M. le président. Il faut conclure, ma chère collègue.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. C’est aussi une question d’ancrage territorial. L’ESS porte en elle toutes les valeurs qui sont essentielles pour notre avenir.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Olivia Gregoire, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargée de l’économie sociale, solidaire et responsable. Madame Lienemann, au risque d’être redondante, je tiens à remercier de nouveau le Sénat d’avoir permis que l’on discute de ce sujet, qui occupe mes jours et mes nuits : l’économie sociale et solidaire.
Je ne le répéterai à chaque réponse, mais elle est résolument une économie de nos territoires. C’est d’ailleurs pourquoi je passe la plupart de mon temps en déplacement, pour observer les structures de l’économie sociale et solidaire. Il n’y a pas débat, je l’ai déjà dit, l’économie sociale et solidaire est une bonne partie de la solution de sortie de crise.
On peut avoir une autre analyse sur le 1,3 milliard d’euros directs et les 3,9 milliards d’euros indirects, mais il s’agit tout de même d’espèces sonnantes et trébuchantes. Les appels à projets sont tous disponibles sur le site de Bercy. Les acteurs de l’ESS le savent, puisqu’ils commencent à y répondre, et je peux mesurer leur intérêt, accompagnés qu’ils sont par le DLA, qui les aide à bien répondre aux appels à projets.
J’ai bien mesuré aussi, pour être précise, que les appels à projets, les AAP, sont moins faciles pour les acteurs de l’ESS que les appels à manifestation d’intérêt, les AMI. C’est aussi pour cela que j’ai souhaité très vite augmenter le DLA de 2,8 millions d’euros, pour faire en sorte qu’on les accompagne davantage.
Vous avez raison, madame la sénatrice, il y a dans la loi de 2014 de nouveaux outils, de nouvelles structures, notamment les SCIC et les coopératives d’activité et d’emploi, ou CAE. Pour tout vous dire, je pense qu’il faut encore travailler un peu au plan réglementaire sur ces organismes, qui connaissent un vrai succès, mais qui doivent être un peu consolidés juridiquement.
C’est pourquoi, et j’en terminerai là, je disposerai, d’ici à la fin du mois d’avril, d’un rapport que j’ai demandé à l’inspection générale des finances, l’IGF, et à l’inspection générale des affaires sociales, l’IGAS, sur la consolidation des CAE et des SCIC. S’il faut prendre des mesures réglementaires simples pour faire en sorte qu’elles puissent se développer plus facilement, je proposerai au Gouvernement que nous les prenions.
Je le répète, ce rapport sera rendu fin avril, et j’aurai grand plaisir à le partager avec les sénateurs. L’IGF et l’IGAS sont mobilisées, et j’ai bien l’intention de consolider le modèle de la loi 2014, auquel je crois.
M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Arnaud.
M. Jean-Michel Arnaud. Madame la secrétaire d’État, les crises que traverse notre pays montrent la nécessité de prendre en compte la dimension sociale et écologique dans les logiques économiques et financières, comme cela vient d’être rappelé.
Conjuguant l’objectif de rentabilité, l’utilité sociale et le respect de l’environnement, l’ESS est devenue une référence en matière de développement économique durable. Le poids qu’elle représente dans l’économie globale ne cesse de s’accroître d’année en année.
Mon département, les Hautes-Alpes, en offre une excellente illustration. C’est un territoire rural, où la proximité, la solidarité et la production locale de biens et de services reposent sur un grand nombre d’organisations coopératives, mutualistes et associatives, mobilisant à la fois des salariés et des bénévoles. L’ESS représente ainsi 20 % des emplois privés dans mon département et près de 25 % dans l’agglomération où je suis par ailleurs élu.
Pour soutenir ce secteur d’activité, vous avez, madame la secrétaire d’État, lancé un plan de plus d’un milliard d’euros, qui se décline notamment dans de multiples appels à projets. Si cela va dans le bon sens, il s’agit cependant d’un ensemble d’aides disparates rattachées à divers fonds de soutien, souvent trop peu visibles et difficilement actionnables par la multitude d’acteurs de l’ESS. Je regrette un manque de cohérence globale de tous ces outils.
Madame la secrétaire d’État, pourquoi ne pas créer un fonds unique et spécifique d’investissement dédié à l’économie sociale et solidaire ? Une telle structure permettrait de soutenir directement les différents acteurs de l’ESS, tout en mettant en valeur leurs vertus sociales et écologiques dans l’économie concurrentielle.
