Mme Esther Benbassa. La vidéosurveillance présente un risque d’atteinte à la vie privée et son utilisation doit donc être strictement nécessaire et proportionnée pour atteindre un objectif légitime.
Nous estimons qu’il ne peut pas être laissé trop de latitude à la définition de l’utilisation des caméras individuelles, technologie de contrôle intrusif : si elles doivent être déployées, nous souhaitons à tout le moins y associer des garanties liées au respect du droit à la vie privée.
Il apparaît donc essentiel qu’à ces mêmes articles la loi affirme clairement que l’utilisation de ces caméras individuelles a pour objectif premier la diminution des cas de recours illégal à la force et la prévention des violences policières.
N’oublions pas que l’une des vocations des caméras-piétons est d’être un outil de contrôle du comportement du fonctionnaire de police ou du gendarme. En ce sens, elles représentent un atout dans le contrôle a posteriori de l’action des agents, notamment par la transmission des images captées aux autorités judiciaires, administratives ou disciplinaires dans le cadre d’une mise en cause d’un agent pour une infraction commise pendant l’exercice de ses fonctions. Dans le cadre d’une procédure judiciaire à l’encontre d’un agent, ces images devront être transmises sous scellé pour en assurer l’authenticité.
Cet amendement a pour objet d’ajouter ces garanties dans la loi.
M. le président. L’amendement n° 245, présenté par Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 3
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…) Le troisième alinéa est ainsi rédigé :
« Les finalités d’utilisation des caméras mobiles pour les policiers, gendarmes et agents de police municipale sont strictement limitées à lutter contre le recours illégal à la force, la prévention des violences policières et au contrôle de l’action des agents. » ;
II. – Après l’alinéa 8
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…) Avant le dernier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L’analyse des images issues de ces caméras individuelles au moyen de dispositifs automatisés de reconnaissance faciale est prohibée, ainsi que les interconnexions, rapprochements ou mises en relation automatisée des données à caractère personnel issues de ces traitements avec d’autres traitements de données à caractère personnel. » ;
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Mme Éliane Assassi. Je reconnais moi aussi que la commission a tenté d’améliorer cet article. Pour autant, je rappelle que l’utilisation des caméras mobiles par les forces de l’ordre a été permise dans le souci d’apaiser les relations entre les forces de l’ordre et la population.
C’est ce principe que vise à réaffirmer cet amendement. Il a également pour objet de lutter contre les violences policières et d’interdire le couplage des caméras individuelles avec des dispositifs de reconnaissance faciale pour des questions évidentes de dérive, dont il a déjà été largement question dans les médias.
M. le président. L’amendement n° 114, présenté par Mme Benbassa, MM. Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 8
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…) Après le cinquième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Sont prohibées l’analyse des images issues de ces caméras individuelles au moyen de dispositifs automatisés de reconnaissance faciale, ainsi que les interconnexions, rapprochements ou mises en relation automatisés des données à caractère personnel issues de ces traitements avec d’autres traitements de données à caractère personnel. » ;
La parole est à Mme Esther Benbassa.
Mme Esther Benbassa. Parce qu’ils traitent tous du déploiement et de l’intensification de la vidéosurveillance mouvante, il aurait été utile de traiter les articles 21, 22 et 22 bis ensemble, puisqu’ils disposent respectivement des caméras-piétons ou caméras individuelles, des caméras aéroportées ou drones et des caméras embarquées.
Nous regrettons que la commission des lois, qui a amendé les dispositions de l’article 22 ayant trait aux drones pour y ajouter des garanties relatives à la reconnaissance faciale et au fichage – ce que, bien sûr, nous saluons –, n’ait pas pris la peine d’apporter ces mêmes garanties pour les caméras individuelles. Or, pour celles-ci, ces garanties nous paraissent d’autant plus importantes que ces instruments seront les plus présents dans l’espace public et dans le quotidien des Français.
Il s’agit donc, par cet amendement, d’interdire l’utilisation de logiciels de reconnaissance faciale et les interconnexions automatisées de données qui peuvent être effectuées lors de l’analyse des images des caméras individuelles. Le recours à cette technique semble devenu systématique, tout en ne reposant sur aucun contrôle du principe de proportionnalité propre à garantir le respect des droits et libertés fondamentales des individus.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Loïc Hervé, rapporteur. C’est sans doute pour nous interpeller ou par provocation que vous voudriez limiter l’usage des caméras mobiles à la seule prévention des violences dites policières. Or ces caméras visent évidemment à lutter contre d’autres faits de délinquance !
