M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d’État. Je vous remercie pour la clarté de vos propos, mesdames, messieurs les sénateurs, et souhaite vous apporter quelques éléments de réponse.
Je reviendrai tout d’abord sur la « pomme de discorde » que représente la question du financement des autorités organisatrices de la mobilité qui ne lèvent pas de versement transport. Le projet de loi sanctuarise le versement transport, devenu versement mobilité, pour les collectivités qui mettent en place des services de transport collectif réguliers. Le Gouvernement a fait le choix, dans le cadre de la réforme de la fiscalité locale – cela a été dit à plusieurs reprises –, de substituer à la taxe d’habitation une ressource plus dynamique : une fraction de TVA qui leur octroiera une marge de manœuvre supplémentaire pour mettre en place de tels services.
M. Jean-Pierre Sueur. Il faut y croire !
M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d’État. Il faudra en effet l’apprécier à l’épreuve des faits, monsieur le sénateur, mais l’intention est réelle et la dynamique substantielle. (Exclamations sur les travées du groupe SOCR.)
D’un point de vue factuel, je veux rappeler le dynamisme du versement transport, l’augmentation de son produit étant très largement supérieure au manque à gagner qui avait justifié, en 2016, la création du mécanisme de compensation ; en moyenne, la réduction de la compensation est aujourd’hui bien inférieure à l’augmentation du versement transport lui-même.
Néanmoins, comme je l’ai dit hier à l’Assemblée nationale, le Gouvernement est tout à fait prêt, afin d’éviter tout risque de mauvaise interprétation, à un ajustement du texte évitant que ce plafonnement ne vienne affecter une collectivité dont la dynamique de versement transport serait défavorable. Je soumets cette question au débat du jour, si tant est que le texte soit discuté.
Plus généralement, je tiens à rappeler que le volume de 13,4 milliards d’euros d’investissements est de 40 % supérieur à celui de la décennie précédente. S’agissant des territoires et de la ruralité, le plan de régénération et d’entretien des routes est porté à 800 millions d’euros par an à compter de 2020, pour atteindre 1 milliard d’euros, un niveau inédit, auquel s’ajoute un plan de désenclavement routier de 1 milliard d’euros sur dix ans qui répond à bien des aspirations de nos territoires, en tout cas du mien.
S’agissant des mesures en faveur du transport collectif, pour répondre à Mme Assassi, le projet de loi prévoit de dédier 600 millions d’euros aux pôles d’échanges multimodaux et aux transports collectifs, au terme d’un appel à projets qui est en cours d’élaboration. Ainsi, SNCF Réseau formulera des propositions sur le plan RER métropolitains dès le 31 mars prochain, consacrant notamment 1,3 milliard d’euros à la désaturation des nœuds urbains.
Monsieur Didier Mandelli, vous évoquez le name and shame à propos du verdissement des flottes. Si l’État entend publier les statistiques des collectivités, établissements et entreprises assujettis, c’est pour valoriser les trajectoires de ceux qui respectent les obligations et non pour dénoncer ceux qui ne font rien – nous nous inscrivons dans une dynamique positive.
À l’article 20, le texte comporte de nouvelles garanties pour les travailleurs des plateformes. (Protestations sur les travées du groupe CRCE.) Je pense notamment au droit à la déconnexion, à l’information sur le prix et la durée des services et à la capacité de refuser. Je sais que nos appréciations peuvent être divergentes s’agissant de cette nouvelle économie, mais je précise, pour avoir discuté avec nombre de professionnels, que les orientations que nous avons choisies correspondent à la volonté d’un certain nombre d’entre eux de demeurer indépendants et d’accroître leurs droits.
Je conclurai en évoquant l’« Arlésienne » que serait le rapport Philizot. Je suis d’autant plus à l’aise avec ce sujet que c’est moi qui l’avais demandé en tant que rapporteur de la loi ferroviaire, lorsque j’étais député. L’avant-projet du rapport m’a été livré peu après mon entrée en fonction. Il dresse l’état du réseau et fait la clarté sur le coût de la régénération et de la pérennisation de l’ensemble des lignes ferroviaires.
