M. le président. L’amendement n° I-895, présenté par Mme Taillé-Polian, MM. Parigi et Benarroche, Mme Benbassa, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme Poncet Monge et M. Salmon, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Guillaume Gontard.
M. Guillaume Gontard. L’accompagnement des entreprises en difficulté engagées dans des opérations de cession-bail est légitime dans la période, particulièrement pour les plus petites d’entre elles, qui souffrent des conséquences économiques de la crise sanitaire.
Toutefois, sur ce point, la mesure proposée, à l’instar des autres mesures gouvernementales, ne fait aucune distinction entre les entreprises, ni par taille, ni par secteur, ni selon leur santé financière ou encore leur impact environnemental.
Dès lors, elle est susceptible de créer des effets d’aubaine et de bénéficier à des groupes bien portants versant des dividendes et engagés, par exemple, dans des pratiques d’évitement fiscal.
De plus, on peut douter de la pertinence de la multiplication des mesures réglementaires et de leur intérêt comparé par rapport à des aides plus directes et plus ciblées.
L’article 6 manque l’occasion d’utiliser les mesures d’urgence pour engager la transition écologique et sociale de notre économie.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Le dispositif prévu à l’article 6 constitue un bon outil de relance, notamment pour éviter un ressaut immédiat d’imposition, mais sans modification du montant total de l’imposition. Il me paraît équilibré et encadré. J’aurai l’occasion d’en reparler lors de l’examen de l’amendement n° I-597 rectifié.
C’est la raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° I-597 rectifié, présenté par MM. Delahaye, Janssens et Cadic, Mmes Billon, Vermeillet et Guidez, MM. Laugier, Bonnecarrère, Canevet, Longeot et Lafon, Mme Vérien et MM. Cazabonne, S. Demilly et Bonneau, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 4
1° Supprimer les mots :
à une société de crédit-bail
2° Remplacer les mots :
et qui sont affectés par le crédit-preneur à son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole
par les mots :
entre le crédit-bailleur et le crédit-preneur
II. – Alinéa 5
Supprimer cet alinéa.
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Sylvie Vermeillet.
Mme Sylvie Vermeillet. L’article 6 prévoit d’étaler la plus-value réalisée lors d’une opération de cession-bail d’immeuble par une entreprise.
Cet amendement vise à élargir, d’une part, la mesure à d’autres crédits-bailleurs que les sociétés de crédit-bail – particuliers, sociétés cotées ou non, fonds d’investissement, etc. –, et, d’autre part, le bénéfice de l’étalement dans le cadre d’une cession-bail aux sociétés foncières.
L’objectif est double : premièrement, faire jouer la concurrence avec un panel plus large d’acquéreurs, pour fixer le prix de cession le plus attractif et faciliter ainsi le refinancement des entreprises affectées par la crise sanitaire ; deuxièmement, en faire profiter les sociétés foncières touchées de plein fouet par la crise sanitaire et économique.
M. le président. L’amendement n° I-896, présenté par Mme Taillé-Polian, MM. Parigi et Benarroche, Mme Benbassa, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme Poncet Monge et M. Salmon, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Ces mêmes dispositions ne s’appliquent pas aux entreprises dont le chiffre d’affaires annuel est supérieur à 50 millions d’euros ou dont les effectifs sont inférieurs à 250 personnes ou dont le total du bilan est supérieur à 43 millions d’euros, une fois pris en compte pour le calcul de ces seuils les chiffres d’affaires, les effectifs et les totaux des bilans des autres entreprises avec laquelle elle entretient des liens de dépendance au sens du 12 de l’article 39.
La parole est à M. Jacques Fernique.
M. Jacques Fernique. Cet amendement de repli tend à limiter les dispositions de l’article aux TPE et aux PME, artisans, petits commerces et sociétés familiales.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Le dispositif de l’article 6 est équilibré puisqu’il exclut notamment les immeubles de placement. Il s’agit d’un verrou opportun pour concentrer l’effet économique du dispositif fiscal.
C’est pourquoi la commission demande le retrait de l’amendement n° I-597 rectifié. En revanche, elle émet un avis défavorable sur l’amendement n° I-896, pour les raisons que j’ai déjà développées sur la réforme des impôts de production.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Madame Vermeillet, l’amendement n° I-597 rectifié est-il maintenu ?
