compte rendu intégral
Présidence de M. Philippe Dallier
vice-président
Secrétaires :
M. Éric Bocquet,
Mme Agnès Canayer.
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Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu intégral de la séance du jeudi 4 juillet 2019 a été publié sur le site internet du Sénat.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté.
2
Décès d’un ancien sénateur
M. le président. Mes chers collègues, j’ai le regret de vous faire part du décès de notre ancien collègue Raymond Tarcy, qui fut sénateur de Guyane de 1980 à 1989.
3
Amélioration de la trésorerie des associations
Discussion d’une proposition de loi dans le texte de la commission
M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, visant à améliorer la trésorerie des associations (proposition n° 410, texte de la commission n° 600 rectifié, rapport n° 599).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Gabriel Attal, secrétaire d’État auprès du ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse. Monsieur le président, monsieur le vice-président de la commission, madame la rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, nous nous retrouvons une nouvelle fois pour aborder les enjeux relatifs à la vie associative, après avoir examiné ensemble la proposition de loi en faveur de l’engagement associatif. Nous travaillons à favoriser le développement des associations de notre pays, à promouvoir leur action, à assurer leur utilité sociale, leur pérennité et leur capacité de mutation, d’évolution et de diversification.
Le texte qui nous réunit cet après-midi traite d’un sujet majeur pour les structures associatives : leur trésorerie.
Comme le consacre l’adage, « l’argent est le nerf de la guerre » ; cela est d’autant plus vrai s’agissant d’associations dont les ressources sont, pour la grande majorité d’entre elles, limitées et complexes à obtenir et à élargir. Cette conviction, nous l’avons tous ici ; je la partage, en tant que secrétaire d’État chargé de la vie associative, mais aussi en tant qu’élu local, puisque, à mesure que les forums des associations se succèdent chaque année, nous prenons le pouls de ce qu’est aujourd’hui la réalité de la vie associative dans notre pays.
Nous avons lancé plusieurs chantiers pour développer et diversifier le financement des associations ou pour les aider à accroître leurs ressources. Je pense aux annonces que j’ai faites dans le cadre de ma feuille de route, que j’ai présentée le 29 novembre dernier, sur les groupements d’employeurs associatifs, pour faire des économies d’échelle, ou sur le plancher de dons à 10 000 euros, pour favoriser le mécénat des TPE et des PME dans les territoires, au plus près des organisations, dans une logique de synergie territoriale.
Cette proposition de loi intervient directement dans le cadre de ces chantiers et de cet objectif.
Elle a notamment pour objectif de lever les freins à la constitution de fonds propres par les associations, leur permettant d’investir ou de se projeter dans le plus long terme – nous savons combien c’est important pour elles. Elle a également pour objectif de leur permettre de recevoir leurs subventions dans des délais qui correspondent aux réalités de gestion quotidienne d’une association, et d’une structure en général. Elle a pour objectif, enfin, de leur permettre de profiter, par le biais du fonds pour le développement de la vie associative, le FDVA, notamment, des fonds bancaires associatifs inactifs, et donc non utilisés aujourd’hui ; ce sujet revient régulièrement dans le débat depuis maintenant plusieurs années.
Ce texte fait suite à un travail de longue haleine mené par l’ensemble des acteurs associatifs. Le Mouvement associatif a travaillé pendant un an à un rapport qui a été remis au Premier ministre il y a maintenant plus d’un an. Ce rapport, ensuite repris par un certain nombre de groupes politiques, m’a moi-même aidé à nourrir la feuille de route que j’ai présentée le 29 novembre dernier. Les mesures qui se retrouvent dans ce texte font directement écho à ce rapport du Mouvement associatif. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle ce texte a été adopté à l’unanimité par l’Assemblée nationale.
Ce vote était important ; c’est un vote en faveur des associations et du développement de leur action dans les territoires, jour après jour, au plus près des citoyens, afin de répondre aux attentes et aux besoins sociaux : animer le périscolaire, gérer un établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, mener des actions culturelles pour tous les âges, être aussi, parfois, des éclaireurs, qui nous alertent, nous, élus locaux, élus nationaux, dirigeants politiques, mais aussi, plus largement, qui alertent la société, sur des problématiques spécifiques.
