M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Je remercie Mme la ministre de ses explications.
Nous nous réjouissons que l’amendement de nos collègues socialistes ait pu être déposé. Celui de notre groupe, pourtant identique, a été déclaré irrecevable… C’est encore le mystère de l’irrecevabilité : je le répète, il faut vraiment que nous, sénatrices et sénateurs, ayons notre mot à dire sur l’irrecevabilité de nos amendements, parce que, là, on marche un peu sur la tête !
Mme Cathy Apourceau-Poly. Exactement !
Mme Laurence Cohen. Mon collègue vient de développer l’objet de son amendement, et donc du nôtre, puisque identique. Je suis un peu choquée par vos explications, monsieur le rapporteur général : à vous écouter, il faudrait toujours attendre pour agir, même si vous jugez le sujet important. Si nous avions eu le temps de débattre en commission, nous aurions pu sous-amender cet amendement ; nous ne l’avons pas fait.
Par ailleurs, madame la ministre, les éléments pourtant importants que vous nous avez communiqués ne suffisent pas à me convaincre. En effet, cela fait des années que nous subissons des pénuries de médicaments. Notre chambre haute a publié énormément de rapports très fouillés, dans lesquels elle formulait des recommandations.
Or nous en sommes toujours au même point : alors que nous vivons une pandémie extrêmement grave, des pénuries de médicaments nous sont révélées, y compris pour des traitements classiques de pathologies connues. En tant que sénatrices et sénateurs, nous sommes régulièrement saisis de ce sujet.
La loi prévoyait des réserves de quatre mois. On nous dit : « Ce sera finalement deux mois, mais ne vous inquiétez pas, nous vérifierons régulièrement l’application de ce décret. » J’estime que c’est largement insuffisant, et j’en appelle à appliquer la loi, c’est-à-dire à prévoir des réserves de quatre mois.
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Je vous remercie, madame la ministre, pour vos explications relatives au décret qui va paraître.
Notre rapporteur général a évoqué la question du coût. En Finlande, une discussion entre les entreprises du médicament et les autorités a permis d’aboutir à un accord prévoyant une prise en charge partielle négociée des coûts de stockage par les pouvoirs publics, qui demandent la constitution de ces stocks de sécurité pour protéger leur population. Par l’amendement n° 804 rectifié bis, je vous propose exactement le même type de dispositif, non pas unilatéral, mais négocié avec les entreprises du médicament.
Madame la ministre, vous avez indiqué que le décret prévoit une procédure dérogatoire permettant de porter le stock à quatre mois. Je rappelle toutefois que les durées moyennes de pénurie sont bien supérieures, et que le choix de stocks de quatre mois résultait d’un compromis adopté pour que chaque partie se sente entendue.
La procédure dérogatoire est complexe. Elle repose sur la décision du directeur général de l’ANSM, qui doit être appliquée dans les six mois suivant sa publication, ce qui peut prolonger la rupture du stock en question pendant une durée qui porte atteinte à la santé de la population.
J’entends les objections relatives au droit européen, mais nous verrons bien ! On ne va pas détricoter d’emblée une mesure de compromis qui a été acceptée par tout le monde et qui améliorerait une situation qui ne cesse de se dégrader. Ou alors, cessons de débattre de la gestion qui a été faite des stocks de masques à l’arrivée de la pandémie : réduisons les stocks à zéro et poursuivons tranquillement le même type de gestion.
Madame la ministre, nous proposons une solution raisonnable et négociée pour remédier à la dégradation des stocks de médicaments d’intérêt thérapeutique majeur, seuls visés dans mon amendement.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Les pénuries de médicaments sont un sujet majeur pour nos concitoyens. Elles angoissent tout le monde. Je suis sollicitée régulièrement par des personnes qui ont peur de ne pas pouvoir continuer leur traitement et qui se trouvent dans des situations scabreuses.
Le Gouvernement avance deux arguments.
Premièrement, cela coûte. De ce point de vue, l’exemple de la Finlande, cité par notre collègue Bernard Jomier, mérite tout à fait d’être étudié.
Deuxièmement, l’Union européenne. Or la Finlande est dans l’Union européenne. Si je suis très critique sur l’Union européenne telle qu’elle existe actuellement, je voudrais être certaine qu’elle est bien le problème. En effet, je connais assez les habitudes de notre grande administration, qui nous explique que telle disposition n’est pas conforme au droit européen, alors que c’est une autre partie du décret, ou même sa transposition qui est contestée. Si ça marche en Finlande, il n’y a pas de raison que ça ne marche pas en France !
