M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue.
M. Jean-Yves Leconte. Mais il est absolument indispensable que nous marquions notre attachement à l’accueil et que l’État s’engage complètement, dans un cadre européen, et sans stigmatisation, pour se saisir de l’opportunité qui se présente et en faire un vecteur de progrès. (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR et sur des travées du groupe CRCE.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
M. Jean-Claude Requier. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, monsieur le ministre, mesdames les secrétaires d’État, mes chers collègues, nous nous félicitons de la tenue de cette discussion, qui s’inscrit dans la continuité de l’engagement pris, en juin dernier, par le Premier ministre de tenir un débat annuel sur la politique migratoire devant les assemblées parlementaires, tant cette question véhicule d’inquiétudes, mais aussi de fantasmes et de contre-vérités, et ce à un moment où les valeurs de la République doivent être réaffirmées et, surtout, appliquées avec force et détermination.
La question migratoire nourrit de nombreux populismes, en France, comme chez certains de nos voisins. Elle entraîne même de dangereuses fractures au sein de l’Union européenne. Pour notre part, nous abordons ce débat en toute responsabilité, sans angélisme ni aveuglement, forts des valeurs de dignité que nous avons toujours défendues. Cette question est effectivement complexe ; elle confronte nos sociétés à des défis, inédits dans leur ampleur comme dans leur durée.
Depuis le pic migratoire de 2015, le nombre d’arrivées aux frontières de l’Europe a fortement faibli, cela a été rappelé. Hélas, ce reflux n’évite pas de nouvelles tragédies comme, encore récemment, la noyade de dix-huit personnes au large de Casablanca. Nul ne peut évidemment rester insensible face à de tels drames, ce qui ne doit pas nous interdire d’aborder aussi la question migratoire sous l’angle de la sécurité, de la politique intérieure et de l’intégration.
Pour autant, le premier facteur des migrations est économique ou, pour le dire autrement, lié au besoin fondamental de vivre dignement. Ainsi, bien que le taux d’extrême pauvreté dans le monde ait été divisé pratiquement par quatre depuis trente ans, 800 millions de personnes vivent encore dans un dénuement total. On compte encore trop d’États faillis ou en proie à des conflits de haute intensité pour envisager un tarissement des flux de réfugiés. N’oublions pas non plus que les migrations climatiques ne feront qu’augmenter.
Dans ces conditions, il est évident que pour nombre de ces femmes et ces hommes, migrer est avant tout une nécessité vitale. De même, pour nos pays développés, il est indispensable d’accueillir dignement et de garantir l’intégration, ce qui appelle une réponse adaptée. Avant ce débat, il aurait ainsi été utile de dresser un premier bilan de la loi du 10 septembre 2018 pour une immigration maîtrisée, un droit d’asile effectif et une intégration réussie, d’autant qu’une nouvelle réforme du contentieux des étrangers est, semble-t-il, en préparation.
La politique migratoire comporte deux axes : la lutte contre l’immigration irrégulière, en lien avec les pays de départ, et la politique d’accueil et d’intégration sur notre sol.
Le premier axe, qui se déploie à l’échelle européenne, a porté ses fruits en réduisant, je l’ai dit, les flux. Depuis 2015, l’Union européenne a mis en œuvre un certain nombre de mesures, que mon groupe a approuvées pour la plupart : accord avec la Turquie en mars 2016, mise en place des hotspots, création du centre européen chargé de lutter contre le trafic de migrants et, bien sûr, les dispositifs de relocalisation.
Néanmoins, le Conseil européen avait préconisé, à la fin de l’année 2018, d’accentuer la lutte contre les trafiquants. Où en est-on sur ce point ? Qu’en est-il du renforcement du mandat de l’agence européenne ayant remplacé l’agence Frontex, en particulier du déploiement des garde-frontières et des experts en matière de retour ?
S’agissant de l’accueil des migrants, certains points font certes polémique, mais, derrière, se trouvent des questions légitimes. Sommes-nous capables d’offrir un accueil digne aux personnes arrivant en France ? Comment bien accueillir, en fonction de nos capacités, pour permettre une réelle intégration ?
