M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Gabouty, pour la réplique.
M. Jean-Marc Gabouty. Monsieur le Premier ministre, je vous remercie de cette réponse. Je comprends bien vos explications, mais il reste que certains effets peuvent paraître curieux. Ainsi, au nom de quoi, dans un système à points, un salarié prenant sa retraite entre l’âge légal et l’âge d’équilibre serait-il pénalisé par un malus ?
démission de médecins hospitaliers
M. le président. La parole est à Mme Michelle Gréaume, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)
Mme Michelle Gréaume. Madame la secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé, plus de 1 200 médecins ont lancé hier un cri d’alarme en adressant à la ministre une lettre dans laquelle ils lui demandent solennellement d’adopter les mesures financières nécessaires pour l’hôpital public. Ils n’ont pas trouvé d’autre moyen pour se faire entendre que de prendre la décision, à la fois grave et inédite, de démissionner collectivement de leurs fonctions administratives.
Voilà maintenant plus de dix mois que l’ensemble du monde hospitalier, dévoué au service public, est mobilisé pour défendre un hôpital public de qualité. Ces personnels dénoncent l’austérité budgétaire qui entraîne, pour eux, de la souffrance et la dégradation des conditions de travail et, pour les patients et leurs familles, la détérioration de l’offre de soins.
Est-il normal que des chirurgiens soient contraints d’annuler des interventions sur des enfants quelques minutes avant de commencer ? Que des enfants en urgence pédiatrique soient transférés à des centaines de kilomètres ? Preuve est faite que vos plans d’urgence ne sauraient suffire à compenser des décennies de restrictions budgétaires à l’hôpital public !
Pour reconstruire sur les ruines laissées par des politiques désastreuses, l’hôpital public a besoin d’un Ondam (objectif national de dépenses d’assurance maladie) à 4,5 %, d’un arrêt immédiat des fermetures d’établissement, de service et de lit, du recrutement en urgence de 100 000 personnes et de l’augmentation des salaires de toutes les catégories professionnelles – bénéfique, au demeurant, pour la situation financière des retraites.
Que vous faut-il de plus pour comprendre que vos plans d’urgence sont très loin de satisfaire les besoins de l’hôpital public et de ses personnels ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.
Mme Christelle Dubos, secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé. Madame la sénatrice, nous partageons le constat que vous venez de faire, ainsi que les inquiétudes des patients et des soignants. (Vives protestations sur les travées du groupe CRCE.) Je ne peux pas vous laisser dire que nous ne faisons rien.
En effet, la ministre a entrepris plusieurs actions, notamment la refonte en profondeur de notre système de santé. Nous faisons en sorte que la médecine de ville se réorganise, afin que la charge n’incombe pas uniquement aux hôpitaux et aux services des urgences.
Vous conviendrez que cette refondation est nécessaire. Elle contribuera à redonner aux hôpitaux et aux services des urgences les moyens de soigner correctement les patients dont ils ont la charge.
M. Fabien Gay. Ce sont des mots, nous attendons des actes !
Mme Christelle Dubos, secrétaire d’État. En parallèle, nous proposons également une refondation en profondeur de l’hôpital public : une plus grande délégation de tâches entre les soignants pour libérer du temps médical, des primes pour mieux reconnaître les carrières et des crédits dédiés à l’investissement au quotidien.
Mme Laurence Cohen. Alors pourquoi les médecins démissionnent-ils ?
Mme Christelle Dubos, secrétaire d’État. Permettez-moi de vous apporter quelques éléments spécifiques sur votre région. Dans les Hauts-de-France, cet investissement au quotidien représente aujourd’hui 13,8 millions d’euros. Le département du Nord bénéficie de 6,3 millions d’euros, dont 292 000 euros pour le centre hospitalier de Douai, 550 000 euros pour le centre hospitalier de Roubaix et 371 000 euros pour le centre hospitalier de Tourcoing.
Quelque 1,5 milliard d’euros seront aussi débloqués sur trois ans pour augmenter les tarifs hospitaliers, ce qui n’a pas été fait depuis de nombreuses années.
Par ailleurs, la reprise de la dette sera engagée à hauteur de 10 milliards d’euros.
S’agissant des ouvertures de lits, Agnès Buzyn a demandé aux hôpitaux de faire remonter leurs besoins en aval des urgences.
Elle s’est rendue lundi à Corbeil-Essonnes pour constater le déploiement de ces mesures. Les résultats arrivent. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM.)