Par ailleurs, vous avez évoqué une enveloppe de seulement 100 millions d’euros à destination des associations de lutte contre la pauvreté.
Dans mon département, je constate, hélas, que les fonds de ces associations sont quasiment réduits à néant à cause de la crise qui sévit depuis un an. Comment le Gouvernement compte-t-il les aider concrètement, alors que les sollicitations financières dont elles sont l’objet ont explosé depuis un an ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Olivia Gregoire, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargée de l’économie sociale, solidaire et responsable. Monsieur le sénateur Arnaud, j’ai bien conscience qu’un certain nombre d’acteurs de l’économie sociale et solidaire ne sont pas toujours informés des aides auxquelles ils sont éligibles.
Rappelons – M. Benarroche a déjà mentionné les Cress – que la diffusion de cette information est l’une des missions d’ESS France, qui a la tutelle du Conseil national des Cress depuis un certain temps. J’ai des échanges très fréquents avec ESS France ; je discute encore plus souvent avec les têtes de réseau. Il est important que chacune des familles de l’économie sociale et solidaire fasse connaître l’ensemble des aides ; c’est aussi le sens du soutien budgétaire, bien légitime, que j’offre à ces têtes de réseau.
Au travers d’entretiens bimensuels, que ce soit avec les préfectures, avec les régions, ou avec les départements – MM. Muselier et Bussereau pourront en témoigner –, je n’ai de cesse de faire circuler les informations sur les dispositifs destinés aux acteurs de l’économie sociale et solidaire, mais aussi de faire remonter les difficultés qu’ils peuvent rencontrer. Je fais tout ce qui est en mon pouvoir, alors que le temps qui m’est imparti est assez court, pour faire savoir aux acteurs ce à quoi ils ont droit en mobilisant l’ensemble de l’écosystème.
Vous avez également mentionné, monsieur Arnaud, le sujet précis du plan de soutien aux associations de lutte contre la pauvreté, doté de 100 millions d’euros, et de la somme équivalente qui a été programmée pour l’hébergement d’urgence, qui est opéré à plus de 90 % par des associations.
Je suis à votre disposition, de même que mon cabinet, pour poursuivre la discussion sur ce point, puisque c’est toujours un défi que d’apporter une réponse précise dans le délai de deux minutes dont je dispose ici. Toutefois, je m’étonne que, pour le dire simplement, vous n’ayez pas vu la couleur de cet argent. Il faudra que nous discutions de nouveau.
Des appels à projets ont été lancés, la première tranche de 50 millions d’euros a été publiée, les associations peuvent y répondre et le DLA est là pour les y aider. Le Mouvement associatif est mobilisé, les Cress le sont aussi, l’argent est là, et je puis vous garantir que les appels à projets sont publiés. On doit donc pouvoir trouver une solution.
Nous sommes en tout cas à votre entière disposition pour examiner précisément le problème que vous m’indiquez sur votre territoire. Pardonnez-moi de ne pouvoir vous apporter une réponse plus précise, mais il nous faudra prendre le temps de nous pencher ensemble sur ce problème, et ce au plus vite, dès les prochains jours.
M. le président. La parole est à Mme Florence Blatrix Contat. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Florence Blatrix Contat. Madame la secrétaire d’État, l’économie sociale et solidaire fonctionne selon des règles de gestion souvent singulières, avec un engagement fort de celles et ceux qui en sont les animateurs.
Parallèlement, elle souffre d’une grande difficulté à obtenir des financements à la mesure de ses besoins. C’est ce qui ressort des entretiens que j’ai eus avec de nombreux professionnels de l’ESS.
Certes, des formules spécifiques de financement existent ; je pense notamment aux titres associatifs. Des formules ouvertes à d’autres secteurs économiques sont également susceptibles d’être utilisées, notamment les titres obligataires. Je n’ignore pas non plus que le secteur bancaire dispose de fonds a priori ciblés pour le secteur de l’ESS.
Néanmoins, si tous ces dispositifs sont utiles, ils ratent en partie leur cible. En effet, ils sont le plus souvent méconnus, même si j’ai conscience de votre action la matière, madame la secrétaire d’État. Surtout, les opérateurs du secteur bancaire connaissent mal les spécificités de l’ESS ; ce secteur si spécifique a notamment besoin de règles prudentielles particulières. Enfin, la mise en œuvre de ces dispositifs est souvent trop technique et complexe pour les entreprises sociales et solidaires de petite taille, qui sont présentes sur tout le territoire.
