Sommaire
Présidence de M. Vincent Delahaye
Secrétaires :
Mmes Jacqueline Eustache-Brinio, Martine Filleul.
2. Loi de finances pour 2021. – Suite de la discussion d’un projet de loi
Amendement n° I-550 de M. Hervé Maurey. – Adoption.
Amendement n° I-1072 de M. Rachid Temal. – Retrait.
Amendement n° I-488 rectifié bis de M. Michel Savin. – Devenu sans objet.
Amendement n° I-489 rectifié de M. Michel Savin. – Adoption.
Amendement n° I-490 rectifié de M. Michel Savin. – Devenu sans objet.
Amendement n° I-491 rectifié de M. Michel Savin. – Devenu sans objet.
Amendement n° I-1027 de M. Éric Bocquet. – Devenu sans objet.
Amendement n° I-1176 rectifié bis de Mme Nadia Sollogoub. – Adoption.
Amendement n° I-11 rectifié de Mme Christine Lavarde. – Rejet
Amendement n° I-842 rectifié bis de M. Richard Yung. – Rejet.
Amendement n° I-706 rectifié ter de M. Jean-Michel Arnaud. – Rejet.
Amendement n° I-492 rectifié de M. Michel Savin. – Retrait.
Adoption de l’article modifié.
Articles additionnels après l’article 24
Amendement n° I-1253 rectifié de la commission. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Adoption de l’article.
Article additionnel après l’article 25
Amendement n° I-273 de Mme Nicole Bonnefoy. – Rejet.
Articles additionnels après l’article 26
Amendement n° I-1239 rectifié ter de M. Philippe Dominati. – Retrait.
Amendement n° I-631 rectifié ter de M. Serge Babary. – Retrait.
Amendement n° I-1165 rectifié ter de Mme Nadia Sollogoub. – Rejet.
Amendement n° I-1166 rectifié ter de Mme Nadia Sollogoub. – Rejet.
Amendement n° I-477 rectifié de M. David Assouline. – Rejet.
Amendement n° I-348 rectifié de M. David Assouline. – Rejet.
Adoption de l’article.
Amendement n° I-929 de Mme Sophie Taillé-Polian. – Rejet.
Adoption de l’article.
Article additionnel après l’article 28
Amendement n° I-1255 du Gouvernement. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Article 31 (précédemment examiné)
M. Claude Raynal, président de la commission des finances
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher
3. Questions d’actualité au Gouvernement
intervention du président de la république du 24 novembre 2020 et nouvelles annonces
M. Emmanuel Capus ; M. Gabriel Attal, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, porte-parole du Gouvernement.
politique du gouvernement en matière d’immigration
M. Philippe Dallier ; Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur, chargée de la citoyenneté ; M. Philippe Dallier.
prise en charge spécifique de la pauvreté et de la précarité engendrées par la crise sanitaire
M. Olivier Henno ; Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l’autonomie ; M. Olivier Henno
moyens accordés à la lutte contre les violences faites aux femmes
Mme Marie-Claude Varaillas ; M. Gabriel Attal, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, porte-parole du Gouvernement.
Mme Marie Evrard ; Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur, chargée de la citoyenneté.
évacuation du campement place de la république à paris
M. Jérôme Durain ; Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur, chargée de la citoyenneté ; M. Jérôme Durain.
Mme Maryse Carrère ; M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d’État auprès de la ministre du travail, de l’emploi et de l’insertion, chargé des retraites et de la santé au travail.
politique du gouvernement en matière de sécurité
M. Guillaume Gontard ; M. Jean Castex, Premier ministre ; M. Guillaume Gontard.
centrale de fessenheim et coupures d’électricité
M. Christian Klinger ; M. Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué auprès de la ministre de la transition écologique, chargé des transports ; M. Christian Klinger.
Mme Annie Le Houerou ; M. Gabriel Attal, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, porte-parole du Gouvernement.
M. Cédric Vial ; M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères, chargé du tourisme, des Français de l’étranger et de la francophonie ; M. Cédric Vial.
situation économique et financière des outre-mer
Mme Lana Tetuanui ; M. Sébastien Lecornu, ministre des outre-mer ; Mme Lana Tetuanui.
M. Laurent Burgoa ; Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.
M. Rémi Cardon ; Mme Frédérique Vidal, ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation ; M. Rémi Cardon.
conséquences psychologiques de la crise sur les étudiants
M. Stéphane Piednoir ; Mme Frédérique Vidal, ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation ; M. Stéphane Piednoir.
évacuation de la zad du carnet
Mme Laurence Garnier ; M. Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué auprès de la ministre de la transition écologique, chargé des transports ; Mme Laurence Garnier.
Suspension et reprise de la séance
4. Nécessité de reconnaître la République du Haut-Karabagh. – Adoption d’une proposition de résolution
Discussion générale :
M. Bruno Retailleau, coauteur de la proposition de résolution
Clôture de la discussion générale.
Texte de la proposition de résolution
Adoption, par scrutin public n° 34, de la proposition de résolution.
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE Mme Pascale Gruny
5. Loi de finances pour 2021. – Suite de la discussion d’un projet de loi
Amendement n° I-1258 du Gouvernement. – Adoption.
Adoption de l’ensemble de l’article et de l’état annexé, modifié.
Demande de seconde délibération
Demande de seconde délibération du Gouvernement sur l’article liminaire. – Adoption.
Amendement n° A-1 du Gouvernement. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Vote sur l’ensemble de la première partie du projet de loi
Adoption, par scrutin public n° 35, de l’ensemble de la première partie du projet de loi, modifié.
compte rendu intégral
Présidence de M. Vincent Delahaye
vice-président
Secrétaires :
Mme Jacqueline Eustache-Brinio,
Mme Martine Filleul.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Loi de finances pour 2021
Suite de la discussion d’un projet de loi
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2021, adopté par l’Assemblée nationale (projet n° 137, rapport général n° 138).
Dans la discussion des articles, nous poursuivons l’examen, au sein de la première partie, des dispositions relatives aux ressources.
Nous sommes parvenus à l’article 24.
PREMIÈRE PARTIE (suite)
CONDITIONS GÉNÉRALES DE L’ÉQUILIBRE FINANCIER
TITRE Ier (suite)
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES
II. – RESSOURCES AFFECTÉES (SUITE)
B. – Impositions et autres ressources affectées à des tiers
Article 24
I. – L’article 46 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012 est ainsi modifié :
A. – Le tableau du second alinéa du I est ainsi modifié :
1° À la troisième ligne de la dernière colonne, le montant : « 557 300 » est remplacé par le montant : « 566 667 » ;
2° À la quatrième ligne de la dernière colonne, le montant : « 1 210 000 » est remplacé par le montant : « 1 285 000 » ;
3° À la cinquième ligne de la dernière colonne, le montant : « 2 156 620 » est remplacé par le montant : « 2 197 620 » ;
4° La septième ligne est supprimée ;
5° (Supprimé)
5° bis (nouveau) À la vingt-cinquième ligne de la dernière colonne, le montant : « 1 315 » est remplacé par le montant : « 807 » ;
5° ter (nouveau) À la vingt-sixième ligne de la dernière colonne, le montant : « 1 315 » est remplacé par le montant : « 752 » ;
6° À la vingt-huitième ligne de la dernière colonne, le montant : « 99 000 » est remplacé par le montant : « 101 500 » ;
7° À la trente-quatrième ligne de la dernière colonne, le montant : « 40 000 » est remplacé par le montant : « 74 100 » ;
8° À la trente-cinquième ligne de la dernière colonne, le montant : « 140 000 » est remplacé par le montant : « 150 000 » ;
9° À la trente-huitième ligne de la dernière colonne, le montant : « 349 000 » est remplacé par le montant : « 299 000 » ;
9° bis (nouveau) La quarante-troisième ligne est supprimée ;
10° À la quarante-quatrième ligne de la dernière colonne, le montant : « 19 500 » est remplacé par le montant : « 12 156 » ;
11° À la quarante-cinquième ligne de la dernière colonne, le montant : « 11 750 » est remplacé par le montant : « 10 479 » ;
12° À la quarante-sixième ligne de la dernière colonne, le montant : « 30 430 » est remplacé par le montant : « 20 510 » ;
13° À la quarante-septième ligne de la dernière colonne, le montant : « 54 880 » est remplacé par le montant : « 38 659 » ;
14° À la quarante-huitième ligne de la dernière colonne, le montant : « 192 308 » est remplacé par le montant : « 137 046 » ;
15° À la quarante-neuvième ligne de la dernière colonne, le montant : « 35 000 » est remplacé par le montant : « 24 322 » ;
16° À la cinquantième ligne de la dernière colonne, le montant : « 28 340 » est remplacé par le montant : « 23 878 » ;
17° À la cinquante et unième ligne de la dernière colonne, le montant : « 17 300 » est remplacé par le montant : « 10 893 » ;
18° À la cinquante-deuxième ligne de la dernière colonne, le montant : « 7 400 » est remplacé par le montant : « 2 944 » ;
19° À la cinquante-troisième ligne de la dernière colonne, le montant : « 51 990 » est remplacé par le montant : « 27 763 » ;
20° À la cinquante-quatrième ligne de la dernière colonne, le montant : « 4 000 » est remplacé par le montant : « 3 471 » ;
21° À la cinquante-cinquième ligne de la dernière colonne, le montant : « 1 000 » est remplacé par le montant : « 722 » ;
22° La cinquante-sixième ligne est supprimée ;
23° La cinquante-septième ligne est supprimée ;
24° À la cinquantième-neuvième ligne de la dernière colonne, le montant : « 116 100 » est remplacé par le montant : « 66 200 » ;
24° bis (nouveau) La soixante-sixième ligne est supprimée ;
25° Après la soixante-septième ligne, est insérée une ligne ainsi rédigée :
« |
Premier alinéa de l’article L. 411-2 du code de la propriété intellectuelle |
Institut national de la propriété industrielle (INPI) |
192 900 |
» ; |
26° À la soixante-neuvième ligne de la dernière colonne, le montant : « 62 500 » est remplacé par le montant : « 61 300 » ;
27° À la soixante-dixième ligne de la dernière colonne, le montant : « 544 000 » est remplacé par le montant : « 593 900 » ;
28° À la soixante et onzième ligne de la dernière colonne, le montant : « 117 000 » est remplacé par le montant : « 67 100 » ;
29° À la soixante-treizième ligne de la dernière colonne, le montant : « 10 000 » est remplacé par le montant : « 16 000 » ;
30° (Supprimé)
B. – À la fin du premier alinéa du III bis, les mots : « , hormis leur part destinée au versement prévu au V de l’article L. 213-10-8 du code de l’environnement » sont supprimés.
II. – À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 313-3 du code de la construction et de l’habitation, les mots : « , d’une fraction de la taxe sur les conventions d’assurances mentionnée à l’article 991 du code général des impôts, dans la limite du plafond prévu au I de l’article 46 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012 » sont supprimés.
III. – Le code de l’environnement est ainsi modifié :
1° Le début de l’article L. 131-15 est ainsi rédigé : « Les ressources du programme confié à l’Office français de la biodiversité dans le cadre du plan d’action national défini à l’article L. 253-6 du code rural et de la pêche maritime incluent la part de contribution mentionnée à ce titre à l’article 135 de la loi n° 2017-1837 de finances pour 2018 et sont dépensées, pour un montant au moins égal, sous la forme d’aides… (le reste sans changement). » ;
2° À l’article L. 131-16, les mots : « au V de l’article L. 213-10-8 » sont remplacés par les mots : « à l’article L. 131-15 » ;
3° Le V de l’article L. 213-10-8 est abrogé.
IV. – Le c de l’article 1001 du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Après le mot : « affecté », la fin de la première phrase est ainsi rédigée : « au budget général de l’État. » ;
2° La seconde phrase est supprimée.
V. – L’article L. 411-2 du code de la propriété intellectuelle est ainsi rédigé :
« Art. L. 411-2. – Les recettes de l’institut se composent de toutes redevances perçues en matière de propriété industrielle et en matière du registre national du commerce et des sociétés, dans la limite du plafond du I de l’article 46 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012, ainsi que d’éventuelles recettes accessoires.
« Les recettes mentionnées au premier alinéa du présent article doivent équilibrer toutes les charges de l’établissement.
« Le contrôle de l’exécution du budget de l’institut s’exerce a posteriori selon des modalités fixées par décret en Conseil d’État. »
VI. – À la fin de la dernière phrase du premier alinéa de l’article L. 253-6 du code rural et de la pêche maritime, les mots : « dans les conditions prévues à l’article L. 213-10-8 du code de l’environnement » sont remplacés par les mots : « par la contribution instituée par l’article 135 de la loi n° 2017-1837 de finances pour 2018 ».
VI bis (nouveau). – Au premier alinéa du I du I bis de l’article 71 de la loi de finances rectificative pour 2003 (n° 2003-1312 du 30 décembre 2003), les mots : « , dans la limite du plafond prévu au I de l’article 46 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 précitée, » sont supprimés.
VI ter (nouveau). – Au premier alinéa du I du G de l’article 71 de la loi de finances rectificative pour 2003 (n° 2003-1312 du 30 décembre 2003), les mots : « , dans la limite du plafond fixé au I de l’article 46 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012, » sont supprimés.
VII. – Le H du V de l’article 16 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020 est ainsi modifié :
1° Aux première et seconde phrases, le mot : « fonciers » est supprimé ;
2° À la première phrase, les références : « , 1609 D et 1609 G » sont remplacées par la référence : « et 1609 D ».
VIII. – Le XIII de l’article 26 de la loi n° 2018-1203 du 22 décembre 2018 de financement de la sécurité sociale pour 2019 est abrogé.
IX. – À la fin du premier alinéa du I de l’article 135 de la loi n° 2017-1837 de finances pour 2018, les mots : « 321,6 millions d’euros et 348,6 millions d’euros » sont remplacés par les mots : « 362,6 millions d’euros et 389,6 millions d’euros, qui intègre une dotation d’au maximum 41 millions d’euros dédiée au financement du programme mentionné à l’article L. 131-15 du même code. »
IX bis (nouveau). – Par dérogation au tableau du second alinéa du I de l’article 46 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012, le produit de la taxe additionnelle à la cotisation foncière des entreprises mentionnée au II de l’article 1600 du code général des impôts affecté aux chambres de commerce et d’industrie est plafonné, en 2021, à 349 millions d’euros.
IX ter (nouveau). – Le V de l’article 59 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020 est ainsi rédigé :
« V. – Le Gouvernement remet au Parlement avant le 1er septembre de chaque année un rapport présentant la situation financière du réseau des chambres de commerce et d’industrie et le bilan des mesures de sa modernisation.
« Avant le 1er septembre 2022, le Gouvernement remet au Parlement un rapport examinant l’opportunité d’un ajustement du niveau de ressources du réseau pour les années postérieures à 2022, s’appuyant sur une évaluation préalable et partagée entre l’État et CCI France au vu de la situation financière du réseau des chambres de commerce et d’industrie en 2021 et 2022. »
X. – Il est opéré en 2021, au profit du budget général, un prélèvement de 6 millions d’euros sur les ressources du fonds mentionné à l’article L. 431-14 du code des assurances.
Le versement de ce prélèvement est opéré avant le 30 juin 2021. Le recouvrement, le contentieux, les garanties et les sanctions relatifs à ce prélèvement sont régis par les règles applicables en matière de taxe sur les salaires.
XI. – Les I à IX ter entrent en vigueur le 1er janvier 2021.
M. le président. L’amendement n° I-550, présenté par MM. Maurey et Sautarel, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Remplacer le montant :
1 285 000
par le montant :
1 685 000
La parole est à M. Stéphane Sautarel.
M. Stéphane Sautarel. Comme les années précédentes, le Sénat n’a obtenu que des informations très lacunaires sur le budget de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afitf) pour 2021.
Si les éléments parcellaires qui nous ont été transmis à ce stade laissent à penser que le Gouvernement a bien l’intention de respecter la trajectoire fixée par la loi d’orientation des mobilités (LOM), avec 2,782 milliards d’euros de dépenses – nous y reviendrons dès vendredi en deuxième partie –, il paraît déjà clair que les recettes prévues pour financer ces dépenses ne sont pas crédibles, compte tenu de la poursuite de la crise sanitaire. C’est en particulier le cas des 230 millions d’euros d’écocontribution du transport aérien et des 278 millions d’euros de produit des amendes radar.
C’est pourquoi les rapporteurs spéciaux pour les crédits des transports terrestres de la commission des finances proposent au Sénat d’adopter un amendement visant à relever de 1,285 milliard d’euros à 1,685 milliard d’euros, soit 400 millions d’euros supplémentaires, le plafond de taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) affecté à l’Afitf en 2021. La TICPE est en effet une recette fiable sur laquelle l’agence pourra à coup sûr compter.
Si la situation sanitaire s’améliore fortement et que les autres recettes de l’Afitf sont perçues en tout ou partie, il sera toujours possible de réajuster ce plafond à un niveau plus bas dans le collectif budgétaire de fin de gestion pour 2021.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Je partage le constat des rapporteurs spéciaux : les recettes de l’Afitf sont actuellement trop fragiles et compromettent le respect de la trajectoire fixée par la loi d’orientation des mobilités. Il faut, à mon sens, prévoir l’affectation de recettes supplémentaires.
La commission émet donc un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics. M. Maurey sait bien que le modèle de l’Afitf est par nature instable, à l’inverse des dépenses du budget général de l’État, lesquelles ne sont pas soumises à aléas sur les recettes.
Vous l’avez souligné, monsieur Sautarel, le budget de l’Afitf n’est pas soumis au Parlement, sinon par l’intermédiaire de certaines taxes qui lui sont affectées, contrairement aux crédits budgétaires, qui seront, eux, discutés en détail. Nous avons pris l’engagement, malgré l’incertitude que vous avez rappelée, de tenir cette trajectoire budgétaire, et nous veillerons à l’honorer.
Nous ne sommes pas favorables à l’affectation d’une fraction supplémentaire de TICPE à l’Afitf par un relèvement du plafond de 1,285 milliard d’euros à 1,685 milliard d’euros.
C’est pourquoi le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement. Il n’en reste pas moins que nous prenons en considération cet amendement et rappelons toute l’attention que nous portons au financement de cette agence.
M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.
M. Philippe Dallier. Monsieur le ministre, Je profite de l’examen de cet amendement pour vous interroger sur une mesure visant à affecter des moyens supplémentaires à l’Afitf en prélevant une portion des amendes de police adoptée dans le quatrième projet de loi de finances rectificative (PLFR 4) et dont personne ne semble avoir mesuré les conséquences, quand bien même je ne peux pas dire qu’elle ait été votée par inadvertance.
Nos collègues de la Ville de Paris – Rémi Féraud nous le confirmera peut-être – déplorent une baisse de leurs recettes de 30 millions d’euros. J’imagine donc que toutes les collectivités vont subir une baisse importante de leur part du produit de ces amendes.
Avec la mise en place du forfait post-stationnement (FPS), nous devions bénéficier de recettes garanties, voire en augmentation franche. Or, d’une année sur l’autre, tout change et l’on est incapable de prévoir, même à moins de trois ou quatre ans, le montant de ce produit, qui dépend de nombreux facteurs.
J’aimerais donc obtenir la confirmation de cet effet de bord de notre vote en PLFR 4 et savoir s’il est encore temps de réagir.
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.
M. Marc Laménie. Nous nous sommes déjà interrogés sur le fonctionnement de l’Afitf, dont les recettes principales ont été réduites par la crise sanitaire, comme cela a été rappelé dans les lois de finances rectificatives précédentes.
Or il est important de donner à cette structure des moyens financiers, car elle s’engage dans des travaux d’investissement pour l’ensemble des réseaux de transport routier, ferroviaire ou fluvial. Des engagements ont été pris depuis déjà quelques années concernant des projets qui intéressent nos départements et nos territoires respectifs, notamment la réhabilitation des infrastructures ferroviaires, pour soutenir certaines lignes secondaires, par exemple en matière de fret capillaire, ou fluviales.
On parle beaucoup de développement durable et de soutien aux transports non routiers, il me semble donc important d’y consacrer des moyens financiers. C’est pourquoi je voterai cet amendement.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Monsieur Dallier, il ne s’agit pas à proprement parler d’un effet de bord. Les recettes des amendes radar connaissent une baisse structurelle en raison de différentes crises et, en en répartissant les impacts, nous avons pris le parti de protéger l’Afitf par rapport aux autres affectataires, parmi lesquels se trouvent des collectivités.
Moins qu’un effet de bord de l’amendement que vous avez adopté, c’est plutôt une modalité de répartition de l’effort lié à la baisse structurelle des recettes d’amendes radar.
M. Philippe Dallier. On a voté cet amendement, ce qui est regrettable !
M. le président. La parole est à M. Rémi Féraud, pour explication de vote.
M. Rémi Féraud. Nous voterons cet amendement.
Je confirme les propos de Philippe Dallier et l’ordre de grandeur qu’il avançait pour la Ville de Paris, mais le problème me paraît structurel. Nous avons déposé un amendement en deuxième partie sur le même sujet, même s’il vise un autre dispositif. Cette question renvoie à ce qu’évoquait Claude Raynal hier soir, à savoir la nature de la relation et des échanges entre les collectivités territoriales et le Gouvernement.
Nous l’avons constaté dans le PLFR 4, qui contient une disposition dont nous n’avions pas bien compris les implications, ce qui nous conduit à déposer des amendements afin de mieux en maîtriser les conséquences, ainsi qu’en première lecture à l’Assemblée nationale, s’agissant du dispositif relatif à l’année de référence pour la TVA en matière de compensation pour les départements.
C’est la méthode de travail et de dialogue mise en œuvre qu’il faut revoir.
M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey, pour explication de vote.
M. Hervé Maurey. Au cours de l’année qui se termine, l’Afitf a subi les conséquences de la crise sanitaire, nous en reparlerons. Dans le PLFR 3, l’État a dû abonder son budget d’une subvention de 250 millions d’euros. Cela n’étant pas suffisant, le PLFR 4 a prévu une affectation supplémentaire de la part des amendes de police à son bénéfice, au détriment des autres bénéficiaires de ce produit.
Il est vrai que le financement de l’Afitf est un problème structurel : le panier de ressources n’est pas satisfaisant, surtout dans cette période de crise. Nous avons précisément déposé cet amendement parce que, de toute évidence, le budget de l’Afitf pour 2021 n’est pas sincère, en ce qu’il prévoit notamment une recette de 230 millions d’euros au titre de l’écocontribution versée par les sociétés de transport aérien, lesquelles ne seront sans doute pas en situation de verser une telle somme.
Je profite de l’occasion pour évoquer le budget de l’Afitf, monsieur le ministre. Nous en reparlerons lors du vote des crédits de la mission, mais, une fois de plus, nous n’avons pas obtenu les informations dont le Parlement est en droit de disposer sur ce budget, ni lors de l’audition du secrétaire général de l’agence ni lors de celle du directeur général compétent.
Nous avons demandé ces données à plusieurs reprises, en vain. Ce n’est pas normal, car cela empêche le Parlement de mener à bien sa mission de contrôle. Il s’agit là d’une marque de mépris envers notre assemblée, monsieur le ministre, et je ne manquerais pas de le faire savoir également à la ministre chargée de ces sujets, vendredi prochain.
M. le président. La parole est à Mme Christine Lavarde, pour explication de vote.
Mme Christine Lavarde. Cet amendement nous fait revenir sur un sujet qui a été effleuré par MM. Féraud et Dallier et dont nous avons déjà débattu il y a un an ou deux ans : la réforme du stationnement payant et sa dépénalisation.
Aujourd’hui, les collectivités rencontrent un problème qui va être plus criant encore dans l’année à venir, avec la ponction opérée par le PLFR 4 sur le montant du programme 754. Les collectivités, en particulier les villes de plus de 10 000 habitants en zone urbaine, donc surtout celles de la région parisienne, se retrouvent à financer le budget de l’Afitf au travers d’un prélèvement sur leurs recettes fiscales destiné à abonder la région Île-de-France et Île-de-France Mobilités.
Nous reviendrons sur ce point lorsque nous examinerons le compte d’affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers », mais il serait souhaitable que vous nous aidiez à trouver une solution pérenne. Il ne revient pas aux collectivités de subir les à-coups des recettes des amendes radar et de la baisse du budget de l’Afitf qui en résulte.
M. le président. Je suis saisi de six amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L’amendement n° I-271 est présenté par MM. Montaugé, Féraud, Kanner et Raynal, Mme Briquet, MM. Cozic et Éblé, Mme Espagnac, MM. Jeansannetas, P. Joly, Lurel et Antiste, Mme Artigalas, M. J. Bigot, Mmes Blatrix Contat, Bonnefoy et Conconne, MM. Durain, Fichet et Gillé, Mme Harribey, M. Jacquin, Mmes G. Jourda, Le Houerou et Lubin, MM. Marie et Mérillou, Mme Préville, M. Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° I-1187 rectifié est présenté par MM. Capus et Chasseing et Mme Paoli-Gagin.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. – Alinéa 5
Remplacer le montant :
2 197 620
par le montant :
2 800 000
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Angèle Préville, pour présenter l’amendement n° I–271.
Mme Angèle Préville. Le mécanisme du plafond mordant vise à permettre à l’État de ponctionner les recettes des agences de l’eau au-delà du montant maximum de prélèvement des redevances.
Ce dispositif limite la capacité d’action des agences, alors même que le onzième programme élargit leur champ d’action et que la crise du covid-19 nécessitera non seulement un accompagnement supplémentaire des collectivités en raison des surcoûts liés notamment à la gestion des boues d’épuration, à la mise en sécurité des chantiers, mais aussi la mise en préparation d’un plan de relance dans une conjoncture difficile.
De plus, le déficit en investissement dans les infrastructures de l’eau a été estimé à environ 2 millions d’euros par an lors des assises de l’eau.
Cet amendement vise à supprimer le plafond mordant des agences de l’eau afin de mettre ces dernières en mesure de faire face aux nombreux défis présents et à venir tels que l’adaptation au changement climatique, l’appui à la transition agricole, la surveillance de la qualité physico-chimique des eaux ou encore les subventions aux travaux d’assainissement non collectifs non encore réalisés.
Au-delà des mesures de court terme, il est particulièrement nécessaire que les agences de l’eau puissent œuvrer efficacement à la résilience du secteur face aux crises actuelles et futures à travers l’entretien et le renouvellement du patrimoine, l’adaptation au changement climatique, laquelle nécessitera des travaux d’interconnexion pour sécuriser l’approvisionnement en eau potable, la réutilisation des eaux non conventionnelles et d’autres actions, et, enfin, les pollutions émergentes.
Vous le savez, s’agissant de ces dernières, nous devrons faire face dans l’avenir à de nombreuses difficultés, par exemple à la présence de microfibres plastiques dans les eaux.
M. le président. La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin, pour présenter l’amendement n° I-1187 rectifié.
Mme Vanina Paoli-Gagin. Il est défendu, monsieur le président !
M. le président. Les quatre amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° I-101 rectifié bis est présenté par Mmes Noël et Deromedi et MM. Vogel, D. Laurent, Chatillon, Pellevat, B. Fournier, Bacci, Sido, E. Blanc et Meurant.
L’amendement n° I-125 rectifié est présenté par MM. Kern et Longeot, Mmes Billon, Tetuanui et Vermeillet, MM. Le Nay, Canevet, Cazabonne, Duffourg et S. Demilly et Mmes Saint-Pé et de La Provôté.
L’amendement n° I-565 est présenté par M. Bonhomme.
L’amendement n° I-942 est présenté par M. Dantec, Mme Taillé-Polian, MM. Parigi et Benarroche, Mmes Benbassa et de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme Poncet Monge et M. Salmon.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
I. – Alinéa 5
Remplacer le nombre :
2 197 620
par le nombre :
2 351 000
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Sylviane Noël, pour présenter l’amendement n° I-101 rectifié bis.
Mme Sylviane Noël. En France, on a pris la mauvaise habitude de créer une taxe, puis de la détourner de son objet au profit d’une cause qui n’a pas grand-chose à voir avec les motivations initiales.
En l’occurrence, on se souvient que les agences de l’eau ont été ponctionnées pour compenser la baisse du prix du permis de chasse, alors que cela n’a pas grand-chose à voir avec le coût des pollutions de l’eau !
M. le président. La parole est à M. Claude Kern, pour présenter l’amendement n° I-125 rectifié.
M. Claude Kern. Nos collectivités, communes comme intercommunalités, ont encore besoin de l’aide des agences de l’eau. Il reste en effet beaucoup à faire, notamment en raison des problèmes climatiques que nous rencontrons, par exemple l’assèchement ou le tarissement de certaines sources d’eau.
M. le président. La parole est à M. François Bonhomme, pour présenter l’amendement n° I-565.
M. François Bonhomme. Dans le même esprit, je rappelle la longue et pénible histoire des ponctions successives dont ont été victimes les agences de l’eau, entraînant un détournement complet du principe selon lequel « l’eau paye l’eau ».
Je rappelle que les sept agences ont dû adopter un onzième programme raboté en prévoyant des baisses ou des reports d’aide aux collectivités qui en avaient besoin. Nous en voyons les conséquences aujourd’hui.
Je sais bien que les ponctions se sont répétées depuis plusieurs années et que cela ne date pas de 2017. Aujourd’hui, les dispositifs d’aide ont été particulièrement réduits par les onzièmes programmes et cela pose des difficultés, alors même que les défis à relever sont majeurs.
Je souhaite connaître la position du ministre sur le principe selon lequel « l’eau paye l’eau », que le précédent ministre de la transition écologique et solidaire, M. de Rugy, avait qualifié de « sacré ».
Cet amendement vise donc à revenir sur cette question de principe et sur le non-respect de la loi de 2005 sur l’eau et les milieux aquatiques.
M. le président. La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour présenter l’amendement n° I-942.
Mme Sophie Taillé-Polian. Il a été excellemment défendu, monsieur le président !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Ces amendements visent à relever le plafond mordant.
Les onzièmes programmes pluriannuels d’intervention des agences de l’eau, adoptés à l’automne 2018, ont été établis conformément au cadrage budgétaire fixé par la loi de finances pour 2018.
Je suis défavorable à ce relèvement, car des crédits budgétaires supplémentaires sont prévus dans le cadre du plan de relance, à hauteur de 300 millions d’euros d’autorisations d’engagement, qui répondent aux préoccupations exprimées. Ils doivent en effet permettre de sécuriser les infrastructures de distribution d’eau potable, d’assainissement et de gestion des eaux pluviales. Ainsi, 250 millions d’euros destinés aux métropoles seront directement versés aux six agences de l’eau, et seront répartis comme suit : 220 millions d’euros pour les réseaux d’eau et la modernisation des stations d’assainissement et 30 millions d’euros pour l’hygiénisation des boues.
Il s’agit d’améliorer la résilience de l’alimentation en eau potable, notamment face aux risques de sécheresse, et la lutte contre les différentes sources de contamination de l’eau, à travers un traitement plus efficace en station d’épuration.
C’est la raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable sur ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Je partage l’avis défavorable de M. le rapporteur général pour les raisons qu’il a exposées.
Le plafond évoqué a été fixé en 2018, nous nous y tenons depuis. Il est légèrement augmenté cette année pour des raisons paramétriques, ce n’est pas un fait de gloire, car nous ajoutons une mission au travail des agences de l’eau.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-271 et I-1187 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-101 rectifié bis, I-125 rectifié, I–565 et I–942.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° I–1072, présenté par M. Temal, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 5
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…° Après la sixième ligne, est insérée une ligne ainsi rédigée :
«
Article 235 ter ZD du code général des impôts |
Agence française de développement (AFD) |
250 000 |
».
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Rachid Temal.
M. Rachid Temal. Par cet amendement, nous entendons évoquer la taxe sur les transactions financières, qui a été notamment créée pour que les gagnants de la mondialisation aident les autres au travers de l’aide publique au développement (APD).
Je sais qu’il existe un projet européen. En ce qui concerne la France, cette taxe aura rapporté 1,6 milliard d’euros en 2020. Or force est de constater que seulement un tiers de cette somme est consacrée à l’APD, ce qui nous conduit à nous interroger sur ce « détournement », mais pose aussi la question du financement de l’aide publique au développement : celui-ci doit-il reposer sur des taxes ou sur le budget de l’État ?
Par ailleurs, dans la mesure où cet amendement est soumis à l’article 40 de la Constitution, pour que mon rôle de parlementaire soit efficient, je suis contraint de flécher ce déplafonnement vers l’Agence française de développement (AFD), dont nous débattrons du budget vendredi prochain.
Il s’agit donc d’un amendement d’appel, car il serait bon que nous discutions du financement de l’APD – taxe ou inscription au budget ? Nous proposons de déplafonner la part de la taxe sur les transactions financières attribuée à l’APD.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. La commission demande le retrait de cet amendement. M. Temal a exprimé mon avis avant même que je ne le fasse ! (Sourires.)
Je rappelle que les crédits alloués à l’AFD sont en augmentation constante depuis plusieurs années.
M. Rachid Temal. Vous n’avez pas répondu sur le fond !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Ces crédits sont en augmentation constante, en effet, ce qui démontre d’ailleurs que budgétisation ne signifie pas baisse des moyens.
Dans le PLF 2021, les crédits de l’APD augmentent de 684 millions d’euros, soit 17 % – c’est inédit –, auquel il faut ajouter 950 millions d’euros de recapitalisation de l’Agence française de développement. Aucune marche aussi importante n’a jamais été franchie en la matière.
Le Gouvernement demande donc également le retrait de cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.
M. Roger Karoutchi. Cet amendement m’étonne.
Le budget de l’AFD, son utilisation et sa maîtrise font l’objet d’un véritable débat et nous en reparlerons vendredi prochain. Je ne suis pas convaincu que, au regard des hausses considérables qu’a connues ce budget depuis trois ans, la priorité soit de réorienter encore des moyens supplémentaires vers cette agence, alors que les crédits publics sont si rares et si difficiles à obtenir.
Commençons par mettre à plat la manière dont l’AFD utilise son budget et met en œuvre ses objectifs, qui sont mal définis. Il fut un temps, que je regrette, où un ministère de la coopération s’en occupait, avec à sa tête une personnalité politique responsable devant le Parlement.
Aujourd’hui, par définition, le directeur général de l’AFD n’est pas responsable devant le Parlement ; le ministre Jean-Yves Le Drian exerce la tutelle sur l’agence, mais ne s’en occupe pas réellement. Je ne dis pas que tout est à mettre au panier – beaucoup de choses sont bien faites –, mais il faut revenir sur la manière dont tout cela fonctionne. L’AFD a obtenu des crédits considérables depuis trois ans.
Commençons par rationaliser tout cela en mettant en place un contrôle du Parlement sur ses moyens et ses objectifs. Nous verrons ensuite s’il est opportun d’en modifier l’équilibre budgétaire.
M. le président. Monsieur Temal, l’amendement n° I-1072 est-il maintenu ?
M. Rachid Temal. Monsieur le ministre, vous vous gargarisez de quelques chiffres, mais l’on sait que la réalité est plus nuancée. M. Karoutchi l’a rappelé : aujourd’hui, il n’y a pas de pilotage politique de l’aide publique au développement et la loi de programmation et d’orientation attendue ne cesse d’être annoncée, puis retirée.
Cela pose un véritable problème : sans pilotage politique, la France n’a pas de vision stratégique. La dernière loi de programmation a été adoptée durant le précédent quinquennat et la prochaine, qui devrait déjà être en vigueur, n’a toujours pas été présentée.
Monsieur Karoutchi, soyez rassuré, je suis très lucide sur la question de l’AFD, mais il ne s’agit pas de cela dans cet amendement. J’ai expliqué pourquoi j’avais été obligé d’affecter cette somme à cette structure, mais cet amendement part du constat de l’absence de loi de programmation et du détournement de la taxe sur les transactions financières.
Il importe de le souligner, parce que le produit de l’autre taxe, la taxe sur les billets d’avion, s’est effondré cette année et sera manifestement revu l’année prochaine. Or cette taxe est utile, notamment parce qu’elle abonde le Fonds mondial de lutte contre le sida. La question du financement d’un certain nombre de politiques publiques se pose donc.
Le fléchage sur l’AFD était le seul moyen à ma disposition au vu des limites imposées aux parlementaires en matière budgétaire. J’aurais souhaité que le ministre engage le débat, cela n’a pas été le cas. Malheureusement, maintenant, on se contente de dire « d’accord » ou « pas d’accord » et aucun débat n’est possible.
Je retire cet amendement, monsieur le président, ainsi que je l’avais annoncé. Toutefois, je le répète : je regrette l’absence de pilotage politique de l’aide publique au développement et l’impossibilité même de discuter ces sujets. La France a pourtant beaucoup à faire en la matière.
M. le président. L’amendement n° I–1072 est retiré.
Je suis saisi de quatre amendements identiques.
L’amendement n° I–22 rectifié est présenté par MM. Dallier, Allizard, Bacci, Bascher, Bazin, E. Blanc, Bonhomme, Bonne, Bonnus, Brisson, Burgoa et Calvet, Mme Canayer, MM. Charon et Cuypers, Mme L. Darcos, MM. Daubresse et de Legge, Mmes Delmont-Koropoulis, Deroche, Deromedi et Dumas, M. B. Fournier, Mme Garriaud-Maylam, MM. Genet, Grand, Gremillet et Houpert, Mmes Imbert et Joseph, M. Karoutchi, Mme Lassarade, M. D. Laurent, Mme Lavarde, MM. Le Gleut, Lefèvre et Mandelli, Mme M. Mercier, MM. Mouiller, Piednoir, Pointereau, Saury, Savin et Sautarel, Mme Thomas, MM. C. Vial et Vogel, Mme Renaud-Garabedian et M. Segouin.
L’amendement n° I–73 est présenté par M. Husson, au nom de la commission des finances.
L’amendement n° I–270 rectifié est présenté par M. Féraud, Mme Artigalas, MM. Temal, Montaugé, Kanner et Raynal, Mme Blatrix Contat, M. Bouad, Mme Briquet, MM. Cardon, Cozic et Éblé, Mme Espagnac, MM. Jeansannetas, P. Joly, Lurel, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy, Tissot, Antiste et J. Bigot, Mmes Bonnefoy et Conconne, MM. Durain, Fichet et Gillé, Mme Harribey, M. Jacquin, Mmes G. Jourda, Le Houerou et Lubin, M. Marie, Mmes Préville et S. Robert, M. Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° I–882 rectifié ter est présenté par Mmes Létard, Estrosi Sassone, Lienemann et Primas, MM. Chatillon et Chaize, Mme Chain-Larché, MM. Babary, D. Laurent et Cabanel, Mme Noël, MM. J.M. Boyer et Duplomb, Mmes Renaud-Garabedian, Berthet et Jacques, M. Bouloux, Mme Chauvin, MM. Somon, Rietmann, Pla et Cardon, Mme Loisier, M. Moga, Mme Férat, M. Louault, Mme C. Fournier et MM. Chauvet, Menonville et Salmon.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Alinéas 6, 39, 44 à 46 et 57
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Philippe Dallier, pour présenter l’amendement n° I-22 rectifié.
M. Philippe Dallier. Nous voilà parvenus au premier étage de la fusée, qui devait en comporter trois. Il ne s’agissait pourtant pas de mettre sur orbite Action Logement. J’ai plutôt le sentiment que c’est le contraire, tant sont floues les intentions du Gouvernement vis-à-vis de cet acteur important du logement social !
Je le dis tout de suite, nous n’examinerons pas le troisième étage de cette fusée, et heureusement ! Il s’agissait en effet de demander au Parlement l’autorisation de légiférer par ordonnances sur le devenir d’Action Logement. On l’a évoqué à un moment, mais l’on n’en parle plus.
Restent deux étages.
Le premier étage vise à revenir sur la décision de remonter à cinquante salariés le seuil qui impose aux entreprises de cotiser à la participation des employeurs à l’effort de construction (PEEC) que nous avons prise lors de la loi relative à la croissance et la transformation des entreprises, dite Pacte. Constatant une diminution des ressources pour Action Logement, le Gouvernement a créé une taxe supplémentaire sur les contrats d’assurance et lui en a affecté le produit. Or, deux ans plus tard, l’État revient sur sa parole et nous propose ici de supprimer cette compensation.
Monsieur le ministre, les compensations accordées par l’État puis supprimées quelques années plus tard, le Parlement en a assez !
En ce qui concerne Action Logement, il ne s’agit plus, comme l’an dernier, de ponctionner une fois 500 millions d’euros ; cette année, vous proposez en seconde partie de ponctionner 1 milliard d’euros sur sa trésorerie. Certes, on peut toujours discuter pour déterminer si celle-ci est trop abondante, mais vous vous en prenez à une ressource pérenne de cet organisme. Si nous adoptions cette mesure, nous le priverions ainsi de 300 millions d’euros.
Monsieur le ministre, tout le monde s’accorde à reconnaître que le financement du logement social pose un gros problème. Probablement des efforts doivent-ils être engagés en ce qui concerne la gouvernance d’Action Logement, le coût de la collecte et nombre d’autres sujets. De tout cela, nous sommes bien conscients. En revanche, ce qui est de mon point de vue certain, c’est que l’on ne peut pas procéder de la sorte !
Il faut mettre le sujet sur la table, discuter avec les partenaires sociaux et, au bout du compte, prendre des décisions. Au lieu de cela, avant même d’avoir écouté les partenaires sociaux vous dire ce qu’ils entendent faire pour répondre à l’attente du Gouvernement, vous voulez priver Action Logement d’une ressource pérenne.
Voilà pourquoi j’ai déposé cet amendement tendant à revenir sur la suppression de cette ressource.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l’amendement n° I-73.
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Monsieur le ministre, vous le voyez bien : nous sommes un certain nombre à aller dans le même sens.
En bon connaisseur de ces questions, Philippe Dallier a exposé de manière objective la situation. Prenons garde de ne pas envoyer des signaux contradictoires à ce secteur : concentrons-nous sur le partage des enjeux et l’élaboration collective des bonnes décisions.
En attendant, monsieur le ministre, le Gouvernement doit respecter les engagements qu’il a pris, d’autant que, comme M. Dallier l’a rappelé, ceux-ci ne remontent qu’à deux ans, au moment de la loi Pacte 1. Au demeurant, nous attendons toujours la loi Pacte 2 et vous pourriez en parler à votre ministre, Bruno Le Maire…
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Briquet, pour présenter l’amendement n° I-270 rectifié.
Mme Isabelle Briquet. La mesure envisagée par le Gouvernement doit s’analyser en lien avec le prélèvement sur les ressources d’Action Logement qui sera examiné en seconde partie, à l’article 47. Au total, avec ce projet de loi de finances, c’est une ponction de 1,13 milliard d’euros que l’on s’apprête à opérer sur la trésorerie de cet opérateur.
Or Action Logement est, avec ses partenaires, un acteur clé pour appréhender la période de relance, alors que la crise sanitaire que nous traversons accentue les difficultés d’accès au logement et de maintien dans celui-ci et fragilise le secteur de l’immobilier et du bâtiment dans son ensemble.
En déposant cet amendement, nous voulons amener le Gouvernement à exprimer clairement devant la représentation nationale ses intentions réelles sur les réformes qu’il entend engager.
M. le président. La parole est à Mme Valérie Létard, pour présenter l’amendement n° I-882 rectifié ter.
Mme Valérie Létard. Je m’exprime au nom de la commission des affaires économiques, en particulier des trois collègues qui ont été avec moi corapporteures de la mission d’information sur le devenir d’Action Logement, laquelle vient de rendre ses conclusions, Mmes Estrosi Sassone, Artigalas et Lienemann. Ce travail a été mené au nom de cette commission, avec Mme Primas bien sûr, et en coordination avec Philippe Dallier.
Le Gouvernement a souhaité accélérer sa réflexion sur l’avenir d’Action Logement et de sa gouvernance, voire du montant prélevé au titre de la PEEC. Dans un premier temps, il se proposait de demander une habilitation à légiférer par ordonnance. Heureusement, la mobilisation du Sénat et nos discussions avec les ministres concernés l’ont conduit à renoncer à cette méthode, ce dont nous lui sommes reconnaissants. Un travail de concertation avec les partenaires sociaux peut maintenant s’engager, libéré de cette habilitation.
Or voilà que, dans le cadre de ce débat budgétaire, avant même la discussion sur l’avenir de la PEEC et d’Action Logement, on voudrait priver cet organisme d’une ressource pérenne de 300 millions d’euros environ – 235 millions d’euros, d’après le quatrième projet de loi de finances rectificative – et de 1 milliard d’euros supplémentaires à l’article 47. Ces deux mesures cumulées, si elles prennent un caractère récurrent, représenteront le montant prélevé annuellement au titre de la PEEC. En d’autres termes, la ressource serait tout bonnement supprimée !
Dès lors, à quoi bon ouvrir un débat avec les partenaires sociaux sur l’avenir de la PEEC, si elle est asséchée par un prélèvement destiné à compenser les difficultés budgétaires de l’État ?
Monsieur le ministre, un vrai problème se pose. Pour notre part, nous pensons qu’il faut réparer, comme Philippe Dallier l’a expliqué, le premier étage de la fusée, en rétablissant la compensation de la perte de ressources pour Action Logement.
En seconde partie, nous rouvrirons le débat sur le prélèvement de 1 milliard d’euros. En effet, quand vous prétendez opérer ce prélèvement seulement cette fois, mais que vous l’affectez au Fonds national d’aide au logement, il y a de grandes chances que, l’année prochaine, vous nous expliquiez que, compte tenu de la situation budgétaire de l’État, il faut recommencer… Au total, il ne resterait plus aucune ressource à Action Logement !
Il n’est pas possible de fonctionner ainsi. Nous ne pouvons donc que voter ces amendements identiques.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Les amendements identiques seront adoptés, à en juger par les groupes dont sont issus les signataires.
Le Gouvernement est convaincu de la nécessité d’une réforme d’Action Logement. À cet égard, l’appréciation qu’il porte est parfois plus directe que les euphémismes de M. Dallier. (Sourires.)
Des questions de gouvernance sont à régler, de même que des questions de sous-consommation et de sous-exécution, qu’il s’agisse des programmes volontaires ou des compétences, disons, obligatoires – je sais que le terme n’est pas parfaitement exact. Lorsque, sur des programmes de salles de bains – pour entrer dans le vif du sujet –, le taux d’exécution à dix-huit mois s’établit à 4,5 %, personne ne peut s’en contenter.
J’ajoute, en ce qui concerne spécifiquement Action Logement Services, qui dispose d’une trésorerie très abondante et présentait en 2019 un résultat net de 1,4 milliard d’euros, que ce n’est pas nécessairement la vocation première d’un tel organisme que d’afficher des résultats à ce point bénéficiaires – même s’il est bon qu’ils soient équilibrés.
D’abord, nous devons travailler à une réforme structurelle d’Action Logement au cours des prochaines semaines et des prochains mois. Comme vous l’avez souligné, le Gouvernement a fait un geste de bonne volonté et de conciliation. Reste que des améliorations devront être obtenues en matière de coût de collecte, de gouvernance, de frais de fonctionnement et de capacité à exécuter les programmes et à tenir les programmes d’investissement. Ce sujet nous occupera certainement longtemps et de manière assez intensive.
Ensuite, nous proposons un prélèvement exceptionnel de trésorerie, inscrit en seconde partie. Je ne m’y attarde pas à cet instant.
Enfin, à cet article, nous proposons de revenir sur la compensation de 290 millions d’euros, ramenée à 238 millions d’euros dans la loi de finances pour 2020. Cela résulte non d’un choix du Gouvernement, mais d’une constatation d’exécution de cette ligne, puisqu’il s’agit d’une taxe affectée.
Mesdames, messieurs les sénateurs, j’entends vos arguments, mais vous connaissez la position du Gouvernement tant sur la réforme que sur le maintien du prélèvement sur recettes. C’est la raison pour laquelle celui-ci émet un avis défavorable sur ces amendements identiques.
M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.
M. Philippe Dallier. Monsieur le ministre, l’exemple des salles de bains que vous avez pris est assez emblématique.
À l’origine, la PEEC était destinée à construire des logements pour les salariés. Au fil du temps, on a fait faire à Action Logement, je ne veux pas dire n’importe quoi, mais beaucoup de choses : pour les élus locaux, le financement de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU), à hauteur de 7 milliards d’euros – ce n’est pas rien –, mais aussi beaucoup d’autres choses encore. Parfois même – je le sais pour en avoir discuté avec eux –, les partenaires sociaux apprenaient par la presse que le Gouvernement avait une idée et que c’était à eux de la financer !
Sans doute qu’il y a des efforts à faire, monsieur le ministre, mais on peut aussi essayer de rationaliser la situation ! Ainsi, l’amélioration de l’habitat, notamment la rénovation des salles de bains, pourrait être financée autrement que par des ponctions sur la PEEC.
Mme Valérie Létard. Eh oui !
M. Philippe Dallier. Il y a vraiment des choix à faire : Action Logement ne peut pas être la boîte à outils à tout faire du Gouvernement en matière de logement, jusqu’à financer les aides personnalisées au logement. Si vous souhaitez laisser à Action Logement l’année prochaine le milliard d’euros que vous voulez prélever cette année, il faudra le trouver dans le budget de l’État. Or on sent bien que cela posera une difficulté…
Bref, monsieur le ministre, on a un peu le sentiment que c’est comme dans le proverbe : qui veut noyer son chien l’accuse de la rage. D’ailleurs, le rapport de l’inspection générale des finances était plus qu’inquiétant à cet égard. Certes, tout ne va probablement pas assez vite, mais il faut en chercher la raison. Encore une fois, vouloir tout faire faire à Action Logement avec la PEEC n’est peut-être pas non plus une bonne politique !
M. le président. La parole est à Mme Valérie Létard, pour explication de vote.
Mme Valérie Létard. Philippe Dallier a parlé d’or.
En complément, je souligne que le rapport de l’inspection générale des finances, souvent mis en avant, porte sur la période 2016-2018. Nous sommes fin 2020 ! Entre temps, Action Logement a travaillé à améliorer son fonctionnement, en particulier à maîtriser les coûts de gestion de la PEEC. Résultat : aujourd’hui, pour prélever 1,2 milliard d’euros, 1,5 million d’euros sont dépensés et vingt et une personnes employées, grâce à la dématérialisation de la collecte et à la numérisation – avant, tout était payé par chèques et tout se faisait par papier. C’est un exemple des progrès accomplis par Action Logement, même si cela ne veut pas dire qu’il n’y a plus rien à faire.
Monsieur le ministre, nous vous communiquerons le rapport de la mission d’information de la commission des affaires économiques, qui a auditionné un très grand nombre d’acteurs. Croyez-moi, vous constaterez qu’une partie du chemin a déjà été accomplie.
Peut-être faut-il réfléchir à la gouvernance, mais, comme l’a souligné Philippe Dallier, il faut s’interroger aussi sur nombre de choix budgétaires faits par les gouvernements pour accompagner des politiques publiques : ANRU, Action cœur de ville, rénovation des logements dans le cadre de l’Agence nationale de l’habitat (ANAH), pour ne citer qu’elles. Quant au plan d’investissement volontaire, lorsqu’il n’avance pas, c’est souvent du fait d’incompréhensions entre l’État et Action Logement sur les orientations à suivre. Le chemin a souvent été semé d’embûches.
Il n’y a pas, d’un côté, ceux qui ont raison et, de l’autre, ceux qui ont tort. Il y a, malheureusement, des difficultés à s’entendre de part et d’autre. Il faut donc que tout le monde se mette autour d’une table.
Monsieur le ministre, la chance que nous offre Action Logement, c’est que l’argent prélevé pour faire du logement reste au logement. Ainsi, 95 % des crédits de l’ANRU – 450 millions d’euros par an – viennent d’Action Logement, le reste est abondé par l’État. Pourquoi ne manque-t-il pas un euro au pot, depuis des années ? Parce que l’argent est sanctuarisé par Action Logement. L’État, qui aurait dû allouer 50 millions d’euros à l’ANRU cette année, ne lui en accordera que 15 millions d’euros… C’est Action Logement qui garantit la ressource pour les collectivités territoriales et elle qui garantit que l’ANRU continue d’avoir un avenir !
Nous avons besoin d’une action qui s’inscrive dans le temps, avec des crédits sanctuarisés et, certes, une gouvernance partagée et une réflexion sur les améliorations possibles.
Là, j’en suis sûre, est la bonne solution !
M. le président. La parole est à M. Éric Bocquet, pour explication de vote.
M. Éric Bocquet. Nous voterons sans hésiter ces amendements identiques.
De fait, nous essayons de démontrer que ce budget ne répond pas à la grave situation sociale que traverse notre pays. Ainsi, la pauvreté, qui est souvent corrélée au mal-logement, n’est pas prise en charge de façon suffisante.
Jugez plutôt : le Gouvernement décide une ponction de 1,3 milliard d’euros au moment où 15 millions de personnes sont touchées par des problèmes de logement, d’une manière ou d’une autre, où 4 millions de personnes sont mal logées et 900 000 personnes privées de logement personnel et où 3 millions de personnes vivent dans des conditions de logement très difficiles, sans compter les 300 000 personnes sans domicile fixe que compte notre pays, comme l’a signalé la Fondation Abbé Pierre la semaine dernière.
Prendre une telle décision dans un tel contexte est totalement irresponsable et surréaliste !
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Briquet, pour explication de vote.
Mme Isabelle Briquet. Nos collègues ont très bien souligné l’importance d’Action Logement au cœur du dispositif du logement social. Je n’y reviens pas. Nous en avons plus que jamais besoin dans la crise que nous traversons !
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Madame Létard, il est inutile de m’adresser ce rapport d’information : je l’ai lu. Je ne partage pas toutes les conclusions que les trois autres corapporteures et vous-mêmes tirez, vous le devinez.
