PRÉSIDENCE DE Mme Nathalie Delattre

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est reprise.

Article 1er (suite)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 397 rectifié, présenté par MM. C. Vial, Brisson et Rapin, Mme Joseph, MM. Le Rudulier et Savary, Mmes Belrhiti et Gruny, MM. Bascher et H. Leroy, Mme Lassarade, M. Chatillon, Mme Ventalon, MM. Darnaud, Boré et Bonhomme, Mmes Dumont, Bonfanti-Dossat, Deroche et Drexler, MM. Laménie, Charon, Tabarot et Somon et Mme Borchio Fontimp, est ainsi libellé :

I. – Alinéas 1 et 5, seconde phrase

Après les mots :

il veille

insérer les mots :

, dans le cadre de son pouvoir disciplinaire,

II. – Alinéa 2

Après le mot :

également

insérer les mots :

, sous sa responsabilité,

La parole est à M. Cédric Vial.

M. Cédric Vial. L’article 1er tend à inscrire dans la loi le principe selon lequel les organismes de droit privé ou de droit public chargés de l’exécution d’un service public sont soumis au principe de neutralité et de laïcité pour les activités qui relèvent de ce champ.

Il impose à ces organismes de veiller au respect de ces principes par les personnes qui participent à l’exécution du service public. J’y insiste : « veiller ». D’après le Larousse, c’est un verbe qui définit un état dans lequel nous ne sommes pas endormis. C’est une bonne chose. Ce dictionnaire nous dit aussi, en seconde définition, que « veiller à ce que », signifie « faire en sorte », mais « faire en sorte », sinon quoi ?

Cet amendement vise à préciser que l’organisme doit veiller au respect desdits principes dans le cadre de son pouvoir disciplinaire à l’égard des agents qui sont sous sa responsabilité, afin, tout simplement, de passer d’un état passif à une attention bienveillante. Nous souhaitons rappeler dans le texte qu’il ne s’agit pas simplement d’une tâche que l’on confie à cet organisme ou à ses agents, mais bien d’une responsabilité, dont le non-respect peut faire l’objet, le cas échéant, de mesures disciplinaires.

Mme la présidente. L’amendement n° 368, présenté par M. Meurant, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 1, seconde phrase

Après le mot :

veille

insérer les mots :

, dans le cadre de son pouvoir disciplinaire,

II. - Alinéa 2

Après le mot :

également

insérer les mots :

, sous sa responsabilité,

La parole est à M. Sébastien Meurant.

M. Sébastien Meurant. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. Nous comprenons la réflexion de nos collègues, mais tout cela est déjà prévu, puisque l’article 1er précise que l’organisme prend les mesures nécessaires pour faire respecter les obligations qui incombent à ses salariés. Cela comprend évidemment les mesures disciplinaires. Cette mention permet en outre à l’employeur de procéder par d’autres voies, en adaptant les stipulations du contrat de travail, par exemple. Une partie de ces amendements est ainsi satisfaite.

Ce même article dispose que l’organisme veille au respect des obligations du sous-traitant, ce qui implique nécessairement qu’il est responsable de leur observation.

Pour ces deux raisons, je sollicite le retrait de ces amendements, faute de quoi j’émettrai un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, ministre. Même avis.

Mme la présidente. Monsieur Vial, l’amendement n° 397 rectifié est-il maintenu ?

M. Cédric Vial. J’ai bien compris les arguments de Mme la rapporteure. Juridiquement, on est bien d’accord, mais je pensais, pour l’affichage, que cela pouvait avoir un sens d’ajouter ces mots. Cependant, je me rallie à la position de la commission et je retire mon amendement, tout en laissant mon collègue libre de son choix concernant le sien…

Mme la présidente. Merci de lui laisser cette liberté ! (Sourires.)

L’amendement n° 397 rectifié est retiré.

Monsieur Meurant, l’amendement n° 368 est-il maintenu ?

M. Sébastien Meurant. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 368 est retiré.

L’amendement n° 126 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano et Bilhac, Mme M. Carrère, MM. Fialaire, Gold et Guérini, Mme Pantel, MM. Requier, Cabanel, Guiol, Roux et Corbisez et Mme Guillotin, est ainsi libellé :

Alinéas 1 et 5, seconde phrase

Supprimer le mot :

notamment

La parole est à M. Bernard Fialaire.

