Mme Françoise Gatel, rapporteur. Nous sommes favorables au principe de l’élargissement de la base potentielle d’actionnaires.
L’écriture juridique de l’amendement n° 673 rectifié bis nous paraît plus sûre. J’invite donc les auteurs des amendements nos 302 rectifié bis, 379, 575 rectifié et 917 à les rectifier pour les rendre identiques au premier cité. À défaut, l’avis de la commission serait défavorable sur ces quatre amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Sébastien Lecornu, ministre. J’avais levé le gage lors de la discussion générale. Je suis évidemment favorable à ces amendements. Seule la rédaction de l’amendement n° 673 rectifié bis fait référence à un décret permettant d’organiser un filet de sécurité pour la dette. Je demande donc le retrait des amendements nos 302 rectifié bis, 379, 575 rectifié et 917, et j’émets un avis favorable sur l’amendement n° 673 rectifié bis, qui offre une solution juridique idéale.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des lois.
M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Je note avec satisfaction que le Gouvernement sait lever le gage de l’article 40 quand il le juge utile ! (Sourires.)
Mme Cécile Cukierman. Excellent !
M. le président. Monsieur Mouiller, acceptez-vous de rectifier l’amendement n° 302 rectifié bis dans le sens souhaité par Mme le rapporteur ?
M. Philippe Mouiller. Oui, monsieur le président.
M. le président. Il s’agit donc de l’amendement n° 302 rectifié ter, présenté par Mmes Estrosi Sassone, Lavarde, Primas, Noël, Deromedi, Deroche, Eustache-Brinio, Boulay-Espéronnier, M. Mercier et Gruny, MM. Cambon, Babary, Cardoux et Sol, Mme Bruguière, MM. Bazin, Charon, Danesi, Milon, Mouiller, Mandelli, Courtial, Kennel, Vogel, Karoutchi, Daubresse et Bascher, Mme Lassarade, MM. Brisson, Husson, Savary et Laménie, Mme Lamure, MM. Pierre, Rapin, Hugonet, Leleux et Longuet, Mme Imbert, MM. Dallier et H. Leroy, Mme Sittler, M. Guerriau, Mme Vermeillet, MM. Lafon, Canevet et Lefèvre, Mme Vullien, M. Chevrollier, Mme L. Darcos, MM. Piednoir, Raison et Perrin, Mmes Ramond et Bonfanti-Dossat, M. Bonnecarrère, Mme N. Goulet, MM. Fouché et Cuypers, Mme Duranton et M. Gremillet, et ainsi libellé :
Après l’article 16
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 1611-3-2 du code général des collectivités territoriales est ainsi rédigé :
« Art. L. 1611-3-2. – Les collectivités territoriales, leurs groupements et les établissements publics locaux peuvent créer une société publique revêtant la forme de société anonyme régie par le livre II du code de commerce dont ils détiennent la totalité du capital et dont l’objet est de contribuer, par l’intermédiaire d’une filiale, à leur financement.
« Cette société et sa filiale exercent leur activité exclusivement pour le compte des collectivités territoriales, de leurs groupements et des établissements publics locaux. Cette activité de financement est effectuée par la filiale à partir de ressources provenant principalement d’émissions de titres financiers, à l’exclusion de ressources directes de l’État ou de ressources garanties par l’État.
« Par dérogation aux dispositions des articles L. 2252-1 à L. 2252-5, L. 3231-4, L. 3231-5, L. 4253-1, L. 4253-2 et L. 5111-4, les collectivités territoriales, leurs groupements et les établissements publics locaux sont autorisés à garantir l’intégralité des engagements de la filiale dans la limite de leur encours de dette auprès de cette filiale. Les modalités de mise en œuvre de cette garantie sont précisées dans les statuts des deux sociétés.
« Un décret précise les conditions dans lesquelles les collectivités territoriales, leurs groupements et les établissements publics locaux peuvent devenir actionnaires de cette société. Il détermine des seuils qui peuvent notamment s’appliquer à leur situation financière et à leur niveau d’endettement et qui tiennent compte de leur futur statut d’actionnaire de la société et de garant de la filiale ci-dessus mentionnée. »
Madame Delattre, acceptez-vous de rectifier l’amendement n° 575 rectifié dans le même sens ?