En revanche, je pense comme vous qu’il reste des pistes d’amélioration. Par exemple, il convient de mettre en place une comptabilité analytique pour démontrer que les chiffres de collecte que vous avez mentionnés sont exacts ou que des marges d’amélioration subsistent.
Monsieur Dallier, vous avez raison de souligner que l’État, depuis des années et des années, demande à Action Logement de financer de multiples politiques, au risque de la confusion. Oui, Action Logement a été utilisée par les gouvernements successifs pour financer des politiques qui devraient relever de l’État, de plus en plus éloignées de la mission de cet organisme. C’est ce qui justifie à nos yeux la réforme.
Comme l’a expliqué l’un des responsables des partenaires sociaux qui siègent à Action Logement, il est nécessaire de recentrer cette structure sur son cœur de mission et de clarifier ses relations financières avec l’État. Tel est notre objectif. Cette réforme sera utile à Action Logement, à l’État et à la politique publique en termes de lisibilité !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-22 rectifié, I-73, I-270 rectifié et I-882 rectifié ter.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de sept amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° I-1098 rectifié, présenté par M. Lafon et les membres du groupe Union Centriste, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 10
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° À la trente-deuxième ligne de la dernière colonne, le montant : « 34 600 » est remplacé par le montant : « 44 600 » ;
II. – Alinéa 11
Remplacer le montant :
74 100
par le montant :
64 100
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Claude Kern.
M. Claude Kern. Je tiens à excuser l’absence de M. Lafon, qui préside en ce moment la commission de la culture pour l’examen de rapports budgétaires.
Alors que l’on pouvait craindre, en cette période particulière, une nette diminution du volume du pari sportif, les reports massifs des parieurs constatés sur les championnats de football maintenus dans le reste du monde et le maintien de toutes les compétitions sportives à huis clos lors de la seconde vague ont permis de préserver l’activité des entreprises de jeu. Cela offre une meilleure visibilité aux pouvoirs publics sur le produit fiscal du prélèvement sur les paris sportifs en ligne.
En revanche, le produit de la taxe Buffet est fortement menacé par l’hypothétique renégociation des contrats entre diffuseurs, depuis les annonces du groupe Mediapro sur le championnat professionnel de football français. Le rendement prévisionnel de cette contribution – 74,1 millions d’euros – paraît aujourd’hui très incertain, comme l’ont souligné le rapporteur général du budget de l’Assemblée nationale, issu de la majorité, et le Président de la République, lors de sa réunion avec les représentants du monde professionnel et amateur du sport, la semaine dernière.
Le Gouvernement ayant soutenu à l’Assemblée nationale un relèvement de 10 millions d’euros du plafonnement de cette taxe, il nous paraît logique de prévoir un relèvement équivalent du plafond du prélèvement effectué chaque année sur les sommes misées sur les paris sportifs. En effet, le plafond actuel de la taxe sur les paris sportifs ne représente que 31 % des recettes fiscales prévues en 2021. Ce rehaussement offrira donc une visibilité accrue à l’Agence nationale du sport pour assurer la solidarité financière directe entre le sport professionnel, le sport amateur et le sport pour tous.
M. le président. Le sous-amendement n° I-1256, présenté par M. Savin, est ainsi libellé :
Amendement n° I-1098, alinéa 3
Remplacer le nombre :
44 600
par le nombre :
74 600
La parole est à M. Michel Savin.
M. Michel Savin. Les inquiétudes sur le rendement de la taxe Buffet sont tout à fait légitimes, et je les partage.
Interrogée sur le sujet devant la commission de la culture, la ministre chargée des sports a expliqué que le rendement de cette taxe étant incertain par nature, le budget du secteur ne pouvait reposer sur elle à 100 %. Elle a rappelé qu’il était trop tôt pour évaluer les conséquences du conflit avec Mediapro, mais nous a assurés que l’Agence nationale du sport percevrait bien les ressources annoncées, même en cas de renégociation du contrat.
Si ces propos étaient de nature à nous rassurer, j’entends aussi la proposition de M. Lafon. Toutefois, l’adoption de l’amendement n° I-1098 rectifié ferait tomber l’amendement n° I-488 rectifié bis, visant à financer le dispositif Pass’Sport, annoncé par le Président de la République et par la ministre, par le produit des taxes sur les paris sportifs.
L’adoption de ce sous-amendement sécuriserait le rendement de la taxe Buffet, comme le propose M. Lafon, tout en relevant de 30 millions d’euros le plafond de la taxe sur les paris sportifs pour permettre à l’Agence nationale du sport de financer le lancement du Pass’Sport. Je rappelle que, si ce dispositif a été annoncé par la ministre et le Président de la République, pas un euro n’a été inscrit au budget pour le financer !
M. le président. L'amendement n° I-488 rectifié bis, présenté par MM. Savin, Retailleau, Piednoir et Lafon, Mme Lavarde, MM. Kern, Hugonet et Pellevat, Mme Eustache-Brinio, M. Reichardt, Mmes Richer, Berthet et Dumas, MM. Grand, Courtial, D. Laurent et Levi, Mme Joseph, MM. Bouchet, Pemezec, Mandelli et Henno, Mme Micouleau, MM. Paccaud, Mouiller et Brisson, Mmes Malet, Mélot et Billon, M. Savary, Mmes M. Mercier et Demas, MM. Charon et Vogel, Mmes Deromedi et Boulay-Espéronnier, M. Chauvet, Mme Estrosi Sassone, M. Laugier, Mmes Belrhiti et Sollogoub, M. B. Fournier, Mmes Lassarade et Puissat, M. Bonhomme, Mme de La Provôté, MM. Gremillet, Genet et Darnaud, Mme Ventalon, MM. Chatillon et Lefèvre, Mme Imbert, M. Menonville, Mmes L. Darcos et Jacques, MM. A. Marc et Laménie, Mme Borchio Fontimp, M. Saury, Mme Gatel, MM. E. Blanc et Meurant, Mme Di Folco, MM. Wattebled, de Nicolaÿ et Détraigne, Mme N. Delattre, MM. P. Martin, Pointereau et Chevrollier, Mme Bonfanti-Dossat et MM. Bouloux et Grosperrin, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 10
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
...° À la trente-deuxième ligne de la dernière colonne, le montant : « 34 600 » est remplacé par le montant : « 109 600 » ;
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
.... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Michel Savin.
M. Michel Savin. Le 17 novembre dernier, le Président de la République a annoncé aux acteurs du monde sportif la mise en place d’un dispositif Pass’Sport en 2021, géré par l’Agence nationale du sport et financé par l’État à hauteur de 100 millions d’euros.
Il s’agit donc d’inscrire dans le projet de loi de finances les engagements du Président de la République, via une hausse du plafond de la taxe sur les paris sportifs affectée au financement de l’Agence nationale du sport, à hauteur de 75 millions d’euros.
Monsieur le ministre, il est urgent de soutenir les fédérations sportives et les clubs, alors que ceux-ci font face à une crise sans précédent : les chiffres les plus récents font apparaître des pertes supérieures à 350 millions d’euros. Comme vous le voyez, le Sénat est fair-play : le Gouvernement annonce des mesures, nous les finançons… Il est important de poser un acte en face des déclarations du Président de la République et de la ministre !
M. le président. L’amendement n° I-489 rectifié, présenté par MM. Savin, Retailleau et Piednoir, Mme Lavarde, MM. Kern, Hugonet et Pellevat, Mme Eustache-Brinio, M. Reichardt, Mmes Richer, Berthet et Dumas, MM. Grand, Courtial, D. Laurent et Levi, Mme Joseph, MM. Bouchet, Pemezec, Mandelli et Henno, Mme Micouleau, MM. Paccaud, Mouiller et Brisson, Mmes Malet, Mélot et Billon, M. Savary, Mmes M. Mercier et Demas, MM. Charon et Vogel, Mmes Deromedi et Boulay-Espéronnier, M. Chauvet, Mme Estrosi Sassone, M. Laugier, Mmes Belrhiti et Sollogoub, M. B. Fournier, Mmes Lassarade et Puissat, M. Bonhomme, Mme de La Provôté, MM. Gremillet, Genet et Darnaud, Mme Ventalon, MM. Chatillon et Lefèvre, Mme Imbert, M. Menonville, Mmes L. Darcos et Jacques, MM. A. Marc et Laménie, Mme Borchio Fontimp, M. Saury, Mme Gatel, MM. E. Blanc et Meurant, Mme Di Folco, MM. Wattebled, de Nicolaÿ et Détraigne, Mme N. Delattre, MM. P. Martin, Pointereau et Chevrollier, Mme Bonfanti-Dossat et MM. Bouloux et Grosperrin, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 10
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° À la trente-troisième ligne de la dernière colonne, le montant : « 71 844 » est remplacé par le montant : « 171 844 » ;
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Michel Savin.
M. Michel Savin. Le Président de la République a donc annoncé une enveloppe de 100 millions d’euros pour compenser les pertes de billetterie, mais, encore une fois, rien n’est inscrit au budget 2021.
Il a annoncé de même une autre mesure de soutien aux fédérations et aux clubs, qui ne figure pas non plus dans le budget.
Par conséquent, nous proposons, par le présent amendement, d’inscrire en plus dans le projet de loi de finances : 50 millions d’euros, pour soutenir les pertes de billetterie des clubs ; et 50 autres millions pour soutenir les fédérations et les clubs.
M. le président. L’amendement n° I-490 rectifié, présenté par MM. Savin, Retailleau et Lafon, Mme Lavarde, MM. Piednoir, Kern, Hugonet et Pellevat, Mme Eustache-Brinio, M. Reichardt, Mmes Richer, Berthet et Dumas, MM. Grand, Courtial, D. Laurent et Levi, Mme Joseph, MM. Bouchet, Pemezec, Mandelli et Henno, Mme Micouleau, MM. Paccaud, Mouiller et Brisson, Mmes Malet, Mélot et Billon, M. Savary, Mmes M. Mercier et Demas, MM. Charon et Vogel, Mmes Deromedi et Boulay-Espéronnier, M. Chauvet, Mme Estrosi Sassone, M. Laugier, Mmes Belrhiti et Sollogoub, M. B. Fournier, Mmes Lassarade et Puissat, M. Bonhomme, Mme de La Provôté, MM. Gremillet, Genet et Darnaud, Mme Ventalon, MM. Chatillon et Lefèvre, Mme Imbert, M. Menonville, Mmes L. Darcos et Jacques, MM. A. Marc et Laménie, Mme Borchio Fontimp, M. Saury, Mme Gatel, MM. E. Blanc et Meurant, Mme Di Folco, MM. Wattebled, de Nicolaÿ et Détraigne, Mme N. Delattre et MM. Pointereau, Chevrollier, Bouloux et Grosperrin, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 10
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° À la trente-troisième ligne de la dernière colonne, le montant : « 71 844 » est remplacé par le montant : « 121 844 » ;
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Michel Savin.
M. Michel Savin. Par cet amendement de repli, nous proposons également de soutenir les fédérations et les clubs à hauteur de 50 millions d’euros supplémentaires.
M. le président. L’amendement n° I-491 rectifié, présenté par MM. Savin et Retailleau, Mme Lavarde, MM. Piednoir, Kern, Hugonet et Pellevat, Mme Eustache-Brinio, M. Reichardt, Mmes Richer, Berthet et Dumas, MM. Grand, Courtial, D. Laurent et Levi, Mme Joseph, MM. Bouchet, Pemezec, Mandelli et Henno, Mme Micouleau, MM. Paccaud, Mouiller et Brisson, Mmes Malet, Mélot et Billon, M. Savary, Mmes M. Mercier et Demas, MM. Charon et Vogel, Mmes Deromedi et Boulay-Espéronnier, M. Chauvet, Mme Estrosi Sassone, M. Laugier, Mmes Belrhiti et Sollogoub, M. B. Fournier, Mmes Lassarade et Puissat, M. Bonhomme, Mme de La Provôté, MM. Gremillet, Genet et Darnaud, Mme Ventalon, MM. Chatillon et Lefèvre, Mme Imbert, M. Menonville, Mmes L. Darcos et Jacques, MM. A. Marc et Laménie, Mme Borchio Fontimp, M. Saury, Mme Gatel, MM. E. Blanc et Meurant, Mme Di Folco, MM. Wattebled, de Nicolaÿ et Détraigne, Mme N. Delattre et MM. Pointereau, Chevrollier, Bouloux et Grosperrin, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 10
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° À la trente-troisième ligne de la dernière colonne, le montant : « 71 844 » est remplacé par le montant : « 106 844 » ;
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Michel Savin.
M. Michel Savin. Cet amendement de repli en dernier recours vise à assurer au secteur un soutien de 35 millions d’euros supplémentaires, répartis entre les différentes politiques.
M. le président. L’amendement n° I-1027, présenté par MM. Bocquet, Savoldelli et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 11
Rédiger ainsi cet alinéa :
7° Les trente-deuxième à trente-quatrième lignes sont supprimées ;
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Pascal Savoldelli.
M. Pascal Savoldelli. Il est tout à fait compréhensible que plusieurs amendements convergent. L’an dernier, en effet, un consensus s’est dégagé sur nos travées pour réclamer une augmentation massive du plafond de la taxe dite Buffet, dont, nul ici ne l’ignore, les produits sont redistribués au sport amateur. Quand on parle vitalité de nos territoires et cohésion sociale, une telle manne est évidemment indispensable pour le sport amateur.
L’Euro masculin de football, les jeux Olympiques et Paralympiques de Tokyo, les championnats d’Europe d’athlétisme : toutes ces compétitions ont été annulées, et d’autres encore.
S’agissant de Mediapro, nous avons derrière nous une expérience qui nous sert, même si elle n’est pas réjouissante, c’est ce qui s’est passé en Italie : Mediapro a failli et rechigné à honorer ses échéances. Il n’est donc pas abusif, malgré les engagements oraux du Président de la République, de craindre de se retrouver dans la même situation qu’au milieu des années 2000, avec la défaillance de MP & Silva.
Dans ce climat défavorable, nous avons, comme d’autres groupes ou collègues, décidé de proposer cette mesure, parce que la manne de Mediapro, estimée à près de 40 millions d’euros de taxe Buffet par an, est devenue largement hypothétique. Nous nous retrouvons une nouvelle fois avec une sorte de « détournement » – je mets bien des guillemets – de cette taxe.
Le problème du plafond n’est pas nouveau. D’ailleurs, nous avons soutenu la décision du Gouvernement de le relever de 40 millions d’euros à 60,1 millions d’euros. Reste que nous sommes loin du compte, puisque le produit estimé de la taxe avoisine les 74 millions d’euros pour 2020 et 2021, contre 53 millions d’euros en 2019.
On parle beaucoup du football, d’autant que la ligue professionnelle est en très grande difficulté. Je précise toutefois que l’intégralité du produit de la taxe Buffet va à l’Agence nationale du sport, directement pour les pratiques amateurs : c’est donc un dispositif redistributif. Mes chers collègues, pensez à tous les sports qui ne sont pas médiatisés, en particulier aux sports féminins. Rassemblons-nous autour du sport amateur et accomplissons un acte législatif novateur !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Sans aller jusqu’à dire que ce débat enflamme notre hémicycle, je constate que le financement du sport professionnel et, peut-être davantage encore, du sport amateur est toujours un motif de préoccupation. Monsieur le ministre, vous venez de vous en rendre compte.
La commission émet un avis favorable sur l’amendement n° I-1098 rectifié visant à modifier la répartition des taxes affectées à l’Agence nationale du sport.
Certes, le Gouvernement a fait le nécessaire pour prévoir l’affectation intégrale du produit de la taxe Buffet, mais cela ne suffira pas en cas de renégociation du contrat de diffusion des droits télé pour le championnat de football professionnel. L’Agence nationale du sport est menacée de fragilisation, puisque c’est elle qui supporte la totalité du risque.
L’amendement n° I-1098 rectifié vise à sécuriser le financement de l’Agence nationale du sport pour la préserver de ce risque.
Les amendements de M. Savin vont dans le même sens, mais ils tendent à prévoir des montants plus élevés de crédits. La commission en demande donc le retrait. Il en est de même pour l’amendement n° I-1027.
L’ensemble de ces amendements traduisent une demande récurrente : que le budget consacre davantage de moyens à la politique en faveur du sport !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Le Gouvernement émet un avis défavorable, et ce pour trois raisons.
D’abord, sur Mediapro, le Gouvernement ne souhaite pas, à ce stade, intervenir dans les discussions contractuelles en cours. Des engagements ont été pris en cas de défaillance du système.
Ensuite, le Gouvernement ne souhaite pas la remise en cause des plafonds votés en première lecture à l’Assemblée nationale, en ce qui concerne tant la taxe sur les paris que la taxe Buffet, dont la limite a été relevée de 10 millions d’euros en net. En réalité, elle l’a été de 34 millions d’euros, avec une diminution de 24 millions d’euros des crédits budgétaires.
Enfin, monsieur Savin, les dispositions annoncées par le Président de la République seront financées. Pour l’opération Pass’Sport et l’aide aux fédérations, nous avons un objectif de financement au second semestre. Nous savons que nous pourrons le faire en gestion et le régulariser autant que nécessaire, au plus tard dans le projet de loi de finances rectificative de fin d’année. Je tiens à vous rassurer : l’ensemble des mesures annoncées par le chef de l’État seront mises en œuvre et financées.
M. le président. La parole est à M. Didier Rambaud, pour explication de vote.
M. Didier Rambaud. Tous ceux qui regardent de près le sport connaissent très bien la mécanique de la taxe Buffet, qui est peut-être la plus belle mesure financière de ces vingt dernières années en faveur du sport, dans la mesure où elle assure une solidarité du monde professionnel vers le monde amateur.
Cela dit, est-ce vraiment cette année qu’il faut agir sur le relèvement ? Le sport professionnel est en danger, notamment les clubs de Ligue 1 et de Ligue 2 : on peut assister, d’ici à la fin de la saison sportive, à des dépôts de bilan de clubs, avec tous les dégâts médiatiques que cela pourrait provoquer.
Il n’existe pas encore de modèle économique pour ces clubs : ils sont télé-dépendants et ont bâti leur budget pour les prochaines années en fonction de droits télévisuels qui ont explosé – Pascal Savoldelli a parlé de Mediapro –, mais qui aujourd’hui ne sont plus à la hauteur. Le relèvement de la taxe Buffet mettrait en péril davantage encore le sport professionnel.
En la circonstance, je prends la défense des clubs professionnels, parce que ce n’est à mon avis pas l’année, où il faut relever ce plafond. Je crois beaucoup plus aux mesures annoncées par la ministre Roxana Maracineanu et le Président de la République pour mieux accompagner le monde sportif au niveau de sa base.
M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, pour explication de vote.
M. Patrick Kanner. Le sport français s’interroge une nouvelle fois sur son devenir, en l’occurrence sous le prisme du financement.
À titre personnel, j’étais très défavorable à la création de l’Agence nationale du sport. Elle correspond à un démantèlement du ministère des sports, alors que celui-ci disposait auparavant d’un bras armé sous la forme du Centre national pour le développement du sport (CNDS), bien connu de tous les élus locaux.
Au fil des années, nous voyons, y compris sur le statut personnel de la ministre des sports, que la préoccupation prioritaire affichée par le Président de la République à l’occasion de l’obtention des jeux Olympiques par la France à Lima en 2017, s’effiloche progressivement, notamment sur le plan budgétaire.
Je regrette que le Gouvernement ne veuille pas rassurer au-delà des annonces qui ont été faites – 400 millions d’euros, c’est beaucoup, mais ce sont des annonces – lors de la rencontre du Président de la République avec les fédérations sportives et les grands sportifs français. Le chef de l’État a voulu rassurer, mais toujours « dos dans les cordes », si vous me permettez cette expression sportive, jamais de manière proactive. Résultat : la Haute Assemblée constate, une nouvelle fois, un déficit financier anxiogène pour le monde sportif dans notre pays.
J’ai entendu l’avis favorable du rapporteur général sur l’amendement de M. Lafon. J’ai bien conscience, monsieur Savin, que son adoption ferait tomber certains des vôtres.
M. Michel Savin. C’est pour cela que le sous-amendement doit être adopté !
M. Patrick Kanner. Pour notre part, nous voterons l’ensemble des amendements au fur et à mesure qu’ils seront mis aux voix.
Fidèles à un devoir de vigilance, nous relayons l’alerte, l’alarme, presque l’appel au secours du monde sportif, qui ne peut pas se retrouver dans une situation de fragilisation totale au regard des 17 millions de Français licenciés dans les clubs et du très grand nombre de Français qui pratiquent un sport.
Monsieur le ministre, vous n’êtes pas en charge des sports, mais vous représentez le Gouvernement : j’espère qu’un jour celui-ci comprendra qu’exercer un soft power, un pouvoir d’influence, à travers le sport est un facteur important de la grandeur de la France. Cela passe non par la négociation de quelques petits millions ici ou là, mais par une grande politique sportive, qui est malheureusement absente aujourd’hui.
M. le président. Mes chers collègues, vous aurez l’occasion, lors de l’examen des crédits des missions budgétaires, en seconde partie, de vous exprimer sur le fond des politiques.
La parole est à M. Michel Savin, pour explication de vote.
M. Michel Savin. Nous débattons trop peu souvent du sport dans cet hémicycle, monsieur le président. Pour une fois, nous avons l’occasion de le faire.
Si l’amendement n° I-1098 est adopté, je crains que les autres amendements en discussion commune ne deviennent sans objet. Il est donc important de le modifier en votant le sous-amendement n° I-1256.
Monsieur le ministre, vous nous annoncez que les crédits seront inscrits en cours d’année, mais nous sommes échaudés depuis que, en 2020, on a déshabillé le budget du ministère chargé des sports pour allouer des crédits à l’Agence nationale du sport.
Les 100 millions d’euros de crédits que l’on nous promet ne sont toujours pas financés. Le risque est donc qu’en cours d’année ils soient prélevés sur le budget du sport, qui est déjà ridicule. C’est pourquoi je propose, par l’amendement n° I-488 rectifié bis, qu’une partie de ces crédits – moins de 75 millions d’euros – soient inscrits dans la loi, ce qui permettra de lancer l’opération Pass’Sport.
Comme l’ont souligné certains de mes collègues, on ne peut pas continuer à entendre les fédérations se plaindre de la baisse du nombre de licenciés, ni les clubs pro de l’absence de recettes de billetterie. Hier, le Président de la République a annoncé que les grands rassemblements restaient suspendus. Chaque match de foot, de basket, de handball ou de hockey sur glace se tient à huis clos, ce qui entraîne des pertes de recettes, donc de revenus pour les clubs.
Par l’amendement n° I-489 rectifié, il s’agit d’inscrire les crédits correspondant aux annonces chiffrées du Président de la République et, ainsi, de donner aux clubs et aux fédérations un peu de visibilité quant au devenir de leur fonctionnement économique et budgétaire.
Ce ne sont pas des sommes extraordinaires, mais elles permettront de donner un coup de pouce au monde sportif amateur et professionnel. J’espère donc que le sous-amendement et les amendements suivants seront votés.
M. le président. Quel est donc l’avis de la commission sur le sous-amendement n° I-1256 ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. La commission s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée sur ce sous-amendement.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-1098 rectifié, modifié.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l’amendement n° I-488 rectifié bis n’a plus d’objet.
Je mets aux voix l’amendement n° I-489 rectifié.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, les amendements nos I-490 rectifié, I-491 rectifié et I-1027 n’ont plus d’objet.
L’amendement n° I-1176 rectifié bis, présenté par Mme Sollogoub, M. Levi, Mme Vermeillet, MM. Daubresse, Prince et S. Demilly, Mme Jacquemet, MM. Bouchet, Henno, Chasseing, Paccaud, Vogel, Guerriau et Houpert, Mme Guidez, M. Chauvet, Mme Vérien, MM. Détraigne et Laugier, Mme Paoli-Gagin, MM. Duffourg, Guérini, Bonhomme, Ravier, Chatillon et Decool, Mme Jacques, MM. A. Marc et Canevet, Mmes Billon, Saint-Pé et Morin-Desailly, MM. Le Nay et L. Hervé, Mme de La Provôté, MM. Reichardt et Gremillet, Mme Gruny, MM. Somon et Meurant, Mmes Renaud-Garabedian et Dindar et MM. Cazabonne et Wattebled, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 13
Supprimer cet alinéa.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Nadia Sollogoub.
Mme Nadia Sollogoub. L’article 24 prévoit une diminution – certes, amendée par l’Assemblée nationale – des ressources affectées aux chambres de commerce et d’industrie (CCI). Or cette baisse de plafond des ressources est incohérente avec l’ambition affichée par le plan de relance et compromet sa mise en œuvre dans les territoires, au plus près des entreprises.
En ces temps de crise sanitaire, sociale et économique, les CCI ont plus que jamais un rôle d’accompagnement à jouer auprès des TPE et des PME.
Il s’agit donc de supprimer l’alinéa 13 afin de préserver le maillage territorial des CCI.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Nadia Sollogoub, pour explication de vote.
Mme Nadia Sollogoub. Les CCI, comme de nombreux autres organismes, souhaiteraient disposer d’un peu de visibilité sur l’avenir. Or, chaque année, leurs ressources sont une variable d’ajustement, si bien que nous sommes obligés de jouer les marchands de tapis. Dans nos territoires ruraux, les CCI sont pourtant des outils absolument stratégiques. Nous en avons un besoin impératif.
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.
M. Marc Laménie. Je voterai cet amendement malgré l’avis défavorable de la commission des finances, dont j’ai pourtant l’habitude de suivre les avis.
Nos chambres consulaires jouent un rôle important en termes d’aménagement du territoire. Or, dans le contexte actuel de crise sanitaire, les CCI – mais aussi les chambres d’agriculture et les chambres de métiers et de l’artisanat, visées dans d’autres amendements – ont réellement besoin de soutien, d’autant qu’elles jouent un rôle particulièrement important pour soutenir nos petites entreprises qui en ont bien besoin.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° I-11 rectifié, présenté par Mme Lavarde, MM. Le Gleut, Longuet, J.B. Blanc, Charon et Cambon, Mme Noël, M. Mouiller, Mme Deroche, M. Cuypers, Mme Delmont-Koropoulis, M. Mandelli, Mme Deromedi, M. de Legge, Mmes M. Mercier et Chauvin, MM. Pellevat et Sautarel, Mme Garriaud-Maylam, MM. Savary et Brisson, Mme Gruny, MM. Piednoir et E. Blanc, Mme Malet, MM. Genet, Favreau et D. Laurent, Mme Estrosi Sassone, MM. Regnard et B. Fournier, Mme Dumas, MM. Meurant et Savin, Mme Berthet, M. Sol, Mmes Lassarade et Procaccia, M. Cardoux et Mmes Raimond-Pavero et Primas, est ainsi libellé :
I. – Alinéas 31 et 32
Supprimer ces alinéas.
II. – Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
…. – L’établissement mentionné au L. 411-1 du code de la propriété intellectuelle verse en 2021 une contribution de trente-six millions d’euros au budget général de l’État, prélevée sur ses réserves.
…. – La perte de recettes résultant pour l’Institut national de la propriété industrielle du précédent paragraphe est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Christine Lavarde.
Mme Christine Lavarde. Cet amendement a pour objet de revenir sur le plafonnement des redevances de l’Institut national de la propriété industrielle (INPI) introduit dans ce projet de loi de finances.
Si je rejoins le Gouvernement sur le constat du niveau de réserves excédentaire de l’INPI – dans son référé relatif à la gestion de l’institut, la Cour des comptes préconisait d’ailleurs une reprise de ces réserves –, je ne le rejoins pas sur la méthode proposée pour les récupérer, à savoir le plafonnement des redevances perçues annuellement par l’opérateur.
En effet, l’INPI facture ses prestations d’analyse des brevets avant leur dépôt. De plus, dans le cadre de la loi Pacte, un certain nombre de ses missions ont été élargies : l’opérateur sera notamment responsable de la mise en place du registre unique.
Plafonner les recettes reviendrait à pénaliser les entreprises qui déposeraient des brevets une fois ce plafond atteint, puisque l’INPI disposerait de ressources limitées pour traiter leur demande. Ce serait un peu contre-intuitif pour les industriels qui, au-delà d’un certain nombre de dossiers de brevets, verraient leurs demandes traitées gratuitement, comme si l’opérateur n’avait pas besoin de ressources humaines pour les instruire.
Il s’agit d’opérer un prélèvement sur les recettes de l’opérateur pour remédier au caractère excédentaire de son fonds de roulement et, ainsi, répondre aux injonctions de la Cour des comptes tout en conservant un flux annuel équilibré entre recettes et dépenses.
M. le président. L’amendement n° I-842 rectifié bis, présenté par M. Yung, Mme Schillinger, MM. Mohamed Soilihi et Rohfritsch, Mme Duranton, MM. Iacovelli, Théophile et Hassani, Mme Havet et M. Patient, est ainsi libellé :
I. – Alinéas 31 et 32
Supprimer ces alinéas.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Richard Yung.
M. Richard Yung. Pour les mêmes raisons, je propose pour ma part, non pas d’opérer une ponction de 36 millions d’euros, comme le suggère Christine Lavarde, mais de supprimer le plafonnement.
En effet, l’INPI doit faire face à des dépenses qui sont proportionnelles à son activité. De plus, dans le cadre de la loi Pacte, elle s’est vue attribuer de nouvelles responsabilités, notamment la tenue du guichet unique électronique pour les formalités des entreprises.
En outre, une partie significative des recettes de l’INPI – entre 150 et 200 millions d’euros par an – provient des reversements de l’Office européen des brevets (OEB), soit de taxes acquittées par des entreprises, y compris étrangères, qui déposent des brevets dans le monde entier.
Il faut que l’INPI ait les moyens de remplir ses missions. Par ailleurs, la diminution des taxes que l’INPI prélève sur les entreprises françaises me paraîtrait une bonne politique pour encourager l’innovation.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. L’amendement n° I-11 rectifié tend à effectuer un prélèvement sur les réserves de l’INPI plutôt que d’instaurer un plafonnement des mêmes réserves.
Le plafonnement n’est certes pas une solution idéale, car il ne dépend pas du nombre de brevets déposés, mais la solution proposée par Mme Lavarde présente l’inconvénient de ne pas résoudre le problème de l’accumulation des excédents, année après année, pointé par la Cour des comptes. De nombreuses redevances affectées font d’ailleurs l’objet d’un plafonnement.
Si le nombre des entreprises déposant un brevet devait augmenter au point de mettre en difficulté l’INPI, il serait facile d’augmenter le plafonnement, puisque chaque projet de loi de finances contient un article dédié aux taxes affectées.
Je demande donc le retrait de l’amendement n° I-11 rectifié, ainsi que de l’amendement n° I-842 rectifié bis de M. Yung, qui vise également à supprimer le plafonnement, mais sans prévoir de prélèvement sur les réserves de l’INPI.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Je précise que la Cour des comptes recommandait soit une budgétisation soit un plafonnement. Le niveau de plafonnement que nous avons retenu est supérieur de presque 10 millions d’euros au montant du budget exécuté en 2019. Cette marge permettra à l’INPI de mener à bien ses missions tout en maintenant, voire – comme nous l’espérons avec M. Young – en diminuant ses tarifs.
Le Gouvernement demande donc également le retrait de ces deux amendements ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
M. le président. Madame Lavarde, l’amendement n° I-11 rectifié est-il maintenu ?
Mme Christine Lavarde. Oui, je le maintiens, monsieur le président.
M. le président. Monsieur Yung, l’amendement n° I-842 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Richard Yung. Oui, je le maintiens, monsieur le président.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-842 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° I-706 rectifié ter, présenté par MM. J.M. Arnaud, Moga et Le Nay, Mme C. Fournier, M. P. Martin, Mme Guidez, MM. Cazabonne, Janssens, Henno et L. Hervé, Mme Morin-Desailly et M. Longeot, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 38
Rédiger ainsi cet alinéa :
B. – Le III bis est complété par les mots : « et au V bis de l’article L. 213-10-9 du code de l’environnement ».
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-Michel Arnaud.
M. Jean-Michel Arnaud. Cet amendement a pour objet d’améliorer le financement des établissements publics territoriaux de bassin (EPTB).
Ces derniers peuvent demander à l’agence de l’eau d’appliquer sur leur territoire une majoration du tarif des redevances pour prélèvement sur les ressources en eau. Les sommes ainsi recouvrées constituent une ressource propre de l’établissement public territorial de bassin.
Malgré le dépôt de plusieurs dossiers, cette ressource n’a jamais pu être mobilisée par les EPTB. Elle est pourtant indispensable pour contribuer à la mise en œuvre des schémas d’aménagement et de gestion des eaux (SAGE), laquelle nécessite des capacités techniques et financières adaptées.
Le premier argument s’opposant à la mise en application de la loi est que la recette susvisée est inscrite à l’article du code de l’environnement auquel s’applique le plafonnement précisé à l’article 46 de la loi de finances pour 2012. Or cette recette ne constitue pas une redevance en tant que telle ; seul son calcul est basé sur une redevance existante.
De plus, l’article 46 précise clairement que les recettes plafonnées sont celles qui sont affectées à l’organisme qui prélève. Or la présente recette étant reversée directement à l’EPTB sans frais de gestion, elle n’est pas visée.
Afin de supprimer les ambiguïtés liées au positionnement de la recette dans le code, il est proposé d’écrire explicitement que la recette prévue est exclue du montant plafonné des recettes des agences de l’eau.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Cette question très technique a déjà été évoquée l’année dernière. Toutefois, je ne dispose pas, à ce stade, de réponse précise. Je sollicite donc l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. La mise en plafond de la possibilité de majoration de la redevance pour prélèvement sur la ressource en eau reviendrait à remettre en cause l’effectivité du plafond des taxes affectées aux agences de l’eau. Or nous considérons que le dispositif de plafonnement global des redevances offre déjà de la souplesse aux agences, car il est adapté à leur situation : ce sont les seuls organismes disposant d’un système de plafonnement individuel couplé à un système de péréquation, ce qui permet de garantir le niveau de recettes et de moduler le taux de redevance en fonction des caractéristiques du bassin.
Nous sommes attachés à cet équilibre qui – j’en conviens – est un peu complexe. Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est donc l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-706 rectifié ter.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements identiques.
L’amendement n° I-325 rectifié est présenté par M. Babary, Mmes Chain-Larché et Primas, M. Artano, Mme Berthet, MM. Bouchet, Le Nay, Meurant, Chatillon, Chasseing et Bouloux, Mme Billon, MM. Canevet et Duffourg, Mme Deromedi, M. Cuypers, Mme Chauvin, MM. Moga, D. Laurent et Klinger, Mmes Gruny et Thomas, M. Rietmann, Mme Puissat, M. Daubresse, Mme Dumas, MM. Le Gleut, Bonnus et Paccaud, Mme M. Mercier, MM. Brisson, Lefèvre et Mandelli, Mmes Lassarade et Imbert, MM. Vogel, Mouiller, Chaize et Perrin, Mme Joseph, MM. Courtial et Houpert, Mme Malet, MM. Pellevat et Sido, Mme Belrhiti, M. Genet, Mme Dumont, MM. Bacci et Bonne, Mme Raimond-Pavero, MM. Charon, B. Fournier, E. Blanc, Saury, Bonhomme, Paul, Darnaud, Rapin et Gremillet et Mme Renaud-Garabedian.
L’amendement n° I-351 est présenté par M. Féraud, Mme Espagnac, MM. Montaugé, Kanner et Raynal, Mme Blatrix Contat, M. Bouad, Mme Briquet, MM. Cardon, Cozic, Éblé, Jeansannetas, P. Joly, Lurel, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy, Tissot, Antiste et J. Bigot, Mmes Bonnefoy et Conconne, MM. Durain, Fichet et Gillé, Mme Harribey, M. Jacquin, Mmes G. Jourda, Le Houerou, Lubin, Monier, Préville et S. Robert, MM. Sueur, Temal et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° I-715 rectifié est présenté par MM. Menonville et Capus, Mmes Paoli-Gagin et Mélot et MM. Lagourgue, Wattebled, Guerriau, Malhuret, Chasseing et Decool.
L’amendement n° I-967 rectifié est présenté par MM. Requier, Artano, Bilhac et Cabanel, Mmes M. Carrère et N. Delattre, MM. Gold et Guérini, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et M. Roux.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
I. – Après l’alinéa 38
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
.… – Par dérogation à la quarantième ligne du tableau du second alinéa du I de l’article 46 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012, le produit de la taxe additionnelle à la cotisation foncière des entreprises mentionnée à l’article 1601 du code général des impôts affecté au réseau des chambres de métiers et de l’artisanat est plafonné, en 2021, à 205,86 millions d’euros.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Serge Babary, pour présenter l’amendement n° I-325 rectifié.
M. Serge Babary. Cet amendement vise à compenser, pour le réseau des chambres de métiers et de l’artisanat (CMA), les moindres recettes perçues en 2019 en raison de l’exonération de taxe pour frais de CMA dont ont bénéficié les entreprises ayant réalisé moins de 5 000 euros de chiffre d’affaires.
Le plafond de recettes affectées allouées aux CMA, fixé à 203,1 millions d’euros, est en effet décliné en plafonds régionaux : selon le dynamisme de la base fiscale, certaines régions perçoivent une recette inférieure au plafond, sans que d’éventuels trop-perçus par d’autres régions puissent leur être transférés ponctuellement, puisque ces derniers sont versés au budget général. La perte de recettes pour le réseau s’élève au total à 2,7 millions d’euros.
Il est proposé de compenser cette perte par un relèvement temporaire, pour un an, du plafond de taxes affectées de 2,7 millions d’euros.
Il s’agit d’une mesure d’équité, mais également d’efficacité, le réseau des CMA étant fortement mobilisé depuis le début de la crise pour accompagner les artisans. Aides à la numérisation, communication sur les aides, soutien psychologique, dizaines de milliers d’appels passés sont autant d’actions largement reconnues par les acteurs de terrain et menées avec des moyens constants, voire en baisse dans certaines régions.
Cet amendement vise donc à corriger un effet de bord de l’exonération pour les petites entreprises en permettant au réseau de percevoir l’intégralité de la taxe affectée prévue par la loi.
M. le président. La parole est à M. Thierry Cozic, pour présenter l’amendement n° I-351.
M. Thierry Cozic. Cet amendement a pour objet de compenser le non-versement pour l’année 2019 par l’État du plafond fiscal de 203,1 millions d’euros normalement garanti au réseau des chambres de métiers et de l’artisanat.
En effet, pour l’année 2019, le réseau consulaire des CMA a perçu 200,4 millions d’euros de la part de l’État, soit 2,7 millions de moins que le plafond général, et ce malgré un rendement de la taxe pour frais de chambre de métiers et de l’artisanat (TFCMA) de 209,4 millions d’euros en 2019.
Cette « perte » n’est en rien imputable aux chambres de métiers et de l’artisanat elles-mêmes : elle est le résultat de l’exonération de TFCMA voulue par le Gouvernement pour les entreprises ayant réalisé moins de 5 000 euros de chiffre d’affaires.
Dans le contexte de crise économique que nous connaissons, les CMA, qui sont particulièrement mobilisées dans l’accompagnement des entreprises artisanales en difficulté et qui sont des acteurs de la « territorialisation » du plan de relance, n’ont pas à assumer cette baisse de ressources.
C’est pourquoi cet amendement vise à relever le plafond de 2,7 millions d’euros pour 2021 afin de compenser cette même somme manquante dans le versement 2020 au titre de l’année 2019.
M. le président. La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin, pour présenter l’amendement n° I-715 rectifié.
Mme Vanina Paoli-Gagin. J’ajoute à ce qui vient d’être dit que le réseau des CMA est vital dans le déploiement effectif du plan de relance dans les territoires.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour présenter l’amendement n° I-967 rectifié.
M. Jean-Claude Requier. Il est défendu, monsieur le président !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Ces amendements visent à compenser une mesure dont le coût n’est certes pas énorme, mais qui représente une somme importante, pour les chambres de métiers et de l’artisanat. Ainsi, la copie sera propre.
Par conséquent, la commission s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-325 rectifié, I-351, I-715 rectifié et I-967 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° I-173 rectifié est présenté par MM. Menonville et Capus, Mmes Paoli-Gagin et Mélot et MM. Lagourgue, Chasseing, Decool, Guerriau, A. Marc, Wattebled et Malhuret.
L’amendement n° I-1087 rectifié bis est présenté par MM. Cabanel, Artano, Gold, Requier, Roux, Fialaire, Guiol et Bilhac, Mmes M. Carrère et N. Delattre, M. Guérini et Mmes Guillotin et Pantel.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 58
Remplacer les mots :
d’au maximum
par le mot :
de
La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin, pour présenter l’amendement n° I-173 rectifié.
Mme Vanina Paoli-Gagin. Mon collègue Franck Menonville est l’auteur de cet amendement.
Monsieur le ministre, quand on pense aux générations futures, on a envie que le chemin du champ à l’assiette soit un peu plus vertueux – c’est un understatement – qu’il n’a pu l’être par le passé.
La diminution du recours aux produits phytos est un enjeu majeur de santé publique et de transition écologique. C’est pourquoi il est très important de maintenir les 41 millions d’euros alloués au volet national du plan Écophyto, conduit à l’échelon européen pour financer des projets innovants et structurants comme le réseau Dephy et les fermes de démonstration, ou encore les travaux de recherche sur des produits alternatifs tels que les biocontrôles.
Nous devons absolument maintenir ces crédits si nous voulons que notre relance soit verte.
M. le président. La parole est à M. Henri Cabanel, pour présenter l’amendement n° I-1087 rectifié bis.
M. Henri Cabanel. Cet amendement vise à maintenir le financement du volet national du plan Écophyto à hauteur de 41 millions d’euros, afin de viser l’objectif de réduction de l’usage des produits phytopharmaceutiques d’ici à 2025.
Engagé en 2018, le plan Écophyto a permis de mettre en place de nombreuses actions structurantes, telles que le réseau Dephy, les fermes pilotes, le bulletin de santé végétale et de nombreux autres projets de recherche et d’innovation. Ce plan a été élargi à 2015, puis consolidé en 2018 pour devenir Écophyto II+.
Les exigences sociétales en matière de sécurité alimentaire sont croissantes. La loi de 2018 pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, dite Égalim, prévoit de nombreux dispositifs visant à améliorer les conditions sanitaires et environnementales de production. Il ne faut donc pas relâcher les efforts.
Dans cette perspective, le budget doit prévoir les moyens suffisants pour accompagner les agriculteurs qui – je le souligne – sont volontaires et ont fait de nombreux efforts depuis de nombreuses années en menant des projets visant à conforter la transition écologique et à encourager la réduction de l’usage des pesticides.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Il s’agit d’un simple problème de coordination rédactionnelle.
En effet, le montant de la redevance pour pollution diffuse est plafonné à 41 millions d’euros. Le projet de loi de finances reprend une formulation similaire, « d’au maximum 41 millions d’euros » – il s’agit donc bien d’un plafond –, pour le financement du programme Écophyto.
La commission s’en remet donc à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Laurent Duplomb, pour explication de vote.
M. Laurent Duplomb. Il vaut mieux dire les choses clairement. Comme l’ont souligné Mme Paoli-Gagin et M. Cabanel, on ne peut pas demander à l’agriculture à la fois de faire des progrès et de s’engager dans des recherches sans utiliser les fonds prévus à cet effet.
La taxe sur les produits phytopharmaceutiques finance les fermes Dephy et le plan Écophyto. Il est bien normal que l’on veille à ce que le produit de cette taxe soit tracé de façon totalement assurée dans le projet de loi.
C’est pourquoi, mes chers collègues, je vous demande de soutenir ces amendements.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-173 rectifié et I-1087 rectifié bis.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. L’amendement n° I-492 rectifié, présenté par MM. Savin, Piednoir, Kern, Hugonet et Pellevat, Mme Eustache-Brinio, M. Reichardt, Mmes Richer, Berthet et Dumas, MM. Grand, Courtial, D. Laurent et Levi, Mme Joseph, MM. Bouchet, Pemezec, Mandelli et Henno, Mme Micouleau, MM. Paccaud, Mouiller et Brisson, Mmes Malet, Mélot et Billon, M. Savary, Mmes M. Mercier et Demas, MM. Charon et Vogel, Mmes Deromedi et Boulay-Espéronnier, M. Chauvet, Mme Estrosi Sassone, M. Laugier, Mmes Belrhiti et Sollogoub, M. B. Fournier, Mmes Lassarade et Puissat, MM. Bonhomme et Gremillet, Mme de La Provôté, MM. Genet et Darnaud, Mme Ventalon, MM. Chatillon et Lefèvre, Mme Imbert, M. Menonville, Mmes L. Darcos et Jacques, MM. A. Marc et Laménie, Mme Borchio Fontimp, M. Saury, Mme Gatel, MM. E. Blanc et Meurant, Mme Di Folco, MM. Wattebled, de Nicolaÿ et Détraigne, Mme N. Delattre, MM. P. Martin et Guerriau, Mmes Guidez et Bonfanti-Dossat, MM. Bouloux et Grosperrin et Mmes de Cidrac et Renaud-Garabedian, est ainsi libellé :
Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
XII. – Le sixième alinéa de l’article 302 bis ZE du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée : « Le plafond de cette taxe de 5 % sur la cession des droits de retransmission télévisuelle des événements sportifs est supprimé. »
XIII. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Michel Savin.
M. Michel Savin. Cet amendement vise à supprimer le plafonnement de la part de la taxe Buffet affectée à l’Agence nationale du sport.
Cette taxe ayant été créée et mise en œuvre au titre de la solidarité entre le sport professionnel et le sport amateur, il est important que les bénéfices de la valorisation du sport professionnel français puissent intégralement bénéficier au sport amateur, ce qui alimentera un cercle vertueux pour le sport français.
Je précise que l’adoption de cet amendement ne remettrait en question ni le plafonnement de la taxe sur les paris sportifs ni celui de la taxe sur les recettes de la Française des jeux.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. La commission demande le retrait de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Savin, l’amendement n° I-492 rectifié est-il maintenu ?
M. Michel Savin. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° I-492 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l’article 24, modifié.
(L’article 24 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 24
M. le président. L’amendement n° I-849 rectifié, présenté par MM. Savin, Piednoir, Kern, Hugonet et Pellevat, Mme Eustache-Brinio, M. Reichardt, Mmes Richer, Berthet et Dumas, MM. Grand, Courtial, D. Laurent et Levi, Mme Joseph, MM. Bouchet, Pemezec, Mandelli et Henno, Mme Micouleau, MM. Paccaud, Mouiller et Brisson, Mmes Malet, Mélot et Billon, M. Savary, Mmes M. Mercier et Demas, MM. Charon et Vogel, Mmes Deromedi et Boulay-Espéronnier, M. Chauvet, Mme Estrosi Sassone, M. Laugier, Mmes Belrhiti et Sollogoub, M. B. Fournier, Mmes Lassarade et Puissat, MM. Bonhomme et Gremillet, Mme de La Provôté, MM. Genet et Darnaud, Mme Ventalon, MM. Chatillon et Lefèvre, Mme Imbert, M. Menonville, Mmes L. Darcos et Jacques, MM. A. Marc et Laménie, Mme Borchio Fontimp, M. Saury, Mme Gatel, MM. E. Blanc et Meurant, Mme Di Folco, MM. Wattebled et de Nicolaÿ, Mme N. Delattre, M. Guerriau et Mmes Renaud-Garabedian et Procaccia, est ainsi libellé :
Après l’article 24
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article L. 222-2-10-1 du code du sport est ainsi rédigé :
« Art. L. 222-2-10-1. – N’est pas considérée comme salaire la part de la rémunération versée à un sportif ou à un entraîneur professionnel par une association ou une société sportive mentionnée aux articles L. 122-1 ou L. 122-2, et qui correspond à la commercialisation par ladite association ou société de l’image collective de l’équipe à laquelle le sportif ou l’entraîneur appartient.
« Pour l’application du présent article, sont seules considérées comme des sportifs ou des entraîneurs professionnels les personnes ayant conclu, avec une association ou une société mentionnée au premier alinéa du présent article, un contrat de travail visé à l’article L. 222-22.
« Une convention ou un accord collectif national, conclu par discipline, détermine les modalités de fixation de la part de rémunération définie au premier alinéa, en fonction du niveau des recettes commerciales générées par l’exploitation de l’image collective de l’équipe sportive, et notamment des recettes de parrainage, de publicité et de marchandisage, ainsi que les recettes provenant de la cession des droits de retransmission audiovisuelle des compétitions. La part de cette rémunération ne peut excéder :
« a) 30 % de la rémunération brute totale pour la fraction de rémunération dans la limite de dix fois le plafond arrêté par le ministre chargé de la sécurité sociale en application de l’article L. 241-3 du code de la sécurité sociale ;
« b) 20 % de la rémunération brute totale pour la fraction de rémunération comprise entre dix et vingt fois le plafond arrêté par le ministre chargé de la sécurité sociale en application du même article L. 241-3 ;
« c) 10 % de la rémunération brute totale pour la fraction excédant vingt fois le plafond arrêté par le ministre chargé de la sécurité sociale en application dudit article L. 241-3.
« Le présent article ne s’applique pas à la part de rémunération inférieure à un seuil fixé par une convention ou un accord collectif national, conclu par discipline, et qui ne peut être inférieur à deux fois le plafond arrêté par le ministre chargé de la sécurité sociale en application du même article L. 241-3.
« En l’absence d’une convention ou d’un accord collectif national pour une discipline sportive, un décret peut déterminer les modalités de cette part de rémunération dans ladite discipline, dans le respect des conditions édictées par les alinéas précédents. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Michel Savin.
M. Michel Savin. Voilà quelques jours, nous avons débattu d’une disposition relative au droit à l’image collective introduite dans le PLFR 4 par l’Assemblée nationale.
Après un débat intéressant et responsable, notre assemblée a adopté un amendement de suppression déposé par M. le rapporteur général, qui a fait valoir les éléments suivants : le PLFR de fin de gestion n’était pas le bon vecteur législatif pour une telle mesure, dont le coût n’était pas maîtrisé et dont la mise en œuvre pouvait être détournée. Nous l’avons entendu.
Monsieur le ministre, lors de ce débat, vous avez déclaré espérer que les études du groupe de travail aboutiraient pour le projet de loi de finances pour 2021, sans en avoir toutefois la certitude, compte tenu des difficultés qu’il aurait à surmonter.
Au regard de ces annonces, de la situation économique catastrophique dans laquelle se trouvent les clubs de sport professionnels masculins et féminins – plus de billetterie, des partenariats qui revoient leur participation à la baisse, des collectivités en difficulté – et de la situation d’urgence que nous affrontons, il me semble que les conditions sont pleinement réunies pour qu’un groupe de travail soit constitué dans les plus brefs délais et qu’une solution soit trouvée d’ici à la fin de l’examen du projet de loi de finances pour 2021 par le Parlement.
Je vous ai d’ailleurs écrit en ce sens, monsieur le ministre. Mon courrier est resté sans réponse. Sans doute êtes-vous très pris…
Conformément à l’article 45 de la Constitution et à la règle dite « de l’entonnoir », j’ai déposé cet amendement ayant pour objet d’introduire dans le code du sport un nouveau dispositif de droit à l’image collective visant l’ensemble des sports professionnels, masculins comme féminins. Monsieur le rapporteur général, en réponse aux inquiétudes et aux critiques que vous avez formulées quant à son coût et à son possible détournement, un barème progressif a été prévu pour l’application de ce dispositif.
Celui-ci s’inscrit de plein droit dans le projet de loi de finances et son application par palier réduit les possibilités de dérives. Enfin – et surtout – son coût pour le budget de l’État est divisé par deux ou trois, puisque la part de rémunération passe de 30 % à 10 % pour la tranche la plus élevée.
Lors de sa réunion avec les acteurs du monde sportif, le Président de la République a exprimé le souhait qu’une proposition soit rapidement formulée.
En adoptant cet amendement, nous répondons à cet objectif et nous disposerons a minima de trois semaines pour élaborer un nouveau dispositif robuste et ambitieux susceptible d’être adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. La commission demande de nouveau le retrait de cet amendement pour deux raisons.
D’une part, comme l’a montré le plaidoyer de Michel Savin, il est nécessaire qu’un groupe de travail voie le jour et se réunisse autour de la table pour formuler des propositions. Il y a une véritable attente.
D’autre part, cette disposition peine à trouver sa place en cette période où nous avons d’autres priorités, car la cohésion sociale du pays est en jeu. Certes, le monde du sport participe à cette cohésion sociale, mais des moyens importants sont déjà mobilisés tant pour le sport de haut niveau, notamment pour les jeux Olympiques, que pour la pratique sportive des Français et le monde amateur.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Le Gouvernement émet le même avis que la commission.
Le 17 novembre dernier, le Président de la République a annoncé la création d’un groupe de travail sur le sujet. Attendons qu’il rende ses conclusions.
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Je tiens à redire tout l’intérêt de cet amendement que j’ai cosigné.
Les clubs sportifs ont un rôle majeur à jouer dans une période particulièrement difficile. Certains d’entre eux ont dû surmonter de nombreuses difficultés pour accéder à une division ou s’y maintenir. C’est le fruit d’un travail long, dont le résultat est rendu public à l’issue de matchs très médiatisés auxquels nos concitoyens aiment assister.
Les clubs sportifs sont essentiels à la vie collective. Ils créent du lien social et développent l’économie. Leur effondrement serait catastrophique. Il leur faudrait des années pour remonter dans les différentes divisions.
Lancer une réflexion sur la situation du sport professionnel est une bonne initiative qui aura des répercussions intéressantes sur le sport amateur. J’y suis très sensible et je fais confiance à Michel Savin pour trouver des solutions. C’est pourquoi je soutiendrai sa décision sur cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Christine Lavarde, pour explication de vote.
