Mme Laurence Cohen. En tant que cosignataire, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 102 rectifié bis est retiré.
Madame Schillinger, l’amendement n° 268 rectifié est-il maintenu ?
Mme Patricia Schillinger. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 268 rectifié est retiré.
Madame Guillotin, l’amendement n° 116 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Véronique Guillotin. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 116 rectifié bis est retiré.
Madame Rossignol, l’amendement n° 279 rectifié est-il maintenu ?
Mme Laurence Rossignol. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 279 rectifié est retiré.
Monsieur Canevet, l’amendement n° 157 est-il maintenu ?
M. Michel Canevet. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 157 est retiré.
Madame Doineau, l’amendement n° 96 rectifié est-il maintenu ?
Mme Élisabeth Doineau. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 96 rectifié est retiré.
Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 98 rectifié quater, présenté par M. Retailleau, Mme Noël, MM. Chevrollier, B. Fournier et Danesi, Mmes Di Folco et Deromedi, MM. de Legge et Bazin, Mme Bonfanti-Dossat, M. H. Leroy, Mmes Bruguière, Chain-Larché, Thomas et Gruny, MM. Bascher, Chaize, Mouiller, Schmitz et Cuypers, Mmes Deseyne et Deroche, MM. Mandelli, Mayet, Longuet, Cambon et Bignon et Mme Micouleau, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 12
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
« Un médecin n’est jamais tenu de participer à l’assistance médicale à la procréation prévue à cet article mais il doit informer l’intéressée de son refus et l’orienter vers un médecin compétent.
« Aucun infirmier ou infirmière, aucun auxiliaire médical, quel qu’il soit, n’est tenu de participer à l’assistance médicale à la procréation. » ;
La parole est à M. Bruno Retailleau.
M. Bruno Retailleau. Je salue votre talent, madame la ministre des solidarités et de la santé ; vous avez emporté la conviction de beaucoup de collègues. Il est suffisamment rare que je vienne à votre rescousse et que je salue votre talent, sans oublier celui de Mme la garde des sceaux, pour que je le souligne. (Sourires.)
Je voudrais, en quelques mots, parce que le débat a déjà beaucoup duré, évoquer trois considérations et commencer par une considération historique sur la clause de conscience.
Simone Veil a construit en 1974 ce concept non pas pour une raison juridique, mais en évoquant une raison qui doit faire sens pour nous qui avons un engagement politique : personne ne doit aller contre ses convictions. Quand on est engagé en politique, on le fait pour défendre ses convictions et non en ayant pour préoccupation première la conquête ou l’exercice d’un pouvoir, je tenais à le rappeler.
Ma deuxième considération sera d’ordre juridique. La clause de conscience est l’expression d’un principe fondamental constitutionnel : la liberté de conscience, qui nous renvoie à la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, au Préambule de la Constitution de 1946, ainsi qu’à différentes jurisprudences du Conseil constitutionnel. Je retiendrai celle de 2001, car elle visait précisément le milieu médical.
J’en viens à ma troisième considération. Sur cette question qui, pour beaucoup d’entre nous, est une rupture anthropologique, le législateur ne peut pas ne rien dire. Il avait explicitement reconnu la clause de conscience pour l’interruption volontaire de grossesse. Ce qui est moins connu, c’est qu’il l’avait aussi reconnue pour les recherches sur l’embryon.
Pour moi, il s’agit d’une question très importante, qui est très discutée, à propos de laquelle nous devons adopter une attitude d’ouverture.
J’entends par avance l’objection selon laquelle que le code de déontologie prévoit une clause de conscience générale. Je veux faire deux remarques très simples. D’abord, le code de théologie,…
Mme Laurence Cohen. Lapsus révélateur !
M. Bruno Retailleau. … pardon le code de déontologie se réfère aux soins. Or la PMA n’est évidemment pas une activité de soins.
Ensuite, il s’agit d’un texte de nature réglementaire. C’est la raison pour laquelle je pense que la loi réglementant la PMA, elle doit aussi prévoir explicitement cette liberté de conscience, c’est-à-dire la clause qui va permettre à chacun de ne pas aller contre ses convictions. C’est important !
