M. François Bonhomme. Absolument !
Mme Christine Herzog. Je fais l’impasse, sans ajouter de commentaire, sur le fait que seuls les projets sélectionnés par les préfets sont portés à la connaissance des élus. Je le sais, car je siège au sein de la commission DETR dans mon département.
L’article 3 était unique par son bon sens même. Il visait simplement à créer un droit à l’erreur lors de la demande de DETR, ce qui aurait permis aux élus de rectifier d’éventuelles erreurs.
Cette proposition de loi, je le répète, va dans le bon sens. Elle soutient les territoires ruraux et le juste octroi de leurs dotations. J’ai personnellement cosigné un certain nombre d’amendements visant à appuyer et à renforcer les aides aux élus des petites communes, qui en ont tant besoin.
Soyons ambitieux pour nos petites communes. Aujourd’hui et maintenant, tous ensemble, préservons leurs moyens financiers. Permettons-leur de participer pleinement à cette grande relance économique si nécessaire à nos territoires. Envoyons à nos élus, aux maires de France un signal fort, donnons-leur des moyens !
Depuis le début de la crise sanitaire et de la crise économique, les communes, les intercommunalités et nos élus apportent, quant à eux, des réponses concrètes. Ils doivent répondre au quotidien aux besoins des habitants et des entreprises locales. Garantissons-leur de participer pleinement aux décisions les concernant pour leurs projets locaux, des décisions confisquées par l’État.
C’est pourquoi cette proposition de loi pleine de bon sens a tout mon soutien. Je vous y invite, mes chers collègues : comme moi, soutenez ce texte, défendez les petites communes, leurs habitants, leur économie et notre France ! (Applaudissements sur les travées des groupes UC et INDEP.)
M. le président. La parole est à M. Antoine Lefèvre.
M. Antoine Lefèvre. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la présente proposition de loi – je remercie Hervé Maurey de l’avoir présentée et je l’aurais volontiers cosignée – s’attache à parfaire le fonctionnement de la DETR ; j’appartiens d’ailleurs à la commission DETR de mon département, l’Aisne.
Déjà, en 2018, nous avions constaté le rôle limité de cette commission, le préfet ayant la capacité de retenir les projets de son choix, d’en refuser d’autres, pourtant éligibles ou prioritaires, et ce sans devoir motiver son refus. Il est même arrivé dans le passé – on s’en apercevait au détour d’une discussion – que certains dossiers ressortissant d’une politique expressément écartée par la commission soient cependant retenus, au titre des demandes inférieures au seuil de la saisine pour avis de ladite commission. Évidemment, dans l’état actuel, celle-ci n’est pas non plus informée de l’ensemble des demandes formulées.
Bref, il n’y a que peu de transparence, voire aucune, sur les dossiers en amont, donnant une effectivité toute relative à cette consultation des élus qui ne se prononcent ainsi que sur une infime partie des besoins de nos communes ou EPCI.
Fruit de la fusion de la dotation de développement rural et de la dotation globale d’équipement des communes en 2011, et, dans une certaine mesure, de feu la réserve parlementaire en 2018, la DETR doit répondre aux besoins d’équipement des territoires ruraux.
Lors de la campagne sénatoriale que j’ai menée l’été dernier, j’ai rencontré moult élus qui regrettent la réserve parlementaire. En son temps, celle-ci permettait en effet de verser des subventions de petit montant, qui apportaient une grande aide aux communes rurales à faible potentiel financier. C’est pourquoi le Sénat s’était battu pour qu’elle soit conservée – Hervé Maurey l’a rappelé.
Mais, vous le savez tous, l’Assemblée nationale a décidé de supprimer la réserve parlementaire à la fin de 2017, au prétexte d’un prétendu manque de transparence, alors même que tout était contrôlé depuis le cabinet du ministre de l’intérieur, en liaison étroite avec les préfectures. En moyenne, les subventions par le biais de la réserve parlementaire, publiées chaque année – ne l’oublions pas –, étaient de 5 000 euros. Il nous avait alors été dit que ces sommes seraient reversées vers la DETR, puis ciblées en direction des petites communes. Mais force est de constater que, sur les deux années écoulées, le compte n’y est pas.