Les associations sont indispensables à la vitalité de notre pays ; leur assurer des facilités complémentaires pour développer et gérer leur trésorerie, c’est participer à cette indispensable action.
Les deux ans qui viennent de s’écouler ont entretenu des doutes, des inquiétudes, parfois des critiques, dans le monde associatif, que la fin des emplois aidés a cristallisés. Cette mesure était essentielle, car il n’est pérenne pour aucune structure de bénéficier d’une forme de subventionnement déguisé, au travers d’un emploi, alors que les ressources ne sont ni stables, ni récurrentes, ni variées. Il faut penser la solidité et la pérennité des modèles associatifs en favorisant la diversification des ressources, des modèles d’organisation, des modèles économiques et des modèles de gouvernance, ainsi que le travail collaboratif, toutes ces mesures permettant une véritable structuration et un développement robuste.
Nous l’avons fait avec la baisse pérenne des cotisations sociales. Je rappelle que la transformation du CICE, le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, en baisse de charges, c’est 1,4 milliard d’euros de trésorerie rendus au secteur associatif, mesure qui se cumule, en 2019, avec les 500 millions d’euros inhérents au crédit d’impôt sur la taxe sur les salaires.
Évidemment, il est question ici des associations qui salarient, donc pas de toutes les associations, et pas, en particulier, des associations de bénévoles ; mais c’est une mesure qu’il me semble important de rappeler, puisque des associations ayant un certain nombre de salariés voient nettement la différence sur leur trésorerie.
Nous l’avons fait aussi avec le lancement, le mois dernier, des premiers postes Fonjep, financés par l’intermédiaire du fonds de coopération de la jeunesse et de l’éducation populaire, dédiés aux groupements d’employeurs associatifs dans les territoires.
Nous allons continuer à le faire en poursuivant la simplification des demandes de subvention et la hausse progressive des conventions pluriannuelles d’objectifs qui sécurisent les ressources des associations.
C’est une demande très forte qui vient des associations : elles veulent plus de prévisibilité pour ce qui concerne leurs ressources. Nous y travaillons, nous avons commencé à y travailler s’agissant de la politique de la ville, et nous poursuivons ces travaux qui nécessitent évidemment une coordination avec les collectivités locales.
L’article 1er de cette proposition de loi a été supprimé en commission. Je le regrette ; c’est pourquoi je demanderai, au nom du Gouvernement, son rétablissement. Il permet en effet aux associations de conserver les excédents raisonnables liés à une subvention publique.
Cette disposition permettrait très concrètement de renforcer des logiques de performance sans rien renier de la mission d’intérêt général portée par les associations. Cela leur permettrait également de renforcer leurs fonds propres, leur donnant les moyens, demain, d’investir et de développer leurs actions sur les territoires, dans une logique, toujours, de prévisibilité et de prospective.
L’article 1er bis, quant à lui, visait à instaurer un délai maximal pour assurer le versement des subventions publiques. La discussion autour de ce délai a été l’occasion d’échanger avec un certain nombre d’associations d’élus des territoires, qui partageaient l’idée qu’il est nécessaire de donner de la visibilité aux associations et de se fixer des objectifs réalistes. Ce délai de soixante jours, donc, a été discuté avec les associations d’élus ; son instauration donne de la visibilité et sécurise l’action des associations au plus près des citoyens tout en préservant un délai de paiement réaliste et raisonnable, à la fois pour l’État et pour les collectivités locales.
L’article 2, qui n’a pas été modifié en commission, porte une mesure indispensable pour la simplification de la vie des associations, en leur permettant de réaliser des prêts à taux zéro entre structures d’un même groupement d’employeurs ou d’une même fédération. Il s’agit aussi d’une mesure d’incitation à la mutualisation des compétences et des ressources.
Cette mutualisation est un levier majeur pour le développement du monde associatif ; pour qu’elle soit réalisée, il faudra parfois passer outre des sentiments de concurrence ou d’animosité qui ont pu exister par le passé, mais qui minent la capacité de certains acteurs à travailler ensemble.
