M. Claude Bérit-Débat. Je suis heureux de pouvoir interroger le ministre de l’agriculture et de l’alimentation, qui, lorsqu’il siégeait sur les mêmes travées que moi, en tant que président du groupe socialiste, a posé plusieurs fois des questions sur la problématique du loup aux différents ministres qui se sont succédé dans cet hémicycle. Il connaît donc bien la question.
Nous sommes confrontés depuis quelques mois en Dordogne à des attaques répétées d’un prédateur, dans un rayon de trente kilomètres, notamment sur les communes de Saint-Priest-les-Fougères, Mialet et Jumilhac-le-Grand. Chaque fois, c’est le même scénario : des veaux sont tués et laissés sur place, à moitié dévorés. On dénombre aujourd’hui une trentaine d’attaques.
Les éleveurs, qui se sont organisés en association de défense contre les prédateurs, sont très en colère : ils ne reçoivent pas de réponse pour leur indemnisation, car on ne peut pas catégoriquement mettre en cause le loup dans ces attaques. Ils sont surtout inquiets, car les dispositifs mis en œuvre dans d’autres régions, notamment les piedmonts pyrénéens et alpins, sont différents. Le préfet a toutefois réactivé la cellule « loup » et mis en place des référents.
Monsieur le ministre, que comptez-vous faire pour mieux prévenir ces attaques et indemniser les éleveurs qui y font face ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Didier Guillaume, ministre de l’agriculture et de l’alimentation. Monsieur le sénateur Bérit-Débat, je suis engagé depuis des années sur la question du prédateur.
Avant toute chose, je tiens à réaffirmer – vous ne l’avez pas fait, mais c’est important – que tous les élus et tous les parlementaires sont favorables à la biodiversité, indispensable dans notre pays. Ce rappel permet d’engager un débat aussi apaisé que possible.
C’est la première fois qu’un ministre de l’agriculture annonce que le loup n’est plus une espèce en voie de disparition, avec plus de 500 individus présents sur le territoire français. Ces déclarations ne me valent pas que des louanges, mais j’assume cette réalité. Nous avons donc élaboré un nouveau plan Loup : nous avons décidé de porter les prélèvements de 10 % à 17 % ; quant aux indemnités dont vous avez parlé, elles s’élèvent à près de 30 millions d’euros. Or je peux vous dire que ces 30 millions d’euros pourraient être facilement utilisés ailleurs, parce que les éleveurs ne veulent pas être indemnisés : ils préféreraient pouvoir faire leur métier et que leurs troupeaux ne soient pas attaqués.
En Dordogne, la question de la responsabilité des attaques se pose effectivement. S’agit-il de loups, d’animaux hybrides ou de chiens errants ? Le préfet coordonnateur Pascal Mailhos travaille beaucoup sur ce sujet, et je pense que des avancées interviendront dans les semaines à venir.
Sachez que le Gouvernement et moi-même sommes pleinement mobilisés pour faire en sorte que les éleveurs puissent continuer à exercer leur profession en toute tranquillité. Un éleveur ne peut pas sans cesse être à l’affût, stressé pour son troupeau.
Je suis pour la défense du bien-être animal et du bien-être des éleveurs, et nous allons poursuivre nos efforts de gestion du prédateur, mais, comme je l’ai dit à plusieurs reprises, entre l’éleveur et le prédateur, je choisirai toujours l’éleveur. C’est ce que je fais à la tête de ce ministère, et j’ai plutôt l’impression que les choses avancent.
M. le président. Je vous remercie d’avoir été présent à cette séance de questions, monsieur le ministre.
La parole est à M. Claude Bérit-Débat, pour la réplique.
M. Claude Bérit-Débat. Je suis le porte-parole de ce groupe d’éleveurs du nord de la Dordogne et de la Haute-Vienne qui sont confrontés, fait relativement nouveau, à l’entrée du loup sur leur territoire. Pour l’instant, ils ne trouvent pas d’interlocuteurs pour leur indemnisation, car le loup n’est pas formellement mis en cause, même s’il a été identifié dès 2015 dans un village de la Dordogne – il avait alors été abattu par un brave grand-père dans son poulailler. Les éleveurs sont très « remontés » sur cette question, si vous me passez l’expression, mes chers collègues.