M. Bernard Fialaire. Il s’agit d’un amendement porté par notre éminente collègue Nathalie Delattre ! (Sourires.)

Sur un sujet aussi sensible et fondamental, notre législation doit être claire et ne pas laisser la place à des ambiguïtés ou à des sous-entendus. La marge interprétative doit être très limitée. Or, de ce point de vue, la rédaction actuelle de l’article 1er du projet demeure insatisfaisante en raison de l’ajout de l’adverbe « notamment ». Il ne s’agit pas d’un point de détail simplement rédactionnel : l’introduction de ce mot risque de donner lieu à une lecture qui étendra la portée de ces dispositions au-delà des opinions politiques et religieuses.

Pourquoi ne pas viser strictement la manifestation d’opinions religieuses ou politiques, le respect de la liberté de conscience et le traitement égal et digne des usagers ? L’ouverture que suggère ce « notamment » représente un risque, ou, à tout le moins, une incertitude que nous souhaitons à tout prix éviter.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. Effectivement, ce terme est souvent évité dans la rédaction de la loi. À juste titre, parce qu’il est la plupart du temps inutile. Dans le cas présent, en revanche, il semble absolument nécessaire de le laisser, parce qu’il est utilisé pour les fonctionnaires. Il nous semble important de garder un parallélisme entre ces deux dispositions pour bien faire comprendre qu’elles renvoient aux mêmes obligations à la fois pour les fonctionnaires et pour les salariés des entreprises auxquelles a été confiée une délégation de service public. Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, ministre. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 126 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 82 rectifié, présenté par MM. Karoutchi et Pemezec, Mmes Garriaud-Maylam et Thomas, MM. Burgoa, D. Laurent, Regnard et Bonne, Mme Chauvin, MM. Guerriau et Mandelli, Mme Dumont, MM. Sido, Cambon, Lefèvre, Vogel et Decool, Mmes Belrhiti et V. Boyer, M. Menonville, Mmes Bellurot et Imbert, M. Laugier, Mmes Puissat, Goy-Chavent et Férat, MM. Cuypers et Moga, Mme F. Gerbaud, MM. Saury, P. Martin, Gremillet, Boré, Le Rudulier et Bouchet, Mmes Delmont-Koropoulis et Lassarade, M. Sautarel, Mme Micouleau, M. Longeot, Mmes Canayer et Deroche, M. Duplomb, Mme Malet, MM. Belin, Pointereau, Le Gleut et Laménie, Mme Schalck, MM. Bonhomme, H. Leroy et Husson, Mme Guidez et M. Segouin, est ainsi libellé :

Alinéa 1, seconde phrase

Remplacer les mots :

politiques ou religieuses

par les mots :

religieuses, politiques ou philosophiques

La parole est à M. Roger Karoutchi.

M. Roger Karoutchi. En fait, je ne me suis pas fatigué : j’ai repris certains des éléments de la magnifique lettre de Jules Ferry en 1883 aux instituteurs, dans laquelle il leur demandait de tout faire pour que, religieusement, politiquement, philosophiquement, la sensibilité des élèves ne soit jamais heurtée par une affirmation d’un instituteur dans sa classe.

Je pense que, cent quarante ans plus tard, les choses n’ont pas beaucoup changé, d’où l’ajout de « philosophiques » que je propose. Après tout, la manifestation du service public de l’enseignement, c’est aussi de respecter les opinions de chacun en la matière, et donc la neutralité.

M. Laurent Lafon. Très bien !

Mme la présidente. L’amendement n° 511 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Alinéas 1 et 5, seconde phrase

Supprimer les mots :

politiques ou

La parole est à M. Pierre Ouzoulias.

M. Pierre Ouzoulias. Je ne partage pas tout à fait l’avis de mon éminent collègue Karoutchi. Notre amendement vise d’ailleurs à supprimer l’adjectif « politiques ». Dans cet hémicycle, on rend souvent un hommage vibrant aux hussards noirs de la République, mais ces derniers étaient très politiques, j’y insiste, dans le bon sens du terme.

M. Roger Karoutchi. Pas en classe !

M. Pierre Ouzoulias. Je le répète ici, après l’avoir dit en commission, ils étaient à la Fédération de l’éducation nationale (FEN), à la Mutuelle assurance des instituteurs de France (MAIF), à la CAMIF, et ils achetaient Pif le chien le dimanche.