Dans mon département, qui compte 800 communes, dont presque 600 de moins de 500 habitants, le mot « rural » est dominant, et les besoins en investissements structurants, même petits, sont légion. Résultat, avec le relèvement systématique du plafond – de ce fait, les petits dossiers échappent à la vigilance de la commission –, personne ne peut plus mesurer l’étendue des besoins correspondants. C’est ainsi que les conditions d’attribution ont été très régulièrement évoquées par mes interlocuteurs durant cette campagne électorale.
Pour l’année 2020, l’appel à projets a été lancé par circulaire du 7 janvier 2020, avec un dépôt limite fixé au 28 février suivant, par voie dématérialisée, le début d’exécution des travaux devant impérativement intervenir en 2020.
Début mars, la pandémie de covid-19 a tout bousculé – je dirais même qu’elle a tout arrêté –, et les collectivités n’ont pas été en mesure d’anticiper les conséquences budgétaires, telles que l’augmentation des dépenses immédiates relatives à la protection de la population, mais aussi la baisse induite des recettes fiscales.
De plus, 30 millions d’euros sont globalement prélevés sur la fiscalité propre de mon département au titre de la suppression de la taxe d’habitation, pour ne citer qu’un exemple.
Ces deux facteurs conjugués vont représenter un coût très important pour les finances locales.
Par ailleurs, l’immobilisation des entreprises durant le confinement et la difficile reprise de l’activité ont perturbé fortement l’investissement public, dont la DETR est un véritable levier.
Aussi, compte tenu de la baisse continue des dotations, et parce qu’elle souffre d’un carcan certain, la DETR nécessite une adaptation à la réalité. Il va falloir nécessairement assouplir son fonctionnement. Je salue donc les dispositions de la proposition de loi et les améliorations apportées par le rapporteur, comme la fin des critères additifs départementaux excluant du bénéfice de la DETR, la communication de tous les dossiers déposés, une information plus complète et la baisse du seuil. Je soutiens également une partie des amendements qui ont été proposés.
Enfin, et ce n’est pas le moins important, la chaîne d’exécution ayant pris beaucoup de retard – dans certains cas, il n’y a même pas de commencement de travaux –, il paraît nécessaire de revoir la durée de validité de la demande de subvention, tout comme les délais réglementaires de commencement et d’achèvement de l’opération – ceux-ci pourraient être allongés d’un exercice supplémentaire.
Pourquoi ne pas envisager également le déblocage des aides publiques tout au long de l’année, dès lors qu’un projet d’investissement a été déclaré éligible ? La relance des territoires par le biais des commandes publiques aux entreprises du BTP passera par une DETR plus souple, inclusive, argumentée et motivée, aussi bien lors de l’octroi que lors du refus, qui pourrait donc être acceptable par tous. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. le président. La parole est à M. Joël Guerriau. (M. Michel Canevet applaudit.)
M. Joël Guerriau. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, il est un risque que nous prenons souvent en tant que parlementaires lorsque nous abordons des sujets aussi cruciaux pour les élus locaux que la décentralisation et l’aménagement du territoire : accorder plus d’importance à la théorie qu’à la pratique, en fait perdre pied avec le terrain.
La proposition de loi que nous examinons ne devrait pas nous faire courir ce risque. En discutant des modalités de la procédure pour l’octroi de la DETR, nous sommes bien en prise avec la réalité des élus locaux. Ce texte soulève des problèmes techniques, mais y apporte des solutions politiques, au bon sens du terme, car il pose la question de la prise de décision dans le cadre très précis de la DETR.
La DETR – faut-il encore le rappeler ? – constitue un élément structurant pour nos politiques d’aménagement du territoire, avec une enveloppe d’un milliard d’euros pour les territoires. Elle participe à la cohésion de la Nation en opérant des transferts au bénéfice de la ruralité et des petites communes. Mais si nous sommes tous très attachés à ce dispositif vital pour le développement de nos territoires, nous n’en sommes pas moins regardants et exigeants quant à sa mise en œuvre concrète.
Le texte dont il est aujourd’hui question apporte à cet égard des solutions pragmatiques.
La première de ces solutions concerne le champ d’application du dispositif. À l’heure actuelle, de nombreuses communes qui répondent à un appel à DETR se voient opposer un critère d’inéligibilité qui les prive de ce levier de développement.