Mes chers collègues, je ne vous ferai pas l’affront de vous demander, si vous avez déjà manipulé les caméras dont sont aujourd’hui équipés les policiers, les gendarmes, les policiers municipaux et certains pompiers pour comprendre comment cela fonctionne concrètement et les capacités somme toute limitées qui peuvent en résulter, en raison soit de la qualité des images, soit de la durée d’utilisation de la batterie, soit tout simplement du prix qui a été consenti pour l’achat de ces matériels – je parle des caméras les plus anciennes. Ce sont des GoPro à peine améliorées ! (M. Guillaume Gontard brandit un smartphone.) Oui, c’est beaucoup moins puissant que nos téléphones, mon cher collègue ! Gardons cela en tête.
Je proposerai tout à l’heure, au nom de la commission, une interdiction expressis verbis de la reconnaissance faciale et de la captation de sons par les drones. En effet, je mesure que les sauts technologiques que permettent les drones et la dimension massive d’une captation en altitude posent une difficulté. En revanche, en ce qui concerne les caméras mobiles des policiers et des gendarmes en intervention, je vous le redis : regardez de quoi on parle !
C’est la raison pour laquelle je souhaite que l’on en reste à la rédaction actuelle. La commission émet donc un avis défavorable sur l’ensemble de ces amendements en discussion commune.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Gérald Darmanin, ministre. Je partage évidemment les attendus et les considérations de M. le rapporteur, mais, sans allonger nos débats, je ne peux pas ne pas dire un mot sur les diverses interventions relatives à cet article.
Oui, il y a des problèmes de batterie sur ces caméras-piétons ! C’est d’ailleurs pour cela que nous avons lancé un nouvel appel d’offres, pour lequel nous attendons la promulgation de cette proposition de loi, puisque, selon les dispositions que vous voterez, il contiendra des options différentes.
J’ai eu l’occasion d’indiquer au cours de la discussion générale que j’acceptais bien volontiers que, comme l’a souligné Jérôme Durain, l’on ne retienne pas la troisième finalité, c’est-à-dire l’utilisation publique des images. Pourtant, on pourrait s’interroger sur l’utilisation sauvage des autres images, mais nous aurons sans doute l’occasion d’en reparler…
Reste qu’il faut que les caméras puissent être activées pendant les six ou sept heures d’intervention d’une brigade. Demain, ce sera totalement le cas, puisque plusieurs sociétés ont déjà répondu à cet appel d’offres et, dans le cadre d’une procédure tout à fait normale, nous choisirons le modèle de caméra qui pourra être utilisé le temps effectif de la patrouille – cela fait partie des critères du cahier des charges.
Madame Benbassa, vous déclarez que les policiers ou les gendarmes n’appuient pas toujours sur le bouton, lorsque des faits surviennent. Ce n’est pas tout à fait vrai. Si vous les aviez rencontrés, ils vous auraient appris deux choses.
D’une part, la caméra filme quelques dizaines de secondes avant que l’on appuie sur le bouton. C’est même le principe des caméras-piétons. On peut en effet comprendre que, pris par un problème, dans la tension, parce que quelqu’un est agressé ou dans le cadre d’une intervention, dans la nuit, dans la férocité – la situation n’est pas toujours facile –, le policier ou le gendarme oublie de déclencher sa caméra. D’ailleurs, celle-ci filme également quelques dizaines de secondes après, si jamais il venait à la couper un peu trop tôt – c’est aussi un point que nous améliorons pour éviter toute subjectivité de sa part.
D’autre part, il est une règle qui handicape les policiers et les gendarmes et que seule la police de la République applique dans toute l’Union européenne, celle de l’enregistrement du numéro référentiel des identités et de l’organisation, aussi appelé RIO, avant d’actionner la caméra. C’est d’ailleurs là que se situait le principal problème technique : le policier ou le gendarme devait entrer ce numéro par avance pour pouvoir enclencher la caméra. Or, en procédant ainsi, il vidait la batterie ; c’est un peu comme si vous mettez en permanence votre téléphone en mode caméra : vous en épuisez la batterie.
