Mme Pascale Gruny. En 2018, le Gouvernement a introduit dans le code de la sécurité sociale un article L. 622-2 permettant aux professions libérales qui le souhaitent de créer, section par section, un régime d’indemnités journalières pendant les 90 premiers jours d’incapacité de travail – l’assurance invalidité pouvant prendre le relais au-delà. Ce régime est bien adapté aux professions libérales, dont les besoins en la matière sont très variables.
Toutefois, aucun dispositif d’indemnités journalières n’a été mis en place par les professions libérales sur ce fondement : seul le conseil d’administration de la Caisse autonome de retraite des médecins de France (CARMF) s’est prononcé en faveur de la mise en place de ce régime en juin 2019, mais sa démarche n’a pu aboutir.
Cette absence d’un dispositif d’indemnisation des arrêts de travail a posé problème pendant la crise sanitaire. Selon l’objet de l’amendement n° 2699 déposé par le Gouvernement lors de l’examen du texte à l’Assemblée nationale, « l’État a décidé d’accorder de manière tout à fait exceptionnelle des indemnités journalières dérogatoires pour les professionnels libéraux, financées par l’assurance maladie ».
Cette affirmation est parfaitement inexacte : seules les professions de santé ont bénéficié, à titre dérogatoire, d’indemnités journalières si elles ont été amenées à interrompre leur activité professionnelle en raison de la covid-19. Toutes les autres professions libérales ont bénéficié soit d’aménagements du règlement des cotisations sociales, soit d’aides directes financées par les sections professionnelles sur leurs fonds propres au titre de l’action sociale.
Si la création d’un régime obligatoire peut se justifier, la création d’un régime unique, uniforme, n’est pas conforme à la tradition sociale des professions libérales, très attachées à leur autonomie.
Le présent amendement vise donc à conserver la création obligatoire d’un régime d’indemnités journalières dans les professions libérales au 1er juillet 2021, tout en préservant l’autonomie de gestion, de prestations et de cotisations des sections professionnelles.
Ainsi, il tend à confier au conseil d’administration de chacune des sections professionnelles dans le cadre de leur régime invalidité-décès, sous le contrôle de la Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales (CNAVPL) et du ministère de la santé par voie de décret, le soin de fixer le taux et le plafond de la cotisation, ainsi que le montant des prestations.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Cet amendement vise à transférer au niveau des sections professionnelles le pilotage que le texte prévoit de confier à la CNAVPL.
Je comprends cette logique qui tend à faire correspondre le régime créé aux réalités de chacune des professions. Je suis consciente également des craintes de voir là un nouveau régime venir alourdir les charges pour des professionnels libéraux qui ne le réclamaient pas tous et qui avaient des besoins inégaux. Rappelons que, depuis deux ans, ils avaient la possibilité de mettre ces indemnités en place, mais que toutes les caisses ne l’ont pas fait.
Cependant, l’approche retenue consistant à confier ce pilotage à la CNAVPL me semble plus opportune. Renvoyer ce pilotage à chacune des sections paraît pertinent à première vue, mais risquerait, me semble-t-il, de freiner considérablement la mise en œuvre de ce dispositif.
La CNAVPL réunit bien la diversité des professions libérales et des différentes sections, tandis que son conseil d’administration est bien chargé de proposer des adaptations.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Comme Mme la rapporteure, le Gouvernement émet un avis défavorable.
La mise en place d’un tel dispositif par section, ainsi que vous le proposez dans cet amendement, ferait peser un risque sur les sections comptant de faibles effectifs et serait plus pénalisante pour les professions aux revenus les plus faibles, par exemple les infirmières.
En outre, madame la sénatrice, contrairement à ce que vous indiquez, des indemnités journalières exceptionnelles ont bien été versées au cours du premier confinement aux professionnels libéraux qui ne pouvaient pas télétravailler et qui assuraient la garde d’un enfant ou qui étaient considérés comme personnes vulnérables. Au total, 176 millions d’euros d’indemnités journalières ont été versés aux professionnels de santé et 72 millions d’euros aux autres professionnels libéraux.
Je confirme donc ce qui est indiqué dans l’exposé des motifs du projet de loi.