Mme Sylvie Vermeillet. Oui, je le maintiens, monsieur le président.
M. le président. Je mets aux voix l’article 6.
(L’article 6 est adopté.)
Article 7
I. – Le 7 de l’article 158 du code général des impôts est ainsi modifié :
1° À la première phrase du premier alinéa, après le mot : « par », sont insérés les mots : « un coefficient de » ;
2° Le 1° est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation au premier alinéa du présent 7, le coefficient mentionné au même premier alinéa est fixé à 1,2 pour l’imposition des revenus de l’année 2020, à 1,15 pour l’imposition des revenus de l’année 2021 et à 1,1 pour l’imposition des revenus de l’année 2022 ; ».
II. – Le 1° du 7 de l’article 158 du code général des impôts est abrogé à compter de l’imposition des revenus de l’année 2023.
M. le président. Je suis saisi de huit amendements identiques.
L’amendement n° I-229 est présenté par Mme Blatrix Contat, MM. Féraud, Kerrouche et Marie, Mme Préville, MM. Kanner et Raynal, Mme Briquet, MM. Cozic et Éblé, Mme Espagnac, MM. Jeansannetas, P. Joly, Lurel et Antiste, Mme Artigalas, M. J. Bigot, Mmes Bonnefoy et Conconne, MM. Durain, Fichet et Gillé, Mme Harribey, M. Jacquin, Mmes G. Jourda, Le Houerou et Lubin, MM. Montaugé, Mérillou et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Sueur, Tissot, Temal et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° I-451 rectifié est présenté par Mmes Noël et Deromedi et MM. Vogel, D. Laurent, Chatillon, Pellevat, Bacci, Sido, E. Blanc, Meurant et Bonhomme.
L’amendement n° I-493 est présenté par M. Savin.
L’amendement n° I-504 rectifié bis est présenté par MM. Sautarel, Milon et C. Vial, Mme Gruny, M. Lefèvre, Mmes Dumont, Dumas et Lassarade, M. Rojouan, Mmes Ventalon et Canayer, MM. Darnaud, B. Fournier, Bouchet, Somon et Genet, Mme Raimond-Pavero, MM. Piednoir, Gremillet et Rapin et Mmes Di Folco, Demas et Boulay-Espéronnier.
L’amendement n° I-525 rectifié quater est présenté par MM. Favreau, Mouiller, Bazin, Saury, Piednoir et Bonne, Mmes M. Mercier, Garriaud-Maylam et Berthet, MM. Houpert, Paccaud, Sol et Chaize, Mmes Deroche, Joseph et L. Darcos, M. Laménie, Mme Richer, MM. de Legge et Brisson, Mme Pluchet, MM. Savary et Charon, Mme Canayer et M. Karoutchi.
L’amendement n° I-621 rectifié bis est présenté par M. Levi, Mmes Tetuanui et Vérien, MM. J.M. Arnaud, Canevet et Duffourg, Mme Doineau, MM. Kern et Le Nay et Mme Morin-Desailly.
L’amendement n° I-743 rectifié bis est présenté par M. Henno, Mme Billon, MM. Capo-Canellas, Cazabonne, Chauvet et S. Demilly, Mmes C. Fournier et Guidez, MM. L. Hervé, Lafon et Moga, Mme Sollogoub, M. Vanlerenberghe et Mme Vermeillet.
L’amendement n° I-806 est présenté par M. Capus, Mme Paoli-Gagin, MM. Menonville, Malhuret, Chasseing, Decool, Guerriau, Lagourgue, A. Marc et Médevielle, Mme Mélot et MM. Verzelen et Wattebled.
Ces huit amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Thierry Cozic, pour présenter l’amendement n° I-229.
M. Thierry Cozic. Aujourd’hui, les revenus déclarés par les entreprises à l’impôt sur le revenu sont majorés de 25 % dans un certain nombre de cas, notamment quand celles-ci ne font pas appel à un organisme de gestion agréé, ou OGA.
L’article 7 instaure une suppression progressive sur trois ans du coefficient de 1,25 appliqué au bénéfice des titulaires de revenus passibles de l’impôt sur le revenu, qui sont soumis à un régime réel d’imposition et qui ne sont pas adhérents d’un centre de gestion ou organisme mixte de gestion agréé.