Nous devons tenir bon sur cette position, car ce n’est pas la première fois que nous avons ce débat au Sénat. Mme Buzyn nous avait dit que la situation allait s’améliorer, que nous étions excessifs. Or la situation ne cesse de se dégrader, et pas seulement à cause du covid.
Si nous ne tenons pas bon sur cette position, nous allons encore avaliser l’impuissance de l’action publique au motif de l’Union européenne, motif sur lequel, personnellement, j’ai des doutes, vu que dans d’autres pays il n’en va pas ainsi. Je vous propose donc de voter cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote.
M. Alain Milon. Je voterai cet amendement, qui me semble extrêmement intéressant, et ce pour une raison très simple : dans la crise que nous avons traversée au mois de mars, l’absence de stocks a entraîné une angoisse importante au sein de la population et des difficultés de communication de la part du Gouvernement.
Il est donc nécessaire que nous reprenions les stocks en main. Cela doit passer par une négociation – c’est un point important – entre les autorités politiques et les laboratoires pharmaceutiques qui regardent cet amendement d’un œil un peu sévère.
Les stocks sont toutefois nécessaires pour rassurer l’ensemble de nos concitoyens, mais aussi les personnels soignants, qui, dans le contexte de la crise qui arrive, n’ont pas seulement l’angoisse de soigner, mais aussi celle de manquer de médicaments.
Je voterai donc cet amendement, des deux mains s’il le faut.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. La question est bonne, mais la réponse ne l’est pas. Vous proposez de légiférer pour remédier à un problème de gestion des stocks ? Non ! Cela supposerait de disposer des entrepôts, des régulateurs, etc. De plus, il existe une multitude de médicaments, et tout cela ne peut se régler à l’échelon d’une entreprise.
Je suis conscient qu’il faut trouver une solution à ce problème, mais celle qui est proposée au travers de cet amendement n’est pas la bonne.
Cela étant dit, je suis ouvert à la discussion avec les industriels pharmaceutiques, qui seule nous permettra de trouver une réponse appropriée à ce problème de gestion des stocks et, ainsi, d’éviter la pénurie.
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Madame Cohen, vous vous êtes élevée contre la non-recevabilité de votre amendement, mais celui-ci n’était pas identique à l’amendement n° 804 rectifié bis de M. Jomier. En effet, M. Jomier a prévu une diminution de l’assiette de contribution pour les médicaments concernés ; cette disposition justifie que l’on puisse discuter cet amendement dans le cadre d’un PLFSS.
Vous nous reprochez de ne pas vous avoir indiqué qu’il fallait rectifier votre amendement, mais, je suis au regret de vous le dire, tel n’est pas le rôle de la commission, qui a dû se prononcer sur la recevabilité de plus de 1 000 amendements. Il y a un droit d’amendement, auquel chacun tient, et ce sont aux auteurs d’un amendement qu’il revient de s’assurer de sa recevabilité.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 17.
Article 17 bis (nouveau)
Le deuxième alinéa de l’article L. 138-19-9 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée : « La part de ces derniers correspondant aux six premiers mois de l’année civile est communiquée par l’assurance maladie au plus tard le 30 septembre de cette même année. »
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 960 rectifié ter, présenté par MM. Henno, Marseille et P. Martin, Mme Dindar, MM. Kern, Janssens et Moga, Mme Guidez, M. Levi, Mme Vermeillet, MM. Laugier, S. Demilly, Hingray, Lafon, Le Nay et Cazabonne, Mme Morin-Desailly et MM. Duffourg et Chauvet, est ainsi libellé :
I. – Au début
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Au premier alinéa de l’article L. 138-19-8 du code de la sécurité sociale, après la référence : « L. 162-22-7 » sont insérés les mots : « à l’exception, pour une période de trois ans suivant leur inscription en vue d’une prise en charge au titre de l’article L. 162-22-7, des produits et prestations innovants présentant un niveau d’amélioration du service attendu majeur, important ou modéré ».
II. – Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Pour l’année 2021, le montant Z mentionné à l’article L. 138-19-8 du code de la sécurité sociale est fixé à 2,09 milliards d’euros.
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant des I et II, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Olivier Henno.