Pour répondre à ce problème, l’article 1er consacre le principe d’universalité de la DETR en modifiant directement l’article du code général des collectivités territoriales qui institue la DETR. Il vise ainsi à clarifier la loi.
L’article 2 apporte des solutions techniques aux problèmes rencontrés sur le terrain dans la procédure d’octroi de la DETR. La méthode retenue me semble bonne : réinjecter de la décision politique dans les procédures administratives. Je pense bien sûr au seuil des 100 000 euros. Ce seuil marque de façon symbolique, mais assez symptomatique, le point de bascule entre décision administrative et décision politique : en deçà, c’est l’apanage du préfet ; au-dessus, la décision est partagée avec les élus. On pourrait inverser ; on pourrait considérer qu’il suffit d’abaisser ce seuil pour redonner mécaniquement plus de poids aux élus face à l’administration.
Personnellement, je crois qu’il serait plus clair et plus honnête de revenir à la vision originale de la proposition de loi, et de supprimer purement et simplement le seuil, en définissant une méthode, puisqu’il y aurait – cela a été dit – beaucoup plus de demandes à examiner.
L’orateur précédent l’a indiqué, la DETR sert aussi à compenser la suppression de la réserve parlementaire, que beaucoup regrettent et qui nous permettait de répondre aux petites demandes. Manifestement, ce n’est plus le cas ! Nous sommes confrontés à un magma de demandes bien plus importantes qui ne correspondent pas du tout aux besoins des maires ruraux.
Comme j’ai déjà eu l’occasion de le dire, les enjeux d’aménagement du territoire sont éminemment politiques. C’est aux élus des territoires de prendre les décisions, de concerter, et de représenter les intérêts parfois divergents, souvent convergents, des différents acteurs des territoires.
C’est dans la même logique que nous abordons les autres mesures de cette proposition de loi, telles que les obligations faites aux préfets de respecter les orientations prises par la commission des élus et de rendre compte des raisons pour lesquelles ils choisissent de rejeter des demandes de subvention.
Je pense aussi à la meilleure représentation des parlementaires au sein de la commission DETR. Les dispositions contenues dans cette proposition de loi vont dans le bon sens, mais je présenterai un amendement, proposé par mon collègue Jean-Pierre Decool, qui vise à élargir cette mesure aux départements qui comptent au moins quinze parlementaires.
Vous l’aurez compris, le groupe Les Indépendants – République et Territoires accueille très favorablement cette proposition de loi. Celle-ci permettra de matérialiser de façon concrète le souhait formulé par nombre de nos concitoyens : redonner du pouvoir au local et rapprocher la décision du terrain. Il s’agit non pas de jouer de façon simpliste le politique contre l’administration, mais bien de redynamiser la décision politique à l’échelon local.
M. le président. La parole est à M. Michel Canevet.
M. Michel Canevet. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je veux tout d’abord me réjouir, au nom du groupe Union Centriste, que le sujet de la DETR ait été mis au centre de nos débats cet après-midi. Cela montre l’intérêt que nous portons aux questions de financement des collectivités territoriales, en particulier rurales.
Mon groupe est en effet attaché – c’est l’une de ses caractéristiques – à ce que nos collectivités aient les moyens de fonctionner et d’investir dans les meilleures conditions. Je tiens à saluer tout particulièrement Hervé Maurey, qui est à l’origine de cette proposition de loi, laquelle est largement fondée sur ce qu’il a pu entendre du fonctionnement de l’attribution de cette dotation dans chacun de nos départements.
Je veux féliciter le rapporteur, Bernard Delcros, qui, au nom de la commission des finances, a fait un travail approfondi et des propositions intéressantes.
Le groupe Union Centriste tient aussi à saluer l’effort consacré par l’État et le Gouvernement au soutien aux collectivités territoriales et à leurs investissements au travers de cette DETR. Monsieur le secrétaire d’État, je pense que vous ne siégiez pas depuis vingt-sept ans dans une commission DETR, puisque, comme cela a déjà été dit, cette dotation a été instituée en 2011. Cet effort financier a permis de doter la DETR de moyens importants, qui sont aujourd’hui de l’ordre d’un milliard d’euros.