Or les organismes de gestion agréés sont aujourd’hui la garantie de la fiabilité comptable et, bien souvent, de la viabilité de nombreuses petites entreprises. Dans le contexte de crise que nous connaissons, il semble prématuré de modifier le régime en vigueur.
M. le président. La parole est à Mme Jacky Deromedi, pour présenter l’amendement n° I-451 rectifié.
Mme Jacky Deromedi. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° I-493 n’est pas soutenu.
La parole est à M. Stéphane Sautarel, pour présenter l’amendement n° I-504 rectifié bis.
M. Stéphane Sautarel. La suppression progressive de la majoration de 25 % pour les non-adhérents aux OGA entraînerait deux conséquences : d’une part, la perte pour la puissance publique d’un outil de sincérité fiscale et de lutte contre la fraude, qui existe depuis plus de quarante-cinq ans ; d’autre part, la disparition des OGA et des emplois induits.
La fréquence des contrôles fiscaux par l’administration fiscale concernant les petites entreprises est relativement faible aujourd’hui. Or, chaque année, 100 % des adhérents des OGA font l’objet d’un contrôle de cohérence et de vraisemblance de leur résultat fiscal, soit plus de 1,2 million de contrôles par an.
Par ailleurs, il s’agit d’un faux cadeau fiscal, officiellement présenté comme une mesure de soutien à la trésorerie des TPE. En effet, ces entreprises bénéficient aujourd’hui d’un certain nombre de services coûteux qui disparaîtraient, notamment des formations gratuites sur des thèmes de gestion et fiscalité, une analyse de leur gestion et des comparatifs sectoriels sur leur secteur.
En contrepartie, l’adhérent est soumis à un contrôle de ses déclarations annuelles – base de TVA, base de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, etc.
La suppression de la majoration de 25 % sans avantage fiscal supplémentaire pour les adhérents conduira à la fermeture des centres de gestion agréés. Or la DGFiP n’a pas aujourd’hui les moyens de se substituer au travail de ces structures, de sorte que le coût de cette mesure pour l’État sera bien supérieur aux 100 millions d’euros estimés.
C’est pourquoi cet amendement vise à supprimer cet article qui risquerait de conduire à la disparition progressive des OGA.
M. le président. La parole est à M. Gilbert Favreau, pour présenter l’amendement n° I-525 rectifié quater.
M. Gilbert Favreau. L’article 7 a pour objet de supprimer de façon progressive la majoration de 25 % des revenus des TPE non adhérentes à un organisme de gestion agréé et met donc fin à l’avantage fiscal dont bénéficient les entreprises qui y adhèrent, engagées dans une démarche de transparence.
Présentée comme une mesure de relance des TPE, cette disposition risque au contraire de les priver de sérieux atouts pour gérer dans de bonnes conditions leurs affaires à long terme.
Ce dispositif vertueux qui a fait ses preuves – les organismes de gestion agréés sont sérieux – est aujourd’hui remis en cause sans raison objective. Je ne veux pas, pour ma part, y voir l’action d’un lobby qui souhaiterait voir disparaître ces structures… (Sourires.)
M. le président. L’amendement n° I-621 rectifié bis n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Sylvie Vermeillet, pour présenter l’amendement n° I-743 rectifié bis.
Mme Sylvie Vermeillet. J’ajoute à ce qui a déjà été dit que les organismes de gestion agréés luttent indéniablement contre la fraude. Les fragiliser en maintenant cet article ne serait pas du tout cohérent avec les objectifs que nous nous sommes fixés.
M. le président. La parole est à M. Emmanuel Capus, pour présenter l’amendement n° I-806.
M. Emmanuel Capus. L’article 7 est une fausse bonne idée. C’est une fausse baisse d’impôts : tous les adhérents à un organisme de gestion agréé bénéficient d’ores et déjà d’une réduction.
Cet article est inutile : les OGA ont un véritable rôle à jouer. Comme l’ont souligné les orateurs précédents, ils assurent un précontrôle extrêmement utile à la fois pour l’administration fiscale et pour les TPE, qui voient dans ces structures un partenaire qui les accompagne.