Cette mutualisation est dans bien des cas la condition d’une dynamique plus importante, du passage à l’échelle supérieure ou, tout simplement, de la concrétisation du premier emploi, dont on sait qu’il est souvent une marche très difficile à atteindre pour des structures associatives.
L’article 3 concerne l’analyse rendant possible la récupération des fonds des comptes bancaires associatifs inactifs, lesquels, au bout de trente ans, passent dans le budget général de l’État.
C’est là un serpent de mer, qui revient régulièrement, s’agissant du financement de la vie associative. L’an passé, ce sont 1,9 milliard d’euros de comptes bancaires inactifs qui ont été versés au budget général. Quelle part de ce montant relevait de comptes d’associations qui avaient été laissées en déshérence ? Nul ne le sait, puisque le tri et l’analyse ne sont pas faits aujourd’hui.
Il y a dans ce montant une part liée aux associations, nous le savons. Il nous faut l’identifier et en évaluer le volume. Cette part, je souhaite la voir réutilisée pour le développement de la vie associative ; c’est justice que des fonds en déshérence qui étaient liés à des associations d’hier puissent finalement bénéficier à des associations d’aujourd’hui. Tel est l’enjeu, très important, de cet article 3.
L’article 3 bis est né d’une très forte attente des parlementaires. Nous en avions parlé longuement, ici, dans le cadre de l’examen d’autres textes et de la procédure budgétaire : il s’agit en effet de prévoir la présence des parlementaires dans les commissions départementales du fonds pour le développement de la vie associative.
Ces commissions paritaires regroupent les représentants de l’État, des collectivités et des associations ; désormais, elles pourront intégrer des parlementaires. Il s’agit en définitive de se caler sur le même format que celui des commissions relatives à la dotation d’équipement des territoires ruraux, la DETR. Ce choix a été fait par parallélisme des formes, mais aussi et surtout dans l’objectif d’assurer une représentation garantissant le maintien du caractère mixte de ces commissions. La diversité des regards et des expertises est indispensable pour faire les choix les plus pertinents possible pour les territoires.
L’article 4 consistait, quant à lui, à permettre aux seules structures associatives reconnues d’intérêt général et fondations reconnues d’utilité publique de bénéficier de la mise à disposition d’un bien immobilier dont la propriété a été transférée à l’État, ce que l’on appelle communément les biens mal acquis. La commission du Sénat y a ajouté des organismes qui ne sont ni sous statut associatif ni reconnus d’intérêt général.
J’entends les arguments qui ont été développés ; nous pourrons en discuter tout à l’heure. Mais j’ai la conviction que cet ajout nous éloigne de l’objectif d’aider prioritairement les associations. Je vous proposerai donc d’adopter un amendement visant à revenir à l’écriture initiale de cet article, pour rester dans un périmètre d’action cohérent.
De la même manière, je vous proposerai de réintégrer l’article 4 bis, supprimé alors qu’il ouvrait à toutes les structures associatives et fondations la possibilité de ne pas faire l’objet d’un droit de préemption, ce qui leur assurerait une sécurité juridique forte, s’agissant notamment des dons immobiliers qu’elles pourraient recevoir.
L’article 5, que vous n’avez pas modifié – je vous en remercie –, porte sur l’évaluation de la fiscalité liée aux dons ainsi que sur le modèle économique des organismes d’intérêt général, qui repose majoritairement sur la générosité.
L’article 5 bis introduit dans les textes une cohérence sémantique destinée à assurer une lisibilité et une meilleure compréhension de la générosité du public.
Mesdames, messieurs les sénateurs, le présent texte est un texte très concret, important pour la trésorerie et la vie des associations – nous le voyons. Des amendements qui ont été adoptés en commission ou qui ont été déposés et seront examinés à l’occasion de cette discussion font émerger des débats et des enjeux légitimes ; je partage la conviction qu’ils le sont.
Je prends un exemple : celui des délais qui permettent, dans le cadre d’une succession, de bénéficier d’abattements pour certains dons et legs. C’est selon moi un vrai sujet, et je travaille sur cet enjeu de l’héritage et de la succession, qui peuvent favoriser le financement de l’intérêt général. Une mission est en cours sur le sujet ; son traitement relève donc davantage, me semble-t-il, du travail de ladite mission, qui aboutira dès la rentrée, que de celui que nous effectuons autour de ce texte.