M. André Reichardt. Très bien !
M. le président. L’amendement n° 164, présenté par M. Meurant, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Aucun médecin, aucune sage-femme, aucun infirmier ou infirmière, aucun auxiliaire médical, quel qu’il soit, n’est jamais tenu de participer à l’assistance médicale à la procréation selon les modalités prévues à l’article L. 2141-2 du code de la santé publique.
La parole est à M. Sébastien Meurant.
M. Sébastien Meurant. Cet amendement est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Il est dommage que l’objet de l’amendement n° 98 rectifié quater n’ait pas été plus détaillé. Les développements de M. Retailleau sont extrêmement intéressants. Mais ils n’ont pas pu être pris en compte par la commission, qui émet un avis défavorable sur les deux amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Buzyn, ministre. Monsieur le sénateur Retailleau, malgré votre remarque très gentille, je vais être obligée de donner un avis défavorable sur votre amendement. (Sourires.)
En effet, vous souhaitez introduire une clause de conscience spécifique pour les professionnels de santé participant à la réalisation d’une assistance médicale à la procréation pour les couples de femmes ou des femmes non mariées. Vous leur offrez la possibilité de choisir entre les demandes d’AMP. Bien entendu, je comprends la cohérence par rapport à votre vote d’hier.
Je rappelle que la clause de conscience existe aujourd’hui pour des actes médicaux, mais pas pour des individus. Cela soulève une difficulté par rapport à votre argumentaire, monsieur Retailleau.
La clause de conscience en matière d’IVG concerne l’acte d’IVG et elle oblige le médecin à réorienter les patientes vers un autre collègue.
En revanche, elle ne peut en aucun cas être invoquée pour différencier des personnes qui se présentent devant un médecin. Votre proposition introduirait une différenciation selon le statut conjugal ou l’orientation sexuelle.
Or le Conseil d’État a été on ne peut plus clair sur ce point. Je le cite : « Il paraît juridiquement impossible de créer une clause de conscience spécifique à l’AMP qui ciblerait certains publics, étant rappelé que l’article 7 du code de déontologie médicale prohibe toute discrimination. » Votre proposition s’apparenterait donc à de la discrimination.
En ce qui concerne les autres professions de santé et tous les auxiliaires médicaux, leur situation les place dans une posture d’exécuter des actes, activité à laquelle ils ne peuvent pas se soustraire. Ils ne peuvent pas justifier d’une clause de conscience spécifique au regard de leurs fonctions.
Enfin, dans le cas de l’assistance médicale à la procréation, les professionnels qui exercent au sein des services spécialisés le font en toute connaissance de cause, autour d’une activité orientée vers l’aide à la procréation.
Par conséquent, une telle clause ne viserait pas à offrir la possibilité de refuser de pratiquer cette activité, l’acte en général, mais serait incontestablement tournée vers des personnes ou des publics. Ce serait donc discriminatoire. C’est la raison pour laquelle j’émets, au nom du Gouvernement, un avis défavorable sur votre amendement.
M. le président. La parole est à M. Philippe Bas, pour explication de vote.
M. Philippe Bas. Madame la ministre, j’avoue être plus convaincu quand vous exprimez une conviction personnelle que quand vous interprétez les raisonnements du Conseil d’État. Peut-être est-ce parce que votre fibre médicale vous fait aborder les questions d’humanité avec pertinence…
En revanche, sur le plan juridique, vos propos ne m’ont pas du tout convaincu. Il ne saurait y avoir de discrimination quand un traitement différent s’applique à des situations différentes. D’ailleurs, dans les discussions au Sénat, des différences seront faites entre l’assistance médicale à la procréation pour traiter un problème d’infertilité – donc un problème médical – et l’assistance médicale à la procréation pour répondre à la demande d’une femme seule ou d’un couple de femmes qui ne sont pas infertiles d’avoir un enfant. Il faut immédiatement laisser cela de côté.
On invoque parfois le code de déontologie. Il n’est pas applicable à la situation que nous voulons traiter, car il prévoit qu’on peut refuser les soins, par exemple quand on ne se sent pas assez qualifié. Ce sont les soins qui sont demandés par M. ou Mme Untel et que le docteur Dupont ou Durand ne veut pas mettre en œuvre.