M. le président. La parole est à Mme Michelle Gréaume, pour la réplique.
Mme Michelle Gréaume. Votre 1,5 milliard d’euros d’investissements sur trois ans ne permettra pas à l’hôpital public de se relever. Il faudra bien que le Gouvernement finisse par entendre et respecter la colère, les exigences et l’esprit de responsabilité qui montent dans tout le pays, pour sauver notre hôpital public ou notre système de retraite. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)
doctrine du maintien de l’ordre
M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour le groupe socialiste et républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR.)
M. David Assouline. Monsieur le ministre, je vous interroge, comme je l’ai fait en mai dernier, sur les violences policières.
Vous les aviez alors niées, malgré les alertes et les faits largement documentés. Le Président de la République et vous-même semblez aujourd’hui les reconnaître, et c’est heureux.
Je suis convaincu que dénoncer de telles dérives, c’est rendre hommage aux milliers de policiers qui font leur travail difficile et dangereux avec maîtrise et qui nous protègent au sacrifice même de leur vie.
Je pense avec émotion à cet instant, et avec le Sénat tout entier, au policier victime de malfrats qui est mort avant-hier.
Dénoncer de telles dérives, c’est aussi rendre hommage à tous ceux qui, malgré les sollicitations incessantes depuis des années face au terrorisme et, depuis plus d’un an, dans le cadre des manifestations de protestation sociale, accomplissent leur mission avec sang-froid et dans le respect de nos principes républicains.
Pouvez-vous nous dire si vous pensez, au-delà de la déontologie nécessaire qu’il faut faire respecter, que votre nouvelle doctrine du maintien de l’ordre, qui avait sonné comme un permis de se lâcher, porte une part de responsabilité dans cette situation où la liberté de manifester est endommagée ?
Mme Éliane Assassi. Exactement !
M. David Assouline. Que comptez-vous faire pour que les enquêtes de l’IGPN (inspection générale de la police nationale) sur les centaines de cas dont elle a été saisie ne soient plus enterrées, et que des sanctions exemplaires soient prononcées en cas de manquement ?
Allez-vous continuer, seul en Europe, à mettre des LBD (lanceurs de balles de défense) et des grenades GLI-F4 qui contiennent du TNT (trinitrotoluène) entre les mains de ceux qui ont en face d’eux des manifestants très largement pacifiques (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.), et non des soldats ennemis ou des terroristes ? (Applaudissements sur les travées des groupes SOCR et CRCE.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur.
M. Laurent Nunez, secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur. Monsieur le sénateur, je ne reprendrai pas les propos du Président de la République, du Premier ministre et du ministre de l’intérieur sur la nécessaire exemplarité des policiers.
Permettez-moi simplement de rappeler le contexte, que manifestement, vous perdez de vue.
Vous ne pouvez pas ignorer, car le phénomène a commencé sous le quinquennat précédent, que nous avons affaire à des manifestations de plus en plus violentes. Souvenez-vous des manifestations contre la loi El Khomri.
Nous avons vécu avec les « gilets jaunes » et nous vivons actuellement avec les manifestations contre le projet de réforme des retraites, en raison de l’engagement de certaines mouvances ultra, des actions extrêmement violentes qui visent nos institutions et nos policiers, entraînant la dégradation de mobilier urbain et de commerces. (Protestations sur des travées des groupes SOCR et CRCE.) Dans ces conditions, policiers et gendarmes ne peuvent qu’intervenir.
Christophe Castaner et moi-même assumons totalement la doctrine que nous avons revue, afin de donner plus de mobilité et de réactivité à nos forces de l’ordre. Elle permet des interventions rapides qui sont nécessaires pour faire cesser les graves troubles à l’ordre public qui surviennent dans le cadre de ces manifestations.
Nous ne souhaitons pas que certains se donnent bonne conscience sur le dos de la police et de la gendarmerie nationales en occultant ces violences inacceptables qui – il faut le dire clairement – n’ont rien à voir avec la liberté d’expression et la liberté de manifester.
Je réfute les termes « violences policières » que vous employez et qui laissent à penser qu’il y aurait un système organisé. C’est une offense qui est faite à notre police et à notre gendarmerie. (Applaudissements sur les travées des groupes LaREM, RDSE, Les Indépendants, UC et Les Républicains.)