Le problème de la prévention se pose également. En Dordogne, on ne peut pas, comme dans les Alpes ou les Pyrénées, utiliser les chiens patous.
vote par internet pour les élections consulaires de 2020
M. le président. La parole est à Mme Jacky Deromedi, auteur de la question n° 772, adressée à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères.
Mme Jacky Deromedi. Monsieur le ministre, à moins d’un an des élections consulaires de 2020, je souhaite appeler votre attention sur la nécessité de sécuriser le vote par internet pour ce scrutin.
Le vote par internet est un dispositif essentiel pour les Français de l’étranger, pour les élections des députés les représentant et pour les élections consulaires. En effet, certains doivent parcourir des centaines de kilomètres pour se rendre aux urnes. En pratique, les Français de l’étranger utilisent massivement le vote par internet : plus de la moitié d’entre eux ont voté en ligne lors des élections législatives de 2012.
Afin d’éviter l’échec des élections législatives de 2017, où l’État et son prestataire n’étaient pas parvenus à garantir l’intégrité de la plateforme de vote et avaient donc supprimé, à deux mois du scrutin, cette modalité d’expression démocratique, quelles mesures ont été prises pour garantir le vote par internet pour les prochaines élections consulaires de 2020 ?
Pour mémoire, en octobre 2018, après dix mois de travaux dans le cadre d’une mission d’information sur le vote électronique, nous avions formulé, avec mon collègue rapporteur Yves Détraigne, quatre mesures pour sécuriser le vote par internet en vue des élections consulaires de 2020 et législatives de 2022. Nous souhaitions en particulier que soit garantie l’organisation du vote par internet pour les élections consulaires de 2020, notamment en augmentant le nombre de tests grandeur nature et en les organisant avec suffisamment d’anticipation pour corriger les difficultés constatées, mais aussi en s’appuyant sur la direction interministérielle du numérique et du système d’information et de communication de l’État pour renforcer le pilotage du projet. Nous insistions sur la nécessité de sécuriser l’identification des électeurs participant au vote par internet en créant une véritable identité numérique, le cas échéant à partir d’outils biométriques.
L’échéance approchant à grands pas, il serait regrettable que le vote par internet soit de nouveau annulé au dernier moment, faute d’anticipation et de préparation, alors que notre pays dispose de tous les moyens techniques disponibles. Il reste seulement dix mois pour réunir toutes les conditions pour que nos compatriotes puissent exprimer leur voix de la manière la plus adaptée. Pour plus de la moitié d’entre eux, il s’agit du vote par internet.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Sébastien Lecornu, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé des collectivités territoriales. Madame la sénatrice Deromedi, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence du ministre de l’Europe et des affaires étrangères. Il m’a chargé de vous donner lecture de la réponse qu’il a préparée à votre intention.
Vous avez bien résumé le principe qui doit nous guider : le vote électronique doit être sécurisé. Cette condition sine qua non n’était pas remplie pour les élections législatives de 2017. Cependant, je peux vous dire qu’elle le sera pour les élections consulaires de 2020 et les élections législatives de 2022, comme l’a demandé le Président de la République le 4 octobre 2017.
Dans cette perspective, le ministre de l’Europe et des affaires étrangères a engagé une série de mesures.
Premièrement, s’agissant de la conduite de projet, le pilotage et le suivi du prestataire ont été renforcés grâce à la constitution d’une équipe intégrée au sein de la direction des Français de l’étranger et de l’administration consulaire et de la direction des systèmes d’information.
Deuxièmement, s’agissant du calendrier, les travaux de mise au point de la nouvelle plateforme destinée à l’élection consulaire de 2020 ont été entrepris dès 2018. Un calendrier a été établi pour homologuer la plateforme de vote début 2020. Il est, à ce stade, respecté.
Troisièmement, s’agissant de la sécurité, l’architecture de la plateforme de vote a été modifiée afin d’améliorer sa sécurité et sa robustesse.
Enfin, quatrièmement, s’agissant de l’ergonomie, le portail de vote est simplifié. L’objectif est de permettre à l’électeur, après s’être identifié, de voter en moins d’une minute. Les écrans du portail de vote ont été présentés aux élus lors de la dernière session de mars de l’Assemblée des Français de l’étranger.
Le ministère de l’Europe et des affaires étrangères a multiplié les tests ces derniers mois afin d’éprouver le système de vote et d’apporter d’éventuelles corrections.
Les équipes sont actuellement en train de passer à la vitesse supérieure, avec deux échéances capitales.
