M. le président. L’amendement n° 78 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l’article 47 ter, modifié.
(L’article 47 ter est adopté.)
Article 47 quater (nouveau)
Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° L’article L. 168-8 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le bénéfice de l’allocation est soumis au respect des conditions de régularité de séjour et de stabilité de résidence en France mentionnées à l’article L. 512-1 et aux deux premiers alinéas de l’article L. 512-2. » ;
2° L’article L. 381-1 est ainsi modifié :
a) La dernière phrase du quatrième alinéa est complétée par les mots : « , sauf si la personne a bénéficié dans les deux dernières années d’une allocation journalière mentionnée au même article L. 168-8 » ;
b) Le cinquième alinéa est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Le travailleur non salarié mentionné à l’article L. 611-1 du présent code, à l’article L. 722-4 du code rural et de la pêche maritime ou au 2° de l’article L. 722-10 du même code ainsi que le conjoint collaborateur mentionné à l’article L. 661-1 du présent code ou aux articles L. 321-5 et L. 732-34 du code rural et de la pêche maritime qui interrompt son activité professionnelle pour s’occuper d’une personne mentionnée à l’article L. 3142-16 du code du travail présentant un handicap ou une perte d’autonomie d’une particulière gravité est affilié obligatoirement à l’assurance vieillesse du régime général. Cette affiliation n’est pas subordonnée à la radiation du travailleur non salarié du centre de formalités des entreprises dont il relève. Elle est subordonnée à la production de justificatifs, définis par décret.
« L’affiliation à l’assurance vieillesse du régime général au titre des quatrième et cinquième alinéas ne peut excéder une durée totale d’un an sur l’ensemble de la carrière. »
M. le président. L’amendement n° 200, présenté par M. Savary, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Au 1° du V de l’article 1er de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises, les mots : « troisième phrase » sont remplacés par les mots : « deuxième phrase ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. René-Paul Savary, rapporteur. Amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 47 quater, modifié.
(L’article 47 quater est adopté.)
Article additionnel après l’article 47 quater
M. le président. L’amendement n° 201, présenté par M. Savary, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l’article 47 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Afin d’atteindre l’équilibre financier de l’ensemble des régimes de retraite de base en 2030, une conférence sur l’équilibre et le financement des retraites réunissant des représentants des organisations syndicales de salariés et des employeurs ainsi que des représentants de l’État est chargée de formuler des propositions en recourant aux paramètres suivants, dans la limite du besoin de financement nécessaire pour rétablir cet équilibre : âge d’ouverture des droits à retraite, conditions d’âge et de durée d’assurance requises pour le bénéfice d’une pension de retraite à taux plein, modalités de décote et de surcote par rapport à ce taux plein, affectation de recettes à l’assurance vieillesse, mobilisation du Fonds de réserve des retraites.
II. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° L’article L. 161-17-2 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les mots : « soixante-deux » sont remplacés par les mots : « soixante-trois » et la date : « 1er janvier 1955 » est remplacée par la date : « 1er janvier 1965 » ;
b) Après les mots : « 1er janvier », la fin du deuxième alinéa est ainsi rédigée : « 1965 et de manière croissante à raison de trois mois par génération pour les assurés nés entre le 1er juillet 1962 et le 31 décembre 1964. » ;
c) Les troisième et dernier alinéas sont supprimés ;
2° L’article L. 161-17-3 est ainsi modifié :
a) Au troisième alinéa, la date : « 31 décembre 1963 » est remplacée par la date : « 31 décembre 1961 » ;
b) Au quatrième alinéa, la date : « 1er janvier 1964 » est remplacée par la date : « 1er janvier 1962 » et la date : « 31 décembre 1966 » est remplacée par la date : « 31 décembre 1962 » ;
c) Au cinquième alinéa, la date : « 1er janvier 1967 » est remplacée par la date : « 1er janvier 1963 » et la date : « 31 décembre 1969 » est remplacée par la date : « 31 décembre 1963 » ;
d) Au sixième alinéa, la date : « 1er janvier 1970 » est remplacée par la date : « 1er janvier 1964 » et la date : « 31 décembre 1972 » est remplacée par la date : « 31 décembre 1964 » ;
e) Au septième alinéa, la date : « 1er janvier 1973 » est remplacée par la date : « 1er janvier 1965 » ;
3° Au 1° de l’article L. 351-8, les mots : « prévu à l’article L. 161-17-2 augmenté de cinq années » sont remplacés par les mots : « de soixante-sept ans ».