Mme Nathalie Delattre. Oui, monsieur le président.
M. le président. Il s’agit donc de l’amendement n° 575 rectifié bis, présenté par Mme N. Delattre, M. Artano, Mme M. Carrère et MM. Gabouty, Gold, Labbé, Roux et Vall, et ainsi libellé :
Après l’article 16
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 1611-3-2 du code général des collectivités territoriales est ainsi rédigé :
« Art. L. 1611-3-2. – Les collectivités territoriales, leurs groupements et les établissements publics locaux peuvent créer une société publique revêtant la forme de société anonyme régie par le livre II du code de commerce dont ils détiennent la totalité du capital et dont l’objet est de contribuer, par l’intermédiaire d’une filiale, à leur financement.
« Cette société et sa filiale exercent leur activité exclusivement pour le compte des collectivités territoriales, de leurs groupements et des établissements publics locaux. Cette activité de financement est effectuée par la filiale à partir de ressources provenant principalement d’émissions de titres financiers, à l’exclusion de ressources directes de l’État ou de ressources garanties par l’État.
« Par dérogation aux dispositions des articles L. 2252-1 à L. 2252-5, L. 3231-4, L. 3231-5, L. 4253-1, L. 4253-2 et L. 5111-4, les collectivités territoriales, leurs groupements et les établissements publics locaux sont autorisés à garantir l’intégralité des engagements de la filiale dans la limite de leur encours de dette auprès de cette filiale. Les modalités de mise en œuvre de cette garantie sont précisées dans les statuts des deux sociétés.
« Un décret précise les conditions dans lesquelles les collectivités territoriales, leurs groupements et les établissements publics locaux peuvent devenir actionnaires de cette société. Il détermine des seuils qui peuvent notamment s’appliquer à leur situation financière et à leur niveau d’endettement et qui tiennent compte de leur futur statut d’actionnaire de la société et de garant de la filiale ci-dessus mentionnée. »
M. François Patriat. Je retire les amendements nos 379 et 917, monsieur le président.
M. le président. Les amendements nos 379 et 917 sont retirés.
Je mets aux voix les amendements identiques nos 302 rectifié ter, 575 rectifié bis et 673 rectifié bis.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 16.
L’amendement n° 245 rectifié, présenté par MM. Cabanel, Labbé et Artano, Mme M. Carrère, MM. Castelli, Collin et Corbisez, Mme Costes, MM. Gabouty, Gold, Guérini et Jeansannetas, Mme Laborde et MM. Requier, Roux et Vall, est ainsi libellé :
Après l’article 16
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre Ier du titre II du livre Ier de la deuxième partie du code général des collectivités territoriales est complété par une section … ainsi rédigée :
« Section…
« Relations avec l’établissement public de coopération intercommunale
« Art. L. 2121-…. – Pour l’application du dernier alinéa de l’article L. 5211-39, au moins une fois par semestre, l’ordre du jour de la réunion du conseil municipal comprend l’activité de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre dont la commune est membre. »
La parole est à M. Henri Cabanel.
M. Henri Cabanel. Pour les conseillers municipaux qui ne sont pas délégués communautaires, le fonctionnement et les décisions de l’intercommunalité apparaissent souvent bien lointains. Certes, plusieurs mécanismes d’information sont d’ores et déjà prévus par la loi, et nous en avons déjà renforcé quelques-uns au début de la discussion de ce texte. Il me semble toutefois primordial de remettre de l’humain et du débat là où la transmission de rapports et de notes techniques ne suffit pas toujours à éclairer politiquement les choix de l’intercommunalité.
Cet amendement a donc pour objet de rendre obligatoire la tenue chaque semestre d’un conseil municipal consacré à l’activité de l’intercommunalité.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Gatel, rapporteur. Avis défavorable : cet amendement me semble satisfait.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Cabanel, l’amendement n° 245 rectifié est-il maintenu ?