Madame la secrétaire d’État, comment pensez-vous contribuer concrètement à faire en sorte que, dans les territoires, les interlocuteurs des associations maîtrisent les outils de financement existants et puissent proposer une expertise technique pour les mettre en œuvre et accompagner les acteurs de l’ESS dans leur financement ?
Comment envisagez-vous de faire prendre en compte, à terme, les spécificités de ce secteur et de ses besoins de financement par les investisseurs et l’ensemble du secteur bancaire ?
À l’heure où l’épargne forcée des ménages serait devenue surabondante en raison de la crise du covid-19, ne serait-il pas envisageable d’orienter une partie de cette épargne vers l’ESS, qui participe à l’amélioration du bien-être et de la cohésion de notre société ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Olivia Gregoire, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargée de l’économie sociale, solidaire et responsable. Madame la sénatrice Blatrix Contat, vous évoquez deux sujets : les difficultés rencontrées par les petites structures, d’une part, et le traitement des besoins en financement de l’ESS par le secteur bancaire, d’autre part.
La question du financement de l’ESS est évidemment primordiale. Comme on l’a rappelé, dans ce secteur, les fonds propres sont structurellement faibles et la trésorerie est fragile. C’est lié au modèle même que porte l’ESS dans son ADN, notamment à sa lucrativité limitée.
Je veux illustrer mon propos par l’exemple du fonds de solidarité et des fonds régionaux. Je risque de me répéter, mais je vous prie de m’en excuser : c’est la réalité à laquelle je me cogne tous les jours ! Environ 14 milliards d’euros ont été décaissés à ce jour pour le fonds de solidarité ; 200 millions d’euros sont allés directement aux associations, cœur de l’ESS. C’est mon travail quotidien que de faire en sorte qu’elles y soient éligibles et de les amener à ces fonds.
Il s’agit d’un travail transpartisan, dans l’esprit de la question posée par Mme Lienemann. L’économie sociale et solidaire est l’un des îlots sur lesquels nous pouvons nous retrouver, quelles que soient nos sensibilités politiques, car il s’agit d’une économie des territoires. Dans tous mes déplacements, je me rends compte que, à tous les niveaux, l’État, les régions et les départements travaillent ensemble.
Je veux porter un message positif : de bonnes initiatives sont prises. Ainsi, la Cress de Provence-Alpes-Côte d’Azur a mis en place, en plus des aides de l’État et du dispositif d’urgence, un fonds régional complémentaire nommé ESS’OR, destiné à compléter le financement des structures de l’économie sociale et solidaire. Certaines Cress et certaines régions prennent donc en main le financement de ces structures, en bonne intelligence avec l’État, dans une logique de complémentarité : je veux saluer l’exemplarité de ces initiatives.
Vous avez également mentionné, madame la sénatrice, le secteur bancaire. Qu’il s’agisse de la Banque de France ou de la Fédération bancaire française, je veux que mon propos soit clair et fort : j’ai appelé ces organismes à l’automne dernier, pour leur demander de la bienveillance avant que n’arrivent les fonds de 30 millions d’euros que, grâce à vous, nous avons pu obtenir au sein de la quatrième loi de finances rectificative pour 2020.
Ces fonds devaient arriver à compter du 22 janvier ; ces acteurs devaient comprendre la nécessité d’attendre jusqu’à cette date. Eh bien, je ne veux pas laisser entendre que l’ESS ne serait pas écoutée par les banques privées ou la Banque de France : je veux vous dire que nous avons été entendus !
Plus largement, la médiation du crédit accompagne les structures de l’ESS dans l’ensemble de vos territoires. Même si je suis bien consciente que beaucoup de travail reste à accomplir, il me semble que les lignes sont en train de bouger.
Cela fait sept mois et demi que je me consacre à cette tâche ; il y a encore beaucoup de pain sur la planche, et le sujet du financement demeure stratégique, comme vous le soulignez, mais bien des choses bougent déjà, notamment à l’échelle régionale.
M. le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Blanc. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-Baptiste Blanc. Madame la secrétaire d’État, je veux tout d’abord honorer, en quelques mots, celles et ceux qui œuvrent au quotidien au sein de nos associations, tout spécialement en cette période ; ils méritent notre considération et notre plus profond respect.
Dans la crise que nous traversons, notre cohésion sociale est particulièrement mise en l’épreuve ; nous avons donc plus que jamais besoin d’un tissu d’associations, de coopératives et de mutuelles. Dès le début de cette crise, nous avons observé une formidable levée de citoyenneté. J’ai pu constater, dans mon département, une incroyable solidarité, y compris en milieu rural, pour faire vacciner nos concitoyens.