III. – Un décret en Conseil d’État fixe les modalités et le calendrier selon lequel les régimes mentionnés à l’article L. 711-1 du code de la sécurité sociale convergent vers les paramètres définis au présent II avant le 1er janvier 2030.
La parole est à M. le rapporteur.
M. René-Paul Savary, rapporteur. Mes chers collègues, nous nous apprêtons à examiner l’article 48, qui détaille les objectifs de dépenses pour la branche vieillesse pour 2021. Au-delà de ces dépenses, nous devons avoir en tête le solde des régimes obligatoires de retraite.
Je l’ai dit lundi lors de la discussion générale : en 2024, le déficit de l’ensemble des régimes de base et du fonds de solidarité vieillesse (FSV) devrait s’élever à 11,6 milliards d’euros. Si une part des déficits prévus est due à la crise économique, la part conjoncturelle devrait cesser, selon le Conseil d’orientation des retraites (COR) en 2024, à moins qu’elle ne se prolonge encore un certain nombre de mois ou d’années.
Comme vous le savez, avant la crise, le COR prévoyait déjà à l’horizon 2030 un déficit du système de retraite, retraites de base et complémentaires confondues, de l’ordre de 1 % du PIB. Je doute que la crise économique améliore cette trajectoire !
La réforme des retraites n’a pas abouti, et le présent texte ne contient aucune mesure d’équilibre budgétaire à cet égard. Or la commission ne veut pas reporter le difficile travail qui doit conduire au redressement des comptes sociaux, au premier rang desquels ceux du système de retraite.
Avec cet amendement, nous misons sur la concertation. Nous voulons que la conférence de financement soit relancée au début de l’année 2021. Nous n’avons pas inventé cette instance : c’est Édouard Philippe, alors Premier ministre, qui l’avait réunie, en nous expliquant qu’avant d’envisager un système universel de retraite, il fallait que le système actuel atteigne l’équilibre, d’où l’intérêt d’une réforme paramétrique avant la réforme systémique.
Nous voulons aussi proposer des pistes et prendre nos responsabilités en cas d’échec de la conférence. Nous souhaitons qu’elle soit lancée. Mais si elle n’aboutissait pas, nous reprendrions les propositions que nous défendons depuis un certain nombre d’années : travailler plus longtemps, avec évidemment des aménagements pour le travail des séniors.
Il s’agit de l’âge de départ à la retraite à 63 ans en 2025 et d’accélérer le déploiement du dispositif Touraine, afin d’atteindre 172 trimestres pour la génération 1965, soit un allongement d’un an. Ces mesures s’appliqueraient progressivement à partir de 2022. Je le rappelle, nous n’avons aucunement l’intention de nuire à la reprise économique.
Je suis bien conscient des suites que le Gouvernement donnera à cet amendement. Toutefois, nous devons être lucides : même les mesures que nous proposons ne suffiraient pas ! Elles amélioreraient le solde du système de retraite de 9,9 milliards d’euros en 2030. Or – on le sait – le déficit sera de plus de 11 milliards d’euros dès 2025.
Telles sont nos propositions : partir de l’existant, avec la conférence de financement, ne pas attendre la fin de la crise, qui va s’éterniser, et donner à nos concitoyens la garantie que leurs retraites seront honorées à un niveau décent !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Monsieur le rapporteur, le Gouvernement est, comme la commission, soucieux d’assurer l’équilibre et la soutenabilité financière du système de retraite. Mais, à ce stade, il ne peut que demander le rejet de votre amendement.
Tout d’abord, il est prématuré de proposer des mesures de redressement financier sans avoir de visibilité quant aux conséquences à plus long terme de la crise sanitaire sur le système de retraite.
Le Premier ministre a précisément demandé au COR d’évaluer la situation financière du système de retraite. Une première note d’étape a été publiée le 15 octobre dernier : elle donne des perspectives à court terme, jusqu’en 2024. Mais elle doit être complétée par des projections à plus long terme : c’est l’objet du rapport qui paraîtra fin novembre.
Cette vision du besoin à long terme est bel et bien essentielle. Toute réforme des retraites a des effets pendant plusieurs décennies.