M. Olivier Henno. Cet amendement relatif aux dispositifs innovants vise à créer une clause de régulation des dispositifs médicaux en lieu et place du régime de la clause de sauvegarde pensé à l’origine pour le secteur du médicament. Loin de vider le mécanisme initial de sa substance, il s’agit essentiellement d’une mesure symbolique et cohérente, portant le signal fort de l’ambition de la France en matière d’innovation.
Les travaux du Conseil stratégique des industries de santé (CSIS) doivent ainsi trouver leurs premières traductions via un traitement spécifique de la régulation de ce secteur. Actuellement, les dispositifs médicaux se voient appliquer une clause de sauvegarde inadaptée aux spécificités de ce secteur. Le secteur des dispositifs médicaux ne peut être traité avec les mêmes mécanismes budgétaires que ceux qui sont appliqués au médicament, en raison de différences de modèle économique, de processus technologiques et industriels, de tissus d’entreprises, de cycles d’innovation, etc.
Il est donc proposé de créer un régime distinct, conformément aux propositions formulées par le Gouvernement en première lecture à l’Assemblée nationale, en y ajoutant la sanctuarisation des dispositifs les plus innovants, qui représentent à peine 1 % en valeur des montants remboursés.
M. le président. L’amendement n° 288 rectifié quater, présenté par M. Milon, Mmes V. Boyer, Deromedi et Dumas, MM. Grand, Burgoa et Calvet, Mme Berthet, MM. Brisson, Charon, Dallier et de Legge, Mme Garriaud-Maylam, MM. D. Laurent, H. Leroy et Mandelli, Mme Richer, MM. Sautarel et Genet, Mme L. Darcos, MM. Piednoir et Savary, Mme Delmont-Koropoulis et MM. Regnard et B. Fournier, est ainsi libellé :
I. - Après l’alinéa 1
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Au premier alinéa de l’article L. 138-19-8 du code de la sécurité sociale, après la référence : « L. 162-22-7, », sont insérés les mots : « à l’exception, pour une période de deux ans suivant leur première inscription en vue d’une prise en charge au titre du même article L. 162-22-7, des produits et prestations innovants présentant un niveau d’amélioration du service attendu majeur, important ou modéré ».
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Alain Milon.
M. Alain Milon. Le présent amendement vise à exclure, pour une durée limitée, du périmètre d’application de la clause de sauvegarde sur la liste en sus des dispositifs médicaux les produits et prestations répondant aux deux critères suivants : un niveau d’amélioration du service attendu élevé et une inscription récente sur la liste en sus.
Cette exception temporaire permettrait de préserver les nouveaux dispositifs médicaux innovants pouvant nécessiter, dans un premier temps, une diffusion progressive dans les premières années de leur accès au marché, afin de répondre aux besoins d’une population cible qui ne bénéficiait pas auparavant d’une telle innovation.
M. le président. L’amendement n° 260 rectifié ter, présenté par M. Milon, Mmes V. Boyer, Deromedi et Dumas, MM. Grand, Burgoa et Calvet, Mme Berthet, MM. Brisson, Charon, Dallier et de Legge, Mme Garriaud-Maylam, MM. D. Laurent, H. Leroy et Mandelli, Mme Richer, MM. Sautarel et Genet, Mme L. Darcos, MM. Piednoir, Savary et Houpert, Mme Delmont-Koropoulis et MM. Regnard et B. Fournier, est ainsi libellé :
I. – Au début, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Après le premier alinéa de l’article L. 138-19-8 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les produits et prestations bénéficiant d’une prise en charge au titre de l’article L. 165-1-5 du code de la sécurité sociale, ainsi que ceux présentant, après avis de la Haute Autorité de santé mentionnée à l’article L. 161-37 du même code, un niveau d’amélioration du service attendu majeur, important ou modéré, sont exclus du calcul du montant mentionné au premier alinéa pour une période de trois ans, selon des modalités définies par décret. »
II. – Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Le présent article est applicable aux produits et prestations pris en charge à compter de l’entrée en vigueur de la présente loi.
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Alain Milon.
M. Alain Milon. Cet amendement a pour objet de susciter un débat spécifique et objectif sur la régulation des dispositifs médicaux, alors que cet enjeu n’a été jusqu’à présent abordé qu’au prisme du modèle des médicaments dont s’inspire cette régulation.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. La commission a émis un avis défavorable sur ces trois amendements, mais, à titre personnel, j’émettrai un avis de sagesse. En effet, il me semble de bon sens de ne pas se bloquer sur la clause de sauvegarde ; il convient au contraire d’assouplir le dispositif, et ce d’autant plus s’il améliore le service attendu.