Mme la présidente. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. En dépit des deux avis défavorables qu’il a recueillis, cet amendement me paraît intéressant en ce que ses auteurs expriment, à travers lui, une volonté d’unification de l’ensemble des régimes d’indemnités journalières des professions libérales regroupées au sein de la CNAVPL – au nombre de treize, quand même. Ce n’est pas incohérent !
Que certaines professions ne soient pas d’accord et demandent que leur régime d’indemnités journalières continue d’être géré par leur régime complémentaire – les indemnités handicap et décès –, on peut le comprendre. Sauf que confier cette gestion à la CNAVPL, la caisse de base regroupant l’ensemble de ces professions, présente un intérêt : cela permettrait une mutualisation de ces régimes. Je partage la position de la rapporteure, selon qui cette mutualisation ne serait pas inintéressante.
Néanmoins, il ne faudra pas oublier de signaler aux intéressés qu’ils devront s’acquitter d’un surcroît de cotisations de 0,3 %, même si ce n’est pas énorme. Selon l’étude d’impact, que je cite de mémoire, cela représente au minimum 51 euros de cotisations annuelles pour des indemnités journalières à hauteur de 22 euros pendant 90 jours.
Ce n’est pas incohérent dans la mesure où ces professionnels font appel à des assurances privées.
En revanche, il faudra être attentif aux délais de mise en œuvre de cette mesure. Elle ne pourra l’être d’ici à 2021, monsieur le secrétaire d’État, compte tenu du fait que la plupart des professionnels concernés devront résilier leur assurance, sauf à les conserver à titre complémentaire.
Le problème, c’est qu’il n’y a pas eu de concertation : l’Union nationale des professions libérales (UNAPL) était favorable au principe de cette caisse supplémentaire – c’est bien un nouveau régime qui est créé – ; en revanche, la concertation a été insuffisante avec les professions, certaines comme les experts-comptables, les chirurgiens-dentistes et les sages-femmes nous ayant fait part de leur désaccord.
Aussi, je vous invite à vous rapprocher de ces professions de manière à améliorer ce dispositif.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 56 rectifié est présenté par MM. Bonne, Bascher et Bocquet, Mme Bonfanti-Dossat, M. Bonhomme, Mme V. Boyer, MM. Brisson et Courtial, Mme L. Darcos, M. Daubresse, Mmes Dumas et Deromedi, MM. B. Fournier et Gremillet, Mme Gruny, M. D. Laurent, Mme Lavarde, M. Lefèvre, Mme Micouleau, M. Moga, Mmes Noël et Puissat, M. Rapin, Mme Richer, MM. Sautarel, Segouin et Vogel, Mme Di Folco et MM. Charon et H. Leroy.
L’amendement n° 286 rectifié quater est présenté par MM. Milon, Grand, Burgoa et Calvet, Mme Berthet, MM. Dallier et de Legge, Mme Garriaud-Maylam, MM. Mandelli, Piednoir, Savary et Houpert, Mme Delmont-Koropoulis et M. Regnard.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. - Alinéa 14
Compléter cet alinéa par les mots :
, cette limite étant égale au plafond de l’assiette de la cotisation supplémentaire prévu au second alinéa de l’article L. 621-2
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Frédérique Puissat, pour présenter l’amendement n° 56 rectifié.
Mme Frédérique Puissat. Cet amendement s’inscrit lui aussi dans une logique de simplification et d’unification. Il tend en effet à fixer le même plafond de revenu applicable au calcul de la cotisation et de l’indemnité journalière.
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Milon, pour présenter l’amendement n° 286 rectifié quater.
M. Alain Milon. Il est défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Ces amendements visent à faire correspondre la limite retenue pour les revenus servant au calcul des prestations avec le plafond retenu pour l’assiette des cotisations.
Le problème, c’est que les régimes de sécurité sociale n’ont pas toujours une identité entre l’assiette des cotisations et le plafond retenu pour les prestations. C’est le cas, par exemple, du régime d’indemnités journalières des indépendants rattachés au régime général, qui cotisent sur deux plafonds annuels de la sécurité sociale (PASS) pour des prestations calculées sur un PASS.
