M. Loïc Hervé. Quel suspense ! (Sourires sur les travées du groupe Union Centriste.)
M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Bertrand. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Anne-Marie Bertrand. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, l’État ne peut pas tout, et les 1,3 million d’associations sur notre territoire en sont quelque part la preuve.
Nos concitoyens s’investissent avec ferveur dans la vie publique. Ainsi, un Français sur quatre est bénévole et un foyer sur deux fait des dons à une association.
Nous pouvons en être fiers, comme nous le sommes de nos élus municipaux, dont, je le rappelle, 370 000 sont bénévoles. Ils sont les artisans de la citoyenneté. Ces forces vives permettent à tous de se rencontrer, à travers une passion commune, mais aussi des convictions.
En effet, à l’évocation de ce statut, nous pensons spontanément aux associations caritatives, culturelles ou aux clubs sportifs. Mais leurs activités sont très variées. En tant qu’ancien maire, je peux affirmer que le tissu associatif est une véritable richesse pour une commune.
Je souhaite profiter de cette tribune pour évoquer, devant vous, une association que nous connaissons peu : l’Association d’Aide Pénale. Elle a été créée en 1978 afin d’apporter son concours au traitement de la délinquance et de contribuer à l’insertion sociale. Avec le temps, ses missions se sont élargies, allant jusqu’à la médiation pénale en 1990, à la réparation pénale en 1993, à l’organisation de stages de sensibilisation à la violence en 2011 et, enfin, en 2012, aux stages de soutien à la parentalité.
Au vu de ces missions, pouvons-nous véritablement parler d’association au sens commun du terme ? Cette association joue un rôle d’auxiliaire de justice puisqu’elle est agréée par des tribunaux et chargée de la mise en œuvre de mesures ordonnées par des magistrats.
Je souhaite ici démontrer que les associations pallient trop souvent les manquements de l’État. Ce dernier ne doit en aucun cas se défausser ni se satisfaire de la situation.
En ces temps où la menace terroriste pèse sur chaque événement, nous demandons de plus en plus aux associations d’assurer elles-mêmes la sécurité de leurs manifestations, notamment via des entreprises spécialisées. Au-delà du coût, où est l’autorité de l’État ? Le général Bertrand Soubelet titrait un de ses livres : Sans autorité, quelle liberté ? Rappelons que la liberté d’association ne vaut que si elle peut s’exercer.
Ce texte entend encourager une « philanthropie à la française » et je m’en réjouis, car cela va vers plus de responsabilisation et une prise en main de la chose publique par nos concitoyens. Cependant, cette philanthropie ne doit pas faire oublier à l’État qu’il doit se reformer afin de réaliser de réelles économies.
Comprenez que nous ne pouvons pas encourager nos concitoyens à financer davantage les associations et « en même temps » – pour reprendre une expression à la mode – ne pas réduire leurs prélèvements obligatoires lorsque ces associations prennent, d’une certaine manière, le relais d’une administration trop lourde.
Nous évoquons souvent les doublons au sein des collectivités, mais nous pouvons et devons également nous interroger sur des doublons entre les institutions et les associations, car toutes, répétons-le, ont directement ou indirectement la même source de financement : nos concitoyens.
Comme beaucoup ici, je souhaite un État délesté et fort là où il doit l’être. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste.)
M. le président. La parole est à Mme Nadia Sollogoub. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)
Mme Nadia Sollogoub. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le monde associatif a explosé. Il est désormais un acteur incontournable de la vie économique. Ses missions se sont multipliées.
Là où aucune collectivité n’a la fameuse « compétence », ni parfois les moyens, pour répondre à certaines attentes et besoins de la population, le monde associatif, tel un petit soldat providentiel, se lève et propose ses services.
Les associations, désormais, rendent des quasi-services publics : il est grand temps que le législateur leur facilite la tâche.
Alors, quelle bonne nouvelle que ce texte, qui présente un caractère d’urgence ! Enfin, on se penche sur ce sujet.
Si la complexité administrative devenait rédhibitoire, si le monde associatif renonçait, alors il n’y aurait plus personne pour relever le défi et faire vivre la pratique sportive, artistique, mais également l’humanitaire, le social, les associations environnementales, la défense des consommateurs, l’enseignement privé, les Ehpad associatifs, les fédérations, les œuvres, les centres sociaux et autres services d’aide à domicile, qui sont parfois devenus les plus gros employeurs de nos territoires.