M. Henri Cabanel. Je fais confiance à Mme la rapporteure, mais il y a tout de même un réel problème. Nous avons certes prévu l’envoi d’informations par voie dématérialisée, mais on sait que, en pratique, peu de conseillers municipaux liront ces documents. Le meilleur moyen de les informer, c’est bien l’humain et le débat.
Mme Françoise Gatel, rapporteur. Absolument.
M. Henri Cabanel. Je retire néanmoins cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 245 rectifié est retiré.
L’amendement n° 311 rectifié, présenté par M. Karoutchi, Mmes M. Mercier et Deromedi, MM. Sido et Brisson, Mme Dumas, MM. Lefèvre, Laménie et Kennel et Mmes Bruguière et Micouleau, est ainsi libellé :
Après l’article 16
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le I de l’article L. 5215-22 du code général des collectivités territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Dans les douze mois suivant le renouvellement général des conseils municipaux, le conseil communautaire peut délibérer pour sortir du syndicat. »
L’amendement n° 312 rectifié, présenté par M. Karoutchi, Mmes M. Mercier et Deromedi, MM. Sido et Brisson, Mme Dumas, MM. Lefèvre, Laménie et Kennel et Mmes Bruguière et Micouleau, est ainsi libellé :
Après l’article 16
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le VI de l’article L. 5217-7 du code général des collectivités territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Dans les douze mois suivant le renouvellement général des conseils municipaux, le conseil métropolitain peut délibérer pour sortir du syndicat. »
La parole est à M. Roger Karoutchi, pour présenter les deux amendements.
M. Roger Karoutchi. Il s’agit de préciser que, dans les douze mois qui suivent le renouvellement général des conseils municipaux, le conseil communautaire ou, pour le second amendement, le conseil métropolitain peut délibérer pour sortir du syndicat d’électricité.
Je sais combien l’existence des syndicats d’électricité est compliquée, mais il doit être possible d’en sortir. Cela étant dit, comme je sais aussi que Mme la rapporteure va m’opposer un « non » sur un ton détestable (Sourires.) et que le ministre va probablement me renvoyer à un texte ultérieur, je retire ces deux amendements et je quitte ce débat, m’appliquant ainsi à moi-même la règle des huit heures ! (Applaudissements.)
Mme Françoise Gatel, rapporteur. La grande classe !
M. le président. Les amendements nos 311 rectifié et 312 rectifié sont retirés.
L’amendement n° 901 rectifié bis, présenté par MM. Chaize et Daubresse, Mme Deromedi, MM. Sido, Bascher, Brisson et Lefèvre, Mme Lassarade, M. Savary, Mmes Bonfanti-Dossat et Gruny, M. Mouiller, Mme Ramond, MM. Charon, Laménie, Pierre et Bonhomme, Mmes Bories et Duranton, M. de Nicolaÿ, Mme Deroche, MM. D. Laurent et Genest, Mme Sittler, MM. Husson, Vaspart, Mandelli, Chevrollier, Rapin et Bonne, Mmes Chain-Larché et Thomas et MM. Bouloux et Gremillet, est ainsi libellé :
Après l’article 16
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 5211-3-…. du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article L. 5211-4-… ainsi rédigé :
« Art. L. 5211-4-…. – Tout établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre peut participer à un groupement de commandes mentionné à la sous-section 2 de la section 1 du chapitre III du titre Ier du livre Ier de la deuxième partie du code de la commande publique quelles que soient les compétences qui lui ont été transférées mentionnées au g de l’article L. 5211-5-1. »
La parole est à M. Patrick Chaize.
M. Patrick Chaize. Je remercie mon collègue Karoutchi d’avoir retiré ses amendements, que je m’apprêtais à combattre…
Il s’agit d’autoriser les EPCI à participer à des groupements de commandes, quelles que soient leurs compétences. Cela présenterait pour eux un double avantage : d’une part, lever les difficultés que rencontrent les EPCI pour justifier de leurs besoins afin de participer aux groupements de commandes ; d’autre part, inciter à la mutualisation des achats et aux économies d’échelle permises par ces groupements.