À notre sens, rien ne doit être tabou : tout dispositif peut être discuté tant qu’il s’inscrit dans les valeurs et principes de notre République.
Je pense, en particulier, à l’aide médicale de l’État, à laquelle l’ensemble de mon groupe reste profondément attaché. D’abord, elle participe du droit inaliénable à la santé pour toute personne. Ensuite, elle contribue à la protection des populations en tant qu’instrument de prévention des maladies contagieuses.
Bien sûr, nous ne sommes pas naïfs. Notre générosité n’est pas illimitée et nous ne pouvons balayer d’un revers de main l’idée de réformer ce dispositif, pour mieux le calibrer et lutter contre les abus. Pour notre part, nous attendons les conclusions de la mission d’inspection mandatée par Mme la ministre des solidarités et de la santé.
Le regroupement familial est, lui aussi, souvent pointé du doigt, pour de mauvaises raisons. Les chiffres sont en réalité très stables depuis 2013, au moins – on observe même une légère baisse –, et se situent autour de 90 000 admissions par an, sur un total de 256 000 titres de séjour délivrés en 2018.
Durcir d’un coup les conditions du regroupement familial n’est certainement pas la bonne solution pour réguler l’immigration légale, d’autant que nous sommes également liés par des engagements bilatéraux et internationaux.
Sommes-nous condamnés à ne rien faire ? Je ne le crois pas. Peut-être pourrions-nous explorer des pistes d’évolution respectueuses de nos principes, par exemple en introduisant, comme en Allemagne, le critère d’une maîtrise minimale de la langue française ou en renforçant le contrôle du respect par le candidat au regroupement familial des valeurs de la République.
Un autre sujet qui nous préoccupe est celui des quotas, un thème, monsieur le Premier ministre, que vous avez évoqué avec beaucoup d’ouverture. Il ne nous paraît pas illégitime de réfléchir à des priorités qui pourraient être fixées en fonction des besoins de notre économie, comme le font déjà d’autres pays.
S’agissant du droit d’asile, il est certain que des marges d’amélioration existent quand on sait qu’une partie des demandeurs vient de pays sûrs. Le cas des ressortissants albanais et géorgiens est souvent cité. On peut en tout cas se féliciter de l’amélioration du traitement des dossiers, ainsi que de l’augmentation des capacités d’hébergement des demandeurs d’asile, même si nous devons mieux faire.
Néanmoins, aucune réponse ne sera pérenne si elle ne s’inscrit pas dans un cadre européen. Le règlement de Dublin qui permet de se défausser sur quelques pays en première ligne, notamment l’Italie et Malte, n’est pas digne de la solidarité européenne, malgré les petits arrangements consentis au fil de la crise migratoire.
Mes collègues du RDSE et moi-même espérons que l’accord de répartition qui s’est dessiné à la fin du mois de septembre à La Valette, distinguant les demandeurs d’asile des réfugiés économiques, aboutira concrètement.
Enfin, mes chers collègues, je m’exprimerai en tant que corapporteur, avec Yvon Collin, du budget de l’aide publique au développement.
Aider les pays d’origine des migrants est une nécessité à deux égards : c’est un moyen d’établir des coopérations pour la gestion des frontières des pays de départ, mais aussi de renforcer les soutiens apportés au développement des pays offrant peu d’espoirs à leurs concitoyens. Les priorités se situent essentiellement en Afrique subsaharienne, ce dont nous rediscuterons dans le cadre du très attendu projet de loi d’orientation et de programmation de l’aide au développement.
S’agissant du niveau de l’aide, avec nos 0,44 % du revenu national brut, nous sommes encore loin de l’objectif de 0,7 % défini par le Comité d’aide au développement de l’Organisation de coopération et de développement économiques, l’OCDE. Signalons néanmoins l’effort consenti pour atteindre le taux de 0,51 % en 2022.
D’autres pays sont parvenus au taux de 0,7 % ; nous devons nous y employer. Au-delà des enjeux de migration, il est aussi question de sécurité, car le sous-développement est le terreau de la déliquescence des États et du terrorisme, avec les conséquences que nous connaissons.