J’ai surtout la conviction qu’il nous faut aller assez vite sur cette proposition de loi, qui, je le redis, est issue d’un rapport du Mouvement associatif, dont les travaux ont commencé en 2017. C’est un enjeu pour les associations de pouvoir dès 2020 bénéficier de ces mesures, qui améliorent leur trésorerie. C’est aussi, selon moi, un enjeu pour les parlementaires de pouvoir être présents dans les commissions départementales du fonds pour le développement de la vie associative dès la session de 2020, la prochaine ; à défaut, il faudra attendre 2021 pour que les parlementaires puissent participer au choix et à l’attribution des subventions dans les territoires.
L’adoption rapide de ce texte me semble donc revêtir une importance centrale, d’autant que d’autres textes vont nous permettre de parler de ces enjeux selon d’autres perspectives. Je pense à la proposition de loi en faveur de l’engagement associatif, dont nous avons déjà débattu ici ; je pense au projet de loi de finances et à d’autres vecteurs qui pourront nous rassembler.
Je souhaite donc que nous puissions avancer, toujours dans l’optique de faciliter la vie quotidienne de nos associations, qui en ont besoin, et surtout de renforcer le lien social et la vie démocratique de notre pays, qui a besoin de ces associations partout sur le territoire. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche, ainsi que sur des travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la proposition de loi visant à améliorer la trésorerie des associations, dont nous discutons aujourd’hui, a été adoptée par l’Assemblée nationale le 26 mars dernier. Elle est issue d’une proposition de loi de Mme Sarah El Haïry, qui a ensuite été nommée rapporteure de la commission des lois de l’Assemblée nationale, et de plusieurs membres du groupe MoDem. Composée initialement de six articles, elle a été considérablement réécrite et étoffée en séance publique à l’Assemblée nationale ; elle se composait de dix articles avant son examen par la commission des lois du Sénat.
Nous sommes tous attachés au monde associatif et nous avons conscience du rôle de plus en plus important qu’il joue dans la vie de nos communes. Simplifier la gestion des associations et alléger la tâche de ceux qui s’y consacrent est évidemment un objectif partagé.
Aujourd’hui, c’est la commune qui est le premier partenaire des quelque 1,5 million d’associations actives que compte notre pays, et il existe un réel lien de confiance entre collectivités et associations. La commission des lois a cherché à préserver ce lien en refusant de faire peser sur les collectivités territoriales des contraintes excessives qui risqueraient de le fragiliser.
Il est vrai que la relation entre collectivités et associations a évolué au cours des dix dernières années. Les subventions aux associations ont baissé, tout comme les dotations aux collectivités. Pour autant, collectivités et associations continuent de travailler ensemble, généralement en bonne intelligence.
La commission a supprimé l’article 1er, qui inscrivait dans la loi l’obligation de prévoir, dans les conventions signées entre l’autorité administrative et les associations qui perçoivent une subvention, les conditions dans lesquelles l’organisme à but non lucratif peut conserver un « excédent raisonnable » sur les ressources non utilisées.
Cette notion d’excédent raisonnable, à vrai dire très mal définie, vient du droit européen. Elle renvoie à l’origine à une simple faculté. Elle s’inscrit dans le cadre très particulier du régime des subventions, qui ne sont pas considérées comme des aides d’État par les instances de l’Union. En pratique, les collectivités peuvent donc déjà, en droit, laisser une part des subventions non consommées aux associations.
Ce que prévoyait l’article 1er de la proposition de loi allait au-delà, en reconnaissant implicitement un droit à la conservation de subventions publiques sans tenir compte de la réalité des collectivités territoriales.
La commission a considéré que cette disposition imposait une contrainte supplémentaire aux collectivités dans leurs relations avec les associations, sans pour autant garantir que ces dernières auront de l’argent à conserver. En effet, si la subvention est calculée au plus juste, il n’y aura pas d’excédent. La commission a donc supprimé cet article.
Elle a également supprimé l’article 1er bis, issu de deux amendements identiques qui ont été respectivement présentés, en séance publique à l’Assemblée nationale, par le Gouvernement et par le groupe La République En Marche, sans quoi ils auraient été frappés par l’article 40 de la Constitution.