C’est aussi l’hypothèse retenue par le Gouvernement pour ce nouveau régime, avec une cotisation sur cinq PASS et des prestations sur trois PASS.
Cette dissociation permet de répondre plus facilement, me semble-t-il, à l’impératif d’équilibre financier en assurant une redistribution.
La commission émet un avis défavorable sur ces amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 56 rectifié et 286 rectifié quater.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. L’amendement n° 172, présenté par Mme Imbert, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 19
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…) Au début du premier alinéa, la mention :
« I. - » est supprimée ;
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Cet amendement tend à supprimer une coquille figurant dans le code depuis quinze ans : il était temps de la corriger !
Avis favorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 34 quater, modifié.
(L’article 34 quater est adopté.)
Article 34 quinquies (nouveau)
Après l’article L. 4151-4 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 4151-4-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 4151-4-1. – I. – À titre expérimental et pour une durée de trois ans à compter de la publication de la loi n° … du … de financement de la sécurité sociale pour 2021, par dérogation à l’article L. 2212-2, les sages-femmes ayant réalisé la formation complémentaire obligatoire et justifiant des expériences spécifiques attendues peuvent réaliser des interruptions volontaires de grossesse instrumentales en établissements de santé.
« II. – Un décret précise les modalités de mise en œuvre de l’expérimentation mentionnée au I du présent article, notamment les caractéristiques de l’appel à projets national, les éléments relatifs à la formation exigée et les expériences attendues des sages-femmes, les conditions de financement de l’expérimentation ainsi que les conditions d’évaluation de l’expérimentation en vue d’une éventuelle généralisation.
« III. – Un arrêté du ministre chargé de la santé précise la liste des établissements de santé retenus pour participer à l’expérimentation au vu des résultats de l’appel à projets national. »
Mme la présidente. L’amendement n° 173, présenté par Mme Imbert, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. L’article 34 quinquies prévoit d’autoriser, à titre expérimental, les sages-femmes à pratiquer des interruptions volontaires de grossesse instrumentales.
Il convient de rappeler que, depuis la loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé, les sages-femmes sont autorisées à pratiquer des IVG par voie médicamenteuse. En revanche, les IVG instrumentales ne peuvent être réalisées que par des médecins.
La pratique d’IVG instrumentales par les sages-femmes ne fait pas l’unanimité. Sur la forme, la mesure proposée, qui a trait aux compétences d’une profession de santé, est une disposition non financière, qui ne relève donc pas du champ de la loi de financement de la sécurité sociale.
Pour ces raisons, il vous est proposé de supprimer cet article.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Le Gouvernement est défavorable à la suppression de l’article 34, qui nous semble important.
Vous le savez, les sages-femmes s’investissent pleinement dans les questions de santé sexuelle et reproductive, dans une approche globale. À ce titre, elles peuvent, depuis 2016, réaliser des interruptions volontaires de grossesse par voie médicamenteuse. Ouvrir une pleine compétence en orthogénie à ces professionnelles de santé, qui pratiquent déjà des gestes endo-utérins, comme la pose de stérilets, la délivrance artificielle ou la révision utérine, pourrait véritablement renforcer l’accès des femmes à l’IVG en tous points du territoire et leur garantir de pouvoir choisir plus librement entre l’IVG médicamenteuse et l’IVG instrumentale, objectif que nous partageons tous, j’en suis convaincu.
Cet article définit les conditions nécessaires afin d’assurer la qualité et la sécurité des soins dans le cadre de cette expérimentation, notamment en termes de formation et d’expérience professionnelle attendue des sages-femmes. La qualité et la sécurité des soins sont évidemment des exigences avec lesquelles nous ne transigerons jamais.
Bien sûr, l’expérimentation sera, par nature et par définition, évaluée. Elle permettra de décider de manière éclairée si, et dans quelles conditions, nous devons généraliser cette nouvelle compétence.