Mes chers collègues, dans un monde de plus en plus ouvert, les migrations ne cesseront jamais. Notre pays s’enorgueillit de sa tradition d’accueil, conforme à ses principes humanistes. Toutefois, la réalité démontre bien que nos dispositifs d’accueil doivent être revus en profondeur, que l’intégration doit retrouver un nouveau souffle. Mon groupe veillera toujours à ce que ce défi, majeur pour la France, soit relevé en accord avec les valeurs qui honorent notre pays.
Pour conclure, mes chers collègues, ni angélisme ni catastrophisme, mais plutôt un humanisme réaliste ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE, ainsi que sur des travées des groupes SOCR et UC.)
M. le président. La parole est à M. Alain Richard, pour le groupe La République En Marche.
M. Alain Richard. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, monsieur le ministre, mesdames les secrétaires d’État, mes chers collègues, le débat qui nous réunit sur l’initiative du Gouvernement est, je crois, nécessaire pour clarifier nos choix collectifs. Tenons-le à la bonne hauteur et faisons-en un guide partagé de notre politique !
C’est la responsabilité première d’un État démocratique de décider quelles personnes peuvent être accueillies sur son territoire, et avec quel accès aux droits qui y sont reconnus.
Une limitation et une régulation des entrées sont de la nature même des missions d’un État souverain. Tous les pays neufs dans l’histoire qui se sont peuplés par l’immigration, sur le modèle des États-Unis dès le XVIIIe siècle, ont fixé des limites au droit d’entrée, en les adaptant suivant les périodes et suivant la consolidation de leur société.
Nous-mêmes, aujourd’hui, avons tous conscience de la nécessité de faire respecter de telles limites à l’accès à notre sol, pour maintenir les équilibres humains et la cohésion de notre société. Seules des doctrines extrémistes réclament l’abolition de toute frontière et tout contrôle territorial, étant observé, d’ailleurs, que ceux qui les défendent ne sont pas parmi les plus pacifiques lorsqu’ils défilent dans nos rues.
Cette régulation est la condition pour que la France assure avec succès l’intégration républicaine, qui est notre tradition et reste notre impératif pour garantir à nos compatriotes une société ouverte et solidaire.
L’immigration sous ses diverses formes représente entre 250 000 et 320 000 personnes par an, suivant l’estimation que l’on peut faire des entrées irrégulières. C’est le même ordre de grandeur que l’augmentation régulière de la population française, laquelle se situe entre 280 000 et 300 000 habitants supplémentaires par an. Bien entendu, ces deux statistiques ne résument pas à elles seules, notre évolution démographique et d’autres types de mouvements existent.
Notre connaissance, à tous ici, des réalités locales nous fait bien percevoir que ce chiffre de nouveaux arrivants est un facteur de tension dans le secteur du logement – tout particulièrement à la périphérie des grandes villes – et pèse sur nos principaux services publics, à commencer par l’enseignement et la santé.
La régulation du nombre d’entrants est donc une condition première d’une intégration accomplie pour chaque personne admise sur notre sol. Nous pouvons constater une large convergence sur ce principe simple. Les divergences apparaissent, d’abord quand on cherche à estimer le nombre préférable, et surtout quand on veut décider et appliquer les moyens concrets qui seront employés pour écarter les entrées dont nous ne voulons pas et que nous devons refuser.
À ce sujet, je souhaite marquer une distance, monsieur le Premier ministre, face à l’idée de quotas d’immigration qui revient encore.
La plus grande part des entrées sur notre sol est issue de processus de rapprochement familial, d’accès aux études supérieures et d’asile politique. Seuls les séjours étudiants peuvent faire l’objet d’une limitation légitime, et c’est déjà fait, ainsi que l’immigration professionnelle, qui, cela a été souligné, représente la plus faible composante du flux, dépassant à peine 10 %. On ne fixera de quotas ni d’entrées familiales ni de titres de réfugiés.
Les points noirs de notre situation se situent à trois niveaux : le traitement des demandes d’asile, le mouvement des mineurs isolés et la coordination européenne insuffisante dans l’espace de libre circulation.
