M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.
M. Fabien Gay. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, cette proposition de loi vise à combler un vide juridique concernant la procédure d’abrogation des cartes communales, qui n’est aujourd’hui pas explicitement prévue par le code de l’urbanisme. Il s’agit donc d’un texte utile et pragmatique, et nous remercions notre collègue Rémy Pointereau de cette initiative. Je tue d’emblée tout suspense en disant que nous voterons cette proposition de loi… à charge de revanche ! (Sourires.)
La procédure définie par le texte permet judicieusement le parallélisme des formes en adossant cette procédure à celle de l’adoption d’un PLU, afin de gagner du temps et d’éviter des surcoûts.
Pour autant, si l’on s’en tient aux difficultés pointées par les auteurs de cette proposition de loi, liées à la réglementation évolutive et aux coûts jugés très ou trop importants de l’élaboration des documents d’urbanisme pour les petites collectivités, force est de constater que cette proposition de loi n’apporte pas toutes les réponses.
Sur le plan de la réglementation, il est vrai que les documents d’urbanisme ont beaucoup évolué depuis la loi SRU, pour tenir compte des enjeux urbains tels que la lutte contre l’étalement urbain, l’exigence de non-artificialisation, la préservation de l’environnement et du vivant.
Ce renforcement des normes et des études n’est pas, à notre sens, du « superflu coûteux ». C’est en effet utile pour atteindre les objectifs de transition et de meilleure préservation des sols. Ainsi, alors que l’équivalent d’un département disparaît tous les sept ans du fait de l’urbanisation, renforcer les objectifs et les normes nous apparaît incontournable, à l’image du « zéro artificialisation nette » prévu à l’horizon 2050.
Les documents d’urbanisme sont des outils essentiels pour atteindre ces objectifs et, dans ce cadre, le renforcement des obligations de contenu nous semble aller dans le bon sens, celui de l’intérêt général.
Cependant, nous ne sommes pas pour l’abrogation « couperet » des POS qui précédaient les PLU, prévue par le texte, d’autant que les POS les plus récents ont été réalisés le plus souvent comme des PLU. Les collectivités, au titre de la libre administration, doivent conserver la maîtrise de l’aménagement de leur territoire.
Il faut par ailleurs, même si ce n’est pas directement l’objet de cette proposition de loi, reconnaître que les évolutions auxquelles sont confrontées les collectivités tiennent beaucoup au changement d’échelle de l’exercice de la compétence « urbanisme », un transfert difficile prévu par l’article 136 de la loi ALUR.
Nous avions, à l’époque, formulé un certain nombre de réserves sur ce transfert automatique qui dessaisissait les communes d’un élément important dans la définition de leur projet politique. Un transfert d’autant moins opportun qu’il s’articulait avec la construction d’intercommunalités forcées, ce qui n’est pas favorable à l’émergence d’un projet urbain collectivement défini et partagé.
Nous avions ainsi estimé que ce transfert de compétence venait dessaisir encore davantage les élus communaux des capacités concrètes de porter le projet politique pour lequel ils avaient été élus, participant ainsi à la vague de dévitalisation des communes et de la démocratie de proximité.
Ces constructions intercommunales, réalisées parfois en dépit des volontés communales, expliquent à nos yeux pour beaucoup les retards pris dans l’élaboration des PLU et des PLUi.
Nous avions, par ailleurs, considéré à cette même époque qu’avec la suppression par la loi de finances de 2014 de l’Assistance technique de l’État pour des raisons de solidarité et d’aménagement du territoire (Atesat), c’est-à-dire du soutien de l’État aux collectivités justement sur ces questions territoriales, les communes avaient subi une perte très importante d’ingénierie et de maîtrise de leur territoire.
La difficulté des collectivités à faire face à la construction de nouveaux documents d’urbanisme tient donc, à la fois, à une perte d’ingénierie humaine liée à leur dévitalisation progressive, à la fin du soutien technique de l’État et à une baisse continue des ressources financières provenant de la dotation globale de fonctionnement (DGF). Leur capacité d’action est donc triplement bridée. Nous sommes par conséquent favorables aux dispositions de cette proposition de loi qui facilitent l’exercice de la compétence « urbanisme » pour les plus petites collectivités.