Vous proposez de réunir une nouvelle conférence sur l’équilibre et le financement des retraites. Soyez rassuré : le Gouvernement est en permanence en lien avec les partenaires sociaux de notre pays, notamment dans le cadre des conférences du dialogue social, que réunit régulièrement le Premier ministre. C’est par ailleurs sur la base du rapport complet du COR que pourra ensuite commencer, avec les partenaires sociaux, un cycle de concertations dédié au financement de notre protection sociale.
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Monsieur le rapporteur, on ne va pas rouvrir ce soir le débat de fond sur la réforme des retraites… Mais votre proposition me stupéfie. Quel à-propos politique ! Même le Gouvernement l’a compris : face à la crise sanitaire, il faut rassembler le pays, et non le cliver.
Quoi que l’on pense de votre proposition, vous savez qu’elle est clivante et divise profondément les Français ! Vous savez quel était l’état de l’opinion publique en début d’année, avant que la crise de la covid ne surgisse. La réforme des retraites provoquait de multiples conflits.
Est-ce le moment, alors que l’activité économique s’est écroulée et que des catégories entières de la population sont en grande difficulté, de leur signifier qu’elles devront travailler plus longtemps ? Les plus de 60 ans, qui sont déjà en difficulté dès qu’ils sont hors de l’emploi – et ils sont de plus en plus nombreux dans ce cas –, seront encore plus pénalisés. C’est cela, le message que vous voulez adresser au pays ? Vous voulez que l’on dise à l’issue de l’examen du PLFSS : « Pendant que le pays se débat dans une crise économique et sociale dramatique, le Sénat vote sa réforme des retraites en allongeant les durées de cotisations ! » ?
Il y a un temps pour tout. Au-delà de nos désaccords de fond, je suis stupéfié de ce tempo politique. Je vous invite tout simplement à retirer votre amendement.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. On peut noter la constance de notre rapporteur : il a toujours suivi cette ligne politique. Ses propositions ne sont pas de nature à surprendre au sein de la Haute Assemblée. Au moins, il est fidèle à lui-même : c’est déjà ça !
Cela étant, je trouve choquant de profiter d’un amendement dans le cadre du PLFSS pour faire revenir par la fenêtre la réforme des retraites ! Elle a suscité un très fort mouvement d’opposition. Le Gouvernement, qui n’entend pas souvent l’opinion publique, l’a pour une fois entendue en mettant son projet en sommeil face à la situation dramatique du pays.
Depuis lundi dernier, tout le monde a évoqué le sort de telle ou telle catégorie professionnelle ou des personnes sans emploi. Dans nos territoires, dans nos communes, de plus en plus de familles demandent l’aide alimentaire.
La situation est vraiment dramatique sur les plans économique, social et sanitaire. Et, au détour d’un amendement discuté en toute fin d’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, on réintroduit une réforme particulièrement impopulaire. Ce n’est pas possible !
Le débat doit avoir lieu. Ce sera argument contre argument. À l’issue des discussions, une réforme sera mise en œuvre. Mais on ne peut pas agir en catimini, en fin de PLFSS, de surcroît dans un tel contexte, alors que la situation des gens s’aggrave de jour en jour !
M. le président. La parole est à M. Olivier Henno, pour explication de vote.
M. Olivier Henno. Nous sommes, certes, en période de covid. Mais cela signifie-t-il que nous ne pouvons plus aborder la moindre question,… (Protestations sur les travées des groupes SER et CRCE.)
M. Bernard Jomier. Tout dépend du sujet !
M. Olivier Henno. … en particulier si elle est difficile et fait courir le risque de devenir impopulaire ?
Mme Laurence Cohen. Même le Gouvernement y a renoncé !
M. Olivier Henno. Faut-il, parce que nous sommes en période de covid, faire la politique de l’autruche ? Je ne le crois pas.
Il est bon de se poser des questions. On était parti sur une réforme systémique. Cela n’a pas été tranché. Faut-il une réforme paramétrique ? Qu’en est-il de la clause du grand-père et de l’âge pivot ?
Quoi qu’il en soit, sur la question du financement, les choses sont assez simples. Comme le rappelle régulièrement René-Paul Savary, on peut jouer sur le montant des retraites, sur celui des cotisations ou encore sur les mesures d’âge ; ou, éventuellement, on peut recourir au financement par la dette. Quel est le choix le plus responsable ? Transférer aux générations futures le coût de nos retraites ? (Marques d’exaspération sur les travées du groupe CRCE.) Je ne le pense pas.