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Les dispositifs médicaux sont souvent assimilés aux médicaments alors qu’ils sont très hétérogènes – même s’il existe aussi d’importantes différences entre les types de médicaments.
Par leurs amendements, Olivier Henno et Alain Milon ciblent des dispositifs médicaux innovants qui contribuent à l’amélioration du service attendu, critère draconien – et sans doute le meilleur – pour juger du caractère innovant d’un dispositif, et qui sont inscrits sur la liste en sus.
Ces amendements me semblent donc de bon sens.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Je ne suis pas de votre avis, madame la présidente, tant pour la restriction que pour l’exclusion de la clause de sauvegarde.
Vous souhaitez réduire ou supprimer le périmètre d’application de la clause de sauvegarde. Les dispositifs médicaux présentant un niveau d’amélioration du service attendu majeur à modéré sont la plupart du temps des produits à fort impact budgétaire pour l’assurance maladie. Les exclure du périmètre de la clause ou restreindre le périmètre de celle-ci pour tenir compte uniquement des produits anciens et à faible évolution de dépenses serait antinomique avec l’objectif de cette clause.
La clause de sauvegarde est un dispositif de sécurisation de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam), qui doit se déclencher uniquement en dernier recours. Elle n’a pas vocation à être le levier principal de la régulation des dépenses. Pour rappel, la clause de sauvegarde est plafonnée à 10 % de l’ensemble du chiffre d’affaires de l’entreprise exploitant un dispositif médical, ce qui doit permettre de rassurer les entreprises sur sa portée.
Le Gouvernement ne souhaite pas revenir sur cette mesure, votée l’année dernière, qui permet une régulation lisible et prévisible. La réduction du périmètre ou l’exclusion de certains produits de la clause de sauvegarde ajouterait de la complexité et rendrait plus difficiles les prévisions des entreprises.
J’émets donc un avis défavorable sur ces trois amendements.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Ces trois amendements n’étant pas identiques, je vous propose d’adopter l’amendement n° 960 rectifié ter, qui, sur le fond, me paraît le plus compatible avec ce que la commission souhaitait. Si nous l’adoptons, les amendements nos 288 rectifié quater et 260 rectifié ter n’auront plus d’objet.
M. le président. En conséquence, les amendements nos 288 rectifié quater et 260 rectifié ter n’ont plus d’objet.
Je mets aux voix l’article 17 bis, modifié.
(L’article 17 bis est adopté.)
Article 17 ter (nouveau)
À la fin du V de l’article L. 245-6 du code de la sécurité sociale, le taux : « 0,17 % » est remplacé par le taux : « 0,18 % ». – (Adopté.)
Article 17 quater (nouveau)
Avant le 1er septembre 2021, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’avenir de la clause de sauvegarde et des mécanismes actuels de soutenabilité des dépenses des médicaments face au développement des biothérapies. Ce rapport étudie l’opportunité de développer comme outil de soutenabilité la mise en place de bioproduction académique et notamment l’impact sur les dépenses de médicaments selon les modes d’organisation de la bioproduction académique.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 159 est présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales.
L’amendement n° 218 rectifié est présenté par Mmes Delmont-Koropoulis et Deromedi, M. Pellevat, Mmes Lassarade et Dumas, MM. Dallier et Milon, Mme Gruny, MM. Savary, Lefèvre et Charon, Mmes L. Darcos, Bonfanti-Dossat et Berthet, MM. Rapin, Bascher, H. Leroy, E. Blanc et Piednoir et Mme Lavarde.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l’amendement n° 159.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Le présent article prévoit la remise au Gouvernement d’un rapport sur les clauses de sauvegarde et l’opportunité de la bioproduction académique afin de rendre les dépenses relatives aux médicaments plus soutenables. Bien que ces deux sujets puissent être indirectement liés, l’objet de ce rapport semble assez mal « ficelé », si vous me permettez l’expression.
Le présent amendement vise donc à supprimer cet article.
M. le président. La parole est à Mme Annie Delmont-Koropoulis, pour présenter l’amendement n° 218 rectifié.
Mme Annie Delmont-Koropoulis. Je vais tenter de clarifier le caractère « mal ficelé » de l’objet du rapport visé.
Contrairement à ce qui est réalisé dans la production industrielle, des innovations thérapeutiques ciblées et produites ponctuellement sont mises en place en fonction des spécificités des patients, notamment pour les immunothérapies cellulaires. De nombreux laboratoires et centres de recherche investissent massivement dans le développement de ces innovations, qui permettent de réduire les pertes de chances de survie pour de très nombreux patients.