En revanche, monsieur le sénateur, cela ne nous empêche pas de réfléchir à froid à notre doctrine. C’est ce que nous faisons dans le cadre de la mise en œuvre d’un schéma national du maintien de l’ordre public, où nous réussissons des experts de tous les pays, des magistrats ou des représentants d’organisations aussi importantes que la Ligue des droits de l’homme, Amnesty International ou Reporters sans frontières. Nous travaillons également avec les policiers.
Sachez qu’en Europe certaines polices envient la façon dont nous gérons le maintien de l’ordre public.
J’en profite pour rendre hommage de nouveau à l’ensemble de nos policiers et de nos gendarmes qui sont sur la voie publique, et je vous remercie, monsieur le sénateur, de votre hommage à M. Franck Labois, tué le week-end dernier. Ce cas nous rappelle la dangerosité des métiers de policier et de gendarme. (Nouveaux applaudissements sur les mêmes travées.)
M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour la réplique.
M. David Assouline. Vous savez que la grande majorité des manifestants dont je parle, notamment les syndicalistes, sont pacifiques… (Protestations sur les mêmes travées.) J’observe que la droite le conteste.
Bien entendu, je condamne avec force les casseurs. Rendre hommage aux policiers, c’est condamner les dérives qui ont eu lieu. (Applaudissements sur les travées des groupes SOCR et CRCE.)
situation des combattants djihadistes français
M. le président. La parole est à M. André Reichardt, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. André Reichardt. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.
Je souhaite à mon tour interroger le Gouvernement sur le premier djihadiste français condamné à son retour de Syrie puis libéré ce lundi de la prison de Condé-sur-Sarthe. Cet individu avait été condamné en novembre 2014 à sept ans de prison fermes.
Monsieur le Premier ministre, à n’en pas douter, cette première sortie va constituer aux yeux de beaucoup de nos concitoyens un véritable test de notre capacité de suivi et de contrôle des djihadistes rentrés dans notre pays, détenus puis libérés après avoir purgé leur peine.
Rappelons que 224 djihadistes sont actuellement détenus dans les prisons françaises et vont sortir progressivement dès cette année.
Mme la garde des sceaux nous a indiqué à l’instant que cet ancien détenu, comme les prochains djihadistes libérés, fera l’objet d’un suivi judiciaire par un juge spécialisé, ainsi que d’un suivi administratif – elle a cité l’obligation de pointage, l’interdiction de quitter son domicile…
Pensez-vous vraiment, monsieur le Premier ministre, que ce dispositif prévu pour des détenus de droit commun suffira à rassurer les Français et à assurer leur sécurité ? A-t-on vraiment les moyens d’être efficace, quand on sait que 20 agents sont nécessaires pour surveiller une personne 24 heures sur 24 ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.
Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le sénateur Reichardt, j’ai déjà répondu à une question similaire, mais je vais m’efforcer d’articuler ma nouvelle réponse autour de quatre points.
Premièrement, les condamnations pénales dont font l’objet les personnes qui sont allées sur les terrains de combat sont des condamnations sévères. Depuis 2015, notamment avec l’ancien procureur François Molins, nous avons criminalisé l’association de malfaiteurs terroriste, afin d’accentuer les peines.
Deuxièmement, les individus concernés font l’objet, lors de leur détention, d’un traitement adapté à la singularité de leur parcours et à ce qu’ils ont vécu.
Troisièmement, pour préparer leur procès, nous essayons d’améliorer la détention des preuves que nous avons de leur action sur les terrains de combat. Avec le concours de la DGSI (direction générale de la sécurité intérieure) et des personnes qui, aux États-Unis, vont recueillir les preuves sur les terrains de combat, nous sommes en mesure de mettre l’ensemble des éléments à la disposition des juges.
Quatrièmement, vous l’avez rappelé, monsieur le sénateur, à leur sortie de prison – dans un État de droit, les peines ont une fin –, les personnes libérées font l’objet d’un suivi extrêmement rigoureux par un juge d’application des peines antiterroriste – il s’agit bien d’un juge spécialisé, et non d’un juge de droit commun.
À ce suivi judiciaire peut s’ajouter un suivi administratif, notamment par le biais des Micas (mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance) créées par la loi SILT (loi renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme).
Enfin, les services de renseignement sont extrêmement présents.
L’ensemble de ces dispositifs forme des mailles extrêmement serrées permettant de garantir la sécurité de nos concitoyens. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM.)
M. le président. La parole est à M. André Reichardt, pour la réplique.
M. André Reichardt. Madame la garde des sceaux, vous ne m’avez pas convaincu.
Ainsi, l’individu qui rentrait de Syrie dont il est question, condamné à sept ans de prison, a été libéré au bout de six ans : du point de vue de la gravité des peines, c’est peu !