Évidemment, ce qui nous inquiète, c’est que la crise n’est pas finie : les difficultés financières seront importantes et les demandes toujours croissantes.
Deux points nous inquiètent encore, madame la secrétaire d’État.
Tout d’abord, quoi que l’on en dise, des signaux négatifs sont envoyés au tissu associatif depuis quelques années : on pourrait évoquer la fin des contrats aidés, la baisse des subventions publiques, la suppression de la réserve parlementaire, ou encore l’inadéquation du fonds pour le développement de la vie associative, sans parler de toutes les petites mesures qui ont eu un impact sur la collecte des dons, comme le prélèvement à la source.
Ensuite, nous avons l’impression que le modèle de l’économie sociale et solidaire est malmené. Ce n’est pas moi qui le dis, mais l’un de vos prédécesseurs, Jean Gatel, dans un excellent ouvrage que vous avez sans doute lu, L’Économie sociale et solidaire – Un nouveau modèle de développement pour retrouver l’espoir. On en tire l’impression que le compte n’y est pas !
J’allais donc lancer un appel vibrant au renforcement du plan d’urgence, mais vous avez annoncé des chiffres forts : 1,3 milliard d’euros directement, 3,9 milliards indirectement, et un fonds d’urgence de 30 millions d’euros. Nous verrons bien si tout cela est suffisant ; en l’état, nous entendons surtout des cris de détresse et d’alarme.
C’est pourquoi nous vous interpellons. Soyons donc très attentifs, car ce secteur est extrêmement fragile, alors que c’est notre pacte social qui en dépend.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Olivia Gregoire, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargée de l’économie sociale, solidaire et responsable. Je vous remercie de votre question, monsieur le sénateur Blanc.
Oui, le plan d’urgence fonctionne ; je ne sais trop s’il faut s’en inquiéter ou, d’une certaine manière, s’en réjouir. Même si me féliciter des urgences n’est pas dans ma nature, je ne puis que me satisfaire de la mise en œuvre de ce plan : en moins d’un mois, on a déjà décaissé 10 millions d’euros pour accompagner 1 600 structures. Ce n’est pas demain ou après-demain que cela se passe, monsieur le sénateur, c’est bien aujourd’hui ; j’ai tenu à vérifier ce point auprès du président de France Active avant ce débat.
Cela sera-t-il suffisant ? Je ne sais pas. Il nous faudra reprendre rendez-vous quand nous aurons tous ensemble, avec vous qui êtes au cœur des territoires, décaissé ces 30 millions d’euros. Si nous sommes bons en la matière – et nous le serons, tous ensemble ! –, cela sera fait au début du printemps ou d’ici à la fin du mois d’avril prochain.
Ce n’est pas à vous que j’apprendrai que c’est la meilleure façon d’aller légitimement redemander plus à Bruno Le Maire, mais aussi au Premier ministre, Jean Castex : je tiens en tout cas à vous garantir l’attention que cet ancien élu local prête au tissu associatif. Je sais que je suis entendue : s’il faut accompagner davantage, le Gouvernement le fera.
Au-delà de l’urgence, je veux œuvrer à la relance : la meilleure façon de soutenir de façon pérenne les petites associations et d’assurer leur financement, c’est de bien les enclencher dans le plan de relance. C’est pourquoi le dispositif local d’accompagnement est très important et il est crucial d’aider et d’accompagner les associations en matière de compétences, pour qu’elles puissent répondre à ces appels à projets.
J’entends l’expression de « modèle malmené », et ce n’est certainement pas à moi de porter une telle qualification ; je ne fais que reprendre votre expression. Sachez que je fais tout pour mieux le mener ! En tout cas, j’ai apprécié les mots de M. Benarroche : il faut que ce secteur soit mieux connu, mais aussi mieux reconnu. Cette reconnaissance est bien ce que nous devons aujourd’hui à l’économie sociale et solidaire.
Telle est ma mission, que je porte avec cœur : faire connaître et reconnaître les femmes et les hommes qui portent cette économie, qui représente tout de même, il est toujours bon de le rappeler, quelque 10 % de notre PIB et 14 % de nos emplois salariés.
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing.
M. Daniel Chasseing. Madame la secrétaire d’État, ma question concerne l’inclusion des personnes en situation de handicap et leur orientation vers des entreprises adaptées, ou EA.