Les membres de mon groupe apprécient l’effort effectué pour les investissements locaux au travers de la DSIL. Il est important que nous puissions continuer à investir. L’effort consacré dans la troisième loi de finances rectificative témoigne de cet objectif de soutien à l’investissement local. On sait, à ce moment de la crise sanitaire, combien il est essentiel que nous puissions relancer l’économie.
Nous partageons ces finalités, monsieur le secrétaire d’État. En revanche, nous ne sommes pas du tout d’accord avec l’interprétation du texte que vous avez effectuée précédemment. L’article 1er, contrairement à ce que vous avez dit, ne vise pas à interpréter différemment de la loi la façon dont est attribuée la DETR. Il tend simplement à considérer que, dans les départements, l’attribution de cette dotation doit se faire dans le respect de ce qui a été décidé à l’échelon national. En tant que législateurs, nous sommes respectueux de la loi, et nous souhaitons qu’elle puisse être interprétée de la même façon dans l’ensemble des départements.
On le voit bien au travers des nombreux exemples qui nous proviennent des départements, la commission DETR fonctionne de façon extrêmement disparate selon les territoires. La proposition de loi a au moins le mérite de mettre en exergue les difficultés qui ont été identifiées et de souligner la nécessité d’avoir un fonctionnement homogène sur l’ensemble du territoire départemental.
Dans son département, chacun a des exemples montrant que la dotation n’est pas utilisée comme elle le devrait ou, en tout cas, comme il serait logique qu’elle le soit dans un objectif de répartition équitable. Une interprétation plus restrictive est souvent appliquée, et c’est ce que nous combattons. C’est le sens des propositions qui ont été faites, y compris en accroissant la participation des parlementaires – il faut y réfléchir, et ne pas l’exclure de facto parce que ces derniers ont une bonne connaissance du terrain et sont légitimes à intervenir.
Il faut aussi revoir le niveau d’information : il est nécessaire d’avoir connaissance non seulement des attributions proposées, mais également des demandes qui ont été refusées, et des raisons de ces rejets.
Mon groupe se pose même la question de savoir si cette commission d’élus ne devrait pas avoir un rôle de décision pour un certain nombre de dossiers. Pourquoi son avis reste-t-il consultatif ? Pour les dossiers de plus de 100 000 euros – ou 80 000 euros, comme cela est proposé dans le texte –, il pourrait être conforme, ce qui signifie que la commission aurait la faculté de décider. (M. Jean-Marc Boyer opine.) Si l’on veut faire confiance aux élus dans un État décentralisé et déconcentré, allons jusqu’à dire qu’il est légitime que ceux-ci aient la capacité de décider en l’espèce !
Il faut aussi s’interroger, monsieur le secrétaire d’État, puisque vous êtes chargé de la ruralité, sur l’exclusion des petits projets. Vous le savez, les budgets de certaines communes, dans lesquelles nous nous sommes rendus, sont extrêmement étriqués. Un « petit » projet à 30 000 euros est important pour la commune. La DETR peut servir à l’accompagner à 50 % avec 15 000 euros. De tels projets doivent pouvoir être concrétisés, pour qu’il y ait un véritable aménagement du territoire.
Je regrette, pour ma part, que, au titre de l’article 45 de la Constitution, l’information des membres de la commission sur la DSIL n’ait pas pu être améliorée, car il faut – me semble-t-il – de la cohérence entre DSIL et DTER. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme Nadine Bellurot. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Nadine Bellurot. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je veux tout d’abord saluer le travail de l’auteur et du rapporteur de cette proposition de loi réformant la procédure d’octroi de la dotation d’équipement des territoires ruraux.
Comme ils l’ont rappelé, la DETR vise à un juste équilibre entre transparence et efficacité des procédures. Elle me semble participer à notre souci commun que la décentralisation au quotidien fonctionne à partir des projets des territoires, et non dans un cadre contraint qui en limiterait le champ des possibles.
C’est donc une bonne chose que toutes les demandes de dossiers, complets et recevables, soient connues par la commission départementale, car cela permettra de mieux identifier les projets sur le territoire et d’adapter, si besoin, les catégories d’opérations prioritaires retenues par la commission départementale.
Abaisser à 80 000 euros le seuil de subvention au-delà duquel la saisine est requise va également dans le bon sens, en ouvrant la concertation sur un plus grand nombre de dossiers. Il sera intéressant de faire une évaluation de cette mesure, afin de s’assurer de la pertinence du maintien de ce seuil ou de son abaissement à 50 000 euros dans les années à venir.