Le recours à un OGA ne coûte pas cher : 200 euros par an en moyenne, soit presque rien pour les TPE, alors que le risque est qu’elles soient demain obligées de faire appel à un expert-comptable, voire à un conseiller fiscal, dont les tarifs sont sans commune mesure avec ceux que pratiquent les OGA.
Ces organismes sont nécessaires : ils diminuent les risques de fraude. Et nous savons, car nous votons de telles diminutions chaque année, que Bercy est le ministère qui réduit le plus sa masse salariale. Bercy n’a plus, aujourd’hui, les moyens d’effectuer ce type de contrôle sur de toutes petites structures.
Enfin, cet article est une mesure antisociale. Entre 2 500 et 3 500 salariés travaillent dans des centres de gestion agréés. Ils ne pourront pas être reclassés dans les cabinets d’expertise comptable, car ils n’ont pas tout à fait la formation et le profil pour cela. De toute façon, les experts-comptables ont déjà leur personnel. Le risque est donc que les OGA soient obligés de se transformer en associations d’expertise comptable.
On déstabilise un système qui a fait ses preuves depuis quarante ans ! Je n’ai d’ailleurs pas bien compris pourquoi la commission propose d’adopter cet article.
Dans son rapport, le rapporteur général indique que, en 2014, la Cour des comptes aurait estimé que la plus-value des organismes de gestion agréés était difficile à établir. Et pour ce seul motif, on supprimerait une filière utile, qui emploie entre 2 500 et 3 500 personnes, soit quatre fois Bridgestone ?
Cet article n’est pas utile.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. L’article 7 prévoit la suppression progressive de la majoration de 25 % du bénéfice imposable en cas de non-recours à un organisme de gestion agréé ou à un professionnel du chiffre.
En revanche, une entreprise pourra toujours bénéficier du crédit d’impôt à raison de la cotisation acquittée pour adhérer à un OGA.
J’entends les demandes venant de toutes les travées. Pour être honnête, on n’est jamais tout à fait certain de prendre la bonne décision. Après avoir écouté les interventions des uns et des autres, je m’en remettrai donc à la sagesse du Sénat. (Marques d’approbation.)
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Pendant très longtemps, les entreprises adhérentes à un OGA ont bénéficié d’une réduction fiscale, mais cette disposition ayant été jugée contraire à la jurisprudence communautaire, nos lointains prédécesseurs ont mis en place un autre système.
Ce système est le suivant : les entreprises qui n’adhèrent pas à un OGA voient leur assiette de fiscalité, et par conséquent leurs impôts, majorés de 25 %. On dit ainsi à ceux qui n’adhèrent pas à un OGA qu’ils paieront plus d’impôt ! Nous considérons que ce n’est pas juste et que cette majoration doit être supprimée, progressivement – en trois ans –, pour permettre le reclassement des OGA. Je précise que le coût de ce dispositif s’élève à une centaine de millions d’euros par an.
Comme M. le rapporteur général l’a dit, pour les entreprises qui souhaiteraient continuer à bénéficier des services d’un OGA, nous maintenons le dispositif de réduction fiscale, y compris lorsque les coûts d’adhésion annuels sont modiques. L’entreprise adhérente pourra ainsi continuer de réduire ses impôts à concurrence d’une fraction importante de sa cotisation.
J’ai eu l’occasion de rencontrer les dirigeants de la Fédération des OGA afin de voir avec eux comment accompagner cette transformation sur trois ans – d’aucuns auraient préféré que nous allions plus vite en réalité. Il y a des pistes : nous travaillons sur l’examen de conformité fiscale et sur les critères concernant les tiers de confiance en la matière. Cela pourrait avoir des effets sur la définition des pistes prioritaires de contrôle fiscal.
L’objectif est de faire confiance à ceux qui souhaitent créer une entreprise et de les accompagner en leur laissant la possibilité de s’entourer des conseils d’un OGA ou de s’appuyer sur un expert-comptable.
Nous considérons, en effet, qu’il n’y a pas lieu de créer une discrimination entre les entrepreneurs assujettis à l’impôt sur le revenu et ceux qui sont assujettis à l’impôt sur les sociétés, entre ceux qui adhèrent à un OGA et les autres. Très clairement, nous ne comprenons pas qu’il puisse y avoir une présomption de fraude à l’égard de ceux qui n’adhèrent pas à un OGA et pas à l’égard de ceux qui y adhèrent, au motif que ces derniers bénéficient de l’accompagnement de ce type d’organisme.