Ce texte, entre autres dispositions, prévoit que les parlementaires puissent siéger dans les commissions d’attribution du FDVA. Nous connaissons la plupart de nos associations, nous connaissons leurs acteurs et leurs actions. En retrouvant une place légitime dans cette instance, nous participerons concrètement au soutien de ce maillage de nos territoires.
L’article 3 propose également une mesure très intéressante. Nous connaissons tous, en effet, le cas des associations, qui, devenues « sans objet » ou ayant perdu leurs leaders, tombent dans un profond sommeil. Telle Blanche-Neige, elles attendent le baiser qui les ramènera à d’autres aventures. (Sourires.)
M. Loïc Hervé. C’est beau !
Mme Nathalie Goulet. Mais un peu sexiste !
Mme Nadia Sollogoub. Elles gèlent des trésoreries qui seraient fort utiles à d’autres causes. Ces comptes dits inactifs pourraient être fléchés vers le FDVA. Il nous faudra seulement veiller à ce qu’ils ne s’égarent pas en route vers les gouffres sans fond d’autres déficits totalement étrangers à l’affaire.
La mesure, par ailleurs, n’aura de sens que si elle vient s’ajouter aux fonds d’État fléchés chaque année vers le monde associatif, et non pas permettre un retrait discret des finances publiques devant l’arrivée de cette manne providentielle.
Sans entrer dans le détail des autres dispositions, je dirai que, dans sa globalité, ce texte recevra le soutien du groupe Union Centriste, pour la souplesse et la dynamique qu’il apporte, pour son ouverture à la mutualisation et au secteur privé, la seule limite étant de ne pas apporter de contrainte supplémentaire aux collectivités.
Pour aller encore plus loin, je souhaite profiter de l’occasion pour attirer votre attention, monsieur le secrétaire d’État, sur une proposition portée initialement par notre collègue Catherine Troendlé.
Les associations sans but lucratif organisent un nombre toujours plus grand de manifestations, qui contribuent à l’attractivité de la vie locale. Pour ce faire, elles recourent bien souvent de façon ponctuelle à des aides de type gardiennage, manutention, service, entretien, etc. Pour tous ces emplois, et sans aucune dérogation, il faut réaliser, chaque fois, des déclarations à l’Urssaf, même pour un poste occupé quelques heures.
Cette lourdeur administrative les étouffe.
C’est pourquoi nous proposons, pour les associations à but non lucratif, une dérogation, dans la limite de six fois par an, à ces obligations déclaratives. Ce serait un simple alignement de la réglementation sociale sur la réglementation fiscale, puisque la loi exonère les recettes de six manifestations annuelles. Je vous remercie d’étudier cette disposition, qui entre parfaitement dans le cadre des débats de ce jour, raison pour laquelle je me suis autorisée cette digression.
En pensant à toutes les associations que nous croisons quotidiennement, de la plus petite jusqu’aux énormes vaisseaux, je réalise que tous les acteurs ont le même visage. Le visage de l’engagement, le visage de la passion pour une cause, le visage de mon voisin. Il faut savoir le voir, le reconnaître, le regarder droit dans les yeux, lui donner ce dont il a besoin pour continuer – j’ai bien entendu, monsieur le secrétaire d’État, que tel était votre souhait –, faute de quoi, il rentrera tout simplement un jour chez lui.
M. le président. Il faut conclure, ma chère collègue.
Mme Nadia Sollogoub. J’attire une nouvelle fois votre attention sur le fait que personne, à ce jour, n’a les moyens humains et financiers de remplacer le monde associatif et son armée de bénévoles. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste. – M. Jean-Claude Requier applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Guillaume Chevrollier. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Guillaume Chevrollier. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la France compte aujourd’hui 1,3 million d’associations et 13 millions de bénévoles. C’est une richesse extraordinaire. Je le mesure chaque jour dans mon département où il existe une réelle dynamique associative.
J’ajoute que le nombre de personnes souhaitant s’engager ne cesse d’augmenter. C’est une bonne nouvelle : cela veut dire que la France sait se montrer solidaire.
Cette solidarité, il faut l’encourager, surtout dans une société où les rapports interpersonnels peuvent parfois être violents, où les repères de notre modèle démocratique sont bousculés, où le relativisme a cassé tous les repères existants et où l’individualisme est croissant.