À l’instar des délais de paiement applicables aux contrats de la commande publique, le délai de paiement pour l’État, ses établissements publics, les collectivités territoriales, leurs établissements publics et leurs groupements est fixé à soixante jours à compter de la notification de la décision d’attribution ou, le cas échéant, de la survenance de l’événement prévu par la convention entraînant attribution d’une subvention. Ici encore, l’intention consistant à préserver la trésorerie des associations est tout à fait louable.
Mais telle n’est pas la réalité des collectivités territoriales. Aucune collectivité ne peut verser en une seule fois une subvention de plusieurs dizaines, voire centaines, de milliers d’euros, comme semble le prévoir le texte de l’article 1er bis. Les collectivités doivent avoir la possibilité de gérer dans le temps les subventions qu’elles versent, car elles-mêmes reçoivent leurs dotations de manière fragmentée, et de plus en plus tardivement. Inscrire dans la loi une obligation que les collectivités ne pourront pas toujours honorer paraît mettre inutilement en cause leur responsabilité et celle de l’État.
La commission a adopté sans modification les articles 2 et 3 de la proposition de loi, même si, à titre personnel, je m’interroge sur leur portée et sur leur intérêt.
Après débat, la commission a maintenu l’article 3 bis, qui tend à permettre la participation des parlementaires aux collèges départementaux de la commission régionale du fonds pour le développement de la vie associative. Cette mesure est justifiée par le fait que ce FDVA bénéficie d’une dotation qui relevait auparavant de la réserve parlementaire ; il s’agit de donner aux députés et sénateurs un droit de suivi sur ces sommes.
C’est là, à mon sens, un bien maigre palliatif à la suppression de la réserve parlementaire, dont pouvaient bénéficier certaines associations. (Murmures sur plusieurs travées.)
Mme Nathalie Goulet. Eh oui !
Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteur. En effet, les montants alloués aujourd’hui sont largement inférieurs à ceux dont les associations bénéficiaient dans le cadre de la réserve parlementaire, ce qui les pénalise.
Mme Nathalie Goulet. Absolument !
Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteur. La commission a été favorable à l’article 4, qui entend inscrire dans la loi la possibilité de confier à des associations d’intérêt général ou à des associations et fondations reconnues d’utilité publique la gestion d’immeubles saisis lors de procédures pénales. Cette disposition répond à une demande ancienne du monde associatif et peut se révéler très intéressante. La commission l’a complétée pour inclure les foncières, qui interviennent dans le domaine du logement social, dans le champ des associations susceptibles de se voir confier la gestion d’immeubles.
L’article 4 bis est issu de deux amendements identiques respectivement déposés en séance, à l’Assemblée nationale, par plusieurs membres du groupe socialiste et par les membres du groupe MoDem. Il tend à exclure du droit de préemption les aliénations à titre gratuit au profit des organisations non lucratives, et donc à instaurer une restriction du droit de préemption des communes.
Cette disposition a un passé législatif tortueux, et je tiens à saluer le travail de notre collègue Jacky Deromedi, qui était notre rapporteur sur le projet de loi ratifiant l’ordonnance du 23 juillet 2015 portant simplification du régime des associations et des fondations, ordonnance dont le Gouvernement n’a jamais mené à terme le projet de ratification. La commission a estimé que, si une collectivité décide d’user de son droit de préemption, par ailleurs très encadré, sur un bien qu’elle entend utiliser pour un projet, il n’est pas illégitime qu’elle puisse acquérir ce bien, même dans le cas d’un legs à une association, fondation ou congrégation. Elle a donc supprimé cet article.
L’article 5 consiste en une demande au Gouvernement d’un rapport sur la fiscalité des dons et legs et sur les moyens de développer et de promouvoir la philanthropie. L’Assemblée nationale travaille déjà sur cette question, et ce rapport interviendra dans ce cadre.
La commission a adopté les articles 5, 5 bis et 5 ter de la proposition de loi, et l’ensemble du texte ainsi modifié.