L’asile politique est une obligation souscrite par notre pays, comme par 140 autres, pour protéger les personnes menacées dans leur vie par la violence régnant dans leur pays. Nous ne pouvons faillir à cette obligation, qui répond impérativement à nos engagements et aux fondements humanistes de la République.
En revanche, la lucidité élémentaire nous oblige à constater que chaque année les deux tiers des demandes d’asile présentées en France se révèlent injustifiés après, pourtant, un examen scrupuleux par l’Ofpra et par la justice, avec d’extrêmes garanties de droits de la défense. Or ce n’est pas un hasard malencontreux. La plupart de ces demandes injustifiées sont présentées pour obtenir en réalité une voie d’immigration non contrôlée. L’abus organisé du droit d’asile est un défi à notre système de droit, auquel nous avons le devoir de remédier, faute de quoi l’exercice de ce droit d’asile sera lui-même atteint.
Le déroulement de l’examen des demandes, la situation dans laquelle sont placés les demandeurs pendant la procédure et les modalités de leur contrôle sont à réexaminer encore plus rigoureusement. Car la situation actuelle, certes en évolution, aboutit à ce qu’une grande majorité des personnes dont la demande d’asile est injustifiée et rejetée se maintiennent sur le territoire en toute irrégularité. C’est un effectif compris entre 50 000 et 70 000 personnes, chaque année, qui se trouve installé sur notre territoire sans remplir aucune des conditions requises.
Nous ne devons pas laisser se perpétuer un circuit de fraudes, minant l’application de tout notre droit. Nous avons légiféré pour rétablir la norme. Nos voisins de l’Union européenne ne sont pas confrontés à un tel phénomène de détournement – en tout cas pas avec la même ampleur. Nous devons donc, avec vous, mesdames, messieurs les membres du Gouvernement, poursuivre nos efforts pour une véritable application de la loi sur l’asile.
Autre source préoccupante d’entrées irrégulières, le mouvement des mineurs isolés est aussi, de manière massive, le résultat de l’activité de filières organisées. Ce n’est pas par une démarche individuelle et improvisée que des milliers de jeunes détruisent leurs documents d’identité, juste après avoir franchi le contrôle à l’aéroport, et se dirigent directement vers le service d’aide à l’enfance, dont l’adresse est enregistrée sur leur téléphone portable. La manière purement sociale dont nous essayons de gérer cette fraude organisée ne peut suffire.
À cet égard, monsieur le ministre de l’intérieur, je suis obligé de répéter une question à laquelle, pour l’instant, je n’ai pas reçu de réponse de la part de l’exécutif. Alors que ce flux d’entrées me paraît atteindre 15 000 à 20 000 personnes supplémentaires par an, je n’arrive pas à savoir si des phénomènes de même ampleur sont constatés dans les autres pays de l’Union européenne. Si ces derniers n’enregistrent pas de chiffres comparables, comme je le crois, quelles méthodes conformes au droit ont-ils mises au point qui nous seraient inaccessibles ?
Dans ces deux domaines, il n’est pas viable que nous continuions à énoncer une politique largement partagée et que nous échouions à la concrétiser.
J’en termine par le sujet, trop large pour notre temps de débat de ce jour, du rapprochement entre Européens.
Je voudrais simplement, sans casser l’ambiance, insister sur une réalité contrariante : il s’agit d’une compétence souveraine des États de l’Union européenne qui n’a été mise en partage communautaire par aucun traité.
M. Laurent Lafon. Absolument !
M. Alain Richard. Nous pouvons tous, en choisissant des mots rassurants – je les ai encore entendus –, parler de « politique européenne » de telle ou telle composante de l’immigration. Mais attention à ne pas être trompeurs ! Schengen, Dublin : nous parlons de traités entre États souverains, laborieusement négociés jusqu’à obtenir l’accord de pays aux approches et aux situations profondément dissemblables.
Mon groupe ne peut donc qu’encourager le Gouvernement, qui, suivant les engagements du Président de la République, fait tous ses efforts pour établir des positions communes, conclure des accords partiels ou temporaires. Nous en avons impérativement besoin pour faire converger un contrôle digne et équitable de l’immigration avec la libre circulation dont jouissent nos 460 millions de concitoyens.