Mme Sophie Primas. Moi aussi !

M. Pierre Ouzoulias. Ils avaient chevillée au corps la défense de la laïcité, et je pense qu’il serait très utile aujourd’hui de retrouver cette même volonté de défendre la République et la laïcité.

Vous citez Jules Ferry, mon cher collègue ; permettez-moi de citer Ferdinand Buisson, en 1911, dans son Nouveau Dictionnaire de pédagogie et dinstruction primaire : « Dans l’évolution de la démocratie, les instituteurs de demain continueront à peu près le même office qu’avaient rempli ceux d’hier à l’égard de la République naissante. Ceux-là avaient frayé la voie aux réformes politiques ; ceux-ci l’ouvriront aux réformes sociales. »

Mme la présidente. L’amendement n° 13 rectifié bis, présenté par M. Marie, Mme de La Gontrie, M. Sueur, Mme Harribey, M. Leconte, Mme S. Robert, M. Magner, Mme Lepage, M. Féraud, Mmes Meunier et Monier, MM. Assouline, Lozach, Kanner, Bourgi, Durain, Kerrouche, Antiste et J. Bigot, Mmes Bonnefoy, Briquet, Conconne et Conway-Mouret, MM. Cozic, Fichet, Gillé et Jacquin, Mme Jasmin, MM. P. Joly, Lurel, Mérillou, Redon-Sarrazy, Temal, Tissot, Montaugé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 1, seconde phrase

Supprimer les mots :

politiques ou

La parole est à M. Didier Marie.

M. Didier Marie. Cet amendement vise lui aussi à supprimer la référence aux opinions politiques. Cette mention ne figurait pas, d’ailleurs, dans le projet de loi initial. Si elle était maintenue, nous aurions dans notre droit des rédactions divergentes entre, d’une part, l’article 25 de la loi de 1983 relative à la fonction publique, qui impose aux fonctionnaires de s’abstenir, dans l’exercice de leurs fonctions, de manifester leurs opinions religieuses, et l’article 1er de ce projet de loi, d’autre part, qui impose aux salariés participant à une mission de service public de s’abstenir de manifester leurs opinions politiques et religieuses. Rien ne justifie cette différence de rédaction, alors même que l’objet de ces deux articles est le même.

Lors de l’examen en commission des lois, Mme la rapporteure s’était montrée sensible à cette nécessité de faire converger les deux rédactions, et la commission avait d’ailleurs adopté un de nos amendements, identique à un amendement déposé par Alain Richard, pour mentionner à l’article 1er l’exigence de traiter de façon égale toutes les personnes et de respecter leur liberté de conscience et leur dignité, obligation qui s’impose déjà aux fonctionnaires en vertu de la loi de 1983.

Avec cet amendement, nous proposons d’aller au bout de cette logique en uniformisant les rédactions de ce projet de loi et de la loi de 1983. Un objectif qui nous paraît d’autant plus facile à atteindre que la mention des opinions politiques n’est pas utile, puisqu’elle est déjà couverte par l’obligation de neutralité. De plus, elle peut prêter à confusion.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. C’est un débat de pure forme, car nous sommes évidemment tous d’accord pour que chacun respecte une obligation de neutralité, qu’elle soit religieuse, politique ou philosophique.

Sur l’amendement de Roger Karoutchi, c’est vrai, nous sommes contre cet ajout, non pas parce que nous sommes contre l’idée, mais parce que cette mention n’existe pas aujourd’hui dans les statuts de la fonction publique. Cela serait de nature à semer de la confusion dans la compréhension des règles, qui seraient un peu différentes pour les uns et pour les autres.

Nous sommes également contre la suppression de la référence aux opinions politiques. Si celles-ci n’apparaissent effectivement pas clairement dans certains textes, il n’existe aujourd’hui aucune marge d’interprétation sur la neutralité politique. Nous souhaitons bien conserver cette notion.

Nous demandons donc le retrait de ces trois amendements, faute de quoi nous émettrons un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, ministre. Même avis.

Mme la présidente. La parole est à Mme Esther Benbassa, pour explication de vote.

Mme Esther Benbassa. Je suis très inquiète à l’idée qu’un tel type de mesure puisse s’appliquer, comme ce serait probable, aux universitaires. En tant que fonctionnaires à l’université, nous devrions ainsi garder une neutralité politique, philosophique, voire religieuse, selon certains. Je trouve que cela ressemble énormément à l’amendement de Mme Darcos sur la liberté d’expression à l’université.