Incontestablement, plusieurs des mesures de ce texte peuvent être utiles aux associations. D’autres ne sont pas acceptables, selon nous, car, malgré l’importance des associations dans la vie de notre pays, elles ne sauraient être placées par la loi au même niveau que les collectivités territoriales. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)
M. le président. La parole est à Mme Maryse Carrère.
Mme Maryse Carrère. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, « Vive la République ! » : c’est par ces mots que les sénateurs conclurent leurs débats lors de l’adoption du projet de loi relatif au contrat d’association, le 22 juin 1901.
Quoi de plus républicain, en effet, qu’une loi qui, consacrant la chose publique, combinait l’objectif de laïcisation tel qu’il était recherché à l’époque et la liberté d’association, dans un contexte de peur des congrégations ?
Quoi de plus républicain qu’une loi mettant fin à un interdit de 110 ans, celui de constituer des groupements professionnels et de se syndiquer ?
Ce cadre, établi grâce à l’habileté de Pierre Waldeck-Rousseau, a résisté à l’épreuve du temps et reste aujourd’hui le socle de la vie associative française.
Nos associations sont le creuset de notre vie sociale, le rempart face à l’individualisme croissant ; aussi, je souhaite rendre hommage aux 16 millions de bénévoles que compte ce pays, ces femmes et hommes qui ne comptent pas leurs heures et n’exigent rien en retour.
Disons-le : l’objectif de cette proposition de loi déposée par le groupe MoDem à l’Assemblée nationale est louable, et notre commission, grâce au travail de sa rapporteur, a simplifié un texte qui, sur certains aspects, revenait à imposer des contraintes supplémentaires à nos collectivités.
Si je comprends les motivations de ceux qui souhaitaient, à l’article 1er, permettre aux associations de conserver un excédent de subvention, le maintien dudit article aurait posé quelques difficultés : il aurait laissé pendante la difficulté inhérente à la définition de l’excédent raisonnable et aurait, en conséquence, modifié les pratiques des collectivités, qui auraient dû faire face à la difficulté de définir avec chacune des associations la hauteur de cet excédent raisonnable.
Reconnaissons qu’il y a plus simple.
L’article 2, qui rend possibles des opérations entre associations d’une même fédération ou d’une même union nationale, va dans le bon sens, selon nous. Ce peut être un vrai outil de solidarité en cas de coup dur d’une structure, qui pourra dès lors être aidée par sa maison mère. Se posera sans doute le problème du non-recouvrement, mais, si un tel cas de figure devait se présenter, le droit commun ferait loi.
Nous approuvons également les mesures visées aux articles 3 et 3 bis.
La transformation par l’Assemblée nationale de la disposition censurée de la loi Égalité et citoyenneté permettant l’affectation du produit des comptes bancaires d’associations en déshérence gérés par la Caisse des dépôts et consignations au fonds pour le développement de la vie associative est une bonne chose.
Toutes les associations ne roulent pas sur l’or ; chaque initiative susceptible d’améliorer leur quotidien et de leur permettre d’offrir davantage de services ou de mener plus d’actions doit ainsi être encouragée.
Plus surprenante, mais tout aussi appréciable, est l’ouverture aux parlementaires de la participation aux collèges départementaux de la commission régionale du FDVA.
Ce droit de regard accordé aux parlementaires prouve peut-être que la réserve parlementaire avait toute son utilité et n’était pas, comme nous avons pu l’entendre à l’époque, « un mécanisme venant entretenir le soupçon du clientélisme ».
M. Olivier Paccaud. Ça, c’est sûr !
Mme Maryse Carrère. Deux ans après sa disparition, aurait-on quelques doutes sur une décision teintée de démagogie ?
À vrai dire, ce qui nous interroge, dans ce texte, c’est qu’il tend à s’appliquer à toutes les associations, sans distinction.
L’équilibre proposé par Waldeck-Rousseau, dont je faisais l’éloge au début de mon propos, est peu à peu dévoyé : la distinction entre les associations de droit commun et les associations cultuelles instaurées par loi de 1905 s’est peu à peu effacée.
Dans certains cas particuliers, comme celui d’associations cultuelles ayant pris la forme de la loi de 1901, la question du financement public est problématique, ce financement étant en totale contradiction avec la loi de 1905.