Le Gouvernement a projeté de doubler, sur le quinquennat, le nombre de places en EA. Il a accéléré, en mai dernier, le déploiement de la plateforme « Mon Parcours Handicap », pour simplifier l’accès des personnes handicapées aux services adaptés.
Ces initiatives vont dans le bon sens, mais il reste beaucoup de travail pour améliorer la fluidité des parcours. Je pense en particulier au passage de certains pensionnaires stabilisés d’un foyer de vie occupationnel à une entreprise adaptée.
Aujourd’hui, une telle transition doit logiquement se faire par l’intermédiaire d’un établissement ou service d’aide par le travail, un ÉSAT, mais certains territoires, notamment dans l’hyper-ruralité, peuvent être pourvus de foyers occupationnels et d’entreprises adaptées, alors qu’ils manquent d’un ÉSAT.
Certains pensionnaires identifiés pourraient aller vers cette inclusion dans une EA, à la condition d’un encadrement spécifique en amont et pendant leur insertion, en commençant par un mi-temps, quitte à ce que ces personnes retournent finalement dans un foyer, dans le cas où le travail en EA ne s’avérerait pas possible.
Madame la secrétaire d’État, que compte faire le Gouvernement pour fluidifier ces parcours et favoriser l’inclusion par l’activité ?
Par ailleurs, vous avez évoqué les aides reçues par les entreprises adaptées pour leur équipement, mais elles restent modestes. Que prévoit le Gouvernement pour renforcer l’investissement de ces entreprises pendant la crise ?
Enfin, lorsque des travailleurs classés « travailleurs handicapés » par leur maison départementale des personnes handicapées, leur MDPH, et chômeurs à plus de 20 % demandent à travailler dans des EA, Pôle emploi leur refuse s’ils travaillent, même partiellement, en milieu ordinaire. Pourquoi ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Olivia Gregoire, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargée de l’économie sociale, solidaire et responsable. Concernant votre dernière question, monsieur le sénateur Chasseing, je n’ai pas la prétention de répondre quand je ne dispose pas de la réponse. Si vous m’y autorisez, je me permettrai donc de vous joindre avant la fin de cette semaine, afin de vous apporter une réponse.
Pour ce qui est de vos deux premières questions, je veux rappeler, sur ce sujet qui me tient particulièrement à cœur, que le Gouvernement s’est engagé dans une politique volontariste et surtout pragmatique d’amélioration du quotidien des personnes en situation de handicap, mais aussi de leurs proches.
Cet engagement, porté avec force par Sophie Cluzel, se déploie dans une pluralité d’actions dont l’ambition majeure est l’amélioration, mais aussi la simplification de l’accès au droit de façon équitable dans tous les départements. Une feuille de route importante est aujourd’hui engagée par Sophie Cluzel, avec qui je vais m’entretenir dans les prochains jours, afin de pouvoir apporter une réponse à votre deuxième question.
Quant aux aspects financiers du problème, dans le cadre du plan France Relance, nous agissons pour l’emploi des personnes en situation de handicap. Le Gouvernement a décidé de mettre en place une aide à l’embauche visant à favoriser l’emploi de ces personnes.
Cette aide, d’un montant maximum de 4 000 euros, est attribuée aux entreprises et aux associations, quelles que soient leur taille et leur structure, qui auront embauché entre le 1er septembre 2020 et le 30 juin 2021 un salarié travailleur handicapé en CDI ou en CDD d’au moins trois mois rémunéré jusqu’à deux fois le SMIC.
Parmi les mesures fléchées vers les entreprises adaptées, rappelons que 300 millions d’euros ont été déployés depuis l’été dernier, en direction de près de 5 000 entreprises sociales inclusives et, en particulier, de 800 entreprises adaptées. Ce plan a reçu 20 millions d’euros supplémentaires en décembre dernier, compte tenu du succès rencontré par ces projets créateurs d’emplois.
Ce sont donc à ce jour 320 millions d’euros qui sont, à ce jour, employés à consolider les emplois existants dans les 5 000 entreprises soutenues sur tout le territoire, mais aussi à créer 40 000 emplois nouveaux entre 2021 et 2022, dont 27 000 dès cette année.
M. le président. La parole est à M. Daniel Salmon.
M. Daniel Salmon. Madame la secrétaire d’État, comme cela a déjà été rappelé, l’ESS représente un gisement colossal d’emplois durables, qui doivent participer à la relance économique, sociale, industrielle et écologique de notre pays.