Face à cette situation, et au-delà de l’accompagnement des programmes nationaux par l’ANCT, il nous semble que le rôle de cette agence devrait être recentré sur un soutien plus fort des collectivités dans leur démarche d’élaboration des documents d’urbanisme, notamment au regard des enjeux de transition écologique et d’aménagement équilibré des territoires.
Pour conclure, je dirai que l’esprit de décentralisation doit être maintenu. L’État doit non pas porter une vision autoritaire de l’aménagement territorial et des collectivités, mais apporter à celles-ci son soutien puissant au service de l’intérêt général et de la transition écologique. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Moga, pour explication de vote. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)
M. Jean-Pierre Moga. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la proposition de loi visant à sécuriser l’abrogation des cartes communales et à reporter la caducité des plans d’occupation des sols, déposée par notre collègue Rémy Pointereau, est un texte de clarification juridique et de simplification des démarches, mais aussi de bon sens à destination des élus locaux.
Permettez-moi de remercier à mon tour l’auteur de cette proposition de loi et le rapporteur de la commission des affaires économiques. Loin des débats manichéens sur le droit de l’urbanisme, en particulier loin de ceux que nous avons eus sur le transfert de la compétence en matière d’urbanisme aux intercommunalités lors de l’examen de la loi ALUR de 2014, le texte déposé, puis celui adopté par la commission, présentent des propositions d’adaptation liées à des situations locales réelles.
Dans ce texte, aucun objectif en matière d’organisation locale et aucune mesure en matière de stratégie d’aménagement ne sont remis en cause.
Certains pourront éventuellement le regretter, mais la disparition des POS, la transformation des cartes communales et le transfert de la compétence aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) ne sont pas remis en question. Vingt ans après la loi SRU, six ans après la loi ALUR, leurs dispositions sont appliquées, bon gré mal gré, par les territoires.
Ce mouvement long est en passe d’aboutir, puisque plus de la moitié des communes françaises appartiennent à un EPCI désormais compétent en matière d’urbanisme ; plus de 18 000 PLU ont été élaborés et il restait à peine 530 POS au 31 décembre dernier.
Madame la ministre, cette proposition de loi ne revient pas sur les réformes passées. Elle n’est pas non plus conservatrice. Elle a pour objectif d’accompagner les communes et les élus locaux dans cette dernière mutation.
Le droit de l’urbanisme est une matière ardue et mouvante : ardue, parce qu’il recèle de nombreux détails qui nécessitent un travail quotidien, mais aussi parce qu’il est à la fois un droit dur, dans le code de l’urbanisme, et un droit mou, par la jurisprudence et les instructions données aux préfets ; mouvante, parce que les lois changent souvent et que la hiérarchie des documents d’urbanisme est un empilement de règles souvent validées par des niveaux différents : PLU et carte communale au niveau municipal, PLUi au niveau intercommunal, schéma de cohérence territoriale (SCoT) au niveau intercommunal ou à l’échelle d’un pays, ou encore schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (Sraddet) au niveau régional.
Les élus locaux, on le sait bien, font leur maximum, mais reconnaissons qu’un peu de clarification et surtout d’accompagnement de la part des services de l’État ne seront jamais de trop.
M. François Bonhomme. C’est certain !
M. Jean-Pierre Moga. Concernant la présente proposition de loi, son article 1er apporte des précisions utiles sur la période de transition au moment du passage d’une carte communale à un PLU ou à un PLUi, et fixe une procédure plus efficace et plus lisible. S’il existe des règles ou des instructions, comme l’a rappelé le Gouvernement devant la commission, elles ne sont pas assez sûres et connues ; ce texte permet de les fixer et d’encadrer la transition. Cet article simplifie aussi certaines démarches, en limitant le nombre d’enquêtes publiques qui ont naturellement trait au même sujet.