Par ailleurs, la vraie question est celle du repentir. Les prisons françaises, vous le savez, ne sont pas à l’heure actuelle des centres de déradicalisation : ce sont au contraire des centres de radicalisation.
Or nous ne disposons pas d’outils permettant d’évaluer la dangerosité des individus qui sortent de prison, sinon, cela se saurait ! Le personnel de la prison de Condé-sur-Sarthe a d’ailleurs exprimé des inquiétudes en apprenant la nouvelle de la libération de ce détenu.
Et vous avez annoncé il y a deux jours le rapatriement des individus détenus en Syrie…
M. le président. Il faut conclure !
M. André Reichardt. Nous ne pourrons pas les recevoir ; même si nous le voulions, nous n’en avons pas les moyens ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
réforme des retraites (iii)
M. le président. La parole est à Mme Nadine Grelet-Certenais, pour le groupe socialiste et républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR.)
Mme Nadine Grelet-Certenais. À chaque jour un nouveau démenti, un nouveau miroir aux alouettes, une nouvelle proposition du Gouvernement qui contredit la précédente.
Une telle cacophonie démontre que le Gouvernement navigue à vue, et nos concitoyens assistent avec consternation à ce barguignage incessant sans obtenir de réponse fiable quant à cette fameuse réforme des retraites.
On ne modifie pas l’un des piliers de notre contrat social sur un coin de table entre deux concertations. Âge pivot, âge d’équilibre, incitation à la capitalisation pour les hauts revenus, et, depuis hier, contrairement aux engagements, possible modification de l’âge légal par voie d’ordonnance : mais de qui se moque-t-on ?
Les Français ne sont pas seulement inquiets, monsieur le ministre ; ils désapprouvent votre réforme et soutiennent majoritairement les grévistes, car ils ont compris que tout le monde y perdra. Même le seuil minimal de 1 000 euros que vous vous targuez d’instaurer ne serait accessible que pour une carrière continue au SMIC.
Le masque de la bonne gestion et de la justice peine à dissimuler les inégalités profondes que vous vous apprêtez à entériner dans un projet de loi bâclé. Personne n’est dupe : vous rejouez en vérité la réforme de l’assurance chômage en mettant au pied du mur les syndicats.
Après avoir sciemment organisé le définancement des régimes au travers d’exonérations de cotisations et du recul de l’emploi public, vous appelez à une conférence des financeurs orchestrée pour aboutir à un désaccord des partenaires sociaux et passer en force par voie d’ordonnance.
Vous méprisez enfin le Parlement, qui devra se prononcer dans le cadre de la procédure accélérée sur une réforme tronquée de son financement. Il s’agit là d’un coup de force inédit pour le Parlement.
Une majorité de Français vous le demande : quand allez-vous faire preuve de discernement et retirer votre texte au profit d’un véritable dialogue social, le temps de présenter une réforme honnête et juste aux Français et à leurs représentants ? (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR et sur des travées du groupe CRCE.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Édouard Philippe, Premier ministre. Madame la sénatrice, la tonalité et le sens général de votre question me paraissent assez critiques sur le projet de réforme. (Sourires.) Je peux le comprendre : après tout, cela n’a rien de scandaleux !
Ce qui me semble plus contestable, et je le dis avec beaucoup de respect, ce sont les facilités de langage et les inexactitudes qui émaillent votre question.
Vous évoquez la conférence de financement que j’exige ou que je convoque. Mais en acceptant l’idée d’une telle conférence, j’ai répondu favorablement à une demande formulée par des organisations syndicales que vous connaissez sans doute et avec lesquelles, j’en suis certain, vous dialoguez régulièrement.
Nous avons reconnu que discuter avec les organisations syndicales était une bonne idée. Un grand nombre d’entre elles – plusieurs organisations syndicales représentatives des salariés, les organisations patronales – ont d’ailleurs accepté de participer, de façon à formuler des propositions permettant de revenir à l’équilibre en 2027.
Cette conférence de financement commencera ses travaux à la fin du mois. Elle a pour mission de nous proposer des mesures, qui, si elles permettent de revenir à l’équilibre et respectent les deux bornes que nous avons fixées et qui ont été admises par les organisations syndicales elles-mêmes – la non-diminution des pensions et la non-augmentation du coût du travail –, seront reprises par le Gouvernement et soumises au Parlement pour adoption.