Tocqueville définit ainsi l’individualisme dans De la démocratie en Amérique : il s’agit du « désintérêt pour les affaires publiques » et de « l’amour des jouissances matérielles ». Cet individualisme menace la responsabilité politique du citoyen à l’égard du bien commun. C’est ce contre quoi nous devons lutter et c’est ce que permet justement l’engagement associatif : bâtir une société plus solidaire, active, concrète, au plus près des réalités quotidiennes. J’imagine que nous partageons tous ce constat.
Avec cette proposition de loi, qui vise à améliorer la trésorerie des associations, on ne peut s’empêcher de penser que le Gouvernement se lance dans une opération de séduction à l’égard du monde associatif. (Mme le rapporteur approuve.) Or on ne peut pas dire, compte tenu de la politique fiscale e des évolutions législatives qu’il leur a imposées, que le Gouvernement soit totalement étranger à certaines des difficultés financières auxquelles les associations sont confrontées.
Ainsi, en 2018, 47 % des associations déclaraient être inquiètes quant à l’évolution de leur situation financière. Pourquoi ? Il y a plusieurs raisons à cela.
Tout d’abord, le Gouvernement a décidé de réduire drastiquement le nombre de contrats aidés. Entre 2017 et 2018, le nombre de ceux-ci, dans les associations, est passé de plus de 80 000 à une trentaine de milliers et 12 500 employeurs associatifs ont disparu en 2017. Il y a eu la même année la suppression de la réserve parlementaire, qui permettait aux parlementaires de soutenir les associations, souvent les plus petites,…
M. Antoine Lefèvre. Eh oui !
M. André Reichardt. Absolument !
M. Guillaume Chevrollier.… et de participer à la vitalité de nos territoires.
M. André Reichardt. Très bien !
M. Guillaume Chevrollier. Aujourd’hui, vous nous présentez un texte dont l’ambition principale est d’accompagner le développement des associations en leur permettant de renforcer leurs fonds propres et d’obtenir de nouvelles formes de financement.
Cette initiative législative vise à pallier l’absence, à l’heure actuelle, d’un plan d’action du Gouvernement, pourtant initié il y a déjà plus d’un an.
Elle reprend certaines préconisations du rapport du Mouvement associatif, remis au Premier ministre en mai 2019. Ainsi, toutes les mesures qui simplifient la gestion des associations et allègent la tâche de ceux qui s’y consacrent sont un objectif partagé.
J’aimerais revenir sur ce qui a motivé les amendements de la commission des lois et la réflexion menée par notre collègue rapporteur, Mme Eustache-Brinio.
En effet, certains articles ont été supprimés : il s’agit de ceux qui soumettaient les collectivités territoriales à des obligations de paiement ou à des limitations en matière de préemption manifestement excessives par rapport à la réalité des relations entre les associations et les collectivités sur le terrain.
Ne faisons pas peser sur le dos des collectivités des contraintes supplémentaires. Je rappelle qu’elles sont déjà soumises à une insécurité financière, avec la disparition de la taxe d’habitation et, parfois, la poursuite de la baisse des dotations.
Faisons, par ailleurs, attention à ne pas altérer la relation de confiance qui existe entre les collectivités territoriales et les associations.
Nous, au Sénat, en tant que représentants des collectivités, nous avons la responsabilité de défendre les collectivités. Certaines des contraintes prévues dans le texte initial n’étaient pas acceptables.
Le groupe Les Républicains votera ainsi le texte modifié par la commission et rappelle son soutien au monde associatif, si important dans la vie de nos territoires. Car c’est souvent dans le tissu associatif d’aujourd’hui que l’on trouve les citoyens engagés qui seront les élus de demain au service de la République. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et au banc de la commission.)
M. André Reichardt. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Alain Dufaut. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Alain Dufaut. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, un texte en faveur du monde associatif est toujours une bonne chose, surtout à l’heure où celui-ci est confronté à de graves difficultés financières. Je suis bien placé pour le savoir puisque j’ai codirigé, avec notre collègue Jacques-Bernard Magner, la mission d’information sur les conséquences de la baisse des contrats aidés dans le secteur associatif.
De tout temps, la situation financière des associations a été une préoccupation, mais, depuis quelques mois, leurs difficultés de trésorerie se sont aggravées. C’est un vrai sujet d’inquiétude pour la pérennité de nos associations et de leurs actions.
