M. Pierre Ouzoulias. Vous me permettrez d’illustrer l’intérêt de cet amendement par un fait récent : alors que les avocats sont en lutte, depuis quelque temps, contre la spoliation de leur caisse de retraite voulue par votre gouvernement, dans le cadre du projet de loi portant réforme des retraites, le Syndicat des avocats de France, qui relayait leur lutte, a vu son site Twitter suspendu pendant une journée sans aucun préavis ni aucune explication.
Dans un tweet, notre collègue députée Laetitia Avia a déclaré : « De quel droit le compte du Syndicat des avocats de France a-t-il été suspendu ? C’est un acte grave : nous demandons des explications à TwitterFrance ! Il est grand temps de contrôler les plateformes et leurs règles de modération : la PPL Cyberhaine nous en donnera les moyens. »
Monsieur le secrétaire d’État, j’ai cherché les dispositions de votre texte qui allaient permettre de contrôler les règles de modération des plateformes. Je ne les ai pas trouvées. Peut-être notre collègue Avia a-t-elle introduit une disposition cachée, à moins que je ne souffre d’un défaut de compréhension… Quoi qu’il en soit, j’aimerais que vous nous indiquiez précisément comment, avec votre texte, nous pourrons, demain, contrôler les règles de modération des plateformes.
À la demande du barreau de Paris, avec lequel j’ai rédigé cet amendement, nous vous proposons ici d’instaurer un droit d’appel, pour pouvoir demander au juge, quand Twitter commet des actes aussi autoritaires, de maintenir le contenu et de s’exprimer sur son caractère licite ou non. On a là un exemple extrêmement grave des libertés que Twitter prend avec la liberté d’expression.
Puisque vous avez été un peu provocateur en début de séance, monsieur le secrétaire d’État, je me permets de vous demander s’il n’existe pas une certaine connivence entre le Gouvernement et Twitter sur le projet de réforme des retraites, qui suscite actuellement un mouvement dont on a bien compris qu’il vous posait quelques difficultés… (Sourires au banc des commissions.) Ce n’est pas absolument impossible !
Quelles sont vos relations avec Twitter ? Avez-vous communiqué avec eux sur la question du retrait des comptes ? Nous voulons des informations à ce sujet.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Christophe-André Frassa, rapporteur. L’amendement de M. Ouzoulias, comme il le souligne lui-même, est inspiré d’un travail en commun avec le barreau de Paris. Il vise, comme en première lecture, à réintroduire le juge dans le processus de retrait du contenu haineux.
En l’espèce, en cas de contre-notification par l’auteur de contenus litigieux retirés, la plateforme devrait obligatoirement les rétablir, à charge pour le notifiant de saisir le juge des référés.
Cher collègue, même si je partage l’esprit de cet amendement, je ne peux y être favorable – je ne fais pas planer le doute plus longtemps.
En effet, le délai de quarante-huit heures que vous laissez au juge pour statuer me semble assez illusoire, surtout si ce contentieux tend à se développer, ce qui, je le pense, va se passer. Je vous rappelle que le délai pour obtenir un blocage en référé au titre de la loi pour la confiance dans l’économie numérique (LCEN) au moyen d’une décision de justice rendue par le plus grand tribunal de France est actuellement de quarante-cinq jours.
Je décèle, en outre, deux problèmes juridiques dans la procédure que vous proposez.
Premièrement, concernant l’intérêt pour agir du requérant, une notification de contenu haineux illicite à un hébergeur peut émaner de toute personne sans qu’elle ait à justifier qu’elle est personnellement lésée par ledit contenu. Or, devant le juge, une action doit bien s’appuyer sur un intérêt lésé, sauf à permettre une sorte d’action populaire, si je puis utiliser ce terme.
Deuxièmement, concernant l’articulation avec le régime de responsabilité de la LCEN, le dispositif de votre amendement tend à obliger la plateforme à rétablir certains contenus litigieux dans l’attente de la décision du juge. Or cette décision peut n’être rendue qu’après des semaines et conclure, finalement, au caractère illicite du contenu. Dans l’intervalle, les contenus resteront visibles, ce qui engagera forcément la responsabilité pénale et civile de la plateforme qui ne les a pas retirés promptement.