Toutes ces dispositions techniques sont résolues par le nouvel appel d’offres que nous avons lancé, indépendamment des finalités évoquées par M. le rapporteur.
Certes, on peut discuter de la pertinence des caméras-piétons. Pour ma part, je pense que c’est très bien : cela permet de savoir ce que fait l’agent, de calmer la personne qui est en face, d’avoir de meilleurs rapports et de meilleures procédures pénales, donc de meilleures poursuites, mais aussi de résoudre des enquêtes, comme l’a très bien indiqué M. le rapporteur. En effet, on pourra le faire pendant l’action sans jamais – et c’est un point très important – modifier les images.
La généralisation des caméras-piétons au 1er juillet prochain attend beaucoup de ce texte et de cet appel d’offres.
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.
M. Guillaume Gontard. Je ne comprends pas tout à fait la logique du rapporteur à propos de l’amendement n° 114.
La commission a accompli un très bon travail sur l’article 22, en interdisant la reconnaissance faciale par les drones. Monsieur le rapporteur, vous avez expliqué que la technologie de ces appareils évoluerait et se développerait. Pourtant, n’importe quel smartphone est déjà équipé de la reconnaissance faciale ! En fait, les logiciels d’analyse et de reconnaissance faciale existent déjà. Cette possibilité est donc déjà effective.
Le drone n’étant rien d’autre que l’appareil qui transportera le dispositif qui prendra la photo, c’est exactement la même chose.
Nous sommes certainement à peu près tous d’accord ici pour reconnaître qu’il faut être très prudent et même se préserver de la reconnaissance faciale. Autant l’inscrire très clairement dans le texte, comme vous l’avez fait à juste titre sur les drones, monsieur le rapporteur.
M. le président. La parole est à Mme Esther Benbassa, pour explication de vote.
Mme Esther Benbassa. Je suis étonnée par les réponses du rapporteur et du ministre. Quand l’opposition n’est pas d’accord, on lui rétorque qu’elle ne connaît pas le sujet ou, comme l’a fait M. le ministre, qu’elle n’a jamais vu de caméra-piéton. Nous serions donc hors sol, nous vivrions enfermés – il est vrai que c’est le cas depuis un moment ! (Sourires.) – dans cet hémicycle sans rien connaître, quand vous seuls connaîtriez tout.
Il faut en finir avec les réponses de ce type : vous n’êtes pas plus sachants que les autres. Si nous déposons des amendements, nous avons nos raisons pour le faire et nous n’inventons rien.
Monsieur le ministre, vous racontez très bien l’histoire – hier, vous avez fait de longs développements historiques. Toutefois, je tiens à vous préciser, concernant les marchés publics que vous passerez pour les caméras-piétons, que vous êtes tenu par un marché public qui dure jusqu’en 2025 et qui prévoit la fourniture de caméras dotées de batteries qui ne durent pas assez longtemps ! La presse en a longuement parlé. Arrêtez donc de nous raconter des histoires à ce sujet !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Gérald Darmanin, ministre. Madame Benbassa, j’espère que vous ne prendrez pas comme une insulte que je vous informe que nous changeons de marché public. Le nouvel appel d’offres est d’ailleurs consultable sur le site du ministère de l’intérieur – n’hésitez pas à vous y référer.
Ce n’est pas attaquer l’opposition de vous le dire. Je me suis attelé à ce sujet dès mon arrivée au ministre de l’intérieur. Ce ne sont pas des histoires, c’est la réalité et chacun peut s’en féliciter, parce qu’il y avait bien un problème de batterie – tout le monde en convenait. Je vous ai expliqué que c’était dû à des raisons techniques, mais aussi à des raisons d’usage.
Monsieur le sénateur Gontard, le Gouvernement a indiqué qu’il ne souhaitait pas que soient introduites dans ce texte des dispositions relevant de la reconnaissance faciale. Il n’y a donc pas de débat. Toutefois, vous avez souligné que la reconnaissance faciale était déjà possible sur les téléphones. Pour éclairer ce débat intéressant, le Gouvernement envisage d’ailleurs de confier une mission à un parlementaire. En effet, si la reconnaissance faciale n’est pas utilisée par les pouvoirs publics, elle l’est par de nombreux acteurs, notamment des entreprises privées, à commencer par les fabricants de téléphones.