En effet, depuis le début de ce quinquennat, des signaux désastreux, d’une violence inouïe, ont été envoyés au monde associatif. La transformation de l’ISF, la hausse de la CSG, le prélèvement à la source ou bien encore les mouvements sociaux ont eu indéniablement, cela a été dit, une incidence sur la collecte de dons.
La fin des contrats aidés – 459 000 en 2016 contre 100 000 attendus en 2019 –, la baisse des subventions publiques, la suppression de la réserve parlementaire et l’inadéquation du fonds pour le développement de la vie associative sont autant de coups fatals assénés au tissu associatif.
Que dire de ce FDVA, mis en place par pur dogmatisme, qui devait être abondé à hauteur des sommes accordées à nos associations dans le cadre de l’ancienne réserve parlementaire, soit 120 millions d’euros, et qui ne l’est finalement qu’à hauteur de 25 millions d’euros ? Une fois de plus, le compte n’y est pas.
Ce gouvernement fait des économies sur le dos du monde associatif alors que les besoins sont immenses. Continuer à faire mieux avec moins n’est plus acceptable. Je vous l’assure, monsieur le secrétaire d’État, les associations sont à l’os.
J’en veux pour preuve la situation du FDVA dans mon département, le Vaucluse, en 2019. Il bénéficiait de 270 600 euros de crédits. Les services ont reçu des demandes de 191 associations à hauteur de 1 105 316 euros. Ce delta entre les sommes nécessaires pour couvrir les besoins et les crédits octroyés est abyssal : c’est dire, ô combien, que le compte n’y est pas !
Monsieur le secrétaire d’État, vous ne semblez pas prendre la mesure de la résonance sur le terrain de vos choix, dont les répercussions sont désastreuses. Les parlementaires que nous sommes, eux, le savent. Nous le mesurons au quotidien quand, dans nos départements, nous rencontrons ces bénévoles désespérés de n’avoir pu acheter de nouveaux maillots pour les équipes de jeunes ou de n’avoir pu transporter gratuitement les enfants au tournoi du village d’à côté. Nous mesurons aussi leur désarroi grandissant lorsqu’on leur demande d’être porteurs de projets innovants dans le cadre d’appels à projets de plus en plus complexes, tout en continuant de jouer un rôle pivot dans notre société.
Je porte ce combat avec énergie, car je suis convaincu que l’altruisme de ces hommes et de ces femmes impliqués dans le quotidien des autres mériterait plus de reconnaissance et beaucoup plus de considération.
C’est grâce à ces 16 millions de bénévoles que nos communes connaissent une vie culturelle, sportive et sociale particulièrement dense ; sans oublier, bien sûr, l’engagement de nos jeunes sapeurs-pompiers volontaires. Ces hommes et ces femmes de bonne volonté sont souvent, aux côtés des maires, « les premiers de cordée », dans nos villages, dans nos quartiers. Personne ne peut se substituer au travail remarquable qu’ils effectuent au quotidien.
Les remercier aujourd’hui est bien la moindre des choses et ce texte est aussi une façon de leur exprimer notre infinie reconnaissance.
Cette proposition de loi, même si elle aurait pu être beaucoup plus ambitieuse, va dans le bon sens. En prévoyant diverses mesures financières de soutien aux associations, elle donne corps à plusieurs propositions que le Haut Conseil à la vie associative réclamait depuis plusieurs années.
Il est primordial de renouer le lien de confiance avec les associations. J’espère que cette politique « du petit pas » y contribuera un peu. Car, il ne faut pas s’y tromper, elle ne corrigera pas totalement les signaux désastreux qui ont été envoyés au monde associatif depuis le début de ce quinquennat. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et au banc de la commission.)
M. le président. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
proposition de loi visant à améliorer la trésorerie des associations
Article 1er
(Supprimé)
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les quatre premiers sont identiques.
L’amendement n° 15 rectifié ter est présenté par MM. Guerriau, Wattebled, Mizzon, Henno, Fouché et Bonnecarrère, Mme Mélot, MM. Lagourgue et Canevet, Mmes Garriaud-Maylam, Noël et Kauffmann et MM. Chasseing, Paccaud, Chatillon, Nougein, Grand, Decool, Gabouty, Daubresse et Laménie.
L’amendement n° 18 est présenté par le Gouvernement.