Pour l’article 2, le rapporteur a largement tenu compte de la nouvelle situation du droit après le 1er janvier de cette année. Il est proposé une boîte à outils de quelques dérogations pour les 530 communes restantes ; cela représente à peine 5 communes par département. Mieux vaut les aider à transformer leurs documents d’urbanisme que les braquer. Ce sera au profit de tous et, en particulier, des habitants de ces communes.
Avant de conclure, madame la ministre, j’aimerais vous interpeller sur votre futur projet de loi dit « 4D ». Nous n’en connaissons encore ni toutes les mesures ni tous les détails ; néanmoins, prenez garde à ne pas bousculer, une fois encore, l’organisation locale en matière d’urbanisme : inutile de créer de nouveaux transferts et de nouveaux délais ! Il serait au contraire préférable de renforcer l’ingénierie de l’État à l’échelle départementale, pour accompagner au mieux les élus locaux.
Pourriez-vous nous donner vos ambitions en la matière, en particulier vos axes de réflexion contenus dans le projet de loi 4D ?
M. Jean-Pierre Moga. Pour revenir à la proposition de loi qui nous est soumise, les membres du groupe Union Centriste voteront en faveur de ce texte. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy, pour explication de vote.
M. Christian Redon-Sarrazy. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, cette proposition de loi a deux objectifs : expliciter le droit en matière d’abrogation des cartes communales et accorder deux ans supplémentaires aux communes n’ayant pas achevé leur transition du POS au PLU ou au PLUi au 31 décembre 2020.
Quelque 530 communes en France seraient concernées par cette dernière problématique, soit environ 5 communes par département qui se retrouvent dans un état de flou juridique depuis le 1er janvier 2021, date à laquelle les POS sont devenus caducs.
Il est donc tout à fait préjudiciable que l’État ait refusé de se saisir du sujet plus tôt, estimant que le droit actuel fournissait déjà des solutions. La situation aurait pu être régularisée avant la date limite de caducité, ce qui aurait évité à ces petites communes de se retrouver dans une situation difficile, sans les documents d’urbanisme qui leur permettaient de planifier leur développement.
En premier lieu, on peut s’interroger légitimement sur les raisons qui expliquent ces difficultés à passer du POS au PLU ou au PLUi, difficultés qui n’ont rien à voir avec une quelconque négligence. Comme j’ai pu le souligner en commission, je maintiens que lorsqu’une petite commune appartient à une intercommunalité de taille importante, la prise en compte de ses propres intérêts peut être en soi un sujet de discussion serré.
Nous abordons ici la liberté d’administration des communes : si le nouveau document d’urbanisme ne répond pas, en matière d’aménagement du territoire, aux besoins de ces communes souvent situées dans des territoires fragiles, il est compréhensible qu’elles aient besoin de temps pour affiner son élaboration. Était-il possible de fournir à ces communes les moyens nécessaires en ingénierie et en finances pour tenir les délais ? Sans doute, mais cela n’a pas été anticipé, d’où la situation où elles se trouvent aujourd’hui.
Notre rôle en tant qu’élus des territoires est de nous montrer à l’écoute de ces difficultés et d’y apporter une réponse.
En l’absence de tout document d’urbanisme, ces communes reviennent au RNU. Je sais, madame la ministre, que vous jugez cette solution tout à fait applicable ; vous rappelez que quelques maires ruraux de votre connaissance souhaitent conserver ce régime d’urbanisme.
M. Christian Redon-Sarrazy. Néanmoins, ce souhait est loin d’être unanime. En effet, le RNU nécessite pour les maires d’obtenir l’avis conforme du préfet. En outre, à la différence des documents d’urbanisme tels que les PLU, les PLUi ou les POS, le RNU ne définit pas de zones par affectation : zones industrielles, touristiques, ou encore naturelles. Il ne s’articule qu’autour de deux notions, des terrains constructibles et non constructibles, c’est-à-dire des zones urbanisées et non urbanisées, sachant que la notion d’« urbanisation » est soumise à une appréciation parfois différente d’un département à l’autre. J’en sais quelque chose : j’ai pu constater de telles différences entre la Corrèze et la Haute-Vienne !