Ce texte ne dit pas exactement s’il s’applique à tous les fonctionnaires et, en tant que professeure d’université, j’aimerais bien quelques explications sur ces trois amendements. Je suis d’accord avec M. Marie, mais pas entièrement : on ne peut pas seulement supprimer « politiques », et laisser dire que l’on doit aussi être neutre philosophiquement.

Mme la présidente. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.

M. Roger Karoutchi. Je vais retirer mon amendement pour faire plaisir à la commission. Je ne veux lui créer aucun embarras sur l’interprétation de l’adjectif « philosophiques », qui, à mon sens, ne prête pourtant guère à interprétation d’après le dictionnaire. Mais je veux bien imaginer que certains codes ne retiennent pas le même sens que le dictionnaire…

Madame Benbassa, soyez rassurée, car le problème n’est pas le même selon que vous avez affaire à des enfants en primaire ou en secondaire, qui, en tant que mineurs, ne jouissent pas la totalité de leurs droits civiques, ou à des étudiants à l’université, qui sont pratiquement tous majeurs et électeurs. Par définition, la neutralité ne s’entend pas de la même manière dans les deux cas. En attendant, je le répète, je retire mon amendement.

Mme la présidente. L’amendement n° 82 rectifié est retiré.

La parole est à M. Didier Marie, pour explication de vote.

M. Didier Marie. J’ai du mal à suivre le raisonnement de Mme la rapporteure. Elle objecte à M. Karoutchi que la terminologie qu’il emploie s’éloignerait trop des textes précédents, et notamment de la loi de 1983, tandis que nous-mêmes souhaitons que le texte soit identique pour éviter toute confusion. Cette remarque justifie que nous maintenions notre amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.

M. Pierre Ouzoulias. Monsieur le ministre, il faudra regarder si cet article s’applique aussi à l’Alsace-Moselle, parce que j’ai du mal à imaginer que l’on puisse obliger à un enseignement religieux et ne pas permettre, dans le même temps, de manifester des opinions religieuses, philosophiques et politiques. Cela va être un petit peu compliqué.

À mon sens, dans tout le texte, dans tous les amendements qui vont suivre, il faudra, chaque fois, se poser la question de l’application à l’Alsace-Moselle, où il y a un régime particulier. Si l’on ne dit pas que ce que nous votons ne s’applique pas à l’Alsace-Moselle, cela va s’y appliquer.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Gérald Darmanin, ministre. Je partage évidemment l’avis de rejet de ces amendements émis par la commission. Sur la question de l’Alsace-Moselle et, plus généralement, du droit local, car il convient de considérer également nos compatriotes des territoires ultramarins du Pacifique, de Guyane et de Mayotte, dont il faut respecter les spécificités reconnues au nom de la République, le texte est assez clair quant à son application dans le droit local.

On peut avoir des désaccords, comme j’ai pu en avoir à l’Assemblée nationale avec M. Coquerel, qui a fait un travail parlementaire très important, que je respecte, mais qui est frontalement opposé aux dispositions concordataires ou du droit local, que M. Ouzoulias a évoquées. Cependant, j’y insiste, aucune disposition de ce texte n’est censée ne pas être applicable en Alsace-Moselle et dans les territoires ultramarins, mais certaines seront traduites en droit local, afin de respecter l’équilibre que la République a trouvé, en faisant une promesse aux parlementaires d’Alsace-Moselle au lendemain de la Première Guerre mondiale, promesse qu’il faut savoir tenir au fil des textes. Cet équilibre s’inscrit, chacun le sait, dans la loi de 1905, comme dans la loi de 1901, qui ne s’applique pas en Alsace-Moselle comme sur le reste du territoire.

Par ailleurs, monsieur le sénateur, vous n’êtes pas sans savoir que le Conseil constitutionnel et le Conseil d’État ont eu largement l’occasion d’expliquer que ce statut était compatible avec l’unité de la Nation et conforme au principe de laïcité, qui s’applique aussi, même si c’est de manière un peu différente, en Alsace-Moselle.