Nous sommes attachés, vous l’avez compris, au maintien de l’article 7. Nous considérons que la suppression de la majoration sur trois ans est suffisamment progressive pour accompagner la reconversion et le reclassement que j’évoquais et que nous mettons fin ici à une discrimination.
Je trouve incroyable – je l’ai découvert lors de la préparation de ces dispositions – que, pour forcer une société ou un entrepreneur à souscrire des prestations commerciales, on indique à ceux qui refuseraient de le faire qu’ils seront pénalisés par une augmentation forfaitaire de leurs impôts. Car tel est bien le système qui fonctionne aujourd’hui, même s’il n’est pas de la responsabilité des OGA puisqu’il a été instauré pour compenser la suppression en 1996 ou en 2001 – j’ai un doute sur la date – d’un abattement fiscal.
Nous sommes donc défavorables à ces amendements de suppression. Nous avons la conviction qu’une diminution de la fiscalité des entreprises qui n’adhèrent pas à un OGA leur sera utile en termes de trésorerie. En outre, nous pensons que le maintien des outils incitatifs comme le crédit d’impôt, ainsi que les perspectives de reclassement, suffiront à accompagner les OGA.
M. le président. La parole est à M. Arnaud Bazin, pour explication de vote.
M. Arnaud Bazin. Je ne suis pas cosignataire de ces amendements, mais je vais bien évidemment les voter.
Je suis d’ailleurs très surpris qu’on évoque une facture de 100 millions pour les entreprises qui n’adhèrent pas à un organisme de gestion agréé. Qu’est-ce qui peut bien inciter un chef d’entreprise à choisir délibérément de se faire imposer sur 125 % de son chiffre d’affaires au lieu de 100 %, alors que les formalités d’adhésion à une OGA sont tout à fait à sa portée et que le coût de la cotisation est modique ? Il y a là un mystère qui me dépasse.
Par ailleurs, je souligne qu’un artisan ou un commerçant qui s’installe, s’il connaît son métier, ignore superbement tout ce qui relève de la fiscalité, quelle qu’ait été sa formation. Toutes ces professions libérales qui démarrent dans la vie économique ont tout intérêt à adhérer à un OGA pour bénéficier d’un soutien et d’une expertise qu’elles n’ont pas elles-mêmes. On les a autrefois incitées à adhérer à ces organismes en abaissant le niveau de chiffre d’affaires imposé. Le système a évolué de façon un peu étonnante. Pour autant, il est nécessaire que toutes ces entreprises puissent bénéficier des conseils d’un OGA.
Je voterai donc ces amendements. Si quelqu’un a une explication rationnelle sur le fait qu’on puisse choisir de payer des impôts sur 125 % du chiffre d’affaires plutôt que sur 100 %, il faut me la donner !
M. le président. La parole est à M. Didier Rambaud, pour explication de vote.
M. Didier Rambaud. Je voterai contre les amendements visant à supprimer l’article 7.
Je commencerai par faire un rappel historique. La mesure dont nous discutons a été créée en 2006, avec pour objectif de fiabiliser la base fiscale de l’impôt sur le revenu en incitant les entreprises qui y étaient assujetties à recourir aux services d’organismes de gestion agréés.
En 2014, cher Emmanuel Capus, la Cour des comptes a clairement questionné l’efficacité de ce dispositif, qui représente un coût considérable pour les entreprises : « Quarante ans après leur création, la contribution des organismes à l’amélioration de la connaissance des revenus non salariaux est difficile à établir », car « la proportion de redressements à l’issue d’un contrôle fiscal est identique chez les adhérents et non-adhérents ». Plus graves encore, « des anomalies significatives sont décelées dans les déclarations de certaines entreprises individuelles alors même qu’elles sont adhérentes d’organismes agréés ». C’est la preuve manifeste que le dispositif n’atteint pas son objectif, alors que, rappelons-le, il pénalise de nombreuses entreprises dans notre pays.
Le rapporteur général de la commission des finances de l’Assemblée nationale est même allé plus loin que la Cour des comptes en soulignant que, en 2017, les rectifications effectuées par les OGA n’ont abouti à fiabiliser la base fiscale qu’à hauteur de 0,2 %, soit seulement 85 millions d’euros sur une base totale de 47 milliards d’euros !