Pour ces deux raisons et compte tenu du caractère illusoire du délai proposé, l’avis de la commission est défavorable.
M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Cédric O, secrétaire d’État. Monsieur Ouzoulias, vous comprendrez d’abord que je ne réponde pas véritablement à la question que vous avez posée à la fin de votre intervention. Je la mettrai sur le compte d’une volonté de taquiner un peu le Gouvernement…
M. Pierre Ouzoulias. C’est vous qui avez commencé !
M. Cédric O, secrétaire d’État. Au-delà des considérations éthiques, si nous nous adonnions à ce genre de pratiques, nous serions à la fois bien inefficaces, compte tenu des déversements de haine dont le Gouvernement, ses membres, les représentants de la majorité parlementaire et d’autres parlementaires font l’objet, et politiquement pas très malins.
Je reviens sur l’indignation qu’a suscitée la fermeture du compte Twitter que vous avez évoquée – je le fais de mémoire, parce que je n’ai pas pu étudier les choses d’extrêmement près. On peut la regretter, mais cette fermeture n’était pas totalement injustifiée au regard des conditions générales d’utilisation de Twitter. En effet, il semble que ce soit pour cause de spamming – le fait d’envoyer énormément de messages en très peu de temps, qui est prohibé par les conditions générales d’utilisation de Twitter – que le compte a été fermé.
Je peux le regretter politiquement – d’ailleurs, le Gouvernement, qui a été accusé, n’y est pour rien –, mais je ne peux pas non plus totalement reprocher à Twitter de prôner une utilisation raisonnée et raisonnable. Or nous connaissons tous le problème que pose le spamming.
S’agissant de votre amendement, qui vise à prévoir, en cas de protestation motivée de l’utilisateur à l’origine de la publication du contenu notifié, la suspension de la mesure de retrait et la saisine du juge des référés, qui statuerait dans un délai de quarante-huit heures, je reprends à mon compte les arguments de M. le rapporteur.
Cette mesure n’aurait, d’ailleurs, pas de portée. Elle ne concernerait que les contenus figurant dans le texte, puisque, si elle devait s’appliquer aux contenus de manière générale, je pense qu’elle serait probablement inconstitutionnelle. En effet, il est un peu compliqué, dans un espace privé, d’obliger à remettre en ligne des contenus spécifiquement mentionnés comme illégaux dans les conditions générales d’utilisation. On peut le regretter. C’est un problème dont nous avons déjà discuté. Néanmoins, jusqu’à preuve du contraire, Twitter constitue un espace privé, où certaines règles s’appliquent pour éviter des dérives, mais dont les conditions générales d’utilisation s’appliquent également.
À cet égard, les retraits de contenus que nous pouvons tous ici considérer comme abusifs – on peut évidemment penser à l’exemple traditionnel de L’Origine du monde – n’ont rien à voir avec la loi : ils sont liés aux conditions générales d’utilisation de Twitter.
D’ailleurs, de manière assez ironique, dans l’affaire qui nous a émus dans le cadre de la campagne municipale à Paris, le retrait de la vidéo par Twitter est lié non à la violation de la vie privée – la vidéo n’était pas si simple à trouver –, mais aux conditions générales d’utilisation, en particulier à l’interdiction des contenus pornographiques.
M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Très intéressant !
M. le président. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.
M. Pierre Ouzoulias. Monsieur le secrétaire d’État, je n’arrive pas à me satisfaire de ce que vous a indiqué la société Twitter, à laquelle, par principe, je ne fais pas confiance. (Sourires.) C’est bien cela qui nous oppose, j’en suis désolé !
Vous évoquez le spamming. En l’occurrence, il s’agissait d’envoyer un tweet à chacun des 577 députés. La société Twitter a-t-elle considéré que le seuil du spamming était dépassé ? Nous n’en savons rien, parce qu’elle apprécie seule le niveau de ce seuil. Je sais que, pour certaines campagnes publicitaires, la société Twitter a refusé de diffuser des informations gouvernementales, pour les mêmes raisons.