C’est un amendement pragmatique, visant à favoriser la mutualisation.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Gatel, rapporteur. C’est une excellente idée ; la commission des lois a d’ailleurs satisfait la demande de notre collègue Chaize au III de l’article 16, qui va même un peu plus loin. Je demande donc le retrait de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Sébastien Lecornu, ministre. Je demande également le retrait de cet amendement, monsieur le président.
M. le président. Monsieur Chaize, l’amendement n° 901 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Patrick Chaize. Non, je le retire, monsieur le président, en remerciant la commission des lois d’être allée plus loin que ce que je propose et d’offrir ainsi à nos collectivités des possibilités tout à fait intéressantes.
M. le président. L’amendement n° 901 rectifié bis est retiré.
Article 17
L’article L. 1111-8 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est ainsi modifié :
a) Après le mot : « propre », sont insérés les mots : « tout ou partie d’ » ;
b) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, lorsqu’il y est expressément autorisé par ses statuts, peut déléguer à un département ou à une région tout ou partie d’une compétence qui lui a été transférée. » ;
2° Au deuxième alinéa, le mot : « délégante » est remplacé par les mots : « ou de l’établissement public délégant ».
M. le président. L’amendement n° 806 rectifié, présenté par MM. Bonnecarrère et Henno, Mme Vullien, MM. Capo-Canellas, Vanlerenberghe, Kern et Canevet, Mmes Morin-Desailly, Billon et Saint-Pé et M. Moga, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Philippe Bonnecarrère.
M. Philippe Bonnecarrère. Quelle habileté légistique et politique dans la rédaction de l’article 17 tel qu’il nous est présenté !
Nous avons engagé ce débat avec l’idée, développée tant par le Gouvernement que par les rapporteurs, de supprimer les irritants et d’aller, pour reprendre la formule d’un des rapporteurs, vers une « intercommunalité heureuse ».
Une discussion pourrait à bon droit être ouverte, à cet instant précis du débat, pour savoir si nous ne sommes pas allés trop loin dans les mouvements entre communes et intercommunalités, dans les tricotages intercommunaux ; mais une volonté très claire du Sénat s’est exprimée à cet égard depuis le début de nos échanges.
Quoi qu’il en soit, mes chers collègues, je voudrais attirer votre attention sur le fait que l’article 17, tel qu’il est issu des travaux de la commission, va vraiment beaucoup trop loin.
Après que, dans un premier temps, nous avons décidé que les communes pourront transférer à la carte ce qu’elles souhaitent à l’intercommunalité, l’article 17 prévoit que les intercommunalités seront libres de subdéléguer au département et à la région.
Il s’agit, on l’aura compris, de permettre aux départements de recouvrer la compétence économique, qu’ils sont extrêmement malheureux d’avoir perdue. Nous pouvons avoir un débat sur ce sujet entre nous, mais il faut rappeler un certain nombre d’éléments. Sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy, l’idée avait été de supprimer un échelon de collectivités territoriales ; on sait ce qui est advenu. Sous le quinquennat de François Hollande, après l’échec d’une tentative identique, c’est le principe de spécialité qui a prévalu : le département et la région ont des compétences spécifiques.
Si l’article 17 reste en l’état, on pourra faire ce que l’on veut, au nom du principe de libre administration communale, et en particulier redonner aux départements et aux régions des compétences qu’ils avaient perdues. Autrement dit, c’en sera fait du peu de cohérence qui pouvait demeurer dans la mise en œuvre de la loi NOTRe. Il me semble que l’on va trop loin : on supprime toute clarté pour l’usager comme pour le contribuable, qui ne savent plus qui est responsable ni quel est le coût.
Je me permets donc d’insister, chers collègues, sur la nécessité de supprimer l’article 17.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Gatel, rapporteur. J’entends les arguments de M. Bonnecarrère et je respecte sa position. Toutefois, il faut rappeler l’esprit de ce texte, qui vise à rendre l’action publique plus efficiente, en prenant en compte la diversité des territoires et le fait que la loi NOTRe et un certain nombre d’autres lois, mais aussi, parfois, la gouvernance des établissements publics, ont conduit nos territoires dans de vraies difficultés.