Avec cet amendement, ce n’est pas une réforme des retraites que l’on propose. (Exclamation sur les travées des groupes SER et CRCE.) Il s’agit simplement de convoquer la conférence des financeurs, d’indiquer une direction et d’exprimer une vision pour l’avenir.
Ainsi, quand il faudra prendre des décisions – car il le faudra tôt ou tard –, nous aurons tous les éléments nécessaires pour agir de manière transparente. C’est essentiel pour celles et ceux qui nous regardent, c’est-à-dire le peuple !
Mme Laurence Cohen. Le peuple n’en veut pas, de cette réforme !
Mme Sophie Primas. Il veut toucher des retraites !
M. le président. La parole est à M. Philippe Mouiller, pour explication de vote.
M. Philippe Mouiller. J’ai bien entendu les interventions offusquées sur la forme de M. Jomier et de Mme Cohen. Mais soyons clairs : chaque année, nous traitons de ces sujets en fin de PLFSS.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Eh oui !
M. Philippe Mouiller. Certes, ce n’est effectivement pas par voie d’amendement que l’on peut lancer une grande réforme des retraites. Mais, en l’occurrence, nous voulons adresser un message de cohérence politique. Même dans les moments difficiles, il faut garder sa cohérence ! On ne peut pas se retrancher derrière les difficultés de l’heure au gré de ses convenances !
Pour notre part, nous restons sur la même ligne : nous avons toujours tenu ce discours au sein de la Haute Assemblée. Nous savons très bien que cet amendement ne perdurera pas au-delà de nos débats. Mais il faut tenir un discours de vérité aux Français. Je me félicite donc d’une telle initiative !
M. le président. La parole est à M. Martin Lévrier, pour explication de vote.
M. Martin Lévrier. Je suis un peu ennuyé…
J’ai bien écouté M. le rapporteur et M. Mouiller. Je le rappelle, sur la réforme des retraites, le Gouvernement ne s’est pas caché derrière son petit doigt. Il y a moins d’un an, beaucoup de Français étaient dans la rue, mécontents que l’on ait posé, au-delà de la réforme systémique, le problème de la partie paramétrique. Le Gouvernement fait preuve de cohérence dans sa volonté d’équilibrer le système des retraites.
D’une certaine manière, je suis d’accord avec M. le rapporteur et Les Républicains. Mais je suis aussi complètement d’accord avec mes collègues de gauche. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.) C’est logique, je suis au centre ! (Sourires.)
M. René-Paul Savary, rapporteur. Dans un tel contexte, on oublie parfois où l’on navigue…
M. Martin Lévrier. Les Français subissent, comme nous tous, la crise actuelle. Beaucoup d’entre eux souffrent profondément. À la crise sanitaire s’ajoute d’ores et déjà une crise économique. Tous les jours, on entend parler de plans de licenciement.
Est-il urgentissime de proposer de tels amendements, de lancer un nouveau débat qui, dans un tel contexte, est anxiogène pour les Français ? Monsieur le rapporteur, pour des raisons d’opportunité politique, je vous demande à mon tour de retirer votre amendement. Vous savez très bien que l’on pourra relancer cette réforme. C’est la volonté du Gouvernement !
M. le président. La parole est à Mme Victoire Jasmin, pour explication de vote.
Mme Victoire Jasmin. Monsieur le rapporteur, ce n’est pas le moment de lancer un tel débat.
Écoutons la voix des départements : récemment encore, face à la flambée du revenu de solidarité active, le RSA, le conseil départemental de la Guadeloupe interpellait le ministère. Nombre d’entreprises sont en grande difficulté. Nombre de nos concitoyens ne savent plus s’ils auront encore du travail à la fin de l’année.
Les mesures que vous préconisez toucheront la grande majorité des Français, à commencer par les plus faibles. Or ce sont eux qui nous ont permis de vivre lors du premier confinement, et ils sont les premières victimes des suppressions d’emploi et des fermetures d’entreprise ! Je pense notamment aux indépendants, qui peinent à vivre au quotidien. Pour eux, les décisions que nous prenons aujourd’hui peuvent avoir des conséquences graves et irréversibles.
Les Français nous regardent. Une telle initiative est très malvenue. Ce n’est pas le moment d’aborder de telles problématiques !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. René-Paul Savary, rapporteur. Mes chers collègues, je vous remercie de vos remarques. Il ne m’avait pas échappé que le contexte était particulièrement difficile ! D’ailleurs, je ne dis pas qu’il faut prendre des mesures maintenant. Simplement, il faut continuer à les prévoir, comme nous l’avons toujours fait.