Enfin, pour répondre au dernier argument de Mme la rapporteure, j’indique qu’une modification du recours à l’IVG instrumentale est à attendre en regard. Au vu des forfaits IVG, qui varient selon les méthodes, la mesure proposée pourrait avoir un impact financier sur les dépenses d’assurance maladie. C’est d’ailleurs ce qui justifie la présence de cet article dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Je partage les propos de M. le secrétaire d’État. Notre groupe a d’ailleurs déposé à plusieurs reprises des amendements en faveur d’une telle expérimentation. Nous sommes donc ravis de la voir figurer dans le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale à l’issue de son examen par l’Assemblée nationale.
Pour rappel, ces professionnels de santé sont habilités à pratiquer des IVG médicamenteuses depuis 2016. Le code de la santé publique garantit aux femmes la liberté de choisir entre ces deux méthodes, mais nous savons bien que, dans les faits, les IVG instrumentales représentent une part minoritaire des IVG, faute de praticiens en nombre suffisant.
J’avoue ne pas comprendre les réticences de certains ou de certaines, qui pensent sans doute que le fait que les sages-femmes ne soient pas des médecins pourrait mettre en danger la vie des femmes. Mais, mes chers collègues, puisque l’IVG médicamenteuse ou instrumentale n’est pas un acte relevant de la pathologie gynécologique, elle est, de fait, de la compétence des sages-femmes !
Cette extension des tâches, qui correspond aux objectifs du plan Ma santé 2022, est d’ailleurs très largement soutenue par nombre de médecins, qui reconnaissent les compétences des sages-femmes.
Elle permettrait par ailleurs de garantir la liberté de choix de la méthode et rendrait plus accessible le recours à l’IVG partout sur le territoire, alors que plus de 130 centres IVG ont fermé en dix ans et que l’accès à celui-ci est rendu encore plus difficile en ces temps de crise sanitaire.
Au-delà de cette question, je regrette que nos deux amendements sur l’IVG, l’un visant à allonger de deux semaines le délai légal, l’autre visant à supprimer la double clause de conscience, aient été déclarés irrecevables, pour des motifs très contestables.
Nous sommes donc tout à fait hostiles à cet amendement de suppression de l’article 34 quinquies. Son adoption serait une erreur.
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Je ne comprends pas bien le sens de cet amendement de suppression, indépendamment des raisons de forme qui, à l’identique d’un amendement précédent, ont été invoquées par la rapporteure.
Sur le fond – car c’est bien ce qui est ici en question –, si cet amendement était adopté, l’accès à l’IVG s’en trouverait compliqué. Les médecins qui pratiquaient des IVG partant en grand nombre à la retraite, un certain nombre de femmes n’auront plus le choix entre la méthode médicamenteuse et la méthode instrumentale, contrairement à ce que prévoit le code de la santé publique.
Comme l’a rappelé Corinne Imbert, les sages-femmes pratiquent des IVG médicamenteuses depuis la loi de 2016 de modernisation de notre système de santé. L’IVG instrumentale est-elle d’une technicité telle qu’elle devrait être réservée à des spécialistes en actes quasi chirurgicaux ? Non ! Les médecins généralistes pratiquent des IVG instrumentales ; la technique en est simple et la formation extrêmement rapide. Une fois que vous savez pratiquer un frottis, l’étape suivante consiste à introduire dans l’utérus le matériel d’aspiration, cette opération n’étant pas compliquée. Cette formation est parfaitement accessible aux sages-femmes, qui, je le rappelle, exercent une profession médicale, prescrivent et accomplissent des actes techniques.
Rien ne justifie, sur le plan technique, ce refus qui est opposé aux sages-femmes de pratiquer des IVG instrumentales, alors qu’elles sont parfaitement compétentes pour ce faire dès lors qu’elles auront suivi une courte formation complémentaire. De surcroît, cela compromet le droit des femmes à choisir leur méthode d’IVG.
Nous aurions accepté de débattre plus précisément des modalités de cette expérimentation, mais nous ne comprenons pas, je le répète, que l’on veuille supprimer l’article. Nous voterons donc contre cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote.
M. Alain Milon. Permettez-moi de revenir sur ce que vient de dire M. Jomier.
C’est vrai, l’IVG instrumentale consiste, pour commencer, à introduire une canule dans l’utérus aux fins d’aspiration. Le problème, c’est que l’utérus n’est pas vide. Monsieur le secrétaire d’État, vous avez comparé l’IVG instrumentale à la pose d’un stérilet ; or la pose d’un stérilet se pratique dans un utérus vide. Lors d’une IVG, celui-ci est « occupé » – pour ne pas dire autre chose.