Mme Christine Lavarde. Personne n’ignore mon attachement au monde du sport. Je n’ai toutefois pas cosigné cet amendement, car, tel qu’il est rédigé – M. le rapporteur général l’a très bien expliqué –, il semble déconnecté de la crise économique que nous traversons.
Il ne faudrait pas pour autant négliger les difficultés que rencontre l’économie du monde du sport. Seuls les clubs qui bénéficient d’un soutien des collectivités locales pourront survivre, car les aides financières diminuent. Voulons-nous vraiment que les collectivités deviennent ainsi le principal financeur du sport professionnel ?
Je souhaite déposer un sous-amendement qui a pour objet de supprimer les alinéas 7 à 9 et de rédiger la dernière phrase de l’alinéa 6 en ces termes : « La part de cette rémunération ne peut toutefois pas excéder 30 % de la rémunération brute totale versée par la société au sportif ou à l’entraîneur professionnel, dans la limite de deux fois le plafond arrêté par le ministre chargé de la sécurité sociale en application dudit article L. 241-3. » La rémunération sera ainsi fixée, de manière plus raisonnable, à 17 000 euros.
Si, dans le monde du football, la rémunération mensuelle oscille entre 90 000 euros et 100 000 euros, elle n’est que de 7 000 euros pour le handball, 12 000 euros pour le basket, 20 000 euros pour le rugby. C’est évidemment bien moindre quand il s’agit du sport féminin !
Ce sous-amendement vise à apporter un petit morceau de réponse, sans doute plus sage, aux difficultés rencontrées par les clubs professionnels, tout en desserrant l’étau qui pèse sur les collectivités. J’ai bien conscience que cela ne suffira pas à résoudre les problèmes auxquels est confrontée l’économie du sport, qui a besoin de réformes structurelles beaucoup plus importantes. Il faudra les développer dans le cadre du groupe de travail annoncé par le Président de la République, le 17 novembre dernier.
M. le président. Monsieur Savin, qu’en pensez-vous ?
M. Michel Savin. Si la limite est fixée à deux fois le plafond de la sécurité sociale, la rémunération ne serait que d’un peu plus de 6 000 euros. Il faudrait au moins l’élargir à cinq fois le plafond pour parvenir aux 17 000 euros que vous annoncez, ma chère collègue.
J’entends les arguments de M. le rapporteur général au sujet de la cohésion sociale. Nous sommes évidemment bien conscients que nombre d’entreprises, d’artisans et de commerçants sont en grande difficulté et qu’il n’est pas forcément opportun de présenter ce type d’amendement.
Cependant, le sport professionnel français ne se limite pas au football et à ses hauts salaires, comme on a trop tendance à le croire ! Ce sont aussi des équipes de basket, de handball, de volleyball, ou de hockey sur glace, qui sont aujourd’hui en très grande difficulté, qu’elles soient masculines, ou féminines, et c’est encore plus vrai dans ce dernier cas.
J’avais initialement prévu des amendements visant à instaurer des tranches de 30 %, 20 % et 10 % afin de mieux cibler les salaires inférieurs à la moyenne et d’aider ces clubs qui, comme l’a bien rappelé Christine Lavarde, vont connaître des difficultés. En effet, ils ne bénéficient pas des droits de télévision, et la participation de leurs partenaires risque d’être revue à la baisse. Sans aide, ils devront se tourner vers les collectivités, alors que celles-ci sont déjà en grande difficulté budgétaire.
Je suis prêt à accepter la proposition de Christine Lavarde, si la limite est remontée. Dans la mesure où le plafond de la sécurité sociale est à 3 000 euros, il faudrait la fixer à dix fois ce plafond. Il restera alors trois semaines au Gouvernement pour ouvrir la discussion et j’espère bien que nous trouverons une solution.
En l’état, la mesure prévue par ce sous-amendement ne touchera personne ! Il faut donc la revoir à la hausse.
M. le président. La limite que vous proposez équivaudrait à une rémunération de 30 000 euros et toucherait beaucoup de monde !
Madame Lavarde, quelle limite souhaitez-vous finalement fixer ?
Mme Christine Lavarde. Il convient de prévoir une limite à cinq fois le plafond de la sécurité sociale pour atteindre la rémunération souhaitée.
M. le président. Je suis donc saisi d’un sous-amendement n° I-1257, présenté par Mme Lavarde et ainsi libellé :
I. – Alinéa 6, dernière phrase
Rédiger ainsi cette phrase :
La part de cette rémunération ne peut toutefois pas excéder 30 % de la rémunération brute totale versée par la société au sportif ou à l’entraîneur professionnel, dans la limite de cinq fois le plafond arrêté par le ministre chargé de la sécurité sociale en application dudit article L. 241-3.
II. – Alinéas 7 à 9
Supprimer ces alinéas
La parole est à M. Claude Kern, pour explication de vote.
M. Claude Kern. Je voterai l’amendement ainsi sous-amendé. Fixer la limite à cinq fois le plafond de la sécurité sociale est tout à fait raisonnable. Un engagement inscrit dans la loi vaut mieux que des promesses.
Il faut désormais que le groupe de travail se mette en place.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. La discussion qui vient d’avoir lieu montre toute la bonne volonté qui émane de ces travées, même si les enjeux semblent se mélanger un peu. Le groupe de travail doit se mettre en place : c’est une impérieuse nécessité, sinon la priorité des priorités. Je le dis avec solennité et gravité.
Par cohérence, la commission demande le retrait du sous-amendement et de l’amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-849 rectifié, modifié.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 24.
L’amendement n° I-1211, présenté par MM. Rambaud, Bargeton, Buis et Dennemont, Mmes Duranton et Evrard, MM. Gattolin et Hassani, Mme Havet, MM. Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lévrier, Marchand, Mohamed Soilihi, Patient et Patriat, Mme Phinera-Horth, MM. Richard et Rohfritsch, Mme Schillinger, MM. Théophile, Yung et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :
Après l’article 24
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le 2° du V de l’article L. 612-20 du code monétaire et financier est ainsi rédigé :
« 2° L’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution envoie un appel à contribution à l’ensemble des personnes mentionnées au B du II du présent article au plus tard le 15 juillet de chaque année. Les personnes concernées acquittent le paiement correspondant auprès de la Banque de France au plus tard le 30 septembre de chaque année ; »
La parole est à M. Didier Rambaud.
M. Didier Rambaud. Cet amendement vise à simplifier le processus d’établissement des appels à contribution des assujettis du secteur de l’assurance au pouvoir de contrôle de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR).
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. La commission émet un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 24.
L’amendement n° I-448, présenté par M. Jacquin, au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, est ainsi libellé :
Après l’article 24
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le III de l’article 36 de la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Par dérogation, au titre de l’année 2021, cette part est calculée de manière à ce que les recettes totales de l’Agence s’élèvent, après déduction du montant des autres recettes qui lui sont affectées, à 2 782 000 000 euros. »
II. – La perte de recettes pour l’État résultant du I est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Angèle Préville.
Mme Angèle Préville, au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. L’Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afitf) perçoit des recettes dont le montant fluctue en fonction de l’activité économique, en particulier la taxe d’aménagement du territoire, qui est assise sur le nombre de kilomètres parcourus sur le réseau autoroutier concédé, les amendes radar et l’écocontribution sur les billets d’avion.
Il en résulte, chaque année, une imprévisibilité quant aux recettes réelles qui seront perçues par l’Afitf, alors même que celle-ci est engagée dans le financement de travaux d’infrastructures sur le temps long.
En raison de la crise sanitaire actuelle, les pertes de recettes pour l’Afitf au titre de l’année 2020 sont évaluées à 500 millions d’euros et font l’objet d’une compensation partielle dans le cadre de la troisième loi de finances rectificative et du quatrième projet de loi de finances rectificative.
Pour 2021, les prévisions de recettes sur lesquelles le budget de l’Afitf est construit paraissent sujettes à caution en raison de la poursuite probable des impacts de la crise sanitaire sur le trafic routier et aérien.
L’affectation des taxes sur les autoroutes et l’aérien et des amendes radar à l’Afitf a une vertu pédagogique, en ce qu’elle permet de matérialiser leur contribution au financement des infrastructures de transport.
C’est pourquoi cet amendement, que je présente au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, vise à maintenir cette affectation, tout en faisant de la part de TICPE versée à l’Afitf une variable d’ajustement, dont le montant sera modulé en fonction de celui des autres recettes perçues, en vue d’équilibrer le budget de l’agence.
On ne peut pas faire dépendre le financement des infrastructures de long terme de ressources aussi fluctuantes. La Suisse a instauré une visibilité à quinze ans, qui facilite la planification des travaux d’infrastructure à long terme. Chaque année, des événements inattendus, qu’il s’agisse des bonnets rouges, des gilets jaunes ou de la pandémie, empêchent la France de faire de même.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement est satisfait par l’amendement n° I-550 de MM. Maurey et Sautarel, auquel vous pourriez vous rallier, ma chère collègue.
C’est pourquoi la commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Madame Préville, l’amendement n° I-448 est-il maintenu ?
Mme Angèle Préville. Oui, je le maintiens, monsieur le président. L’amendement qui a été voté ne fait pas état des mêmes sommes que le nôtre.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-448.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 24 bis (nouveau)
I. – L’article 1604 du code général des impôts est ainsi modifié :
1° À la fin du troisième alinéa du I, les mots : « d’agriculture » sont remplacés par les mots : « départementale d’agriculture ou, le cas échéant, de chaque chambre interdépartementale d’agriculture ou de chaque chambre d’agriculture de région » ;
2° Le II est ainsi modifié :
a) À la première phrase, après le mot : « agriculture », sont insérés les mots : « mentionnées au troisième alinéa du I » et, à la fin, les mots : « I du présent article » sont remplacés par les mots : « même I » ;
b) Après la référence : « I », la fin de la deuxième phrase est ainsi rédigée : « , de sa situation financière et, le cas échéant, de l’harmonisation progressive du taux de la taxe prévue au dernier alinéa du présent II. » ;
c) À l’avant-dernière phrase, après le mot : « départementale », il est inséré le mot : « , interdépartementale » ;
d) Sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :
« Le taux de la taxe est calculé en divisant le produit arrêté par la chambre par le total des bases d’imposition de taxe foncière sur les propriétés non bâties de la circonscription de la chambre.
« Pour les impositions établies au titre des six années suivant celle de sa création, une chambre interdépartementale d’agriculture ou une chambre d’agriculture de région peut arrêter des produits différents pour chaque département de sa circonscription afin de permettre une harmonisation progressive du taux de la taxe dans la circonscription de la chambre. La somme de ces produits ne peut dépasser le montant maximal défini au premier alinéa du présent II. Des taux différents de la taxe sont alors calculés dans chaque département en divisant le produit arrêté par la chambre pour chaque département par le total des bases d’imposition de taxe foncière sur les propriétés non bâties du département. » ;
3° Au premier alinéa du III, après le mot : « départementales », sont insérés les mots : « ou interdépartementales » ;
4° À la première phrase du IV, le mot : « départementales » est supprimé et, après le mot : « agriculture », sont insérés les mots : « mentionnées au troisième alinéa du I ».
II. – Par dérogation au dernier alinéa du II de l’article 1604 du code général des impôts, les chambres interdépartementales d’agriculture et les chambres d’agriculture de région qui ont été créées avant le 1er janvier 2020 peuvent arrêter des produits différents pour chaque département de leur circonscription au titre des années 2020 à 2025, dans les conditions prévues au même dernier alinéa.
III. – Les I et II s’appliquent aux impositions dues au titre de l’année 2020.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L’amendement n° I-74 est présenté par M. Husson, au nom de la commission des finances.
L’amendement n° I-544 est présenté par M. A. Marc.
L’amendement n° I-558 est présenté par M. Bonhomme.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l’amendement n° I-74.
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Le réseau des chambres d’agriculture ne souhaite pas fixer de taux unique à l’échelle des régions pour harmoniser le financement des différentes chambres. Je partage cette position. En effet, cela ne répond pas à l’ambition affichée d’une harmonisation entre les chambres : ce serait un « cache-misère » qui n’instaurerait qu’une apparente égalité entre les chambres sans mettre fin aux inégalités d’assiettes à l’échelle départementale et empêcher que les diversités ne persistent.
Cet amendement a donc pour objet la suppression de l’article.
M. le président. L’amendement n° I-544 n’est pas soutenu.
La parole est à M. François Bonhomme, pour présenter l’amendement n° I-558.
M. François Bonhomme. Cet article modifie les règles qui encadrent la répartition du produit de la taxe additionnelle à la taxe foncière sur les propriétés non bâties (TATFNB). S’il ne revient pas sur le montant global de cette taxe reversée aux chambres d’agriculture, et c’est heureux, il prévoit que les chambres régionales et interdépartementales pourront décider en lieu et place des structures départementales de la répartition du produit de la taxe.
Il n’est pas souhaitable d’ouvrir cette possibilité à des structures régionales, qui se trouvent de plus en plus déconnectées des départements du fait de la fusion des régions.
Cet amendement a donc pour objet de supprimer cet article, dont on mesure mal les conséquences sur la restructuration du réseau.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-74 et I-558.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, l’article 24 bis est supprimé.
Article 24 ter (nouveau)
I. – La taxe sur les spectacles de variétés perçue au profit du Centre national de la musique prévue à l’article 76 de la loi n° 2003-1312 du 30 décembre 2003 de finances rectificative pour 2003 n’est pas due pour la période du 17 mars 2020 au 31 décembre 2020.
II. – Par dérogation à l’avant-dernier alinéa du VI du A du même article 76, la date limite de paiement de la taxe due pour les représentations antérieures au 17 mars 2020 est fixée au 31 décembre 2021.
M. le président. L'amendement n° I-1253, présenté par M. Husson, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 1
Remplacer la date :
31 décembre 2020
par la date :
30 juin 2021
…. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
....– La perte de recettes résultant de l'exonération de la taxe sur les spectacles pour les représentations ayant lieu au premier semestre 2021 pour le Centre national de la musique est compensée à due concurrence par la création et l’affectation d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Il s’agit de prolonger d’un semestre l’exonération de la taxe sur les spectacles, du 31 décembre 2020 au 30 juin 2021. Chacun connaît l’importance de cette mesure.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement et lève le gage, monsieur le président.
M. le président. Il s’agit donc de l’amendement n° I-1253 rectifié.
Je le mets aux voix.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 24 ter, modifié.
(L’article 24 ter est adopté.)
Article 25
I. – Le II de l’article L. 561-3 du code de l’environnement et le 20° du I de l’article 179 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020 sont abrogés.
II. – Le solde, au 31 décembre 2020, du compte de la caisse centrale de réassurance qui retrace les opérations du fonds mentionné au premier alinéa du II de l’article L. 561-3 du code de l’environnement, dans sa rédaction antérieure à la présente loi, est reversé au budget général de l’État avant le 1er avril 2021.
Les opérations enregistrées au 31 décembre 2020 relatives au fonds mentionné au premier alinéa du II de l’article L. 561-3 du code de l’environnement dans sa rédaction antérieure à la présente loi sont reprises sur le budget général de l’État.
III. – Le livre Ier du code général des impôts est ainsi modifié :
1° La section XXI du chapitre III du titre Ier de la première partie est ainsi rétablie :
« Section XXI
« Prélèvement annuel sur le produit des primes ou cotisations additionnelles relatives à la garantie contre le risque de catastrophes naturelles prévues à l’article L. 125-2 du code des assurances
« Art. 235 ter ZE. – I. – Il est institué un prélèvement annuel sur le produit des primes ou cotisations additionnelles prévues à l’article L. 125-2 du code des assurances relatives à la garantie contre le risque de catastrophes naturelles. Ce prélèvement est versé par les entreprises d’assurance.
« II. – Le taux de ce prélèvement est fixé à 12 %. Le prélèvement est recouvré suivant les mêmes règles, sous les mêmes garanties et les mêmes sanctions que la taxe prévue à l’article 991 du présent code. » ;
2° L’article 1635 bis AD est abrogé.
IV. – Le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2021.
M. le président. La parole est à M. Patrice Joly, sur l’article.
M. Patrice Joly. Cette prise de parole vaudra présentation de l’amendement n° I-272.
L’article 25 intègre au budget de l’État le fonds de prévention des risques naturels majeurs, dit fonds Barnier, créé dans la loi de 1995 relative au renforcement de la protection de l’environnement.
Ce fonds couvre les dépenses visant à favoriser le déplacement des propriétaires des biens les plus exposés aux risques naturels majeurs. Il finance des mesures de réduction de la vulnérabilité face aux risques naturels. Enfin, il améliore la connaissance du risque par des études et des campagnes d’information. Il est principalement alimenté par une part des primes pour la couverture du risque de catastrophe naturelle qui figurent dans les contrats d’assurance.
Compte tenu de la multiplication des aléas climatiques, ce fonds revêt une importance stratégique majeure, comme l’atteste son usage au moment de diverses catastrophes naturelles en outre-mer et en métropole.
Au mois de juillet 2019, le rapport de la mission sénatoriale d’information sur la gestion des risques climatiques et l’évolution de nos régimes d’indemnisation, pilotée par Nicole Bonnefoy, indiquait que le fonds Barnier était « la principale source de financement de la politique de prévention des risques naturels, menant une véritable politique incitative pertinente au profit d’une meilleure couverture des risques ».
Il s’agit donc de supprimer cet article, dont on mesure mal l’intérêt au regard des enjeux que je viens de rappeler.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° I-272 est présenté par M. Féraud, Mme Bonnefoy, MM. Kanner et Raynal, Mme Briquet, MM. Cozic et Éblé, Mme Espagnac, MM. Jeansannetas, P. Joly, Lurel et Antiste, Mme Artigalas, M. J. Bigot, Mmes Blatrix Contat et Conconne, MM. Durain, Fichet et Gillé, Mme Harribey, M. Jacquin, Mmes G. Jourda, Le Houerou et Lubin, MM. Marie, Mérillou et Montaugé, Mme Préville, M. Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° I-1060 est présenté par MM. Savoldelli, Bocquet et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
L’amendement n° I-272 a déjà été défendu.
La parole est à M. Éric Bocquet, pour présenter l’amendement n° I-1060.
M. Éric Bocquet. L’intégration du fonds Barnier au budget de l’État fait peser un risque majeur sur les capacités que les collectivités auront à l’avenir pour se prémunir contre les aléas du dérèglement climatique. Or les phénomènes climatiques sont de plus en plus fréquents et extrêmes.
D’autres questions se posent. Que fera-t-on des 600 millions d’euros de trésorerie du fonds s’il est intégré au budget de l’État ? Que deviendront les crédits déjà délégués aux départements pour verser les subventions sur lesquels l’État s’est engagé et qui représentent plusieurs centaines de millions d’euros ? Comment s’opéreront le contrôle et la coordination de l’utilisation du fonds qui sera transférée au préfet ? Quelle égalité entre les territoires dans l’attribution des subventions ?
Les phénomènes extrêmes sont de plus en plus fréquents et prennent un tour nouveau, non seulement dans ma région, mais aussi dans d’autres territoires. Des périodes de forte sécheresse assèchent les sous-sols, finissent par déstabiliser les fondations des immeubles, ce qui provoque des fissurations. Un certain nombre de communes dans le Nord, dans le Pas-de-Calais et, plus globalement, sur l’ensemble du territoire sont déjà confrontées à cette réalité.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. L’intégration du fonds Barnier au budget de l’État correspond à ce qu’a demandé le Sénat lors de l’adoption de la proposition de loi visant à réformer le régime des catastrophes naturelles, au mois de janvier dernier.
Il s’agissait de supprimer le plafond qui semblait insuffisant et limitait les moyens du fonds. De mémoire, le vote de cette mesure, qui apportait une meilleure réponse, a été unanime. J’avais moi-même défendu l’idée d’une augmentation du plafond de 180 millions d’euros à 205 millions d’euros, puisque l’on ne dépensait jamais plus, mais m’étais rendu à l’avis général en faveur d’un déplafonnement et d’une intégration au budget de l’État.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur ces amendements identiques.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Christine Lavarde, pour explication de vote.
Mme Christine Lavarde. J’anticipe la discussion que nous aurons vendredi prochain, lors de l’examen de la mission « Écologie, développement et mobilités durables ».
M. Bocquet laisse entendre que le fonds Barnier disposerait d’une trésorerie de plusieurs centaines de millions d’euros. Or les prélèvements opérés depuis plusieurs années ont affaibli le fonds de roulement au point qu’il ne reste pas assez de ressources pour une seule année.
La budgétisation du fonds Barnier permet d’en augmenter les moyens : l’action n° 14 du programme 181, dotée d’un peu plus de 200 millions d’euros, atteint presque le niveau des sommes qui sont prélevées sur les polices d’assurance.
D’une part, les moyens d’action du fonds, dédiés à la prévention des risques, augmentent. D’autre part, le bleu budgétaire permet désormais de tracer le fonds, aussi bien en recettes qu’en dépenses, alors que nous ne disposions jusqu’à présent que d’un droit de regard sur les recettes.
En tant que rapporteur spécial de la commission des finances, j’ai émis un avis favorable sur cet article, avis que la commission a suivi. Je voterai donc contre ces amendements de suppression.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-272 et I-1060.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 25.
(L’article 25 est adopté.)
Article additionnel après l’article 25
M. le président. L’amendement n° I-273, présenté par Mme Bonnefoy, MM. Féraud, Kanner et Raynal, Mme Briquet, MM. Cozic et Éblé, Mme Espagnac, MM. Jeansannetas, P. Joly, Lurel et Antiste, Mme Artigalas, M. J. Bigot, Mmes Blatrix Contat et Conconne, MM. Durain, Fichet et Gillé, Mme Harribey, M. Jacquin, Mmes G. Jourda, Le Houerou et Lubin, MM. Marie, Mérillou et Montaugé, Mme Préville, M. Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 25
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le 34° du II de la section V du chapitre premier du titre premier de la première partie du livre premier du code général des impôts est complété par un article 200 … ainsi rédigé :
« Art. 200 …. – Les contribuables domiciliés en France au sens de l’article 4 B peuvent bénéficier d’un crédit d’impôt sur le revenu au titre des dépenses effectivement supportées pour la réduction de la vulnérabilité des biens à usage d’habitation ou des biens utilisés dans le cadre d’activités professionnelles employant moins de vingt salariés dont ils sont propriétaires.
« Le crédit d’impôt s’applique aux études et travaux de réduction de la vulnérabilité de ces biens aux risques naturels majeurs.
« Le taux de ce crédit d’impôt est égal à 50 % des dépenses mentionnées au présent article.
« Les conditions d’éligibilité de ce crédit d’impôt sont précisées par décret.
« Pour un même logement dont un contribuable est propriétaire et qu’il affecte à son habitation principale, le montant de crédit d’impôt dont peut bénéficier ce contribuable ne peut excéder, au titre d’une période de cinq années consécutives comprises entre le 1er janvier 2020 et le 31 décembre 2024, la somme de 5 000 € pour une personne célibataire, veuve ou divorcée et de 10 000 € pour un couple soumis à imposition commune. Cette somme est majorée de 250 € par personne à charge au sens des articles 196 à 196 B. La somme de 250 € est divisée par deux lorsqu’il s’agit d’un enfant réputé à charge égale de l’un et l’autre de ses parents. »
II. – Le I ne s’applique qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.
III. – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Patrice Joly.
M. Patrice Joly. Cet amendement, issu de la proposition de loi visant à réformer le régime des catastrophes naturelles adoptée à l’unanimité par le Sénat, le 15 janvier 2020, vise à renforcer la prévention des dommages, en diminuant le reste à charge des particuliers.
Il s’agit de créer, sur le modèle du crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE), un crédit d’impôt pour la prévention des aléas climatiques (Cipac). Cela permettrait aux particuliers de déduire de leur impôt sur le revenu les dépenses engagées pour réaliser des travaux éligibles à ce financement, dans le but d’améliorer la résilience du bâti aux effets des catastrophes naturelles.
Ce dispositif améliore l’article 25 qui rend opaques les critères d’accès aux crédits dédiés à la prévention et à la reconstruction après les catastrophes climatiques.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Le niveau de crédit d’impôt que vous proposez est hors de proportion dans les circonstances actuelles.
La commission demande donc le retrait de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Joly, l’amendement n° I-273 est-il maintenu ?
M. Patrice Joly. Oui, je le maintiens, monsieur le président.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-273.
(L’amendement n’est pas adopté.)
C. – Dispositions relatives aux budgets annexes et aux comptes spéciaux
Article 26
Sous réserve des dispositions de la présente loi, les affectations résultant de budgets annexes créés et de comptes spéciaux ouverts antérieurement à la date d’entrée en vigueur de la présente loi sont confirmées pour l’année 2021. – (Adopté.)
Articles additionnels après l’article 26
M. le président. Je suis saisi de six amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° I-1239 rectifié ter, présenté par M. P. Dominati, Mme Bonfanti-Dossat, M. Cambon, Mmes Delmont-Koropoulis et Goy-Chavent, M. Gremillet, Mme Joseph et MM. Laménie, D. Laurent, Panunzi, Saury et Vogel, est ainsi libellé :
Après l’article 26
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Les articles 1605, 1605 bis et 1605 ter du code général des impôts sont abrogés.
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Dominati.
M. Philippe Dominati. Cet amendement a pour objet de supprimer la taxe audiovisuelle. J’y vois quatre raisons.
La première raison est de cohérence avec la suppression de la taxe d’habitation, taxe ancestrale à laquelle il est bon d’avoir mis fin.
La deuxième raison tient à ce que la réforme de l’audiovisuel n’est jamais intervenue, malgré diverses promesses. La taxe subsiste donc dans l’attente de cette réforme.
La troisième raison, c’est qu’il y a désormais plus de chaînes de télévision à disposition des utilisateurs que de boucheries ou de boulangeries artisanales de quartier ! Par conséquent, rien ne justifie une taxe pour financer une part de l’audiovisuel public.
La quatrième raison, c’est que la suppression de cette taxe profiterait à l’ensemble des citoyens français, après que tous les efforts du plan de relance ont été ciblés en fonction de la situation de tel ou tel secteur d’activité.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° I-630 rectifié ter est présenté par MM. Babary, D. Laurent, Perrin, Rietmann et Cambon, Mme Deromedi, M. Bonnus, Mmes Chauvin et Gruny, MM. Savin et Bouloux, Mme Noël, MM. Genet et Brisson, Mmes Puissat et Berthet, MM. Paccaud et E. Blanc, Mme Thomas, MM. Bouchet et Chatillon, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Lefèvre, Sido, Sautarel, Laménie et Cuypers, Mmes F. Gerbaud, M. Mercier et Ventalon, MM. Darnaud, Le Gleut et Savary, Mme Micouleau, MM. Charon et Mouiller, Mmes Lassarade, Di Folco, Demas et Imbert, MM. Vogel, B. Fournier et Chaize, Mmes Raimond-Pavero et Dumas, MM. Bonhomme, Bonne et Le Rudulier, Mmes Canayer, Jacques et Garriaud-Maylam, MM. Gremillet, Somon et Grosperrin et Mmes Renaud-Garabedian, Joseph et de Cidrac.
L’amendement n° I-1082 rectifié bis est présenté par M. P. Joly.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 26
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Les cafés, bars, débits de boisson, hôtels, restaurants et établissements de nuit sont exonérés de moitié de la redevance audiovisuelle pour l’année 2021.
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Serge Babary pour présenter l’amendement n° I-630 rectifié ter.
M. Serge Babary. Les cafés, hôtels, restaurants, discothèques (CHRD) et les entreprises du tourisme sont dans une situation économique d’une gravité extrême, compte tenu de l’obligation de fermeture administrative et de l’interruption brutale des flux touristiques. Cette situation s’est encore accentuée avec le deuxième confinement.
Si l’exonération de la redevance audiovisuelle était difficile à mettre en œuvre dans le quatrième projet de loi de finances rectificative, car le recouvrement de la taxe avait déjà eu lieu, il n’en va pas de même dans le projet de loi de finances.
Il s’agit donc de prévoir que tous les établissements CHRD puissent bénéficier à titre exceptionnel d’une réduction de 50 % du montant de leur contribution à l’audiovisuel public.
M. le président. La parole est à M. Patrice Joly, pour présenter l’amendement n° I-1082 rectifié bis.
M. Patrice Joly. Pour donner la mesure des enjeux financiers, je précise que le montant de la contribution à l’audiovisuel public s’élève aujourd’hui à environ 3 500 euros pour un hôtel de trente chambres et à 1 876 euros pour un débit de boissons équipé de quatre postes de télévision.
Compte tenu de la durée des fermetures liées aux deux confinements successifs, il paraît nécessaire de procéder à un abattement. C’est pourquoi nous proposons de réduire cette redevance de moitié.
M. le président. L’amendement n° I-631 rectifié ter, présenté par MM. Babary, D. Laurent, Perrin, Rietmann, Cambon et Bouloux, Mme Deromedi, M. Bonnus, Mmes Chauvin et Gruny, M. Savin, Mme Noël, MM. Genet et Brisson, Mmes Puissat et Berthet, MM. Paccaud et E. Blanc, Mme Thomas, MM. Bouchet et Chatillon, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Lefèvre, Sido, Sautarel, Laménie et Cuypers, Mmes F. Gerbaud, M. Mercier et Ventalon, MM. Darnaud, Le Gleut et Savary, Mme Micouleau, MM. Charon et Mouiller, Mmes Lassarade, Di Folco, Demas et Imbert, MM. Vogel, B. Fournier et Chaize, Mmes Raimond-Pavero et Dumas, MM. Bonhomme, Bonne et Le Rudulier, Mmes Canayer, Jacques et Garriaud-Maylam, MM. Gremillet, Somon et Grosperrin et Mmes Renaud-Garabedian, Joseph et de Cidrac, est ainsi libellé :
Après l’article 26
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Les cafés, bars, débits de boisson, hôtels, restaurants et établissements de nuit sont exonérés du quart de la redevance audiovisuelle pour l’année 2021.
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Serge Babary.
M. le président. L’amendement n° I-631 rectifié ter est retiré.
L’amendement n° I-1165 rectifié ter, présenté par Mme Sollogoub, M. Levi, Mme Vermeillet, MM. Daubresse, Prince, S. Demilly et Bonnecarrère, Mme Jacquemet, MM. Bouchet, P. Martin, Henno, Chasseing, Paccaud, Vogel, Guerriau et Houpert, Mme Guidez, M. Chauvet, Mme Vérien, MM. Détraigne, Laugier et Fialaire, Mme N. Delattre, MM. Ravier, Guérini, Bonhomme, Bonne, Chatillon et Decool, Mmes Férat et Jacques, MM. A. Marc et Canevet, Mmes Billon et Saint-Pé, MM. Le Nay et L. Hervé, Mme de La Provôté, MM. Reichardt et Gremillet, Mme Gatel, MM. Somon et Meurant, Mmes de Cidrac, Renaud-Garabedian et Dindar et MM. Cazabonne et Wattebled, est ainsi libellé :
Après l’article 26
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après le 2° de l’article 1605 bis du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° Bénéficient d’un dégrèvement de la contribution à l’audiovisuel public pour la durée de fermeture administrative résultant des arrêtés du 14 et 16 mars 2020 puis du décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l’épidémie de covid-19 dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire, les professionnels de la restauration, c’est-à-dire des cafés et restaurants ; ».
II. – Le I s’applique à compter du 16 mars 2020.
III. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Nadia Sollogoub.
Mme Nadia Sollogoub. J’ai présenté cette mesure lors de l’examen des trois premiers PLFR. Elle a fini par être adoptée dans le PLFR 3, ce qui a fait naître de grands espoirs chez les professionnels de l’hôtellerie et de la restauration, mais elle n’a pas survécu à la commission mixte paritaire.
C’est pourquoi je présente deux amendements qui visent à supprimer la taxe audiovisuelle respectivement pour les établissements qui ont fait l’objet d’une fermeture administrative et pour ceux qui n’ont pas reçu de clients, puisque, dans un cas comme dans l’autre, les téléviseurs n’ont pas fonctionné.
M. le président. L’amendement n° I-1166 rectifié ter, présenté par Mme Sollogoub, M. Levi, Mme Vermeillet, MM. Daubresse, Prince, S. Demilly et Bonnecarrère, Mme Jacquemet, MM. Bouchet, P. Martin, Henno, Chasseing, Paccaud, Vogel, Guerriau et Houpert, Mme Guidez, M. Chauvet, Mme Vérien, MM. Détraigne, Laugier et Fialaire, Mme N. Delattre, MM. Guérini, Ravier, Duffourg, Bonhomme, Bonne, Chatillon et Decool, Mmes Férat et Jacques, MM. A. Marc et Canevet, Mmes Billon et Saint-Pé, MM. Le Nay et L. Hervé, Mme de La Provôté, MM. Reichardt et Gremillet, Mme Gatel, MM. Delcros, Somon et Meurant, Mmes de Cidrac, Renaud-Garabedian et Dindar et MM. Cazabonne et Wattebled, est ainsi libellé :
Après l’article 26
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I – Après le 2° de l’article 1605 bis du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° Bénéficient d’un dégrèvement de la contribution à l’audiovisuel public pour la durée de fermeture consécutive aux arrêtés des 14 et 16 mars 2020 puis au décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l’épidémie de covid-19 dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire, les professionnels de l’hôtellerie qui justifient n’avoir eu aucune activité pendant ladite période ; ».
II – Le I s’applique à compter du 16 mars 2020.
III – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Nadia Sollogoub.
Mme Nadia Sollogoub. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. La commission demande le retrait de l’amendement n° I-1239 rectifié ter. M. Dominati a exposé ses raisons, mais la suppression de la taxe audiovisuelle aggraverait le déficit de l’État, car il faudrait compenser cette perte de recettes pour l’audiovisuel public.
Il paraît difficile d’exonérer d’emblée de la contribution les hôtels et restaurants, car on ignore la durée de l’arrêt de l’activité. Mieux vaut aménager le fonds de solidarité et développer des approches forfaitaires pour prendre en compte ce problème.
C’est la raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable sur les amendements identiques nos I-630 rectifié ter et I-1082 rectifié bis, ainsi que sur les amendements nos I-1165 rectifié ter et I-1166 rectifié ter.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Dominati, l’amendement n° I-1239 rectifié ter est-il maintenu ?
M. Philippe Dominati. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° I-1239 rectifié ter est retiré.
Je mets aux voix les amendements identiques nos I-630 rectifié ter et I-1082 rectifié bis.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-1165 rectifié ter.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-1166 rectifié ter.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 27
I. – Le VI de l’article 46 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006 est ainsi modifié :
1° À la fin de la seconde phrase du premier alinéa du 2° du 1, les mots : « 542,1 millions d’euros en 2020 » sont remplacés par les mots : « 487,9 millions d’euros en 2021 » ;
2° Au 3, les mots : « 2020 sont inférieurs à 3 246,9 millions d’euros » sont remplacés par les mots : « 2021 sont inférieurs à 3 231,1 millions d’euros ».
II. – Par dérogation au second alinéa du III de l’article 1605 du code général des impôts, en 2021, le montant de la contribution à l’audiovisuel public n’est pas indexé sur l’indice des prix à la consommation hors tabac.
M. le président. La parole est à M. David Assouline, sur l’article.
M. David Assouline. Nous arrivons à la fin de cette longue discussion sur la première partie du budget consacrée aux recettes et c’est pourtant la seule occasion que j’ai trouvée pour défendre une conviction que nous partageons tous depuis longtemps au sein de la commission de la culture, à savoir l’importance de la contribution à l’audiovisuel public.
Je veux soutenir l’exact opposé de ce que vous venez d’exposer, monsieur Dominati. Il est vrai qu’une réforme est nécessaire, mais elle doit aller dans le sens inverse de celui que vous avez évoqué. Il faut faire en sorte qu’elle soit adaptée aux usages. Aujourd’hui, ce n’est plus seulement en regardant son téléviseur que l’on bénéficie du service public de l’audiovisuel, c’est aussi en regardant sa tablette, par exemple.
C’est d’ailleurs la raison pour laquelle tous les pays voisins comparables au nôtre, comme la Grande-Bretagne ou l’Allemagne, ont engagé une réforme tendant à rendre cette contribution à l’audiovisuel public universelle. Je veux informer notre assemblée qu’en Suisse…
M. Pierre Cuypers. Ce n’est pas le même pays !
M. David Assouline. … le montant de la redevance s’élève à 380 euros, soit 242 euros de plus qu’en France ; au Danemark, il atteint 326 euros, soit 188 euros de plus ; en Suède, il est de 238 euros, c’est-à-dire plus de 100 euros de plus ; en Allemagne, il est 216 euros, soit 70 euros de plus ; en Grande-Bretagne, il est de 176 euros, soit 38 euros de plus.
Évidemment, on nous objectera comme chaque fois que cela arrange, la qualité de la BBC ou de la télévision allemande. Reconnaissons tout de même que le montant de notre redevance est nettement en deçà des contributions universelles mises en place dans ces pays.
Pour anticiper sur les deux amendements que je vais présenter, je précise que, si l’on ne veut pas augmenter cette contribution, il faut au moins faire en sorte de n’en pas diminuer le montant. L’année dernière, pour la première fois dans l’histoire, la redevance a baissé …
M. Pierre Cuypers. Très bonne chose !
M. David Assouline. … d’un euro, soit de deux euros en réalité, puisqu’elle devrait augmenter chaque année d’un euro pour suivre l’évolution du coût de la vie.
Cette année, on parle d’une stabilité de la contribution à l’audiovisuel public, mais on ne tient pas compte de l’évolution des prix : dans les faits, la contribution baissera d’un euro. Il faut savoir que chaque euro de baisse, bien que cela ne représente que quelques centimes d’euros par mois pour chaque foyer, équivaut à 30 millions d’euros de recettes en moins.
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue !
M. Pierre Cuypers. Oui, s’il vous plaît !
M. David Assouline. Je conclurai un peu plus tard : il ne me faudra que quelques secondes, car cette prise de parole me permettra d’aller très vite dans la présentation de mes amendements.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° I-946 est présenté par Mme Taillé-Polian, MM. Parigi et Benarroche, Mme Benbassa, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme Poncet Monge et M. Salmon.
L’amendement n° I-1041 est présenté par MM. Savoldelli, Bocquet et Bacchi, Mme Brulin, M. Ouzoulias et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour présenter l’amendement n° I-946.
Mme Sophie Taillé-Polian. L’article 27 prévoit une nouvelle baisse des recettes du service public de l’audiovisuel d’environ 70 millions d’euros.
Le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires s’oppose à la fragilisation continue du service public de l’audiovisuel, qui s’est traduite par la suppression de plus de 2 000 postes à France Télévisions depuis 2012, la disparition de France Ô, qui constitue une véritable perte culturelle et qui va, par ailleurs, à rebours des engagements du Président de la République.
Mes chers collègues, nous sommes à un moment où nous devons sérieusement nous interroger sur l’évolution de notre paysage audiovisuel, qui est, d’ailleurs, soumis à des offensives éditoriales assez graves. Certaines chaînes ont en effet une ligne éditoriale d’extrême droite et invitent à longueur de temps sur les plateaux des animateurs, qui se prétendent journalistes, mais qui sont davantage des polémistes, voire parfois des multirécidivistes de l’incitation à la haine raciale.
Face à cette tendance, je crois qu’un audiovisuel public fort, qui fonde la mise en œuvre de ses programmes sur la raison, la science et la diversité des points de vue, dans le respect des règles de la République, serait souhaitable.
M. le président. La parole est à M. Éric Bocquet, pour présenter l’amendement n° I-1041.
M. Éric Bocquet. Il est défendu, monsieur le président !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-946 et I-1041.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° I-477 rectifié, présenté par M. Assouline, Mme S. Robert, M. Antiste, Mme Lepage, MM. Lozach et Magner, Mme Monier, M. Stanzione et Mme Van Heghe, est ainsi libellé :
I. – Au début
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Au premier alinéa du III de l’article 1605 du code général des impôts, le montant : « 138 € » est remplacé par le montant : « 140 € » et le montant : « 88 € » est remplacé par le montant : « 90 € ».
II. – Alinéa 3
Remplacer le montant :
3 231,1 millions d’euros
par le montant :
3 291,1 millions d’euros
III. – Alinéa 4
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Cet amendement vise à revenir sur la baisse historique d’un euro votée l’année dernière. Tous gouvernements confondus, personne ne l’avait fait ! Même lorsque Nicolas Sarkozy était Président de la République et qu’il a supprimé la publicité sur les chaînes publiques, le montant de la redevance a augmenté d’un euro chaque année.
Il s’agit de rétablir le montant de la contribution à l’audiovisuel public au niveau qu’il aurait dû atteindre s’il n’y avait pas eu de baisse l’année dernière, soit deux euros supplémentaires, qui correspondent à l’euro retiré l’année dernière et à l’euro compensant l’augmentation du coût de la vie. Nous souhaitons en fait, non pas augmenter la redevance, mais revenir à une forme de stabilité.
En effet, si nous adoptions cet amendement, nous pourrions presque totalement compenser la baisse de la dotation à l’audiovisuel public prévue dans ce budget, soit à peu près 69 millions d’euros, puisque cette mesure rapporterait 60 millions d’euros. Cette diminution des ressources de l’audiovisuel public est absolument inadmissible au moment où, au contraire, on a besoin de ce service public de l’audiovisuel.
Ainsi, tout le monde a pu voir durant le confinement le rôle joué par France 4, chaîne que l’on projette d’ailleurs de supprimer, parce que, dit-on, il n’y a plus assez d’argent. On sait pourtant à quel point le service public est important : regardez le succès de France Inter le matin, les stations de Radio France comme France Culture ou France Musique, qui, par leur qualité, élèvent le niveau.
Nous en avons particulièrement besoin en cette époque de fake news où l’on trouve tout et n’importe quoi sur les réseaux sociaux. L’audiovisuel public fournit de l’information vérifiée, des sources, de la culture. Tout cela est nécessaire.
C’est la puissance publique qui peut y contribuer en aidant le service public de l’audiovisuel, et non en baissant son budget chaque année, alors que nous traversons déjà une crise qui fait que les revenus publicitaires, qui comptent beaucoup dans la journée pour France Télévisions, ont diminué de près de 40 millions d’euros cette année.
M. le président. L’amendement n° I-348 rectifié, présenté par MM. Assouline et Féraud, Mme S. Robert, MM. Kanner et Antiste, Mme Briquet, MM. Cozic et Éblé, Mme Espagnac, MM. Jeansannetas et P. Joly, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel et Magner, Mme Monier, M. Stanzione, Mmes Van Heghe et Artigalas, M. J. Bigot, Mmes Blatrix Contat, Bonnefoy et Conconne, MM. Durain, Fichet et Gillé, Mme Harribey, M. Jacquin, Mmes G. Jourda, Le Houerou et Lubin, MM. Marie, Montaugé et Mérillou, Mme Préville, MM. Redon-Sarrazy, Sueur, Temal, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
I. – Au début
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Au premier alinéa du III de l’article 1605 du code général des impôts, le montant : « 138 € » est remplacé par le montant : « 139 € » et le montant : « 88 € » est remplacé par le montant : « 89 € ».
II. – Alinéa 3
Remplacer le montant :
3 231,1
par le montant :
3 261,1
III. – Alinéa 4
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Il s’agit d’un amendement de repli, qui tend à augmenter le montant de la redevance d’un euro, afin de maintenir une forme de stabilité cette année, en prenant en compte l’augmentation du coût de la vie.
Je le répète, cette position est largement partagée au sein de la commission de la culture, quelle que soit l’appartenance politique des uns et des autres, notamment au sein de la majorité sénatoriale : nous souhaitons valoriser, revaloriser et défendre la contribution à l’audiovisuel public pour permettre à celui-ci de fonctionner correctement.
M. Éric Bocquet. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. David Assouline. Pas beaucoup d’arguments !
M. le président. Je mets aux voix l’article 27.
(L’article 27 est adopté.)
Article 28
I. – Le compte d’affectation spéciale « Services nationaux de transports conventionnés de voyageurs » est clos le 1er janvier 2021. À cette date, le solde des opérations antérieurement enregistrées sur ce compte est versé au budget général de l’État.
II. – Les III et IV de l’article 65 de la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011 sont abrogés.
III. – Les trois derniers alinéas de l’article 302 bis ZB du code général des impôts sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :
« Le produit de la taxe est affecté à l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, dans la limite du plafond prévu au I de l’article 46 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012. »
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, sur l’article.
M. Marc Laménie. Cet article supprime le compte d’affectation « Services nationaux de transports conventionnés de voyageurs », dont les crédits sont pourtant élevés, puisqu’ils s’élèvent de mémoire à 323 millions d’euros.
Ce compte d’affectation spéciale existe depuis de nombreuses années pour soutenir, par exemple, les trains d’équilibre du territoire ou les Intercités. Certes, ces lignes sont déficitaires, mais le compte d’affectation spéciale symbolise notre attachement à un aménagement du territoire lié au ferroviaire.
Je reste très réservé sur cet article, car il faut soutenir les petites lignes ferroviaires. Je soutiendrai donc l’amendement n° I-929, qui tend à le supprimer.
M. le président. L’amendement n° I-929, présenté par Mme Taillé-Polian, MM. Parigi, Fernique et Benarroche, Mme Benbassa, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Gontard et Labbé, Mme Poncet Monge et M. Salmon, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian.
Mme Sophie Taillé-Polian. Cet amendement vise à supprimer l’article 28, car la suppression de ce compte d’affectation spéciale fragilisera notre capacité à maintenir de petites lignes régionales, les trains de nuit, et ce au profit de la libre concurrence et des lignes internationales. Cette mesure est dangereuse et va véritablement à l’encontre de ce qu’il faudrait faire aujourd’hui.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. La commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
Je précise que la suppression du compte d’affectation spéciale n’entraîne pas a priori la réduction des moyens alloués.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Je confirme les propos du rapporteur général.
Avis défavorable.
M. le président. Madame Taillé-Polian, l’amendement n° I-929 est-il maintenu ?
Mme Sophie Taillé-Polian. Oui, je le maintiens, monsieur le président.
M. le président. Je mets aux voix l’article 28.
(L’article 28 est adopté.)
Article additionnel après l’article 28
M. le président. L’amendement n° I-1209, présenté par MM. Rambaud, Bargeton, Buis et Dennemont, Mmes Duranton et Evrard, MM. Gattolin et Hassani, Mme Havet, MM. Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lévrier, Marchand, Mohamed Soilihi, Patient et Patriat, Mme Phinera-Horth, MM. Richard et Rohfritsch, Mme Schillinger, MM. Théophile, Yung et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :
Après l’article 28
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 6-2 de la loi n° 89-1007 du 31 décembre 1989 relative au corps des ingénieurs du contrôle de la navigation aérienne est ainsi modifié :
1° Les mots : « , dont le taux est de 24,6 %, et affecté au budget de l’aviation civile » sont supprimés ;
2° Sont ajoutées deux phrases ainsi rédigées : « Son taux est de 24,6 %. Il est recouvré par l’agent comptable du budget annexe “Contrôle et exploitation aériens” et reversé au fonds mentionné à l’article 1er du décret n° 98-1096 du 4 décembre 1998 portant création du fonds de gestion de l’allocation temporaire complémentaire ».
La parole est à M. Didier Rambaud.
M. Didier Rambaud. Il est défendu, monsieur le président !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. La commission demande l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Quel est donc l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Avis favorable.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 28.
D. – Autres dispositions
Article 29
I. – A. – Le solde des contributions dues en application des articles L. 121-10, L. 121-37 et L. 121-43 du code de l’énergie, dans leur rédaction antérieure à la loi n° 2015-1786 du 29 décembre 2015 de finances rectificative pour 2015, et recouvrées jusqu’au 31 décembre 2020 est reversé au budget général de l’État avant le 1er avril 2021.
B. – Les opérations enregistrées au 31 décembre 2020 par la Caisse des dépôts et consignations au titre de la contribution au service public de l’électricité, en application des articles L. 121-6 à L. 121-28 et L. 121-35 à L. 121-44 du code de l’énergie, dans leur rédaction antérieure à la loi n° 2015-1786 du 29 décembre 2015 précitée, sont reprises par l’État à compter du 1er janvier 2021.
II. – Le code de l’énergie est ainsi modifié :
1° L’article L. 121-7 est complété par un 6° ainsi rédigé :
« 6° Les coûts supportés par l’organisme mentionné à l’article L. 314-14 résultant des frais de gestion et d’inscription au registre national des garanties d’origine pour la mise aux enchères prévue à l’article L. 314-14-1. » ;
2° Le second alinéa de l’article L. 121-16 est ainsi modifié :
a) À la première phrase, après le mot : « consignations », sont insérés les mots : « assure, pour le compte de l’État, le versement de ces acomptes et » et, à la fin, les mots : « dans des comptes spécifiques » sont remplacés par les mots : « en compte spécifique » ;
b) La seconde phrase est complétée par les mots : « et sont intégralement compensés par l’État ». – (Adopté.)
Article 30
I. – Le 9 de l’article L. 131-8 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, le taux : « 27,74 % » est remplacé par le taux : « 27,89 % » ;
2° À la fin du a, les mots : « 22,56 points » sont remplacés par les mots : « 22,71 points ».
II. – Une fraction du produit de la taxe sur la valeur ajoutée revenant à l’État, d’un montant de 389 millions d’euros net des frais d’assiette et de recouvrement, est affectée en 2021 à l’organisme mentionné au premier alinéa de l’article L. 723-11 du code rural et de la pêche maritime pour le financement des sommes qui lui sont dues par l’État à raison du dispositif d’exonération mentionné à l’article L. 741-16 du même code.
Un arrêté conjoint des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget fixe l’échéancier de versement de la fraction mentionnée au premier alinéa du présent II.
III. – Le I entre en vigueur le 1er février 2021.
M. le président. L’amendement n° I-1255, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 5
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
II bis. – La fraction du produit de la taxe sur la valeur ajoutée revenant en janvier 2021 à la branche mentionnée au 1° de l’article L. 200-2 du code de la sécurité sociale est majorée d’un montant de 10 millions d’euros.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Il s’agit d’allouer 10 millions d’euros à la Caisse nationale d’assurance maladie, afin de compenser les 10 millions d’euros que nous lui avons demandé de verser à l’Établissement français du sang.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. La commission s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée, car elle n’a pas eu le temps de se réunir pour examiner l’amendement.
M. le président. Je mets aux voix l’article 30, modifié.
(L’article 30 est adopté.)
Article 31 (précédemment examiné)
Le montant du prélèvement effectué sur les recettes de l’État au titre de la participation de la France au budget de l’Union européenne est évalué pour l’exercice 2021 à 26 864 000 000 €.
M. Claude Raynal, président de la commission des finances. Nous en avons fini avec l’examen des amendements de la première partie du projet de loi de finances.
Mes chers collègues, la commission des finances se réunira à quatorze heures trente pour examiner l’amendement du Gouvernement sur l’article d’équilibre, sous réserve de son dépôt.
L’examen du projet de loi de finances se poursuivra en séance publique à l’issue de la discussion de la proposition de résolution sur la République du Haut-Karabagh.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Monsieur le président, le Gouvernement déposera son amendement sur l’article d’équilibre suffisamment tôt pour que la commission des finances puisse l’examiner à quatorze heures trente et, ainsi, rendre son avis avant la reprise de la séance.
Je précise que je solliciterai une seconde délibération sur l’article liminaire afin d’intégrer les prévisions de solde pour 2021, qui tiennent compte de l’avis rendu par le Haut Conseil des finances publiques. Cet amendement sera déposé dans les mêmes délais.
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à treize heures dix, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Gérard Larcher.)
PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher
M. le président. La séance est reprise.
3
Questions d’actualité au Gouvernement
M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.
Monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, je vous rappelle que la séance est retransmise en direct sur Public Sénat et sur notre site internet.
Au nom du bureau du Sénat, j’appelle chacun de vous à observer au cours de nos échanges l’une des valeurs essentielles du Sénat : le respect, celui des uns et des autres, mais aussi celui du temps de parole.
intervention du président de la république du 24 novembre 2020 et nouvelles annonces
M. le président. La parole est à M. Emmanuel Capus, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
M. Emmanuel Capus. Le Président de la République a annoncé hier un plan d’assouplissement progressif du confinement, qui a le mérite de donner de la visibilité aux Français.
Je salue ici la réouverture, dès ce week-end, de tous les commerces : c’était une décision extrêmement attendue sur ces travées. Je salue aussi l’annonce de la levée du confinement, si la situation le permet, et de la réouverture des cinémas, des théâtres et des musées, de tout ce qui fait la vie et nous permet l’accès essentiel à la culture.
En revanche, le report au 20 janvier prochain de la réouverture des bars et des restaurants est une nouvelle difficile, et il conviendra d’accompagner ces secteurs sinistrés et de les indemniser à la hauteur exacte de leur préjudice.
J’ai aussi une pensée pour les étudiants et les jeunes, qui ne pourront pas retrouver leur établissement avant le mois de février prochain. Pour eux, le moins que l’on puisse dire, c’est que la lumière au bout du tunnel est encore faible.
Ces annonces indispensables posent aussi un certain nombre de questions, qui appellent des précisions si l’on veut être sûr qu’elles seront acceptées par les Français.
À combien les Français pourront-ils se réunir à Noël et au réveillon pour profiter de leurs familles et de leurs proches, sans risquer de former de nouveaux clusters ?
Quand le couvre-feu annoncé pour le 15 décembre prochain finira-t-il ? Doit-on comprendre, monsieur le secrétaire d’État, qu’il prendra fin le 20 janvier, date à laquelle les bars et les restaurants rouvriront ? Dans le cas contraire, en effet, le préjudice pour les restaurants va encore augmenter.