Il y a une jurisprudence très abondante de la juridiction ordinale sous le contrôle en cassation du Conseil d’État qui définit l’étendue des obligations déontologiques du médecin. En principe, il ne doit pas refuser des soins, mais une raison professionnelle ou personnelle peut le conduire à les refuser.
Là, ce qu’il faut viser, ce n’est pas une situation individuelle, mais une situation collective. Je pense à l’objection que ferait un médecin face à une demande du service public hospitalier auquel il appartient d’apporter son concours à une catégorie d’actes. Il ne s’agit plus de traiter la demande de Mme Dupont ou de M. Durand.
Dans ce cas, on a besoin de la loi, comme on a eu recours à la loi pour l’interruption volontaire de grossesse, les actes à visée contraceptive et les recherches sur l’embryon. D’ailleurs, à ce propos, l’objection de conscience est prévue dans la loi sur la bioéthique.
L’amendement présenté par M. Retailleau est donc nécessaire si l’on veut couvrir la possibilité pour un médecin hospitalier de ne pas concourir, à l’intérieur de son service de gynécologie obstétrique, à des actes d’assistance médicale à la procréation qui n’ont pas de visée de soins. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Alain Houpert, pour explication de vote.
M. Alain Houpert. J’avoue que je ne comprends pas bien ces amendements. En effet, l’assistance médicale à la procréation est un acte extrêmement difficile et spécialisé, qui est accompli par peu d’équipes médicales. Les médecins qui appartiennent à ces équipes les ont intégrées de leur propre choix. (Mme Véronique Guillotin applaudit.)
Mme Laurence Cohen. Exactement !
M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.
Mme Laurence Rossignol. Ce qui nous est proposé au travers de ces amendements est une clause de conscience politique.
Il est déjà bien connu dans cet hémicycle que plusieurs de mes collègues et moi-même considérons que la clause de conscience qui s’applique concernant l’IVG est, elle aussi, politique. En effet, il importe de rappeler que le code de déontologie médicale comporte déjà une clause de conscience générale qui bénéficie à l’ensemble des soignants.
Par ailleurs, malgré le désaccord que j’ai avec Mme la ministre quant à la clause de conscience sur l’IVG, j’adhère totalement au raisonnement par lequel elle a fait une distinction entre une clause de conscience qui porterait sur un acte médical et une autre qui concernerait plutôt la personne qui recevrait cet acte. Dans le premier cas, on peut du moins comprendre la logique d’une telle clause et le compromis qu’a pu représenter, en la matière, la loi Veil ; dans le second, en revanche, il s’agit purement et simplement d’une discrimination de fait et d’un abus du pouvoir médical à l’encontre des femmes seules ou en couple qui voudraient pratiquer une AMP.
Par ailleurs, je tiens à relever que notre collègue Alain Houpert a eu de nouveau, à l’instant, de très bonnes paroles sur ce sujet. Bien entendu, nous voterons contre ces amendements.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Mon propos sera quelque peu redondant, dans la mesure où je partage l’opinion des orateurs qui viennent de s’exprimer.
Si j’admets volontiers, monsieur le président, que le débat que nous venons d’avoir a peut-être été un peu long, je n’en pense pas moins qu’il a été absolument passionnant et très respectueux de chacune et chacun d’entre nous. C’est un fait suffisamment rare pour qu’on en prenne note de manière tout à fait positive.
Cela dit, force est de constater qu’il existe une tendance à utiliser la clause de conscience dès qu’il s’agit d’un acte où – je redis ma conviction sur ce point – est en cause la liberté des femmes de faire un choix.
Ce serait instituer en la matière une double clause de conscience. En effet, excusez-moi de rappeler de nouveau qu’une clause de conscience figure déjà dans le code de déontologie médicale. On veut choisir à la place des femmes !
Un aspect du problème qui me semble très important a été relevé par Alain Houpert : les équipes qui pratiquent la PMA aujourd’hui, en France, sont constituées de professionnels qui ont choisi de pratiquer cet acte.