Je veux enfin souligner devant cette assemblée qu’une erreur est souvent faite dans les discussions autour de la laïcité : le Conseil constitutionnel n’a jamais consacré – peut-être le fera-t-il à l’occasion de ce texte – le principe de non-subventionnement comme un principe constitutionnel. La loi de 1905 est constitutionnalisée dans son article 1er sur la non-reconnaissance, mais c’est la loi simple qui interdit aujourd’hui le non-subventionnement. On peut même considérer que ce subventionnement existe, à travers les déductions fiscales, les baux emphytéotiques, voire, à l’avenir, des garanties d’emprunt par les collectivités locales, dont nous aurons peut-être l’occasion de parler.

En d’autres termes, le principe de subventionnement direct des ministres du culte en Alsace-Moselle ou dans certains territoires ultramarins pour les cultes reconnus n’est pas contraire à la loi de 1905 en tant qu’elle n’a pas été constitutionnalisée dans son article concernant le subventionnement.

Enfin, monsieur Ouzoulias, on peut avoir des divergences sur la nécessité de mettre fin au concordat en Alsace-Moselle, mais je veux redire que toutes ces dispositions s’appliqueront, y compris en ce qui concerne le culte. Pour l’instant, nous sommes sur l’article 1er, lequel ne relève pas des dispositions cultuelles, et qui s’appliquera aux délégations du service public, aux salariés du service public délégué, que ce soit en Alsace-Moselle ou sur le reste du territoire.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 511 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 13 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 276 rectifié, présenté par MM. Roux, Artano et Bilhac, Mme M. Carrère, MM. Corbisez, Gold, Guérini et Guiol, Mme Pantel et M. Requier, est ainsi libellé :

Alinéa 1, seconde phrase

Après le mot :

religieuses,

insérer les mots :

s’abstiennent également de porter tout signe vestimentaire ostensiblement réservé aux femmes,

La parole est à M. Jean-Claude Requier.

M. Jean-Claude Requier. Il s’agit d’un amendement porté par Jean-Yves Roux.

Afin de détourner les interdictions liées au port des signes religieux, certains signes et vêtements sont parfois instrumentalisés, en dehors de toute connotation religieuse, en vue de marquer des discriminations sexuelles, et notamment dans le but d’inférioriser les femmes. Pour pallier ces risques, il importe de ne pas se limiter aux manifestations religieuses et d’élargir la loi à tout ce qui symboliserait objectivement toute forme de discrimination à l’égard des femmes.

Avec un tel principe ajouté à la loi, les juges et les administrations seraient alors à même d’encadrer et de contrôler certaines dérives susceptibles d’être observées dans l’exécution du service public.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. Vous proposez d’ajouter à l’article les mots « s’abstiennent également de porter tout signe vestimentaire ostensiblement réservé aux femmes ». Je sais bien à quoi vous pensez, mais quid des jupes ?

M. Gérald Darmanin, ministre. Va-t-on interdire les kilts écossais ?

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. M. le ministre me donne des idées. (Sourires.)

Je vous comprends, mais votre rédaction appelle un trop grand effort d’interprétation ; donc, nous vous appelons à retirer votre amendement, faute de quoi l’avis sera défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Je suppose que vous défendez le kilt ? (Sourires.)

M. Gérald Darmanin, ministre. Même avis.

Mme la présidente. Monsieur Requier, l’amendement n° 276 rectifié est-il maintenu ?

M. Jean-Claude Requier. Non, je vais le retirer. Vous savez que j’aime le rugby. À ce titre, je vais en Écosse, où l’on peut voir des hommes en kilt. Madame la rapporteure, vous m’avez convaincu. (Sourires.)

Mme la présidente. Parfait, on va pouvoir créer un club du kilt ce soir ! (Nouveaux sourires.)

L’amendement n° 276 rectifié est retiré.

L’amendement n° 127 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano et Bilhac, Mme M. Carrère, MM. Gold, Guérini et Guiol, Mme Pantel, MM. Requier, Cabanel et Roux, Mme Guillotin et MM. Fialaire et Corbisez, est ainsi libellé :

Alinéas 1 et 5, seconde phrase

Compléter cette phrase par les mots :

, sans discrimination

La parole est à M. Henri Cabanel.

