Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Mouiller, pour explication de vote.
M. Philippe Mouiller. Monsieur le secrétaire d’État, je m’efforce d’accompagner, dans cette démarche, les collectivités du département dont je suis l’élu. À ce titre, Cap emploi fait l’objet d’un suivi particulier.
Vous le soulignez avec raison : plusieurs actions sont mises en œuvre pour assurer une convergence des outils numériques. Mais, concrètement, sur le terrain, on estime entre dix-huit et vingt-quatre mois le temps nécessaire pour les rendre efficientes !
L’expérimentation pourrait justement permettre une phase de transition : le Gouvernement en maîtriserait la durée et les contours. De manière pragmatique, nous aurions, dès le 1er janvier prochain, un outil opérationnel dans les départements. (M. le président de la commission des lois opine.) Au fur et à mesure du déploiement de cette interface, vous seriez en mesure d’éteindre l’expérimentation, avec la certitude de disposer d’un outil qui fonctionne.
Enfin, la mesure que nous proposons permettra à des collectivités qui n’ont pas connaissance des démarches spécifiques d’accueillir des personnes en situation de handicap. Au nom de nos départements, je vous demande, du fond du cœur, de bien vouloir retirer votre amendement !
Mme la présidente. La parole est à M. Didier Marie, pour explication de vote.
M. Didier Marie. J’ai écouté M. de Belenet avec une certaine émotion, et je tiens à le rassurer : personne ici n’entend instrumentaliser un sujet qui nous touche toutes et tous, et qui fait l’objet d’un large consensus.
Le travail d’élaboration de notre rapport a fait remonter des demandes et des aspirations convergentes. M. le rapporteur vient de le rappeler : nous avons mené un grand nombre d’auditions, qu’il s’agisse du FIPHFP, des syndicats ou des associations de personnes en situation de handicap.
Tous nos interlocuteurs nous ont fait part des mêmes volontés : premièrement, rétablir la situation financière du FIPHFP ; deuxièmement, améliorer la coordination des acteurs, qui – il faut le dire – est mauvaise dans certains endroits ; troisièmement, inciter l’ensemble des acteurs publics à faire les efforts nécessaires, via la généralisation de référents ; quatrièmement, diversifier l’accès à l’emploi public, notamment par l’apprentissage et les contrats ad hoc, qui existent déjà, mais qui sont insuffisamment employés ; cinquièmement, enfin, simplifier le fonctionnement du FIPHFP.
Tous ces efforts doivent concourir à améliorer l’inclusion des personnes en situation de handicap dans la fonction publique. C’est un objectif que nous avons toutes et tous en partage ; dans certaines branches, il y a encore beaucoup de travail à faire.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 34 D.
(L’article 34 D est adopté.)
Article additionnel après l’article 34 D (priorité)
Mme la présidente. L’amendement n° 263 rectifié, présenté par Mmes Assassi et Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 34 D
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport ayant pour objectif d’évaluer l’opportunité de créer un corps spécifique pour les accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH).
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Mme Éliane Assassi. Mes chers collègues, je connais les réticences que vous inspirent les demandes de rapport,…
M. Philippe Bas, président de la commission des lois. En effet !
Mme Éliane Assassi. … mais les limites constitutionnelles qui entourent le droit d’amendement dans notre chambre nous obligent bien souvent à solliciter ce type d’études.
Il faut, une nouvelle fois, se pencher sur la situation des accompagnants des élèves en situation de handicap, les AESH. Lors de l’examen du projet de loi pour une école de la confiance, nous avons longuement débattu de leur absence de statut. Comment expliquer que des agents publics répondant à un besoin permanent, indispensables au bon fonctionnement de l’éducation nationale, soient laissés dans une précarité absolue ? C’est bien le premier enjeu d’un statut de fonctionnaires pour les AESH : la sortie de la précarité.
Nous le savons, la situation est tout à fait insatisfaisante, et à tout point de vue, pour les AESH. Ainsi, la diversité des employeurs conduit à l’absence de cadre et nourrit de graves situations de discrimination, selon que l’État ou les établissements sont recruteurs, ou encore en fonction des académies et des directions desdits établissements.
Le recrutement se fait, en dépit du bon sens, à temps partiel et à durée déterminée, ce qui entraîne des rémunérations particulièrement faibles et une imprévisibilité de l’emploi. En parallèle, cette situation participe fortement des difficultés que rencontrent de nombreuses familles à chaque rentrée.