Je souscris tout à fait à votre argumentation : Twitter est une société privée, qui agit selon des règles de droit privé, en fonction de ses conditions générales d’utilisation.
Le problème essentiel, dont nous ne parvenons pas à débattre avec vous, est que cette société est dans une situation monopolistique sur le marché des réseaux sociaux. Aujourd’hui, il n’est pas possible de diffuser des informations sur internet autrement que par son entremise. On le voit, le nœud du problème est que nous devons, aujourd’hui, trouver des solutions pour que les internautes puissent échapper à l’emprise de Twitter et intervenir sur d’autres réseaux, plus éthiques.
C’est la raison pour laquelle j’ai voté, la semaine dernière, la proposition de loi visant à garantir le libre choix du consommateur dans le cyberespace, à laquelle vous étiez opposé, mais qui, je pense, apportait la bonne réponse. Celle que vous nous proposez ici est parfaitement inadaptée.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Cédric O, secrétaire d’État. Monsieur Ouzoulias, nous n’allons pas refaire cinquante fois le même débat ! Nous avons déjà eu cette discussion en première lecture et, la semaine dernière, sur la proposition de loi déposée par Mme Primas.
Vous pouvez continuer à répéter que nous ne faisons rien, que nous ne nous battons pas contre les monopoles, etc. Pour ma part, j’ai déjà exposé cinquante fois le plan du Gouvernement, qui, par ailleurs, est complètement public, expliqué que la France jouait un rôle moteur, au niveau européen, sur la question de la régulation des plateformes structurantes, indiqué que j’étais favorable à l’interopérabilité dans le cadre de ces plateformes… Je vous propose donc que nous ménagions le temps du Parlement et que nous évitions de refaire la même discussion lors de l’examen de chaque texte de loi portant sur ce sujet.
Au reste, monsieur Ouzoulias, il me paraît assez discutable d’affirmer que Twitter soit monopolistique. D’une certaine manière, c’est probablement le cas de Facebook, c’est le cas de Google ou d’Amazon, au moins sur certains marchés. Pour Twitter, on peut en débattre, même s’il ne s’agit pas de le faire maintenant. Quoi qu’il en soit, votre avis ne me paraît pas fondé.
M. le président. Je mets aux voix l’article 2.
(L’article 2 est adopté.)
Article 3
L’article 6-3 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 précitée, tel qu’il résulte de l’article 2 de la présente loi, est complété par des 6° à 12° ainsi rédigés :
« 6° Ils mettent à la disposition du public une information claire et détaillée, facilement accessible et visible, présentant à leurs utilisateurs les modalités de modération des contenus illicites mentionnés au premier alinéa du I de l’article 6-2, et en particulier :
« a) Les sanctions, y compris pénales, que leurs utilisateurs encourent en cas de publication de ces contenus ;
« b) Les dispositifs de recours, internes et juridictionnels, dont disposent les victimes de ces contenus, les délais impartis pour le traitement de ces recours, ainsi que les acteurs en mesure d’assurer l’accompagnement de ces victimes ;
« c) Les sanctions encourues par les auteurs de notifications abusives et les voies de recours internes et juridictionnelles dont disposent les utilisateurs à l’origine de la publication de contenus indûment retirés ou rendus inaccessibles ;
« 7° Ils rendent compte des moyens humains et technologiques qu’ils mettent en œuvre et des procédures qu’ils adoptent pour se conformer aux obligations mentionnées aux premier et deuxième alinéas du I de l’article 6-2 et au présent article ainsi que, le cas échéant, pour le retrait des contenus mentionnés au I de l’article 6-2 qu’ils identifient eux-mêmes. Ils rendent compte également des actions et moyens qu’ils mettent en œuvre et des résultats obtenus dans la lutte et la prévention contre les contenus mentionnés au premier alinéa du même I. Le Conseil supérieur de l’audiovisuel précise, par délibération et dans le respect du secret des affaires, les informations et les indicateurs chiffrés qui sont rendus publics au titre du présent 7° ainsi que les modalités et la périodicité de cette publicité ;