Enfin, le rappel qu’aucun autre critère que ceux qui sont fixés par la loi ne peut justifier une inéligibilité conforte l’importance que nous accordons au respect du projet, tel qu’il est librement élaboré par les collectivités qui le présentent.
Comme l’ont rappelé l’ensemble des orateurs, la DETR est une dotation essentielle pour les territoires ruraux, et elle doit être au plus près des besoins des élus. Elle est aussi un outil important au service de la relance territoriale voulue par le Gouvernement.
De ce point de vue, on peut regretter que le milliard d’euros supplémentaires affecté à la DSIL dans le plan de relance ne soit pas alloué à la DETR, au moins pour une part : cela aurait permis de financer plus rapidement les projets et de favoriser la concertation entre l’État et les collectivités territoriales sur le développement des territoires.
J’ajoute que, compte tenu des priorités retenues par l’État pour le fléchage de la DSIL supplémentaire, en déterminant les opérations éligibles, les plus petites collectivités sont de fait écartées. Les financements accordés au titre de la DSIL seront concentrés sur les plus grandes collectivités et, par nature, ne produiront pas d’effets sur l’économie réelle avant plusieurs mois.
Ainsi, 60 % de l’investissement public national est réalisé par les communes : toutes y contribuent à proportion de leur taille. C’est souligner et redire leur importance dans la réussite de la politique de relance engagée par l’État. Mais je ne suis pas certaine qu’elles pourront être au rendez-vous tant la crise sanitaire pèse sur leurs dépenses comme sur leurs recettes et ne leur laisse que peu de marges de manœuvre.
Le plan de relance n’a pas considéré les communes comme des acteurs économiques dont il convenait de soutenir l’équilibre financier dans une période difficile, à la différence du parti pris pour le secteur privé. Ce choix a pour conséquence que le bloc communal reconstituera d’abord sa capacité d’autofinancement, en privilégiant l’épargne de précaution sur l’investissement.
Cela conduit mécaniquement, dès cette année, à une baisse durable des capacités d’investissement du bloc communal dans un contexte de recentralisation progressive de ses recettes, transformées à marche forcée en dotations de l’État. L’expérience nous montre que ce mécanisme a toujours conduit à une diminution des ressources locales.
C’est pourquoi le texte que nous examinons cet après-midi, dans le contexte financier que je viens de rappeler, s’inscrit en parfaite cohérence avec les propositions de loi étudiées par le Sénat cette semaine pour le plein exercice des libertés locales. Il faut redonner aux collectivités territoriales plus de compétences et cesser de grignoter leur autonomie financière, en tout cas pour ce qu’il en reste ! Monsieur le secrétaire d’État, faisons simplement confiance aux élus ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Joël Giraud, secrétaire d’État. Je ne reviendrai pas sur ce que j’ai dit dans mon intervention liminaire, qui répondait préalablement à un certain nombre de remarques. Je tiens, en revanche, à apporter une réponse à certains propos qui ont été tenus, notamment sur des sujets extérieurs à la proposition de loi.
Madame Espagnac, la suppression de la réserve parlementaire en 2018 que j’avais négociée pour qu’elle se traduise par la réinjection d’argent dans les budgets généraux a permis d’alimenter non seulement la DETR, mais également le fonds pour le développement de la vie associative (FDVA). (Mme Frédérique Espagnac fait un signe dubitatif.) Cela n’a pas été du 100 % – je le reconnais volontiers – mais pas non plus seulement 50 % ! À l’époque – je pense que vous vous en souvenez –, nous avons dû adopter un projet de loi de finances rectificative de fin d’exercice en raison de la non-sincérité des comptes : il a bien fallu faire de la réfraction sur un certain nombre de budgets. Sans cela, je vous prie de croire que j’aurais insisté pour que les sommes « remontent ». Sur les 92 millions d’euros, 50 millions ont été affectés à la DETR et 25 millions au FDVA.
De nombreux orateurs ont parlé de la DSIL. Je vous rappelle qu’elle avait été conçue pour être temporaire : devant disparaître en 2018, elle a finalement été pérennisée. J’y insiste, cette pérennisation est un élément important.