D’abord, un premier test grandeur nature impliquant 13 000 électeurs testeurs dans les postes sera organisé du 5 au 8 juillet 2019. Selon les résultats, un second test grandeur nature pourra être organisé en octobre de cette année. Il s’agissait d’une demande des élus des Français de l’étranger, à laquelle nous avons donné satisfaction.
Ensuite, une étude d’appréciation des risques numériques et de leur traitement a été lancée en juin et se déroulera sur plusieurs mois. Elle repose sur une méthode particulièrement exigeante et nous permettra de disposer d’un état des lieux précis et sans concession sur le dispositif de vote. Cela nous permettra ainsi de corriger d’éventuelles failles suffisamment en amont.
L’objectif du Gouvernement demeure une homologation de la plateforme de vote en janvier 2020.
M. le président. La parole est à Mme Jacky Deromedi, pour la réplique.
Mme Jacky Deromedi. Je vous remercie de ces informations rassurantes et intéressantes, monsieur le ministre.
L’expression démocratique des Français de l’étranger compte tout autant que celle des Français de métropole et d’outre-mer. Ne leur enlevons pas ce droit une nouvelle fois !
décrochage de metz dans l’université de lorraine
M. le président. La parole est à M. François Grosdidier, auteur de la question n° 682, adressée à Mme la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation.
M. François Grosdidier. Ma question s’adresse à Mme la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation.
Le Premier Empire avait créé deux facultés en Lorraine : l’une de sciences, à Metz ; l’autre de lettres, à Nancy.
De 1870 à 1918, l’Annexion a détruit toute vie intellectuelle et universitaire à Metz, la francophone. L’Empire allemand a investi exclusivement à Strasbourg, la germanophone. Parallèlement, la République française, légitimement, a investi massivement à Nancy, le bastion universitaire le plus avancé de la francité aux marches de l’Est.
Il faudra attendre les années soixante pour que des enseignements de première année soient dispensés à Metz, depuis l’université de Strasbourg, et pas depuis celle de Nancy.
Enfin, c’est seulement en 1968, soit cinquante ans après le retour à la République, que la loi Faure a permis la création de l’université de Metz.
Aujourd’hui, plus de cent ans après le retour de la France, Metz reste très gravement sous-dotée par rapport à son bassin de population.
Metz a accepté la fusion des universités de Lorraine en 2012, convaincue que les sites seraient plus forts ensemble et se développeraient d’autant mieux. Cependant, le risque était fort pour Metz, en acceptant cette fusion, de figer la disproportion entre les deux sites, voire de l’accroître. Ce risque, hélas, se vérifie.
Au lieu de se réduire, l’écart se creuse. Metz a toujours un site universitaire sous-dimensionné par rapport à ses bassins de vie et d’emploi. S’agissant de la gouvernance, sur les onze directions opérationnelles, une seule siège à Metz. La répartition des contrats doctoraux est également inéquitable.
La Lorraine Nord compte 1,5 fois la population de la Lorraine Sud, mais seulement 30 % des étudiants lorrains, et cette proportion continue de diminuer.
Le nombre d’ingénieurs formés à Metz est également en baisse, alors que les besoins de son bassin industriel sont incontestablement plus importants.
L’école nationale d’ingénieurs de Metz, l’ENIM, a perdu 6 millions d’euros de budget.
Le dernier épisode du refus du projet de création de l’école d’ingénieurs Mista a été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase, chacun s’apercevant, dans chaque unité, que la gouvernance nancéienne lésait Metz.
J’aurai trois questions.
Le Gouvernement a-t-il conscience de ce retard historique, qui pénalise Metz et la Lorraine Nord en matière universitaire ? Certes, ce retard résulte des avatars de l’histoire, mais les décisions actuelles entraînent son accroissement plutôt que sa réduction.
Dans ce système où Metz est marginalisée, est-il possible d’imaginer des règles de gouvernance et des principes équitables de gestion et de répartition ? Si cela s’avérait impossible, une scission est-elle possible ou Metz doit-elle chercher les voies de son développement dans des partenariats avec de grandes écoles ou des universités étrangères déjà implantées ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Sébastien Lecornu, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé des collectivités territoriales. Monsieur le sénateur, je vous prie d’excuser Mme Frédérique Vidal, ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation.