M. Henri Cabanel. La loi du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations définit de manière claire et détaillée ce qu’est une discrimination. Elle érige ce principe en l’un des fondements les plus élémentaires de notre droit et de notre société. Dans sa rédaction actuelle, l’article 1er du projet de loi précise bien que toutes les personnes doivent être traitées de façon égale dans le cadre du service public. Néanmoins, il paraît nécessaire d’aller au-delà, en précisant que tout traitement doit être fait sans discrimination. Nous avons ici l’occasion de réaffirmer un principe qui est au cœur de notre pacte républicain. L’objet de ce projet de loi étant précisément de conforter le respect des principes de la République, il est indispensable que celui de la non-discrimination y soit inscrit.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. Je comprends l’objet de cet amendement, mais cette mention fait doublon avec ce qui est déjà prévu dans le texte. L’article 1er précise que toutes les personnes doivent être traitées de manière égale, ce qui fait obstacle à toute forme de discrimination.

Nous vous invitons à retirer votre amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, ministre. Même avis.

Mme la présidente. Monsieur Cabanel, l’amendement n° 127 rectifié est-il maintenu ?

M. Henri Cabanel. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 127 rectifié est retiré.

L’amendement n° 128 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano et Bilhac, Mme M. Carrère, MM. Guérini et Guiol, Mme Pantel et MM. Requier, Cabanel, Roux, Gold et Corbisez, est ainsi libellé :

Alinéa 1

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Les dispositions du présent alinéa ne font pas obstacle au respect du principe d’indépendance des enseignants-chercheurs dans l’exercice de leurs fonctions d’enseignement et de leurs activités de recherche fixé par l’article L. 952-2 du code de l’éducation.

La parole est à M. Henri Cabanel.

M. Henri Cabanel. Le principe d’indépendance des enseignants-chercheurs dans l’exercice de leurs fonctions d’enseignement et de leurs activités de recherche a été consacré comme principe fondamental reconnu par les lois de la République. Si l’article 1er du projet de loi vient réglementer l’exercice du service public, notamment du point de vue des manifestations d’opinion, il est nécessaire que l’indépendance universitaire soit préservée. Aussi, nous souhaitons préciser que les dispositions de l’article 1er ne doivent pas faire obstacle au respect du principe d’indépendance des enseignants- chercheurs.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. Cet amendement semble satisfait, puisque l’article 1er n’introduit dans la loi que des obligations principalement applicables aux salariés de droit privé. Les agents publics, catégorie à laquelle appartiennent les enseignants-chercheurs, demeurent soumis aux obligations déjà prévues par les statuts de la fonction publique. L’articulation entre ces dernières dispositions et celles du code de l’éducation ne sont pas remises en cause. Demande de retrait ou avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, ministre. Même avis.

Mme la présidente. Monsieur Cabanel, l’amendement n° 128 rectifié est-il maintenu ?

M. Henri Cabanel. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 128 rectifié est retiré.

L’amendement n° 633, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Rédiger ainsi cet alinéa :

Les organismes mentionnés à l’article L. 411-2 du code de la construction et de l’habitation et les sociétés d’économie mixte de construction et de gestion de logements sociaux agréées dans les conditions prévues à l’article L. 481-1 du même code, lorsqu’ils participent à l’exécution du service public, ainsi que les entreprises ferroviaires, lorsqu’elles assurent des services librement organisés de transport ferroviaire de voyageurs mentionnés à l’article L. 2121-12 du code des transports, à l’exception des services de transport international de voyageurs, sont soumis aux obligations mentionnées au premier alinéa.

La parole est à M. le ministre.

M. Gérald Darmanin, ministre. Cet amendement important tend à montrer l’étendue du champ de ce texte et, notamment, de son article 1er.

Vous avez compris, mesdames, messieurs les sénateurs, que celui-ci prévoit d’imposer la neutralité, notamment religieuse, mais aussi politique, évidemment, à tous ceux qui concourent au service public : les fonctionnaires – cela va de soi –, mais aussi tous ceux qui s’inscrivent dans le cadre de la fonction publique sans avoir le statut de fonctionnaire, à savoir les contractuels, qui sont de plus en plus nombreux et représentent aujourd’hui à peu près 20 % de la fonction publique, ainsi que les apprentis et les stagiaires.

Ces obligations s’imposeront également aux délégations de service public ; on pense aux sociétés de transport, de marchés, ou encore de gestion de lieux nautiques.

Enfin, il y a les sociétés qui concourent directement au service public et les appendices de celui-ci. Il convient de les définir, car tout n’est pas service public !

Ainsi, mesdames, messieurs les sénateurs, les TGV ne sont pas considérés comme des services publics au sens juridique du terme.