Enfin, pour les cultes, la jauge des trente personnes est difficilement compréhensible dans des cathédrales ou des églises souvent très vastes, voire parfois immenses. Cette jauge ne devrait-elle pas disparaître au plus tard le 15 décembre et, en tout cas, avant Noël, au moment où les cinémas et les théâtres seront ouverts sans autre limite que l’application du protocole sanitaire ? Il y va de l’acceptabilité de ces mesures. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP. – M. Loïc Hervé applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État, porte-parole du Gouvernement.
M. Gabriel Attal, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le sénateur Capus, le Président de la République s’est exprimé hier soir : il avait donné rendez-vous aux Français autour du 1er décembre, après avoir annoncé un confinement pour le mois de novembre.
Nous sommes à un tournant de l’épidémie : le nombre de contaminations constatées chaque jour diminue, tout comme le nombre d’admissions en réanimation à l’hôpital. Par conséquent, les efforts qui ont été consentis par les Français depuis maintenant plusieurs semaines paient, ce dont nous devons collectivement nous réjouir.
Pour autant, il ne faut pas baisser la garde. C’est la raison pour laquelle le Président de la République a annoncé la prolongation du confinement jusqu’au 15 décembre et le maintien de règles restrictives : nous ne pouvons pas courir le risque que l’épidémie reparte et nous devons éviter une nouvelle flambée, comme c’est le cas partout en Europe depuis plusieurs semaines.
Le Président de la République a révélé un calendrier avec des étapes claires. Nous vous rejoignons sur le fait que les Français avaient besoin de cette visibilité : elle est au rendez-vous.
Ce calendrier comporte trois étapes, qui visent chacune des objectifs sanitaires, selon des indicateurs extrêmement clairs et partagés. Il sera nécessaire d’atteindre durablement ces objectifs pour que ces étapes soient franchies les unes après les autres.
Vous avez posé trois questions précises auxquelles je vais essayer de répondre le mieux possible.
Vous m’avez demandé si le confinement allait se poursuivre ou non au-delà du 15 décembre. À ce sujet, les choses sont claires : si la situation sanitaire continue à s’améliorer et si, au 15 décembre, nous avons atteint les cibles fixées, c’est-à-dire un nombre quotidien de contaminations inférieur à 5 000 et un nombre limité d’admissions en réanimation notamment, alors le confinement sera levé. Les contraintes ne disparaîtront pour autant, puisqu’un couvre-feu prendra le relais.
Vous m’avez ensuite demandé dans quelles conditions les Français pourront fêter Noël. Le Président de la République l’a lui-même dit : ce ne sera pas un Noël comme les autres, mais nous donnons la possibilité aux Français de fêter Noël, parce que c’est une fête importante pour les familles. Le Premier ministre aura l’occasion de s’exprimer demain, lors d’une conférence de presse, pour donner davantage de précisions sur ce point, tout comme sur le sujet des cultes, objet de votre troisième question. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
politique du gouvernement en matière d’immigration
M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Philippe Dallier. Ma question s’adressait à M. le ministre de l’intérieur, mais il n’est pas là. (Exclamations sur des travées des groupes Les Républicains et SER.)
M. Rachid Temal. Eh bien, où est-il ?
M. Philippe Dallier. Le 17 novembre dernier, à Saint-Denis, dans mon département, un campement sauvage de plus de 2 500 migrants a été évacué, afin de réaliser ce que l’on appelle pudiquement une « mise à l’abri ».
Pour ce faire, les services de l’État ont procédé comme ils le font d’ordinaire : ils ont réquisitionné des gymnases – cette fois, c’était dans le Val-de-Marne, mais c’est parfois à Paris, dans les Hauts-de-Seine ou en Seine-Saint-Denis –, des nuitées d’hôtel ont été réservées et les associations ont été mobilisées.
Quelques jours plus tard, près de 400 personnes issues de ce camp – nous dit-on – se sont retrouvées sur la place de la République et ont été dispersées dans les conditions que l’on sait.
Force est donc de constater que, malgré des moyens budgétaires toujours plus importants pour accroître le nombre de places dans les centres d’accueil pour demandeurs d’asile (CADA) et essayer d’instruire les dossiers plus rapidement, malgré les 400 millions d’euros supplémentaires pour l’hébergement d’urgence en 2020, nous sommes toujours dépassés par la situation, ce qui n’est humainement pas acceptable.
Cette situation laisse surtout supposer que le flux des migrants continue à progresser fortement, alors même que la situation sanitaire restreint les déplacements.
Madame la ministre, ma question est simple : avez-vous les moyens de la politique de gestion des flux migratoires que le Gouvernement affiche. En effet, voyez-vous, plutôt que de la politique, j’y vois la vieille technique du sapeur Camember : « Quand ferme un camp de migrants, il s’en ouvre un autre » ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la citoyenneté. (Exclamations ironiques sur des travées du groupe Les Républicains.)
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur, chargée de la citoyenneté. Monsieur le sénateur, les migrants dont vous parlez étaient bien en Seine-Saint-Denis dans un premier temps. Certains d’entre eux ont ensuite été pris en charge par les services de l’État pour être mis à l’abri et hébergés, quand d’autres ont été redirigés vers des associations et se sont retrouvés, plus nombreux, sur la place de la République.
Nous avons alors décidé de lancer une opération d’évacuation du camp de migrants et de ses tentes, puisque cette occupation était illégale, avant d’entamer une mise à l’abri immédiate pour loger ces personnes.
Vous avez évoqué l’augmentation des moyens du Gouvernement pour réduire les délais de réponse aux demandeurs d’asile ; je vous en remercie. Je peux vous confirmer que 200 personnes supplémentaires ont été recrutées par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides, l’Ofpra, pour accélérer l’examen des dossiers et proposer une réponse plus rapide aux demandes formulées.
Je vais vous dire les choses telles que je les pense, monsieur le sénateur, même si je sais que nous ne serons pas d’accord – après tout, c’est peut-être aussi cela, la politique et la démocratie : oui, nous assumons que l’État finance des mises à l’abri et l’hébergement de personnes venues en France pour chercher une vie meilleure.
M. Philippe Dallier. Je n’ai jamais dit le contraire !
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée. Non, nous n’allons pas nous excuser de le faire ! (Protestations sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. François Bonhomme. Quelle mauvaise foi !
M. Roger Karoutchi. Ce n’était pas la question !
M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour la réplique.
M. Philippe Dallier. Madame la ministre, je ne m’attendais pas à être accusé de la sorte, mais peu importe…
Si vous aviez les moyens de votre politique, les délais d’instruction dans les CADA seraient de quelques mois, alors qu’ils atteignent toujours près d’un an !
M. Roger Karoutchi. Eh oui !
M. Philippe Dallier. Si vous aviez les moyens de votre politique, ceux qui ont obtenu l’asile auraient un logement et ceux qui ont été déboutés seraient reconduits à la frontière, ce qui éviterait d’« emboliser » le système.
Si vous aviez les moyens de votre politique,…
M. François Patriat. Où est la vôtre ?
M. Philippe Dallier. … la majorité des centres d’hébergement d’urgence n’auraient pas à accueillir des gens qui sont en situation irrégulière et que nous ne savons pas gérer.
M. Roger Karoutchi. Eh oui !
M. Philippe Dallier. Alors, madame la ministre, la réponse à ma question est malheureusement négative : en la matière, la situation est de plus en plus grave ! (Vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
prise en charge spécifique de la pauvreté et de la précarité engendrées par la crise sanitaire
M. le président. La parole est à M. Olivier Henno, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Olivier Henno. Madame la ministre, mes chers collègues, au lendemain du premier jour de la campagne d’hiver des Restos du cœur et d’autres associations caritatives, nous avons le devoir moral d’aborder avec gravité et lucidité les signaux alarmants d’une montée de la précarité et de la pauvreté : une augmentation de 50 % des aides alimentaires, la multiplication du nombre de jeunes parmi les demandeurs – la moitié des personnes accueillies aux Restos du cœur ont moins de 25 ans.
Ainsi, je vois dans mon département du Nord des étudiants qui sautent volontairement des repas : c’est terrible. Je suis interpellé par des intermittents de la restauration ou des saisonniers, qui sont en train de tomber dans la misère. Nous faisons face à un risque de basculement dans l’extrême précarité de personnes qui ne pensaient jamais devoir recourir aux aides sociales.
Cette crise sanitaire ne doit pas nous cacher la crise économique, et surtout sociale, qui se trouve à nos portes.
La bonne réponse à cette crise ne sera ni technocratique ni verticale. La bonne réponse ne viendra pas d’un éventuel ruissellement. La bonne réponse ne peut venir que du terrain, des élus locaux, des partenaires sociaux et, surtout, d’un secteur associatif mobilisé sur toutes les grandes causes sociales et humaines : pauvreté, inégalité des chances, injustice dans les quartiers.
Le secteur associatif est mobilisé, mais aussi fragile et presque à bout : il mérite donc toute notre attention. L’expérience nous a appris qu’une association qui meurt est une association qui disparaît pour toujours.
Madame la ministre, ma question est toute simple : quelle est la stratégie sociale du Gouvernement ? Quelles mesures spécifiques entend-il mettre en œuvre pour faire face à cette précarité ? Surtout, à quand un véritable plan de cohésion sociale mobilisant tous les acteurs de terrain ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’autonomie.
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l’autonomie. Monsieur le sénateur Olivier Henno, votre question me permet de rappeler que la crise humaine et la pauvreté préexistaient à la crise sanitaire. Vous le savez mieux que quiconque, vous qui êtes de la même région et du même département que moi. Nous le savons chacun.
Le Gouvernement a agi depuis le début du quinquennat pour accompagner nos compatriotes confrontés à des difficultés : ce n’est ni une fatalité ni une assignation.
Depuis 2017, plus de 17 milliards d’euros ont été mobilisés. Nous avons mis l’accent sur l’apprentissage, l’insertion sociale et professionnelle – cela me tient particulièrement à cœur – et l’accompagnement des personnes éloignées de l’emploi. Le département du Nord recrutera d’ailleurs très prochainement 2 000 personnes dans les métiers du grand âge, que je rencontrerai bientôt. Il s’agit d’une approche plus émancipatrice, plus humaine et plus sociale, qui vise à sortir les personnes de la précarité, et non à les assigner.
En revanche, les résultats se heurtent à la dureté de la crise sanitaire – nous le savons – et, dans ces moments-là, les vulnérabilités s’accroissent.
C’est pourquoi les bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA) et de l’allocation de solidarité spécifique (ASS), les étudiants boursiers et les jeunes disposant des aides personnalisées au logement (APL) se verront verser 150 euros dès la fin de cette semaine. Un montant majoré de 100 euros par enfant sera versé à plus de 4 millions de foyers. Des dizaines de millions d’euros ont été mobilisés pour assurer la mise à l’abri des personnes en difficulté, la distribution de masques, l’accès à un emploi ou à une activité adaptée.
Je pense aussi aux 6,5 milliards d’euros dédiés au plan « 1 jeune, 1 solution » pour la formation, l’insertion et l’embauche. Comme l’a annoncé le Président de la République, les premiers résultats sont encourageants.
Olivier Véran a annoncé, hier, un plan de soutien aux associations de 100 millions d’euros pour mieux accompagner les plus précaires face à la crise, en développant des actions innovantes et en accompagnant la transformation des infrastructures. Ce budget viendra compléter les 94 millions d’euros alloués aux associations d’aide alimentaire pour la seule année 2020.
Vous le voyez, monsieur le sénateur, le Gouvernement adapte sa réponse à la crise qui nous touche de plein fouet. Personne ne sera laissé au bord du chemin et nous serons tous associés. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Olivier Henno, pour la réplique.
M. Olivier Henno. Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre, mais le pays n’attend pas un empilement de mesures (Mme la ministre déléguée chargée de l’autonomie proteste.) : il attend une réponse humaine. C’est pourquoi notre groupe souhaite un véritable plan de cohésion sociale mobilisant tous les acteurs de terrain. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
moyens accordés à la lutte contre les violences faites aux femmes
M. le président. La parole est à Mme Marie-Claude Varaillas, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Mme Marie-Claude Varaillas. Le 25 novembre marque, chaque année, la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes.
Salariées indispensables, mères de famille épuisées, femmes précarisées : les « premières de corvée » n’auront pas été épargnées par la crise sanitaire en cours, d’autant moins avec le regain de violences intrafamiliales engendré par les confinements successifs.
Tous les deux jours, une femme est tuée par son conjoint ou son ex-conjoint, et un accroissement de 16 % des violences conjugales a été constaté durant l’année 2019.
Les faits sont précis et d’une grande brutalité ; les moyens doivent l’être également. Ceux qui ont été promis, voilà un an, à la suite du Grenelle des violences conjugales ne sont pas à la hauteur.
Pire, une dégradation de la qualité d’écoute des victimes est aujourd’hui à craindre avec la mise en concurrence de la plateforme 3919. La Fédération nationale Solidarité femmes doit poursuivre sa mission. Son travail de qualité a fait ses preuves depuis toujours, et aujourd’hui plus que jamais.
Les annonces chiffrées d’une augmentation des places d’hébergement – que les associations spécialisées ont pourtant bien du mal à comptabiliser – ne doivent pas conduire à faire l’économie d’une qualité de prise en charge. Un lit et un toit, cela ne suffit pas ! Il faut un accompagnement social de ces femmes, qui sont dans la plus grande précarité humaine.
Cet accompagnement passe aussi par une véritable politique de prévention dans l’éducation nationale et par une prise en charge adaptée dans nos commissariats, avec une police formée.
Il faut adopter une loi-cadre et des tribunaux spécialisés doivent être érigés, sur le modèle de nos voisins espagnols, exemplaires sur le sujet.
Oui, pas moins de un milliard d’euros sont nécessaires pour la seule lutte contre les violences faites aux femmes. Comment le Gouvernement compte-t-il redresser les moyens financiers et humains pour, enfin, lutter efficacement et durablement contre ce fléau des violences faites aux femmes ? (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE et SER.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État, porte-parole du Gouvernement.
M. Gabriel Attal, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, porte-parole du Gouvernement. Madame la sénatrice Varaillas, je vous prie tout d’abord d’excuser l’absence de ma collègue Elisabeth Moreno, qui se trouve actuellement en déplacement avec le Président de la République, justement pour visiter un centre d’hébergement de femmes victimes de violences conjugales. Vous l’avez dit, ce 25 novembre marque la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes.
Vous avez à raison rappelé la terrible réalité – dans le monde comme dans notre pays – et des chiffres qui nous indignent toutes et tous. C’est pourquoi, dès le début du quinquennat, le Président de la République a décidé de faire de la lutte contre ces violences une grande cause nationale.
Le 25 novembre 2017, nous affichons une ambition. Le 25 novembre 2019, nous concluons un Grenelle historique contre les violences faites aux femmes – je veux à cet égard saluer l’implication de Marlène Schiappa, qui était à l’époque chargée de ces questions et qui poursuit son action au sein du ministère de l’intérieur. Aujourd’hui, ce 25 novembre 2020, nous pouvons dresser un bilan des actions engagées à l’issue du Grenelle. Les résultats sont là.
C’est une politique massive qui a été engagée. Nous avons renforcé les moyens. Le bracelet anti-rapprochement se déploie partout en France. Cette année, 1 000 places d’hébergement d’urgence supplémentaires ont été créées, auxquelles viendront s’ajouter 1 000 autres, pour atteindre, à la fin de 2021, un niveau de 7 700 places opérationnelles pour les femmes victimes de violences. Nous continuons enfin à accroître les budgets, avec l’adoption d’une augmentation historique de 40 % du budget de l’égalité entre les femmes et les hommes.
J’entends votre appel à une loi-cadre. Madame la sénatrice, trois lois ont été votées au cours des trois dernières années. La responsabilité qui nous incombe, nous, exécutif, mais qui incombe aussi aux acteurs dans les territoires, est désormais de faire en sorte que les mesures adoptées soient appliquées. Nous sommes extrêmement sensibles – c’est la responsabilité de ma collègue Élisabeth Moreno – à l’application des mesures.
Sur ces bases, nous pourrons continuer à progresser collectivement, autour d’un enjeu qui, je crois, nous rassemble toutes et tous. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
formations des policiers et gendarmes mises en place depuis le lancement du grenelle des violences conjugales
M. le président. La parole est à Mme Marie Evrard, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, dont je salue la première intervention dans cet hémicycle.
Mme Marie Evrard. Ma question s’adresse à Mme la ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur, chargée de la citoyenneté.
En cette Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes, j’ai une pensée très forte pour les femmes de ce monde victimes de maltraitances au quotidien.
Les mesures de confinement mises en œuvre dans plusieurs pays ont rappelé la réalité tragique que peut revêtir pour certaines femmes le huis clos familial. Les données publiées par l’Organisation des Nations unies, l’ONU, au mois de septembre dernier, parlent d’elles-mêmes : le confinement a fait augmenter les plaintes de 30 % en France.
La France a mis en place un Grenelle ambitieux sur le sujet, réunissant pendant plusieurs mois les associations, les acteurs de terrain et l’ensemble des administrations.
La France a décliné par deux textes de loi notamment les mesures proposées durant ces travaux, mesures dont la mise en œuvre a récemment fait l’objet d’un bilan d’étape.
Je salue les acteurs de terrain qui rendent possible cette action et, plus spécifiquement, la mémoire d’Halina Creusaton, qui était directrice déléguée départementale aux droits des femmes et à l’égalité dans l’Yonne et qui a apporté sans relâche sa réflexion et son action.
Je salue également les forces de sécurité intérieure : elles sont un interlocuteur clé, parfois premier, pour les victimes de violences conjugales, comme les appels d’initiative réalisés par les policiers et les gendarmes pendant le premier confinement l’ont illustré.
Cette action des forces de sécurité, justement parce qu’elle peut tout changer, ne peut se penser sans une véritable formation. La notion d’emprise, introduite dans la loi cet été, exprime bien la complexité des mécanismes en jeu.
Madame la ministre, pouvez-vous préciser les mesures prises et envisagées pour renforcer cette formation, tant au titre de la formation initiale que tout au long de la carrière ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la citoyenneté.
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur, chargée de la citoyenneté. Madame la sénatrice Evrard, je commencerai mon intervention en saluant votre engagement sur ce sujet et le travail extrêmement important que vous menez dans l’Yonne pour protéger les femmes, et plus largement toutes les victimes, contre les violences conjugales, travail auquel est associé le secrétaire d’État Jean-Baptiste Lemoyne.
Sachez, madame la sénatrice, que l’engagement du ministère de l’intérieur est total. Les 290 000 femmes et hommes travaillant dans ce ministère s’engagent pour mieux protéger les femmes. C’est le sens du point d’étape que nous avons fait ce matin avec le directeur général de la police nationale, le directeur général de la gendarmerie nationale et les responsables des groupes de travail du Grenelle des violences conjugales pour le ministère de l’intérieur.
Depuis ce Grenelle et la mobilisation collective du Gouvernement, de nombreuses mesures ont été mises en place pour faciliter l’accès des femmes aux dépôts de plainte. Je pense à la grille d’évaluation du danger, construite avec les associations, à la « roue des violences », mais aussi à la possibilité pour les femmes de déposer plainte sans se rendre dans un commissariat ou une gendarmerie via la plateforme Arretonslesviolences.gouv.fr, où je me suis rendue, la semaine dernière, avec mes collègues Élisabeth Moreno et Adrien Taquet. Ses équipes sont composées de policiers et de gendarmes formés pour répondre à ces femmes.
La formation, sur laquelle vous m’interrogez, est fondamentale à nos yeux. Nous avons créé 120 heures de formation initiale pour les policiers et les gendarmes, afin de leur permettre de mieux prendre en charge les femmes victimes de violences sexistes, sexuelles et conjugales. Nous ajoutons à cela des formations continues et la création d’une formation en ligne ouverte à tous – un MOOC –, en collaboration avec l’initiative citoyenne Make.org et le Collectif féministe contre le viol, pour mieux former en continu l’ensemble des policiers et gendarmes.
Par ailleurs, madame la sénatrice, la chaîne pénale est fondamentale. Le ministère de l’intérieur travaille donc étroitement avec le ministère d’Éric Dupond-Moretti.
L’objectif que nous visons avec Gérald Darmanin est simple : que 100 % des plaintes soient enregistrées, que 100 % des plaintes soient correctement qualifiées, que 100 % des plaintes soient transmises au parquet pour traitement, afin que ces femmes puissent être sauvées et protégées. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
évacuation du campement place de la république à paris
M. le président. La parole est à M. Jérôme Durain, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Jérôme Durain. Ma question s’adresse au Premier ministre.
« Jamais deux sans trois » : voilà les mots prononcés par un policier mardi soir, sur la place de la République, avant que celui-ci ne s’attaque pour la troisième fois à un journaliste.
« Jamais deux sans trois » : c’est ce que semble dire aussi M. Didier Lallement. Après l’évacuation du pont de Sully au mois de juin 2019, ce M. Lallement avait demandé un rapport. Après la répression d’une manifestation, déjà place de la République, au mois de mars 2020, il avait demandé un rapport. Et c’est ce même M. Lallement qui vient de produire un rapport après les incidents de mardi, rapport dont nous ne connaissons pas le contenu, mais qui a conduit M. Gérald Darmanin à demander un autre rapport – à l’inspection générale de la police nationale, l’IGPN, cette fois.
Nous sommes impatients de lire tout cela…
Au fond, le seul rapport qui nous intéresse, celui qu’il faut changer, c’est le rapport de la police de la République avec ses citoyens. Nous ne nous accommodons pas de la formule du préfet Lallement : « Nous ne sommes pas dans le même camp, madame. »
Votre gouvernement, mesdames, messieurs les ministres, prétend protéger policiers et gendarmes, mais c’est lui qui les expose, en continuant de creuser le fossé et d’alimenter la défiance. Vous les poussez à la faute. Vous voulez une police qui sert le pouvoir, nous voulons une police de la République !
Plusieurs sénateurs du groupe Les Républicains. Démago !
M. Roger Karoutchi. C’est même au-delà !
M. Jérôme Durain. Les violences de la place de la République constituent le point d’orgue d’une longue série de dérives. Vous l’avez bien compris, monsieur Castex, puisque vous annoncez vouloir saisir le Conseil constitutionnel sur l’article 24 de la proposition de loi relative à la sécurité globale.
En attendant les rapports, allez-vous siffler la fin de la partie ? Comment comptez-vous, surtout, retisser le lien entre forces de l’ordre et citoyens ? Quelles consignes allez-vous donner à M. Lallement pour que la manifestation prévue samedi prochain à Paris ne donne pas lieu à de nouveaux débordements ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la citoyenneté.
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur, chargée de la citoyenneté. Monsieur le sénateur Durain, avant de vous répondre sur le fond, je ferai une observation. Je ne crois pas que quelques actions isolées doivent nous autoriser à jeter l’opprobre sur l’ensemble de la police de la République, qui mène globalement un travail important et sérieux – primordial même. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et UC, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)
C’est ce travail qui permet de maintenir l’ordre républicain, lequel nous protège de l’ordre des clans. Notre rôle de responsables politiques, me semble-t-il, est aussi de protéger ceux qui nous protègent et de défendre l’action résolue menée par la police.
Que s’est-il passé, en l’occurrence, sur la place de la République ? Vous aviez là un campement installé de manière illégale,…
Mme Anne Chain-Larché. Très bien !
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée. … composé de tentes à l’intérieur desquelles se trouvaient des migrants. Nous avons souhaité mettre ces personnes à l’abri, leur offrir un hébergement.
Dès le lendemain matin, le ministre de l’intérieur Gérald Darmanin, en voyant les images qu’il a lui-même qualifiées de choquantes,…
Mme Marie-Pierre de La Gontrie et M. Jérôme Durain. Heureusement !
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée. … a immédiatement souhaité commander un rapport au préfet de police et, conformément à la recommandation formulée dans ce rapport, il a saisi l’IGPN, ce qui constitue un acte important.
Le ministre de l’intérieur a indiqué qu’il tirerait toutes les conséquences…
M. Pierre Laurent. C’est grâce à des images vidéo !
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée. … de ce rapport, qu’il rendrait public dans les quarante-huit heures, c’est-à-dire, maintenant, dans un peu plus de vingt-quatre heures.
J’en viens au fond du sujet, c’est-à-dire la question de l’hébergement. Oui, les migrants doivent être traités avec humanité et fraternité ! C’est pourquoi, dès le lendemain matin, ma collègue Emmanuelle Wargon, ministre chargée du logement, et moi-même avons souhaité mobiliser les administrations pour trouver des solutions de relogement.
Nous avons présenté publiquement un premier point d’étape et nous recevrons, dès demain, l’ensemble des associations travaillant dans ce champ, afin de partager avec elles les solutions proposées par l’État pour reloger ces migrants. (M. David Assouline s’exclame.)
Vous le voyez, mesdames, messieurs les sénateurs, nous apportons des réponses et travaillons au fond.
M. David Assouline. Vous êtes les seuls à le croire !
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée. Nous sommes pleinement mobilisés pour garantir le respect des lois, mais aussi celui de la dignité humaine, et pour défendre la fraternité, qui est une valeur importante de notre République. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Jérôme Durain, pour la réplique.
M. Jérôme Durain. Merci de cette leçon de morale, madame la ministre.
Nous aimons les policiers de la République ! (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains.) Nous aimons les policiers de la République quand ils sont au milieu de la population ! Nous aimons les policiers de la République quand ils sont bien employés, qu’ils ne sont pas prisonniers de l’ambition d’un homme cherchant toujours à en faire plus ! D’ailleurs, monsieur le Premier ministre, je ne suis pas certain que vous arriviez à convaincre, dans vos propres rangs, de la légitimité de la pente que vous êtes en train de prendre.
En tout cas, on l’a bien compris, en matière de sécurité publique et de libertés publiques, le macronisme n’a qu’une main, et c’est une main droite ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE. – Huées sur les travées du groupe Les Républicains.)
chômage partiel
M. le président. La parole est à Mme Maryse Carrère, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
Mme Maryse Carrère. Ma question s’adressait initialement à Mme la ministre du travail, de l’emploi et de l’insertion.
Nul besoin de revenir sur les difficultés que nous traversons et contre lesquelles l’ensemble des Français luttent depuis le mois de mars dernier. Je souhaite aujourd’hui alerter le Gouvernement sur un certain nombre de professionnels qui vont rester sur le bord du chemin.
Les premiers sont des réceptionnistes, des veilleurs de nuit, des femmes de ménage, des maîtres d’hôtel, des extras, tous ces salariés de l’hôtellerie et de la restauration, dont les emplois sont au rythme des saisons et de l’activité touristique. Dans mon département, notamment à Lourdes, ils sont des centaines sur le fil de leur fin de droits au chômage, parce qu’ils n’ont pu signer un nouveau contrat au mois de mars dernier.
Les seconds sont des pisteurs secouristes, des dameurs, des moniteurs de ski aujourd’hui suspendus à la réouverture des stations de sports d’hiver pour Noël. On les appelle les saisonniers ; à Lourdes, on les appelle aujourd’hui les oubliés. Ils sont le maillon essentiel de notre économie touristique et de montagne.
Hier soir, ils ont comme nous tous entendu le Président de la République s’exprimer en ces termes : « Les saisonniers, les extras qui n’ont plus d’engagements depuis des mois […] trouveront une réponse exceptionnelle à leur situation. » Aussi, entre les milliers de saisonniers qui arrivent en fin de droits, parce qu’ils n’ont pu retrouver une activité, et ceux qui ne retrouveront une activité au mieux qu’au mois de janvier prochain, quelle réponse d’urgence le Gouvernement compte-t-il apporter pour traduire les engagements du Président de la République ?
Les saisonniers auront-ils droit à une recharge automatique de leurs droits, afin de survivre dans une situation qui risque de durer ? Je pense notamment à mon département, où la crise sociale sera sans précédent. L’État a localement activé les leviers possibles, mais ceux-ci ne suffiront pas. Il nous faut une réponse ! Il leur faut une réponse de toute urgence ! Et cette réponse, elle est entre les mains du Gouvernement.
Ma question est donc simple. Monsieur le secrétaire d’État, pouvez-vous nous préciser les dispositifs d’aide qui seront proposés et, ainsi, donner une lueur d’espoir à ceux qui, en l’état actuel des mesures, passeront au travers des mailles du filet de la solidarité nationale ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
M. Jean-Claude Requier. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé des retraites et de la santé au travail.
M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d’État auprès de la ministre du travail, de l’emploi et de l’insertion, chargé des retraites et de la santé au travail. Madame la sénatrice Carrère, vous venez de rappeler les propos que le Président de la République a tenus hier soir dans son allocution. Il est parfaitement exact qu’il a évoqué la situation de tous ces Françaises et Français qui sont des saisonniers ou des extras et que vous connaissez bien dans votre territoire. En effet, ils trouveront une réponse exceptionnelle à leur situation.
Je veux revenir sur quelques éléments qui concernent, certes, les habitants de votre département des Hautes-Pyrénées, particulièrement de la zone de Lourdes, mais aussi, sans aucun doute, de nombreux Françaises et Français dans d’autres territoires.
Comme vous le savez, la ministre du travail Élisabeth Borne est mobilisée, avec les partenaires sociaux, pour protéger tous les travailleurs ayant vu leur activité se réduire, voire disparaître du fait de la crise. Je reconnais que l’ampleur de celle-ci est particulièrement forte dans les zones que vous connaissez bien, notamment du fait des emplois saisonniers du secteur de l’hôtellerie-restauration.
Notons d’ailleurs que le dispositif d’activité partielle mobilisé sur cette année 2020 au titre de la crise sanitaire – dispositif d’un montant de plus de 30 milliards d’euros – engage déjà 3 milliards d’euros pour l’ensemble des salariés des hôtels, restaurants et cafés.
J’ai été particulièrement attentif à votre question, madame la sénatrice, et à la situation précise de Lourdes. Mes services ont donc pris contact avec ceux de Pôle emploi sur place et je peux déjà vous dire que, sur les 125 saisonniers identifiés à Lourdes par Pôle emploi comme étant en fin de droits, plus de 60 se sont vu proposer, soit un emploi dans la vallée, soit une solution de formation. Je reconnais toutefois qu’une solution n’a pas été trouvée pour tous et vous avez souligné l’importance d’avoir une réponse globale.
Dans cette optique, vous savez que le travail du Gouvernement se poursuit sur le sujet, dans la continuité du comité interministériel du tourisme, avec Jean-Baptiste Lemoyne et les élus du territoire, dont vous faites partie. Nous allons donc trouver les solutions les plus adaptées, celles que vous attendez, d’ici, je crois, quelques heures ou quelques jours.
politique du gouvernement en matière de sécurité
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. Guillaume Gontard. Monsieur le Premier ministre, le Gouvernement se fait le héraut de la défense des valeurs républicaines. Nous avons encore constaté toute la puissance de vos propos, lundi soir, place de la République, à Paris.
La République s’honorerait ainsi à mettre des migrants à la rue et à déchirer leurs tentes…
La République s’honorerait ainsi à tabasser des journalistes, à violenter des avocats et des élus… (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
La République s’honorerait ainsi à laisser femmes, hommes, enfants, se noyer en Méditerranée ou à les enfermer en centres de rétention dans des conditions indignes…
La République s’honorerait ainsi à renvoyer errer dans les vallées alpines femmes enceintes et familles, puis à attaquer en justice ceux qui tentent de les aider… (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.)
La République s’honorerait ainsi à voter des lois sécuritaires en plein état d’urgence, alors que le droit à manifester est contraint…
La République s’honorerait ainsi à rogner la liberté de la presse et la liberté d’informer… (Mêmes mouvements.)
Monsieur le Premier ministre, la dérive sécuritaire de votre gouvernement est alarmante. Le problème, ce n’est pas l’action zélée et révoltante de quelques fonctionnaires de police isolés.
Non ! Le problème, c’est votre loi Asile et immigration et les lois sécuritaires qui s’enchaînent – et nous enchaînent. (Exclamations sur les mêmes travées.)
Le problème, c’est la doctrine de maintien de l’ordre qui mutile les manifestants.
Le problème, c’est la chaîne de commandement. Comment le préfet Didier Lallement peut-il encore être en poste après tant de bavures et tant de propos honteux ? (Mme Marie-Pierre de La Gontrie applaudit.) Comment le ministre de l’intérieur peut-il en permanence jeter impunément de l’huile sur le feu ?
Monsieur le Premier ministre, quand allez-vous enfin prendre vos responsabilités, revoir votre politique migratoire et sécuritaire déshumanisée et cesser de courir après l’extrême droite ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées des groupe SER et CRCE. – Marques d’indignation sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Jean Castex, Premier ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, le gouvernement que j’ai l’honneur de conduire et la majorité qui le soutient au Parlement mènent, je vous le dis, une politique profondément républicaine.
Une politique profondément républicaine, monsieur le sénateur Gontard, c’est d’abord assurer la sécurité de nos concitoyens. Assurer la sécurité de nos concitoyens, c’est respecter, partout, les lois et les règles de la République, …
M. Roger Karoutchi. Très bien !
M. Jean Castex, Premier ministre. … celles-là mêmes qui sont édictées par la représentation nationale.
M. François Patriat et Mme Françoise Gatel. Très bien !
M. Roger Karoutchi. Exact !
M. Jean Castex, Premier ministre. Que s’est-il passé l’autre soir ? Vous le savez toutes et tous, mesdames, messieurs les sénateurs, face à une manifestation non déclarée et à une occupation illégale du domaine public (Marques d’approbation sur les travées du groupe Les Républicains.),…
M. Roger Karoutchi. Dans un contexte de crise sanitaire, en plus !
M. Jean Castex, Premier ministre. … il était parfaitement normal que des fonctionnaires de la République fassent appliquer les lois de la République ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes RDPI, RDSE, UC et Les Républicains.)
À l’occasion de ces événements, des faits se sont produits, qui ont choqué et appelé la mise en œuvre des procédures prévues par les lois de la République. Le gouvernement que je dirige veillera à l’application de ces procédures.
L’inspection générale de la police nationale, dont c’est le rôle, a été saisie pour faire la lumière sur ces faits. Le ministre de l’intérieur, à ma demande, s’est engagé à rendre public ce rapport, dont nous tirerons les enseignements.
Est-ce, en quoi que ce soit, une raison pour jeter l’opprobre sur les forces de sécurité de la République ?
M. Jean Castex, Premier ministre. En aucun cas ! (Marques d’approbation sur les travées du groupe Les Républicains.)
Les forces de sécurité de la République, qui doivent respecter elles-mêmes les lois de la République, font un travail difficile, qui mérite l’hommage de toute cette assemblée. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, RDSE, UC et Les Républicains.)
Je ne peux pas davantage vous laisser dire, monsieur le sénateur Gontard, que ce gouvernement cherche, de quelque manière que ce soit, à porter atteinte aux libertés publiques garanties par les lois de la République.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Et l’article 24 ?
M. Jean Castex, Premier ministre. C’est totalement inexact !
La proposition de loi relative à la sécurité globale, qui sera prochainement examinée dans cette assemblée, est une excellente loi. (Exclamations sur les travées du groupe SER.)
M. Loïc Hervé. Elle n’est pas encore votée !
M. Jean Castex, Premier ministre. Elle vise à renforcer la coordination des forces de sécurité, à mieux établir encore l’intervention des polices municipales. Dois-je vous rappeler le rôle qu’elles ont eu, notamment lors du dernier attentat de Nice ?
M. David Assouline. L’article 24 !
M. Jean Castex, Premier ministre. Elle vise également à encadrer l’intervention de la sécurité privée et à protéger nos forces de sécurité.
Quant à l’article 24, mesdames, messieurs les sénateurs,…
M. David Assouline. Oui !
M. Jean Castex, Premier ministre. … que le Sénat – je n’en doute pas, je l’ai dit hier à l’Assemblée nationale – examinera avec le souci de le clarifier,…
M. Loïc Hervé. Oui !
M. Jean Castex, Premier ministre. … il n’a pas d’autre but que de protéger les forces de sécurité, sans porter atteinte à la liberté sacrée de la presse…
M. Marc-Philippe Daubresse. On est d’accord !
M. Jean Castex, Premier ministre. … et à la liberté d’expression.
Lisez le texte, et non tous les commentaires erronés qui en sont faits. Plus que jamais, la liberté et la sécurité sont des valeurs au cœur de la République. Ce gouvernement les défendra et les défendra toujours ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées des groupes RDSE, UC et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour la réplique.
M. Guillaume Gontard. Monsieur le Premier ministre, la République, c’est l’État de droit, et c’est votre responsabilité !
La République, c’est la liberté, l’égalité et la fraternité.
C’est la liberté d’informer. C’est l’égalité devant la loi des auteurs de violence, qu’ils soient policiers ou manifestants. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) C’est la fraternité, la sororité avec les êtres humains, d’où qu’ils viennent.
Voilà les valeurs républicaines qui nous animent ! Elles devraient tous nous animer ! (Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées des groupe SER et CRCE.)
centrale de fessenheim et coupures d’électricité
M. le président. La parole est à M. Christian Klinger, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Christian Klinger. Ma question s’adresse à Mme Barbara Pompili, ministre de la transition écologique.
Mme la ministre a indiqué, sur un plateau de télévision, que les Français pourraient connaître des coupures électriques, cet hiver. Ces annonces jettent un froid ! (Exclamations amusées.)
Cette situation arrive après que deux réacteurs de Fessenheim ont été fermés en 2020. Cette fermeture relève d’une décision politique et idéologique, alors que la centrale était sûre, rentable et qu’elle faisait vivre plus de 2 000 foyers.
Fermer Fessenheim, c’est perdre 1,8 gigawatt, c’est-à-dire ce qui nous manque pour passer le cap de cet hiver. Nous allons donc devoir recourir à quatre centrales à charbon restant en France pour compenser le manque. Belle réussite de votre politique écologique !
Plusieurs sénateurs du groupe Les Républicains. Bravo !
M. Christian Klinger. Nous allons devoir importer de l’énergie de nos voisins allemands, qui utilisent des centrales à charbon. Belle réussite de votre politique écologique ! (Marques d’approbation sur des travées du groupe Les Républicains.)
Quoi que l’on en pense, le nucléaire nous permet d’être indépendants et de passer l’hiver sans coupure électrique.
M. Emmanuel Capus. Très bien !
M. Christian Klinger. Au vu de ces éléments, Mme la ministre regrette-t-elle d’avoir fermé Fessenheim ? Les Français pourront-ils passer l’hiver au chaud ? La France pourra-t-elle garantir dans les années à venir son indépendance énergétique ? (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et INDEP.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports.
M. Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué auprès de la ministre de la transition écologique, chargé des transports. Monsieur le sénateur Klinger, je vous remercie de cette question qui me permet de revenir à la fois sur la stabilité du réseau électrique et, au-delà, sur notre politique énergétique.
D’abord, comme vous le savez, le sujet de la disponibilité des centrales est le fait de travaux de maintenance qui ont pris du retard à cause de la crise du covid-19 et sont actuellement en cours de rattrapage. Je tiens à vous rassurer toutefois, et Mme Pompili a eu l’occasion de le dire, il n’y aura pas de coupure d’approvisionnement cet hiver pour les Français. Il n’est pas question d’un quelconque black-out !
Pour revenir plus largement sur le sujet de la politique énergétique, le Gouvernement s’est engagé dans la voie de la diversification, en réduisant progressivement la part du nucléaire dans le mix électrique de la France, avec l’objectif d’atteindre un niveau de 50 % en 2035, contre 72 % aujourd’hui. Nous développons massivement une filière des énergies renouvelables, notamment solaires et éoliennes, avec, à l’heure actuelle, des investissements de plus de 7 milliards d’euros par an. Enfin, nous soutenons fortement l’émergence de la filière hydrogène, la France pouvant devenir dans ce domaine, j’en suis convaincu, l’un des leaders mondiaux.
Notre politique est donc globale. Non seulement nous maintenons en condition opérationnelle notre filière nucléaire, mais nous diversifions aussi notre mix énergétique électrique en développant les énergies renouvelables et nous innovons sur les technologies de rupture.
Ce sont là, je pense, les clés d’une politique énergétique réussie, qui offre un haut niveau de service aux Français tout en maintenant des prix bas, notamment en comparaison de ceux de nos voisins européens. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Christian Klinger, pour la réplique.
M. Christian Klinger. Monsieur le ministre des transports… électriques (Exclamations amusées), la crise du covid-19 ne peut pas tout : elle n’est pas responsable de tous les maux ! Nous rencontrerons aussi des difficultés au cours des hivers prochains.
Pour les visites de maintenance, vous le savez comme moi, gouverner, c’est prévoir. La crise du covid-19 a commencé au mois de mars dernier et nous sommes à la fin du mois de novembre. Ce problème aurait pu largement être anticipé.
Au groupe EDF, qui vous a proposé de prolonger, sur la centrale de Fessenheim, l’un des réacteurs de 900 mégawatts pour passer l’hiver sereinement, vous avez adressé un refus idéologique.
C’est donc très simple : étant donné la situation dans laquelle nous risquons de nous trouver cet hiver et pour pallier toutes ces coupures électriques, je propose à Mme la ministre de la transition écologique d’offrir à chaque Français, sous le sapin, une paire de gants, un bonnet et de grosses chaussettes pour passer l’hiver au chaud ! (Rires et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
violences faites aux femmes
M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Annie Le Houerou. Ce 25 novembre marque la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes.
En 2017, notre Président de la République a fait de l’égalité entre les femmes et les hommes la grande cause de son quinquennat. En 2019, on a encore déploré 141 féminicides et il faut attendre le projet de loi de finances pour 2021 pour que des moyens supplémentaires soient proposés.
Or, malgré les annonces faites lors du Grenelle des violences conjugales, sans moyens, les actions identifiées, connues et expérimentées ne peuvent être mises en place ni porter leurs fruits sur le long terme.
Les forces de l’ordre et de secours accomplissent un travail remarquable pour mettre à l’abri, informer et orienter vers un accompagnement. Trop souvent pourtant, il n’y a pas de solution en aval.
Ces équipes sont de plus en plus sollicitées. En 2020, les violences intrafamiliales explosent de 40 %. La plateforme 3919, dédiée aux violences conjugales, a reçu trois fois plus d’appels qu’au cours des années précédentes. Mise en place et gérée depuis 1992 par la Fédération nationale Solidarité femmes (FNSF), cette plateforme a démontré son efficacité, grâce à la mobilisation de ses équipes. L’annonce, par le Gouvernement, de sa mise en concurrence déstabilise une organisation bien rodée entre la FNSF et son réseau d’associations locales.
La communication ne suffit pas : après les constats, il faut des actes.
Monsieur le Premier ministre, quand des lieux d’accueil et d’hébergement dignes seront-ils disponibles, en lieu et place des mises à l’abri en urgence dans des hôtels de passage sur les bords de quatre voies ? Au minimum, 2 000 places dédiées sont nécessaires.
Quand les associations seront-elles dotées de moyens leur permettant un accompagnement dans la durée, notamment psychologique, de ces victimes de traumatismes sévères ?
Quand donnera-t-on à la justice les moyens dont elle a besoin pour écarter sans délai les conjoints violents par des bracelets anti-rapprochement ?
À quand une prise en charge adaptée des enfants, victimes collatérales, qui attendent des mois pour calmer leurs blessures faute de professionnels spécialisés ?
À quand une éducation nationale de nos garçons et de nos filles dès les petites classes sur l’égalité des sexes ?
À quand des formations effectives tout au long de la vie dans nos entreprises et administrations sur l’égalité entre les hommes et les femmes et sur les violences sexistes et sexuelles au travail et ailleurs ? (Applaudissements sur des travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État, porte-parole du Gouvernement.
M. Gabriel Attal, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, porte-parole du Gouvernement. Madame la sénatrice Annie Le Houerou, je vous remercie de cette question, qui nous permet d’approfondir un sujet déjà abordé tout à l’heure.
Je ne reviens pas sur les différents points que j’ai déjà évoqués, notamment la question de l’hébergement. Vous soulignez qu’il faut 2 000 places supplémentaires : c’est précisément notre objectif. En tout, au cours des années 2020 et 2021, ce sont 2 000 places que le Gouvernement créera.
En revanche, deux points de votre intervention me semblent particulièrement importants.
D’une part, vous avez abordé la place de l’éducation dans ce combat. Elle est absolument centrale. C’est en effet par l’éducation que nous arriverons à faire changer les mentalités et un certain nombre de comportements que nous observons aujourd’hui.
À cet égard, je rends hommage à l’action de Jean-Michel Blanquer et de Marlène Schiappa, alors secrétaire d’État chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations, en particulier aux trois séances annuelles d’éducation affective et sexuelle. Elles étaient prévues par une loi de 2014 sans être systématiques pour autant ; c’est ce gouvernement qui les a rendues obligatoires.
D’autre part, vous interrogez le Gouvernement sur la plateforme 3919.
Depuis des années, la FNSF gère ce numéro de manière remarquable. Je salue tout particulièrement les écoutantes qui sont au bout du fil – on ne le fait pas souvent – : elles permettent de traiter la situation de ces femmes et de les orienter. Nous avons renforcé le 3919 en le rendant accessible vingt-quatre heures sur vingt-quatre et sept jours sur sept.
À ce titre, pourquoi passons-nous par la commande publique ?
Dès lors que l’État définit entièrement les modalités de fonctionnement de ce dispositif, le prend à sa charge et le finance en totalité, la commande publique s’impose. L’État entend confirmer et renforcer le 3919 en lui donnant une place centrale dans les politiques publiques de lutte contre les violences conjugales.
J’y insiste : quels que soient les choix qui devront être faits, nous veillerons évidemment, avec la plus grande attention, à ce que les écoutantes de demain, qui resteront les interlocutrices de ces femmes, aient la même formation et la même compétence que celles d’aujourd’hui. C’est absolument fondamental pour les femmes.
Tel est le travail qui sera poursuivi par ma collègue Élisabeth Moreno, qui ne pouvait malheureusement pas vous répondre. Elle accompagne le Président de la République dans le cadre d’un déplacement consacré précisément à ce sujet ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
ouverture des stations de ski
M. le président. La parole est à M. Cédric Vial, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. Cédric Vial. Monsieur le Premier ministre, comment en est-on arrivé là ?
Lundi dernier, vous avez réuni l’ensemble des acteurs de la montagne pour échanger sur les conditions d’un accueil dans nos stations, cet hiver. Sur la base d’un travail sérieux et responsable, vous avez annoncé une décision sous dix jours, lorsque la situation sanitaire serait plus claire.
Hier soir, nous avons écouté avec stupeur les déclarations du Président de la République. Nous les avons ressenties comme une trahison.
M. François Patriat. De la part de qui ?
M. Cédric Vial. Comment en est-on arrivé là ?
Depuis votre nomination, pour plus d’efficacité de l’action publique, vous n’avez eu de cesse de nous vanter les vertus de la décentralisation…
M. François Patriat. Ce n’est pas Wauquiez qui va arrêter le virus…
M. Cédric Vial. … et de la proximité, ainsi que le rôle des élus locaux. Or la gestion de cette crise sanitaire n’a jamais été aussi centralisée. Les situations sont pourtant bien différentes d’un massif à l’autre, d’un territoire à l’autre.
Comment en est-on arrivé là ?
Nous ne comprenons plus rien à votre stratégie de gestion de crise. Nous déplorons l’absence d’une méthode coordonnée. Nous ne savons même plus qui pilote. S’il existe bien des voitures à deux volants, lorsque l’on se sert des deux en même temps, c’est l’accident !
Monsieur le Premier ministre, soit vous n’étiez pas informé des déclarations du Président de la République hier soir, et cela pose le problème de la gouvernance à la tête de l’État, soit vous l’étiez, et vous nous avez dans ce cas raconté des calembredaines, ce qui pose un problème de crédibilité à la tête de l’État.
Comment en est-on arrivé là ?
Certes, la situation sanitaire n’est pas bonne – d’ailleurs, la pression sur le monde hospitalier reste forte –, mais elle s’est considérablement améliorée ces derniers temps…
M. François Patriat. En attendant la troisième vague ?
M. Cédric Vial. … et son évolution nous offre espoir et perspectives.
Tous les ans, l’accueil des touristes en station est une prouesse sanitaire, réalisée sans encombre. Cette année, on attend une fréquentation en baisse de 50 %. Des personnels médicaux saisonniers sont d’ores et déjà prévus dès le 15 décembre prochain. Une politique de tests massive a été prévue par la région et par les départements. Nous pourrions être prêts en toute sécurité.
Monsieur le Premier ministre, pouvez-vous nous confirmer que la concertation entre le Gouvernement et les acteurs de la montagne est toujours d’actualité et que la décision sera finalement fondée sur des éléments objectifs plutôt que sur des appréciations à l’emporte-pièce ? (Vifs applaudissements sur des travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé du tourisme.
M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères, chargé du tourisme, des Français de l’étranger et de la francophonie. Monsieur le sénateur Vial, nous mesurons tous la déception que vous exprimez : je la mesure tout particulièrement, comme la colère, qui éclate parfois.
Il y a une heure encore, j’étais en réunion avec le président des domaines skiables, les représentants de l’Association nationale des maires des stations de montagne (ANMSM), de l’Association nationale des élus de la montagne (ANEM) et des écoles des skis pour préparer la suite.
Voilà plusieurs semaines que nous travaillons ensemble : j’ai pu mesurer combien les acteurs du monde de la montagne sont sérieux et responsables… (Protestations sur des travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. Rémy Pointereau. Ce n’est pas la question !
M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d’État. Ils veulent simplement travailler : ils ne sont pas en cause !
Ce qui est en cause, c’est la situation sanitaire, qui, même si elle s’améliore, demeure très tendue.
Ce qui est en cause, c’est aussi l’évolution des intentions des États voisins.
M. Jacques Grosperrin. Les skieurs iront en Suisse !
Mme Anne Chain-Larché. Et la Suisse ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d’État. Ces intentions ont été manifestées postérieurement à la réunion tenue par le Premier ministre.
Le Premier ministre a réuni les acteurs lundi dernier. Il a émis le vœu que le travail se poursuive et ce sera bien le cas. Le Président de la République le souhaite aussi.
À la suite des annonces d’hier, nous allons voir s’il est possible d’autoriser telle ou telle activité, comme la raquette. On pourrait également rouvrir les jardins d’enfants en plein air… (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Anne Chain-Larché. Il faut s’adapter !
Mme Sophie Primas. Et le ski, ce sera en Suisse !
M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d’État. Ces questions doivent encore être travaillées et discutées. (Nouvelles protestations sur les mêmes travées.)
En outre, le soutien économique doit être renforcé pour aider les acteurs à faire face à cette situation particulièrement complexe. On le sait : Noël représente 20 % à 25 % de la saison. Ce que nous voulons, c’est préserver le cœur de la saison. De nombreux acteurs l’ont dit : rien ne serait pire que d’ouvrir les stations, puis de devoir les refermer à cause d’une mauvaise évolution.
Nous allons continuer à travailler d’arrache-pied. On pourrait également organiser davantage de classes de neige le moment venu – le Président de la République y est très ouvert. On a besoin de réamorcer la pompe pour que les jeunes redécouvrent la montagne. (Mêmes mouvements.)
En tous les cas, nous allons travailler et nous serons au côté des acteurs de la montagne ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Cédric Vial, pour la réplique.
M. Cédric Vial. Monsieur le secrétaire d’État, ce n’est pas sérieux !
La concurrence n’est pas en Allemagne ou en Italie. Elle est en Autriche et en Suisse : ces deux pays ont pris la décision d’ouvrir leurs stations. Nos compatriotes vont s’empresser de s’y rendre et nous devrons ensuite gérer le retour de cette clientèle française, alors même que, notamment en Suisse, la situation sanitaire y est pire qu’en France aujourd’hui ! (Très bien ! et applaudissements sur des travées des groupes Les Républicains et UC.)
situation économique et financière des outre-mer
M. le président. La parole est à Mme Lana Tetuanui, pour le groupe Union Centriste.
Mme Lana Tetuanui. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ‘ia ora na !
La crise sanitaire n’épargne pas les outre-mer en général et je crains fort que nous ne soyons les oubliés de la République.
Demain, le gouvernement polynésien déposera son projet de budget 2021 à l’assemblée de Polynésie française. De son côté, le Sénat examinera la mission « Plan de relance » du projet de loi de finances pour 2021. Or je n’y retrouve pas la traduction des engagements de l’État à l’égard de ma collectivité.
En premier lieu, je constate l’absence des 12 millions d’euros se rapportant à la convention État-pays relative à la santé et à la solidarité. Pourtant, garantir un niveau d’accès aux soins pour l’ensemble des citoyens français du Pacifique est un impératif.
En second lieu, un second prêt garanti par l’État pour l’exercice 2021 est attendu.
Le contrat de développement et de transformation 2021-2023 n’offre aucune visibilité quant au montant réservé à la Polynésie française. Le tourisme demeure le premier moteur de notre économie. Or ce vecteur pourvoyeur d’emplois est en berne depuis vos annonces du 30 octobre dernier.
Quelles mesures immédiates envisager pour maintenir nos emplois liés au tourisme ? L’État tiendra-t-il ses engagements envers ma collectivité ou devons-nous conclure que nos statuts spécifiques d’autonomie constituent une limite, et non le gage d’une confiance réciproque entre l’État et ses collectivités d’outre-mer ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre des outre-mer.
M. Sébastien Lecornu, ministre des outre-mer. Madame la sénatrice, vous avez raison de rappeler la violence avec laquelle l’épidémie sévit dans les différents outre-mer, singulièrement dans votre territoire.