En outre, l’introduction d’une canule dans un col d’utérus « occupé » nécessite au préalable que celui-ci soit dilaté, cette opération n’étant pas nécessairement très aisée à réaliser. (Exclamations sur les travées du groupe SER.) Ensuite, il faut vérifier l’absence de tout saignement après l’aspiration.
Je suis d’accord pour considérer que les sages-femmes, dès lors qu’elles auront suivi une formation à cette fin, pourraient très bien pratiquer des IVG instrumentales. En revanche, monsieur le secrétaire d’État, je ne veux surtout pas qu’il soit établi une comparaison entre une IVG instrumentale et la pose d’un stérilet. L’une et l’autre n’ont rien en commun.
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Je veux rassurer M. Milon, qui pourra relire mes propos : je n’ai pas comparé l’une et l’autre, pour les raisons que vous avez d’ailleurs très bien évoquées ; j’ai simplement dit que les sages-femmes pratiquaient d’ores et déjà un certain nombre d’actes.
M. Alain Milon. Ce n’est pas une excuse valable !
Mme la présidente. En conséquence, l’article 34 quinquies est supprimé.
Mme Laurence Cohen. Hou !
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Ce n’est pas glorieux !
Article 34 sexies (nouveau)
À titre expérimental, pour une durée de trois ans, l’État peut autoriser le financement par le fonds d’intervention régional mentionné à l’article L. 1435-8 du code de la santé publique de la mise en place par certaines agences régionales de santé d’un parcours soumis à prescription médicale visant à accompagner les personnes pour lesquelles une complication du diabète de type 2 est découverte et qui bénéficient du dispositif prévu au 3° de l’article L. 160-14 du code de la sécurité sociale.
Un décret fixe les conditions d’application du présent article, notamment les agences régionales de santé concernées par cette expérimentation et le contenu de ce parcours, qui peut comprendre un bilan d’activité physique ainsi qu’un bilan et des consultations de suivi nutritionnels et psychologiques.
Un rapport d’évaluation du dispositif est transmis au Gouvernement avant la fin de l’expérimentation.
Mme la présidente. La parole est à M. Xavier Iacovelli, sur l’article.
M. Xavier Iacovelli. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, je profite de l’examen de cet article pour alerter M. le secrétaire d’État sur le remboursement de frais médicaux liés au diabète.
J’ai récemment fait la connaissance d’un jeune homme que certains d’entre vous ont déjà eu, eux aussi, l’occasion de rencontrer : Hakaroa Vallé. Âgé de 15 ans, il est diabétique de type 1 et mène un combat formidable contre les discriminations que subissent les personnes diabétiques dans notre pays, notamment dans l’emploi, principalement dans la fonction publique.
J’évoquerai la problématique du remboursement des capteurs de glycémie, qui sont au nombre de deux en France.
Avec 80 % d’utilisateurs, le système Freestyle est le plus utilisé en France. Il l’est même désormais par les cyclistes professionnels pour le suivi de leur glycémie dans l’effort. Or ce capteur flash, sans piqûre, n’est aujourd’hui pas remboursé pour les enfants de moins de 4 ans, âge auquel il n’est pas évident de verbaliser les symptômes d’une hypoglycémie. Pour les familles, le coût de ce dispositif peut atteindre 1 750 euros par an.
Le second type de capteur, le Dexcom, est, quant à lui, remboursé dès lors que le taux d’hémoglobine glyquée est supérieur à 8 %, taux à partir duquel on se situe dans la zone de croissance exponentielle des risques de complications.
En deçà de 7 %, il est impossible d’être remboursé alors même qu’un tel remboursement éviterait des complications qui coûtent beaucoup plus cher à la sécurité sociale.
Je tenais vraiment à aborder cette question, car cette problématique touche des milliers d’enfants et de familles en France.
Nous devons tendre vers un remboursement sans condition pour les personnes insulino-dépendantes et insulino-requérantes – 500 000 Français sont concernés.