Il ne faut pas confondre identification et authentification. Ce n’est pas la même chose. Nous utilisons par exemple déjà la reconnaissance faciale dans le fichier de traitement d’antécédents judiciaires (TAJ) utilisé par la police judiciaire, qui recense quinze à vingt millions de personnes ; la CNIL a accepté ce fichier : des photos y sont enregistrées, elles permettent d’identifier les personnes. Cela diffère de la reconnaissance faciale de la caméra, qui, comme dans les films ou dans le métro de Londres, permet par exemple d’authentifier Alain Richard à 97 % ! (Sourires.)
M. Alain Richard. Avec le masque ?
M. Gérald Darmanin, ministre. Avec le masque, c’est évidemment moins facile… (Nouveaux sourires.)
La reconnaissance faciale regroupe la famille de l’authentification et celle de l’identification. À cette dimension extrêmement technique s’ajoutent de nombreuses considérations éthiques, dans lesquelles je n’entrerai pas ce soir, d’autant que le Gouvernement ne souhaite pas inscrire de telles dispositions dans ce texte, je le répète.
Le débat est extrêmement complexe et ce n’est pas parce que votre téléphone permet l’identification qu’il s’agit d’une authentification. Nous aurons sans doute l’occasion d’en reparler.
M. le président. La parole est à M. Jérôme Durain, pour explication de vote.
M. Jérôme Durain. Notre débat s’est un peu apaisé, mais M. le ministre relance certaines des questions que nous nous sommes posées tout à l’heure. Je ne le taquinerai pas sur les caméras-piétons, pour avoir déjà eu l’occasion de constater qu’il était extrêmement compétent sur le sujet.
Monsieur le rapporteur, vous considérez que les drones constituent un sujet à part, parce qu’ils sont extrêmement puissants. Or nous avons tendance à légiférer sur ces questions à technologie constante, au regard des outils du moment, alors qu’il nous faut fixer des principes. Pour ma part, je ne sais pas ce que permettront les caméras-piétons dans deux ou trois ans ; peut-être le savez-vous, si vous êtes en lien avec les industriels. Cette remarque d’ordre général n’appelle pas de commentaire particulier.
C’est pourquoi, sur la question des images, nous recommandons de prendre le temps et d’avoir une vue très large, sans rester sur des objectifs opérationnels étroits. C’est important, parce que nous sommes parfois piégés par nos connaissances technologiques du moment. C’est pour cette raison que nous avons voulu déposer des amendements de principe, en nous appuyant sur les finalités et sur des rapports qui posent des questions éthiques.
Il n’est pas inutile, de temps en temps, de laisser la réflexion décanter.
M. le président. Mes chers collègues, il est minuit. Je vous propose de prolonger un peu notre séance, afin de poursuivre l’examen de ce texte.
Il n’y a pas d’opposition ?…
Il en est ainsi décidé.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à minuit, est reprise le jeudi 18 mars 2021, à zéro heure cinq.)
M. le président. La séance est reprise.
L’amendement n° 372, présenté par MM. L. Hervé et Daubresse, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Alinéa 14
Supprimer les mots :
de la police nationale ou des militaires de la gendarmerie nationale
La parole est à M. le rapporteur.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 174 rectifié, présenté par MM. Roux, Artano et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Corbisez, Fialaire, Gold et Guérini, Mme Guillotin, MM. Guiol et Requier et Mme Pantel, est ainsi libellé :
Alinéa 14
Remplacer les mots :
peuvent être transmises
par les mots :
sont transmises
La parole est à M. Jean-Yves Roux.
M. Jean-Yves Roux. L’article 21 vise à faciliter le recours aux caméras mobiles par les agents de la police et de la gendarmerie nationales, ainsi que par ceux de la police municipale. Nous nous réjouissons de la position de la commission des lois et des modifications adoptées à l’initiative de nos rapporteurs. Cela a été souligné, l’usage des vidéos n’a pas une vocation illustrative ni polémique, mais doit servir les agents dans leurs interventions, le maintien de l’ordre et la sécurité de nos concitoyens.