Je saisis cette occasion pour saluer publiquement, au nom du Gouvernement, la manière dont nous travaillons avec Édouard Fritch, président de la Polynésie française. La qualité de cette collaboration et la maturité des décisions prises nous permettent de faire au mieux. Ce territoire est grand comme l’Europe et les décisions y sont évidemment parfois difficiles à prendre.
Sur le terrain financier, la solidarité nationale a largement été mobilisée grâce au vote de l’ensemble des parlementaires. Parfois, les domaines concernés relèvent non de l’État, mais du pays. Je pense notamment au fonds de solidarité pour les entreprises : déployé depuis le mois de mars dernier, ce fonds atteint aujourd’hui 63 millions d’euros. Les prêts garantis par l’État représentent 435 millions d’euros, destinés, entre autres secteurs, au transport aérien. S’y ajoutent un premier prêt au pays de 240 millions d’euros ainsi que des prêts spécifiques.
Pour répondre très précisément à votre question, nous allons poursuivre cet effort de solidarité. Si vous ne le savez pas déjà, le président Fritch, lui, le sait : nous envisageons un nouveau prêt pour le pays. Il faut documenter les besoins en trésorerie de la Polynésie française, afin de les évaluer précisément.
En parallèle, M. le Premier ministre s’y est engagé devant vous et devant une délégation polynésienne, et je m’y suis engagé moi-même, la convention relative à la santé et à la solidarité sera efficace et effective. C’est le cas pour 2020, ce le sera également pour 2021. Si vous n’en trouvez pas trace dans la mission « Plan de relance », c’est parce que ces sommes figurent au programme 123, dont le Sénat débattra dans quelques jours.
Nous poursuivrons donc bien l’effort de solidarité engagé au mois de mars dernier. Il n’y a aucune raison d’en douter, madame la sénatrice, et le président Fritch le sait.
Enfin, vous m’interrogez sur les compétences et me demandez si l’autonomie n’empêche pas la solidarité. Les situations de crise et d’urgence sont un enjeu tout à fait spécifique. C’est peut-être une réflexion dont le Sénat peut s’emparer, y compris en se penchant sur les questions de fiscalité, car de telles interventions, notamment l’accompagnement des entreprises, renvoient à la question fiscale. En tout cas, nous sommes prêts à répondre à vos attentes et à vos questions sur ces sujets ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme Lana Tetuanui, pour la réplique.
Mme Lana Tetuanui. Monsieur le ministre, reconnaissez que l’on s’y perd parfois un peu. Entre les paroles et les actes, il y a tout de même une différence ! (Applaudissements sur des travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à M. Laurent Burgoa, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. Laurent Burgoa. Ma question s’adresse à Mme le ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.
Madame le ministre, jusqu’à présent, malgré les pétitions de principe réitérées comme pour conjurer la réalité vécue sur le terrain par les élus locaux, la crise du covid a été le triomphe du jacobinisme.
C’est à Paris que tout se décide, un point c’est tout.
M. François Patriat. Encore ?
M. Laurent Burgoa. Cette vision totalement verticale du pouvoir a conduit un grand journal allemand à renommer la France l’« Absurdistan ».
M. Julien Bargeton. Oh !
M. Laurent Burgoa. Ces dernières heures, le rythme s’est même accéléré. Hier, le Président de la République déclare que trente personnes pourront participer aux offices religieux et, pas plus tard que ce matin, nous apprenons que vous revenez déjà sur cette annonce. (M. David Assouline s’exclame.)
Une telle absurdité ne se serait pas produite si vous aviez laissé les autorités locales – maires et préfets – adapter les mesures en fonction de leur territoire.
Plusieurs sénateurs du groupe Les Républicains. Eh oui !
M. Laurent Burgoa. La période peu glorieuse de pénurie de masques a pourtant montré que la proximité trouvait des solutions là où l’hypercentralisation restait impuissante.
Pour être efficace, la lutte contre la pandémie aurait dû et doit être menée en lien étroit avec les maires. Les Premiers ministres qui se sont succédé en ont fait des éléments de discours, mais le couple préfet-maire n’a jamais eu les moyens de fonctionner réellement.
M. Laurent Burgoa. Le Président de la République l’a redit hier, comme si la crise ne faisait que commencer : le couple préfet-maire, c’est la solution. En réalité, il n’y a jamais eu coconstruction et les maires sont souvent considérés comme des exécutants sans marge de manœuvre.
M. François Patriat. Ce n’est pas vrai !
M. Laurent Burgoa. Une étude récente, réalisée en partenariat avec l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité (AMF), a d’ailleurs montré qu’une majorité de maires dressaient un constat négatif de leur relation avec l’État.
Madame le ministre, vous êtes chargée des relations avec les collectivités locales : comment expliquez-vous ces résultats ? Comment comptez-vous faire en sorte que les maires soient pleinement associés aux décisions qui concernent leur territoire, qu’ils connaissent mieux que personne ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.
Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales. Monsieur le sénateur Laurent Burgoa, commençons par le commencement : nous sommes en pleine crise sanitaire et, vous le savez, c’est l’État qui est responsable. C’est lui qui gère la crise sanitaire sur le territoire. Même M. Baroin ne cesse de le répéter au fil de ses déclarations. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Ensuite, en matière de sondages, je n’ai pas les mêmes sources que vous. Pour ma part, j’ai lu un excellent petit papier publié par l’Association des maires de France – elle aurait dû tenir son congrès aujourd’hui, mais ce n’est bien sûr pas possible.
M. Roger Karoutchi. Ah, ça…
Mme Jacqueline Gourault, ministre. L’AMF a confié un sondage d’opinion au centre de recherches politiques de Sciences Po (Cevipof).
Mme Françoise Gatel. Exactement !
Mme Jacqueline Gourault, ministre. À la question « Êtes-vous content de votre relation avec votre préfet ? », 68 % des maires – je cite de mémoire, mais je ne crois pas me tromper – se déclarent satisfaits de leur relation avec leur préfet ; j’ajoute bien sûr les sous-préfets, car il faut considérer le corps préfectoral dans son ensemble.
Enfin, c’est le Premier ministre qui a mis en avant le couple préfet-maire, et pour cause ! Les politiques publiques menées dans les territoires n’auraient aucune efficacité sans cette alliance. Elle est absolument indispensable dans de nombreux domaines, a fortiori face à la crise sanitaire.
Tous les jours, je suis en relation avec les préfets et avec les élus locaux. Tous les jours, je mène des concertations avec toutes les strates de collectivités territoriales. Hier encore, nous avons discuté des tests antigéniques, actuellement développés dans les territoires grâce au partenariat des maires et des préfets, car il n’y a pas d’autre solution.
Monsieur le sénateur, vos critiques sont donc tout à fait fausses : la concertation existe et l’action dans les territoires existe ! (Protestations sur des travées du groupe Les Républicains.)
précarité des étudiants
M. le président. La parole est à M. Rémi Cardon, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Rémi Cardon. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.
Le président des Restos du cœur, Patrice Blanc, s’est dit bouleversé par l’image de jeunes « arrivant aux Restos du cœur avec leur tenue Uber Eats. Ils apportent à manger, mais n’ont pas de quoi manger pour eux ».
Monsieur le Premier ministre, je tenais à vous parler d’un sujet qui me tient à cœur, qui nous tient à cœur, qui engage notre pays et son avenir : la situation de notre jeunesse.
La crise de la covid-19 a encore dégradé les conditions de vie des jeunes.
Le chômage des actifs de moins de 25 ans a bondi et pourrait dépasser les 30 % d’ici à la fin de l’année. Un jeune de moins de 25 ans sur cinq vit sous le seuil de pauvreté. Les épiceries sociales sont débordées. Les soins médicaux sont un luxe pour nombre d’entre eux.
Cette génération, qui consent tous les sacrifices, souffre terriblement. Elle ne connaîtra en retour qu’un marché de l’emploi très difficile, voire inaccessible. Pourtant, les jeunes bénéficient moins des mesures de solidarité et sont exclus des principaux dispositifs de lutte contre la pauvreté, comme le revenu de solidarité active (RSA).
La France tourne-t-elle le dos à sa jeunesse ? Je vous pose la question.
Votre plan Jeunes, modeste compilation de vieilles recettes, n’apporte que peu de réponses à cette urgence.
Est-ce la bonne démarche ? L’horizon proposé à la jeunesse ne peut pas se résumer à l’emploi. Il est temps de repenser les politiques publiques en faveur de la jeunesse dans une approche globale et transversale. Il est temps de considérer les jeunes comme une chance, comme le socle de notre avenir et non seulement comme des victimes ou comme une menace.
Face à la violence de la situation actuelle, qui frappe encore plus durement les jeunes, comment allez-vous répondre à l’urgence et redonner un avenir à notre jeunesse ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation.
Mme Frédérique Vidal, ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation. Monsieur le sénateur Cardon, la précarité de la jeunesse est une réalité. La nier ou la sous-estimer serait une erreur. S’y résigner serait une erreur plus grave encore. C’est pourquoi, depuis le début de cette crise, le Gouvernement actionne de très nombreux leviers, notamment pour soutenir les étudiants.
Ainsi, pendant le premier confinement, plus de 19 millions d’euros ont été dédiés aux étudiants les plus précaires sous forme d’aides numériques, alimentaires ou encore sanitaires, en particulier en faveur des jeunes femmes.
Les centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires (Crous) ont assuré un accompagnement remarquable, à l’instar des établissements. Nous avons également mis en place un ensemble de mesures, comme le versement de 200 euros pour tous ceux qui avaient perdu leur job étudiant ou la prolongation des bourses sur critères sociaux pour ceux dont les examens avaient été retardés.
Alors que nous connaissons un deuxième confinement, le Premier ministre a annoncé un plan inédit, intitulé « 1 jeune, 1 solution ».
Nous y avons travaillé en interministériel. Il permet notamment aux entreprises de maintenir l’apprentissage. En 2020, les résultats obtenus en la matière seront finalement meilleurs qu’en 2019, qui était déjà une année exceptionnelle pour l’apprentissage.
Ce plan, c’est l’aide à l’embauche des jeunes par les entreprises au travers d’un soutien aux premiers contrats de travail. C’est aussi un versement de 150 euros à chaque étudiant boursier et à chaque jeune bénéficiaire des aides personnalisées au logement (APL), qui sera effectué dans quelques jours. C’est le ticket de restaurant universitaire à 1 euro, grâce, une nouvelle fois, à la mobilisation exceptionnelle des Crous : ces centres prennent les commandes des jeunes et font en sorte qu’ils aient des repas équilibrés, faciles à réchauffer. Ils leur fournissent même plusieurs repas à la fois pour leur éviter de se déplacer plusieurs fois par jour.
Oui, la précarité est une réalité. Elle dure depuis longtemps. Nous travaillons pour y faire face et nous proposons des solutions globales, en lien avec toutes les associations ! (M. François Patriat applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Rémi Cardon, pour la réplique.
M. Rémi Cardon. Madame la ministre, le plan « 1 jeune, 1 solution » ne répond pas à l’urgence et reste largement sous-dimensionné.
Toutefois, vous aurez une occasion de vous rattraper : les élus du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain vous donnent rendez-vous dans quelques semaines pour l’examen de leur proposition de loi relative aux droits nouveaux dès 18 ans. Ils y défendent une perspective universelle et plus structurelle, avec le projet d’aide individuelle à l’émancipation ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
conséquences psychologiques de la crise sur les étudiants
M. le président. La parole est à M. Stéphane Piednoir, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. Stéphane Piednoir. Ma question s’adresse à Mme la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation.
Madame la ministre, alors que nous sommes encore au cœur de la deuxième vague de covid-19, c’est une véritable lame de fond, aux effets potentiels sévères, qui est en train de se former. L’enjeu, c’est la santé des Français, en particulier celle des jeunes.
Après une dernière année de lycée largement tronquée, les nouveaux étudiants abordent le virage important de l’entrée dans les études supérieures dans des conditions extrêmement dégradées.
M. Roger Karoutchi. Eh oui !
M. Stéphane Piednoir. L’absence de cours en présentiel, qui devrait durer deux mois encore, accroît considérablement la durée d’exposition aux écrans. Celle-ci dépasse parfois les dix heures par jour. Elle va de pair avec une inactivité physique qui interroge, alors même que, dans un récent avis, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) alerte les pouvoirs publics sur les risques sanitaires inhérents à ce type de comportements.
Mauvaises habitudes alimentaires, obésité, anxiété, troubles du sommeil : toutes ces conséquences sont bien identifiées. Aujourd’hui, un certain nombre d’étudiants avouent être en situation de fragilité psychologique du fait d’une brutale rupture sociale. Ils ont quitté depuis peu un cocon familial protecteur et n’ont pas encore eu le temps de construire un réseau d’amis dans leur nouvel environnement.
D’ailleurs, les services de santé universitaires (SSU) donnent l’alerte. En cette période propice au décrochage, entre la Toussaint et Noël, ils reçoivent de fréquents appels à l’aide ; un accompagnement psychologique de proximité est nécessaire. Malheureusement, celui-ci n’existe que rarement sur le terrain.
Certes, le Premier ministre a annoncé récemment le déploiement de 1 600 emplois étudiants dans les cités universitaires, mais, par définition, seuls sont concernés les résidents de ces structures, soit seulement 7 % des étudiants.
Madame la ministre, que prévoyez-vous de faire pour les 93 % restants ? (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation.
Mme Frédérique Vidal, ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation. Monsieur le sénateur Piednoir, vous soulevez vous aussi une question d’une grande importance, y compris pour l’avenir de notre pays.
Si les jeunes vivent eux aussi cette crise et sont soumis à ses aléas psychologiques, comme l’ensemble de la population, les effets de celle-ci sont parfois plus graves sur eux, car ils sont en train de se construire. C’est aussi un risque pour notre avenir ; il y va de leur confiance en notre pays et dans la société en général. Celle-ci doit être en mesure de les accompagner.
C’est pourquoi plusieurs dispositifs ont été mis en place.
Vous évoquez les 1 600 étudiants référents dans les cités universitaires : 600 d’entre eux sont déjà au travail et 400 sont en cours de recrutement. En l’espace de trois semaines, ces 1 600 emplois seront pourvus.
De surcroît, les établissements d’enseignement supérieur ont recruté 30 000 tuteurs pour accompagner les jeunes qui – vous le soulignez vous-même – ont pu connaître une fin de terminale compliquée et dont les débuts dans l’enseignement supérieur sont tout aussi compliqués.
En réalité, la difficulté, c’est de convaincre les étudiants de l’importance de la prévention. Ils ont parfois tendance à l’oublier, tant ils se sentent jeunes et en bonne santé.
Depuis plus de trois ans, nous menons un travail de fond avec le ministère des solidarités et de la santé au sujet de la prévention, sous toutes ses formes. Je pense notamment à la santé mentale.
Il faut que les jeunes osent dire qu’ils ne vont pas bien. Or ils ne le disent jamais mieux qu’à d’autres jeunes. C’est pourquoi nous avons mis en place les services sanitaires : ces équipes pluridisciplinaires composées d’étudiants en santé peuvent aller à la rencontre de ces jeunes. C’est pourquoi les SSU sont à pied d’œuvre. C’est pourquoi plus de trente-six maisons de santé ont été ouvertes au sein des universités : ainsi, les jeunes disposent de relais auprès d’autres jeunes afin d’être dirigés vers des professionnels de santé.
Une nouvelle fois, je tiens à saluer le travail mené par les SSU, par les associations, par les bénévoles, par tous ceux qui nous permettent de donner un avenir à notre jeunesse ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Stéphane Piednoir, pour la réplique.
M. Stéphane Piednoir. Madame la ministre, nous dressons le même constat au sujet de l’isolement et de la fragilité des étudiants. J’entends qu’ils s’ouvrent plus volontiers à des jeunes du même âge.
Néanmoins, notre enseignement supérieur souffre d’un manque de moyens humains. Ainsi, la France compte 1 psychologue pour 30 000 étudiants, alors que le ratio est de 1 pour 4 000 dans d’autres pays. Il est peut-être temps de s’interroger sur ces sujets ! (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
évacuation de la zad du carnet
M. le président. La parole est à Mme Laurence Garnier, pour le groupe Les Républicains, dont je salue la première intervention en séance publique comme sénatrice de la Loire-Atlantique ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Laurence Garnier. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.
Monsieur le Premier ministre, voilà plusieurs semaines, une zone de non-droit s’est installée en Loire-Atlantique, sur le site du Carnet, que des dizaines de « zadistes » occupent illégalement. Ces derniers ont détérioré la route départementale et construit des barricades pour contester un projet de développement du grand port maritime de Nantes-Saint-Nazaire.
M. François Bonhomme. Eh oui !
M. Roger Karoutchi. Eh voilà !
Mme Laurence Garnier. Ce projet consiste en l’installation d’entreprises écotechnologiques sur 110 hectares, près de 300 hectares étant par ailleurs préservés dans le cadre de la compensation écologique. Vous le voyez, monsieur le Premier ministre, sur ce dossier, les enjeux sont clairs : il s’agit du développement économique du pays et de la restauration de l’autorité de l’État.
Malheureusement, en Loire-Atlantique, nous connaissons bien les zones à défendre (ZAD). En effet, en 2018, Emmanuel Macron a déjà donné raison aux zadistes et aux ultra-violents, en renonçant au projet de Notre-Dame-des-Landes, projet pourtant soutenu par de nombreux élus locaux et validé par un référendum local et par 200 décisions de justice. (M. François Bonhomme s’exclame.)
Aujourd’hui, les élus du territoire sont démunis, monsieur le Premier ministre. Ils ont demandé à vos services si des poursuites avaient été engagées contre les manifestations non déclarées de ces derniers mois. Il leur a été répondu que les services de l’État étaient seuls juges pour engager ou non des poursuites.
Monsieur le Premier ministre, l’État ne doit plus jamais céder devant l’illégalité et la violence. Ma question est donc claire : quand allez-vous évacuer la ZAD du Carnet ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué auprès de la ministre de la transition écologique, chargé des transports. Madame la sénatrice Garnier, vous interrogez le Gouvernement sur l’aménagement du site du Carnet, qui fait partie des emprises du grand port maritime de Nantes-Saint-Nazaire.
Ce projet a été instruit selon la procédure d’autorisation environnementale unique, dite loi sur l’eau. Il a fait l’objet, vous le savez, d’un arrêté préfectoral d’autorisation environnementale, lequel a été purgé de tout recours.
Vous l’avez rappelé, ce projet répond à des raisons impératives d’intérêt public, notamment le développement des énergies marines renouvelables. Un comité de suivi a été mis en place, au mois de décembre 2017, pour suivre l’évolution des travaux.
Le collectif Stop Carnet mène une contestation contre ce projet d’aménagement. Il a déjà organisé plusieurs manifestations, qui ont réuni entre 20 et 200 personnes. À ce jour, une trentaine de personnes restent sur le site du Carnet.
Un moratoire d’une année a été annoncé le 4 novembre dernier par le grand port maritime, afin de compléter les études déjà réalisées, sans lever l’occupation du site. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle le bailleur a, à juste raison, déposé plainte pour violation de domicile. Le Gouvernement appelle au respect du moratoire, de manière à ce que les freins et les doutes sur le projet soient levés et que celui-ci puisse se dérouler de façon cohérente, dans le respect de l’ordre public. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. François Bonhomme. Il n’a rien dit !
M. le président. La parole est à Mme Laurence Garnier, pour la réplique.
Mme Laurence Garnier. Monsieur le ministre, je suis assez surprise que ce soit vous qui répondiez à cette question, alors que vous êtes ministre délégué chargé des transports.
Mme Laurence Garnier. J’aurais préféré que le Premier ministre, qui a réaffirmé précédemment avec force l’autorité de l’État sur le camp de migrants évacué à Paris, fasse de même concernant ce dossier, devant les sénateurs.
L’indignation à géométrie variable, c’est trop facile ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d’actualité au Gouvernement.
Je salue ceux de nos collègues qui ont accepté d’assister à cette séance depuis les tribunes.
Je vous rappelle que les prochaines questions d’actualité au Gouvernement auront lieu le mercredi 9 décembre 2020, à quinze heures.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures vingt, est reprise à seize heures trente.)
M. le président. La séance est reprise.
4
Nécessité de reconnaître la République du Haut-Karabagh
Adoption d’une proposition de résolution
M. le président. L’ordre du jour appelle l’examen de la proposition de résolution, en application de l’article 34-1 de la Constitution, portant sur la nécessité de reconnaître la République du Haut-Karabagh, présentée par MM. Bruno Retailleau, Patrick Kanner, Hervé Marseille, Mme Éliane Assassi et M. Guillaume Gontard (proposition n° 145).
Dans la discussion générale, la parole est à M. Bruno Retailleau, coauteur de la proposition de résolution. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Bruno Retailleau, coauteur de la proposition de résolution. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, cette résolution n’est pas banale et elle est fondamentale ; la preuve : elle échappe à la géographie politique traditionnelle, puisqu’elle a été cosignée par cinq présidents de groupe de la Haute Assemblée, issus de la droite, du centre et de la gauche. Cela signifie que l’enjeu qu’elle représente dépasse nos clivages traditionnels, routiniers, et qu’elle touche à ce que nous avons en commun.
Ce que nous avons en commun, sur toutes les travées, c’est l’idée que nous nous faisons de la France et de son rôle, un rôle singulier : cette exigence française qui consiste à prendre soin du monde, à avoir le souci du monde. J’en ai la conviction et je le clame du fond du cœur, ce qui se passe là-bas nous concerne ici. Le conflit du Haut-Karabagh n’est pas un conflit local et nous devons prendre position.
Ainsi, au nom tant de ses intérêts que de ses convictions et de ses valeurs, la République française s’honorerait, monsieur le secrétaire d’État, en reconnaissant rapidement la République du Haut-Karabagh.
Cela correspond à nos intérêts, tout d’abord, parce que – ne nous cachons pas derrière notre petit doigt diplomatique –, si ce conflit a une dimension tout autre que locale, c’est en raison de l’implication, de la participation décisive et massive de la Turquie de M. Erdogan, au nom de sa politique expansionniste, néo-ottomane et, disons-le franchement, nationale-islamiste.
Cette politique est une menace, ici et ailleurs dans le monde, contre la paix et contre nos intérêts, car c’est bien ce régime qui a armé le bras azéri. C’est lui aussi qui attise, dans un certain nombre de régions, les conflits régionaux, des déserts de Libye aux montagnes et aux plateaux du Caucase. Bien entendu, c’est encore lui qui menace la stabilité au cœur même de l’Europe, à Chypre et dans les eaux territoriales grecques. Et qui a armé le bras des djihadistes, si ce n’est ce régime ? Qui a fait venir ces djihadistes de Syrie, qui ont décapité là-bas comme ils l’ont fait ici ?
C’est au nom d’une politique d’expansion islamiste que M. Erdogan a justifié l’engagement de son régime, de son pays. Je cite fidèlement ses propos : « Le Haut-Karabagh est redevenu un pays de l’islam, il a repris sa place à l’ombre du croissant. »
Les motivations de ce genre de personnage sont souvent transparentes, mais l’histoire nous enseigne aussi que ces individus ne connaissent qu’une seule limite : le rapport de force. Combien d’agressions faudra-t-il pour que l’Europe sorte de sa torpeur et applique enfin de véritables sanctions diplomatiques et surtout économiques ? Encore combien de provocations nous faudra-t-il pour que nous sortions de notre naïveté ? Le président de notre commission des affaires étrangères, Christian Cambon, nous l’a appris, voilà quelques semaines, l’Agence française de développement a prêté, depuis une dizaine d’années, 4 milliards d’euros à la Turquie afin, notamment, de préparer son entrée en Europe. Franchement, de qui se moque-t-on ?
Mme Valérie Boyer. Bravo !
M. Bruno Retailleau, coauteur de la proposition de résolution. Monsieur le secrétaire d’État, ne prenez pas notre initiative pour une démarche hostile à l’égard du Gouvernement, car j’ai apprécié les dernières initiatives du Président de la République, Emmanuel Macron. Nous les soutenons ; c’est un début, mais nous les soutenons. Je considère d’ailleurs que le Président de la République a relevé l’honneur perdu du groupe de Minsk.
Ensuite, si défendre le Haut-Karabagh, mes chers amis, revient à défendre – outre l’Arménie, évidemment – nos intérêts, cela revient également à défendre nos valeurs, car celles-ci ont été piétinées par l’utilisation d’armes de guerre interdites, par des exactions commises contre la population, par des amputations et par la mort de civils, femmes, enfants, vieillards confondus.
C’est la raison pour laquelle nous demandons, dans notre résolution, l’ouverture d’une commission d’enquête internationale sur ces crimes de guerre. Nous demandons également un soutien massif de la France envers les populations déplacées – provisoirement, je l’espère – et la protection, par l’Unesco (Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture), du patrimoine, qui n’est pas seulement arménien ; c’est un patrimoine commun de l’humanité.
Ensemble, nous pensons que la France ne peut pas détourner le regard sans tourner le dos à la vieille amitié qui nous lie à l’Arménie, car c’est bien de l’Arménie qu’il s’agit désormais. Quand le président azéri traite les habitants du Haut-Karabagh de « chiens », il traite tout autant les Arméniens de chiens ! Or, mes chers collègues, lorsque l’on dénie la dignité d’être humain à une population, où cela s’arrête-t-il ? L’Arménie vit également avec cette épée de Damoclès, le corridor qui la transperce de part en part, dans le sud, de son flanc est à son flanc ouest, entre le Nakhitchevan et l’Azerbaïdjan.
Trahir l’Arménie, ce serait nous trahir nous-mêmes et trahir un lien précieux, singulier, multiforme et multiséculaire, qui remonte au fond des âges, au Moyen Âge. Cette amitié est ancienne, elle n’a jamais été démentie, elle a toujours été renouvelée. C’est cette amitié qui a permis à nos parents de recevoir les survivants, les rescapés du génocide de 1915. Ces derniers ont trouvé en France, non seulement un refuge, mais encore un foyer, leur foyer, et ils nous l’ont rendu au centuple, car ce lien multiséculaire est également, je l’indiquais, multiforme ; il prend le visage familier, français, de tant de nos compatriotes. Je pense bien entendu à Patrick Devedjian, à Charles Aznavour, à Missak Manouchian, mort et enterré au Mont-Valérien. Cela devrait parler à nos cœurs de Français.
Tous ceux-là ont montré ce qu’était le modèle français, ils nous l’ont révélé, ils ont démontré que l’on pouvait conjuguer l’amour de la grande patrie française avec l’amour, comme aurait dit Péguy, de la petite patrie charnelle arménienne. Ils ont montré que la République ne leur demandait pas d’abdiquer ce qu’ils étaient et que l’on pouvait être complètement Français sans rien renier de ses racines.
Je terminerai en vous disant, mes chers collègues, que, sur la carte du monde des grandes souffrances humaines, le peuple arménien occupe une place particulière. Un écrivain français – Sylvain Tesson – le disait : « Les Arméniens parlent du fond d’une tombe. » Or ce peuple, avec lequel nous entretenons des liens d’affection et de civilisation, ce petit peuple, comme l’a dit un jour, à Damas, le général de Gaulle, riche de culture et d’histoire, a beaucoup donné pour l’humanité et cette dette de l’humanité, c’est à nous, Français, à nous, le Sénat de la République française, de l’assumer aujourd’hui, en votant cette résolution.
Voilà près de vingt ans, la France fut la première des nations du monde à reconnaître le génocide arménien. Aujourd’hui, le Sénat de la République française doit demander la reconnaissance de la République du Haut-Karabagh. (Applaudissements prolongés sur toutes les travées, sauf sur celles du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Christian Cambon. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Christian Cambon. Monsieur le président, madame, messieurs les présidents des groupes auteurs de cette proposition de résolution, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, au centre d’Erevan, il existe une grande place, connue de tous les Arméniens. Dans ce pays lointain, cette place porte un nom : c’est la place de France, symbole parmi tant d’autres de l’attachement indéfectible qui unit nos deux pays. Aujourd’hui, c’est par le symbole d’une résolution – procédure rarement utilisée – quasi unanime que le Sénat affiche ce même symbole d’amitié et de solidarité avec le peuple arménien, plongé une fois encore dans la tragédie.
Mes chers collègues, qu’a fait la France, une amie de l’Arménie depuis des siècles, pour éviter ce drame ? Et que faut-il faire maintenant pour assurer leurs droits aux Arméniens et leur rendre un peu d’espoir ?
Dans ce conflit du Haut-Karabagh, cœur spirituel et historique de l’Arménie, la France devait, certes, utiliser sa position de médiateur entre les parties. Mais, avec l’escalade de la violence, cette posture nous a menés dans l’impasse et condamnés à l’impuissance. Malgré la violation de trois cessez-le-feu, l’avancée des forces azéries n’a donné lieu qu’à de bien molles protestations.
Des crimes de guerre ont été commis : bombardements de civils, utilisation de bombes à sous-munitions, exécutions filmées de prisonniers de guerre. Pour notre part, nous appelions à la retenue… Le cessez-le-feu a figé une solution militaire imposée par la force par les armes azéries, équipées et encouragées par la Turquie. Nous n’avons pas même été prévenus… Après les multiples agressions turques en Méditerranée orientale et en Libye, nous savions pourtant que la Turquie ne s’arrêterait pas là ! Mais qu’avons-nous fait, à part des déclarations convenues ?
Alors qu’un nouveau partenariat stratégique avec la Russie était né du discours de l’Élysée de 2019, n’était-ce pas justement le moment d’influer sur la Russie, qui aura joué, elle aussi, un rôle ambigu, consolidant son influence dans la région, mais laissant au passage des djihadistes s’installer sur son flanc sud ?
Enfin, qu’a fait l’Europe ? Inexistante, écartelée par ses divisions internes et par ses intérêts divergents, elle a une fois de plus montré qu’elle n’était pas vraiment une puissance politique.
Ces multiples renoncements sont lourds de conséquences. De nouveau, l’usage de la force a conduit à faire voler en éclats, aux confins de l’Europe, des frontières que seule la négociation pouvait fixer.
L’Occident et ses valeurs sont une fois de plus marginalisés. L’accord du 9 novembre est, au fond, un deuxième Astana, avec une Russie et une Turquie qui préfèrent accorder leurs intérêts sans plus s’occuper du droit international et des valeurs que, nous, nous portons. Voilà les fruits de l’inaction au Haut-Karabagh !
Monsieur le secrétaire d’État, que faut-il faire maintenant ? Cette résolution, largement soutenue par le Sénat, ne cherche pas à porter condamnation du Gouvernement, car chacun connaît les racines profondes et anciennes de ce conflit, qui n’avait de gelé que le nom. Il faut, au contraire, que cet engagement du Sénat soit, pour le Gouvernement, un outil, une aide, un levier supplémentaire pour aller vers un règlement politique durable du conflit.
Nous devons maintenant veiller à la mise en œuvre de bonne foi de ce cessez-le-feu.
Par ailleurs, la France accueille le siège de l’Unesco : il faut donc assurer sans tarder la protection d’un inestimable patrimoine culturel et religieux.
Le Gouvernement doit exiger le départ des combattants djihadistes : la Russie ne peut laisser les Turcs créer en toute impunité une zone de terrorisme islamiste sur ses flancs sud.
Les crimes de guerre avérés doivent être identifiés et punis. L’aide humanitaire fournie par notre pays aux populations civiles arméniennes a trop tardé ; elle doit maintenant leur être adressée de manière massive. Vous devez réanimer le groupe de Minsk, qui doit devenir l’enceinte d’une véritable négociation sur le statut du Haut-Karabagh à long terme.
S’agissant de la Turquie, l’heure des clarifications est passée. Nous pensons, comme M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, qui vient de faire une déclaration en ce sens, qu’il faut maintenant passer à l’action. Passez à l’action, monsieur le secrétaire d’État !
Faites-le tout d’abord au Conseil de l’Atlantique Nord. La réflexion stratégique sur le rôle de l’OTAN qu’a engagée le Président de la République doit être un exercice ambitieux, et non produire un discours creux, conservateur, consensuel et parfois autosatisfait. La dimension politique de la réforme est essentielle. La seule question qu’il convient de se poser est la suivante : la Turquie est-elle encore un allié au sein de l’Alliance ?
Passez ensuite à l’action au Conseil européen : si, d’ici à sa réunion de décembre, soit dans quelques jours, aucun signe d’apaisement tangible ne nous est adressé, la question des sanctions et pourquoi pas de la suspension de l’union douanière doit être posée et discutée avec nos partenaires européens. Sur ce sujet, le Sénat invite le Gouvernement à l’action et à la fermeté.
Enfin, en vous demandant aujourd’hui de reconnaître la République du Haut-Karabagh, le Sénat vous envoie un signe fort pour que la France prenne ses responsabilités devant l’Histoire, parce que la guerre menée par l’Azerbaïdjan avec le soutien de la Turquie ne nous laisse malheureusement plus d’autre choix.
Monsieur le secrétaire d’État, nous le savons tous, l’histoire de l’Arménie est ponctuée de tragédies. Pourtant, quand il l’a fallu, l’Arménie a su consentir au sacrifice de ses enfants pour être à nos côtés dans tous les combats pour la liberté. Mes chers collègues, il nous appartient aujourd’hui de rendre à l’Arménie le témoignage de sa fidélité ! (Applaudissements sur toutes les travées, sauf celles du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Joël Guerriau. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
M. Joël Guerriau. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, durant six semaines, le Haut-Karabagh, majoritairement peuplé d’Arméniens, au sein du territoire de l’Azerbaïdjan, a une nouvelle fois été l’objet d’affrontements. Ce conflit, qui remonte à plus d’un siècle, n’a jamais été résolu.
Comment imaginer qu’au XXIe siècle on puisse encore se livrer à des exactions abjectes contre des êtres humains ? Le conflit récent au Haut-Karabagh a donné lieu à des vidéos et à des photos, qui circulent sur les réseaux sociaux, montrant des atteintes à la dignité humaine. Les criminels eux-mêmes en ont assuré la diffusion et fait la publicité. Ces actes barbares illustrent de manière terrifiante la prégnance d’une haine ethnique, tout comme le choix du commandement militaire de bombarder massivement des zones d’habitations civiles.
En préambule à toute négociation, il est pour nous primordial que les militaires qui commettent de tels actes de barbarie soient jugés et condamnés sévèrement par le pays dont ils portent l’uniforme. Le gouvernement qui procédera de la sorte gagnera en légitimité en démontrant ainsi qu’il ne couvre pas et n’encourage pas des faits aussi inadmissibles.
Si le droit international est bafoué par des actes de guerre et de violence, la France a le devoir de réagir. Le recours à la force est inacceptable. Il appartient à l’ONU de faire respecter ce principe fondateur de nos relations internationales.
Il nous paraît essentiel que soit ouverte une enquête sur les manquements graves qui ont été commis dans le conflit qui vient de s’achever, comme l’usage d’armes contre des civils. De même, la destruction, le pillage et la profanation du patrimoine historique et religieux doivent conduire à la condamnation des auteurs de ces actes inacceptables.
Ce n’est qu’à la lumière d’une enquête approfondie et détaillée que nous pourrons déterminer les responsabilités et renouer une relation de confiance. Les accords de paix qui viennent d’être signés ne peuvent en aucun cas effacer les crimes de guerre, lesquels doivent impérativement être punis. Leurs auteurs doivent être traduits en justice.
Si les canons se taisent au Haut-Karabagh, ce silence n’est pas la paix. Un accord de cessez-le-feu a été conclu sous l’autorité de la Russie. Le conflit est ainsi une nouvelle fois gelé, mais il n’est pas réglé.
La proposition de résolution que nous examinons aujourd’hui vise notamment à inviter le Gouvernement français à reconnaître la République du Haut-Karabagh. On peut s’interroger. La France est coprésidente du groupe de Minsk aux côtés de la Russie et des États-Unis. Cette fonction de médiation n’implique-t-elle pas une recherche de solution sans prendre parti ? N’est-il pas essentiel que notre pays conserve une position d’impartialité ?
Dans cette affaire comme dans les autres, ne vaut-il pas mieux éviter d’agir unilatéralement ? Ne faut-il pas, au contraire, promouvoir la négociation et le multilatéralisme ? C’est la position que la France a soutenue jusqu’à présent. Ce n’est cependant pas la position défendue par tous les acteurs. À cet égard, l’intervention unilatérale décidée par le président Erdogan n’a surpris personne : nous l’avons déjà vu agir ainsi en Méditerranée orientale, au Levant et, à présent, dans le Caucase.
La France peut-elle faire ce qu’elle reproche au président Erdogan, c’est-à-dire agir unilatéralement ? (M. Bruno Retailleau proteste.)
En même temps, comment rester neutre lorsqu’une guerre s’est déroulée quarante-cinq jours sans mobilisation de la communauté internationale ?
À cet égard, il nous semble indispensable que le respect du cessez-le-feu soit contrôlé par les Nations unies. Il est également essentiel que le retour des populations déplacées par les combats puisse se faire en toute sécurité. Seul un contrôle international peut le permettre.
La crise du Haut-Karabagh témoigne aussi du changement actuellement à l’œuvre dans les relations entre les États. Nous avons en effet connu, ces dernières années, de nombreuses remises en cause de l’ordre international. Mis à mal par le président Trump et par certains États autoritaires, le multilatéralisme est en train de s’affaiblir. La France et ses alliés doivent continuer à défendre ce modèle, parce qu’il constitue la seule alternative à la loi du plus fort.
Jusqu’ici, nos réactions aux coups de force menés par certains pays ne les ont arrêtés ni dans leurs intentions ni dans leurs actes.
Une réforme des Nations unies, si complexe soit-elle, est sans doute inévitable pour permettre à cette institution de retrouver l’efficacité qui lui fait aujourd’hui cruellement défaut. En parallèle et sans attendre, la France et ses partenaires européens doivent se donner les moyens d’agir autrement que par la seule indignation. C’est tout le sens de cette résolution. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP, ainsi que sur des travées des groupes RDSE et UC.)
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard.
M. Guillaume Gontard. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, rassemblant diverses initiatives, la majorité sénatoriale a soumis à tous les groupes politiques la présente proposition de résolution portant sur la nécessité de reconnaître la République du Haut-Karabagh. Je me félicite de ce compromis transpartisan.
Pour autant, si j’ai accepté de signer ce texte, au nom du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, ce n’est pas sans réserve.
La principale est une vision très différente du conflit de celle que le président Bruno Retailleau vient d’exposer. Dans le Caucase, à la jonction de l’Europe, de la Russie et du Moyen-Orient, la situation géopolitique semble infiniment plus complexe que l’opposition entre chrétiens et musulmans qui transparaît trop souvent dans le discours de la majorité sénatoriale. (Marques d’ironie sur les travées du groupe Les Républicains.) Le conflit larvé qui oppose, depuis la chute de l’URSS, l’Arménie et l’Azerbaïdjan dans le Haut-Karabagh a de nombreuses ramifications historiques, géographiques, stratégiques, géopolitiques, mais n’en a pas de religieuses – ou en a peu. C’est avant tout un conflit territorial, induit par un dessin des frontières hasardeux, datant de la période soviétique et impliquant de près ou de loin les grandes puissances régionales que sont la Turquie, l’Iran et la Russie.
L’Azerbaïdjan, appuyé par la Turquie, a profité d’une situation internationale confuse – pandémie, élections américaines – pour reprendre, par les armes, les territoires qu’il avait perdus en 1994. Rappelons que trois résolutions de l’ONU demandaient que ces territoires lui soient rendus.
Ils ont été reconquis au prix d’une guerre violente, qui a vraisemblablement vu l’utilisation d’armes non conventionnelles par les deux belligérants, tué plus de 4 000 personnes et provoqué le départ de plus de 100 000 réfugiés. Nous condamnons sans réserve cette agression contre le peuple arménien.
À l’issue du cessez-le-feu du 10 novembre, la priorité est de protéger les populations.
Il faut protéger les réfugiés, en permettant le retour de celles et ceux qui le souhaitent, et favoriser l’accueil des autres. L’aide humanitaire doit se déployer pour permettre cet accueil et accélérer la reconstruction des zones sinistrées.
Il faut protéger les populations arméniennes qui passent sous contrôle azéri, en renforçant, au-delà de la Russie, le dispositif de maintien de la paix au Haut-Karabagh. À ce sujet, la sécurisation du corridor de Latchine est fondamentale pour permettre les liens et les échanges de populations entre l’Arménie et le Haut-Karabagh. Les mercenaires syriens doivent être renvoyés chez eux sans délai. La communauté internationale doit, enfin, veiller à la protection du patrimoine culturel arménien.
Il convient également de diligenter une enquête internationale pour clarifier l’utilisation d’armes non conventionnelles par l’un ou l’autre des deux belligérants et envisager les sanctions nécessaires.
Alors que les États-Unis sont paralysés par leur transition présidentielle, la France doit relancer le groupe de Minsk. Opposé au régime arménien issu de la révolution de 2018, qui tente de s’affranchir de sa tutelle, Moscou joue un double jeu et ne peut rester le seul arbitre du conflit, d’autant que la stabilité de la région représente un défi à long terme, car la volonté à peine voilée de la Turquie et de l’Azerbaïdjan de se doter d’une frontière commune, au détriment du sud de l’Arménie, ne s’est pas estompée avec le cessez-le-feu.
Aussi, la question du statut du Haut-Karabagh est primordiale. La république, autonome depuis 1991, mais pas reconnue, est majoritairement peuplée de populations arméniennes. Depuis 1994, elle vivait en bon voisinage avec l’Arménie, qui la reconnaissait en fait, mais pas en droit.
Alors que le territoire du Haut-Karabagh a été partiellement conquis par l’Azerbaïdjan, qui l’encercle désormais complètement, la pérennité de cette situation semble particulièrement compromise. La volonté de l’Azerbaïdjan de reconquérir, à terme, l’ensemble de son ancien territoire n’est pas à exclure. L’ambassadeur, que nous avons auditionné hier, n’a pas levé nos inquiétudes. La question du statut du Haut-Karabagh est donc l’enjeu central pour garantir l’efficience du cessez-le-feu.
Les écologistes sont favorables au droit des peuples à disposer d’eux-mêmes via un processus démocratique. De ce point de vue, il aurait été préférable d’engager un processus d’autodétermination du peuple du Haut-Karabagh, pouvant éventuellement aboutir à une indépendance internationalement reconnue. Cependant, au regard de l’urgence actuelle, il nous a semblé que des mesures plus rapides s’imposaient.
Pour permettre à la France de revenir dans le jeu, dont elle semble largement absente, il nous paraît pertinent que le Gouvernement reconnaisse la République d’Artsakh et utilise cette reconnaissance comme un levier de négociation pour obtenir rapidement un statut juridique internationalement reconnu, pérenne et protecteur pour le Haut-Karabagh.
C’est une condition indispensable pour la pérennité de la paix. Aussi, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires votera en faveur de cette proposition de résolution. (Applaudissements sur les travées des groupes GEST, SER, CRCE, RDSE, UC et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Alain Richard.
M. Alain Richard. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la gravité s’impose face à un conflit meurtrier dont nous voyons désormais les conséquences : des milliers de morts, combattants et civils, des atrocités commises dans et autour des combats et des suspicions profondes de crimes de guerre.
La population arménienne du Haut-Karabagh est déplacée en masse sous la menace. L’Arménie elle-même est déstabilisée.
Cette nouvelle épreuve se place dans une histoire dramatique de l’Arménie, faite d’une succession de guerres, d’échanges forcés de territoires, d’exodes, d’attaques contre son existence même, avec le génocide de 1915. La réorganisation des frontières dont nous héritons aujourd’hui résulte de la domination soviétique.
C’est l’ensemble de ces épreuves qui a forgé l’amitié de la France avec l’Arménie, et les actions que nous avons menées en commun lors de multiples épisodes historiques nous créent aujourd’hui des devoirs.
Le Haut-Karabagh, depuis la renaissance de l’Arménie indépendante, est un territoire restreint, enclavé dans l’Azerbaïdjan, où se regroupent environ 150 000 Arméniens. Son existence n’a été garantie depuis trente ans que par la présence de forces armées arméniennes occupant aussi des zones à peuplement azéri, et sans aucun règlement politique.
Cet historique menaçant nous dit ce que doit et ce que peut faire la France. Le Haut-Karabagh a été attaqué par l’Azerbaïdjan. Il doit bénéficier d’une protection internationale.
Toutefois, regardons les faits. Cette protection part d’une base imparfaite, mais réelle : l’action de la Russie pour faire cesser les combats et pour faire appliquer un cessez-le-feu. Cette protection doit devenir stable, juridique et effective, pour assurer aux Arméniens de vivre au Haut-Karabagh dans le respect de leur culture, de leur vie démocratique et de leur foi.
Soyons tous conscients du rôle maléfique de la Turquie dans cette campagne meurtrière. Ses forces sont en cause dans les exactions criminelles qui ont été relevées. Nous devrons nous tourner vers la Cour pénale internationale pour qu’une enquête approfondie soit menée et dévoile la vérité sur l’ensemble de ces agissements.
L’attitude agressive de la Turquie d’Erdogan, sur ce terrain et sur bien d’autres, est une atteinte aggravée à la paix et aux règles internationales. Elle coïncide avec un grave échec économique et social, qui met ce dirigeant sous pression. C’est un défi majeur pour l’Union européenne, qui, par sa puissance économique et commerciale, peut contribuer à le faire rentrer dans le rang.
Gardons-nous cependant d’assimiler toute la nation turque avec ce dirigeant dévoyé. Ne nous fermons pas aux contacts avec la société turque, où les défenseurs de la liberté et des droits humains agissent pour un autre avenir.
Cette situation dramatique ne peut encourager la France à agir unilatéralement. Nous n’interviendrons pas sur la base d’un rapport de force. Notre rôle se situe dans la légalité et dans l’ordre international. Nos outils s’appellent l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), l’ONU et son conseil de sécurité, la Cour pénale internationale, l’Unesco, le groupe de Minsk. Notons que le dialogue que le Président de la République a voulu entreprendre avec la Russie, choix difficile et critiqué, trouve là son sens. Cette réalité s’impose à nous et cadre avec notre vocation internationale, qui est d’agir dans le multilatéralisme, à un moment, d’ailleurs, où celui-ci va voir son horizon s’éclaircir quelque peu à Washington.
Rappelons-nous l’épisode du conflit de Géorgie : voilà douze ans, la Géorgie attaque une enclave séparatiste protégée par la Russie, laquelle la vainc en quelques jours. Le Président de la République Nicolas Sarkozy joue alors un rôle actif et méritoire de bons offices et facilite un règlement politique. Il l’a fait en respectant le rapport de force et la réalité. (Mme Valérie Boyer le confirme.) Il n’a pas pu inverser la domination russe. Il n’empêche que le peuple géorgien lui en garde une profonde reconnaissance.
J’en viens à ce qui nous sépare de la proposition de résolution de M. Retailleau : déclarer unilatéralement une reconnaissance du Haut-Karabagh comme État indépendant, c’est-à-dire la création d’un État souverain,…
M. Pierre Ouzoulias. Il existe déjà !
M. Alain Richard. … et prétendre, ainsi, changer les frontières dans cette région traversée de conflits nous paraît porteur de difficultés supplémentaires. Un tel État ne serait viable qu’avec une garantie internationale qui, aujourd’hui, est hors de portée.
J’ai évoqué le conflit géorgien : rappelons-nous que la Russie elle-même a reconnu l’Abkhazie et l’Ossétie du Sud comme États indépendants. Cela n’a eu aucun effet en douze ans !
Au contraire, cette initiative de reconnaissance artificielle nous couperait immédiatement des partenaires qui peuvent construire avec nous une solution partagée. Il faut défendre une protection internationale du Haut-Karabagh, mais pas par cette voie. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle les autorités arméniennes ne l’ont jamais demandée depuis trente ans.
Au fond, ce débat pose la question de ce qu’est une résolution, que la Constitution se garde bien de définir. Une résolution est ce moment où le Parlement veut exprimer une volonté, fixer un objectif ; mais, si elle perd le contact avec la réalité, son autorité s’en trouve affaiblie.
Du fait de cette différence significative avec la proposition de résolution, alors que nous partageons les motivations essentielles qu’elle présente, la plupart d’entre nous s’abstiendront, en espérant que les réflexions ainsi échangées serviront l’influence collective du Sénat. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI et sur des travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Noël Guérini.
M. Jean-Noël Guérini. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, au moment où nous sommes réunis pour défendre la résolution visant à reconnaître la République du Haut-Karabagh, je ne peux oublier l’émotion qui était la nôtre voilà tout juste vingt ans – le président Retailleau l’a rappelée –, alors que la France reconnaissait le génocide arménien du 24 avril 1915.
Aujourd’hui, cette fierté est remplacée par la tristesse provoquée par le silence assourdissant de notre diplomatie, monsieur le secrétaire d’État, mis à part quelques propos.
Alors oui, c’est avec le cœur lourd que je défends devant vous ce projet de résolution. Une fois encore, une fois de plus, une fois de trop, la République d’Arménie est victime du cynisme de ses voisins. Ses soldats, sa jeunesse, ses enfants ont payé les assauts de l’Azerbaïdjan de leur sang, de leur vie.
Je regrette, monsieur le secrétaire d’État, que cette agression ait été accompagnée d’une coupable neutralité, au sens noble du terme, de notre gouvernement.
Nous entendons, bien sûr, ici et là, des voix demandant : « À quoi bon ? » À quoi bon reconnaître cet Artsakh aujourd’hui, alors qu’un cessez-le-feu parrainé par Moscou et Ankara affiche la volonté de sceller pour lui un funeste destin ?
La réponse tient pour moi dans une phrase écrite par Charles Péguy quelques années avant la Grande Guerre : « Il faut toujours dire ce que l’on voit. Surtout il faut toujours, ce qui est plus difficile, voir ce que l’on voit. »
Cet exercice de lucidité, quand les propagandes populistes déversent la haine à travers le monde, n’est pas aisé – je le reconnais bien volontiers.
Le 14 octobre dernier, M. le ministre Le Drian, à l’occasion de la séance de questions d’actualité au Gouvernement, a déclaré avec justesse : « Dans cette affaire grave, il y a, pour la France, une urgence, un devoir et une exigence. »
Oui, il est urgent de dire à nos amis d’Erevan, à nos frères arméniens, aux Arméniens de France, que notre pays est à leurs côtés. Et il est de notre devoir d’en finir avec les grands discours rarement suivis d’effets.
Il y a une urgence humanitaire, car des dizaines de milliers de femmes, d’hommes, d’enfants, de personnes âgées se sont repliés vers Erevan, face à des troupes djihadistes accompagnées d’Azéris.
Il y a urgence à remettre le sultan d’Ankara à sa place.
Il y a urgence à se retrouver aux côtés des victimes d’un conflit que, par aveuglement, nous n’avons pas su prévenir.
Il sera bien temps, demain, de comprendre les raisons de ces tragiques échecs, dont celui, disons-le franchement, des gouvernants d’Erevan, qui n’ont pas vu monter les périls.
Dans un Caucase où Moscou ne joue, en toute logique, que pour reconstituer son pré carré, il sera bien temps, demain, de comprendre l’inertie des travaux du groupe de Minsk.
Relever ce défi est une urgence, un devoir et une exigence pour la France des Lumières, que les assauts d’un islamisme militant tentent de fracturer.
Nous retrouvons ce dédain, ce rejet, ce refus de ce que nous sommes dans le comportement inacceptable de la Turquie et dans les propos inqualifiables du président Aliyev.
Monsieur le secrétaire d’État, l’ambassadeur azéri aurait dû être convoqué par le ministère de l’Europe et des affaires étrangères lorsque le président Aliyev a demandé au gouvernement de la France d’offrir à la Corse son indépendance et d’élever Marseille en république du Haut-Karabagh ! (Sourires.)
Mme Valérie Boyer. C’est vrai !
M. Jean-Noël Guérini. Les Corses et les Marseillais, dont je suis – je ne suis pas le seul ici –, attendent toujours votre réaction.
Notre devoir est de reprendre le flambeau de la justice, du droit et de la fraternité, afin que le groupe de Minsk ne soit plus le théâtre poussiéreux des bonnes consciences qui regardent le monde se défaire et les peuples souffrir.
Pour tout cela, le projet de résolution est une exigence, celle qui éclairera le chemin du renouveau, pour l’Arménie, pour le Haut-Karabagh et pour notre diplomatie.
« Urgence », « devoir, « exigence » : en adoptant cette proposition de résolution, nous retrouverons un peu de notre fierté perdue. Le groupe du RDSE votera, évidemment, en faveur de celle-ci. (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE, SER, GEST, CRCE, UC et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi.
Mme Éliane Assassi. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, il y a un siècle, le 10 août 1920, les puissances victorieuses du premier conflit mondial et l’Empire ottoman signaient le traité de Sèvres. Ce traité prévoyait la création d’un territoire autonome pour les Kurdes et celle d’une république indépendante d’Arménie. Ce nouvel État devait être le refuge d’un peuple qui avait perdu un million cinq cent mille des siens dans le premier génocide du XXe siècle, ce meurtre d’une nation, ce crime contre l’humanité erga omnes – à l’égard de tous.
Pourtant, au traité de Sèvres succéda le traité de Lausanne, par lequel fut ratifiée l’annexion par la nouvelle Turquie de la partie occidentale de cette république mort-née et l’incorporation du reliquat dans l’ensemble soviétique. Plus tard, Staline rattacha les régions autonomes du Haut-Karabagh et du Nakhitchevan, peuplées majoritairement par des Arméniens, à la nouvelle république d’Azerbaïdjan.
C’est l’une des causes, un siècle plus tard, de l’embrasement meurtrier actuel.