« 8° Ils sont tenus, lors de l’inscription à l’un de leurs services d’un mineur âgé de moins de quinze ans et dans le cas où leur offre de service implique un traitement de données à caractère personnel, de prévoir une information à destination du mineur et du ou des titulaires de l’autorité parentale sur l’utilisation civique et responsable dudit service et sur les risques juridiques encourus en cas de diffusion par le mineur de contenus haineux, à l’occasion du recueil des consentements mentionnés au deuxième alinéa de l’article 45 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés ;
« 9° Ils informent promptement les autorités publiques compétentes de toutes activités contrevenant aux dispositions mentionnées au premier alinéa du I de l’article 6-2 de la présente loi qui leur seraient notifiées et qu’exerceraient les destinataires de leurs services ;
« 10° Ils désignent une personne physique située sur le territoire français exerçant les fonctions d’interlocuteur référent chargé de recevoir les demandes de l’autorité judiciaire en application de l’article 6 de la présente loi et les demandes du Conseil supérieur de l’audiovisuel en application de l’article 17-3 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée ;
« 10° bis (nouveau) Ils mettent en place les moyens nécessaires à la suspension des comptes des utilisateurs inscrits à leur service ayant fait l’objet d’un nombre élevé de notifications suivies de retrait de contenus constituant les infractions mentionnées au premier alinéa du I de l’article 6-2 de la présente loi. Cette suspension peut être contestée par l’utilisateur dans les conditions prévues au 5° du présent article. Elle intervient sans préjudice des obligations des opérateurs relatives à la conservation des données associées à ces comptes pour les besoins de la recherche, de la constatation et de la poursuite des infractions pénales ;
« 11° Ils formulent en termes précis, aisément compréhensibles, objectifs et non discriminatoires les conditions générales d’utilisation du service qu’ils mettent à la disposition du public lorsqu’elles sont relatives aux contenus mentionnés au premier alinéa du I de l’article 6-2 de la présente loi ;
« 12° (Supprimé) ». – (Adopté.)
Article 3 bis
(Non modifié)
Au premier alinéa du 1 du VI de l’article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 précitée, le montant : « 75 000 euros » est remplacé par le montant : « 250 000 euros ». – (Adopté.)
Chapitre III
Rôle du Conseil supérieur de l’audiovisuel dans la lutte contre les contenus haineux en ligne
Article 4
I. – Après l’article 17-2 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, il est inséré un article 17-3 ainsi rédigé :
« Art. 17-3. – I. – Le Conseil supérieur de l’audiovisuel veille au respect des dispositions de l’article 6-3 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique par les opérateurs mentionnés aux premier et deuxième alinéas du I de l’article 6-2 de la même loi. Dans l’exercice de cette mission, le Conseil supérieur de l’audiovisuel prend en compte la pluralité des modèles de ces opérateurs et l’adéquation des moyens mis en œuvre par chacun d’eux à la lutte contre la diffusion de contenus haineux en ligne.
« À ce titre, il notifie aux opérateurs mentionnés aux mêmes premier et deuxième alinéas les délibérations qu’il adopte visant à assurer le respect des dispositions mentionnées au premier alinéa du présent I.
« Il s’assure du suivi des obligations reposant sur ces opérateurs.
« Il publie chaque année un bilan de l’application de ces dispositions par les opérateurs de plateforme en ligne et de leur effectivité.
« Il recueille auprès des opérateurs mentionnés aux premier et deuxième alinéas du I de l’article 6-2 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 précitée toutes les informations nécessaires au contrôle des obligations prévues à l’article 6-3 de la même loi.
« II. – Le Conseil supérieur de l’audiovisuel peut mettre en demeure un opérateur de se conformer, dans le délai qu’il fixe, aux dispositions mentionnées au premier alinéa du I du présent article.
« Dans l’appréciation du manquement de l’opérateur, le Conseil supérieur de l’audiovisuel peut prendre en compte l’application inadéquate par l’opérateur des procédures et des moyens humains et, le cas échéant, technologiques prévus au 4° de l’article 6-3 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 précitée au regard de l’objectif de prévenir les retraits excessifs de contenus.