Tel est l’engagement qui a été pris non par le Gouvernement seul, mais par le Gouvernement, les organisations syndicales et les organisations patronales.
Madame la sénatrice, vous vous faites avec raison le défenseur du dialogue social : voilà un exemple concret, pratique, borné dans le temps et dans l’objet d’un tel dialogue social. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM. – Protestations sur les travées des groupes SOCR et CRCE.)
Il est vrai qu’un certain nombre d’organisations syndicales vont participer à cette conférence, mais sont opposées par principe soit à un système universel, soit à un système par points.
Elles en ont parfaitement le droit, mais nous nous sommes engagés à créer un système universel par répartition et par points. Nous ne nous départirons pas de cet objectif, et nous allons l’atteindre.
Une deuxième inexactitude porte sur l’habilitation qui permettra au Gouvernement de tirer les conséquences des propositions qui seront formulées par la conférence de financement, notamment sur l’âge légal.
Vous le savez, la jurisprudence impose désormais que les habilitations à légiférer par ordonnances, pour être conformes à la Constitution, soient beaucoup plus précises qu’elles ne l’étaient il y a quelques années – le président du Sénat s’en fait régulièrement l’écho.
Autrement dit, si nous voulons les inscrire dans la loi, il faut que l’ensemble des mesures qui seront proposées par la conférence de financement soient mentionnées dans l’habilitation.
Les partenaires sociaux doivent donc disposer de la totalité des instruments disponibles, charge à eux de déterminer lesquels ils souhaitent retenir.
Madame la sénatrice, en proposant la rédaction de l’article d’habilitation la plus large possible, nous ne fermons pas le débat, au contraire, nous l’ouvrons. Je suis surpris que vous ne le compreniez pas, d’autant que les organisations syndicales elles-mêmes ont demandé de disposer du maximum de possibilités pour formuler les mesures qui nous permettront de revenir à l’équilibre en 2027 ce qui, convenons-en, est un objectif tout à fait respectable. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM et sur des travées du groupe RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme Nadine Grelet-Certenais, pour la réplique.
Mme Nadine Grelet-Certenais. Sur le fond, vous savez bien que nous sommes en profond désaccord.
Sur la forme, vous appelez à ne pas aller plus vite que la musique. Certes, mais nous avons des interrogations sur la partition et son timing.
Vous planchez sur cette réforme depuis un certain temps. Nous avons demandé en préalable à tout examen du texte une étude d’impact et des précisions en termes de financement, et c’est seulement maintenant que vous allez commencer à étudier ces questions alors que la réforme est déjà en cours ! (Applaudissements sur les travées des groupes SOCR et CRCE.)
dette
M. le président. La parole est à M. Laurent Duplomb, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Laurent Duplomb. Monsieur le ministre de l’économie et des finances, il y a un an, vous déclariez au Sénat : « Nos finances publiques, c’est l’histoire d’une lente dégradation depuis quinze ans. Cette dégradation tient en trois chiffres : trente-trois, trois et trois : vous le voyez, ce n’est pas difficile à retenir ! » Trente-trois, c’est le montant de l’augmentation de la dette publique en dix ans ; 3 %, c’est celui de l’augmentation de la dépense publique ; et 3 %, c’est également celui de l’augmentation des taxes et des impôts. Et vous ajoutiez : « ma détermination personnelle est justement d’en changer, afin que nous dépensions moins et mieux, que nous réduisions par conséquent la dette ».
Ces propos résonnaient dans l’hémicycle comme une leçon un tantinet provocatrice, voire un tant soit peu arrogante et méprisante.
Monsieur le ministre, après le mouvement des « gilets jaunes » et pendant celui qui concerne les retraites, je me permets de vous aider à retenir les chiffres d’aujourd’hui d’une façon encore plus simple. En réalité, il suffit de retenir un seul chiffre, 100 : la dette est à 100 % du PIB, le déficit public est à 100 milliards d’euros et vous prélevez aux contribuables plus de 1 000 milliards d’euros, soit dix fois 100 milliards.
N’avez-vous pas oublié de vous appliquer la leçon que vous nous donniez ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie et des finances.
M. Bruno Le Maire, ministre de l’économie et des finances. Monsieur le sénateur, je ne suis ici pour donner de leçon à personne (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.) et je vous remercie d’avoir rappelé un certain nombre de chiffres.
Oui, la dette publique, qui était de 64 % en 2008, est passée à 97 % en 2017, au moment où j’ai été nommé ministre de l’économie et des finances. Elle avait effectivement augmenté de 33 points. (Protestations sur les travées des groupes CRCE et SOCR.)