En 1991, le parlement de la région autonome du Haut-Karabagh proclama son indépendance, qui fut ratifiée par un référendum. Cette proclamation fut prise à l’issue d’un processus démocratique parfaitement respectueux des conditions législatives de l’époque. Cette indépendance ne fut pas moins légitime que celle prononcée par l’Azerbaïdjan, la même année. Par la présente résolution, c’est cette affirmation légale du droit d’un peuple à disposer de lui-même que le Sénat demande au gouvernement de la France de reconnaître.
Cette exigence, le parti communiste français et notre groupe, dont certains élus sont très impliqués sur ce sujet, l’ont portée, il y a plus d’un an. Aujourd’hui, animés par cette même volonté, nous voterons cette proposition de résolution, et avec elle la demande de reconnaissance de la République d’Artsakh, parce que nous pensons qu’elle est un signe plus que jamais nécessaire à un règlement pacifique et politique des conflits dans le Caucase du Sud.
Comme le précise l’exposé des motifs de cette proposition de résolution, nous pensons que le peuple arménien continue d’être la victime expiatoire du nationalisme néo-ottoman de la Turquie.
Malheureusement, il ne fait aucun doute que la dérive dictatoriale du pouvoir de Recep Tayyip Erdogan, qui emprisonne l’opposition, musèle les journalistes ou fait assassiner jusqu’en France les militants kurdes, se projette aujourd’hui en dehors des frontières de la Turquie par un projet agressif qui se donne pour nouvelles frontières les Balkans, le Proche-Orient et l’Asie centrale.
À la fiction d’une homogénéité culturelle par l’exaltation du nationalisme turc, la Turquie de Turgut Özal et de Recep Tayyip Erdogan ajoute une dimension expansionniste qui profite des déséquilibres géostratégiques de la fin de la guerre froide, de la connivence coupable de l’OTAN et de l’incapacité désespérante de l’Europe à s’impliquer dans la résolution des conflits armés qui se déroulent à ses portes.
Pour ne pas avoir joué le rôle moteur qu’on attendait d’elle dans le groupe de Minsk, la France a été mise sur le côté par le cessez-le-feu signé sous l’égide de la Russie. La résolution du Sénat redonne de la voix à la France. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE et Les Républicains.)
Mme Valérie Boyer. Bravo !
Mme Éliane Assassi. En 1992, Turgut Özal, alors président de la République de Turquie, avait déclaré qu’il était nécessaire, de temps en temps, « de faire un peu peur aux Arméniens ». Aujourd’hui, Recep Tayyip Erdogan déclare, lui, vouloir « finir le travail commencé il y a plus d’un siècle par les grands-parents ». Cette rhétorique guerrière et criminelle, qui a l’amer goût du sang et qui ne renonce pas à l’objectif génocidaire, considère la République d’Artsakh comme un îlot de résistance au sein de la grande nation turque et azérie et l’Arménie comme un obstacle à l’unité territoriale d’un nouvel empire ottoman étendu au-delà de la mer Caspienne.
Par cette résolution, mes chers collègues, nous devons exprimer notre condamnation vigoureuse de ce projet expansionniste, de toutes les formes de nationalisme mortifère et des risques qu’ils font courir à toute la région. De la même façon, il nous faut manifester avec force notre totale solidarité avec l’Arménie devant les menaces terribles proférées contre son existence.
Dans cet hémicycle et dans celui de l’Assemblée nationale, à la suite de Marcel Cachin, de Guy Ducoloné, d’Hélène Luc et de Guy Fischer, les parlementaires communistes n’ont cessé de demander la reconnaissance du génocide arménien pour rendre justice à toutes ses victimes et montrer à quelle horreur aboutissent les nationalismes dressés contre un peuple.
Cette résolution sera une bien faible consolation pour toutes les familles endeuillées, pour celles qui ont fui sans espoir de retour et pour cette jeune génération élevée dans le Haut-Karabagh et broyée par la machine de guerre colossale déployée contre elle.
Néanmoins, elle est pour notre groupe le moyen de rappeler notre attachement au règlement pacifique de ce conflit millénaire. Dans le Caucase du Sud, comme dans tout le Proche-Orient, seules des solutions politiques permettront d’apporter aux peuples et aux minorités la paix et les garanties de leur existence dans la libre administration de leurs destinées.
Les mots prononcés par Jean Jaurès à la Chambre des députés en 1896 résonnent encore et, à notre tour, il nous revient « d’accomplir notre devoir d’élémentaire humanité […] qui conciliera l’œuvre de paix et l’œuvre de justice ».
Monsieur le ministre, nous espérons vivement que le Gouvernement fera sienne la démarche du Sénat, qui tire sa force de sa grande solennité. (Applaudissements sur toutes les travées, sauf celles du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Olivier Cigolotti. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – M. Emmanuel Capus applaudit également.)
M. Olivier Cigolotti. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, l’actualité nous oblige, cet après-midi, à examiner une proposition de résolution portant sur la nécessité de reconnaître la République du Haut-Karabagh.
Signée par une majorité des présidents de groupe de la Haute Assemblée, cette proposition de résolution fait l’objet d’un assez large consensus sur nos travées.
Il apparaît cependant important de rappeler quelques éléments de contexte historique.
À l’époque bolchevique, Moscou a fait du Haut-Karabagh une région autonome au sein de la République socialiste soviétique d’Azerbaïdjan, et ce malgré les promesses qui avaient été faites à l’Arménie.
Avec la chute de l’URSS, le réveil des revendications ethniques et religieuses a été brutal.
Durant ces dernières décennies, Azéris et Arméniens se sont observés, invectivés, affrontés, parfois séparés par quelques centaines de mètres seulement. Aujourd’hui, la situation demeure très préoccupante.
Après six semaines d’affrontements intenses marqués par de graves exactions, la fin des hostilités opposant l’Arménie et l’Azerbaïdjan dans cette région du Haut-Karabagh a été signée entre ces deux pays le 9 novembre dernier.
Ce cessez-le-feu, réalisé sous l’égide de la Russie, semble, à ce jour, faire autorité.
Le Haut-Karabagh est l’une de ces régions du Caucase du Sud trop longtemps considéré comme le théâtre d’un conflit gelé, au même titre que celui qui oppose l’Ossétie du Sud et la Géorgie.
Les tensions ont malheureusement repris le 27 septembre dernier, et ce nouvel embrasement de la région intervient désormais avec en toile de fond la prédominance d’États puissants comme la Turquie et la Russie.
Le soutien de la Turquie à l’Azerbaïdjan se concrétise par l’apport de matériel de guerre et de drones lui conférant une suprématie aérienne évidente, mais également par l’acheminement de supplétifs de l’armée syrienne.
Selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme, ce sont au moins 850 mercenaires syriens ayant pris part aux combats contre Bachar el-Assad qui ont été envoyés par Ankara dans les zones de combat afin de renforcer les forces azerbaïdjanaises.
Dans le même temps, nous assistons à une succession de provocations de la part de la Turquie, qui ne cache pas ses ambitions expansionnistes et constitue à ce jour la deuxième armée de l’Organisation du traité de l’Atlantique nord.
Nous ne pouvons que vivement regretter l’accélération dangereuse des faits constatés ces derniers mois : poursuite de forages gaziers illégaux à Chypre, réouverture de la plage de Varosha, et ce au mépris des résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU, incursion dans les eaux territoriales grecques par des navires de forage sous escorte militaire, positions troubles face à Daech en Syrie et multiplication des interventions armées contre nos alliés kurdes.
Je rappellerai également l’incident qui s’est produit avec la frégate Courbet en juin dernier en Méditerranée orientale, et l’accumulation de déclarations plus ou moins hostiles à l’égard de la France et de son exécutif.
Quant à la Russie, cette dernière a su demeurer dans une position des plus ambiguës en vendant des armes aux deux camps, en commerçant avec Bakou et Erevan, tout en conservant un statut d’arbitre – il faut malheureusement le reconnaître – bien plus convaincant que celui que devraient assumer les instances européennes.
Moscou souhaite depuis de nombreuses années se montrer en défenseur des chrétiens d’Orient et entretient en même temps, depuis l’ère bolchevique, une forme de division au sein des républiques du Caucase, afin de faire respecter l’ordre.
Mais, désormais, c’est une déstabilisation profonde du Caucase du Sud qui est à l’œuvre, et il semble bien difficile de se contenter des termes du cessez-le-feu signé le 9 novembre dernier.
Il est aujourd’hui plus que nécessaire, mes chers collègues, de travailler à un règlement politique durable de ce conflit. La communauté internationale, et notamment la France, doit se mobiliser pour une sortie de crise pérenne, et toutes les formes de négociation doivent être utilisées pour que le multilatéralisme fasse émerger une solution durable.
Après la signature de ce cessez-le-feu, la situation au Haut-Karabagh retrouve son statut de conflit gelé.
Et qui dit conflit gelé dit possible reprise d’un conflit armé violent et de toutes les exactions afférentes. Nous ne pouvons cautionner un tel risque.
M. Le Drian a déclaré, le 10 novembre dernier, que la France s’était mobilisée ces dernières semaines en faveur des populations locales, notamment par des initiatives très nombreuses de la société civile, et que les autorités françaises y contribuaient largement, avec une aide médicale arrivée à Erevan.
Pouvez-vous, monsieur le secrétaire d’État, éclairer la représentation nationale sur ces actions, et nous indiquer ce qu’il en est de la reprise des négociations entre les deux parties pour un accord durable ?
Si la grande majorité du groupe Union Centriste est favorable à cette proposition de résolution et partage ces propos, certains membres du groupe ont soulevé quelques interrogations.
Tout d’abord, la création d’une mission d’information sur les conflits gelés du Caucase avait été un temps sollicitée afin d’anticiper au mieux les déséquilibres probables de la région en cas de reprise de l’un ou l’autre de ces nombreux conflits. S’il avait été fait droit à une telle demande, nous aurions peut-être été en mesure de mener un travail plus approfondi.
Ensuite, cette résolution, quand bien même elle n’a qu’une valeur de recommandation, ne doit pas affaiblir diplomatiquement la France dans cette région du Caucase déjà ô combien troublée.
Autre sujet d’inquiétude : le groupe de Minsk.
Aux côtés de la Russie et des États-Unis, la France se doit de respecter une certaine neutralité sur cette question du Haut-Karabagh. Mais l’efficacité de ce groupe suscite des interrogations. Quelle a été son action depuis de nombreuses années et dans cette nouvelle phase du conflit ?
Enfin, mes chers collègues, ne tombons pas dans la facilité consistant à considérer que l’Azerbaïdjan n’est qu’un État velléitaire ou terroriste, alors qu’il se développe économiquement, grâce à la manne du pétrole, et culturellement, avec une certaine forme de laïcité.
Certes, ce pays n’est pas la plus grande des démocraties, mais c’est un pays jeune qui se construit dans un contexte régional souvent difficile, et marqué du poids de son histoire.
Mes chers collègues, vous l’aurez compris, malgré ces quelques remarques divergentes, le groupe Union Centriste votera dans sa grande majorité cette proposition de résolution. (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées des groupes Les Républicains, RDSE, SER et CRCE.)
M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Patrick Kanner. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, ce qui nous réunit aujourd’hui est une situation d’une particulière gravité. Cette gravité nous oblige ; elle a conduit nos groupes politiques, différents sur bien des points, à travailler de concert pour aboutir à cette proposition de résolution. Cette convergence a été rendue possible, car elle était absolument nécessaire. C’est une obligation morale et politique : refuser que la guerre soit une option pour régler des différends territoriaux.
Il y va de notre responsabilité de parlementaires de dénoncer des faits accomplis qui ne peuvent être acceptés : le recours à la force, le ciblage des populations civiles, l’usage d’armes prohibées par le droit international, le non-respect des droits des prisonniers de guerre ou encore le déplacement massif de population qui quittent du jour au lendemain toute une vie… ce qui ressemble étrangement à une forme de nettoyage ethnique.
Nous ne pouvons ni laisser faire ni admettre une telle situation dans le Caucase, c’est-à-dire aux portes de l’Europe. Les souvenirs qui nous submergent à ces évocations d’exactions nous montrent que proclamer « plus jamais ça ! » n’est plus suffisant.
Je voudrais réitérer ici notre amitié et notre soutien à la population arménienne qui, une nouvelle fois dans son histoire, est ciblée, vilipendée, attaquée et mise en danger.
Le cessez-le-feu du 9 novembre, inspiré par la Russie, n’a au fond rien résolu ; il ne saurait tenir lieu de règlement définitif du conflit alors que l’usage de la force et de la contrainte ne peut satisfaire qu’une seule des deux parties.
Plus inquiétants encore sont les bénéfices géostratégiques pour les parrains de ce cessez-le-feu, qui remettent au goût du jour des rêves impérialistes, en tout cas un panturquisme incarné par le président Erdogan, qui déstabiliseraient plus encore une région déjà si fragile.
Dans ces conditions et compte tenu de ses modalités, ce cessez-le-feu ne peut offrir aucune garantie de paix durable. Il se limite à entériner le fait accompli et à consacrer l’usage de la force. Cet accord est hors de tout contrôle international et ne présente aucune solution pour les populations arméniennes.
En revanche, il acte une installation militaire durable d’un pays tiers et un redécoupage territorial qui pérennise la mainmise de puissances étrangères.
Mes chers collègues, ce qui nous anime aujourd’hui, c’est la volonté d’aider les acteurs locaux à dessiner un avenir pour le Haut-Karabagh.
Il est urgent, monsieur le secrétaire d’État, de redéfinir les conditions et les règles d’un compromis possible ; la France, en tant que coprésidente du groupe de Minsk, doit demander le retrait des forces et le retour aux frontières d’avant le 27 septembre et baliser à nouveau la voie d’une reconnaissance de ce territoire. Elle ne peut se contenter de demander que les « ambiguïtés » du cessez-le-feu soient levées. Sa voix doit être plus forte et plus ferme.
Oui, le retour de la question du Haut-Karabagh fait la tragique démonstration qu’un conflit dont le règlement n’est que gelé ne reste jamais figé.
Ce conflit s’impose aujourd’hui comme un défi à la réinvention de la relation transatlantique ainsi qu’aux ambitions de l’Union européenne de devenir un acteur géopolitique majeur. Il faut changer de braquet, et cela passera par un nécessaire réinvestissement du multilatéralisme.
La reconnaissance de la République du Haut-Karabagh n’est pas seulement un symbole ; c’est un devoir ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE, GEST, Les Républicains et UC. – M. Stéphane Artano applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Stéphane Ravier.
M. Stéphane Ravier. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, « l’Azerbaïdjan est le premier partenaire économique de la France dans le Caucase du Sud. Et ce n’est pas parce que l’Azerbaïdjan n’est que peu démocratique que l’on doit s’interdire de commercer avec lui… »
Ou quand certains, parmi mes chers collègues de droite, font rimer pragmatisme avec cynisme et, in fine, résument la position réelle de la France dans cette partie du monde. Cela a le mérite d’être clair !
Le peuple arménien pensait pouvoir compter sur l’amitié de la France ? La France préfère compter avec son client azerbaïdjanais, à qui elle a vendu, entre 2015 et 2019, des équipements militaires d’une valeur totale de 364 millions d’euros.
Et que peuvent bien peser quelques centaines de milliers d’Arméniens dans la balance commerciale ? Une résolution, tout au plus, qui ne rime pas avec « intervention ».
La vérité est là ; elle est commerciale, comptable ; elle est crue et cruelle. Les affaires du monde passeront après le monde des affaires !
Aujourd’hui, après le silence assourdissant de la communauté internationale durant le conflit éclair déclenché par les Azéris, notre assemblée sort de sa torpeur pour voter en toute hâte cette proposition de résolution. Ou comment s’acheter une bonne conscience, à peu de frais…
Reconnaître l’indépendance de l’Artsakh n’est cependant pas inutile. Cette reconnaissance est nécessaire ; elle constitue un premier pas pour protéger le peuple arménien de l’épuration ethnique qui a déjà commencé.
Menacé dans sa chair, dans sa culture et dans son âme, le plus vieux pays chrétien du monde est la cible d’une Turquie dont l’expansionnisme territorial et islamiste est désormais assumé par son leader, le sultan Erdogan.
Car, autre vérité, l’Azerbaïdjan n’aurait pas déclenché cette guerre et ne l’aurait pas remportée sans le soutien appuyé de la Turquie.
L’expansionnisme turc, qui repose sur le rêve de recréer l’Empire ottoman, conduit Erdogan à avoir Chypre et la Grèce dans son viseur.
Après l’Artsakh, après l’Arménie, c’est notre tour, mes chers collègues ! Et, irai-je même jusqu’à dire, avec l’Artsakh et l’Arménie, c’est déjà notre tour !
Sortez donc de cette logique munichoise, et punissons l’ogre turc qui menace la paix dans le monde. Mais, pour cela, il va falloir abandonner votre double discours, car vous êtes encore nombreux à souhaiter l’entrée de la Turquie dans l’Union européenne et à être des acteurs et actrices du clientélisme communautaire. (Non ! sur les travées du groupe Les Républicains.)
Entre le déshonneur et la guerre, il y a encore un chemin pour retrouver notre honneur en faisant notre devoir ! Son devoir, la jeunesse arménienne l’a fait. J’ai vu à l’hôpital de Goris, au premier mois de la guerre, de jeunes Arméniens blessés au combat. Âgés d’à peine 20 ans, ils ne demandaient qu’à retourner au front pour se battre, prêts à mourir pour que vive leur patrie. Mon ami Aram avait raison de m’écrire que la modernité n’avait pas effacé la bravoure et l’héroïsme arméniens !
Héroïsme, bravoure, solidarité, de jeunes Français aussi en font preuve, tous bénévoles au sein de l’association SOS Chrétiens d’Orient et qui, sur place, apportent aide et réconfort aux réfugiés de l’intérieur. Grâce à eux, la flamme française ne s’est pas tout à fait éteinte ; elle continue de réchauffer le corps, le cœur et l’âme des Arméniens…
Garegin Njdeh, homme d’État, philosophe, militaire et stratège arménien, connaissait, selon ses propres termes, une vérité : « Si tu veux deviner et voir l’avenir de ton peuple, regarde sa jeunesse. Ceux qui ont une jeunesse patriote et de conviction ont un avenir. »
La jeunesse arménienne, pleine de convictions et de patriotisme, prouve que l’Arménie a un grand et bel avenir devant elle, à condition, mes chers collègues, que nous ne l’abandonnions pas une seconde fois, cent cinq ans après l’horreur du génocide.
M. le président. Il faut conclure.
M. Stéphane Ravier. Soyons dignes de la confiance que nous accordent nos amis arméniens. Levons-nous, et élevons-nous, pour que vive l’Arménie !
M. le président. La parole est à Mme Valérie Boyer. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Valérie Boyer. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, permettez-moi de vous faire part de mon émotion. Il y a maintenant plus de huit ans, je venais pour la première fois au Sénat – je n’étais pas présente, comme aujourd’hui, sur ces travées, mais en tribune. Il y a plus de huit ans, donc, le Sénat marquait l’histoire en votant le texte que j’avais porté au Parlement sur la pénalisation du négationnisme relatif au génocide de 1915. Je n’imaginais pas, à cette époque, siéger un jour dans cet hémicycle et devoir y dénoncer une autre épuration ethnique, un autre génocide.
Je tiens à remercier du fond du cœur le président Larcher d’avoir inscrit à l’ordre du jour cette proposition de résolution sur l’Artsakh. Je remercie également, et tout particulièrement, Bruno Retailleau, qui a su rassembler les groupes politiques pour cette cause qui nous dépasse et qui nous transcende. Merci à vous, mes chers collègues, d’être réunis pour cette cause, qui n’est pas communautaire, mais bien universelle.
L’histoire est certes un perpétuel recommencement, mais elle ne doit pas être un renoncement éternel. Le 27 septembre dernier, un conflit armé a éclaté dans la région caucasienne du Haut-Karabagh. De nouveau, l’Azerbaïdjan est entré en guerre contre l’Arménie. Toute cette opération a été froidement orchestrée par un membre de l’OTAN, la Turquie. Et le Gouvernement, interrogé sur toutes les travées du Parlement, ici et à l’Assemblée nationale, de se réfugier derrière la neutralité du groupe de Minsk… Ce groupe n’avait pourtant pas vocation à être neutre, mais à éviter une nouvelle épuration.
Je suis très déçue, monsieur le secrétaire d’État, que M. Le Drian ait évité aujourd’hui le débat. C’est vraiment dommage !
Nous ne sommes ni un petit pays ni une grande nation : nous sommes une civilisation. La France, dans son histoire, a toujours protégé les opprimés. Oui, le chef de l’État a désigné le bourreau et dénoncé la volonté expansionniste du président turc. Et pourtant : aucune aide militaire pour l’Arménie, une aide humanitaire timide, voire absente, pas de résolution européenne ! Alors que nous avons su nous déployer sur d’autres théâtres d’opérations, rien n’a été fait pour l’Arménie.
Les mots sont peu de chose quand des milliers d’Arméniens se font exterminer. Sur place, des journalistes courageux, comme ceux du Figaro, ou l’écrivain Sylvain Tesson témoignent et font état des corps mutilés d’Arméniens retrouvés dans les alentours de Chouchi. Des vidéos insoutenables circulent sur internet. Des êtres humains sont traités de « porcs » ou de « chiens », pour reprendre les mots du dictateur Aliyev. Et pourtant, le Gouvernement est resté neutre face à l’usage qui a été fait par l’Azerbaïdjan, avec l’appui de la Turquie, d’armes non conventionnelles telles que des armes au phosphore. J’espère que ces criminels seront jugés pour leurs actes odieux et lâches !
Rester neutre, quand on sait que la Turquie emploie des djihadistes comme mercenaires pour tuer des Arméniens et les mutiler ? Rester neutre, face à l’épuration ethnique et culturelle opérée par la Turquie et l’Azerbaïdjan ? Rester neutre, pour la France, c’est abandonner sa sœur et alliée l’Arménie. C’est être de nouveau spectatrice d’un génocide : hier les Arméniens et les Assyriens, récemment les Kurdes, de nouveau les chrétiens d’Orient, aujourd’hui encore les Arméniens. Rester neutre, c’est choisir la dictature turco-azérie plutôt que la démocratie arménienne. Desmond Tutu avait raison : rester neutre face à l’injustice, c’est choisir le camp de l’oppresseur.
L’oppresseur, c’est l’Azerbaïdjan soutenu par la Turquie, cette même Turquie qui a pour président M. Erdogan et sa folie expansionniste, sa volonté de reconstituer l’empire ottoman, de planter le drapeau de l’islam sur les terres de l’Artsakh, d’occuper Chypre, territoire de l’Union européenne, de violer l’espace aérien et maritime grec, ses chantages migratoires, le massacre des Kurdes, que nous avons abandonnés, son appel aux djihadistes pour en finir avec les Arméniens, son négationnisme récalcitrant concernant le génocide de 1915, sa volonté d’en finir avec les « restes de l’épée », mot terrible pour désigner les Arméniens rescapés du génocide.
Il y a là autant d’atteintes à notre honneur, à la dignité des peuples, à leur souveraineté, à la paix, jusque chez nous, en France, où ses Loups gris traquent les Français d’origine arménienne. La communauté internationale a laissé mourir les Arméniens, qui sont une part de nous-mêmes et de notre civilisation dans le Caucase.
L’Artsakh est une terre arménienne, par son histoire, par sa culture, par son peuplement. Son identité arménienne est aujourd’hui plus que jamais menacée, à l’image du monastère arménien de Dadivank, que nous devons à tout prix préserver. Si les Azéris persistent à détruire de tels vestiges, ce patrimoine disparaîtra à jamais. Pour que ne se reproduisent pas les désastres de la destruction des Bouddhas de la vallée de Bâmiyân ou des trésors de Palmyre, il faut agir ! Nous devons agir pour préserver ces trésors de l’humanité qui sont au cœur du Haut-Karabagh. Il est écrit dans l’Évangile de Saint-Luc : « S’ils se taisent, les pierres crieront. » Aujourd’hui, elles crient ; elles nous appellent à l’aide.
Si la France entend encore être écoutée et respectée, elle doit agir, comme nous le faisons cet après-midi. C’est l’honneur de la France qui se joue dans cet hémicycle aujourd’hui, via cette diplomatie parlementaire qui nous permettra de ne pas faire rougir l’histoire. La reconnaissance de la République d’Artsakh est davantage qu’un symbole ; elle permettra de relancer le processus de paix en y introduisant une discussion juridique sur le statut de cette petite république, petite par la taille, mais grande par la culture, par l’histoire, par les habitants.
Il y va aussi de la reconnaissance et de la fidélité que les Français doivent aux Arméniens, lesquels ont toujours répondu à l’appel des combats de la liberté, et sont français par le sang versé. Au Haut-Karabagh, on ne souhaite pas l’indépendance comme un colifichet de fierté nationale mal placée ; on la vit comme une garantie de sécurité, de démocratie et de développement. Cette indépendance est la garantie de la vie des Arméniens ; elle est aussi la garantie de la vie des Européens, des Français, et la garantie de la paix dans notre partie du monde.
Mes chers collègues, c’est notre droit le plus strict, au vu des circonstances, et surtout notre devoir le plus élevé, de voter cette proposition de résolution. La France a été le premier État à reconnaître officiellement le génocide arménien, en 2001. Elle doit être la première nation à reconnaître la République d’Artsakh, son droit à vivre en paix et en toute indépendance, son droit de peuple à disposer enfin de lui-même.
Demain, cette résolution inspirera d’autres pays européens, et même au-delà. Nous n’avons pas pu éviter la guerre ; évitons le déshonneur. Il y va de la responsabilité morale et politique du monde libre : reconnaissons ce peuple qui a tant donné pour l’humanité ! Reconnaissons ce peuple qui a tant souffert ! « La France ne peut être la France sans la grandeur », disait le général de Gaulle. Aujourd’hui, c’est le Sénat, par ce vote, qui incarne cette grandeur. Votons tous unis cette belle proposition de résolution ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC, ainsi que sur des travées des groupes SER et CRCE.)
M. le président. La parole est à M. Gilbert Roger. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. Éric Bocquet applaudit également.)
M. Gilbert Roger. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, les coprésidents du groupe de Minsk tentent depuis plus de vingt-cinq ans de faciliter la résolution du conflit entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan dans le Haut-Karabagh.
Ce conflit est en premier lieu territorial. Il oppose deux principes, celui du droit d’un peuple, les Arméniens de l’enclave, à l’autodétermination, et celui de l’intégrité territoriale d’un État, l’Azerbaïdjan.
Depuis le lancement, le 27 septembre dernier, d’une offensive militaire par Bakou, les États-Unis, la Russie et la France, comme ils le font depuis 1994, appellent les parties prenantes à la retenue et à la négociation. Par la voix de leurs chefs de diplomatie, les trois pays ont condamné l’offensive, dans une déclaration en date du 5 octobre dernier.
Mais, cette fois, l’engrenage du conflit est plus complexe, et pas seulement en raison de l’ampleur des moyens militaires déployés par l’Azerbaïdjan, qui souhaite reconquérir les territoires perdus situés entre le Haut-Karabagh et l’Arménie.
La situation s’est complexifiée du fait de l’intervention d’un nouvel acteur, la Turquie, et par le retrait d’un autre, la Russie, qui montre sa réticence à intervenir résolument en faveur de l’Arménie. Russie, qui, par ailleurs, a contribué à déstabiliser le multilatéralisme en annexant la Crimée.
Le président turc Erdogan apporte son soutien politique et militaire à l’opération déclenchée par l’Azerbaïdjan – pour rappel, l’armée turque est membre de l’OTAN et a déployé des drones, technique otanienne, sur le théâtre des opérations. La nature des récents combats, d’une violence inouïe, nourrit les soupçons d’exactions conduites par les autorités azéries, qu’il faut condamner avec la plus grande fermeté.
Le président Erdogan a également pris publiquement position en faveur de l’Azerbaïdjan en déclarant que l’Arménie devait quitter « le territoire azerbaïdjanais occupé ». Par ses agissements et ses prises de position, le président turc piétine ses engagements non seulement comme membre du groupe de Minsk, mais également comme membre de l’OTAN.
Aussi me semble-t-il nécessaire, monsieur le secrétaire d’État, de tirer les conséquences de cet échec diplomatique. Trois cessez-le-feu successifs négociés sous l’égide du groupe de Minsk n’ont eu aucun effet sur le terrain.
Ces échecs posent la question de la viabilité même du groupe de Minsk, alors que la Turquie en est membre, alors que la Russie en est coprésidente et alors que les États-Unis considèrent le dossier du Haut-Karabagh comme non prioritaire. Il ne reste que la France, mais que peut-elle peser seule ? Dans ce contexte, l’Union européenne doit jouer un rôle politique et sortir du piège du Brexit, dans laquelle elle s’est embourbée, pour projeter sa puissance à l’extérieur.
Sans doute par manque de volonté, le groupe de Minsk n’a pas su imposer jusqu’à présent une force d’interposition internationale.
Aussi, la France doit jouer un rôle moteur dans la résolution du conflit. La France doit défendre dans le cadre du groupe de Minsk la mise en œuvre immédiate de la protection des populations par le déploiement d’une force d’interposition internationale.
M. le président. Il faut conclure.
M. Gilbert Roger. C’est l’objet de cette proposition de résolution, que je vous invite, mes chers collègues, à adopter. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes RDSE et UC.)
M. le président. La parole est à M. Gilbert-Luc Devinaz. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Gilbert-Luc Devinaz. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le 3 novembre 1896, à propos des massacres d’Arménie, Jean Jaurès interpellait le gouvernement sur le rôle de la France et de l’Europe. Une Europe hypocrite, qui fait passer la raison diplomatique et économique avant la sauvegarde des peuples, de la justice et du droit. Ce ne sera pas la dernière fois…
Il serait impensable que reste dans l’histoire le fait qu’un État, aidé par des groupes terroristes, inflige un camouflet aux démocraties occidentales et à l’ensemble des valeurs séculaires qu’elles ont toujours eu à cœur de défendre.
L’Arménie et le Haut-Karabagh ont démontré leur engagement en faveur du développement d’institutions démocratiques solides dans un environnement régional constitué de régimes autoritaires. Ce conflit peut remettre en cause cette orientation.
Le règlement du statut du Haut-Karabagh doit se fonder sur la justice internationale pour garantir une paix durable.
L’Arménie aspire à vivre en paix et en toute sécurité. Prenons au sérieux les menaces des présidents Aliyev et Erdogan. Le 24 juillet, ce dernier déclarait vouloir « continuer d’accomplir la mission de ses grands-parents »… Le groupe d’amitié France-Arménie du Sénat dénonce depuis un an et demi cette menace. La délégation de députés arméniens reçue en octobre dernier s’était inquiétée des manœuvres militaires de la Turquie. Avec mon homologue, Vladimir Vardanyan, nous avions dénoncé dans un communiqué commun « les graves conséquences humanitaires, politiques et diplomatiques qui pourraient en résulter, craignant que cela ne contribue à déstabiliser encore davantage cette région ».
Dès le mois de juin, nos échanges m’ont conduit à interpeller le Président de la République et le ministre de l’Europe et des affaires étrangères pour demander une intervention de la France en tant que coprésidente du groupe de Minsk. Les déclarations belliqueuses portaient atteinte au processus de paix en cours dans le Karabagh, et nous craignions une menace réelle et sérieuse de recours à la force. La diplomatie parlementaire doit être reconnue dans son rôle.
Notre groupe d’amitié persévèrera dans son action et veillera à ce que l’Arménie puisse assouvir sa soif de démocratie. La jeunesse arménienne doit avoir un avenir dans son pays. Nous avions constaté, lors de notre visite à Erevan en 2018, un changement de ton, d’atmosphère et une grande espérance, celle née des bouleversements de la « révolution de velours ». Cette dynamique est aujourd’hui rompue sauvagement.
Dans l’immédiat, notre groupe contribuera à accompagner la priorité des priorités : l’aide aux réfugiés de ce conflit.
Mes chers collègues, nos homologues arméniens ne se nourrissent pas de mots bienveillants : « réaffirmer toute notre amitié », c’est bien ; la prouver par des actes, c’est encore mieux ! Cent cinq ans après le génocide, trente-deux ans après les pogroms, nos amis arméniens ne comprendraient pas que la France ne leur tende pas la main !
Je vous invite à adopter cette résolution. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes RDSE et UC.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État. (M. André Gattolin applaudit.)
M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères, chargé du tourisme, des Français de l’étranger et de la francophonie. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, ce qui vient de se passer au Haut-Karabagh, six semaines de combats d’une très grande violence, constitue un drame sur tous les plans : humanitaire, sécuritaire et politique.
Cette crise nous touche profondément parce que les affrontements ont provoqué des milliers de morts. Des jeunes de 20 ans et moins ont été sacrifiés. Des vies ont été brisées, des dizaines de milliers d’habitants du Haut-Karabagh et des districts adjacents ont été jetés sur les routes et ont fui leurs maisons, les uns vers l’Arménie voisine, les autres en Azerbaïdjan, vers l’arrière du front.
Cette crise suscite une émotion forte et légitime en France, notamment en raison des liens historiques et humains très étroits que nous entretenons avec le peuple arménien, et que vous avez été très nombreux à rappeler. Ce sont des liens multiséculaires qui nous unissent. D’ailleurs, l’élan de solidarité s’est très vite manifesté et structuré, avec le concours des collectivités locales, des associations et du Gouvernement. Notre pays, qui a su jadis accueillir de nombreuses familles arméniennes rescapées du génocide de 1915 rappelé par les uns et les autres, se doit d’être fidèle à une amitié historique et à sa promesse d’apporter son appui à l’Arménie dans ce moment difficile.
Je n’oublie pas non plus les liens tissés entre la France et l’Azerbaïdjan, car la France est l’amie des peuples arméniens et azerbaïdjanais. Cela s’est vérifié, quels que soient les présidents et les gouvernements.
Ayant eu l’occasion de me rendre tant en Arménie qu’en Azerbaïdjan, ayant eu l’occasion de rencontrer les étudiants de l’Université française en Arménie (UFAR), à Erevan, ou ceux de l’Université franco-azerbaïdjanaise (UFAZ), à Bakou, je puis vous dire que les uns et les autres communient de la même façon dans la langue française, dans un esprit que nous encourageons. Ne l’oublions pas !
Cette crise nous renvoie, bien sûr, aux responsabilités que la France assume depuis 1997 comme coprésidente du groupe de Minsk, aux côtés de la Russie et des États-Unis. Depuis vingt-trois ans, notre pays s’est activement engagé à tous les niveaux en faveur d’un règlement négocié, pacifique, équilibré et durable du conflit. D’ailleurs, à plusieurs reprises, il y a eu des moments où l’on a pensé qu’on allait pouvoir déboucher sur quelque chose. Hélas, non !
Il s’agit d’une négociation d’une grande difficulté, à tel point que ce conflit était parfois désigné comme un « conflit gelé », appellation laissant entendre qu’il était à la fois insoluble et latent. Malheureusement, nous l’avons vu, le conflit du Haut-Karabagh était une plaie béante qui ne demandait qu’à se rouvrir.
La guerre qui vient de se terminer par un cessez-le-feu obtenu aux forceps par la Russie, dans le prolongement d’efforts intenses déployés dès le déclenchement de l’offensive par les trois capitales coprésidentes du groupe de Minsk, a profondément changé la situation. Si cet accord n’est pas le nôtre, il a permis de mettre fin aux combats. Mais il laisse ouvertes d’importantes questions, qui empêcheront en l’état de trouver une solution durable à ce conflit.
La France joue donc son rôle et entend tenir toute sa place en contribuant à la consolidation du cessez-le-feu et à la résolution des nombreuses difficultés qui restent à surmonter, notamment pour rendre possible le retour des civils et des personnes déplacées dans des conditions acceptables de sécurité et leur permettre de reprendre une vie décente, tout autant que pour la protection du patrimoine historique et culturel de la région.
Le projet de résolution que vous vous apprêtez à adopter est un texte qui reflète et exprime une émotion légitime. Dans le même temps, la responsabilité de l’exécutif est d’élaborer et de conduire une politique cohérente permettant d’établir enfin la paix dans le Caucase du Sud. Je m’attacherai donc à répondre point par point, en toute transparence et en responsabilité, aux différentes questions que vous avez soulevées.
Pour ce faire, je vous rappellerai la situation sur le terrain telle que nous l’analysons, ainsi que les réponses que nous mettons en œuvre.
Aujourd’hui, notre principal objectif est de créer les conditions d’un retour en toute sécurité des populations civiles dans leurs maisons et d’assurer qu’elles pourront continuer à y vivre en paix, dans des conditions décentes.
Dès le déclenchement des hostilités le 27 septembre dernier, les plus hautes autorités de notre pays se sont mobilisées. Le Président de la République a été le premier responsable occidental à appeler les choses par leur nom. Le Président de la République, en marge du Conseil européen extraordinaire des 1er et 2 octobre, a indiqué que des centaines de mercenaires, notamment en provenance de Syrie, avaient été envoyés par la Turquie depuis Gaziantep vers la zone de combat du Haut-Karabagh.
Malgré nos demandes de clarification, la Turquie poursuit ses menées déstabilisatrices dans notre environnement régional immédiat, notamment via l’action militaire. Nous en avions la preuve en Méditerranée orientale, en Libye ou en Syrie ; désormais, c’est au Haut-Karabagh qu’Ankara intervient.
Le Président de la République s’est entretenu à de très nombreuses reprises avec le premier ministre arménien et avec le président azerbaïdjanais. Il a eu des échanges avec Vladimir Poutine. Jean-Yves Le Drian, de son côté, s’est entretenu avec ses homologues arméniens et azerbaïdjanais, de même qu’avec Sergueï Lavrov. Trois tentatives pour conclure un cessez-le-feu ont été menées collectivement par les coprésidents russe, français, américain. Notre ambassadeur représentant la France au sein du groupe de Minsk, ici présent, peut en témoigner : nous n’avons jamais laissé fléchir notre ardeur. Hélas ! ces trois accords de cessez-le-feu n’ont malheureusement pas été suivis d’effet. Notre engagement n’a pas faibli pour autant. Les développements dramatiques sur le terrain, notamment les 8 et 9 novembre, lorsque les forces azerbaïdjanaises n’étaient plus qu’à quelques kilomètres de Stepanakert, ont conduit à l’issue que vous connaissez.
Ce qui a été signé le 9 novembre par le premier ministre arménien, par le président azerbaïdjanais et par la Russie, c’est un accord de cessez-le-feu qui prévoit l’arrêt des combats, l’assistance humanitaire, le retour des réfugiés, les échanges de prisonniers, la sécurisation du cœur du Haut-Karabagh et de sa capitale, Stepanakert. La Russie, ce n’est pas une surprise, s’est fortement investie sur le terrain et a déployé en un temps très court un contingent de 2 000 soldats.
Toutefois, cet accord, à l’évidence, ne résout pas le conflit. Il laisse de nombreuses questions sans réponse : sur les modalités de retour des déplacés, sur le départ nécessaire des combattants étrangers de la région, sur le rôle des organisations internationales, notamment de l’OSCE, et surtout sur les questions qui ont trait au statut final du Haut-Karabagh, à sa délimitation administrative et à son mode de gouvernance, qui sont renvoyées à une négociation ultérieure.
Aujourd’hui, l’accord de cessez-le-feu existe. Il faut construire à partir de là une paix durable et une relation nouvelle entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan. Dans ce contexte radicalement changé, la France développe une action selon trois axes.
Le premier axe de travail est l’aide d’urgence aux populations civiles du Haut-Karabagh. Plusieurs dizaines de milliers de réfugiés ont fui vers l’Arménie et sont accueillis souvent dans des familles. Beaucoup souffrent de sous-alimentation et se trouvent dans une situation d’extrême précarité et de grande pauvreté. Le Président de la République a souhaité une réponse humanitaire forte, structurée et rapide. Elle est coordonnée par le centre de crise et de soutien du Quai d’Orsay.
Le 22 novembre, un premier avion d’aide humanitaire s’est envolé pour Erevan. Sa cargaison se composait de matériel médical d’urgence et d’aide humanitaire. Un second cargo d’aide humanitaire doit décoller ce vendredi 27 novembre de Paris. Son affrètement est le fruit du travail conduit avec les associations de solidarité avec l’Arménie, notamment la Fondation Aznavour, l’Union générale arménienne de bienfaisance, le Fonds arménien de France. Des organisations humanitaires et des fondations d’entreprises participent aussi activement à ces actions. Nous ne pouvons que nous féliciter de cet élan de générosité, à la hauteur du drame actuel et de la peine que nous ressentons devant les ravages causés par ce conflit.
Nous agissons aussi en travaillant au renforcement de la coopération hospitalière entre des établissements français –Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), Assistance publique-Hôpitaux de Marseille et Hospices de Lyon – et arméniens.
Enfin, un mot pour vous dire que les collectivités territoriales, dont certaines sont déjà très actives, ont été invitées à participer à ce dispositif dans le cadre d’un fonds du ministère de l’Europe et des affaires étrangères.
Nous appuierons enfin dans la durée l’action sur le terrain des agences onusiennes et du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), auxquelles nous entendons verser des contributions pour les années à venir.
Le deuxième axe de travail concerne la protection du patrimoine culturel et religieux au Haut-Karabagh, et dans les territoires attenants. La France, par la voix du Président de la République, a appelé à un « cessez-le-feu patrimonial » permettant la protection de l’exceptionnel patrimoine qui témoigne de la longue coexistence de plusieurs peuples et cultures sur ces terres. L’Unesco a annoncé qu’elle enverrait une mission sur le terrain.
Pour pouvoir agir, il nous faut la coopération de tous et, bien entendu, de l’Azerbaïdjan. Par-delà la mission de l’Unesco, la France interviendra à travers le fonds Aliph créé pour venir en aide au patrimoine dans les zones de conflit. C’est un fonds qui a montré son utilité et son efficacité à Mossoul. Le premier ministre Pachinian et le président Aliyev ont exprimé au Président de la République en fin de semaine dernière leur soutien à une action dans ce domaine.
Le troisième axe de travail, tout aussi fondamental, est celui du règlement politique. De nombreuses questions demeurent, je l’ai souligné : le retour des déplacés, la sécurisation des frontières, le départ des combattants étrangers. C’est là que la coprésidence du groupe de Minsk doit intervenir pleinement : les dirigeants de l’Arménie et de l’Azerbaïdjan ont exprimé le souhait que ses travaux reprennent. Ces sujets ne peuvent être traités dans une discussion entre la Russie et la Turquie seules.
La France entend parler à toutes les parties comme elle l’a toujours fait. C’est essentiel si nous voulons contribuer durablement à la résolution du conflit, c’est la condition non seulement de la légitimité, mais surtout de l’efficacité de notre action.
Dans votre projet de résolution, vous dénoncez les ingérences de la Turquie. Très clairement, la Turquie a soutenu militairement le recours à la force de l’Azerbaïdjan, y compris sous la forme d’un déploiement de mercenaires venus du théâtre de guerre syrien. Non seulement nous ne l’acceptons pas, mais nous avons saisi nos collègues européens pour prendre des mesures fermes à l’occasion du prochain Conseil européen des 1er et 2 décembre.
La France a également procédé, en conseil des ministres, à la dissolution des groupes de fait, comme les Loups gris, qui ont voulu mener ce combat sur notre sol même.
Vous demandez le retrait de tous les mercenaires étrangers, c’est déjà une requête que nous formulons également. Jean-Yves Le Drian, s’il a pu noter une inflexion chez les Turcs, l’a rappelé : cela ne suffit pas, nous voulons des actes, nous voulons des preuves ! L’un des actes attendus est le retrait des mercenaires syriens.
Vous demandez la saisine du Conseil de sécurité des Nations unies. Les discussions sont en cours à New York et se poursuivent. S’agissant de la Cour pénale internationale (CPI), nous sommes tous choqués par la gravité de certains faits qui nous ont été rapportés. Il convient de faire toute la lumière sur ces faits et la France appuiera les efforts en ce sens.
Mais vous savez également que se pose un problème de compétence : la CPI n’est compétente que pour traiter des crimes commis par des ressortissants d’États parties au statut de Rome, ce qui n’est malheureusement le cas ni de l’Arménie ni de l’Azerbaïdjan. D’autres voies restent à explorer, au travers des décisions du Conseil de sécurité : c’est la seule solution pour créer des mécanismes d’enquête internationale. Or le réalisme nous impose aujourd’hui de prendre acte que le Conseil de sécurité est trop divisé sur la question de la CPI pour la saisir.
Enfin, mesdames, messieurs les sénateurs, vous évoquez la question délicate de la reconnaissance par la France du Haut-Karabagh. (Enfin ! sur plusieurs travées.) La résolution, que j’ai lue intégralement, évoque un certain nombre de points auxquels j’ai apporté des réponses ! La reconnaissance du Haut-Karabagh est le dernier point de la résolution, il arrive donc à la fin de mon propos !
C’est une question grave et nous devons y répondre avec l’esprit de vérité, de responsabilité et d’efficacité qui anime le Gouvernement. Il faut en mesurer toutes les implications.
La république autoproclamée du Haut-Karabagh a déclaré son indépendance en 1991 lorsque le statut spécial de cette région a été supprimé par le gouvernement en place à Bakou à l’époque. Aucun État ne l’a reconnue, pas même l’Arménie. Je le dis bien : aucun pays, pas même l’Arménie.
La responsabilité du Gouvernement consiste aussi à se demander si ce geste serait utile et efficace. Est-ce qu’il emporterait des conséquences sur le terrain pour les populations du Haut-Karabagh ? Nous ne devons en effet pas perdre de vue l’efficacité.
La responsabilité qui est celle de la France au sein du groupe de Minsk fait que notre pays ne peut peser sur la résolution du conflit que si sa médiation active est acceptée par les deux parties. Aujourd’hui, la reconnaissance par la France du Haut-Karabagh nous ferait perdre, à n’en pas douter, toute capacité d’influence sur ce pays (Protestations sur les travées des groupes Les Républicains et CRCE.) et nous ne serions plus d’aucune aide pour ceux-là mêmes auxquels vous voulez porter secours et qui nous demandent de rester impliqués dans ce dossier.
Hier encore, lors de la conférence ministérielle de la Francophonie, l’Arménie, par la voix de son représentant, a confirmé le souhait d’une implication du groupe de Minsk.
Par conséquent, soyons clairs, la reconnaissance unilatérale par la France de l’indépendance du Haut-Karabagh ne serait aujourd’hui à l’avantage de personne : ni de l’Arménie, ni des habitants du Haut-Karabagh, ni de la France, ni des autres coprésidents du groupe de Minsk, ni des Européens. Ce n’est pas la politique du Gouvernement, ce n’est pas celle de l’Arménie, ce n’est pas celle de nos partenaires !
M. François Patriat. Très bien !
M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d’État. La solution du conflit du Haut-Karabagh ne viendra pas d’un geste unilatéral, fût-il français, mais du dialogue entre les parties.
M. Bruno Retailleau. Cela fait vingt ans que ça dure !
M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d’État. Aujourd’hui, plus que jamais, les parties ont besoin de l’appui des coprésidents pour poursuivre ce dialogue. Le président Christian Cambon a eu l’occasion de le souligner il y a quelques années lors de l’adoption au Sénat d’une proposition de résolution sur la reconnaissance de l’État de Palestine : « Faire de la reconnaissance unilatérale un “instrument” de négociation revient à exercer une pression unilatérale. » Procéder à une reconnaissance symbolique ne présente aucun intérêt pour la relance du processus, je puise aux meilleures sources !
M. Christian Cambon. Ce n’est pas le même sujet !
M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d’État. Nous ne renonçons pas à être actifs au sein de l’Union européenne pour promouvoir les trois axes d’action que je viens d’évoquer. Les Vingt-Sept ont d’ailleurs adopté récemment une déclaration sur le Haut-Karabagh, qui reprend l’essentiel de nos préoccupations. Outre le soutien qu’elle apporte sur le plan de l’aide humanitaire d’urgence, l’Union européenne réaffirme son plein soutien aux coprésidents du groupe de Minsk et se tient prête à accompagner la reprise des négociations.
Ce que nous avions proposé pour traiter la question du statut du Haut-Karabagh, conjointement avec nos partenaires russes et américains, c’est de trouver une façon de concilier l’intégrité territoriale de l’Azerbaïdjan et l’autodétermination de la population, majoritairement arménienne, du Haut-Karabagh. Les nouvelles réalités d’aujourd’hui imposent de reprendre les efforts de négociation sur les nouveaux paramètres que je viens rapidement de mentionner, sans toutefois renoncer aux principes de base du règlement.
Aujourd’hui, la priorité va à la consolidation du cessez-le-feu et à l’action humanitaire. Mais notre pays doit d’ores et déjà préparer activement les prochaines étapes, et il doit avoir les moyens de le faire pour peser positivement sur la suite.
La France est un pays responsable et fidèle à son engagement pour la paix, et qui n’a d’autre objectif que la coexistence pacifique des communautés dans la sécurité et la dignité. C’est un projet exigeant, je le mesure, mais auquel nous ne renoncerons jamais ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
Mme Cathy Apourceau-Poly. Quelle catastrophe !
M. le président. La discussion générale est close.
Nous allons procéder au vote sur la proposition de résolution.
proposition de résolution portant sur la nécessité de reconnaître la république du haut-karabagh
Le Sénat,
Vu l’article 34-1 de la Constitution,
Vu le traité de l’Atlantique Nord du 4 avril 1949,
Vu l’accord de cessez-le-feu du 12 mai 1994,
Vu l’accord de cessez-le-feu du 9 novembre 2020,
Considérant que le Président turc Recep Tayip Erdogan multiplie ces dernières années, les provocations, les intimidations et les menaces à l’encontre de la France, de l’Europe ou d’autres pays ;
Considérant que la politique expansionniste conduite par la Turquie est un facteur majeur de déstabilisation en Méditerranée orientale, au Proche et Moyen-Orient, et désormais dans le Caucase du Sud ; considérant que de telles déstabilisations constituent une menace pour la sécurité de la France et de l’Europe dans son ensemble ;
Considérant que le conflit au Haut-Karabagh se déroule aux confins de deux régions du monde particulièrement instables, le Caucase et le Moyen-Orient, et qu’il comporte par ailleurs un risque d’escalade impliquant potentiellement des puissances régionales ;
Considérant que le soutien militaire apporté par la Turquie à l’Azerbaïdjan est à l’origine de l’agression débutée le 27 septembre 2020 contre la population du Haut-Karabagh ; considérant par ailleurs que la Turquie a déployé sur le théâtre d’opérations, en tant que supplétifs de l’armée azérie, des mercenaires ayant servi au sein de groupes djihadistes en Syrie ;
Considérant que la population arménienne du Haut-Karabagh, lorsqu’elle était placée sous administration azérie, a été soumise de façon répétée à des massacres organisés, notamment à Soumgaït (25-27 février 1988), à Kirovabad (23 novembre 1988), à Bakou (12-19 janvier 1990) et à Maragha (10 avril 1992) ;
Considérant que les rapports de la Commission européenne contre le racisme et l’intolérance du Conseil de l’Europe (ECRI) et du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale de l’ONU (CERD) attestent de l’impossibilité des populations arméniennes à vivre librement en Azerbaïdjan ;
Considérant par conséquent que la sécurité et la liberté des populations arméniennes du Haut-Karabagh ne sont pas garanties par la République d’Azerbaïdjan ;
Considérant les efforts déployés depuis 1994 par la France, dans le cadre du Groupe de Minsk dont elle assure la coprésidence aux côtés de la Russie et des États-Unis, pour aboutir à une solution pacifique dans le conflit du Haut-Karabagh ; considérant par ailleurs sa position constante de neutralité et sa volonté de promouvoir un processus négocié par étape de règlement du conflit ; considérant par ailleurs que ce processus est durablement entravé par le recours de l’Azerbaïdjan à la solution militaire ;
Condamne l’agression militaire de l’Azerbaïdjan, menée avec l’appui des autorités turques et de mercenaires étrangers, et demande le retrait immédiat des forces armées azéries et de leurs soutiens des territoires pris à la suite des opérations de guerre conduites depuis le 27 septembre 2020 dans la région du Haut-Karabagh ;
Invite le Gouvernement à apporter une aide humanitaire massive aux populations civiles du Haut-Karabagh, en exigeant l’ouverture de couloirs humanitaires et en utilisant tous les canaux disponibles ;
Invite le Gouvernement à défendre dans le cadre du Groupe de Minsk la mise en œuvre immédiate de la protection des populations par le déploiement d’une force d’interposition internationale sous son égide conformément aux recommandations du plan de paix de 2007 ;
Invite le Gouvernement à demander la conduite d’une enquête internationale sur les crimes de guerre commis au Haut-Karabagh, en particulier à l’encontre des populations civiles et par l’usage d’armes prohibées par le droit international ;
Demande au Gouvernement de mettre tout en œuvre pour que des discussions en vue d’un règlement négocié et durable du conflit, assurant le rétablissement des frontières définies en 1994, la sécurité des populations arméniennes et le droit au retour des personnes déplacées, ainsi que la préservation du patrimoine culturel et religieux arménien, puissent reprendre sans délai dans le cadre du Groupe de Minsk, dont la France assure la coprésidence ;
Invite le Gouvernement à tirer toutes les conséquences diplomatiques du rôle joué par les autorités turques, et à envisager avec ses partenaires européens les réponses les plus fermes appropriées ;
Invite le Gouvernement à reconnaître la République du Haut-Karabagh, et à faire de cette reconnaissance un instrument de négociations en vue de l’établissement d’une paix durable.
Vote sur l’ensemble
M. le président. Mes chers collègues, je rappelle que la conférence des présidents a décidé que les interventions des orateurs valaient explication de vote.
Je mets aux voix la proposition de résolution.