L’ESS démontre chaque jour que nous pouvons faire autrement, en plaçant l’humain au cœur de l’économie. En nous appuyant sur ce formidable réseau de compétences, d’action et de démocratie, nous pourrons apporter des solutions pertinentes à la crise sanitaire, écologique et économique.
Madame la secrétaire d’État, je ne puis que saluer votre engagement pour ce secteur, qui s’est notamment traduit par la mise en place du fonds d’urgence dédié à l’ESS, ou encore par la prise en compte des spécificités de ce secteur, pour que ses entreprises puissent bénéficier des mesures de soutien mises en place par l’État depuis la crise du covid-19.
Cela étant, je souhaite insister sur un point spécifique : il est nécessaire de structurer un écosystème capable d’aider les entreprises du secteur.
Vous avez déjà évoqué les têtes de réseaux, qui ont pour mission d’accueillir, d’informer et d’accompagner. J’insiste sur la notion d’accompagnement et d’appui des structures, notamment en matière de levée de fonds et de développement commercial, compétences parfois peu représentées dans les organisations de l’ESS, ce qui tend à favoriser les plus grosses structures au détriment des plus petites.
Cela s’est ressenti lors de la première séquence de la crise. Le Mouvement associatif a pointé la faible consommation par les associations des dispositifs mis à leur disposition pour les soutenir. Aussi, pourquoi ne pas imaginer le développement d’un centre de formalité des entreprises dédié aux entreprises de l’ESS et géré par les Cress, à l’image de ce que font déjà les chambres de commerce et d’industrie ?
Madame la secrétaire d’État, malgré vos efforts, il reste du chemin à effectuer. Que pensez-vous de cette piste ? (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Olivia Gregoire, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargée de l’économie sociale, solidaire et responsable. La tâche est lourde, monsieur le sénateur Salmon ; vous faites bien de le rappeler. C’est toujours un honneur que d’être appelé à faire partie du Gouvernement, mais c’est aussi une sacrée pression, surtout quand on n’a que peu de temps devant soi, ce qui est mon cas, même si j’ai eu l’honneur d’être parlementaire avant d’être nommée secrétaire d’État.
Il reste beaucoup à faire, qui plus est durant cette crise, pour un écosystème en pleine croissance et porteur d’avenir, dont les spécificités sont encore trop méconnues.
Je veux rappeler à ce propos un événement que l’on ne connaît peut-être pas assez. L’été dernier, peu après ma nomination au Gouvernement, je devais signer avec la Caisse des dépôts et consignations une convention d’un montant de 210 millions d’euros, pour soutenir directement le financement de l’économie sociale et solidaire dans les territoires. En fin de compte, à l’automne, la convention que j’ai signée portait sur un montant de 300 millions d’euros, soit 90 millions de plus que ce qui était prévu initialement.
Je tiens à le rappeler, car cela répond aussi à la question qui m’a été posée un peu plus tôt sur le financement de ce secteur. Les problématiques sont parfois techniques et complexes. Mais, qu’il s’agisse de la Caisse des dépôts et consignations, des banques privées ou de la Banque de France, je puis vous garantir que les hommes qui sont à leur tête – pour le coup, ce sont des hommes ! – sont attentifs à l’ESS. Ainsi, Éric Lombard, directeur général de la Caisse des dépôts, compte parmi ceux qui ne lésinent pas en matière de financement pour l’économie sociale et solidaire.
À nous d’agir ensemble ! C’est pourquoi, à défaut de rencontres physiques, je mène de nombreuses visioconférences avec les préfets et même les sous-préfets d’arrondissement. J’ai écrit à eux tous, ainsi qu’à l’ensemble des présidents de région et de département. Nous faisons tout ce que nous pouvons pour faire savoir que ces outils existent et mettre en relation France Active, les acteurs du secteur, le DLA, la Caisse des dépôts, les têtes de réseau, ou encore Bpifrance.
Je n’avais pas encore mentionné ce dernier acteur, mais il faut évoquer les prêts d’honneur que Bpifrance octroie, à hauteur de 130 millions d’euros, au sein des 230 millions d’euros qui lui reviennent parmi le 1,3 milliard d’euros du plan de relance consacré à l’ESS. Ces prêts d’honneur solidaires peuvent apporter jusqu’à 8 000 euros d’aide directe à taux zéro ; à l’heure actuelle, un peu plus de 2 000 prêts ont été ainsi octroyés, il reste encore beaucoup de marge.
J’ai donc une seule réponse à vous apporter, monsieur le sénateur : oui, il y a encore beaucoup de travail, et ce n’est qu’ensemble qu’on peut l’accomplir.