Cependant, pour aller un cran plus loin, en accord avec le Premier ministre, j’ai demandé au préfet Philizot de relancer un cycle court de discussions avec les régions afin que nous disposions, d’ici à la fin du mois de novembre, non seulement du rapport, mais aussi d’un plan d’actions territorial concret. Nous pourrons ainsi utiliser un panel d’actions – là un train léger, ailleurs un train à hydrogène – répondant aux besoins précis des territoires, en liaison notamment avec les régions. Disposer d’un plan d’actions opérationnel me paraît de nature à satisfaire les besoins de la collectivité, bien plus qu’un énième rapport, fût-il bien fait.
Voilà les précisions que je souhaitais vous apporter, mesdames, messieurs les sénateurs. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM.)
M. le président. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion de la motion tendant à opposer la question préalable.
Question préalable
M. le président. Je suis saisi, par M. Mandelli, au nom de la commission, d’une motion n° 1.
Cette motion est ainsi rédigée :
En application de l’article 44, alinéa 3, du Règlement, le Sénat décide qu’il n’y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture, d’orientation des mobilités (n° 730, 2018-2019).
Je rappelle que, en application de l’article 44, alinéa 7, du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l’auteur de l’initiative ou son représentant, pour dix minutes, un orateur d’opinion contraire, pour dix minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.
En outre, la parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée n’excédant pas deux minutes et demie, à un représentant de chaque groupe.
La parole est à M. le président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, pour la motion.
M. Hervé Maurey, président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, comme l’a rappelé notre rapporteur Didier Mandelli, le texte issu des travaux de l’Assemblée nationale que nous examinons cet après-midi conserve la majeure partie des apports du Sénat, saisi de ce projet de loi en première lecture, que ce soit sur le volet de la programmation des infrastructures, sur celui de la gouvernance ou sur ceux du développement des mobilités propres et de la sécurité dans les transports.
Dès lors, pourquoi la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable a-t-elle décidé de déposer une motion tendant à lui opposer la question préalable ? Tout simplement parce que nous faisons le constat que le projet de loi, tel qu’il a été adopté par l’Assemblée nationale, ne permettra pas d’atteindre l’ambition affichée par ce texte.
Cette ambition, à laquelle nous souscrivons pleinement, est de mettre fin aux zones blanches de la mobilité, en offrant des solutions de substitution à la voiture individuelle aux habitants des territoires périurbains et ruraux. Malheureusement, ce texte ne le permettra pas, car il n’apporte aucune réponse à une question primordiale, celle du financement, qualifiée par le secrétaire d’État de « pomme » de discorde, référence à laquelle, en tant que Normand, je ne peux qu’être sensible. (Sourires.)
Nous le regrettons, car la mobilité est un sujet majeur qui répond à une double préoccupation : une préoccupation sociale, le mouvement des « gilets jaunes » puis le grand débat national ayant rappelé à quel point la mobilité est un enjeu important pour de nombreux Français aujourd’hui condamnés à utiliser quotidiennement leur voiture et qui subissent de ce fait de plein fouet la hausse des prix des carburants ; une préoccupation environnementale également : le secteur du transport étant l’un des principaux émetteurs de gaz à effet de serre, il est urgent de développer des offres de transport propres et partagées.
Le projet de loi initial ne comportait aucune disposition en matière de financement. Aussi, dès sa présentation en conseil des ministres, avions-nous alerté le Gouvernement sur ce sujet et indiqué qu’il s’agissait pour nous d’une « ligne rouge ». Il est en effet inconcevable, pour l’assemblée des territoires que nous sommes, de transférer aux communautés de communes une nouvelle compétence aussi importante et aussi lourde financièrement sans leur donner les moyens de l’exercer.
C’est pourquoi le Sénat avait intégré dans le texte du Gouvernement un financement qui permettait aux communautés de communes dont les ressources sont insuffisantes de bénéficier d’une fraction de la TICPE afin de prendre en charge leurs politiques en matière de mobilité. Ce dispositif – nous l’avions dit – était de notre point de vue amendable ou même remplaçable, dès lors qu’une solution viable était retenue.