C’est un régime restrictif où les situations se règlent au cas par cas, selon la libre appréciation des directeurs départementaux des territoires. Le manque de transparence est donc total, et le risque de voir des prédateurs fonciers lésés par les précédents documents d’urbanisme devenus caducs tenter d’exploiter les ambiguïtés permises par le retour au RNU est réel. Un retour à ce dispositif va à l’encontre de la lutte contre l’artificialisation des sols et n’assure pas aux communes des conditions de développement semblables à celles qui étaient prévues dans les POS.
Le Sénat s’est vu contraint d’examiner le présent texte après la date limite de caducité ; les auditions menées par le rapporteur ont permis de constater que ce vide juridique entraînait la perte de la maîtrise foncière et du droit de préemption urbain, ainsi qu’un risque de blocage de certains projets à cause du retour au RNU.
Une réécriture complète de l’article 2 de la proposition de loi a donc été proposée, de manière à atténuer les conséquences de la caducité des POS par la mise à la disposition des maires des communes concernées d’une boîte à outils applicable jusqu’à l’adoption du nouveau PLU ou PLUi, et jusqu’au 31 décembre 2022 au plus tard.
Le texte de la commission prévoit également de créer un droit de proposition des maires : ils pourraient solliciter du préfet l’usage de son pouvoir de dérogation aux règles du RNU pour des projets qui auraient été compatibles avec le POS antérieur, mais ne le sont pas avec le RNU.
Le Gouvernement s’est pourtant montré opposé à ces mesures transitoires, arguant que, sur les 530 communes évoquées, 160 communes seulement se situaient à l’arrêt du projet de PLUi et 200 autres à un stade d’avancement très faible, tandis que 130 communes revenues au RNU allaient pouvoir approuver rapidement leur PLUi.
Sur le droit de proposition, madame la ministre, vous avez émis un avis défavorable au motif que le maire restait l’autorité compétente pour délivrer l’autorisation, sous la seule réserve de recueillir l’avis conforme du préfet. Malheureusement, votre argumentaire ne fonctionne réellement que dans le cas où les deux parties sont d’accord. Même si le maire reste libre de ne pas suivre les conclusions du préfet, il n’est pas toujours évident d’aller contre l’avis de l’administration.
Pour ces 360 communes, madame la ministre, vous avez proposé en commission d’écrire à tous les préfets pour vous faire remonter avec précision pourquoi certaines communes ou intercommunalités connaissent des situations de blocage.
Vous proposez enfin d’accompagner au plus près ces collectivités, par l’ingénierie de l’État sur les territoires ou l’aide directe fournie par l’ANCT.
Vos propositions prouvent bien qu’un dialogue spécifique et « cousu main », pour reprendre votre expression, est nécessaire. On peut néanmoins regretter que l’État ne l’ait pas mis en place plus tôt.
M. le président. Il est temps de conclure, mon cher collègue.
M. Christian Redon-Sarrazy. Même si peu de communes sont désormais concernées, il n’est pas question de les négliger. En effet, le sujet est de la même importance pour une agglomération ou pour une petite commune, et toutes deux sont utiles à nos territoires.
Le groupe socialiste confirmera donc le vote favorable qu’il a eu en commission sur cette proposition de loi, en espérant que la navette parlementaire sur ce texte s’achèvera dans les délais de la présente législature. En effet, si tel n’était pas le cas et que, par ailleurs, le traitement au cas par cas ne permettait pas de régulariser les situations, le problème resterait entier.
M. le président. La parole est à M. Franck Menonville, pour explication de vote. (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP et RDPI.)
M. Franck Menonville. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la proposition de loi de notre collègue Rémy Pointereau que nous examinons en cette fin d’après-midi va assurément dans le bon sens. Elle vient sécuriser certains vides juridiques identifiés sur nos territoires par les élus locaux, que ce soit au sein des communes ou des EPCI.