M. Pierre-Yves Collombat. Parce que vous avez sauvé les banques !
M. Bruno Le Maire, ministre. Est-ce que je me satisfais d’un niveau de dette publique aussi élevé ? La réponse est non. Mais ayez l’honnêteté de reconnaître que nous avons réussi à stabiliser la dette publique française alors qu’elle avait augmenté de 33 points au cours des dix dernières années.
Ayez l’honnêteté de reconnaître que grâce à ce gouvernement – vous devriez vous en réjouir parce que je sais que vous êtes attaché à la bonne tenue des finances publiques –, la France est sortie de la procédure pour déficit public excessif dans laquelle elle se trouvait depuis dix ans.
Ayez l’honnêteté de reconnaître que nous avons engagé un certain nombre de réductions de la dépense publique en matière d’emplois aidés ou de logement qui nous ont permis d’éviter la dérive des finances publiques.
M. Vincent Éblé. Ce sont les pauvres qui paient : tout est dit !
M. Bruno Le Maire, ministre. Ensuite, il y a eu une crise sociale majeure à laquelle nous avons voulu répondre. C’est la responsabilité du politique de savoir entendre les messages des Français.
Les baisses d’impôts que nous avons engagées, notamment la baisse de l’impôt sur le revenu, la baisse de l’impôt sur les sociétés et la baisse d’un certain nombre de taxes, correspondaient à une attente profonde des Français. Il était juste et nécessaire de baisser les impôts.
Je dirai enfin un dernier mot sur la dette publique. Nous ferons tout ce qui pourra être fait dans les deux années restantes du quinquennat pour stabiliser et baisser la dette publique française. Croyez-moi, nous prendrons les décisions nécessaires, et j’espère que vous nous soutiendrez dans ce sens. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM.)
M. le président. La parole est à M. Laurent Duplomb, pour la réplique.
M. Laurent Duplomb. Monsieur le ministre, Montesquieu écrivait : « J’aime les paysans, ils ne sont pas assez savants pour raisonner de travers. »
Les Français ne raisonnent pas de travers. Ils ne sont pas dupes : ils connaissent la réalité désastreuse de nos comptes publics.
Ma grand-mère, elle, disait : « Ne nous faites pas prendre des vessies pour des lanternes. » À force d’arrogance et de mépris, cela pourrait finir « à la lanterne » ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
enjeux et interrogations de l’opération barkhane après le sommet de pau
M. le président. La parole est à M. Olivier Cigolotti, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Olivier Cigolotti. Madame la ministre des armées, d’Indelimane à Chinédogar, la liste des attaques meurtrières de djihadistes contre les forces présentes au Sahel s’allonge, et avec elle, celle des victimes, militaires comme civiles, maliennes comme nigériennes, burkinabè comme françaises.
Alors que la situation sécuritaire se dégrade rapidement et que la zone d’affrontement s’étend vers le sud, nous observons avec inquiétude qu’une part croissante de la population locale rejette la présence sur place de nos armées.
Il était donc important que le soutien des autorités des pays du G5 Sahel à l’appui de la France dans la lutte militaire contre les terroristes soit réaffirmé de manière forte et claire. À cet égard, l’objectif du sommet de Pau est atteint.
Toutefois, de nombreuses questions cruciales pour l’avenir de l’opération Barkhane restent en suspens.
Le Président de la République a annoncé l’envoi de 220 soldats français supplémentaires au Sahel en appui des forces déjà déployées. L’effort est important, mais au regard de l’intensité et de l’extension géographique de la menace, ce nombre est-il à la hauteur ?
Par ailleurs, la déclaration conjointe adoptée à l’issue du sommet exprime la reconnaissance des signataires à l’égard des États-Unis pour leur appui, et demande clairement leur maintien en Afrique de l’Ouest. Or cette demande découle de rumeurs insistantes quant à un éventuel départ américain. Madame la ministre, à quelle échéance aurons-nous des assurances sur ce point crucial ?
En cas de retrait avéré des États-Unis, un soutien européen n’en deviendrait que plus essentiel. Nous saluons donc la présence à Pau de Josep Borrell et de Charles Michel, en espérant qu’elle soit le signe d’un renforcement de l’implication de nos partenaires européens.
Madame la ministre, pourriez-vous nous éclairer sur la force Takuba que vous appelez de vos vœux, mais également sur la révision du mandat de la Minusma (Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali) ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)