Par ailleurs, il serait abusif de la part de l’État de faire des économies sur le dos des collectivités locales pendant la gestion de la crise. Je rappelle le milliard d’euros de la DSIL fongible avec la DETR, le filet de sécurité sur les pertes de ressources fiscales, les avances de droits de mutation à titre onéreux (DMTO) pour les départements et, dans le projet de loi de finances pour 2021, les crédits territorialisés du plan de relance. Cela donne matière à réfléchir à ceux qui ont fait cette remarque.
Enfin, la commission DETR fixe des catégories d’opérations et des taux minimaux et maximaux. Elle n’a pas à définir quoi que ce soit d’autre, je le répète. C’est la raison pour laquelle, dans les circulaires qui seront produites en 2021, les choses seront clairement rappelées aux préfets : au travers de la commission DETR, il ne s’agit ni de faire de la sélection, notamment une sélection complémentaire par rapport aux dispositions légales, ni, comme je l’ai vu, de prévoir une interdiction de fongibilité entre DSIL et DETR. Nous veillerons à ce que la commission DETR respecte les textes qui lui donnent certaines prérogatives, et non pas des pouvoirs généraux.
M. le président. La discussion générale est close.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Claude Raynal, président de la commission des finances. Mes chers collègues, il nous reste trente-sept minutes, puisque la séance doit être levée à dix-huit heures trente. Or nous devons examiner des amendements – même si leur nombre est limité – et certains d’entre vous ont annoncé leur intention de prendre la parole sur les articles.
Si nous souhaitons voter cette proposition de loi ce jour, je vous invite à être concis et à vous en tenir à des interventions d’une minute pour les explications de vote et les prises de parole sur article.
M. le président. Nous passons à la discussion du texte de la commission.
proposition de loi visant à réformer la procédure d’octroi de la dotation d’équipement des territoires ruraux
Article 1er
L’article L. 2334-32 du code général des collectivités territoriales est complété par une phrase ainsi rédigée : « Les communes et leurs groupements qui y répondent ne peuvent se voir opposer aucun autre critère d’éligibilité à cette dotation. »
M. le président. La parole est à M. Olivier Paccaud, sur l’article.
M. Olivier Paccaud. Au cœur de notre vocabulaire d’élus un sigle est incontournable : DETR. Tous les maires, conseillers départementaux et régionaux, et parlementaires le connaissent. Dans le contexte financier qui a vu les dotations globales de fonctionnement des communes fondre comme neige au soleil entre 2014 et 2017, avant de se stabiliser à un niveau médiocre, la désormais fameuse DETR est devenue une manne précieuse, indispensable à la réalisation de bien des investissements municipaux, surtout lorsque certains conseils départementaux ne peuvent dégager un budget important d’aide aux communes.
Or cette source de financement gagnerait à devenir un peu plus transparente. Certains orateurs ont évoqué feu la réserve parlementaire, stigmatisée, diabolisée, guillotinée pour crime de clientélisme. Celle-ci rendait pourtant bien des services, notamment aux communes peu fortunées et aux associations locales, dont nous connaissons tous l’importance pour entretenir le lien social. Nombreux sont aujourd’hui les parlementaires qui regrettent de l’avoir sacrifiée sur l’autel de la démagogie.
Mais qu’est donc la DETR si ce n’est une gigantesque réserve préfectorale ? Cette distribution de subventions à la discrétion du préfet ne constitue-t-elle pas une forme de clientélisme ? Quand on met en parallèle les 130 000 euros annuels dont bénéficiaient nos collègues et les 15 millions d’euros que répartit le préfet de l’Oise, on voit toute la relativité entre le clientélisme parlementaire et l’influence préfectorale, dont personne ne peut nier le rôle politique.
Qui mieux qu’un élu enraciné depuis des décennies connaît son territoire et ses habitants, sait quels sont leurs attentes et leurs besoins ? Personne ! C’est pourquoi associer plus et mieux les élus à l’attribution des crédits de la DETR, ainsi que le prévoit cette proposition de loi du toujours remarquable Hervé Maurey, est une démarche de bon sens et de cohérence. Un préfet éclairé par la lanterne de celles et ceux qui ont, à la fois, la légitimité démocratique et la lucidité offerte par un fil d’Ariane local est toujours plus efficace, préférable et plus équitable. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, sur l’article.