C’est un travail contraignant, lent et pas toujours promis au succès. Ainsi, j’entends les uns et les autres expliquer qu’il faut reprendre le règlement de Dublin de A à Z, compléter ou revoir les accords de Schengen, mais quand trouvera-t-on un accord entre l’ensemble des pays membres et que fera-t-on tant qu’on ne l’aura pas obtenu ?
Pendant ce temps-là, développons au moins les coopérations pratiques entre États volontaires et les comparaisons professionnelles. Par exemple, pour une même nationalité, pourquoi les taux d’acceptation sont-ils si différents entre ceux qui sortent de l’Ofpra et ceux qui sortent des organismes équivalents dans le reste de l’Europe ? En tout cas, essayons de retrouver un contrôle qui, aujourd’hui, nous échappe partiellement.
M. le président. Il faut conclure.
M. Alain Richard. Cette méthode pragmatique, mais exigeante, suppose d’agir efficacement à chaque étape du processus. C’est la seule voie pour garder la boussole qui doit guider notre politique d’immigration, en fixant des principes clairs d’ouverture et en combattant lucidement les mécanismes qui cherchent à les contourner.
Si le débat d’aujourd’hui nous aide à clarifier ces principes, en dialoguant de façon rationnelle et tolérante entre nous et avec l’exécutif, nous aurons accompli notre devoir : éclairer l’avenir du pays ! (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM, ainsi que sur des travées du groupe UC. – M. Gérard Longuet applaudit également.)
M. François Patriat. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Stéphane Ravier, pour la réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe.
M. Stéphane Ravier. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, monsieur le ministre, mesdames les secrétaires d’État, mes chers collègues, « l’immigration est une chance pour la France ! » Telle est depuis une trentaine d’années la devise, sinon de la République, du moins d’une classe politique qui a tout renié, jusqu’à laisser mourir l’identité du peuple français. Regroupement familial, effacement des frontières, discrimination positive à l’embauche, assistanat social,…
Mme Annick Billon. Ah !
M. Stéphane Ravier. … droit d’asile, faux mineurs mais vrais clandestins majeurs : vous avez créé toutes les conditions d’une véritable submersion migratoire.
Alors, l’immigration est une chance, mais pour qui ? Assurément pas pour nos compatriotes. Pour une caste politique, elle a permis de sauver quelques élections grâce à ces nouveaux Français. (Mme Cécile Cukierman s’exclame.) Pour d’autres, elle a permis de recevoir des subventions publiques et d’affréter des bateaux pour ramener des clandestins des côtes libyennes jusqu’en Europe.
Les chiffres sont éloquents : en 2016, seuls 7 % des étrangers qui se sont installés chez nous étaient munis d’un contrat d’embauche. L’immigration n’est plus, et depuis longtemps, une immigration de travail, mais une immigration de peuplement pour assistés sociaux. Pour nos compatriotes, la facture est exorbitante.
Je vous le dis solennellement, mes chers collègues, je ne crois pas à la théorie du grand remplacement. En revanche, je suis convaincu de sa réalité. (Rires et exclamations sur les travées du groupe CRCE.) Je n’évoquerai pas, moi, « le bruit et les odeurs » si chers au Président disparu, mais ces zones qui se comptent par centaines à travers le pays et qui sont devenues des enclaves étrangères, des zones de non-France où la haine de tout ce qui est français se répand comme une traînée de poudre.
Nos lois, notre culture, notre identité, notre savoir-vivre, notre savoir-être, nos libertés – celles des femmes en particulier –, comme les libertés sexuelles et religieuses,…
M. Pierre Laurent. Celles que vous n’avez jamais défendues !
M. Stéphane Ravier. … sont rejetées, combattues, pour être, elles aussi, remplacées sous les coups d’un communautarisme islamiste militant.
L’idéologie du vivre ensemble s’écroule sous le poids de la réalité d’une immigration chaque jour plus violente et conquérante, qui met en danger notre unité nationale et républicaine.