Nous l’avons suffisamment dit ici : il existe encore des difficultés, notamment dans de petites communes rurales et de petits EPCI, même si la couverture des PLU et des PLUi progresse sur le territoire hexagonal.
La situation que nous avons connue en 2020 – crise sanitaire, renouvellement différé d’élus municipaux – a causé certaines difficultés supplémentaires pour de nombreux EPCI et communes dans la transition qu’ils avaient engagée afin d’éviter la caducité des POS et l’abrogation de cartes communales. Dans le premier cas, la date limite, repoussée à plusieurs reprises, est désormais dépassée depuis la fin du mois de décembre dernier.
Comme j’ai eu l’occasion de le dire lors de notre examen de ce texte en commission la semaine passée, les ralentissements ont aussi pu être causés par les évolutions des périmètres des intercommunalités – certaines, de fait, ont été contraintes de fusionner –, mais aussi par les transferts de compétences évoqués par Fabien Gay, qui ont aussi beaucoup mobilisé les intercommunalités. Ces évolutions sont parfois venues ajouter à la complexité des procédures existantes, souvent dénoncée par les élus. On peut aussi ressentir sur nos territoires un manque d’accompagnement et d’ingénierie ; l’ANCT a pour mission de les combler.
Le présent texte apporte donc des réponses pratiques et réalisables. Je salue ce que nous appelons la « procédure combinée » et son approfondissement. Elle me paraît être logique et pragmatique.
Comme j’ai pu également le dire lors du débat en commission, l’article 2 de cette proposition de loi et la boîte à outils qui y est développée sont les bienvenues pour les 530 communes concernées.
Les possibilités qui sont données aux maires dans le cadre des autorisations d’urbanisme et des dérogations aux règles du RNU auront des finalités concrètes. Le couple maire-préfet serait une nouvelle fois sollicité pour rechercher des solutions au plus près des problématiques des communes et des territoires.
Parmi les éléments de cette boîte à outils, on trouve le droit de préemption urbain. En effet, dans le cadre du RNU, ce droit est très limité et notamment circonscrit à la création de logements sociaux. D’autres objectifs du droit de préemption urbain sont quant à eux impossibles à mobiliser, ce qui risque de susciter des difficultés pour les communes concernées.
Ce texte apporte donc des solutions pour faire face à cette période de transition.
Enfin, je veux évoquer le caractère temporaire des dérogations et alternatives détaillées à l’article 2. Il me paraît essentiel qu’au-delà du 31 décembre 2022 les transitions aient pu être effectuées et que les effets négatifs des situations actuelles soient définitivement derrière nous. Là encore, nous devons rester attentifs et accompagner ces communes.
Le rôle des préfets et des maires demeure central. Ils doivent œuvrer de concert : c’est un gage de solutions pour nos territoires, c’est aussi l’esprit de ce texte.
Pour conclure, je suis amené à constater sur le terrain que les politiques d’urbanisme ne sont pas toujours adaptées aux territoires ruraux. Si je conviens qu’il faut lutter contre l’artificialisation des terres et l’étalement urbain, il ne faut pas pour autant exclure les territoires ruraux de leur développement urbanistique. Les politiques actuelles sont quelquefois trop restrictives : il devient parfois impossible de proposer des terrains à bâtir aux enfants de nos villages. Leur développement, indispensable, constitue vraiment un gage d’attractivité pour nos villages et nos territoires.
Le groupe Les Indépendants soutiendra donc ce texte pragmatique et de bon sens, qui accompagne les transitions des communes, même s’il ne répondra sans doute pas à toutes les situations. (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP et RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.
M. Daniel Salmon. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous partageons l’objectif tout à fait louable de cette proposition de loi, qui permet de mieux accompagner la transition des documents d’urbanisme communaux vers les PLU et PLUi. Le cadre législatif de ces règlements a fait l’objet d’un certain nombre de réformes importantes depuis les années 2000 ; je n’en referai pas l’historique.