Toutefois, une disposition peut paraître étonnante : il est question que, lorsque la sécurité des agents ou celle des biens et des personnes est menacée, les images captées au moyen de caméras individuelles puissent être transmises en temps réel au poste de commandement. Elles le « peuvent », ce n’est donc pas une obligation. Cette transmission devrait justement être obligatoire, et non pas une simple possibilité offerte aux agents intervenants. L’objet de cet amendement est de procéder à une modification en ce sens.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Loïc Hervé, rapporteur. Monsieur le sénateur, ôtez-moi d’un doute : si cet amendement était adopté, nous rendrions obligatoire la transmission en direct des images au centre de commandement en cas de danger. C’est le policier ou le gendarme en situation qui endosserait la responsabilité de devoir transmettre, s’il éprouve un danger.
Sur un plan technique, tout d’abord, toutes les caméras ne sont pas à même de transmettre les images en direct. Vous imaginez la différence de coût entre une caméra qui enregistre simplement et une caméra équipée du matériel permettant la transmission au centre de commandement !
Quant à l’agent dans le feu de l’action, si l’on peut lui reprocher de ne pas avoir appuyé sur un bouton pour transmettre les images au moment où il éprouve un danger, cela crée deux difficultés, l’une technique, l’autre juridique, qui me poussent à vous demander de retirer votre amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Roux, l’amendement n° 174 rectifié est-il maintenu ?
M. Jean-Yves Roux. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 174 rectifié est retiré.
L’amendement n° 361, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 17
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. le ministre.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Loïc Hervé, rapporteur. Nous y sommes défavorables, monsieur le président, parce que cet amendement vise à supprimer les remontées d’informations au ministère de l’intérieur concernant l’emploi des caméras individuelles des agents de police municipale.
Cet amendement est curieux, parce que je trouve au contraire intéressant que le ministère de l’intérieur dispose de remontées d’informations statistiques fiables sur l’emploi des caméras-piétons par nos polices municipales.
Dans son récent rapport thématique, la Cour des comptes critique pourtant sévèrement le ministère au sujet du manque de données fiables sur la vidéoprotection lato sensu, en particulier en ce qui concerne les dispositifs piétons.
M. le président. Je mets aux voix l’article 21, modifié.
(L’article 21 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 21
M. le président. L’amendement n° 248, présenté par M. P. Dominati, est ainsi libellé :
Après l’article 21
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre Ier du titre IV du livre II du code de la sécurité intérieure, dans sa rédaction résultant de l’article 21 de la présente loi, est complété par un article L. 241-… ainsi rédigé :
« Art. L. 241-…. – Dans l’exercice de l’une des activités mentionnées à l’article L. 611-1, les entreprises peuvent procéder en tous lieux, au moyen de caméras individuelles, à un enregistrement audiovisuel de leurs interventions lorsque se produit ou est susceptible de se produire un incident, eu égard aux circonstances de l’intervention ou au comportement des personnes concernées.
« L’enregistrement n’est pas permanent.
« Les enregistrements ont pour finalités la prévention des incidents au cours des interventions des agents des entreprises exerçant des activités mentionnées au même article L. 611-1, le constat des infractions et la poursuite de leurs auteurs par la collecte de preuves, la formation et la pédagogie des agents ainsi que l’information du public sur les circonstances de l’intervention.
« Lorsque la sécurité des agents de sécurité privée ou la sécurité des biens et des personnes est menacée, les images captées et enregistrées au moyen de caméras individuelles peuvent être transmises en temps réel au poste de commandement du service concerné et aux personnels impliqués dans la conduite et l’exécution de l’intervention.
« Les caméras sont portées de façon apparente par les agents. Un signal visuel spécifique indique si la caméra enregistre. Le déclenchement de l’enregistrement fait l’objet d’une information des personnes filmées, sauf si les circonstances l’interdisent. Une information générale du public sur l’emploi de ces caméras est organisée par le ministre de l’intérieur. Les caméras sont équipées de dispositifs techniques permettant de garantir l’intégrité des enregistrements lorsqu’ils sont consultés dans le cadre de l’intervention.
« Les enregistrements audiovisuels, hors le cas où ils sont utilisés dans le cadre d’une procédure judiciaire, administrative ou disciplinaire, sont effacés au bout de six mois.