Seuls ceux qui en ont les moyens en réchappent, et parmi ceux-là, vous tous ou presque mes chers collègues ! Car si la classe politique est favorable au vivre ensemble, elle ne s’inflige pas le « vivre avec ».
L’immigration, c’est comme les éoliennes : ceux qui en défendent l’installation refusent d’en voir à côté de chez eux. (Exclamations sur les travées du groupe CRCE.)
M. Jean-Pierre Grand. C’est scandaleux de dire ça !
Mme Éliane Assassi. Arrêtez-le !
M. Stéphane Ravier. Mes chers collègues, votre politique d’immigration a aussi le coût du sang. Du Bataclan à Nice, de Laura et Mauranne à Thimothy ou à Théo, c’est notre jeunesse qui est sacrifiée sur l’autel d’une idéologie destructrice. Sur le plan social, la politique d’immigration relève de la provocation. Alors que chaque jour de nouveaux sacrifices sont exigés des Français, l’immigration continue d’être un tonneau des Danaïdes.
M. Loïc Hervé. Ah !
M. Stéphane Ravier. Le coût de l’AME, qui bénéficie aux seuls clandestins, est passé de 400 millions d’euros il y a quinze ans à 1 milliard d’euros aujourd’hui.
Les Français ne s’y trompent plus, ou plutôt vous ne les trompez plus. Ils sont majoritaires à refuser ce suicide national. Les Français en ont marre, les Français en ont assez ! Voilà quarante ans qu’ils se poussent, qu’ils consentent des sacrifices, qu’ils accueillent « l’autre », et qu’ont-ils obtenu en retour ? Le développement d’un insupportable racisme anti-Français, anti-blancs, anti-chrétiens !
Mme Esther Benbassa. Ah !
M. Stéphane Ravier. Nos compatriotes refusent la submersion. Ils refusent de devenir des étrangers dans leur propre pays : alors, vous menacez, vous censurez, et vous traînez devant les tribunaux ces résistants qui refusent de collaborer. (Protestations diverses.)
Mme Cécile Cukierman. Ce n’est pas la bonne histoire !
M. Jean-Pierre Grand. C’est dégueulasse !
M. Pierre Laurent. Les résistants, vous les clouez au poteau d’exécution !
M. Stéphane Ravier. Comment pouvez-vous avoir les yeux aussi grand fermés devant ce phénomène unique dans l’histoire de l’humanité et des nations : l’explosion démographique mondiale !
Loin d’en prendre conscience, et fidèle à son « en même temps », Emmanuel Macron parcourt l’Europe pour sanctionner les pays qui refusent les quotas de migrants, et il s’apprête à faire de Marseille un port d’accueil pour les clandestins de la Méditerranée.
M. Jean-Pierre Grand. Et ça ne vous empêche pas de vous baigner dedans !
M. Stéphane Ravier. Marseille ! Marseille qui subit déjà une situation migratoire, sociale et sécuritaire explosive ! C’est une provocation que je continuerai à défendre – pardon, à dénoncer… (Rires et exclamations. – Applaudissements sur des travées du groupe UC.) Je la dénonce depuis longtemps, et je persisterai, même si cela doit me coûter une mise en examen, comme c’est le cas aujourd’hui : car, dans ce beau pays de France, un parlementaire qui dénonce un trafic d’êtres humains se retrouve devant les tribunaux !
Face à ce danger mortel qui menace notre nation et l’Europe de Charlemagne, de Charles Martel,…
M. Jean-Pierre Grand. De grands humanistes !
M. Stéphane Ravier. … de Charles Quint, personne ne nous fera taire ; nous attendons bien autre chose que ce faux débat !
Les seules questions qui devraient vous animer sont celles-ci : avons-nous, nous, Français, le droit de vivre en France selon nos traditions et notre identité ? Avons-nous le droit de rester ce que nous sommes et de transmettre à nos enfants ce que nous avons reçu de nos parents ? Avons-nous le droit de demeurer français dans une France française ?