La commission a veillé à préserver l’intercommunalité. Celle-ci est nécessaire, indispensable, mais elle mérite d’être elle aussi réexaminée, comme n’importe quelle structure, pour en faire un bon outil au service des collectivités territoriales.
Monsieur Bonnecarrère, votre amendement vise à la suppression de l’article 17, mais il importe de rappeler que le dispositif de celui-ci ne constitue pas une nouveauté : la possibilité de subdélégation offerte, notamment, ne représente qu’une simple extension du droit en vigueur, qui permet déjà aux EPCI à fiscalité propre de confier la création ou la gestion de certains équipements ou services relevant de leurs attributions à toute autre collectivité territoriale. Le dispositif de l’article n’est pas incompatible avec celui de la loi NOTRe, auquel certains d’entre nous trouvent quelques vertus éminentes.
M. Loïc Hervé. Il y en a !
Mme Françoise Gatel, rapporteur. Je vous demande donc, mon cher collègue, de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, l’avis de la commission serait défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Sébastien Lecornu, ministre. Voilà un beau sujet, auquel je ne suis pas insensible, pour avoir présidé le conseil départemental quand M. Bas présidait celui de la Manche.
M. Philippe Bas, président de la commission des lois. C’était le bon temps !
M. Sébastien Lecornu, ministre. Nous avions alors adressé au président du conseil régional, qui lui est toujours en poste, un certain nombre de recommandations allant dans le sens du texte dont nous discutons ici. Une forme de jacobinisme régional les a malheureusement empêchées de prospérer…
M. André Reichardt. C’est encore le cas aujourd’hui !
M. Sébastien Lecornu, ministre. Le texte de l’article a le mérite de corriger les irritants de la loi NOTRe en matière de délégation : c’est la bonne nouvelle.
S’agissant de la méthode, nous avons pris le parti, depuis le début, de ne pas toucher, au travers de ce projet de loi, au bloc départements-région, et de renvoyer cette question au prochain texte. C’est le choix que nous avons fait en termes de méthodologie. À défaut, c’est pendant trois semaines ou un mois qu’il faudrait siéger pour examiner ce texte. (M. Jean-Pierre Sueur s’exclame.)
La rédaction actuelle de l’article renvoie aux statuts de l’EPCI et ouvre la possibilité de déléguer toutes les compétences de l’EPCI, sans aucune forme de limite ou de verrou. Or les compétences susceptibles d’être déléguées mériteraient à mon avis d’être énumérées de façon limitative. Dans le cadre de nos réflexions passées, Philippe Bas et moi-même avions pensé aux réseaux, par exemple. Le cas des zones économiques nous ramène au débat sur les compétences du département. Plus sensible est celui des documents stratégiques comme le PLUI, le plan local d’urbanisme intercommunal : une intercommunalité qui s’est vu transférer la compétence en matière d’urbanisme pourrait-elle être tentée de la déléguer à son tour à une collectivité de niveau supérieur, le département ou la région ?
Mme Catherine Troendlé. Non, évidemment !
M. Sébastien Lecornu, ministre. Par cohérence, je me garderai de répondre à cette question, puisque je suis favorable au principe de liberté. En tout état de cause, il faut quand même encadrer la délégation ascendante. C’est pourquoi je comprends les amendements de MM. de Belenet et Bonnecarrère. Il faut néanmoins avancer sur la délégation ascendante, qui est un très bel outil, auquel je crois beaucoup. Au cours de la navette ou via le texte à venir, nous devrons affiner les choses pour bien déterminer les compétences qu’il est opportun de pouvoir déléguer et, inversement, celles qui ne sauraient l’être. Il faut être très attentif à ce que l’on fait en la matière, pour ne pas créer de nouveaux irritants.
Mme Cécile Cukierman. C’est à force d’austérité qu’on en crée, des irritants !
M. Sébastien Lecornu, ministre. Aborder ce sujet, ce n’est pas ouvrir un mauvais débat, s’agissant notamment des documents stratégiques. J’émets un avis de sagesse favorable sur l’amendement n° 806 rectifié.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des lois.