J’ai été saisi de cinq demandes de scrutin public émanant, la première, du groupe Les Républicains, la deuxième, du groupe Union Centriste, la troisième, du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, la quatrième, du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, et, la cinquième, du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 34 :
Nombre de votants | 336 |
Nombre de suffrages exprimés | 306 |
Pour l’adoption | 305 |
Contre | 1 |
Le Sénat a adopté. (Mmes et MM. les sénateurs se lèvent et applaudissent longuement sur toutes les travées, à l’exception de celles du groupe RDPI.)
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-huit heures quinze, est reprise à dix-huit heures vingt, sous la présidence de Mme Pascale Gruny.)
PRÉSIDENCE DE Mme Pascale Gruny
vice-président
Mme le président. La séance est reprise.
5
Loi de finances pour 2021
Suite de la discussion d’un projet de loi
Mme le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances pour 2021, adopté par l’Assemblée nationale.
Dans la suite de la discussion des articles de la première partie, nous en sommes parvenus à l’examen de l’article d’équilibre et de l’état A sur les voies et moyens.
TITRE II
DISPOSITIONS RELATIVES À L’ÉQUILIBRE DES RESSOURCES ET DES CHARGES
Article 32 et état A annexé
I. – Pour 2021, les ressources affectées au budget, évaluées dans l’état A annexé à la présente loi, les plafonds des charges et l’équilibre général qui en résulte sont fixés aux montants suivants :
(En millions d’euros*) |
|||
Ressources |
Charges |
Solde |
|
Budget général |
|||
Recettes fiscales brutes / dépenses brutes |
397 147 |
504 738 |
|
À déduire : Remboursements et dégrèvements |
126 152 |
126 152 |
|
Recettes fiscales nettes / dépenses nettes |
270 995 |
378 586 |
|
Recettes non fiscales |
24 948 |
||
Recettes totales nettes / dépenses nettes |
295 943 |
378 586 |
|
À déduire : Prélèvements sur recettes au profit des collectivités territoriales et de l’Union européenne |
70 173 |
||
Montants nets pour le budget général |
225 770 |
378 586 |
-152 816 |
Évaluation des fonds de concours et crédits correspondants |
5 674 |
5 674 |
|
Montants nets pour le budget général y compris fonds de concours |
231 444 |
384 260 |
|
Budgets annexes |
|||
Contrôle et exploitation aériens |
2 222 |
2 272 |
-50 |
Publications officielles et information administrative |
159 |
152 |
7 |
Totaux pour les budgets annexes |
2 381 |
2 425 |
-43 |
Évaluation des fonds de concours et crédits correspondants : |
|||
Contrôle et exploitation aériens |
28 |
28 |
|
Publications officielles et information administrative |
0 |
0 |
|
Totaux pour les budgets annexes y compris fonds de concours |
2 409 |
2 452 |
|
Comptes spéciaux |
|||
Comptes d’affectation spéciale |
76 411 |
76 040 |
370 |
Comptes de concours financiers |
128 269 |
128 959 |
-691 |
Comptes de commerce (solde) |
-19 |
||
Comptes d’opérations monétaires (solde) |
51 |
||
Solde pour les comptes spéciaux |
-289 |
||
Solde général |
-153 148 |
||
* Les montants figurant dans le présent tableau sont arrondis au million d’euros le plus proche ; il résulte de l’application de ce principe que le montant arrondi des totaux et sous-totaux peut ne pas être égal à la somme des montants arrondis entrant dans son calcul. |
II. – Pour 2021 :
1° Les ressources et les charges de trésorerie qui concourent à la réalisation de l’équilibre financier sont évaluées comme suit :
(En milliards d’euros) |
||
Besoin de financement |
||
Amortissement de la dette à moyen et long termes |
128,1 |
|
Dont remboursement du nominal à valeur faciale |
127,3 |
|
Dont suppléments d’indexation versés à l’échéance (titres indexés) |
0,8 |
|
Amortissement de la dette reprise de SNCF Réseau |
1,3 |
|
Amortissement des autres dettes reprises |
0,0 |
|
Déficit à financer |
153,1 |
|
Autres besoins de trésorerie |
0,1 |
|
Total |
282,6 |
|
Ressources de financement |
||
Émission de dette à moyen et long termes, nette des rachats |
260,0 |
|
Ressources affectées à la Caisse de la dette publique et consacrées au désendettement |
0,0 |
|
Variation nette de l’encours des titres d’État à court terme |
19,1 |
|
Variation des dépôts des correspondants |
0,0 |
|
Variation des disponibilités du Trésor à la Banque de France et des placements de trésorerie de l’État |
0,0 |
|
Autres ressources de trésorerie |
3,5 |
|
Total |
282,6 |
; |
2° Le ministre chargé des finances est autorisé à procéder, en 2021, dans des conditions fixées par décret :
a) À des emprunts à long, moyen et court termes libellés en euros ou en autres devises pour couvrir l’ensemble des charges de trésorerie ou pour renforcer les réserves de change ;
b) À l’attribution directe de titres de dette publique négociable à la Caisse de la dette publique ;
c) À des conversions facultatives, à des opérations de pension sur titres d’État ;
d) À des opérations de dépôts de liquidités auprès de la Caisse de la dette publique, auprès de la Société de prise de participations de l’État, auprès du Fonds européen de stabilité financière, auprès du Mécanisme européen de stabilité, auprès des institutions et agences financières de l’Union européenne, sur le marché interbancaire de la zone euro et auprès des États de la même zone ;
e) À des souscriptions de titres de créances négociables émis par des établissements publics administratifs, à des rachats, à des échanges d’emprunts, à des échanges de devises ou de taux d’intérêt, à l’achat ou à la vente d’options, de contrats à terme sur titres d’État ou d’autres instruments financiers à terme ;
3° Le plafond de la variation nette, appréciée en fin d’année et en valeur nominale, de la dette négociable de l’État d’une durée supérieure à un an est fixé à 132,7 milliards d’euros.
III. – Pour 2021, le plafond d’autorisation des emplois rémunérés par l’État, exprimé en équivalents temps plein travaillé, est fixé au nombre de 1 945 585.
IV. – Pour 2021, les éventuels surplus mentionnés au 10° du I de l’article 34 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances sont utilisés dans leur totalité pour réduire le déficit budgétaire.
Il y a constatation de tels surplus si, pour l’année 2021, le produit des impositions de toute nature établies au profit de l’État net des remboursements et dégrèvements d’impôts, révisé dans la dernière loi de finances rectificative pour l’année 2021 ou, à défaut, dans le projet de loi de finances pour 2022, est, à législation constante, supérieur à l’évaluation figurant dans l’état A mentionné au I du présent article.
État A
VOIES ET MOYENS
I. – BUDGET GÉNÉRAL
(En euros) |
||
Numéro de ligne |
Intitulé de la recette |
Évaluation pour 2021 |
1. Recettes fiscales |
||
11. Impôt sur le revenu |
93 837 325 564 |
|
1101 |
Impôt sur le revenu |
93 837 325 564 |
12. Autres impôts directs perçus par voie d’émission de rôles |
2 944 000 000 |
|
1201 |
Autres impôts directs perçus par voie d’émission de rôles |
2 944 000 000 |
13. Impôt sur les sociétés |
68 251 081 223 |
|
1301 |
Impôt sur les sociétés |
68 251 081 223 |
13 bis. Contribution sociale sur les bénéfices des sociétés |
1 360 424 146 |
|
1302 |
Contribution sociale sur les bénéfices des sociétés |
1 360 424 146 |
13 ter. Contribution de la Caisse des dépôts et consignations représentative de l’impôt sur les sociétés |
60 300 000 |
|
1303 |
Contribution de la Caisse des dépôts et consignations représentative de l’impôt sur les sociétés |
60 300 000 |
14. Autres impôts directs et taxes assimilées |
24 886 801 433 |
|
1401 |
Retenues à la source sur certains bénéfices non commerciaux et de l’impôt sur le revenu |
996 000 000 |
1402 |
Retenues à la source et prélèvements sur les revenus de capitaux mobiliers et prélèvement sur les bons anonymes |
3 986 000 000 |
1403 |
Prélèvements sur les bénéfices tirés de la construction immobilière (loi n° 63-254 du 15 mars 1963, art. 28-IV) |
0 |
1404 |
Précompte dû par les sociétés au titre de certains bénéfices distribués (loi n° 65-566 du 12 juillet 1965, art. 3) |
0 |
1405 |
Prélèvement exceptionnel de 25 % sur les distributions de bénéfices |
0 |
1406 |
Impôt sur la fortune immobilière |
2 146 000 000 |
1407 |
Taxe sur les locaux à usage de bureaux, les locaux commerciaux et de stockage |
0 |
1408 |
Prélèvements sur les entreprises d’assurance |
177 000 000 |
1409 |
Taxe sur les salaires |
0 |
1410 |
Cotisation minimale de taxe professionnelle |
4 000 000 |
1411 |
Cotisations perçues au titre de la participation des employeurs à l’effort de construction |
17 000 000 |
1412 |
Taxe de participation des employeurs au financement de la formation professionnelle continue |
39 000 000 |
1413 |
Taxe forfaitaire sur les métaux précieux, les bijoux, les objets d’art, de collection et d’antiquité |
97 000 000 |
1415 |
Contribution des institutions financières |
0 |
1416 |
Taxe sur les surfaces commerciales |
210 000 000 |
1421 |
Cotisation nationale de péréquation de taxe professionnelle |
3 000 000 |
1427 |
Prélèvements de solidarité |
10 203 407 117 |
1430 |
Taxe sur les services numériques |
358 300 000 |
1431 |
Taxe d’habitation sur les résidences principales |
5 617 000 000 |
1497 |
Cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (affectation temporaire à l’État en 2010) |
0 |
1498 |
Cotisation foncière des entreprises (affectation temporaire à l’État en 2010) |
2 770 000 |
1499 |
Recettes diverses |
1 030 324 316 |
15. Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques |
20 403 582 366 |
|
1501 |
Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques |
20 403 582 366 |
16. Taxe sur la valeur ajoutée |
147 958 208 776 |
|
1601 |
Taxe sur la valeur ajoutée |
147 958 208 776 |
17. Enregistrement, timbre, autres contributions et taxes indirectes |
37 444 861 307 |
|
1701 |
Mutations à titre onéreux de créances, rentes, prix d’offices |
566 000 000 |
1702 |
Mutations à titre onéreux de fonds de commerce |
188 000 000 |
1703 |
Mutations à titre onéreux de meubles corporels |
261 587 |
1704 |
Mutations à titre onéreux d’immeubles et droits immobiliers |
19 000 000 |
1705 |
Mutations à titre gratuit entre vifs (donations) |
2 995 000 000 |
1706 |
Mutations à titre gratuit par décès |
12 260 000 000 |
1707 |
Contribution de sécurité immobilière |
784 000 000 |
1711 |
Autres conventions et actes civils |
431 498 207 |
1712 |
Actes judiciaires et extrajudiciaires |
0 |
1713 |
Taxe de publicité foncière |
536 000 000 |
1714 |
Prélèvement sur les sommes versées par les organismes d’assurances et assimilés à raison des contrats d’assurances en cas de décès |
292 000 000 |
1715 |
Taxe additionnelle au droit de bail |
0 |
1716 |
Recettes diverses et pénalités |
187 081 520 |
1721 |
Timbre unique |
378 000 000 |
1722 |
Taxe sur les véhicules de société |
0 |
1723 |
Actes et écrits assujettis au timbre de dimension |
0 |
1725 |
Permis de chasser |
0 |
1726 |
Produit de la taxe additionnelle à la taxe sur les certifications d’immatriculation des véhicules |
933 000 000 |
1751 |
Droits d’importation |
0 |
1753 |
Autres taxes intérieures |
10 155 000 000 |
1754 |
Autres droits et recettes accessoires |
4 784 731 |
1755 |
Amendes et confiscations |
47 211 300 |
1756 |
Taxe générale sur les activités polluantes |
901 334 035 |
1757 |
Cotisation à la production sur les sucres |
0 |
1758 |
Droit de licence sur la rémunération des débitants de tabac |
0 |
1761 |
Taxe et droits de consommation sur les tabacs |
48 000 000 |
1766 |
Garantie des matières d’or et d’argent |
0 |
1768 |
Taxe spéciale sur certains véhicules routiers |
0 |
1769 |
Autres droits et recettes à différents titres |
11 311 272 |
1773 |
Taxe sur les achats de viande |
0 |
1774 |
Taxe spéciale sur la publicité télévisée |
0 |
1776 |
Redevances sanitaires d’abattage et de découpage |
52 000 000 |
1777 |
Taxe sur certaines dépenses de publicité |
22 602 166 |
1780 |
Taxe de l’aviation civile |
0 |
1781 |
Taxe sur les installations nucléaires de base |
568 000 000 |
1782 |
Taxes sur les stations et liaisons radioélectriques privées |
25 000 000 |
1785 |
Produits des jeux exploités par la Française des jeux (hors paris sportifs) |
2 560 566 798 |
1786 |
Prélèvements sur le produit des jeux dans les casinos |
803 232 107 |
1787 |
Prélèvement sur le produit brut des paris hippiques |
421 500 331 |
1788 |
Prélèvement sur les paris sportifs |
568 353 702 |
1789 |
Prélèvement sur les jeux de cercle en ligne |
65 526 751 |
1790 |
Redevance sur les paris hippiques en ligne |
0 |
1797 |
Taxe sur les transactions financières |
1 044 000 000 |
1798 |
Impositions forfaitaires sur les entreprises de réseaux (affectation temporaire à l’État en 2010) |
0 |
1799 |
Autres taxes |
576 596 800 |
2. Recettes non fiscales |
||
21. Dividendes et recettes assimilées |
4 788 421 455 |
|
2110 |
Produits des participations de l’État dans des entreprises financières |
2 965 000 010 |
2116 |
Produits des participations de l’État dans des entreprises non financières et bénéfices des établissements publics non financiers |
1 794 021 445 |
2199 |
Autres dividendes et recettes assimilées |
29 400 000 |
22. Produits du domaine de l’État |
1 314 891 050 |
|
2201 |
Revenus du domaine public non militaire |
181 000 000 |
2202 |
Autres revenus du domaine public |
5 000 000 |
2203 |
Revenus du domaine privé |
271 891 050 |
2204 |
Redevances d’usage des fréquences radioélectriques |
556 000 000 |
2209 |
Paiement par les administrations de leurs loyers budgétaires |
0 |
2211 |
Produit de la cession d’éléments du patrimoine immobilier de l’État |
0 |
2212 |
Autres produits de cessions d’actifs |
300 000 000 |
2299 |
Autres revenus du Domaine |
1 000 000 |
23. Produits de la vente de biens et services |
1 983 646 736 |
|
2301 |
Remboursement par l’Union européenne des frais d’assiette et de perception des impôts et taxes perçus au profit de son budget |
513 000 000 |
2303 |
Autres frais d’assiette et de recouvrement |
1 125 700 899 |
2304 |
Rémunération des prestations assurées par les services du Trésor Public au titre de la collecte de l’épargne |
39 284 469 |
2305 |
Produits de la vente de divers biens |
27 528 |
2306 |
Produits de la vente de divers services |
2 633 840 |
2399 |
Autres recettes diverses |
303 000 000 |
24. Remboursements et intérêts des prêts, avances et autres immobilisations financières |
862 410 320 |
|
2401 |
Intérêts des prêts à des banques et à des États étrangers |
523 086 336 |
2402 |
Intérêts des prêts du fonds de développement économique et social |
2 884 115 |
2403 |
Intérêts des avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics |
17 288 292 |
2409 |
Intérêts des autres prêts et avances |
31 500 000 |
2411 |
Avances remboursables sous conditions consenties à l’aviation civile |
92 000 000 |
2412 |
Autres avances remboursables sous conditions |
136 929 |
2413 |
Reversement au titre des créances garanties par l’État |
13 314 648 |
2499 |
Autres remboursements d’avances, de prêts et d’autres créances immobilisées |
182 200 000 |
25. Amendes, sanctions, pénalités et frais de poursuites |
1 729 818 493 |
|
2501 |
Produits des amendes de la police de la circulation et du stationnement routiers |
651 524 312 |
2502 |
Produits des amendes prononcées par les autorités de la concurrence |
400 000 000 |
2503 |
Produits des amendes prononcées par les autres autorités administratives indépendantes |
89 756 475 |
2504 |
Recouvrements poursuivis à l’initiative de l’agence judiciaire de l’État |
14 852 647 |
2505 |
Produit des autres amendes et condamnations pécuniaires |
548 000 000 |
2510 |
Frais de poursuite |
12 077 739 |
2511 |
Frais de justice et d’instance |
10 032 282 |
2512 |
Intérêts moratoires |
3 593 |
2513 |
Pénalités |
3 571 445 |
26. Divers |
14 269 129 340 |
|
2601 |
Reversements de Natixis |
61 899 308 |
2602 |
Reversements au titre des procédures de soutien financier au commerce extérieur |
0 |
2603 |
Prélèvements sur les fonds d’épargne gérés par la Caisse des dépôts et consignations |
0 |
2604 |
Divers produits de la rémunération de la garantie de l’État |
2 641 300 000 |
2611 |
Produits des chancelleries diplomatiques et consulaires |
166 045 392 |
2612 |
Redevances et divers produits pour frais de contrôle et de gestion |
6 687 630 |
2613 |
Prélèvement effectué sur les salaires des conservateurs des hypothèques |
1 000 266 |
2614 |
Prélèvements effectués dans le cadre de la directive épargne |
394 404 |
2615 |
Commissions et frais de trésorerie perçus par l’État dans le cadre de son activité régalienne |
248 729 |
2616 |
Frais d’inscription |
9 962 825 |
2617 |
Recouvrement des indemnisations versées par l’État au titre des expulsions locatives |
8 233 557 |
2618 |
Remboursement des frais de scolarité et accessoires |
6 360 245 |
2620 |
Récupération d’indus |
30 000 000 |
2621 |
Recouvrements après admission en non-valeur |
120 878 443 |
2622 |
Divers versements de l’Union européenne |
10 000 000 000 |
2623 |
Reversements de fonds sur les dépenses des ministères ne donnant pas lieu à rétablissement de crédits |
36 186 938 |
2624 |
Intérêts divers (hors immobilisations financières) |
35 337 738 |
2625 |
Recettes diverses en provenance de l’étranger |
1 186 375 |
2626 |
Remboursement de certaines exonérations de taxe foncière sur les propriétés non bâties (art.109 de la loi de finances pour 1992) |
3 243 453 |
2627 |
Soulte sur reprise de dette et recettes assimilées |
0 |
2697 |
Recettes accidentelles |
355 145 797 |
2698 |
Produits divers |
375 980 361 |
2699 |
Autres produits divers |
409 037 879 |
3. Prélèvements sur les recettes de l’État |
||
31. Prélèvements sur les recettes de l’État au profit des collectivités territoriales |
43 309 026 109 |
|
3101 |
Prélèvement sur les recettes de l’État au titre de la dotation globale de fonctionnement |
26 756 368 435 |
3103 |
Prélèvement sur les recettes de l’État au titre de la dotation spéciale pour le logement des instituteurs |
6 693 795 |
3104 |
Dotation de compensation des pertes de bases de la taxe professionnelle et de redevance des mines des communes et de leurs groupements |
50 000 000 |
3106 |
Prélèvement sur les recettes de l’État au profit du Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) |
6 546 000 000 |
3107 |
Prélèvement sur les recettes de l’État au titre de la compensation d’exonérations relatives à la fiscalité locale |
539 632 796 |
3108 |
Dotation élu local |
101 006 000 |
3109 |
Prélèvement sur les recettes de l’État au profit de la collectivité de Corse |
62 897 000 |
3111 |
Fonds de mobilisation départementale pour l’insertion |
465 889 643 |
3112 |
Dotation départementale d’équipement des collèges |
326 317 000 |
3113 |
Dotation régionale d’équipement scolaire |
661 186 000 |
3118 |
Dotation globale de construction et d’équipement scolaire |
2 686 000 |
3122 |
Dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle |
2 905 463 735 |
3123 |
Dotation pour transferts de compensations d’exonérations de fiscalité directe locale |
413 753 970 |
3126 |
Prélèvement sur les recettes de l’État au titre de la dotation unique des compensations spécifiques à la taxe professionnelle |
0 |
3130 |
Dotation de compensation de la réforme de la taxe sur les logements vacants pour les communes et les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) percevant la taxe d’habitation sur les logements vacants |
4 000 000 |
3131 |
Dotation de compensation liée au processus de départementalisation de Mayotte |
107 000 000 |
3133 |
Fonds de compensation des nuisances aéroportuaires |
6 822 000 |
3134 |
Dotation de garantie des reversements des fonds départementaux de taxe professionnelle |
284 278 000 |
3135 |
Prélèvement sur les recettes de l’État au titre de la compensation des pertes de recettes liées au relèvement du seuil d’assujettissement des entreprises au versement transport |
48 020 650 |
3136 |
Prélèvement sur les recettes de l’État au profit de la collectivité territoriale de Guyane |
27 000 000 |
3137 |
Prélèvement sur les recettes de l’État au profit des régions au titre de la neutralisation financière de la réforme de l’apprentissage |
122 559 085 |
3138 |
Prélèvement sur les recettes de l’État au profit de la Polynésie française |
90 552 000 |
3141 |
Soutien exceptionnel de l’État au profit des collectivités du bloc communal confrontées à des pertes de recettes fiscales et domaniales du fait de la crise sanitaire |
430 000 000 |
3142 |
Soutien exceptionnel de l’État au profit des régions d’outre-mer confrontées à des pertes de recettes d’octroi de mer et de taxe spéciale de consommation du fait de la crise sanitaire |
0 |
3143 |
Soutien exceptionnel de l’État au profit de la collectivité de Corse confrontée à certaines pertes de recettes fiscales spécifiques du fait de la crise sanitaire |
0 |
3144 |
Soutien exceptionnel de l’État au profit de Saint-Pierre-et-Miquelon, Saint-Martin, Saint-Barthélemy et Wallis-et-Futuna confrontées à certaines pertes de recettes fiscales spécifiques du fait de la crise sanitaire |
0 |
3145 |
Prélèvement sur les recettes de l’État au titre de la compensation de la réduction de 50 % des valeurs locatives de TFPB et de CFE des locaux industriels |
3 290 000 000 |
3146 |
Prélèvement sur les recettes de l’État au titre de la compensation des communes et EPCI contributeurs au Fonds national de garantie individuelle des ressources (FNGIR) subissant une perte de base de cotisation foncière des entreprises (ligne nouvelle) |
900 000 |
3147 |
Prélèvement exceptionnel sur les recettes de l’État de compensation du Fonds national de péréquation des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) (ligne nouvelle) |
60 000 000 |
32. Prélèvement sur les recettes de l’État au profit de l’Union européenne |
26 864 000 000 |
|
3201 |
Prélèvement sur les recettes de l’État au profit du budget de l’Union européenne |
26 864 000 000 |
4. Fonds de concours |
||
Évaluation des fonds de concours |
5 673 785 095 |
RÉCAPITULATION DES RECETTES DU BUDGET GÉNÉRAL
(En euros) |
|
Intitulé de la recette |
Évaluation pour 2021 |
1. Recettes fiscales |
397 146 584 815 |
11. Impôt sur le revenu |
93 837 325 564 |
12. Autres impôts directs perçus par voie d’émission de rôles |
2 944 000 000 |
13. Impôt sur les sociétés |
68 251 081 223 |
13 bis. Contribution sociale sur les bénéfices des sociétés |
1 360 424 146 |
13 ter. Contribution de la Caisse des dépôts et consignations représentative de l’impôt sur les sociétés |
60 300 000 |
14. Autres impôts directs et taxes assimilées |
24 886 801 433 |
15. Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques |
20 403 582 366 |
16. Taxe sur la valeur ajoutée |
147 958 208 776 |
17. Enregistrement, timbre, autres contributions et taxes indirectes |
37 444 861 307 |
2. Recettes non fiscales |
24 948 317 394 |
21. Dividendes et recettes assimilées |
4 788 421 455 |
22. Produits du domaine de l’État |
1 314 891 050 |
23. Produits de la vente de biens et services |
1 983 646 736 |
24. Remboursements et intérêts des prêts, avances et autres immobilisations financières |
862 410 320 |
25. Amendes, sanctions, pénalités et frais de poursuites |
1 729 818 493 |
26. Divers |
14 269 129 340 |
Total des recettes brutes (1 + 2) |
422 094 902 209 |
3. Prélèvements sur les recettes de l’État |
70 173 026 109 |
31. Prélèvements sur les recettes de l’État au profit des collectivités territoriales |
43 309 026 109 |
32. Prélèvement sur les recettes de l’État au profit de l’Union européenne |
26 864 000 000 |
Total des recettes, nettes des prélèvements (1 + 2 - 3) |
351 921 876 100 |
4. Fonds de concours |
5 673 785 095 |
Évaluation des fonds de concours |
5 673 785 095 |
II. – BUDGETS ANNEXES
(En euros) |
||
Numéro de ligne |
Intitulé de la recette |
Évaluation pour 2021 |
Contrôle et exploitation aériens |
||
7010 |
Ventes de produits fabriqués et marchandises |
210 974 |
7061 |
Redevances de route |
902 710 000 |
7062 |
Redevance océanique |
13 000 000 |
7063 |
Redevances pour services terminaux de la circulation aérienne pour la métropole |
165 260 000 |
7064 |
Redevances pour services terminaux de la circulation aérienne pour l’outre-mer |
30 000 000 |
7065 |
Redevances de route. Autorité de surveillance |
|
7066 |
Redevances pour services terminaux de la circulation aérienne. Autorité de surveillance |
|
7067 |
Redevances de surveillance et de certification |
22 494 725 |
7068 |
Prestations de service |
3 032 701 |
7080 |
Autres recettes d’exploitation |
745 761 |
7400 |
Subventions d’exploitation |
|
7500 |
Autres produits de gestion courante |
21 010 |
7501 |
Taxe de l’aviation civile |
367 061 567 |
7502 |
Frais d’assiette et recouvrement sur taxes perçues pour le compte de tiers |
4 780 152 |
7503 |
Taxe de solidarité - Hors plafond |
|
7600 |
Produits financiers |
1 982 |
7781 |
Produits exceptionnels hors cessions |
341 128 |
7782 |
Produit de cession des immobilisations affectées à la dette (art. 61 de la loi de finances pour 2011) |
2 000 000 |
9200 |
Produit de cession hors biens immeubles de l’État et droits attachés |
|
9700 |
Produit brut des emprunts |
710 575 233 |
9900 |
Autres recettes en capital |
|
Total des recettes |
2 222 235 233 |
|
Fonds de concours |
27 667 000 |
|
Publications officielles et information administrative |
||
A701 |
Ventes de produits |
158 500 000 |
A710 |
Produits de fonctionnement relevant de missions spécifiques à l’État |
|
A728 |
Produits de fonctionnement divers |
500 000 |
A740 |
Cotisations et contributions au titre du régime de retraite |
|
A751 |
Participations de tiers à des programmes d’investissement |
|
A768 |
Produits financiers divers |
|
A770 |
Produits régaliens |
|
A775 |
Produit de cession d’actif |
|
A970 |
Produit brut des emprunts |
|
A990 |
Autres recettes en capital |
|
Total des recettes |
159 000 000 |
|
Fonds de concours |
0 |
III. – COMPTES D’AFFECTATION SPÉCIALE
(En euros) |
||
Numéro de ligne |
Intitulé de la recette |
Évaluation pour 2021 |
Contrôle de la circulation et du stationnement routiers |
1 611 437 170 |
|
Section : Contrôle automatisé |
335 398 208 |
|
01 |
Amendes perçues par la voie du système de contrôle-sanction automatisé |
335 398 208 |
02 |
Recettes diverses ou accidentelles |
0 |
Section : Circulation et stationnement routiers |
1 276 038 962 |
|
03 |
Amendes perçues par la voie du système de contrôle-sanction automatisé |
170 000 000 |
04 |
Amendes forfaitaires de la police de la circulation et amendes forfaitaires majorées issues des infractions constatées par la voie du système de contrôle-sanction automatisé et des infractions aux règles de la police de la circulation |
1 106 038 962 |
05 |
Recettes diverses ou accidentelles |
0 |
Développement agricole et rural |
126 000 000 |
|
01 |
Taxe sur le chiffre d’affaires des exploitations agricoles |
126 000 000 |
03 |
Recettes diverses ou accidentelles |
0 |
Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale |
377 000 000 |
|
01 |
Contribution des gestionnaires de réseaux publics de distribution |
377 000 000 |
02 |
Recettes diverses ou accidentelles |
0 |
Gestion du patrimoine immobilier de l’État |
370 000 000 |
|
01 |
Produits des cessions immobilières |
280 000 000 |
02 |
Produits de redevances domaniales |
90 000 000 |
Participation de la France au désendettement de la Grèce |
132 770 000 |
|
01 |
Produit des contributions de la Banque de France |
132 770 000 |
Participations financières de l’État |
12 809 732 211 |
|
01 |
Produit des cessions, par l’État, de titres, parts ou droits de sociétés détenus directement |
0 |
02 |
Reversement de produits, sous toutes formes, résultant des cessions de titres, parts ou droits de sociétés détenus indirectement par l’État |
0 |
03 |
Reversement de dotations en capital et de produits de réduction de capital ou de liquidation |
0 |
04 |
Remboursement de créances rattachées à des participations financières |
76 732 211 |
05 |
Remboursements de créances liées à d’autres investissements, de l’État, de nature patrimoniale |
20 000 000 |
06 |
Versement du budget général |
12 713 000 000 |
Pensions |
60 983 635 740 |
|
Section : Pensions civiles et militaires de retraite et allocations temporaires d’invalidité |
57 504 544 087 |
|
01 |
Personnels civils : retenues pour pensions : agents propres de l’État et agents détachés dans une administration de l’État sur un emploi conduisant à pension |
4 673 942 123 |
02 |
Personnels civils : retenues pour pensions : agents détachés dans une administration de l’État sur un emploi ne conduisant pas à pension |
6 518 952 |
03 |
Personnels civils : retenues pour pensions : agents propres des établissements publics et agents détachés en établissement public sur un emploi conduisant à pension |
847 126 856 |
04 |
Personnels civils : retenues pour pensions : agents détachés dans les collectivités et établissements publics locaux sur un emploi conduisant à pension |
23 996 815 |
05 |
Personnels civils : retenues pour pensions : agents détachés hors l’État sur un emploi ne conduisant pas à pension (hors France Télécom et hors La Poste) |
70 599 426 |
06 |
Personnels civils : retenues pour pensions : agents propres de France Télécom et agents détachés à France Télécom |
90 108 742 |
07 |
Personnels civils : retenues pour pensions : primes et indemnités ouvrant droit à pension |
302 719 966 |
08 |
Personnels civils : retenues pour pensions : validation des services auxiliaires : part agent : retenues rétroactives, versements du régime général, des autres régimes de base et de l’IRCANTEC |
35 000 000 |
09 |
Personnels civils : retenues pour pensions : rachat des années d’études |
2 500 000 |
10 |
Personnels civils : retenues pour pensions : agents propres de l’État et agents détachés dans une administration de l’État : surcotisations salariales du temps partiel et des cessations progressives d’activité |
14 468 108 |
11 |
Personnels civils : retenues pour pensions : agents propres des établissements publics et agents détachés hors l’État : surcotisations salariales du temps partiel et des cessations progressives d’activité |
26 122 157 |
12 |
Personnels civils : retenues pour pensions : agents propres de La Poste et agents détachés à La Poste |
204 836 112 |
14 |
Personnels civils : retenues pour pensions : agents propres et détachés des budgets annexes |
37 662 657 |
21 |
Personnels civils : contributions des employeurs : agents propres de l’État et agents détachés dans une administration de l’État sur un emploi conduisant à pension (hors allocation temporaire d’invalidité) |
31 004 290 305 |
22 |
Personnels civils : contributions des employeurs : agents détachés dans une administration de l’État sur un emploi ne conduisant pas à pension (hors allocation temporaire d’invalidité) |
42 855 613 |
23 |
Personnels civils : contributions des employeurs : agents propres des établissements publics et agents détachés en établissement public sur un emploi conduisant à pension |
5 586 225 265 |
24 |
Personnels civils : contributions des employeurs : agents détachés dans les collectivités et établissements publics locaux sur un emploi conduisant à pension |
156 013 256 |
25 |
Personnels civils : contributions des employeurs : agents détachés hors l’État sur un emploi ne conduisant pas à pension (hors France Télécom et hors La Poste) |
377 409 775 |
26 |
Personnels civils : contributions des employeurs : agents propres de France Télécom et agents détachés à France Télécom |
396 559 643 |
27 |
Personnels civils : contributions des employeurs : primes et indemnités ouvrant droit à pension |
1 072 467 819 |
28 |
Personnels civils : contributions des employeurs : validation des services auxiliaires : part employeur : complément patronal, versements du régime général, des autres régimes de base et de l’IRCANTEC |
40 000 000 |
32 |
Personnels civils : contributions des employeurs : agents propres de La Poste et agents détachés à La Poste |
503 834 267 |
33 |
Personnels civils : contributions des employeurs : allocation temporaire d’invalidité |
166 247 294 |
34 |
Personnels civils : contributions des employeurs : agents propres et détachés des budgets annexes |
240 891 074 |
41 |
Personnels militaires : retenues pour pensions : agents propres de l’État et agents détachés dans une administration de l’État sur un emploi conduisant à pension |
893 352 396 |
42 |
Personnels militaires : retenues pour pensions : agents détachés dans une administration de l’État sur un emploi ne conduisant pas à pension |
144 242 |
43 |
Personnels militaires : retenues pour pensions : agents propres des établissements publics et agents détachés en établissement public sur un emploi conduisant à pension |
561 125 |
44 |
Personnels militaires : retenues pour pensions : agents détachés dans les collectivités et établissements publics locaux sur un emploi conduisant à pension |
519 855 |
45 |
Personnels militaires : retenues pour pensions : agents détachés hors l’État sur un emploi ne conduisant pas à pension (hors France Télécom et hors La Poste) |
1 077 492 |
47 |
Personnels militaires : retenues pour pensions : primes et indemnités ouvrant droit à pension |
55 674 440 |
48 |
Personnels militaires : retenues pour pensions : validation des services auxiliaires : part agent : retenues rétroactives, versements du régime général, des autres régimes de base et de l’IRCANTEC |
100 000 |
49 |
Personnels militaires : retenues pour pensions : rachat des années d’études |
1 200 000 |
51 |
Personnels militaires : contributions des employeurs : agents propres de l’État et agents détachés dans une administration de l’État sur un emploi conduisant à pension |
9 437 141 921 |
52 |
Personnels militaires : contributions des employeurs : agents détachés dans une administration de l’État sur un emploi ne conduisant pas à pension |
1 673 234 |
53 |
Personnels militaires : contributions des employeurs : agents propres des établissements publics et agents détachés en établissement public sur un emploi conduisant à pension |
2 727 324 |
54 |
Personnels militaires : contributions des employeurs : agents détachés dans les collectivités et établissements publics locaux sur un emploi conduisant à pension |
1 842 222 |
55 |
Personnels militaires : contributions des employeurs : agents détachés hors l’État sur un emploi ne conduisant pas à pension (hors France Télécom et hors La Poste) |
2 418 483 |
57 |
Personnels militaires : contributions des employeurs : primes et indemnités ouvrant droit à pension |
671 886 389 |
58 |
Personnels militaires : contributions des employeurs : validation des services auxiliaires : part employeur : complément patronal, versements du régime général, des autres régimes de base et de l’IRCANTEC |
100 000 |
61 |
Recettes diverses (administration centrale) : Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales : transfert au titre de l’article 59 de la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010 |
487 571 739 |
62 |
Recettes diverses (administration centrale) : La Poste : versement de la contribution exceptionnelle de l’Établissement public national de financement des retraites de La Poste |
0 |
63 |
Recettes diverses (administration centrale) : versement du Fonds de solidarité vieillesse au titre de la majoration du minimum vieillesse : personnels civils |
1 157 000 |
64 |
Recettes diverses (administration centrale) : versement du Fonds de solidarité vieillesse au titre de la majoration du minimum vieillesse : personnels militaires |
0 |
65 |
Recettes diverses (administration centrale) : compensation démographique généralisée : personnels civils et militaires |
0 |
66 |
Recettes diverses (administration centrale) : compensation démographique spécifique : personnels civils et militaires |
0 |
67 |
Recettes diverses : récupération des indus sur pensions : personnels civils |
10 141 036 |
68 |
Recettes diverses : récupération des indus sur pensions : personnels militaires |
4 858 964 |
69 |
Autres recettes diverses |
8 000 000 |
Section : Ouvriers des établissements industriels de l’État |
1 935 578 185 |
|
71 |
Cotisations salariales et patronales |
339 982 250 |
72 |
Contribution au Fonds spécial des pensions des ouvriers des établissements industriels de l’État et au Fonds des rentes d’accident du travail des ouvriers civils des établissements militaires |
1 505 865 557 |
73 |
Compensations inter-régimes généralisée et spécifique |
89 000 000 |
74 |
Recettes diverses |
0 |
75 |
Autres financements : Fonds de solidarité vieillesse, Fonds de solidarité invalidité et cotisations rétroactives |
730 378 |
Section : Pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre et autres pensions |
1 543 513 468 |
|
81 |
Financement de la retraite du combattant : participation du budget général |
644 484 269 |
82 |
Financement de la retraite du combattant : autres moyens |
325 731 |
83 |
Financement du traitement de membres de la Légion d’honneur : participation du budget général |
229 063 |
84 |
Financement du traitement de membres de la Légion d’honneur : autres moyens |
0 |
85 |
Financement du traitement de personnes décorées de la Médaille militaire : participation du budget général |
534 437 |
86 |
Financement du traitement de personnes décorées de la Médaille militaire : autres moyens |
0 |
87 |
Financement des pensions militaires d’invalidité : participation du budget général |
849 987 453 |
88 |
Financement des pensions militaires d’invalidité : autres moyens |
872 547 |
89 |
Financement des pensions d’Alsace-Lorraine : participation du budget général |
15 913 181 |
90 |
Financement des pensions d’Alsace-Lorraine : autres moyens |
86 819 |
91 |
Financement des allocations de reconnaissance des anciens supplétifs : participation du budget général |
18 880 968 |
92 |
Financement des pensions des anciens agents du chemin de fer franco-éthiopien : participation du budget général |
45 000 |
93 |
Financement des pensions des sapeurs-pompiers et anciens agents de la défense passive victimes d’accident : participation du budget général |
12 054 000 |
94 |
Financement des pensions de l’ORTF : participation du budget général |
100 000 |
95 |
Financement des pensions des anciens agents du chemin de fer franco-éthiopien : autres financements : Fonds de solidarité vieillesse, Fonds de solidarité invalidité et cotisations rétroactives |
0 |
96 |
Financement des pensions des sapeurs-pompiers et anciens agents de la défense passive victimes d’accident : autres financements : Fonds de solidarité vieillesse, Fonds de solidarité invalidité et cotisations rétroactives |
0 |
97 |
Financement des pensions de l’ORTF : autres financements : Fonds de solidarité vieillesse, Fonds de solidarité invalidité et cotisations rétroactives |
0 |
98 |
Financement des pensions de l’ORTF : recettes diverses |
0 |
Total des recettes |
76 410 575 121 |
IV. – COMPTES DE CONCOURS FINANCIERS
(En euros) |
||
Numéro de ligne |
Intitulé de la recette |
Évaluation pour 2021 |
Accords monétaires internationaux |
0 |
|
01 |
Remboursements des appels en garantie de convertibilité concernant l’Union monétaire ouest-africaine |
0 |
02 |
Remboursements des appels en garantie de convertibilité concernant l’Union monétaire d’Afrique centrale |
0 |
03 |
Remboursements des appels en garantie de convertibilité concernant l’Union des Comores |
0 |
Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics |
10 491 376 505 |
|
01 |
Remboursement des avances octroyées au titre du préfinancement des aides communautaires de la politique agricole commune |
10 000 000 000 |
03 |
Remboursement des avances octroyées à des organismes distincts de l’État et gérant des services publics |
299 458 121 |
04 |
Remboursement des avances octroyées à des services de l’État |
176 918 384 |
05 |
Remboursement des avances octroyées au titre de l’indemnisation des victimes du Benfluorex |
15 000 000 |
06 |
Remboursement des avances octroyées aux exploitants d’aéroports touchés par la crise de covid-19 au titre des dépenses de sûreté-sécurité |
0 |
Avances à l’audiovisuel public |
3 719 020 269 |
|
01 |
Recettes |
3 719 020 269 |
Avances aux collectivités territoriales |
111 596 663 550 |
|
Section : Avances aux collectivités et établissements publics, et à la Nouvelle-Calédonie |
0 |
|
01 |
Remboursement des avances de l’article 70 de la loi du 31 mars 1932 et de l’article L. 2336-1 du code général des collectivités territoriales |
0 |
02 |
Remboursement des avances de l’article 14 de la loi n° 46-2921 du 23 décembre 1946 et de l’article L. 2336-2 du code général des collectivités territoriales |
0 |
03 |
Remboursement des avances de l’article 34 de la loi n° 53-1336 du 31 décembre 1953 (avances spéciales sur recettes budgétaires) |
0 |
04 |
Avances à la Nouvelle-Calédonie (fiscalité nickel) |
0 |
Section : Avances sur le montant des impositions revenant aux régions, départements, communes, établissements et divers organismes |
111 596 663 550 |
|
05 |
Recettes diverses |
10 870 154 969 |
09 |
Taxe d’habitation et taxes annexes |
36 892 051 543 |
10 |
Taxes foncières et taxes annexes |
44 293 010 880 |
11 |
Cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises |
9 450 436 938 |
12 |
Cotisation foncière des entreprises et taxes annexes |
10 091 009 220 |
Section : Avances remboursables de droits de mutation à titre onéreux destinées à soutenir les départements et d’autres collectivités affectés par les conséquences économiques de l’épidémie de covid-19 |
0 |
|
13 |
Avances remboursables de droits de mutation à titre onéreux destinées à soutenir les départements et d’autres collectivités affectés par les conséquences économiques de l’épidémie de covid-19 |
0 |
Prêts à des États étrangers |
1 918 829 056 |
|
Section : Prêts à des États étrangers en vue de faciliter la vente de biens et de services concourant au développement du commerce extérieur de la France |
280 988 134 |
|
01 |
Remboursement des prêts accordés à des États étrangers en vue de faciliter la vente de biens et de services concourant au développement du commerce extérieur de la France |
280 988 134 |
Section : Prêts à des États étrangers pour consolidation de dettes envers la France |
216 255 909 |
|
02 |
Remboursement de prêts du Trésor |
216 255 909 |
Section : Prêts à l’Agence française de développement en vue de favoriser le développement économique et social dans des États étrangers |
974 500 000 |
|
03 |
Remboursement de prêts octroyés par l’Agence française de développement |
974 500 000 |
Section : Prêts aux États membres de la zone euro |
447 085 013 |
|
04 |
Remboursement des prêts consentis aux États membres de l’Union européenne dont la monnaie est l’euro |
447 085 013 |
Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés |
542 787 105 |
|
Section : Prêts et avances pour le logement des agents de l’État |
30 000 |
|
02 |
Avances aux agents de l’État pour l’amélioration de l’habitat |
0 |
04 |
Avances aux agents de l’État à l’étranger pour la prise en location d’un logement |
30 000 |
Section : Prêts pour le développement économique et social |
524 267 105 |
|
06 |
Prêts pour le développement économique et social |
23 862 000 |
07 |
Prêts à la filière automobile |
405 105 |
09 |
Prêts aux petites et moyennes entreprises |
500 000 000 |
Section : Prêts à la société concessionnaire de la liaison express entre Paris et l’aéroport Paris-Charles de Gaulle |
0 |
|
10 |
Prêts à la société concessionnaire de la liaison express entre Paris et l’aéroport Paris-Charles de Gaulle |
0 |
Section : Avances remboursables et prêts bonifiés aux entreprises touchées par la crise de la covid-19 |
18 490 000 |
|
11 |
Avances remboursables et prêts bonifiés aux entreprises touchées par la crise de la covid-19 |
18 490 000 |
Total des recettes |
128 268 676 485 |
Mme le président. L’amendement n° I-1258, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. - Dans l’état A, les évaluations de recettes sont modifiées comme suit : |
||||||||||
|
1. Recettes fiscales |
|||||||||
|
1. Impôt sur le revenu |
|
||||||||
Ligne |
1101 |
Impôt sur le revenu |
minorer de |
4 818 186 708 € |
||||||
|
3. Impôt sur les sociétés |
|
||||||||
Ligne |
1301 |
Impôt sur les sociétés |
minorer de |
6 158 196 196 € |
||||||
|
4. Autres impôts directs et taxes assimilées |
|
||||||||
Ligne |
1499 |
Recettes diverses |
minorer de |
2 711 000 € |
||||||
|
5. Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques |
, |
||||||||
Ligne |
1501 |
Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques |
minorer de |
2 906 240 302 € |
||||||
|
6. Taxe sur la valeur ajoutée |
|
||||||||
Ligne |
1601 |
Taxe sur la valeur ajoutée |
minorer de |
2 729 717 613 € |
||||||
|
7. Enregistrement, timbre, autres contributions et taxes indirectes |
|
||||||||
Ligne |
1721 |
Timbre unique |
minorer de |
21 000 000 € |
||||||
Ligne |
1726 |
Produit de la taxe additionnelle à la taxe sur les certifications d’immatriculation des véhicules |
minorer de |
90 000 000 € |
||||||
Ligne |
1753 |
Autres taxes intérieures |
minorer de |
2 000 000 € |
||||||
Ligne |
1785 |
Produits des jeux exploités par la Française des jeux (hors paris sportifs) |
minorer de |
100 000 000 € |
||||||
Ligne |
1788 |
Prélèvement sur les paris sportifs |
minorer de |
40 000 000 € |
||||||
Ligne |
1799 |
Autres taxes |
minorer de |
80 000 000 € |
||||||
|
2. Recettes non fiscales |
|||||||||
|
2. Produits du domaine de l’État |
|
||||||||
Ligne |
2204 |
Redevances d’usage des fréquences radioélectriques |
majorer de |
155 096 000 € |
||||||
|
6. Divers |
|
||||||||
Ligne |
2604 |
Divers produits de la rémunération de la garantie de l’État |
majorer de |
205 000 000 € |
||||||
|
3. Prélèvements sur les recettes de l’État |
|||||||||
|
1. Prélèvements sur les recettes de l’État au profit des collectivités territoriales |
|
||||||||
Ligne |
3106 |
Prélèvement sur les recettes de l’État au profit du Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) |
majorer de |
5 000 000 000 € |
||||||
Ligne |
3107 |
Prélèvement sur les recettes de l’État au titre de la compensation d’exonérations relatives à la fiscalité locale |
majorer de |
1 000 000 000 € |
||||||
Ligne |
3122 |
Dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle |
majorer de |
12 000 000 € |
||||||
Ligne |
3123 |
Dotation pour transferts de compensations d’exonérations de fiscalité directe locale |
majorer de |
37 510 000 € |
||||||
Ligne |
3135 |
Prélèvement sur les recettes de l’État au titre de la compensation des pertes de recettes liées au relèvement du seuil d’assujettissement des entreprises au versement transport |
majorer de |
37 558 348 € |
||||||
Ligne |
3141 |
Soutien exceptionnel de l’État au profit des collectivités du bloc communal confrontées à des pertes de recettes fiscales et domaniales du fait de la crise sanitaire |
majorer de |
250 000 000 € |
||||||
Ligne |
3148 |
Prélèvement sur les recettes de l’État exceptionnel de compensation des fonds départementaux de péréquation des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) des communes ayant une population inférieure à 5 000 habitants (nouveau) |
majorer de |
50 000 000 € |
||||||
Ligne |
3149 |
Prélèvement exceptionnel sur les recettes de l’État au titre de la compensation des communes, des EPCI et des départements de la perte de recettes de CVAE en 2021 (nouveau) |
majorer de |
977 000 000 € |
||||||
Ligne |
3150 |
Prélèvement exceptionnel de compensation des pertes des revenus forestiers du bloc communal en 2020 (nouveau) |
majorer de |
82 000 000 € |
||||||
Ligne |
3151 |
Prélèvement exceptionnel sur les recettes de l’État de compensation du fonds national de péréquation des DMTO pour les départements ayant subi une catastrophe naturelle en 2020 (nouveau) |
majorer de |
35 000 000 € |
||||||
II. – L’alinéa 2 est ainsi rédigé : |
||||||||||
(En millions d’euros*) |
||||||||||
RESSOURCES |
CHARGES |
SOLDE |
||||||||
Budget général |
|
|
|
|||||||
Recettes fiscales brutes / dépenses brutes |
380 199 |
507 927 |
||||||||
À déduire : Remboursements et dégrèvements |
129 341 |
129 341 |
||||||||
Recettes fiscales nettes / dépenses nettes |
250 858 |
378 586 |
||||||||
Recettes non fiscales |
25 308 |
|||||||||
Recettes totales nettes / dépenses nettes |
276 166 |
378 586 |
||||||||
À déduire : Prélèvements sur recettes au profit des collectivités territoriales et de l’Union européenne |
77 654 |
|||||||||
Montants nets pour le budget général |
198 512 |
378 586 |
-180 074 |
|||||||
Évaluation des fonds de concours et crédits correspondants |
5 674 |
5 674 |
||||||||
Montants nets pour le budget général, y compris fonds de concours |
204 186 |
384 260 |
|
|||||||
Budgets annexes |
|
|
|
|||||||
Contrôle et exploitation aériens |
2 222 |
2 272 |
-50 |
|||||||
Publications officielles et information administrative |
159 |
152 |
+7 |
|||||||
Totaux pour les budgets annexes |
2 381 |
2 425 |
-43 |
|||||||
Évaluation des fonds de concours et crédits correspondants : |
||||||||||
Contrôle et exploitation aériens |
28 |
28 |
||||||||
Publications officielles et information administrative |
0 |
0 |
||||||||
Totaux pour les budgets annexes, y compris fonds de concours |
2 409 |
2 452 |
|
|||||||
Comptes spéciaux |
|
|
|
|||||||
Comptes d’affectation spéciale |
76 411 |
76 040 |
+370 |
|||||||
Comptes de concours financiers |
128 269 |
128 959 |
-691 |
|||||||
Comptes de commerce (solde) |
-19 |
|||||||||
Comptes d’opérations monétaires (solde) |
+51 |
|||||||||
Solde pour les comptes spéciaux |
|
|
-289 |
|||||||
Solde général |
|
|
-180 406 |
|||||||
III. – L’alinéa 5 est ainsi rédigé : |
||||||||||
Besoin de financement |
|
|||||||||
Amortissement de la dette à moyen et long termes |
123,1 |
|||||||||
Dont remboursement du nominal à valeur faciale |
122,3 |
|||||||||
Dont suppléments d’indexation versés à l’échéance (titres indexés) |
0,8 |
|||||||||
Amortissement de la dette reprise de SNCF Réseau |
1,3 |
|||||||||
Amortissement des autres dettes reprises |
0,0 |
|||||||||
Déficit à financer |
180,4 |
|||||||||
Autres besoins de trésorerie |
0,1 |
|||||||||
Total |
304,9 |
|||||||||
Ressources de financement |
|
|||||||||
Émissions de dette à moyen et long termes nettes des rachats |
260,0 |
|||||||||
Ressources affectées à la Caisse de la dette publique et consacrées au désendettement |
0,0 |
|||||||||
Variation nette de l’encours des titres d’État à court terme |
41,4 |
|||||||||
Variation des dépôts des correspondants |
0,0 |
|||||||||
Variation des disponibilités du Trésor à la Banque de France et des placements de trésorerie de l’État |
0,0 |
|||||||||
Autres ressources de trésorerie |
3,5 |
|||||||||
Total |
304,9 |
|||||||||
IV. - L’alinéa 12 est ainsi rédigé : |
||||||||||
3° Le plafond de la variation nette, appréciée en fin d’année et en valeur nominale, de la dette négociable de l’État d’une durée supérieure à un an est fixé à 137,7 milliards d’euros. |
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics. Au terme de l’examen de la première partie du projet de loi de finances pour 2021, il est nécessaire, comme à l’accoutumée, de tirer les conséquences sur l’article d’équilibre des amendements votés par votre assemblée, mais aussi de la révision du scénario macroéconomique auquel nous allons procéder.
À l’issue de son examen en première lecture par l’Assemblée nationale, le projet de loi de finances pour 2021 présentait un déficit budgétaire de 153,1 milliards d’euros. Les amendements votés par votre assemblée, ainsi que la révision du scénario macroéconomique présentée par le Gouvernement, conduisent à dégrader ce déficit de 27,3 milliards d’euros, pour atteindre un déficit de 180,4 milliards d’euros.
Cette évolution de l’équilibre budgétaire résulte d’une baisse des recettes fiscales nettes de plus de 20 milliards d’euros, dont 12,2 milliards d’euros au titre de la révision du scénario macroéconomique, d’une hausse des recettes non fiscales de 400 millions d’euros et d’une hausse des prélèvements sur recettes au profit des collectivités territoriales de 7,5 milliards d’euros.
En résumé, la révision du scénario macroéconomique conduit à une dégradation du solde de 12,2 milliards d’euros, et les 224 amendements adoptés par votre assemblée sur la première partie du projet de loi de finances conduisent à augmenter le déficit de l’État de 15,4 milliards d’euros.
En premier lieu donc, la révision du scénario macroéconomique portée par le Gouvernement, et que je présenterai dans une seconde délibération sur l’article liminaire, pour intégrer les évolutions récentes de la situation sanitaire et économique, se traduit par une dégradation du solde de 12,2 milliards d’euros.