L’amendement n° 24 rectifié est présenté par MM. Kanner, Sueur, Temal, Kerrouche et Jacques Bigot, Mme de la Gontrie, MM. Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Leconte, Marie et Sutour, Mme Conconne, MM. Vaugrenard et Magner, Mme Rossignol et les membres du groupe socialiste et républicain.
L’amendement n° 46 est présenté par MM. Mohamed Soilihi, Richard, de Belenet, Patriat, Amiel, Bargeton et Buis, Mme Cartron, MM. Cazeau, Dennemont, Gattolin, Hassani, Haut, Karam, Lévrier, Marchand, Patient et Rambaud, Mmes Rauscent et Schillinger, MM. Théophile, Yung et les membres du groupe La République En Marche.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Après le mot : « versement », la fin de la première phrase du quatrième alinéa de l’article 10 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations est ainsi rédigée : « , les conditions d’utilisation et les modalités de contrôle et d’évaluation de la subvention attribuée ainsi que les conditions dans lesquelles l’organisme, s’il est à but non lucratif, peut conserver un excédent raisonnable sur les ressources non consommées affectées à une dépense déterminée. »
La parole est à M. Joël Guerriau, pour présenter l’amendement n° 15 rectifié ter.
M. Joël Guerriau. Les associations ont des difficultés, cela a été dit, à se constituer une assise financière suffisante pour faire face aux imprévus – décalages de trésorerie, notamment –, mais aussi pour investir et se rendre visibles ou crédibles aux yeux de leurs partenaires.
L’article 1er visait à intégrer la possibilité pour les associations de conserver un éventuel excédent trop versé au-delà d’un bénéfice raisonnable, dans la définition de la subvention. En effet, bien que rien ne les empêche juridiquement de réaliser des bénéfices, les associations disposent en général de peu de fonds propres, ce qui peut constituer un obstacle à leur développement. Cette situation est liée à leur modèle économique, non capitalistique, et à la nature de leurs activités, essentiellement à but non lucratif.
Dans le cadre de la relation avec les financeurs publics, des solutions peuvent être trouvées pour faire reconnaître et appliquer le principe d’excédent raisonnable. Il s’agit de conserver une partie des fonds octroyés dans le cadre d’un financement public pour autant que les objectifs partagés aient été atteints et que l’excédent constitué relève d’une maîtrise des dépenses n’ayant pas nui à l’exécution des missions.
Tel est l’objet de cet amendement. En droit, ce qui n’est pas utilisé doit être restitué. La collectivité locale est souveraine pour décider si elle veut ou non récupérer son reliquat.
L’avantage de reconnaître un excédent raisonnable, c’est aussi d’éviter que les bénéficiaires des fonds dépensent pour dépenser, afin d’atteindre le montant de la subvention accordée. C’est donc plutôt une mesure de bon augure.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État, pour présenter l’amendement n° 18.
M. Gabriel Attal, secrétaire d’État. Je ne serai pas très long, puisque j’ai déjà abordé ce sujet dans mon intervention liminaire.
Cela a été rappelé, cet amendement tend à rétablir l’article 1er adopté à l’Assemblée nationale, qui vise à permettre aux associations de conserver et de reporter un bénéfice raisonnable sur une subvention qui n’a pas été entièrement consommée.
Il s’agit d’un article essentiel pour les associations, car il revient à les pousser à la meilleure performance, la meilleure efficience, dans l’utilisation des fonds publics. Aujourd’hui, les associations peuvent être incitées à consommer le plus vite possible la subvention qu’elles reçoivent dans la mesure où elles ne pourront pas reporter l’éventuel excédent.
Parce que nous croyons à l’efficience de leur gestion, nous voulons leur permettre de reporter l’excédent raisonnable. Je dis bien, comme l’a souligné Patrick Kanner, « leur permettre » : nous ouvrons ici une possibilité, mais personne n’est contraint à rien. C’est une flexibilité, une possibilité pour les associations de se constituer des fonds propres, afin de pouvoir investir, d’avoir davantage de prévisibilité. Voilà une mesure très importante pour leur quotidien. J’espère donc que l’article 1er sera rétabli.
M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, pour présenter l’amendement n° 24 rectifié.
M. Patrick Kanner. J’ai eu l’occasion d’évoquer l’« insécurisation » qui régnait dans le secteur associatif en raison de décisions n’allant pas dans le bon sens. Je n’y reviens pas.