Aborder cette question lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, même si celle-ci n’est pas directement liée à cet article, c’est aussi rendre hommage à ce jeune homme de 15 ans, à sa détermination et à son combat pour améliorer notre système. Il est source d’inspiration pour nous tous et un formidable porte-parole pour les personnes diabétiques. (Mme Nadia Sollogoub applaudit.)
Mme la présidente. L’amendement n° 174, présenté par Mme Imbert, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Avant de présenter cet amendement, je tiens à dire que je souscris aux propos de notre collègue. Le non-remboursement de ce dispositif pour les enfants de moins de 4 ans soulève de nombreux problèmes pour eux et pour leurs familles.
J’en viens à la présentation de l’amendement n° 174 tendant à supprimer l’article 34 sexies.
Cet article s’inspire du forfait de suivi post-cancer institué par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020, qui ne constitue pas cependant une expérimentation, comme celle qui est envisagée dans cet article.
Si la volonté d’accompagner les patients atteints de pathologies chroniques dans une logique de parcours non pas seulement de santé, mais aussi de soins est partagée, le fait est que de nombreux dispositifs répondent déjà à cette finalité.
L’expérimentation proposée pourrait notamment s’inscrire dans le cadre général pour l’innovation au sein du système de santé ouverte par l’article 51 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018, qui avait précisément vocation à renforcer la cohérence des actions de coordination des parcours tout en renforçant leur suivi et leur évaluation.
Afin de ne pas superposer les dispositifs, il est proposé de supprimer cet article.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Permettez-moi, pour commencer, de faire un double aparté.
Comme Mme la rapporteure, je partage les propos du sénateur Iacovelli. Aussi, je vous propose d’avancer ensemble sur la problématique que vous avez soulevée.
Par ailleurs, permettez-moi de revenir sur l’expérimentation prévue à l’article précédent, dont vous avez voté la suppression à l’instant. Il s’agissait d’autoriser les sages-femmes, à titre expérimental, à pratiquer des IVG instrumentales. Avec cette suppression, je me demande quel message nous envoyons aux femmes de ce pays et, accessoirement, aux sages-femmes elles-mêmes, mais nous aurons l’occasion d’y revenir au cours de la longue navette parlementaire qui nous attend. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, GEST, SER et CRCE.)
J’en viens à l’amendement n° 174.
Mme la rapporteure a raison de souligner les possibilités offertes par le dispositif de l’innovation en santé, créé par l’article 51 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018.
Plus de soixante-dix expérimentations, portant sur des thèmes variés, ont été autorisées à ce titre, dont douze favorisant la pratique de l’activité physique adaptée. C’est la voie principale pour les expérimentations, d’autant qu’il n’existe aucune restriction quant au statut juridique des porteurs de projets.
En première lecture, l’Assemblée nationale a voté une expérimentation visant à mettre en place un parcours de soins pour l’accompagnement des personnes souffrant de diabète. Nous y sommes favorables, pour plusieurs raisons que je vous précise de nouveau.
Premièrement, cet article souligne très clairement que le Gouvernement est fortement engagé en faveur du développement du sport santé. J’espère qu’il en est de même du Sénat !
Deuxièmement, il favorise le déploiement sur le terrain de toutes les initiatives qui rencontrent un véritable succès dans les territoires. Je pense notamment aux maisons sport-santé – certains d’entre vous en comptent sans doute dans leur département.
Troisièmement et enfin, il met en avant les innovations, permises par le dernier PLFSS, en faveur de l’activité physique adaptée. Parmi elles, figure bien sûr le parcours post-cancer, que vous avez voté l’an passé et dont les décrets d’application sont en cours de finalisation en vue d’un déploiement avant la fin de l’année 2020.
Le sport santé est l’une des priorités d’Olivier Véran et il s’inscrit dans l’action du Gouvernement : l’examen du PLFSS me donne l’occasion de le réaffirmer. Pour cette raison, nous avons appuyé les amendements de députés visant à expérimenter l’accompagnement pluridisciplinaire des diabétiques de type 2. En conséquence, nous sommes défavorables à cet amendement de suppression.