« Les modalités d’application du présent article et d’utilisation des données collectées sont précisées par un décret en Conseil d’État, pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés. »
La parole est à M. Philippe Dominati.
M. Philippe Dominati. Cet amendement vise à adapter aux agents de sécurité privée le dispositif concernant les images. Nous voyons bien l’apport des images pour des agents désormais armés.
Cependant, certaines dispositions diffèrent pour les sociétés privées et la police, notamment en ce qui concerne l’équipement des armes. Certaines armes possèdent des caméras adaptées directement, comme les Tasers. Or, apparemment, les agents de sécurité privée ne peuvent pas utiliser certaines armes actuellement commercialisées.
Cet amendement a pour but de rendre une cohérence à la législation.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Loïc Hervé, rapporteur. Quand je vois le temps qu’il a fallu pour mener les expérimentations préalables à l’équipement des policiers municipaux, des sapeurs-pompiers, des gendarmes ou des policiers, je suis plus que réservé sur cette proposition.
Les agents de sécurité privée seraient autorisés à filmer en tous lieux, alors même qu’en l’état du droit les autorités publiques ne peuvent filmer que la voie publique. Les finalités proposées relèvent en fait de la police judiciaire, alors que ces agents n’en ont pas du tout le statut.
Par ailleurs, la durée de conservation de six mois est bien trop longue et même déraisonnable, alors qu’elle n’est que de trente jours pour la police…
Le régime porterait une atteinte excessive à la vie privée et constituerait une véritable délégation de prérogatives de puissance publique à des personnes privées, qui bénéficieraient à bien des égards de droits plus étendus que les policiers ou les gendarmes.
La commission a donc émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Dominati, l’amendement n° 248 est-il maintenu ?
M. Philippe Dominati. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 248 est retiré.
L’amendement n° 364, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 21
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – À titre expérimental, dans l’exercice de leurs missions de police des campagnes, les gardes champêtres peuvent être autorisés, par le représentant de l’État dans le département, à procéder en tous lieux, au moyen de caméras individuelles, à un enregistrement audiovisuel de leurs interventions lorsque se produit ou est susceptible de se produire un incident, eu égard aux circonstances de l’intervention ou au comportement des personnes concernées.
L’enregistrement n’est pas permanent.
Les enregistrements ont pour finalités la prévention des incidents au cours des interventions des gardes champêtres, le constat des infractions et la poursuite de leurs auteurs par la collecte de preuves ainsi que la formation et la pédagogie des agents.
Les caméras sont portées de façon apparente par les agents. Un signal visuel spécifique indique si la caméra enregistre. Le déclenchement de l’enregistrement fait l’objet d’une information des personnes filmées, sauf si les circonstances l’interdisent. Une information générale du public sur l’emploi de ces caméras est organisée par le ministre de l’intérieur. Les personnels auxquels les caméras individuelles sont fournies ne peuvent avoir accès directement aux enregistrements auxquels ils procèdent.
Les enregistrements audiovisuels, hors le cas où ils sont utilisés dans le cadre d’une procédure judiciaire, administrative ou disciplinaire, sont effacés au bout de six mois.
L’autorisation mentionnée au premier alinéa est subordonnée à la demande préalable du maire.
Lorsque l’agent est employé dans les conditions prévues au second alinéa du I et au premier alinéa du II de l’article L. 522–2 du code de la sécurité intérieure, cette demande est établie conjointement par l’ensemble des maires des communes où il est affecté.
Les modalités d’application du présent I et d’utilisation des données collectées sont précisées par un décret en Conseil d’État, pris après avis publié et motivé de la Commission nationale de l’informatique et des libertés.
II. – L’expérimentation prévue au I du présent article s’applique pour une durée de trois ans à compter de l’entrée en vigueur du décret mentionné au dernier alinéa du même I, et au plus tard six mois après la promulgation de la présente loi.
L’expérimentation est éligible au fonds interministériel pour la prévention de la délinquance défini à l’article 5 de la loi n° 2007-297 du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance.
Au plus tard six mois avant le terme de l’expérimentation, le Gouvernement remet au Parlement un rapport d’évaluation de sa mise en œuvre.
La parole est à M. le ministre.