M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Nous voulons simplement trouver le meilleur échelon pour l’exercice d’une compétence, quelle qu’elle soit.
Lorsque la commune peut exercer la compétence, il n’y a pas de raison que la communauté de communes l’exerce. Nous prévoyons donc la possibilité de restituer des compétences. Il faudra d’ailleurs que nous traitions la question de la neutralité financière, pour la communauté de communes, de ces restitutions de compétences à la commune.
M. Loïc Hervé. Très bien !
M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Quand, au contraire, la communauté de communes est trop petite pour exercer la compétence, il faut, si elle le souhaite et si par ailleurs le département ou la région le désirent, qu’une convention entre le département et la région permette à cette compétence d’être exercée au meilleur niveau, qui n’est alors pas celui de la communauté de communes.
Jusqu’à présent, c’est interdit pour une raison de principe très simple : on considère que la communauté de communes n’a pas la compétence de sa compétence et qu’elle ne peut déléguer à autrui ses compétences, car elle n’est pas une collectivité territoriale. Toutes les collectivités territoriales peuvent déléguer leur compétence : nous n’avons pas établi une liste de compétences qu’elles pourraient, ou non, déléguer.
Toute collectivité territoriale – c’est-à-dire la commune, le département et la région – peut déléguer sa compétence. C’est quand il s’agit de subdélégation ou quand la communauté de communes souhaite déléguer l’une de ses compétences que les questions se posent.
Nous voulons simplement, alors que se pratique déjà dans plusieurs champs de l’action intercommunale – Mme le rapporteur l’a rappelé tout à l’heure –, faciliter la délégation en introduisant plus de souplesse. Il n’y a rien à craindre de ce mouvement, pour la simple et bonne raison qu’il faut, d’un côté, que la communauté de communes soit d’accord, et, de l’autre, que le département ou la région soient également d’accord.
Je ne connais pas de communauté de communes, monsieur le ministre, qui aurait l’intention de se dépouiller de l’intégralité de ses compétences. C’est une absurdité que d’imaginer cela !
Nous proposons simplement que, en cas de besoin, le dialogue puisse s’ouvrir entre élus adultes et responsables pour essayer d’aboutir à une solution. Et parce que la commission des lois prend de grandes précautions, elle a décidé que cette faculté nouvelle, qui n’est pas une obligation, devrait figurer dans les statuts de la communauté de communes.
Or, vous le savez bien, ces statuts sont adoptés à une majorité qualifiée : soit les deux tiers des voix, représentant au moins 50 % de la population par les communes que ces voix représentent, soit l’inverse. Il faut également tenir compte du fait que la commune-centre ne peut pas, à elle seule dominer, le vote.
Je ne comprends donc pas que nous ayons un débat presque théologique sur une question fort simple. En réalité, c’est symétrique : on peut redescendre des compétences et on peut aussi en remonter, mais seulement par voie d’accord et jamais par voie d’autorité.
Mes chers collègues, il est tard. J’ai repris la parole parce que je m’étonne d’un débat aussi crispé sur une telle question. Mais peut-être n’ai-je pas tout compris.
Monsieur le ministre, puisque vous êtes favorable au principe, mais que vous trouvez notre rédaction maladroite, pourquoi n’avez-vous pas amendé notre proposition ? Cela fait quinze jours que le texte de la commission des lois est connu. En outre, ce droit d’amendement que vous n’avez pas voulu exercer devant le Sénat vous pouvez l’exercer devant l’Assemblée nationale. Nous pourrions alors en débattre avec nos collègues députés dans le cadre de la commission mixte paritaire.
Quoi qu’il en soit, j’aimerais que ce texte véhicule cette idée neuve, créative et novatrice jusqu’à l’Assemblée nationale, pour ne pas priver cette dernière d’un débat pratique, voire pragmatique, et uniquement inspiré par le désir d’être utile à notre territoire en prévoyant davantage de souplesse.
De la liberté pour nos territoires : voilà ce que nous voulons ! (M. Philippe Mouiller applaudit.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.