Ce texte s’attelle d’abord à une simplification et à une clarification bienvenues du cadre juridique quant à l’abrogation des cartes communales. Comme nous l’avons souligné en commission, la législation actuelle n’apporte aucune précision sur cette procédure ; nombre d’élus locaux demandent de la lisibilité sur le droit applicable en la matière.
Environ 2 300 communes, soit 40 % de celles qui sont aujourd’hui couvertes par une carte communale, seront bientôt couvertes par un PLUi. Ces communes peuvent se retrouver démunies face à la lourdeur et à la complexité de la procédure, qui sont notamment dues à l’obligation d’organiser une enquête publique supplémentaire.
Il convient donc de clarifier et d’expliciter le droit et de lever des contraintes inutiles, pour ne plus exposer des communes à une potentielle insécurité juridique. Ce sont surtout les plus petites d’entre elles qui peuvent être mises à mal, celles qui sont peu accompagnées dans ces évolutions procédurales et qui n’ont pas les moyens humains et financiers d’y faire face ; pour certaines d’entre elles, je dirais plutôt qu’elles n’ont plus ces moyens.
En ce sens, l’article 1er nous paraît tout à fait pertinent : il fixe dans la loi la procédure applicable, qui permet de sécuriser juridiquement ces communes et d’apporter aux élus locaux des outils clairs et efficaces pour davantage de prévisibilité.
Il apporte notamment une souplesse accrue aux collectivités et aux intercommunalités, lorsque l’abrogation d’une carte communale intervient au profit de l’approbation d’un PLUi, et prévoit ainsi une procédure combinée d’abrogation de la carte communale et d’approbation du PLUi via une enquête publique unique et une seule délibération finale. Voilà le plus important !
Nous saluons le renforcement par la commission de cette procédure combinée, qui sera prévue dès la délibération initiale de prescription. Cela tend à éviter tout décalage entre l’abrogation des cartes et la mise en application du PLUi, et permet d’éviter la mise en application temporaire du RNU.
L’article 2 initial, qui reportait de deux ans, soit jusqu’au 31 décembre 2022, la date de caducité des POS nous posait davantage question : l’argument selon lequel la crise sanitaire et la période de confinement auraient empêché l’avancée de certaines communes sur leur document d’urbanisme peut s’entendre, mais notons que cela fait tout de même vingt ans que la disparition des POS doit être actée. Un an supplémentaire nous paraissait largement suffisant pour laisser les 530 communes concernées faire aboutir leur PLUi.
Comme nous l’avons vu en commission, ce délai supplémentaire est inopérant puisque la caducité a été actée depuis le 1er janvier. La commission a donc proposé d’apporter des dérogations facultatives, ciblées et encadrées dans le temps aux maires des communes concernées par la caducité, en se basant sur un dialogue renforcé entre le maire et le préfet.
Ces dispositions m’apparaissent plutôt pertinentes et utiles pour les communes, afin notamment de leur éviter de se retrouver soumises au RNU. En effet, ce règlement peut entraîner un certain nombre de problématiques quant à la continuité ou à la mise en place de projets structurants pour le territoire concerné.
Nous restons tout de même vigilants : ces dérogations doivent être suffisamment cadrées et ne sauraient permettre de revenir temporairement sur des réglementations nécessaires pour la protection des paysages et de la biodiversité, en lien avec l’artificialisation des sols ou la protection du littoral.
Prenons garde à ce que ce délai supplémentaire ne soit pas utilisé comme un moyen de déroger à l’application de documents d’urbanisme qui s’imposeront aux futurs PLU ou PLUi. Je pense notamment aux SCoT. Merci, madame la ministre, monsieur le rapporteur, de nous apporter des éléments sur ce point.
Pour conclure mon explication au nom du groupe écologiste, nous voterons pour ce texte qui permet globalement de clarifier le droit et apporte des outils utiles aux élus locaux. J’imagine qu’il fera consensus ; en ce sens, l’usage de la procédure de législation en commission est justifié. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour explication de vote.