L’Assemblée nationale, plutôt que de proposer une éventuelle solution de remplacement, a purement et simplement supprimé ces dispositions, les députés renvoyant cette question du financement au prochain projet de loi de finances.
La ministre des transports, consciente de l’importance de ce sujet pour que nos deux assemblées puissent trouver un accord en commission mixte paritaire, s’était engagée à proposer un dispositif de financement en amont de celle-ci. Il n’en a malheureusement rien été.
Deux jours avant la CMP, le Premier ministre a adressé un courrier aux rapporteurs indiquant que, pour financer l’exercice de leur compétence en matière d’organisation des mobilités, les intercommunalités pourraient compter sur le dynamisme de la part de TVA qui leur serait attribuée pour compenser la suppression de la taxe d’habitation. Vous avez repris, monsieur le secrétaire d’État, cet élément de langage. Cette réponse ne nous a pas paru et ne nous paraît toujours pas à la hauteur des enjeux, et ce pour deux raisons.
La première raison, c’est que rien ne dit que ce supplément de recettes de TVA sera suffisant – et suffisamment stable dans le temps – pour financer la mise en place de services de mobilités sur le long terme.
M. Jean-Pierre Sueur. Bien sûr !
M. Hervé Maurey, président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. La deuxième raison, c’est que ces ressources, quand bien même elles seraient plus importantes, ne seront pas liées à l’exercice de la compétence mobilité, ce qui n’incitera pas les intercommunalités à s’en saisir, les communautés de communes ayant déjà beaucoup de difficultés à financer les compétences qu’elles exercent.
Nous avons eu l’occasion d’indiquer au Premier ministre que sa lettre ne répondait pas à nos attentes, et ce à la veille de la CMP. Aussi, quelques heures avant celle-ci, avons-nous reçu un courrier de la ministre des transports nous indiquant que le Gouvernement était disposé à examiner, dans le cadre de la réforme des finances locales, des mécanismes incitatifs au bénéfice des communautés de communes qui se saisiraient de la compétence d’organisation des mobilités, sans préciser les modalités d’une telle incitation. Nous ne pouvions pas nous satisfaire d’engagements aussi imprécis. C’est pour cette raison que la CMP n’a pas été conclusive.
Nous avons malheureusement eu raison d’être prudents, si ce n’est méfiants, puisque – nous le constatons aujourd’hui – le projet de loi de finances pour 2020, qui est maintenant connu, malgré les assurances données par le Gouvernement, ne prévoit aucun dispositif permettant d’assurer un financement dédié et pérenne de l’exercice de la compétence mobilité par les intercommunalités.
Pire, monsieur le secrétaire d’État, au lieu d’attribuer aux autorités organisatrices de la mobilité des moyens supplémentaires, il les prive d’une partie de leurs ressources, puisqu’il prévoit d’amputer de 45 millions d’euros la compensation que l’État leur verse à la suite du relèvement en 2016 du seuil de salariés à partir duquel les employeurs sont assujettis au versement mobilité ! Les recettes non seulement n’augmentent pas, donc, mais elles diminuent.
Nous craignons par conséquent, monsieur le secrétaire d’État, qu’un grand nombre d’intercommunalités renonce à exercer cette compétence, et que celle-ci soit finalement exercée par les régions, qui ne seront pas en mesure de développer les solutions de mobilité de proximité dont nos territoires, notamment ruraux, ont besoin.
L’ensemble des territoires sera donc en théorie couvert par une autorité organisatrice, mais, en réalité, les zones blanches de la mobilité demeureront, au détriment des habitants des territoires les plus fragiles, qui risquent d’être les premiers déçus de ces engagements non tenus.
La question préalable déposée par la commission acte ce désaccord profond sur le financement de la compétence mobilité, dès lors qu’elle serait prise en charge par les intercommunalités. Elle ne signifie pas que nous ne partageons pas les objectifs du projet de loi ni que nous ne pouvons pas être fiers du travail que nous avons effectué - car, oui, nous pouvons être fiers du travail mené par l’ensemble des groupes politiques du Sénat, qui a permis d’améliorer considérablement le texte.