Nous connaissons la réponse, et le sursaut national ne peut donc venir d’aucun d’entre vous : aussi, pour toutes les victimes de votre folle politique d’immigration, pour les victimes sociales, économiques et identitaires, pour toutes ces familles dont la vie a été détruite sous les coups de l’immigration sauvage, je vous demande, mes chers collègues, de droite comme de gauche, car vous êtes tous responsables de ce désastre, je vous demande de vous excuser ! (Vives exclamations.)
Mme Éliane Assassi. Mais bien sûr !
M. Stéphane Ravier. Excusez-vous pour avoir menti ! Excusez-vous pour avoir trahi !
M. le président. Il va falloir conclure.
M. Stéphane Ravier. Excusez-vous – je conclus, monsieur le président – en instaurant la préférence nationale dans tous les domaines,…
M. Patrick Kanner. Lamentable !
M. Stéphane Ravier. … en rétablissant les frontières, en mettant en place, non pas des quotas d’immigration, mais des quotas d’expulsion !
Excusez-vous en inversant le courant de l’immigration !
Plusieurs sénateurs du groupe CRCE. C’est terminé !
M. Stéphane Ravier. Si vous refusez, si vous ne renoncez pas à votre idéologie mortifère, bien avant la postérité, c’est la France qui vous maudira ! (Exclamations et protestations diverses. – Mme Claudine Kauffmann applaudit.)
M. Fabien Gay. Allez, et à l’année prochaine !
M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Mme Éliane Assassi. Monsieur le Premier ministre, monsieur le ministre, mesdames les secrétaires d’État, l’immigration n’est pas un tabou, mais bien votre totem. À preuve, avec près de vingt réformes en trente ans, un an après que la loi Asile et immigration de M. Collomb a été promulguée, nous voici de nouveau à débattre de la politique migratoire de la France et de l’Europe : il n’y a pas besoin de trouver un justificatif pour ce débat.
Alors, on peut s’interroger. Que s’est-il passé depuis le vote de la dernière loi ? Pourquoi proposer un débat sous ce format précis ? Est-ce pour revenir sur les dispositifs les plus graves de la loi Collomb, tels que la suspicion généralisée à l’égard des demandeurs d’asile et la multiplication du recours à l’enfermement administratif, y compris d’enfants, ou encore les expulsions vers des pays en guerre ? Est-ce pour améliorer les conditions d’accueil dans les préfectures ?
Monsieur le Premier ministre, je vous ai écouté lundi à l’Assemblée nationale et cette après-midi au Sénat : visiblement, ce n’est pas le cap voulu. En résumé, la dernière loi adoptée en matière d’immigration était déjà très dure, et vous venez aujourd’hui nous expliquer comment être encore plus dur.
Je ne m’y attarderai pas longtemps, mais les visées politiciennes et électoralistes évidentes que recèle ce débat sont dangereuses : comme on l’a encore entendu il y a quelques secondes, elles ouvrent les vannes de logorrhées haineuses, violentes, vulgaires, mêlant sans vergogne religion et nationalités, de la part de négationnistes et de personnages condamnés pour propos racistes.
Mais revenons à notre sujet. La crise économique, sociale et environnementale que traverse notre pays est profonde. Elle provoque colère et angoisse, à l’origine en particulier du mouvement des « gilets jaunes ». Pourtant, le fameux grand débat national nous aura au moins enseigné ceci : les questions migratoires sont loin d’être parmi les premières préoccupations des Français (M. Alain Richard manifeste sa circonspection.) ; de ces Français que le Président de la République essaie d’opposer aux immigrés, bien sûr responsables de tous les maux des classes populaires, qui en seraient les victimes, les bourgeois étant exonérés de tout soupçon raciste…
Au-delà du mépris indécent que révèlent de tels propos, ce discours est pour le moins simpliste, les immigrés constituant aussi le tissu social des classes populaires.
S’il voulait se soucier des classes populaires, le Président de la République ferait mieux d’agir pour développer les services publics, pour améliorer d’urgence les conditions de vie, en termes de logement, de santé, de transports par exemple, et pour lutter contre la précarité et le chômage dans nos territoires, notamment en Seine-Saint-Denis. Je l’invite d’ailleurs à venir y constater que, malgré des conditions de vie quelque peu difficiles, le « vivre », le « ensemble », le « vivre ensemble » subsistent.