On peut néanmoins regretter que toutes les précautions n’aient pas été prises. Une étude d’impact sur les effets de telles mesures sur le fonctionnement du secteur associatif aurait dû être réalisée.
Aujourd’hui, mes chers collègues, nous avons la possibilité d’adresser un signal fort aux associations en adoptant une mesure simple, qui leur permettrait de mieux fonctionner au quotidien, pour se développer, innover, investir et, finalement, remplir les missions d’intérêt général que nous-mêmes, en tant que décideurs locaux, nous leur confions bien souvent.
L’ensemble des acteurs du secteur associatif partagent le même constat. Alors que nous étions sur le bon chemin après l’examen du texte par les députés et leur vote unanime, la commission des lois du Sénat a supprimé cet article. Nous le regrettons très sincèrement.
Cet article, comme vient de le rappeler M. le secrétaire d’État, offre une simple possibilité : il permettrait aux seuls organismes à but non lucratif de conserver l’excédent d’une subvention non dépensé en introduisant la notion d’excédent raisonnable, afin de renforcer leur assise financière.
Est-il sérieux de susciter de fausses peurs pour les collectivités territoriales sur le dos du secteur associatif, lequel serait finalement trop dépensier ? Je ne le crois pas. Une telle attitude n’est pas à la hauteur du respect que nous portons tous ici au secteur associatif, comme l’ont montré les nombreuses interventions à la tribune.
La mesure proposée ne constitue en aucun cas une contrainte, je le redis. La commission des lois a évoqué des risques de tension dans les relations que les collectivités pourraient entretenir avec le secteur associatif. Or, nous le savons, c’est dans une démarche de dialogue et de confiance que nous travaillons bien souvent et, heureusement, avec nos partenaires associatifs au niveau local.
Ces partenaires doivent disposer de fonds propres afin d’avoir une visibilité budgétaire. Pour les acteurs locaux, cette bonne pratique existe déjà au quotidien sur le terrain. Nous savons que les collectivités continueront à exercer un contrôle vigilant, dans la confiance. Tel est l’esprit de cet amendement de rétablissement.
M. le président. La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi, pour présenter l’amendement n° 46.
M. Thani Mohamed Soilihi. L’objet de cet amendement est de rétablir l’article 1er dans la rédaction adoptée par nos collègues de l’Assemblée nationale. Comme cela vient d’être rappelé, cet article vise à intégrer la possibilité, pour les associations, de conserver un éventuel excédent de fonds octroyés dans le cadre d’un financement public, pour autant que les objectifs partagés aient été atteints et que l’excédent constitué relève d’une maîtrise des dépenses n’ayant pas nui à l’exécution des missions de l’association.
Cet article est très important. Nous ne comprenons pas vraiment pourquoi Mme la rapporteur a voulu le supprimer, vidant ainsi le texte d’une grande partie de sa substance.
Les associations ne disposent que de peu de fonds propres. Elles n’ont donc pas de grandes marges de manœuvre en termes de trésorerie et de finances.
Les autoriser à conserver un excédent trop versé leur permettra de renforcer la trésorerie des associations, afin qu’elles aient les moyens d’investir et de développer leur action sur l’ensemble du territoire, dans le but de remplir leurs missions d’intérêt général.
Dans sa version adoptée par nos collègues de l’Assemblée nationale, le champ d’application de cet article était limité aux seuls organismes à but non lucratif, c’est-à-dire à ceux qui souffrent le plus du manque de moyens.
Cette proposition figurait déjà dans le rapport de 2014 du Haut Conseil à la vie associative sur le financement privé du secteur associatif. C’est une mesure que nombre d’acteurs du milieu associatif appellent de leurs vœux depuis plusieurs années. Ne leur donnons pas l’impression que la représentation nationale les oublie dans un texte qui les concerne au premier chef.
M. le président. L’amendement n° 12, présenté par Mme Brulin, M. Ouzoulias et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Après le mot : « versement », la fin de la première phrase du quatrième alinéa de l’article 10 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations est ainsi rédigée : « , les conditions d’utilisation et les modalités de contrôle et d’évaluation de la subvention attribuée ainsi que les conditions dans lesquelles l’organisme, s’il est à but non lucratif, conserve un excédent raisonnable sur les ressources non consommées affectées à une dépense déterminée. Un décret pris en Conseil d’État définit ce que représente un excédent raisonnable. »
La parole est à Mme Céline Brulin.