« Lorsque l’opérateur faisant l’objet de la mise en demeure ne se conforme pas à celle-ci, le Conseil supérieur de l’audiovisuel peut, dans les conditions prévues à l’article 42-7 de la présente loi, prononcer une sanction pécuniaire dont le montant prend en considération la gravité des manquements ainsi que, le cas échéant, leur caractère réitéré, sans pouvoir excéder 20 millions d’euros ou 4 % du chiffre d’affaires annuel mondial total de l’exercice précédent, le montant le plus élevé étant retenu.
« Le Conseil supérieur de l’audiovisuel peut rendre publiques les mises en demeure et sanctions qu’il prononce. Il détermine dans sa décision les modalités de cette publication, qui sont proportionnées à la gravité du manquement. Il peut également ordonner leur insertion dans des publications, journaux et supports qu’il désigne, aux frais des opérateurs faisant l’objet de la mise en demeure ou de la sanction.
« Les sanctions pécuniaires sont recouvrées comme les créances de l’État étrangères à l’impôt et au domaine.
« III. – Le Conseil supérieur de l’audiovisuel encourage les opérateurs mentionnés aux premier et deuxième alinéas du I de l’article 6-2 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 précitée à mettre en œuvre :
« 1° Des outils de coopération et de partage d’informations, dans un format ouvert entre ces opérateurs, dans la lutte contre les infractions mentionnées au premier alinéa du même I ;
« 2° Des dispositifs techniques proportionnés permettant de limiter, dans l’attente du traitement de la notification d’un contenu mentionné au même premier alinéa, le partage de ce contenu et l’exposition du public à celui-ci ;
« 2° bis Des outils de coopération dans la lutte contre la rediffusion massive de contenus, en particulier de vidéos ou d’images, identiques ou spécifiquement équivalents à ceux retirés en application de l’article 6-2 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 précitée ;
« 3° Des standards techniques communs d’interopérabilité entre services de communication au public en ligne, conformes à l’état de l’art, documentés et stables, afin de favoriser le libre choix des utilisateurs entre différentes plateformes. »
I bis A. – (Non modifié) Le 1° de l’article 19 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« – auprès des opérateurs mentionnés aux premier et deuxième alinéas du I de l’article 6-2 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique, toutes les informations nécessaires au contrôle des obligations mentionnées à l’article 6-3 de la même loi, y compris l’accès aux principes et méthodes de conception des algorithmes ainsi qu’aux données utilisées par ces algorithmes pour se conformer à ces obligations ; ».
I bis. – (Non modifié)
I ter. – Le chapitre II du titre Ier de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 précitée est ainsi modifié :
1° et 1° bis (Supprimés)
2° Le troisième alinéa de l’article 6-1 est ainsi modifié :
a) La première phrase est ainsi modifiée :
– les mots : « la Commission nationale de l’informatique et des libertés » sont remplacés par les mots : « le Conseil supérieur de l’audiovisuel » ;
– à la fin, les mots : « dans cette commission » sont remplacés par les mots : « au Conseil » ;
b) La deuxième phrase est supprimée.
II. – (Suppression maintenue)
M. le président. L’amendement n° 5 rectifié, présenté par Mme de la Gontrie, MM. Assouline, Montaugé, Durain, Kanner, Jacques Bigot et Fichet, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Sueur, Sutour et Antiste, Mmes Blondin, Ghali et Lepage, MM. Lozach, Magner et Manable, Mmes Monier, S. Robert et Artigalas, M. M. Bourquin, Mme Conconne, MM. Courteau, Daunis et Duran, Mme Guillemot, M. Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 13
Remplacer les mots :
, dans un format ouvert entre ces opérateurs, dans la lutte
par les mots :
entre ces opérateurs, dans un format ouvert et conforme à ses recommandations, pour lutter
La parole est à Mme Victoire Jasmin.
Mme Victoire Jasmin. L’objet de cet amendement est de donner au régulateur le soin d’organiser les outils de coopération et de partage d’informations entre opérateurs pour mieux lutter contre les contenus haineux sur internet.