La riche histoire, que vous avez rappelée et qui a conduit à la fusion des universités de Nancy et de Metz, témoigne de l’intérêt de la création de ce grand établissement afin de doter la Moselle comme la Lorraine et la majeure partie du territoire du Grand Est d’une offre complète en matière de formation et de recherche.
Tout d’abord, je tiens à rappeler qu’il ne revient pas au Gouvernement, conformément à l’esprit de la loi relative aux libertés et aux responsabilités des universités, de commenter ou de remettre en cause le caractère des décisions prises par telle ou telle université dans le cadre de son autonomie.
Par ailleurs, votre question laisse entendre que la création de l’université de Lorraine aurait été mise en œuvre au détriment du territoire messin. C’est une analyse que ne partage pas la ministre de l’enseignement supérieur.
S’agissant du siège de la présidence, Nancy a été retenue, parce qu’elle accueille le siège du recteur de région académique. Cela est de nature à simplifier les relations entre les services déconcentrés de l’État et l’université, comme c’est le cas dans de nombreuses autres régions.
La fusion a permis de réaliser à Metz, ces dernières années, des projets ambitieux et significatifs au bénéfice des étudiants messins. À titre d’exemple, l’installation sur le technopôle des UFR de mathématiques, informatique et mécanique, ainsi que des cinq laboratoires de recherche associés afin de rapprocher la formation et la recherche des entreprises a donné lieu à plus de 38 millions d’euros d’investissements.
S’agissant des contrats doctoraux, ils font l’objet d’un appel à candidatures organisé par les laboratoires de recherche, sans distinction entre ceux installés à Metz et à Nancy.
Quant au projet management, ingénierie, sciences et technologies avancées, connu sous l’acronyme Mista, il est à la fois ambitieux et complexe. Le conseil d’administration de l’université a donc souhaité, en février dernier, se donner plus de temps pour réfléchir au développement des formations d’ingénieurs dans le bassin messin. C’est une décision que chacun doit respecter. Cela n’enlève rien au diagnostic que vous avez établi et qui est partagé par l’université de Lorraine.
Metz connaît un réel essor économique et industriel qui demande un surcroît de formations pour les métiers d’ingénieur et de technicien spécialisé. Cette problématique est bien connue de la présidence de l’université, qui cherche à répondre à ce besoin.
Le Gouvernement est donc bien conscient de l’intérêt du développement de formations adaptées aux besoins des entreprises pour le bassin messin. Ainsi, la ministre Frédérique Vidal ne manquera pas de demander à l’université de Lorraine de préciser sa vision du développement du site de Metz dans le cadre du dialogue stratégique de gestion qui sera généralisé à toutes les universités dès la rentrée prochaine.
modalités de calcul des retraites des professeurs des écoles
M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, en remplacement de M. Claude Raynal, auteur de la question n° 621, adressée à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.
Mme Marie-Pierre Monier. Cette question a été préparée en collaboration avec mon collègue Claude Raynal. Nous avons été alertés, depuis des mois, sur les conséquences de la mise en place du protocole Parcours professionnels, carrières et rémunérations, pour les anciens instituteurs devenus professeurs des écoles. En effet, dans le cadre de ce protocole, les anciens instituteurs ne sont plus éligibles, dans les faits, aux rendez-vous de carrière qui permettent d’accéder à la hors classe de professeur des écoles. Voilà donc quinze ou vingt ans d’une vie professionnelle au service de l’État rayés du calcul des possibilités d’avancement !
Cette situation perdure. Dans le bulletin officiel paru le 21 mars 2019 relatif au passage à la hors classe des professeurs des écoles, il apparaît que, concernant l’avis émis par les inspecteurs, l’ancienneté générale de service n’est toujours pas un critère. Ainsi, la méritocratie républicaine, dont ils sont les premiers gardiens, ne s’applique pas à eux ! L’idéal de la fonction publique basé sur la promotion interne, le plus souvent par concours, se trouve mis à mal par des règles comptables.
En outre, il semblerait que la prise en compte des années en tant qu’instituteur dans la détermination de l’avis permettant le passage à la hors classe diffère en pratique selon les académies. La rupture d’égalité en fonction du parcours se trouve dès lors renforcée par des inégalités territoriales.
Ces inégalités de traitement s’accompagnent de conséquences à long terme, notamment sur les retraites. Voilà des fonctionnaires qui ont, par vocation, consacré leur vie à l’intérêt général avec des retraites inférieures à celles de leurs collègues.