Ceux d’entre nous qui sont membres de la commission spéciale savent bien que certains de ces médecins ont été auditionnés. La technique qu’ils pratiquent est très particulière : c’est vraiment un choix professionnel spécifique. Ces médecins nous ont exposé un certain nombre des problèmes qu’ils doivent régler et nous ont demandé de légiférer en la matière.
Alors, pourquoi cet amendement, si ce n’est, peut-être, pour se donner bonne conscience ?
M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour explication de vote.
Mme Véronique Guillotin. Je voterai contre ces amendements. Je suis de l’avis de M. Houpert : la PMA est pratiquée par des équipes spécialisées ; je ne comprends donc pas trop l’intérêt de cette clause de conscience, sauf à permettre à ces médecins de refuser de pratiquer une PMA en raison de l’orientation sexuelle du patient, ce qui serait une discrimination. C’est pourquoi je m’opposerai à ces amendements.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission spéciale.
M. Alain Milon, président de la commission spéciale. M. Houpert a déjà exprimé ma pensée, mais je tiens à revenir sur les propos de Mme Rossignol pour contester l’opinion selon laquelle la clause de conscience en vigueur concernant l’IVG serait un acte politique.
Je rappelle que les médecins prêtent le serment d’Hippocrate : ils s’engagent à veiller au respect de la vie. Donner la vie, permettre la vie : l’IVG s’en distingue tout de même quelque peu. C’est pourquoi une clause de conscience particulière a été mise en place en la matière.
Pour ce qui concerne les présents amendements, je rejoins la position de M. Houpert, tout en m’en excusant auprès de M. Retailleau. On n’a pas imposé aux médecins qui pratiquent dans les services d’AMP de rejoindre ces services ! Ce sont des professionnels ultraspécialisés qui ont choisi ce métier lui-même ultraspécialisé ; c’est leur choix personnel.
Dès lors, si je puis admettre, à la rigueur, qu’on autorise une telle clause de conscience, je ne vois pas pourquoi on l’imposerait à des gens qui ont fait ce choix. Ce serait comme si l’on imposait à un chirurgien pratiquant la chirurgie digestive de choisir une autre spécialité ! Ces médecins sont ultraspécialisés, tout comme les services auxquels ils appartiennent.
Par conséquent, si ces amendements ne sont pas retirés, pour être gentil avec M. Retailleau, je m’abstiendrai.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre de la Gontrie, pour explication de vote.
Mme Marie-Pierre de la Gontrie. J’ignore s’il est vraiment nécessaire d’ouvrir un aussi long débat sur la clause de conscience, mais il est tout de même nécessaire de citer les textes en cause.
Je ne nie pas l’importance du serment d’Hippocrate, mais que dit la clause de conscience générale qui figure dans le code de déontologie médicale ? Ce n’est qu’en la lisant qu’on peut déterminer si, dans le droit actuel, un médecin peut ou non refuser de pratiquer une PMA. « Hors le cas d’urgence et celui où il manquerait à ses devoirs d’humanité, un médecin a le droit de refuser ses soins pour des raisons professionnelles ou personnelles. S’il se dégage de sa mission, il doit alors en avertir le patient et transmettre au médecin désigné par celui-ci les informations utiles à la poursuite des soins. »
Voilà : cette clause de conscience existe ! C’est pourquoi créer une clause de conscience spécifique pour tel ou tel traitement reviendrait à ranger ces actes systématiquement dans une catégorie à part. Je n’ai certes pas la compétence médicale de M. le président de la commission spéciale, mais je suis juriste, ce qui me permet, à la lecture de cet article du code de déontologie relatif à la clause de conscience, de conclure que le médecin qui ne voudrait pas pratiquer tel ou tel acte peut d’ores et déjà refuser de le faire.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 98 rectifié quater.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je constate 36 contre et 26 pour.
Je mets aux voix l’amendement n° 164.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 273 rectifié bis, présenté par Mme Meunier, MM. Daudigny, Vaugrenard, Dagbert, Manable et Lurel, Mme Tocqueville, MM. Féraud et Tourenne, Mme S. Robert, MM. Duran et Kerrouche, Mme Monier et M. Jacquin, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 14
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Art. L. 2141-2-…. – Toute personne ou tout couple pris en charge dans le cadre d’une assistance médicale à la procréation doit pouvoir recourir à ses propres gamètes. » ;
La parole est à Mme Michelle Meunier.