Cette question préalable signifie, en revanche, que le Sénat, défenseur des territoires, ne peut pas accepter le transfert d’une telle compétence sans financements adaptés et dédiés. Ce sont tout de même 950 communautés de communes qui pourraient être concernées demain par ce transfert. Un grand nombre d’entre elles ne bénéficieront pas des recettes du versement mobilité, car elles ne mettront pas en place des services réguliers de transport, compte tenu du coût que ceux-ci représentent.
Pour terminer, je voudrais évoquer les articles introduits par les députés relatifs aux concessions autoroutières – je sais que le sujet vous intéresse au plus haut point, monsieur le secrétaire d’État –, qui constituent un autre sujet de profond désaccord entre l’Assemblée nationale et notre commission.
L’article 40 ter A issu de l’Assemblée nationale permet en effet d’intégrer au sein du périmètre des concessions autoroutières des « sections à gabarit routier servant à fluidifier l’accès au réseau autoroutier ». C’est là une notion extrêmement floue, qui laisse craindre que des sections de routes nationales, départementales, voire communales, puissent, demain, être intégrées au sein des concessions en contrepartie d’une augmentation des péages. C’est d’ailleurs l’interprétation qui est faite par l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (Arafer), qui considère que la rédaction de cet article est très imprécise et qu’elle pourrait conduire à un élargissement du périmètre des concessions routières à des routes qui aujourd’hui ne peuvent en faire partie.
Un tel dispositif, monsieur le secrétaire d’État, est contraire à l’esprit de la loi Macron de 2015, qui a permis de mieux réguler ce secteur, et surtout, ce qui est bien plus grave, à l’intérêt des automobilistes, qui risquent, une fois de plus, de devoir mettre la main à la poche.
Vos services nous ont indiqué, monsieur le secrétaire d’État, que le décret prévu par cet article préciserait que cette notion ne recouvre que les routes à deux fois une voie qui satisfont un critère d’autoroute, et que, en définitive, cet article n’aurait pas de réelle portée. Permettez-nous d’en douter. Nous sommes relativement inquiets et souhaitons que vous puissiez nous rassurer sur le fait qu’un décret interprétera de manière restrictive cette disposition extrêmement préoccupante pour le portefeuille des automobilistes.
Par cette motion tendant à opposer la question préalable, je le répète, nous entendons avant tout marquer notre refus d’une réforme de la gouvernance des mobilités qui soit à la charge financière des collectivités locales, collectivités que nous avons à cœur, dans cette assemblée, de représenter et de défendre. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes Les Indépendants et SOCR.)
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d’État. Avis défavorable.
Pour répondre brièvement à M. le président de la commission, le décret sera évidemment fondé sur le droit actuel, lequel reste inchangé, y compris avec le nouvel article – nous avons eu l’occasion d’échanger sur ce point.
Notre désaccord, aujourd’hui, porte sur le financement des autorités ne prélevant pas de versement transport. La pomme de discorde, comme vous le savez, fut jetée au milieu d’un festin des dieux et conduisit à la guerre de Troie ; mais je ne doute pas que, quant à nous, nous saurons dépasser cette querelle temporaire, monsieur le président Maurey.
M. le président. La parole est à Mme Martine Filleul, pour explication de vote.
Mme Martine Filleul. Force est de constater qu’avec ce projet de loi d’orientation des mobilités, en dépit des déclarations de bonnes intentions, le Gouvernement s’arrête à mi-chemin.
Si ce texte part de constats inattaquables et vise des objectifs auxquels on ne peut que souscrire, encore faut-il que les moyens alloués soient à la hauteur des ambitions et des besoins de nos concitoyens et des collectivités.
Or, en la matière, il y a loin de la coupe aux lèvres. Dès la première lecture, nous avions en effet évoqué le manque de financement et alerté sur le fait que leur insuffisance ne permettrait ni de réduire ni de résorber les inégalités, ni de répondre aux enjeux actuels et futurs de la mobilité.
