’insister sur ce point, qui est important.
Je ne vous apprendrai évidemment pas que, dans de nombreux pays du monde, les femmes et les enfants dits « naturels » ou « illégitimes » ne sont pas protégés par la réserve héréditaire : ils sont souvent déshérités sur le fondement de pratiques coutumières.
Mesdames les rapporteures, je sais que vous craignez que la disposition ne s’applique aussi aux lois anglo-saxonnes, qui ne connaissent pas non plus la réserve héréditaire. Très sincèrement, je ne vois pas de raison de les en exclure si des discriminations entre enfants sont aussi faites par les testateurs dans ces pays.
Je veux néanmoins préciser que les pays anglo-saxons connaissent eux aussi, dans une certaine mesure, des mécanismes protecteurs des enfants. Les Anglais ont, par exemple, les Family Provisions, qui permettent à l’enfant mineur ou à l’enfant dans le besoin de réclamer une part de la succession. Ainsi, si l’enfant est déjà protégé dans les faits par le droit étranger, le droit de prélèvement ne jouera pas en France.
Notre amendement tend en effet à préciser, contrairement à la rédaction initiale, que la loi étrangère ne doit permettre aucun mécanisme réservataire. Il autorise ainsi une appréciation concrète et factuelle de la loi étrangère, qui permet de vérifier si l’enfant est protégé ou non dans les cas d’espèce.
Enfin, votre commission a supprimé l’obligation d’information renforcée des héritiers réservataires qui avait été mise à la charge du notaire.
Le Gouvernement propose également de la rétablir, afin que les enfants puissent exercer leur droit en pleine connaissance de cause et à l’abri des pressions familiales. Nous considérons qu’il est inadmissible qu’en 2021, en France, des filles soient déshéritées parce qu’elles sont des filles et que certains veuillent appliquer des lois coutumières au mépris des lois de la République.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. Je veux préciser avant toute chose que la commission, contrairement à ce qui est soutenu par les auteurs de l’amendement n° 548 rectifié, n’a pas critiqué la réserve héréditaire en affirmant, en particulier, qu’elle nuisait à la circulation des capitaux ou au développement de la philanthropie. Nous avons tout simplement rappelé, dans notre rapport, les termes du débat et les critiques qui sont régulièrement faites à la réserve héréditaire.
Nous nous sommes également appuyés sur les conclusions du groupe de travail qui avait été missionné par l’ancien garde des sceaux, Nicole Belloubet, lequel a conclu à la nécessité de préserver la réserve héréditaire des enfants.
Pourquoi avons-nous supprimé cet article ? Pas parce que nous contestons le bien-fondé de la réserve héréditaire, mais parce que nous avons estimé que les femmes étaient déjà protégées contre les discriminations les plus flagrantes imposées, par exemple, par la règle de tafadol, applicable dans la plupart des pays musulmans, tels que le Maroc, l’Algérie et l’Égypte.
Au reste, à bien regarder cet article, nous sommes sûrs qu’il va s’appliquer dans des pays de droit anglo-saxon, comme cela a été rappelé. Nous sommes moins certains qu’il s’appliquera véritablement dans les successions soumises aux lois de pays de droit musulman, qui sont évidemment ceux qui sont visés par le texte, car, dans ces pays, la liberté successorale est très encadrée : c’est généralement la loi qui règle les successions.
Dans ces conditions, nous avons estimé que cet article n’avait pas sa place dans le texte en discussion. De fait, selon nous, il manque sa cible.
C’est la raison pour laquelle j’émets un avis défavorable sur les deux amendements, qui visent au rétablissement de l’article 13 dans ce texte de loi.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 548 rectifié ?
M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour explication de vote.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Comme nous l’avons exprimé en commission, nous sommes totalement favorables au rétablissement de l’article 13, qui est très important.
Madame la rapporteure, j’ai bien entendu vos explications sur la réserve héréditaire, mais je ne vous ai pas entendu parler des enfants.
Il est vrai que la suppression de cet article nous donne le sentiment que c’est le principe même de la réserve héréditaire qui vous pose problème. Cela nous inquiète, parce que, je le répète, s’il faut protéger les femmes, il faut aussi protéger les enfants. C’est cette avancée considérable de notre droit que nous voulons préserver, raison pour laquelle nous soutiendrons ces deux amendements, dont j’ai l’impression, d’ailleurs, qu’ils sont identiques – je n’ai pas réussi à trouver ce qui les différenciait.
M. le président. En conséquence, l’article 13 demeure supprimé.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Ce n’est pas brillant !
Article 14
I. – Le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2020-1733 du 16 décembre 2020 portant partie législative du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, est ainsi modifié :
1° La section 2 du chapitre II du titre Ier du livre IV est ainsi modifiée :
a) L’intitulé est ainsi rédigé : « Réserves liées à l’ordre public et à la polygamie » ;
b) Il est ajouté un article L. 412-6 ainsi rédigé :
« Art. L. 412-6. – Aucun document de séjour ne peut être délivré à un étranger qui vit en France en état de polygamie. Tout document de séjour détenu par un étranger dans une telle situation est retiré. » ;
2° Au premier alinéa de l’article L. 423-1, à la première phrase de l’article L. 423-2, à l’article L. 423-7 et au premier alinéa des articles L. 423-10 et L. 423-23, les mots : « ne vivant pas en état de polygamie, » sont supprimés ;
3° À la fin du premier alinéa de l’article L. 432-3, les mots : « à un étranger qui vit en état de polygamie ni aux conjoints d’un tel étranger » sont remplacés par les mots : « aux conjoints d’un étranger qui vit en France en état de polygamie » ;
4° Au premier alinéa des articles L. 435-1 et L. 435-2, les mots : « ne vivant pas en état de polygamie » sont supprimés ;
5° L’article L. 611-3 est ainsi modifié :
a) Au 5°, les mots : « ne vivant pas en état de polygamie » sont supprimés ;
b) Au 7°, les mots : « , ne vivant pas en état de polygamie, » sont supprimés ;
c) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation au présent article, l’étranger mentionné aux 2° à 8° peut faire l’objet d’une décision portant obligation de quitter le territoire français en application de l’article L. 611-1 s’il vit en France en état de polygamie. » ;
6° L’article L. 631-2 est ainsi modifié :
a) Au 1°, les mots : « , ne vivant pas en état de polygamie, » sont supprimés ;
b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation au présent article, l’étranger mentionné aux 1° à 4° peut faire l’objet d’une décision d’expulsion s’il vit en France en état de polygamie. » ;
7° L’article L. 631-3 est ainsi modifié :
a) Aux 3° et 4°, les mots : « , ne vivant pas en état de polygamie, » sont supprimés ;
b) Après le 5°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation au présent article, l’étranger mentionné aux 1° à 5° peut faire l’objet d’une décision d’expulsion s’il vit en France en état de polygamie. »