Au-delà de l’aspect purement financier, se trouve aussi, et peut-être avant tout, un problème humain, car ces professeurs des écoles qui ont gravi tous les échelons ressentent cette situation comme témoignant d’un profond mépris et d’une séparation entre les « vrais » professeurs des écoles et ceux arrivés plus tardivement – et avec plus d’expérience – à cette fonction.
Je souhaiterais connaître les solutions envisagées par l’administration pour remédier à cette situation.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Sébastien Lecornu, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé des collectivités territoriales. Madame la sénatrice, il se trouve que vous posez cette question au nom de Claude Raynal et que je vous réponds au nom de Jean-Michel Blanquer ; l’exercice est ainsi complet. (Sourires.)
La création du corps des professeurs des écoles s’est accompagnée de l’intégration progressive des instituteurs. Ces derniers, agents de catégorie B recrutés au niveau du baccalauréat, ont donc rejoint, par la voie du concours interne ou d’une liste d’aptitude, un corps de catégorie A.
Les services des instituteurs sont repris à l’occasion de leur intégration, en tenant compte du changement de catégorie induit. Une année de service effectuée dans le corps des instituteurs n’est donc pas reprise à hauteur d’une année entière.
Toutefois, ces règles ne conduisent pas à pénaliser les anciens instituteurs. En effet, ils sont éligibles à la hors classe, et les instituteurs qui intégreront à l’avenir le corps des professeurs des écoles pourront être promus dès leur intégration.
Depuis l’intervention du protocole Parcours professionnels, carrières et rémunérations, connu sous l’acronyme PPCR, au 1er septembre 2017, les conditions d’accès à la hors classe des différents corps des personnels enseignants, d’éducation et psychologues ont été modifiées. Désormais, le vivier des agents « promouvables » a été resserré, mais, en parallèle, le taux de promotion a été considérablement augmenté, passant de 5,5 % pour 2017 à 13,2 % pour 2018, afin de maintenir le nombre de promotions. Ce taux sera porté à 15,1 % en 2019 pour atteindre, à terme, la convergence avec les enseignants du second degré.
L’ensemble des anciens instituteurs pouvant être promus hors classe dès la mise en œuvre du PPCR en 2017, ils bénéficient directement de ces nouvelles modalités de promotion.
S’agissant de leur évaluation professionnelle, les ex-instituteurs « promouvables » à la hors classe qui n’avaient pu bénéficier d’un rendez-vous de carrière ont reçu, lors de la campagne 2018, une appréciation sur leur valeur professionnelle fondée sur l’avis des inspecteurs. Ils ont donc été intégrés à l’exercice de promotion à la hors classe, qui repose sur l’examen de deux critères : l’appréciation professionnelle et l’ancienneté.
Enfin, les instituteurs devenus professeurs des écoles peuvent également accéder au troisième grade créé par le PPCR, dénommé « classe exceptionnelle ». Les conditions de passage sont favorables aux professeurs des écoles ex-instituteurs : lors de la campagne de promotion 2018, ils constituaient, en effet, moins d’un tiers du vivier des « promouvables », mais représentaient plus de la moitié des promus.
Ainsi, les instituteurs qui ont intégré le corps des professeurs des écoles ont un déroulement de carrière qui leur permet de partir à la retraite dans des conditions plus favorables que celles qui auraient été les leurs dans le corps des instituteurs.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, pour la réplique.
Mme Marie-Pierre Monier. Monsieur le ministre, j’entends vos arguments, mais j’ai reçu des instituteurs dans mon département, et je peux vous dire que, sur le terrain, les choses ne se passent pas comme vous les présentez. Vous avez parlé de l’appréciation des inspecteurs ; il y aurait beaucoup à dire à ce sujet, et le processus manque de lisibilité.
Aujourd’hui, il n’y a pas d’équité dans le processus de promotion au grade « hors classe ». Or notre République promeut l’égalité de traitement entre tous les individus. Elle se doit donc de la réaliser pour son personnel. Il faudrait vraiment que le ministère de l’éducation nationale se penche concrètement sur ce qui se passe sur le terrain.
sous-effectifs chroniques au sein des juridictions
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Lherbier, auteur de la question n° 626, adressée à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.