Mme Michelle Meunier. Cet amendement vise à empêcher que les personnes en parcours d’AMP, qu’elles soient seules ou en couple, ne soient contraintes de recourir à un don de gamètes alors qu’elles disposent de leurs propres gamètes, frais ou cryopréservés.
Cela permettrait d’éviter que la technique de fécondation in vitro dite « réception des ovocytes de la partenaire », ou FIV-ROPA, ne soit refusée aux couples de femmes et de garantir que ces personnes, lorsque cela est médicalement possible, soient autorisées à procréer à l’aide de leurs propres gamètes.
Lorsqu’un couple de femmes réalise une FIV-ROPA, aucune d’entre elles n’est donneuse, puisque les deux sont mères de l’enfant. La FIV-ROPA n’est ni un don d’ovocytes ni une gestation pour autrui ; c’est simplement une maternité partagée au sein d’un couple de femmes.
M. le président. L’amendement n° 197 rectifié bis, présenté par Mmes Cohen, Assassi, Apourceau-Poly et Benbassa, M. Bocquet, Mme Brulin, MM. Gay, Gontard, P. Laurent et Ouzoulias, Mme Prunaud, M. Savoldelli et Mme Lienemann, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 14
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Art. L. 2141-2-…. – Lorsque l’assistance médicale à la procréation implique un couple formé de deux femmes, le don d’ovocytes d’un membre du couple à l’autre membre du couple peut être autorisé. » ;
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Mon amendement va dans le même sens que celui de Mme Meunier. La méthode ROPA est une technique qui permet aux deux femmes qui forment un couple de partager de manière active le parcours de fécondation in vitro : l’une d’entre elles, qui apporte son ovule, sera la mère génétique ; l’autre, qui porte à terme la grossesse, sera la mère biologique.
Grâce à cette technique, que nous souhaitons inscrire dans ce projet de loi, les couples de femmes souhaitant partager la maternité et vivre activement ce processus reproductif peuvent le faire. Cela peut être motivé par un choix personnel, mais aussi par des raisons médicales, telles que l’altération de la qualité des ovocytes de l’une des partenaires, l’absence d’ovocytes, l’absence ou le dysfonctionnement sévère des ovaires, ou encore une altération chromosomique ou génétique ; enfin, cette méthode peut être envisagée après l’échec d’autres techniques de PMA.
M. le président. L’amendement n° 271 rectifié bis, présenté par Mmes Meunier et Blondin, M. Daudigny, Mme Lepage, MM. Vaugrenard, Dagbert, Manable et Lurel, Mme Tocqueville, MM. Féraud, Tourenne, Duran et Kerrouche, Mme Monier et M. Jacquin, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 14
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Art. L. 2141-2-…. – Lorsque l’assistance médicale à la procréation implique un couple formé de femmes, la réception des ovocytes d’un membre du couple par l’autre membre du couple peut être autorisée, après avis de l’équipe pluridisciplinaire. » ;
La parole est à Mme Michelle Meunier.
Mme Michelle Meunier. Il s’agit en quelque sorte d’un amendement de repli, qui tend à soumettre le recours à la procédure de FIV-ROPA à un avis médical recueilli de manière pluridisciplinaire.
M. le président. L’amendement n° 172, présenté par M. Meurant, est ainsi libellé :
Alinéa 25
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Dans le cas d’un couple de femmes, le don d’ovocyte de la compagne est interdit.
La parole est à M. Sébastien Meurant.
M. Sébastien Meurant. L’article 16–8 du code civil dispose que le don des éléments du corps doit être anonyme : « Aucune information permettant d’identifier à la fois celui qui a fait don d’un élément ou d’un produit de son corps et celui qui l’a reçu ne peut être divulguée. Le donneur ne peut connaître l’identité du receveur ni le receveur celle du donneur.
« En cas de nécessité thérapeutique, seuls les médecins du donneur et du receveur peuvent avoir accès aux informations permettant l’identification de ceux-ci. »
La pratique qui consisterait pour une femme à accueillir un ovocyte de sa compagne reviendrait donc à contourner cette interdiction.