Les recettes nettes d’impôts sur le revenu sont réduites de 1,6 milliard pour tirer les conséquences des trois points suivants : la baisse de la masse salariale, qui réduit le prélèvement à la source ; la baisse du solde sur les revenus de 2020 à la suite des plus-values du prélèvement à la source enregistrées en 2020 ; la modulation accrue de la part des contribuables, en particulier des indépendants.
Les recettes nettes d’impôt sur les sociétés sont minorées de 5,9 milliards d’euros, du fait de la révision de la répartition entre les acomptes versés en 2020 et le solde versé en 2021, d’une part, et de la baisse de la profitabilité des entreprises, en lien avec la dégradation du produit intérieur brut (PIB), d’autre part.
Les recettes de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) sont dégradées de 1,2 milliard d’euros, en lien avec la baisse anticipée de consommation de carburant au premier semestre, compte tenu des conditions sanitaires.
Enfin, les recettes nettes de TVA sont dégradées de 3,5 milliards d’euros, en lien avec la révision du scénario macroéconomique, qui entraîne une baisse des emplois taxables, et la révision à la baisse du PIB.
En deuxième lieu, nous intégrons les amendements adoptés par votre assemblée, qui conduisent à dégrader le solde de 15,4 milliards d’euros.
Le Sénat a adopté 244 amendements. J’évoquerai uniquement ceux dont les incidences sont les plus fortes sur le budget de l’État.
La hausse temporaire du taux forfaitaire d’abattement pour frais professionnels diminue les recettes d’impôt sur le revenu de 3,3 milliards d’euros.
L’affectation de deux nouvelles fractions de TICPE au titre du financement des collectivités ayant adopté un plan climat-air-énergie territorial (PCAET) ou un schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (Sraddet) représente 1 milliard d’euros.
Les versements anticipés du FCTVA d’une année pour les régimes n+2 et n+1 augmentent le prélèvement sur recettes (PSR) dédié de plus de 5 milliards d’euros en 2021.
La majoration du prélèvement sur recettes existantes, compensation des pertes de recettes au titre des exonérations de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) en matière de logement social, représente 1 milliard d’euros ; c’est une estimation stable d’une année sur l’autre.
La création d’un prélèvement sur recettes pour compenser les pertes de recettes de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) en 2021, au profit des communes, des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) et des départements, représente 1 milliard d’euros.
Enfin, au tableau de financement, la hausse du besoin de financement total résultant de l’augmentation du déficit, constatée à l’issue de l’examen au Sénat de la première partie du projet de loi de loi de finances, sera financée par une augmentation des encours de titres de l’État à court terme.
Madame la présidente, en conclusion de cette présentation de l’article d’équilibre et de l’amendement du Gouvernement y afférent, je vous annonce que je demanderai une seconde délibération de l’article liminaire pour mettre celui-ci en cohérence avec la révision des prévisions macroéconomiques et les votes intervenus en première partie du projet de loi de finances.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Comme chaque année, le Gouvernement a déposé un amendement visant à tirer les conséquences sur le solde budgétaire des votes intervenus au Sénat au cours de l’examen de la première partie du projet de loi de finances. Cette année, il devrait également déposer un amendement sur l’article liminaire.
La situation est un peu délicate, car la révision du scénario macroéconomique, avant qu’elle ne soit formalisée à l’article liminaire, est d’ores et déjà prise en compte dans les recettes révisées par le présent amendement.
En outre, il faut rappeler que cet amendement porte uniquement sur les recettes, et non sur les dépenses.
J’estime toutefois que le Gouvernement devrait tirer, lors de l’examen de la seconde partie du projet de loi de finances, les conséquences de l’évolution de la situation macroéconomique et des annonces faites hier soir par le Président de la République. C’est un débat que nous aurons dans les jours à venir.
L’amendement du Gouvernement porte – vous l’avez dit, monsieur le ministre – le déficit inscrit à l’article d’équilibre à 180,4 milliards d’euros, contre 153,1 milliards d’euros dans le texte transmis au Sénat, soit une dégradation de 27,3 milliards d’euros.
Près de la moitié de cette dégradation est due à la révision du contexte macroéconomique que je vous ai présentée, et non aux amendements adoptés par les sénateurs. Je rappelle que cette dégradation est prise en compte pour les recettes, et pas encore pour les dépenses.
La révision du scénario macroéconomique réduit en effet, à elle seule, les recettes fiscales nettes de 11,8 milliards d’euros.
S’agissant des amendements adoptés, le Gouvernement a présenté ses estimations de chiffrage.
On pourrait discuter de certains de ces chiffrages, voire de l’absence de chiffrage. Par exemple, les conséquences de l’amendement n° I-58 rectifié de la commission, qui crée une contribution acquittée par les assureurs visant à ce que ceux-ci participent à l’effort de solidarité nationale, ne sont pas prises en compte, pas davantage d’ailleurs que les conséquences de l’amendement n° I-1252 de la commission instaurant une taxe sur la vente à distance.
De même, nous estimons à 2,3 milliards d’euros le coût de l’amendement n° I-1085 rectifié ter, modifié par le sous-amendement n° I-1241, qui augmente le taux forfaitaire d’abattement pour frais professionnels dont le Gouvernement estime, lui, le coût à 3,3 milliards d’euros.
Toutefois, d’autres éléments pourraient également être pris en compte parmi les votes intervenus. Dans l’ensemble, la commission n’a donc souhaité ni rejeter cet amendement ni présenter, comme l’an passé, un sous-amendement.
La commission s’en remet donc à la sagesse du Sénat, d’autant que l’amendement à l’article liminaire n’est pas encore adopté, alors que la révision du scénario macroéconomique a un effet majeur sur les recettes.
Mme le président. Je mets aux voix, modifié, l’ensemble constitué de l’article d’équilibre et de l’état A annexé.
(L’article 32 et l’état A annexé sont adoptés.)
Demande de seconde délibération
Mme le président. En application de l’article 47 bis, alinéa 1, du règlement du Sénat, le Gouvernement demande qu’il soit procédé à une seconde délibération de l’article liminaire du projet de loi de finances pour 2021.
Je rappelle que la seconde délibération est de droit lorsqu’elle est demandée par le Gouvernement.
Conformément à l’article 43, alinéa 5, du règlement du Sénat, lorsqu’il y a lieu à seconde délibération, les textes adoptés lors de la première délibération sont renvoyés à la commission, qui doit présenter un nouveau rapport.
La commission demande-t-elle une suspension de séance afin qu’elle puisse se réunir ?
M. Claude Raynal, président de la commission des finances. Non, madame la présidente.
Mme le président. Le Sénat a précédemment adopté l’article liminaire dans la rédaction suivante :
Les prévisions de solde structurel et de solde effectif de l’ensemble des administrations publiques pour l’année 2021, l’exécution de l’année 2019 et la prévision d’exécution de l’année 2020 s’établissent comme suit :
(En points de produit intérieur brut) |
|||
Exécution 2019 |
Prévision d’exécution 2020 |
Prévision 2021 |
|
Solde structurel (1) |
-2,2 |
-0,6 |
-3,6 |
Solde conjoncturel (2) |
0,2 |
-7,2 |
-2,8 |
Mesures ponctuelles et temporaires (3) |
-1,0 |
-3,5 |
-0,2 |
Solde effectif (1 + 2 + 3) |
-3,0 |
-11,3 |
-6,7 |
Mme le président. L’amendement n° A-1, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Rédiger ainsi cet alinéa :
(En points de produit intérieur brut) |
|||
Exécution 2019 |
Prévision d’exécution 2020 |
Prévision 2021 |
|
Solde structurel (1) |
-2,2 |
-0,6 |
-3,4 |
Solde conjoncturel (2) |
0,2 |
-7,2 |
-4,5 |
Mesures ponctuelles et temporaires (3) |
-1,0 |
-3,5 |
-0,2 |
Solde effectif (1 + 2 + 3) |
-3,0 |
-11,3 |
-8,1 |
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Comme j’ai eu l’occasion de l’indiquer jeudi dernier, lors de l’ouverture de nos débats, le Gouvernement a saisi d’une prévision de croissance pour l’année 2021 le Haut Conseil des finances publiques, lequel a rendu son avis lundi 23 novembre.
C’est la raison pour laquelle nous sommes en mesure de proposer au Sénat d’actualiser l’article liminaire pour l’année 2021, de la même manière que nous lui avions proposé d’actualiser les articles du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Les prévisions de l’année 2020 avaient été intégrées à cet article liminaire par l’adoption de l’amendement n° I-1084.
La nouvelle prévision pour 2021 tient compte, pour l’essentiel, de la mise à jour des prévisions économiques. L’écart par rapport à la prévision de solde public initiale s’explique par une baisse des prélèvements obligatoires, par une hausse des dépenses conjoncturelles d’assurance chômage pour un point de PIB, un effet de –0,2 point lié à la baisse de la prévision de PIB, et par la prise en compte des amendements pour un effet de 0,3 point de PIB. Un effet d’arrondi explique que le déficit que je présenterai ultérieurement s’établisse à 8,1 %.
Ainsi, nous vous proposons d’actualiser l’article liminaire en intégrant comme hypothèse de croissance pour 2021 une croissance à 6 %, plutôt que 8 %, en intégrant une hypothèse de déficit public à 8,1 % au lieu de 6,7 %. Ce sont là les principales modifications.
Je précise que le solde conjoncturel deviendrait ainsi fortement négatif en 2020 sous l’effet de la récession, après avoir été proche de zéro entre 2018 et 2019, et se réduirait ensuite en 2021 avec le rebond d’activité.
Le solde des mesures exceptionnelles et temporaires intègre les mesures d’urgence sanitaire et économique uniquement pour l’année 2020, et le solde structurel se redresse en 2020 à un niveau de –0,6 % de PIB, après s’être situé à –0,2 % en 2019, avant de se dégrader en 2021 à hauteur de –3,4 % du PIB.
Telles sont ces modifications à l’article liminaire que nous proposons à l’occasion de cette seconde délibération.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. L’amendement déposé par le Gouvernement à l’article liminaire, qui a été précédemment étudié par notre commission, vise à tirer les conséquences de la révision du scénario macroéconomique gouvernemental, qui table désormais sur une croissance du PIB de 6 % en 2021, contre 8 % initialement, ainsi que des votes intervenus au Sénat au cours de l’examen de la première partie du projet de loi de finances.
Il en résulte une dégradation du déficit public de 1,4 point de PIB. Ce déficit s’élèverait donc à 8,1 points de PIB en 2021, contre 6,7 points dans le projet de loi de finances initiale.
La prise en compte des amendements adoptés par le Sénat sur la première partie n’explique que 20 % de la dégradation du déficit public, soit 0,3 point de PIB.
Nous assumons ce choix de renforcer les mesures de soutien et de relance pour préserver le tissu productif, relancer l’économie et aider les collectivités locales à faire face à la crise. Nous avons veillé à ce que ces mesures présentent un caractère temporaire, pour ne pas peser sur les déficits structurels.
Le reliquat, soit 80 % de cette dégradation du déficit public, tient à la révision du scénario macroéconomique qui pèse à la fois sur les recettes, les dépenses et le dénominateur du ratio, à savoir le PIB.
À cet égard, nous avons entendu les critiques du Haut Conseil des finances publiques, qui constate que sa saisine n’était pas accompagnée d’un scénario macroéconomique complet, comprenant notamment des informations sur l’évolution des prix et l’emploi. Cela ne paraît toutefois pas de nature à modifier notre analyse sur le caractère, que je qualifierai de raisonnable, du scénario gouvernemental.
Le Haut Conseil s’est par ailleurs plaint de n’avoir pas été saisi des nouvelles prévisions concernant les finances publiques, mais le Gouvernement n’y était pas tenu par l’article 16 de la loi organique de 2012. Ces critiques ne me semblent donc pas de nature à justifier un rejet de l’amendement proposé par le Gouvernement.
En revanche, nous souhaiterions que les annonces présidentielles faites hier soir, qui vont se traduire par de nouvelles mesures de dépenses pesant sur l’exercice 2021, puissent faire l’objet d’amendements de crédit au Sénat dans le cadre de la seconde partie. Cela est d’autant plus légitime que des chiffrages précis ont déjà été annoncés dans les médias, notamment par le ministre de l’économie et des finances dont j’attends toujours, comme mes collègues, qu’il fasse une première apparition dans notre hémicycle…
Le dépôt de ces amendements permettrait de rappeler l’article liminaire en fin de seconde partie, pour que le Sénat s’exprime sur un projet de loi de finances sincère, à jour des derniers développements économiques et budgétaires. Cela ne vous empêchera d’ailleurs pas d’ajuster ensuite les dispositifs au cours de la navette.
Dans l’attente, sur cet amendement, puis sur l’article liminaire ainsi modifié, je m’en remets à la sagesse de notre assemblée.
Mme le président. La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour explication de vote.
Mme Sophie Taillé-Polian. Pas plus que nous n’avions voté la première mouture de cet article liminaire, nous ne voterons la seconde, et ce pour plusieurs raisons.
D’abord, cet article liminaire, dans sa conception même, nous entrave, nous encadre et nous enferme dans une vision extrêmement libérale et austéritaire liée aux traités européens que la France a signés. Cette vision nous contraint à travailler sur nos finances publiques à l’aune d’indicateurs qui, à notre sens, sont totalement en décalage avec les besoins historiques et écologiques, et avec les crises auxquelles nous sommes confrontés.
On nous dit que la logique austéritaire est en pause. Je crois tout de même que nous devrions procéder à une révision approfondie de cette logique qui nous entrave très fortement, notamment en termes de réponse climatique, de justice sociale et de sauvegarde de nos services publics.
Par ailleurs, M. le rapporteur général l’a dit, la proposition de révision qui nous est soumise se fonde, selon le Haut Conseil des finances publiques, sur une lecture étriquée, étroite, de la loi organique. Cette lecture nous empêche d’avoir une vision des choses qui soit la plus proche possible de ce que l’on peut aujourd’hui prévoir.
Nous en sommes tous d’accord, il est extrêmement difficile – beaucoup plus que les autres années – de disposer de prévisions fiables. La situation est exceptionnelle, nous en convenons.
Cependant, le choix a été fait de saisir tardivement le Haut Conseil des finances publiques et de faire une lecture étroite de la loi organique. Par conséquent, de nombreux éléments ne sont pas pris en compte.
Enfin – M. le rapporteur général l’a dit également –, un certain nombre d’annonces ont été faites. De nouveau, le conseil de défense a délibéré dans l’opacité.
Le Président de la République a délivré son message aux Français. De nouvelles mesures sont annoncées. Ce matin, le ministre de l’économie nous a annoncé des chiffres : 1,6 milliard d’euros par mois… Tout cela aura une incidence sur le projet de budget donc nous débattons ; or ces éléments ne figurent pas dans ce qui vient de nous être présenté.
Nous voterons donc contre l’amendement.
Mme le président. Je mets aux voix l’article liminaire, modifié.
(L’article liminaire est adopté.)
Vote sur l’ensemble de la première partie du projet de loi
Mme le président. Avant de passer au vote sur l’ensemble de la première partie du projet de loi de finances pour 2021, je vais donner la parole à ceux de nos collègues qui ont été inscrits par les groupes pour expliquer leur vote.
Je rappelle au Sénat que, conformément à l’article 42 de la loi organique relative aux lois de finances du 1er août 2001 et à l’article 47 bis, alinéa 2, de notre règlement, lorsque le Sénat n’adopte pas la première partie du projet de loi de finances, l’ensemble du projet de loi est considéré comme rejeté.
J’indique au Sénat que, compte tenu de l’organisation du débat décidée par la conférence des présidents, chacun des groupes dispose de cinq minutes pour ces explications de vote, à raison d’un orateur par groupe.
La parole est à M. Antoine Lefèvre, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Antoine Lefèvre. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, notre assemblée s’apprête à voter la première partie du projet de loi de finances pour 2021, après plusieurs jours de débats. Je salue leur qualité et constate que, une fois encore, le texte qui en résulte porte la marque du Sénat.
Si je devais résumer la coloration que la majorité sénatoriale, sous l’impulsion de notre rapporteur général Jean-François Husson, a souhaité donner à ce texte voté dans un contexte de crise inédit, je retiendrais trois points, relatifs aux collectivités, aux entreprises et aux ménages.
Nous avons souhaité, d’une part, introduire de nombreuses mesures en faveur des collectivités territoriales.
Nous sommes depuis longtemps persuadés de la nécessité de baisser les impôts de production, cette anomalie française qui agit comme un boulet pour nos entreprises soumises à une forte pression concurrentielle dans une économie ouverte.
Nous avions proposé à ce titre, dès le troisième projet de loi de finances rectificative, la suppression de la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S). Nous soutenons la baisse de la CVAE et de la cotisation foncière des entreprises (CFE), et nous l’avons votée. Mais nous ne pouvons accepter que cette réforme se fasse au détriment des collectivités et de leur autonomie financière.
Les dispositions que nous avons adoptées répondent à la double problématique d’assurer la compétitivité de nos entreprises, tout en ne pénalisant pas le financement des collectivités. L’abaissement du plafond de la contribution économique territoriale (CET) à 1,5 % permet à ce titre de sécuriser le dispositif pour nos entreprises. Les amendements adoptés en faveur des collectivités permettent, quant à eux, d’assurer des financements pérennes. Nous avons voulu garantir au maximum le maintien des ressources locales, durement impactées par la crise sanitaire.
La suppression de l’article 22 bis était une évidence, face à ce que l’on pourrait qualifier de mauvais coup fait aux départements. La décentralisation, cela ne peut pas être, d’un côté, des compensations au bon vouloir de l’État lorsque les choses vont bien et, de l’autre, un « effet d’aubaine » qui justifierait de changer les règles en cours de jeu lorsque la situation se dégrade.
Pour cette même raison, nous avons souhaité compenser les pertes de recettes de CVAE en 2021 grâce à un nouveau prélèvement sur recettes à destination du bloc communal et des départements. Notre groupe a par ailleurs souhaité reconduire en 2021 le mécanisme voté en juillet de compensation globalisée des pertes de recettes des collectivités.
Le texte que nous votons comporte, en outre, de nombreuses mesures de soutien en faveur des entreprises, visant à permettre une reprise rapide de leur activité. Je pense aux amendements proposés par la commission des finances, visant à instaurer des suramortissements pour l’achat d’avions ou de poids lourds moins polluants, ainsi qu’au mécanisme particulièrement efficace de carry back, que nous avions déjà proposé lors de l’examen du PLFR 3.
Certains sujets ont provoqué de vrais débats, comme la contribution exceptionnelle sur les assurances ou la taxe sur les très grandes entreprises de vente en ligne. Ces dispositifs ne règlent pas tout. Ils permettent néanmoins de souligner l’attention que porte le Sénat à certains secteurs sinistrés ayant besoin de toutes les ressources mobilisables, qu’elles viennent du secteur des assurances ou de celui des entreprises les moins touchées par la crise.
Dans un contexte de montée de la précarité et des pauvretés, nous avons voulu afficher notre soutien aux indépendants et aux petits commerces, qui sont insuffisamment pris en compte par le plan d’aide du Gouvernement. L’ensemble des dispositifs adoptés en première partie, si le Gouvernement les retient, doit permettre de les soutenir et de les aider à franchir le cap de cette crise sanitaire.
Nous avons également souhaité inclure différentes mesures en faveur des ménages pénalisés par l’épidémie. En la matière, le Sénat a envoyé des messages forts : suppression de la TVA sur les tests covid et, sur l’initiative de notre collègue Karoutchi, suppression du plafond d’exonération des heures supplémentaires pour les professionnels médicaux hospitaliers.
Les ménages ont souvent eu le sentiment de subir un véritable matraquage fiscal, particulièrement ceux de la classe moyenne. Plus récemment, ce matraquage a pris la forme d’une écologie punitive appliquée en dehors de tout réalisme de terrain. Nous avons, à cette fin, souhaité lisser, sur cinq ans au lieu de trois, la hausse du malus automobile. Nous soutiendrons, en seconde partie, la suppression du malus au poids, qui risque de pénaliser les familles.
Enfin, notre groupe a été vigilant sur le risque d’une thésaurisation préjudiciable à l’économie réelle et, à ce titre, a adopté plusieurs amendements visant à débloquer l’épargne accumulée durant le confinement. Je salue, à cette occasion, les initiatives de notre collègue Christine Lavarde.
Mes chers collègues, il reste encore beaucoup de travail à réaliser pour ce budget pour 2021. Dès demain, nous aborderons les crédits du plan de relance dont notre rapporteur général, Jean-François Husson, a largement déploré les manques et les insuffisances.
Je crois, cependant, que nous pouvons être fiers de la première partie ainsi amendée. Elle prévoit les possibilités d’une relance plus complète et plus massive au service du redressement de notre pays.
Le groupe Les Républicains votera donc cette première partie et poursuivra, avec la même détermination et la même exigence, l’examen de la seconde. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme le président. La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
Mme Vanina Paoli-Gagin. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, « pour les représentants, il n’y a rien de plus facile que de voter une dépense, et rien de plus difficile que de voter une recette. » Avec le temps, ce mot de Frédéric Bastiat n’a rien perdu de sa justesse.
Et pour cause : lorsqu’on vote une dépense, on croit faire des gagnants ; lorsqu’on vote une recette, on pense faire des perdants. Ce raisonnement peut valoir au cas par cas, mais ne tient ni à l’échelle d’une nation ni sur le long terme.
Alors que notre taux d’endettement a bondi de 20 points de PIB en un an, nous devons faire preuve de lucidité face à ce mauvais penchant. La crise sanitaire risque de se prolonger, et il nous faut, dès maintenant, préparer un nouveau modèle de développement pour rembourser notre dette.
Cette crise globale est trop profonde pour que nous cherchions à la régler par plus de dépenses et moins de recettes. Le défi est immense. Il consiste à préparer le terrain pour une croissance d’avenir, en semant les germes de l’innovation et de la réparation tout en neutralisant les ferments de colère sociale.
Cette première partie du projet de loi de finances pour 2021 nous a permis de confronter, de façon concrète, différentes visions de ces nouvelles perspectives de croissance.
Le groupe Les Indépendants s’est attaché à défendre les mesures qui renforceront, demain, la compétitivité de la France et l’attractivité de nos territoires. Je pense, en particulier, à la baisse des impôts de production. Je suis certaine que nous en verrons très rapidement les bénéfices pour nos petites et moyennes entreprises (PME) et nos entreprises de taille intermédiaire (ETI) qui investiront et recruteront davantage dans nos territoires.
Je me réjouis que cette mesure ait reçu un accueil très favorable du Sénat. Nous sommes nombreux, sur ces travées, à vouloir la réindustrialisation de notre économie et la relocalisation de nos productions en phase avec la transition écologique. Voilà qui devrait y contribuer efficacement.
La partie n’était pourtant pas gagnée d’avance, puisque cette baisse d’impôts s’effectuera aux dépens des collectivités locales, dont nous souhaitons tous préserver l’autonomie financière. Mais sur ce point, je crois que les amendements présentés par la commission des finances ont renforcé les gages que le Gouvernement avait donnés. L’État compensera bien ces pertes de recettes, et les collectivités n’auront plus à choisir entre équilibre de leurs finances et compétitivité de leur territoire.
Pour nous sortir de la crise dans laquelle le virus nous a plongés, nous devrons innover et produire en France, sur l’ensemble du territoire. C’est pourquoi notre stratégie doit consister à alléger la pression fiscale qui pèse sur le capital et le travail, quitte à augmenter la fiscalité sur la consommation.
En matière de politique fiscale, nous assumons le pari de la compétitivité de nos territoires. C’est dans la même logique que nous avons reversé au débat notre proposition de TVA sociale, dont l’objet est de taxer davantage la consommation pour mieux rémunérer le travail.
L’intérêt de cette mesure est double. D’une part, à l’heure du « consommer moins, mais mieux », faire basculer nos prélèvements obligatoires depuis le travail et le capital vers la consommation revient à renforcer notre compétitivité-coût. Cela permet d’avantager les produits français face aux produits étrangers et d’améliorer notre balance commerciale qui en a bien besoin.
D’autre part, alors qu’un consensus politique s’est formé autour de la nécessité de laisser filer nos déficits pour financer la lutte contre l’épidémie, peu de propositions ont surgi pour rééquilibrer sérieusement nos finances publiques.
Disons-le : nous ne pourrons pas nous contenter de voter des dépenses supplémentaires. C’est pourquoi le groupe Les Indépendants assume également son soutien à certaines hausses d’impôts et à la suppression de certaines baisses.
En voici deux exemples emblématiques : la suppression de la majoration d’impôt pour les entrepreneurs n’adhérant pas à des organismes de gestion agréés (OGA). Nous sommes favorables à la baisse d’impôts pour les indépendants, mais pas au risque d’entamer la fiabilité des comptes.
Plus emblématiques encore sont les deux contributions exceptionnelles que nous avons votées sur les assurances et les ventes en ligne.
Bien sûr, l’impôt n’est pas une baguette magique qui, d’un coup, pourrait changer la réalité. Néanmoins, les Français attendent des entreprises qui ont tiré profit de la crise aux dépens des autres et au gré des circonstances, qu’elles fassent un effort de solidarité. Je doute que l’Assemblée nationale conserve ces contributions exceptionnelles de solidarité, mais nous avons souhaité envoyer un message fort, et nous espérons qu’il sera entendu par les grandes entreprises.
Je considère donc que le Sénat a apporté, de manière responsable, d’importantes améliorations à ce budget. C’est dans ce même esprit de responsabilité que notre groupe souhaite en aborder la seconde partie.
Nous voterons donc en faveur de cette première partie qui pose les premiers jalons d’une fiscalité adaptée aux défis de la sortie de crise et de l’après-crise. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
Mme le président. La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
Mme Sophie Taillé-Polian. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous sommes au cœur de la crise et, à l’issue de ces longues heures de débats, les nombreuses difficultés que nous avions initialement soulignées ne sont malheureusement pas résolues.
Nous avons apporté, il est vrai, un certain nombre d’améliorations à ce projet de loi. Nous avons eu des points d’accord avec la majorité sénatoriale sur les questions du logement, de la participation des assurances au paiement de la crise, de la vente en ligne, ainsi que sur l’amélioration des conditions financières permettant aux collectivités d’assurer cette crise tout en gardant leur autonomie.
Force est toutefois de constater que, sur bien des points qui nous semblent absolument fondamentaux, comme l’ampleur de la crise sociale et écologique, nous ne trouvons nulle trace de la refondation évoquée par le Président de la République le 13 avril dernier. Je pense aux baisses non ciblées et non conditionnées des impôts sur les entreprises, qui viendront grever le budget de l’État de 10 milliards d’euros par an et augmenter les déficits et la dette. Cette même dette « covid » que le ministre Bruno Le Maire appelait encore, ce matin, à rembourser en vingt ans grâce à des réformes structurelles, comme celle des retraites.
Nous savons que le souhait du Gouvernement est de faire payer cette crise, demain, par les salariés, les Français et les territoires, avec la réduction des services publics ; surtout pas par la participation des plus hauts revenus !
Nous avons pourtant été inventifs en soumettant toutes sortes de propositions pour que les plus fortunés mettent la main à la poche. Et ce d’autant plus que, durant cette période, les deux derniers déciles des Français ont accumulé une épargne « forcée ».
Quelle obstination, de la part de ce Gouvernement et de la majorité sénatoriale, à ne pas regarder en face la réalité des inégalités qui se creusent et la forte demande de justice sociale ! Nous n’avons pas été en mesure de répondre à ces réalités.
Quelle obstination à refuser les propositions visant à prendre en considération la crise environnementale majeure qui se trouve juste devant nous !
Quelle obstination à refuser, sur le fond comme sur la forme, les propositions de la Convention citoyenne pour le climat ! Nous regrettons le mépris dont a fait l’objet cette convention pour laquelle des citoyens se sont mobilisés et ont travaillé avec des experts. Je le répète, les propositions formulées par ses membres – nous les avons relayées à de nombreuses occasions –, ont bien souvent été accueillies par le mépris. Je regrette beaucoup cette attitude à l’encontre d’un désir de regain de démocratie sous des formes nouvelles.
Nous avons connu des moments difficiles, aussi bien pour nos propositions aux dimensions les plus importantes en termes de basculement que pour celles touchant à des aspects plus modestes. Lorsque nous avons proposé de supprimer l’exonération de TICP pour les croisières – on sait qu’elles sont de véritables désastres écologiques –, nous nous sommes vus répondre que ce n’était pas possible !
Et quand nous avons proposé d’exonérer les bateaux des organisations non gouvernementales qui repêchent des migrants dans la mer Méditerranée, nous avons essuyé une fin de non-recevoir. Je dois vous faire part de notre grande incompréhension et de notre vrai malaise par rapport aux décisions prises dans cet hémicycle.
Alors que nous sommes dans une situation de crise profonde, le Gouvernement isole, dans ce plan de relance, un certain nombre de dispositifs pour aider l’économie, tout en oubliant les pauvres, en renonçant à toute justice fiscale et en ne conditionnant aucunement les aides aux entreprises. Or nous savons que ces dernières seront aussi inefficaces que l’ont été le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) et toutes les autres aides de ces dernières années au regard de l’emploi.
Nous ne pourrons, bien évidemment, pas voter les recettes de ce projet de loi de finances, mais vous nous trouverez résolument présents dans cet hémicycle pour l’examen de la seconde partie. Nous ferons des propositions pour faire avancer cette écologie qui constitue à la fois notre projet et, selon nous, la boussole de l’égalité et de la justice fiscale. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – Mme Martine Filleul et M. Rémi Féraud applaudissent également.)
Mme le président. La parole est à M. Julien Bargeton, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
M. Julien Bargeton. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous avons eu des débats comme toujours intéressants, courtois, sereins et pondérés. Nous avons retrouvé les éléments traditionnels et les passages obligés que nous nous connaissons bien en loi en finances.
Ces discussions ont abouti, in fine, à dégrader le déficit de 15 milliards d’euros – c’est le chiffre du ministre. Même s’il y a toujours des débats sur son évaluation, ce déficit se situe entre 12 et 15 milliards d’euros.
Notre groupe, de ce fait, s’interroge sur le vote d’un texte modifié dégradant davantage le déficit public de 15 milliards d’euros. Le suspense ne sera pas très long : nous allons le voter, parce que c’est un ensemble de mesures qui aboutit à cette dégradation.
Cinq, six ou sept des amendements adoptés sur ces travées correspondent à l’essentiel de ces 15 milliards d’euros. Toutefois, l’équilibre du texte voté par l’Assemblée nationale n’est pas modifié. Le Sénat, en somme, valide le texte proposé par le Gouvernement et amendé par les députés.
Notre assemblée n’est pas revenue sur cet élément important que constitue la bienheureuse diminution des impôts de production. Nous assumons d’aider les entreprises et, en même temps, de dépenser pour les plus précaires et les plus jeunes ; nous le verrons dans l’examen de sa seconde partie, ce budget comporte de nombreuses dépenses sociales.
La trajectoire n’est pas remise en cause concernant la taxe d’habitation qui n’a pas fait l’objet d’amendements de suppression. L’armature principale de ce texte, à savoir l’indexation sur l’inflation du barème de l’impôt sur le revenu, la suppression de niches fiscales inefficientes ou les mesures relative à l’amortissement, n’a pas été bouleversée par le Sénat.
Dès lors, il n’y a pas, de notre part, de justification à le rejeter parce qu’il ne s’agit pas d’un contre-budget, mais de mesures sectorielles parfois bienvenues. Nous en avons d’ailleurs proposé certaines en faveur de secteurs qui souffrent, comme la culture ou les collectivités locales.
Nous sommes d’autant plus enclins à voter ce texte que les amendements importants de notre groupe ont été retenus, notamment au sujet de l’outre-mer, de la blockchain ou des sociétés publiques locales (SPL) à caractère culturel. Je tiens à remercier, à cet égard, M. le rapporteur général et nos collègues qui les ont votés.
Je crois, en outre, que cette période inédite justifie un vote favorable. On pourrait, effectivement, s’interroger sur l’importance de la dégradation du déficit résultant des votes émis par le Sénat. On peut d’autant plus s’interroger lorsqu’il est le fait de personnes qui s’inquiètent du remboursement de la dette covid par les générations futures, du montant des déficits, mais qui ajoutent 15 milliards d’euros de dette supplémentaire…
Les Français attendent de nous que nous soyons à la hauteur des exigences. Vu la façon dont s’est déroulé le débat, nous avons d’autant moins de légitimité à rejeter ce budget que des propositions de hausses d’impôts provenant d’autres travées de cet hémicycle ont été repoussées. Nous pensons, en effet, que dans cette crise conjoncturelle de réduction de l’activité économique, il ne faut pas augmenter les impôts. Je ne doute pas que ce débat viendra et certains feront certainement des propositions en ce sens lors des échéances électorales à venir. Mais comme le disait Keynes, une période de récession ne constitue pas le moment propice pour baisser la dépense publique – nous l’augmentons – ni pour augmenter les impôts – nous les réduisons.
À partir du moment où les hausses d’impôts proposées n’ont pas été retenues, nous ne pouvons que voter cette première partie, tout en espérant que les échanges avec l’Assemblée nationale soient à la hauteur des événements et permettent d’intégrer certains des apports du Sénat. Nous espérons ainsi que la commission mixte paritaire et la suite des échanges seront conformes au caractère qu’ont, jusqu’ici, revêtu les débats : sereins, parfois avec des différences de vues, mais sans volonté de remettre en cause ce que propose le Gouvernement. Pour l’ensemble de ces raisons, nous voterons la première partie de ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
Mme le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.
M. Jean-Claude Requier. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, pour rappeler les propos des orateurs précédents, l’examen de cette première partie de PLF aura, plus que jamais, fait figure de marathon : endurance, moments d’effort supplémentaire, mais aussi moments de régime de croisière…
Le protocole sanitaire n’est pas toujours sans conséquence sur nos conditions de travail, nous obligeant à suivre certaines règles qui n’avaient pas cours habituellement, et rendant la période budgétaire encore plus austère qu’elle peut parfois l’être.
Sur le fond, après plus de mille amendements examinés, nous pouvons retenir plusieurs points. La majorité sénatoriale a proposé, comme chaque année, le rehaussement du plafond du quotient familial. Constants dans nos propositions, nous avons redéposé, malheureusement avec moins de succès, l’« amendement Caillaux » sur l’impôt universel. Cette année, il comportait une nouveauté : la déductibilité de la contribution sociale généralisée (CSG) et de la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS), contributions qui n’existaient évidemment pas à l’époque de notre illustre prédécesseur.
Instructifs ont été les débats sur la TVA, impôt toujours très amendé – je regrette d’ailleurs que nos nombreuses propositions à ce sujet n’aient pas rencontré le succès escompté. Remarquons qu’il existe un véritable débat sur la capacité de la France à fixer plus librement ses propres taux, presque à l’instar des collectivités pour les impositions locales. On critique souvent le manque d’harmonisation fiscale au niveau européen, mais la TVA, dont le produit est majeur pour les finances de l’État, est encadrée par la directive de 2006 qui interdit, en particulier, des taux trop bas. Souvent, la liste de produits et services pouvant bénéficier de taux réduits ou super-réduits se heurte aux priorités du moment, comme aujourd’hui en période de crise sanitaire. Il y a là des motifs d’interrogation légitimes, et notre commission des finances pourrait pousser plus loin la réflexion alors que l’Union européenne cristallise parfois un opprobre non mérité.
La baisse des impôts de production est la grande mesure fiscale de ce budget. Annoncée l’an dernier, dès avant la pandémie, elle est, aujourd’hui, centrale dans la politique fiscale du Gouvernement, qui souhaite améliorer notre compétitivité en cette fin de quinquennat. Il est vrai que les comparaisons avec certains de nos voisins européens ne sont pas toujours à notre avantage. Le Sénat a adopté cette réforme tout en veillant à en limiter les effets négatifs, en particulier pour les finances locales.
Parmi les mesures soutenant la population face à la crise, je tiens à souligner l’extension du crédit d’impôt famille aux indépendants. La contribution exceptionnelle sur les contrats d’assurance, sujet défendu en début d’année par notre ancien collègue Jean-Marc Gabouty, apparaît comme une mesure de solidarité nationale, alors que l’on constate une baisse de la sinistralité. Enfin, nombre d’articles ont, d’ores et déjà, été adoptés conformes, à l’instar de la prorogation du soutien à la presse écrite, des soutiens exceptionnels au spectacle vivant ou des exonérations relatives à la construction de logements sociaux.
La fiscalité énergétique est, comme chaque année, un important dossier. Une majorité originale du Sénat, qui va du centre à la gauche de la gauche, a voté le rejet de l’article 13 relatif au recouvrement des taxes sur l’électricité, en particulier la mise en place d’un taux maximum unique. Il est vrai que cette mesure pose la question de l’autonomie financière des collectivités locales, en particulier des communes et des départements. Ce vote ne doit pas être pris pour un simple mouvement d’humeur.
Je me félicite que certaines de nos propositions, notamment sur les seuils d’imposition d’incorporation de biocarburants d’origine agricole, ou encore sur le lissage de la hausse de la taxe sur l’essence des avions de loisirs, cher à notre collègue Nathalie Delattre, aient été adoptées.
Nous avons également obtenu la suppression de l’article 22 bis, qui pose problème dans la mesure où l’évolution de la TVA en 2020 aura forcément un impact négatif sur la fraction reversée aux collectivités. Une telle mesure mérite, à tout le moins, davantage de concertation avec les élus locaux. Je salue également l’adoption d’un amendement portant sur la fraction de TVA attribuée aux départements, qui font face à de réelles difficultés de financement entre la hausse des dépenses de minima sociaux et la baisse de recettes habituelles comme les droits de mutation.
Enfin, l’avancement du versement du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) en 2021, proposé par mon collègue Christian Bilhac, permettra aux communes et aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) de faire face aux dépenses de l’an prochain tout en limitant la baisse de l’investissement public.
En conclusion, et afin de permettre la suite de l’examen de ce PLF, les membres du groupe du RDSE se prononceront pour l’adoption de cette première partie, sauf quatre abstentions.
Mme le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
M. Pascal Savoldelli. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, depuis le début de cette crise sanitaire, on entend la petite musique de l’exception : tout serait inédit.
Ce n’est pas faux, mais le politique est convoqué à ses responsabilités : il y a le virus et ses conséquences, ainsi que les mesures financières envisagées en soutien de l’économie.
Il est vrai que nous sommes bien servis, dans ce débat, en termes d’inédit. Ils doivent être toutefois priorisés.
Inédit est l’accroissement du nombre des allocataires du revenu de solidarité active (RSA) qui entraîne une hausse des dépenses des départements, alors que les salaires n’augmentent pas.
Inédite, également, est l’explosion de la pauvreté : le président des Restos du cœur s’est dit choqué que des livreurs de repas pour le compte de plateformes n’aient pas de quoi manger.
Inédite est la détresse encore plus massive des étudiants, toujours plus isolés dans la précarité. On refuse d’étendre à leur profit le RSA et d’imaginer une allocation d’autonomie. Cette insécurité sociale inhumaine prend une ampleur tellement inédite qu’elle nous paraît devenir extrêmement dangereuse.
Inédit, également, est l’avis du Haut Conseil des finances publiques quant à la politique du « en même temps », ne pouvant « pas pleinement éclairer le débat démocratique sur les finances publiques ».
À l’inverse, la réponse apportée par ce budget aux plus démunis n’a rien d’inédit. Là, tout est normal ! On retrouve la même méthode que d’habitude : un déficit plus lourd et un recours à la dette plus important.
J’ai beaucoup apprécié l’article 2 qui concerne l’impôt sur le revenu. Il est le même en 2017, en 2018, en 2019 et, comme tout change et qu’on est dans l’inédit, le même en 2020 : les plus fortunés sont protégés !
J’ai entendu, comme une rengaine, le refus d’augmenter les taxes et les impôts. Cela signifie l’absence de nouvelles ressources supplémentaires prélevées sur les riches ou sur les grandes entreprises.
Nous ne tomberons pas dans le piège, entretenu dans nos débats, de la confusion entre entreprise et capital. Il n’y a pas de confusion : « entreprise » n’est pas le même vocable que « capital ».
De la même manière, je regrette l’usage de ce que je qualifierai de « non-lieu politique », par exemple en matière de TVA. On invoque l’irrecevabilité liée, évidemment, à l’harmonisation fiscale européenne, permettant d’évacuer le problème des dividendes et des marchés financiers.
En revanche, nous avons voté ce moindre mal, pour le budget des collectivités, que sont les mesures de soutien et les dotations qui permettent d’atténuer ce que j’ai qualifié de « surdité politique » du Gouvernement lors de la discussion générale. Le ministre l’a d’ailleurs avoué à demi-mot : les collectivités subiront l’augmentation des dépenses de l’État due à la crise sanitaire.
Notre groupe est convaincu que les collectivités ne doivent pas constituer une simple variable d’ajustement, parce que c’est sur elles que reposent l’implantation et le cadre de vie des petites entreprises. À titre d’exemple, 98,5 % du tissu économique de mon département du Val-de-Marne, qui compte 1,4 million d’habitants, est constitué de TPE. Continuons à être vigilants et ne faisons plus d’économies sur la démocratie locale !
Je note également un fossé entre la réalité de la situation et l’efficacité des réponses que cette loi de finances apporte. Cette situation inédite, que vous avez pourtant diagnostiquée, a malheureusement fait l’objet de réponses des plus habituelles.
Nous avons essayé, avec détermination, mais humilité, de faire valoir nos analyses, nos idées et nos amendements. Nous avons tenté de défendre le rôle irremplaçable du Parlement qui est de faire bouger l’impôt, contrôler l’action du Gouvernement et faire des propositions. Mais celles-ci ne sont jamais mises en œuvre par ce gouvernement – cela est également vrai pour les gouvernements précédents.
Néanmoins, nous ne boudons pas les soutiens quand certaines de nos alertes sont prises en considération, par exemple sur la garantie du maintien du fonds postal dans les territoires ruraux à son niveau de 2020.
Nous avons alerté et sans cesse martelé notre opposition à la disparition programmée de l’autonomie fiscale de nos collectivités. Nous avons réussi à obtenir la suppression de l’unification de la taxation de l’électricité qui aurait abouti à faire perdre aux collectivités territoriales 2,3 milliards d’euros. Je rappelle qu’elles ont déjà perdu 10 milliards d’euros du fait de la suppression des impôts de production pour l’année 2021 et 10 milliards pour l’année d’après. Heureusement que notre proposition a été retenue !
Relayant la détresse des élus locaux, nous avons, en outre, obtenu la majorité, et nous vous en remercions, pour la suppression d’un article scélérat de compensation de la dotation globale de fonctionnement (DGF).
Vous l’aurez compris, monsieur le ministre, nous considérons que ce budget est un échec politique et nous regrettons, à cet égard, une certaine complaisance et une certaine complicité de la part de la majorité sénatoriale. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE. – Mme Martine Filleul et M. Rémi Féraud applaudissent également.)
Mme le président. La parole est à M. Vincent Capo-Canellas, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Vincent Capo-Canellas. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous avons commencé l’examen de ce projet de loi de finances pour 2021 dans un contexte exceptionnel : une crise économique et financière considérable, telle que nous n’en avons pas connu depuis l’après-guerre.
Vous venez, en outre, monsieur le ministre délégué, d’actualiser vos prévisions avec un solde négatif de 8,1 % du PIB pour 2021 et une croissance de 6 % au lieu de 8 %. Encore cette prévision vient-elle après plusieurs lois de finances rectificatives contenant elles-mêmes des mesures de soutien.
Ce PLF très exceptionnel se caractérise aussi par un plan de relance dont nous débattrons dans le détail demain, lors de l’examen des crédits de la mission qui lui est consacrée.
Les discussions de la première partie de ce projet de loi de finances se sont focalisées sur la baisse de 10 milliards d’euros des impôts de production proposée par le Gouvernement. Je veux d’abord indiquer, au nom du groupe Union Centriste, que nous approuvons cette réforme qui permet de réduire la pression fiscale pesant sur les entreprises, en particulier les petites et les moyennes, ainsi que celles du secteur industriel.
Cette pression fiscale trop élevée est l’un des maux de notre pays, cette baisse de 10 milliards d’euros va donc dans le bon sens. Toutefois, des inquiétudes subsistent au Sénat, et parmi les membres du groupe Union Centriste, sur le montant et sur la pérennité des compensations dont bénéficieront les collectivités locales. Sur l’initiative de son rapporteur général, le Sénat a nettement amélioré ce dispositif en adoptant un mécanisme de compensation des pertes de CVAE.
Nous discuterons demain de l’autre aspect du plan de relance, avec la mission du même nom, au sein de laquelle sont détaillés l’ensemble des dispositifs sectoriels de relance de notre économie. Ce sera l’occasion, pour le groupe Union Centriste, d’affirmer globalement son soutien à ce plan, qui lui paraît indispensable pour relancer notre économie et l’adapter au monde de demain.
L’examen de la première partie du projet de loi de finances a permis à notre groupe de faire adopter un certain nombre d’amendements et de dispositifs d’incitation fiscale en faveur des indépendants et des autoentrepreneurs, qui sont souvent les oubliés des plans de soutien, et des mesures générales. J’ai d’abord à l’esprit les amendements de mes collègues, Sylvie Vermeillet et Bernard Delcros, ou encore celui que j’avais moi-même déposé.
Une autre satisfaction pour nous a été de voir adoptées des propositions de notre groupe visant à mettre à contribution les secteurs ayant bénéficié, certes involontairement, de la crise sanitaire. Il s’agit, bien sûr, de la contribution exceptionnelle temporaire sur les primes d’assurance, issue d’un amendement de la commission des finances sous-amendé par notre collègue Vincent Delahaye, mais aussi de la contribution exceptionnelle de 1 % sur le chiffre d’affaires réalisé par les grandes entreprises de vente à distance. Ces mesures apportent, à mon sens, un peu d’équité.
À ce titre, nous nous félicitons également de l’adoption de l’amendement de notre collègue Olivier Henno visant à faciliter les investissements des commerces physiques durement affectés par la concurrence du e-commerce.
Un troisième motif de satisfaction pour notre groupe est l’adoption, dans cette première partie du PLF, d’amendements en faveur des collectivités territoriales que nous avions déposés à l’occasion du PLFR 4 et qui avaient été rejetés au motif que ce texte n’était pas le bon véhicule législatif.
Ainsi, nous nous réjouissons de l’adoption de plusieurs mesures de compensation aux collectivités territoriales, en particulier la compensation pour les pertes des régies municipales, qui ne sont pas éligibles aux mêmes aides que les sous-traitants privés, proposée par Bernard Delcros et Sylvie Vermeillet.
De même, l’adoption de l’amendement de notre groupe, défendu par Michel Canevet et Bernard Delcros, tendant à avancer d’une année le versement du FCTVA est une mesure de soutien budgétaire bienvenue pour les collectivités territoriales et l’investissement public local.
M. Jean-Marie Mizzon. Excellent !
M. Vincent Capo-Canellas. Nous saluons également la suppression de l’article 13, laquelle permet ainsi de revenir sur l’unification au niveau national des tarifs de la taxe communale sur la consommation finale d’électricité. Cet amendement de suppression a été adopté sur l’initiative de nombreux groupes de notre assemblée, dont le nôtre, afin de préserver l’autonomie fiscale locale.
Enfin, parmi les nombreuses mesures adoptées au cours de l’examen de cette première partie, je veux souligner celle que proposait notre groupe, rejoint par d’autres, en faveur du pouvoir d’achat des familles, avec le relèvement du plafond du quotient familial pour le calcul de l’impôt sur le revenu.
J’y ajouterai la série d’amendements en faveur de la construction de logements sociaux adoptés sur l’initiative de nos collègues Valérie Létard et Hervé Marseille. La relance ne doit pas uniquement concerner les entreprises, mais également soutenir nos concitoyens les plus fragilisés par les conséquences de la crise sanitaire.
Dans un esprit de responsabilité, les sénateurs de l’Union Centriste approuveront, dans leur très grande majorité, cette première partie du projet de loi de finances dans la version amendée par le Sénat ; quelques-uns d’entre eux manifesteront toutefois une position différente, indiquant ainsi leur inquiétude au regard de l’évolution de nos finances publiques.
Notre vote ne constitue donc pas un quitus à la politique du Gouvernement, mais vise à permettre à la Haute Assemblée de discuter des missions budgétaires, notamment de la mission « Plan de relance », de les amender et d’y apporter les correctifs et les améliorations nécessaires. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme le président. La parole est à M. Rémi Féraud, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Rémi Féraud. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la pandémie a entraîné un choc économique terrible, inédit depuis 1945, comme Pascal Savoldelli vient de le dire.
Pourtant, cette première partie du PLF pour 2021 ressemble tellement à celle du précédent que je pourrais presque vous présenter l’explication de vote que notre ancien collègue Thierry Carcenac a prononcée l’an dernier au nom de notre groupe !
Disons-le : cette première partie est une occasion manquée. Nous aurions pu nous donner les moyens de créer de nouvelles solidarités, de soutenir la jeunesse et de changer notre modèle de développement pour le rendre plus durable, mais ce chemin n’a été emprunté ni par le Gouvernement ni par la majorité sénatoriale. Nous avions d’ailleurs rarement constaté une telle convergence de vues entre eux !
Nous saluons, certes, l’instauration d’une contribution exceptionnelle de solidarité sur le secteur de l’assurance, obtenue de haute lutte, mais nous avions proposé bien d’autres mesures pour permettre une meilleure redistribution des richesses : rétablissement d’un impôt de solidarité sur le capital, taxe sur les géants du numérique, report d’un an de la suppression de la taxe d’habitation pour les 20 % de foyers les plus aisés, maintien du niveau de l’impôt sur les sociétés pour les grandes entreprises, suppression de la flat tax comme de l’exit tax. Comme prévu, vous avez tout rejeté.
Vous n’avez pas eu autant de préventions lorsqu’il s’est agi, au printemps dernier, de faire payer la CRDS à tous les Français pour neuf années supplémentaires.
Quant au Gouvernement, il ne change pas de voie par rapport à la politique menée depuis trois ans, qu’il l’amplifie même, avec une baisse des impôts de production – comme par hasard ceux qui étaient perçus par les collectivités locales ! –, mais, bien sûr, sans conditionnalité.
La crise exceptionnelle que nous traversons nécessite pourtant de se réinventer, comme l’a dit lui-même le Président de la République. Même les économistes favorables à votre action en faveur de la compétitivité indiquent qu’il faut, en parallèle, agir beaucoup plus fortement sur la demande. Ils sont nombreux à relever, comme Jean Pisani-Ferry, des insuffisances vis-à-vis des victimes de la crise, à regretter le manque de soutien au pouvoir d’achat des plus modestes et la bombe à retardement des entreprises surendettées et qui devraient être aidées encore davantage.
Dans cet ensemble insatisfaisant, l’adoption de nos amendements visant à appliquer le taux réduit de TVA aux productions des agences de presse, à la billetterie du e-sport, ou encore aux voyages en train apparaît comme une succession de petites victoires, petites quoique précieuses.
D’autres amendements que nous présentions ont aussi été votés, je ne les citerai pas tous, ils étaient souvent – par bonheur, reconnaissons-le ! – également présentés par un groupe de la majorité sénatoriale.
Je n’en dirai pas autant de nos amendements qui visaient à changer de modèle de développement et à favoriser une relance durable. Nous aurions pu, ensemble, encourager le Gouvernement à aller plus loin et à mettre en œuvre les conclusions de la Convention citoyenne pour le climat. Pourtant, même l’augmentation du malus automobile, pour ne prendre que cet exemple, a encore perdu de son ambition lors de nos débats. Cela en dit long sur votre timidité en matière environnementale ; cinq ans après les accords de Paris, au cœur d’une crise exceptionnelle qui aurait pu marquer une rupture, ce conservatisme nous déçoit.
Enfin, nous restons inquiets pour les finances des collectivités locales, même si l’article 22 bis a fait l’objet d’une suppression bienvenue par notre assemblée. Nous poursuivrons utilement le débat en seconde partie, avec la volonté de préserver les marges de manœuvre des collectivités et leur capacité à assumer leurs missions et à faire face à la crise sur nos territoires.
Mes chers collègues, vous l’aurez compris ce volet recettes ne nous convient pas. Nous proposions, par nos amendements, 22 milliards d’euros de recettes supplémentaires. Ce que vous appelez « ne pas augmenter les impôts », c’est-à-dire votre refus obstiné de faire contribuer davantage les plus fortunés et les grandes entreprises, constitue une erreur, à notre sens, et ce choix conduit à accroître le déficit public sans dégager les moyens d’un plan de relance et de solidarité à la hauteur de la situation.
Néanmoins, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain souhaite débattre de la seconde partie de ce projet de loi de finances. Nous attendrons le vote final sur l’ensemble du budget pour nous prononcer sur le fond, sans illusion, mais avec la volonté de défendre nos convictions et l’espoir de convaincre. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme le président. Personne ne demande plus la parole ?…
Je mets aux voix, modifié, l’ensemble de la première partie du projet de loi de finances pour 2021.
En application de l’article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.
Il va y être procédé dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
Mme le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 35 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 273 |
Pour l’adoption | 243 |
Contre | 30 |
Le Sénat a adopté.
6
Ordre du jour
Mme le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à demain, jeudi 26 novembre 2020 :
À dix-heures trente :
Nouvelle lecture du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021 (texte n° 151, 2020-2021).
À quatorze heures trente et le soir :
Suite du projet de loi de finances pour 2021, adopté par l’Assemblée nationale (texte n° 137, 2020-2021) ;
Mission « Plan de relance » et articles 56 à 56 octies ;
Mission « Plan d’urgence face à la crise sanitaire ».
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-neuf heures trente.)
Pour la Directrice des comptes rendus du Sénat,
le Chef de publication
ÉTIENNE BOULENGER