Mme Brigitte Lherbier. L’administration judiciaire, plus particulièrement pour ce qui concerne les magistrats, souffre d’un manque constant de personnel. Je veux évoquer avec vous la situation d’un tribunal que je connais bien, le tribunal de grande instance de Lille : à la fin de l’année 2018, il disposait d’un effectif réel de fonctionnaires de 216 équivalents temps plein, mais ses besoins étaient évalués à 280 ETP, soit un manque de 64 emplois, c’est-à-dire 23 % de l’effectif.
Les besoins des tribunaux croissent d’année en année à raison des réformes et de l’augmentation de la demande de justice. En dépit de l’attention de l’administration centrale, l’effectif de fonctionnaires reste inadapté à la charge de travail, si bien que le ratio de performance des fonctionnaires du TGI de Lille est le plus élevé du groupe rassemblant les douze juridictions les plus importantes de France.
Le troisième conseil de juridiction s’est tenu vendredi 28 juin à Lille en présence du président du TGI, du procureur de la République, du directeur de greffe, des professionnels de justice et d’un certain nombre de parlementaires, dont je faisais partie. La situation présentée par tous a révélé une surcharge de travail des personnels judiciaires excessive par manque de personnel, sans compter les arrêts et les congés maternité et sans compter les réformes à mettre en place à la rentrée.
Vingt-six juridictions sociales en France connaissent une réforme. Lille organise dans ce cadre un vaste pôle social, en regroupant le tribunal de la sécurité sociale, le tribunal de l’incapacité… Cette réorganisation s’ajoute à l’activité initiale.
On constate aussi à Lille une forte augmentation de l’activité pénale, puisque les affaires « poursuivables » ont crû de 16 % en 2018. Les besoins en magistrats et en greffiers sont donc à réévaluer dans le ressort du TGI.
Ce problème est, au vu des questions posées par les collègues de toute la France, une constatation nationale. La situation est grave, et j’aurais voulu que Mme la garde des sceaux nous rassure sur les moyens mis en œuvre par son ministère pour remédier à ce manque de professionnels judiciaires.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
Mme Lherbier et moi-même sommes tout ouïe ! (Sourires.)
M. Sébastien Lecornu, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé des collectivités territoriales. Je vois donc apparaître un axe Tourcoing-Mayotte, monsieur le président… (Sourires.)
Madame la sénatrice Brigitte Lherbier, je vous prie d’excuser Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, qui m’a chargé de vous répondre.
La programmation quinquennale 2018-2022 prévoit la création nette de 184 emplois pour les greffes afin notamment d’améliorer les délais de traitement, de diminuer les vacances d’emplois et de renforcer l’équipe autour du magistrat. En cinq ans, 750 greffiers auront été recrutés grâce notamment aux mesures de simplification procédurale en matière civile et pénale permises par la loi de programmation et de réforme pour la justice. En parallèle, les efforts de mise en cohérence des emplois et des moyens, à l’aune de la fusion des greffes de première instance, permettront de rétablir une juste répartition en fonction de la charge de travail des juridictions.
Les services des ressources humaines de la direction des services judiciaires définissent et mettent en œuvre la politique de gestion des ressources humaines. Ainsi, la CLE, la circulaire de localisation des emplois, constitue un cadre annuel opérationnel pour les effectifs des juridictions. Elle est établie à l’issue de réunions avec les chefs des cours d’appel qui présentent leurs demandes d’adaptation du volume d’emplois alloué au ressort. Ces demandes sont examinées par les services des ressources humaines au regard notamment de l’analyse des données d’activité de chaque juridiction, des éléments de gestion ou des particularités territoriales.
La charge de travail est estimée importante au TGI de Lille et est identifiée par les services de l’administration centrale. Cela a d’ailleurs motivé un renfort continu depuis quatre ans : la hausse des emplois localisés s’est élevée à vingt-six, ce qui représente 11,5 % d’augmentation, tandis que la hausse nationale atteignait 2,3 %. Aujourd’hui, ce sont 238 agents qui travaillent au TGI de Lille.
En 2019, le tribunal de grande instance de Lille a bénéficié de quatorze emplois supplémentaires pour absorber le transfert du contentieux social et de deux autres emplois en renfort de son parquet et en soutien du service de la numérisation.
Enfin, le ressort de la cour d’appel de Douai a été renforcé de cinq emplois, permettant un soutien aux juridictions du ressort, notamment de Lille. Ces efforts se poursuivront dans les prochaines années.
Je sais les élus du Nord vigilants sur cette question, et le ministre de l’action et des comptes publics la surveille de près.