M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Les trois premiers amendements sont similaires, tandis que celui de M. Meurant vise exactement l’inverse.
Mmes Meunier et Cohen veulent réaffirmer un principe qui existe déjà : la possibilité d’utiliser les gamètes de chacun des membres du couple pour l’AMP. Je dirais même que cette possibilité constitue l’essence même de l’AMP telle qu’elle se pratique aujourd’hui. En effet, la procréation ne se fait pas naturellement dans cette procédure : on prélève les gamètes de chacun des membres du couple – l’homme et la femme – et on aide à cette procréation.
Toutefois, vous aurez compris, mes chers collègues, que la demande qui vous est faite est tout à fait différente. En effet, dans le cas d’un couple de femmes homosexuelles, prélever les gamètes du couple ne permettra jamais de produire un embryon, pour des raisons évidentes.
La procédure que l’on demande d’autoriser au travers de ces amendements recouvre deux situations : dans un premier cas, il s’agit, en quelque sorte, d’un échange – on utilise les ovocytes d’une femme pour la grossesse de l’autre, de manière à faire participer la première à la procréation ; dans l’autre, il s’agit d’utiliser les ovocytes de la femme qui ne portera pas l’enfant, parce que sa compagne n’en produit pas qui soient capables de donner lieu à une grossesse.
Les deux cas constituent ce qu’on appelle un don dirigé, c’est-à-dire un don qui n’est plus anonyme, comme l’a souligné M. Meurant. Or de tels dons sont strictement interdits par le droit français de la bioéthique. En effet, le principe d’anonymat impose qu’on ne puisse connaître à la fois le donneur et le receveur ; ces deux personnes ne sauraient donc a fortiori se connaître. Cela interdit strictement le don dirigé entre deux personnes.
Nous nous trouvons donc dans un cas qui me semble être interdit par les principes de la bioéthique. C’est pourquoi la commission émet un avis défavorable sur les amendements nos 273 rectifié bis, 197 rectifié bis et 271 rectifié bis ; en revanche, elle est favorable à l’amendement n° 172, qui vise à faire figurer dans la loi le principe exactement inverse.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Buzyn, ministre. Les trois premiers amendements tendent à porter atteinte au principe fondamental de la médecine consistant à ne pas pratiquer un acte médical s’il n’est pas nécessaire ou justifié médicalement.
Dans un couple de femmes, il suffira, dans la grande majorité des cas, de pratiquer une insémination artificielle pour aboutir à une grossesse. La femme qui portera l’enfant ne subira pas de stimulation ovarienne ; on lui inséminera simplement dans l’utérus les spermatozoïdes issus de donneurs.
Or les propositions de Mmes Meunier et Cohen imposeraient au couple une stimulation ovarienne, en plus de la FIV, du transfert embryonnaire et de la congélation d’embryons. C’est exactement ce que nous voulons éviter, en particulier la congélation d’embryons surnuméraires. La ROPA aboutirait à infliger à la femme qui donnerait les ovocytes à sa conjointe plusieurs stimulations ovariennes ; l’autre femme, quant à elle, devrait subir des fécondations in vitro et des congélations d’embryons qui ne seraient ni justifiées ni nécessaires.
Nous sommes sensibles à la volonté de deux mères de participer au projet parental, mais cette conception de la double maternité entre en réalité en contradiction avec toute la philosophie de ce projet de loi, notamment avec l’ouverture de l’AMP aux couples de femmes.
L’idée selon laquelle on n’est pas parent si l’on n’a pas donné ses gamètes nous pose problème, car tout le projet de loi repose sur le principe qu’un donneur de gamète n’est pas forcément un père ou une mère et que les parents sont ceux qui élèvent l’enfant et lui apportent amour et sécurité.
Pour cette raison, le Gouvernement est défavorable aux amendements défendus par Mmes Meunier et Cohen. Quant à l’amendement de M. Meurant, il est déjà satisfait ; j’en propose donc le retrait.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 273 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 197 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 271 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Monsieur Meurant, l’amendement n° 172 est-il maintenu ?