Ce n’est pas la crise actuelle qui crée le déficit du système de retraite. Le problème est véritablement structurel. Ce déficit va être porté à plusieurs dizaines de milliards d’euros. Si, à l’issue de la crise, nous ne sommes pas capables d’honorer les retraites, nos concitoyens connaîtront encore des difficultés supplémentaires, et ils nous en voudront de ne pas avoir suffisamment anticipé pour redresser les comptes et assurer les prestations !
En l’occurrence, nous ne faisons que reprendre des mesures existantes.
Oui, la réforme systémique est clivante, mais ce n’est pas nous qui l’avons mise sur pied ! Si elle posait un certain nombre de problèmes, c’est parce qu’elle remettait en cause, non l’équilibre, mais un certain nombre de calculs. Pour être valable, il devait se fonder sur un système équilibré.
Voilà pourquoi elle reposait sur des mesures paramétriques. Ce n’est pas nous qui les avons inventées ! Elles ont été proposées et soumises à la discussion des partenaires sociaux, dans le cadre d’une conférence de financement. À mes yeux, c’est une bonne méthode. C’est effectivement aux partenaires sociaux de s’emparer du dossier et de donner leur avis, pour avoir un système équilibré dans quelques années.
Le constat est partagé par tous : tout responsable de droite, de gauche ou du centre sait très bien qu’il faudra prendre des mesures. On ne peut pas cacher la vérité ! Les mesures seront peut-être difficiles à valider politiquement, mais elles seront indispensables pour maintenir nos pensions.
Je propose d’accélérer la réforme Touraine. Ce n’est pas moi qui l’ai inventée ! Elle a été mise en place par une autre majorité.
M. Philippe Mouiller. Eh oui !
Mme Sophie Primas. Plutôt du côté gauche…
M. René-Paul Savary, rapporteur. Nous proposons simplement d’accélérer cette réforme ; cela n’a rien de révolutionnaire. D’ailleurs, personne n’avait poussé de hauts cris lorsqu’elle avait été proposée.
Mme Laurence Cohen. Si ! Si !
M. René-Paul Savary, rapporteur. Je vous rappelle également le poids que représentent les retraites : 13,8 % du PIB. (Protestations sur les travées des groupes CRCE et SER.)
Mme Laurence Cohen. On ne va pas refaire la réforme des retraites à cette heure-ci !
M. le président. Monsieur le rapporteur, je vous invite à la concision.
M. René-Paul Savary, rapporteur. Notre PIB lui-même étant désormais en baisse, la charge des retraites va encore s’alourdir. Demain, elle représentera près de 15 % de la richesse nationale. Comment pourrons-nous l’assumer ?
Une dernière raison m’a poussé à proposer ces dispositions : plus les décisions seront tardives, plus la note sera lourde. Il est notre devoir d’être constant pour équilibrer à terme le régime de retraite.
Je maintiens donc mon amendement !
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Mes chers collègues, l’argument selon lequel ce ne serait pas le moment d’aborder de telles questions n’est pas recevable. Nous sommes en train de débattre de la branche vieillesse. Or, chaque année, nous adoptons des mesures pour équilibrer au mieux les comptes de la branche.
Monsieur Lévrier, qui a utilisé le 49-3 pour faire passer la réforme des retraites, même si le texte n’est pas arrivé au Sénat ? Nous n’avons pas de leçons à recevoir.
M. Martin Lévrier. Nous assumons nos actes !
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Nous aussi !
Par cet amendement, nous proposons la reprise des discussions. D’ailleurs, cette demande va moins loin que les années précédentes. Nous suggérons d’accélérer le dispositif Touraine pour tenir compte des difficultés actuelles.
Ce qui nous guide, c’est le refus de la paupérisation des retraités, paupérisation qui aura lieu si nous n’avons pas le courage de prendre les mesures nécessaires.
Mme Laurence Cohen. Il faut surtout d’autres recettes !
M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, pour explication de vote.
Mme Corinne Féret. Monsieur le rapporteur, on a l’impression que vous voulez engager un véritable débat de fond au sujet de la réforme des retraites à dix-neuf heures…
M. Mouiller parlait de « cohérence ». Il est vrai que, depuis quatre ou cinq ans, à la fin de chaque PLFSS, arrive un amendement tendant à prolonger la durée de cotisations et de reculer l’âge de départ à la retraite. C’est une certaine forme de cohérence. Mais nous vivons dans le même monde et nous voyons ce qui se passe autour de nous, qui plus est en tant qu’élus : notre rôle est aussi d’être à l’écoute de nos concitoyens.