À titre personnel, je trouve étonnant que l’on majore la base d’imposition d’entreprises sur le seul critère de leur choix de gestion, ce qui revient à présumer qu’elles ne peuvent pas tenir correctement leur comptabilité.
Je pense que la suppression de la majoration prévue à l’article 7 favorisera les petites entreprises imposées à l’impôt sur le revenu sans pénaliser les OGA, car elle sera progressive : la suppression définitive n’interviendra qu’à compter de 2023.
M. le président. La parole est à Mme Sylvie Vermeillet, pour explication de vote.
Mme Sylvie Vermeillet. Monsieur le ministre, si cet avantage fiscal existe, c’est parce que l’intérêt des OGA dans la lutte contre la fraude est absolument réel. Il n’est pas à prouver.
Les expertises des OGA sont très contraignantes et, selon moi, très efficaces. Ces organismes détectent un grand nombre d’anomalies dans les comptes de leurs adhérents, que les comptables ont parfois bien du mal à justifier. Leur système d’analyse et de croisement est tout à fait intéressant et très indiqué, d’où l’intérêt de ces organismes aujourd’hui.
Je ne comprends donc pas la décision de supprimer cet avantage fiscal dans un contexte de lutte contre la fraude. Je vous le dis : supprimez les OGA, vous augmenterez la fraude !
M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.
M. Victorin Lurel. Notre collègue se demande quel peut être l’intérêt de ne pas adhérer à un OGA sachant que l’on sera alors imposé à un coefficient de 1,25.
J’ai moi-même autrefois créé un centre de gestion agréé. Malgré toutes les campagnes d’information – j’estime d’ailleurs qu’elles ne sont pas suffisantes –, de nombreux d’agriculteurs ne sont toujours pas adhérents à un organisme de gestion agréé, non pas parce qu’ils n’y auraient pas quelque intérêt, mais parce qu’ils manquent d’information. Par ailleurs, les agriculteurs sont encore soumis, même s’ils en sortent progressivement, au régime des bénéfices agricoles forfaitaires, souvent à l’hectare, quelle que soit la conjoncture.
Pour lutter effectivement contre la fraude et accroître la transparence, il me paraît utile de voter la suppression de cet article, même s’il prévoit une disparition progressive sur trois ans. Nous vous demandons donc, chers collègues, de soutenir notre amendement.
M. le président. La parole est à M. Emmanuel Capus, pour explication de vote.
M. Emmanuel Capus. Je souhaite répondre à la fois à Didier Rambaud et à M. le ministre.
Je comprends l’argument selon lequel il n’est pas sain d’imposer une augmentation des impôts de 25 % aux entreprises qui n’adhèrent pas à un OGA, mais il faut se souvenir des raisons pour lesquelles cette mesure a été prise : c’est parce que les impôts ont été baissés pour tout le monde en 2006. En conséquence, pour conserver l’intérêt d’adhérer à un OGA, on a augmenté les impôts des professionnels non-adhérents à un OGA.
Techniquement, il y a peut-être quelque chose à faire. Il n’y a qu’à rétablir l’exonération de 20 % pour les adhérents à un OGA, car ils accomplissent un acte positif, à coût modique, pour montrer qu’ils luttent contre la fraude.
Le président du Comité de déontologie parlementaire a très clairement résumé ce qui saute aux yeux de tout le monde : il n’y a aucune raison objective de payer des impôts sur 125 % de son chiffre d’affaires plutôt que de s’acquitter de frais d’adhésion de l’ordre de 200 euros, sauf si l’on a des comptes totalement occultes dont on escompte un bénéfice supérieur !
De fait, comme l’a indiqué la Cour des comptes en 2014, il est compliqué d’estimer l’utilité des précontrôles effectués par les OGA, mais il est évident qu’ils sont utiles.
Pour l’ensemble de ces raisons, il me semble qu’on ne peut pas supprimer ces organismes de gestion. Ce serait aller totalement à contre-courant de l’histoire, alors qu’on lutte contre la fraude fiscale et que tout le monde – je ne parle même pas des parlementaires – est soumis à des contrôles de plus en plus rigoureux.