Mme Patricia Schillinger. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, depuis le transfert au niveau communal de la compétence en matière d’urbanisme, en 1983, plusieurs réformes sont intervenues pour encadrer l’action des collectivités en la matière. Avec les lois SRU et ALUR, les documents d’urbanisme sont devenus de véritables instruments d’aménagement et de cohésion des territoires, intégrant des objectifs de contrôle de l’étalement urbain, de mixité sociale, ou encore, plus récemment, de lutte contre le changement climatique.
Avec la complexité croissante des règles en matière d’urbanisme, aggravée dans certaines collectivités par le manque d’ingénierie et de moyens financiers, les maires et les présidents d’intercommunalité peuvent rencontrer des difficultés dans l’élaboration de leurs documents d’urbanisme.
Aussi, la proposition de loi que nous examinons entend épauler ces collectivités face à ces difficultés.
Il est question, d’une part, à l’article 1er, de clarifier et d’expliciter la procédure applicable en matière d’abrogation des cartes communales, et, d’autre part, à l’article 2, de répondre aux inquiétudes suscitées par la disparition des POS. En commission, nous avons salué la volonté de sécuriser la procédure d’abrogation des cartes communales portée à l’article 1er par les auteurs de cette proposition de loi. Mais si le droit se doit d’être lisible, la codification proposée ne nous a toutefois pas semblé nécessaire.
La jurisprudence, reprise par de nombreuses instructions ministérielles et confirmée dans la pratique, démontre que les solutions existent et sont opérationnelles. Or, en matière de codification, le mieux s’avère parfois être l’ennemi du bien.
Aussi, notre crainte est que l’introduction de nouvelles dispositions dans le code de l’urbanisme génère de nouveaux contentieux et qu’elle nuise davantage à la lisibilité du droit qu’elle ne l’améliore.
En revanche, les auteurs de la proposition de loi ont relevé à juste titre l’existence d’un vide juridique durant la courte période qui sépare le moment de l’abrogation de la carte communale de celui de l’entrée en vigueur du PLU.
Si le texte a le mérite de proposer une solution pour combler ce vide juridique, la voie législative ne nous semble pas la plus appropriée, en raison notamment du temps qui serait nécessaire pour une mise en œuvre effective de cette solution.
En conséquence, nous avons choisi en commission de faire confiance à Mme la ministre, qui s’est engagée à apporter une solution à cette situation par la voie réglementaire. Une instruction claire rappelant les règles d’abrogation des cartes communales doit par ailleurs être envoyée aux préfets.
Nous nous sommes montrés plus sceptiques en ce qui concerne l’article 2, qui reportait à l’origine de deux ans la date de caducité des POS. Il s’agissait de tenir compte du retard pris par certaines communes dans l’élaboration de leur PLU, notamment du fait de la crise sanitaire.
Si nous comprenons l’inquiétude suscitée par cette caducité, un tel report nous aurait semblé inéquitable par rapport aux communes qui ont accéléré l’adoption de leurs documents d’urbanisme et ont tenu les délais.
Par ailleurs, le principe de non-rétroactivité de la loi s’opposait à ce que l’on revienne sur la caducité des POS intervenue au 1er janvier 2021.
Enfin, un énième report ne nous a pas semblé opportun, alors qu’il ne reste que 530 communes concernées et qu’une grande partie d’entre elles sont en train de terminer l’élaboration de leur document d’urbanisme.
Cet article a toutefois été complètement réécrit en commission. S’il n’y est plus question de report de la caducité des POS, la rédaction proposée revient par des voies de contournement aux mêmes finalités.
En conséquence, cette nouvelle rédaction ne modifie pas notre regard sur l’objet de cette mesure. Conscients toutefois des difficultés que peuvent rencontrer certains élus en matière d’urbanisme, nous observons avec bienveillance la démarche portée par ce texte.
Nous ne pouvons néanmoins totalement y souscrire, puisque les solutions qui y sont proposées s’avèrent déjà satisfaites ou trouveront une traduction plus rapide et plus efficace par la voie réglementaire.
Aussi, comme Mme la ministre a entendu les difficultés exprimées et s’est engagée à y répondre, nous choisirons de nous abstenir. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)