Pour rappel, en première lecture, le Sénat avait prévu que les outils de coopération et le partage d’informations mis en place par les plateformes à la demande du CSA le soient dans un format ouvert et conforme à ses recommandations.
En nouvelle lecture, l’Assemblée nationale a souhaité ne plus mentionner la nécessité que ces outils soient conformes aux recommandations du CSA, au motif qu’une telle mention serait contradictoire avec le caractère purement incitatif de la mission dévolue au CSA dans ce domaine.
Cette modification est regrettable, car il est important de donner au régulateur le soin d’organiser la coopération d’échange d’information entre opérateurs pour lutter contre les contenus haineux sur internet.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Christophe-André Frassa, rapporteur. Madame Jasmin, vous n’aurez pas défendu cet amendement en vain ! (Exclamations sur les travées du groupe SOCR.)
Je vous rappelle que c’est sur l’initiative de notre collègue rapporteur pour avis, M. Yves Bouloux, que nous avons complété, à l’article 4, les missions confiées au CSA, afin d’encourager le partage d’informations entre opérateurs pour lutter contre la dissémination de contenus haineux illicites.
L’amendement n° 5 rectifié, que vous venez de défendre, vise à rétablir la version adoptée par le Sénat en première lecture. Il a pour objet de donner compétence au CSA pour préciser, dans ses recommandations, le format de ces informations, afin d’en faciliter la circulation entre plateformes.
La commission est favorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Cédric O, secrétaire d’État. Hélas, je ne partage pas l’avis de M. le rapporteur, ce qui, je le crains, risque de créer, dans cet hémicycle, un émoi, une surprise et même une sidération de nature à paralyser le travail de la Haute Assemblée. (Sourires.)
M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Il est encore temps de vous reprendre !
M. Cédric O, secrétaire d’État. J’ai peur de devoir poursuivre dans cette direction malheureuse, car il nous semble qu’imposer que les outils de coopération et de partage d’informations entre opérateurs soient conformes aux recommandations du CSA est contradictoire avec le caractère purement incitatif de la mission dévolue au CSA dans ce domaine.
Il ne nous semble pas souhaitable d’aller au-delà de ce caractère incitatif s’agissant des contenus concernés par cet article.
M. le président. L’amendement n° 6, présenté par M. Montaugé, Mme de la Gontrie, MM. Assouline, Durain, Kanner, Jacques Bigot et Fichet, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Sueur, Sutour et Antiste, Mmes Blondin, Ghali et Lepage, MM. Lozach, Magner et Manable, Mmes Monier, S. Robert et Artigalas, M. M. Bourquin, Mme Conconne, MM. Courteau, Daunis et Duran, Mme Guillemot, M. Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 18
Compléter cet alinéa par les mots :
, sans que le secret des affaires mentionné par la loi n° 2018-670 du 30 juillet 2018 relative à la protection du secret des affaires puisse lui être opposé
La parole est à M. Franck Montaugé.
M. Franck Montaugé. En nouvelle lecture, les députés ont excessivement resserré le champ d’application des dispositions relatives à la transparence des algorithmes introduites au Sénat par voie d’amendements. Le texte issu des travaux de l’Assemblée nationale ne fait ainsi plus mention de l’impossibilité d’opposer au CSA le secret des affaires.
Il me semble important de distinguer la mission du CSA, d’une part, de la communication externe sur ses travaux, d’autre part. Sur ce dernier point, l’alinéa 6 de l’article 4 de cette proposition de loi conditionne bien cette publicité au respect du secret des affaires. En revanche, la capacité du CSA à obtenir des informations pertinentes des opérateurs concernés par le dispositif de lutte contre les contenus haineux sur internet conditionne l’exercice même de sa mission et, par conséquent, son utilité.
Loin d’être une précision superfétatoire, il nous paraît indispensable que la loi attribue au CSA des prérogatives adaptées permettant d’assurer son efficacité et d’asseoir sa légitimité, pour qu’il puisse assurer pleinement ses fonctions de régulation des grandes plateformes et contribuer ainsi à la lutte contre la haine en ligne.