Vous l’avez rappelé vous-même, la réforme des retraites proposée par le Gouvernement voilà quelques mois a profondément divisé les Français. Il faut tout de même en tenir compte.
Et puis, il y a l’épidémie de covid ! Certes, elle n’était absolument pas prévisible, mais on ne peut pas faire comme si de rien n’était. (Mme Victoire Jasmin acquiesce.) On ne peut pas partir du principe que cette épidémie est sans conséquence, sans incidence économique et sociale, en continuant à proposer les mêmes mesures sous prétexte d’être cohérent !
La France de demain ne sera pas la France d’avant l’épidémie. Déjà, des milliers, pour ne pas dire des centaines de milliers de personnes s’inscrivent à Pôle emploi. Si, en plus, elles doivent travailler encore plus longtemps, quel sera le montant de leur retraite le jour où elles pourront cesser volontairement leur activité professionnelle ?
Je suis également choquée de voir qu’avec cet amendement, on propose une nouvelle fois en fin de PLFSS des mesures dont les conséquences seraient extrêmement lourdes pour l’ensemble de nos concitoyens.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. C’est un travail que nous faisons chaque année !
Mme Corinne Féret. Ce n’est pas un amendement anodin, que l’on ferait passer rapidement en se disant que la séance sera levée dans cinq minutes. Non ! Les Français nous regardent. Ils sauront quelle décision aura été prise par le Sénat à dix-neuf heures !
Mme Laurence Cohen. Très bien !
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 201.
J’ai été saisi de deux demandes de scrutin public, émanant, l’une, de la commission, l’autre, du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 23 :
Nombre de votants | 331 |
Nombre de suffrages exprimés | 318 |
Pour l’adoption | 200 |
Contre | 118 |
Le Sénat a adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 47 quater.
Article 48
Pour l’année 2021, les objectifs de dépenses de la branche Vieillesse sont fixés :
1° Pour l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale, à 251,9 milliards d’euros ;
2° Pour le régime général de la sécurité sociale, à 144,7 milliards d’euros. – (Adopté.)
Article 49
Pour l’année 2021, les objectifs de dépenses de la branche Famille de la sécurité sociale sont fixés à 49,3 milliards d’euros. – (Adopté.)
Article 49 bis (nouveau)
I. – Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution et dans un délai de douze mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnances les mesures relevant du domaine de la loi visant à :
1° Étendre à Mayotte les prestations prévues aux articles L. 168-1, L. 168-8, L. 331-8, L. 531-5, L. 531-6 et L. 544-1 du code de la sécurité sociale ;
2° Valider rétroactivement des périodes d’assurance pour les personnes affiliées au régime de retraite mentionné à l’article 5 de l’ordonnance n° 2002-411 du 27 mars 2002 relative à la protection sanitaire et sociale à Mayotte ayant exercé une activité salariée entre 1987 et 2002 ;
3° Adapter la composition de la Caisse de sécurité sociale de Mayotte et certaines dispositions relatives à la gouvernance de cet organisme ;
4° Adapter la législation d’assurance maladie maternité applicable au Département de Mayotte en vue de la rapprocher de la législation applicable en métropole ou dans les autres collectivités relevant de l’article 73 de la Constitution ;
5° Mettre en œuvre la branche Autonomie du régime général de la sécurité sociale à Mayotte ;
6° Adapter les conditions d’ouverture de droit aux prestations familiales servies par la Caisse de sécurité sociale de Mayotte.
II. – Chaque ordonnance procède à une ou plusieurs des opérations suivantes :
1° Étendre la législation intéressée dans une mesure et selon une progressivité adaptées aux caractéristiques et contraintes particulières de Mayotte ;
2° Adapter le contenu de cette législation à ces caractéristiques et contraintes particulières ;
3° Modifier la législation intéressée applicable à Mayotte en vue d’améliorer les prestations servies ;
4° Adapter certaines dispositions du code de la sécurité sociale pour les rendre directement applicables à Mayotte.
III. – Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de six mois à compter de la publication de chaque ordonnance. – (Adopté.)
Articles additionnels après l’article 49 bis