Le groupe socialiste avait alors été force de proposition pour trouver de nouveaux financements, aussi bien pour investir dans les infrastructures que pour la mise en place de nouvelles solutions de mobilités. Pour ce faire, nous avions proposé, malheureusement sans succès, de lever un grand emprunt ou encore d’instaurer une vignette poids lourds.
Dans cette logique, en commission comme en séance, nous avons soutenu les mesures corrigeant en partie ces manques, notamment la possibilité pour les intercommunalités d’instaurer un versement mobilité à taux réduit et de bénéficier d’une part du produit de la taxe carbone.
Mais ces mesures ont été supprimées par l’Assemblée nationale. Si le Gouvernement a présenté d’autres dispositifs, ceux-ci ne sont pas pérennes et ne garantissent pas des financements durables. Le sujet est renvoyé à une réforme de la fiscalité locale qui interviendra bien plus tard, et dont les contours sont encore très flous. Cette décision irresponsable met encore une fois les collectivités en difficulté et laisse pour compte les territoires les plus fragilisés, alors que le Gouvernement avait promis des moyens dans le budget pour 2020.
En cohérence avec ces positions, les sénateurs socialistes voteront cette motion tendant à opposer la question préalable. (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR et sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Alain Fouché, pour explication de vote.
M. Alain Fouché. La mobilité, en France, n’a jamais été aussi importante – nous l’avons dit. À l’heure du tout-numérique et de la transition écologique, alors que nos territoires sont confrontés à des évolutions toujours plus rapides, le cadre législatif doit évoluer.
Je salue les avancées de ce texte, qui traduit la volonté d’une mobilité plus propre et plus dynamique.
Cependant, il faut nous donner les moyens de nos ambitions. La question du financement est primordiale et, comme j’ai eu l’occasion de le dire, l’objectif n’est pour le moment pas atteint.
Le groupe Les Indépendants s’abstiendra en majorité sur cette question préalable.
Mon collègue Jérôme Bignon et moi-même souhaitons cependant nous associer à la démarche de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, qui a voté cette motion à la quasi-unanimité ; nous voterons donc pour cette motion.
Les collectivités locales et les citoyens ont besoin de réponses précises. C’est à nous, mes chers collègues, de reprendre la main lors des discussions à venir sur le projet de loi de finances. La LOM est un espoir ; donnons-lui les moyens de se réaliser ! (M. Yves Bouloux applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.
M. Guillaume Gontard. Comme l’a indiqué Éliane Assassi, notre groupe votera cette question préalable. Si nous saluons un certain nombre de dispositions de ce texte, notamment celles qui sont relatives au développement des mobilités douces, au premier rang desquelles le vélo, ou la fin des véhicules thermiques à l’horizon 2040, force est de constater que le compte, financièrement parlant, n’y est pas.
Monsieur le secrétaire d’État, le Sénat a largement amélioré ce texte et nombre de ces améliorations ont été conservées par l’Assemblée nationale. La commission mixte paritaire aurait pu et même dû aboutir, mais le Gouvernement refuse d’entendre le message quasi unanime du Sénat sur l’indispensable besoin de financement des infrastructures de transport. La première grande loi sur les transports depuis trente-cinq ans fera figure d’épée de bois si les investissements ne suivent pas pour rénover, entretenir et développer nos infrastructures.
Toutes les bonnes intentions du monde ne suffiront pas. Le Gouvernement est incapable d’équilibrer et de pérenniser le budget de l’Afitf, qui est aujourd’hui insuffisant pour mener à bien, pendant les quarante prochaines années, le scénario moyen du rapport Duron. Alors, vous reprenez en catastrophe l’écotaxe a minima sur les billets d’avion que vous refusiez au Sénat six mois plus tôt. Comprenne qui pourra ! On est dans le bricolage.
Les propositions, pourtant, ne manquent pas, que ce soit l’écotaxe pour les poids lourds ou la nationalisation des autoroutes, qui sont des solutions cohérentes pour financer l’Afitf tout en réduisant quelque peu nos émissions de CO2.