Ces innovations particulières ont un coût très important de par leur caractère ciblé et personnalisé. C’est la raison pour laquelle nos collègues députés ont adopté un amendement créant cet article 17 quater, qui prévoit la remise par le Gouvernement d’un rapport évaluant l’opportunité de produire des biothérapies traitant de pathologies cancéreuses rares pour une utilisation à plus large échelle, ce qui permettrait de réduire le coût que cela représente pour la collectivité.
Cette disposition me paraît pour le moins bancale, car elle porte confusion entre les propriétés et capacités des produits traitant des cas ponctuels et spécifiques et ceux qui peuvent être produits industriellement. Les conditions du suivi de leur qualité et de leur efficacité, et l’assurance d’une équité de traitement pour l’ensemble des patients ne peuvent être garanties si l’on considère ces deux types de produits comme équivalents ou similaires.
Le présent amendement vise donc à supprimer l’article 17 quater. L’urgence de la maîtrise des comptes sociaux ne doit pas nous amener à voter des mesures contre-productives pour les soignants et les patients.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Lors de la première lecture de ce texte à l’Assemblée nationale, des députés ont demandé la remise d’un rapport analysant les voies de financement qui pourraient permettre l’accès des Français à ces médicaments. L’idée nous paraît pertinente.
J’émets donc un avis défavorable sur ces amendements.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 159 et 218 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, l’article 17 quater est supprimé.
Article additionnel après l’article 17 quater
M. le président. L’amendement n° 808 rectifié, présenté par MM. Théophile, Lévrier, Iacovelli, Patriat, Bargeton, Buis et Dennemont, Mmes Duranton et Evrard, MM. Gattolin et Hassani, Mme Havet, MM. Haye, Kulimoetoke, Marchand, Mohamed Soilihi et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud, Richard et Rohfritsch, Mme Schillinger, M. Yung et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :
Après l’article 17 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article L. 1221-14 du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Au septième alinéa, les mots : « il peut directement demander à être garanti des sommes qu’il a versées » sont remplacés par les mots : « ou lorsque les tiers payeurs ont pris en charge des prestations mentionnées aux 1° à 3° de l’article 29 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l’amélioration de la situation des victimes d’accidents de la circulation et à l’accélération des procédures d’indemnisation, ils peuvent directement demander à être garantis des sommes qu’ils ont versées ou des prestations prises en charges » ;
2° Après le même septième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L’office et les tiers payeurs, subrogés dans les droits de la victime, bénéficient dans le cadre de l’action mentionnée au précédent alinéa de la présomption d’imputabilité dans les conditions prévues à l’article 102 de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé. Les assureurs à l’égard desquels il est démontré que la structure qu’ils assurent a fourni au moins un produit sanguin labile ou médicament dérivé du sang, administré à la victime, et dont l’innocuité n’est pas démontrée, sont solidairement tenus de garantir l’office et les tiers payeurs pour l’ensemble des sommes versées et des prestations prises en charge. »
II. – Le I s’applique aux actions juridictionnelles engagées à compter de la date du 1er juin 2010, sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée.
La parole est à M. Dominique Théophile.
M. Dominique Théophile. Dans les années 1970 et 1980, nombre de patients ont été transfusés par des produits sanguins qui se sont révélés contaminés, notamment par les virus de l’hépatite C et de l’hépatite B.
Cinquante ans après, l’activité contentieuse continue. Alors que l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux (Oniam) peut exercer un recours directement à l’encontre des assureurs des anciens centres de transfusion sanguine sur la base d’un régime de responsabilité sans faute, les organismes d’assurance maladie ne le peuvent pas et sont contraints d’agir contre l’Établissement français du sang, qui se charge d’appeler en garantie les assureurs sans pouvoir bénéficier du même régime de preuves et de responsabilité.
Cette situation met à mal les recours des tiers payeurs, qui ne peuvent que difficilement récupérer les débours, et impose à l’Établissement français du sang un rôle d’intermédiaire qui n’est pas efficient.
Cinquante ans après les faits, cet amendement vise à étendre au tiers payeur le droit d’action directe à l’encontre des assureurs des anciens centres de transfusion sanguine (CTS), droit qui est déjà ouvert à l’Oniam, pour permettre à chacun d’obtenir ce qui lui revient de droit.