On est très loin de l’ambition affichée en faveur d’un transport écologique du XXIe siècle, et ce double discours devient usant. Les conséquences, nous les connaissons : l’État se décharge sur les collectivités locales pour l’entretien des lignes ferroviaires du quotidien.
L’État se désengage, ou plutôt ne s’engage plus dans les contrats de plan État-région. SNCF Réseau est contraint, et même bridé, conséquence directe de la récente loi ferroviaire. Curieusement, l’État est plus prompt à s’engager quand il s’agit de la route. Au passage, monsieur le secrétaire d’État, nous attendons toujours votre réponse concernant l’engagement de l’État à maintenir – c’est indispensable – la ligne Grenoble-Veynes-Gap, dont les financements existent et dont les travaux doivent impérativement débuter en 2020.
Plus largement – cela a déjà été dit plusieurs fois –, nous attendons toujours le fameux rapport Philizot. Nous avons cru comprendre, monsieur le secrétaire d’État, qu’il était arrivé sur votre bureau, et nous aimerions en connaître les conclusions. Vous venez d’annoncer un nouveau rapport Philizot ; quoi qu’il en soit, son absence se fait sentir. Si vous refusez de publier le diagnostic, c’est, me semble-t-il, faute de plan d’action pour y répondre. Et vous n’avez toujours aucun plan, puisque vous nous annoncez une énième concertation avec les régions pour tirer à la courte paille, peut-être, le sort des lignes du quotidien !
La boucle est donc bouclée : deux ans et demi pour en arriver là… Encore une fois, nous restons au milieu du gué ; c’est particulièrement décevant. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)
M. le président. La parole est à M. Jean-François Longeot, pour explication de vote.
M. Jean-François Longeot. À titre personnel, je ne participerai pas au vote sur cette motion tendant à opposer la question préalable. Comme vient de le dire notre collègue Gontard, en effet, nous nous arrêtons au milieu du gué en décidant de ne pas poursuivre après avoir fait la moitié du chemin.
Lors de la réunion de la commission, j’ai comparé cette attitude à celle d’une équipe de football qui rentrerait définitivement au vestiaire une fois jouée la première mi-temps et s’étonnerait, le soir venu, de lire dans le journal qu’elle a perdu ! Eh oui, faute de jouer la deuxième mi-temps, on perd à tous les coups ! Et, en l’occurrence, je pense que nous devrions jouer cette deuxième période.
Comme l’a souligné le rapporteur, nous avons énormément travaillé, auditionné, amendé. Les apports du Sénat ont été considérables. Nos désaccords avec l’Assemblée nationale, certes, restent importants ; mais ils auraient mérité, selon moi, une seconde discussion, au cours de laquelle nous aurions pu montrer notre attachement aux mobilités dans les territoires et prouver la force et l’utilité du Sénat. La décision de ne pas poursuivre le débat pose la question de notre réelle volonté de participer à l’amélioration des mobilités, notamment dans les territoires ruraux.
Je trouve ennuyeux que nous nous arrêtions ainsi au milieu du gué, alors que cette loi d’orientation des mobilités est la première depuis quarante ans. Voilà quarante ans, en effet, que le sujet n’a pas été mis sur la table ; il me paraissait donc nécessaire de poursuivre le débat. À titre personnel, donc, et comme un certain nombre de mes collègues du groupe UC, je ne participerai pas au vote ; d’autres s’abstiendront, certains voteront contre, d’autres encore voteront pour. (Applaudissements sur des travées du groupe UC. – MM. Stéphane Artano et Martin Lévrier applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. Michel Vaspart, pour explication de vote.
M. Michel Vaspart. Comme vous l’aurez compris à l’écoute de mon intervention précédente, le groupe Les Républicains votera cette motion tendant à opposer la question préalable.
M. le président. Je mets aux voix la motion n° 1, tendant à opposer la question préalable.
Je rappelle que l’adoption de cette motion entraînerait le rejet du projet de loi.
(La motion est adoptée.) – (Applaudissements sur des travées des groupes Les Républicains et SOCR.)
M. le président. En conséquence, le projet de loi est rejeté.