Fonctionnariser les AESH constituerait une solution juste socialement pour ces derniers et une garantie pour qu’ils soient affectés en amont de la rentrée scolaire. Par ailleurs, il faut relever que, en l’absence de cadre, les AESH ont bien du mal à faire valoir leur expérience : ils repartent de zéro à chaque changement d’établissement, s’ils sont recrutés à cette échelle, ou à chaque changement de département, si les rectorats sont les employeurs.
En outre, il est grand temps de reconnaître à sa juste valeur l’apport des AESH au bon fonctionnement du service public d’éducation. Le ministre de l’éducation nationale a pointé, à juste titre, les difficultés qu’il avait à recruter des AESH. Au vu du tableau que je viens de dépeindre, cela n’est guère étonnant ; et ce n’est pas en assouplissant les conditions de recrutement, comme on l’a fait il y a un an, que le problème sera résolu.
Voilà pourquoi nous formulons, au travers de cet amendement, une demande de rapport.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Loïc Hervé, rapporteur. Ma chère collègue, vous le rappelez vous-même, face aux demandes de rapport, la commission suit une position constante qui ne souffre que très peu d’exceptions. Aussi, elle demande le retrait de cet amendement. Cela étant, ses dispositions nous donnent l’occasion d’évoquer un sujet important, et elles nous permettront d’entendre le Gouvernement sur ce point.
Aujourd’hui, les AESH gagnent en moyenne 700 euros par mois, sur la base de contrats précaires ; seuls 2 % d’entre eux travaillent à temps plein. Le Gouvernement a pris plusieurs engagements, notamment de porter à 30 % la proportion d’AESH à temps plein d’ici à la rentrée prochaine, ou encore de permettre l’octroi d’un CDI lorsqu’un AESH a obtenu deux CDD de trois ans.
Nous attendons que le Gouvernement nous détaille ses engagements et, surtout, qu’il les tienne !
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Comme pour la quasi-totalité des demandes de rapport, le Gouvernement émet, sur cet amendement, un avis défavorable.
Madame Assassi, au-delà de la position de principe, et à la suite de M. Blanquer, je vous assure que l’amélioration durable du cadre d’emploi et des conditions d’exercice des AESH constitue une priorité du ministère de l’éducation nationale. Des avancées majeures ont été accomplies, notamment grâce à une forte mobilisation de moyens humains pour un meilleur accueil des élèves.
Pour ce qui concerne, plus particulièrement, les questions que vous évoquez, à l’issue d’une large concertation avec les partenaires sociaux, le ministère a adopté un nouveau cadre de gestion de ses agents. Il s’agit d’un des leviers essentiels du saut qualitatif annoncé, lequel est nécessaire pour construire une école inclusive et transformer durablement le dispositif d’accompagnement.
Ce nouveau cadre pose les fondements d’une gestion pérenne et valorisante des accompagnants d’élèves en situation de handicap. Il définit des mesures de nature à consolider leur place dans la communauté éducative, en améliorant à la fois leur gestion administrative et leurs conditions d’exercice, avec l’allongement de la durée des contrats, l’accroissement de la quotité travaillée et la meilleure prise en compte, en rémunération, des activités connexes à l’accompagnement des élèves.
Les travaux dont il s’agit ont vocation à se poursuivre pour renforcer ces acquis fondamentaux. Ils s’appuient sur une réflexion aboutie.
Au fond, la principale difficulté que soulève votre suggestion est la suivante : le rapport que vous proposez vise un objet dont, en réalité, l’opportunité a déjà été évaluée. La création d’un corps d’AESH au sein de la fonction publique d’État conduirait, in fine, à appliquer aux mêmes AESH des règles de gestion potentiellement moins favorables que les dispositions définies dans le nouveau cadre de gestion que le ministre de l’éducation nationale met en place.
En particulier, la gestion d’un corps impliquant d’éventuelles mobilités à l’échelle académique ou départementale, et une mobilité fonctionnelle accrue entre maternelle, élémentaire et second degré, la création d’un corps pourrait tarir le vivier des personnes intéressées par le métier sans répondre pour autant à l’objectif d’amélioration des conditions d’emploi des AESH.
Pour des raisons d’attractivité, et pour la pérennité de l’engagement de chacun des AESH auprès des élèves en situation de handicap, nous préférons donc ne pas retenir cette formule.
En résumé, nous allons continuer à travailler sur le fond. Le ministre de l’éducation nationale s’y est engagé dans les termes que je viens de rappeler. De plus, la demande de rapport que vous formulez me semble satisfaite par le travail de concertation mené. Enfin, vous connaissez la position constante du Gouvernement en la matière.
Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Cartron, pour explication de vote.
Mme Françoise Cartron. Mes chers collègues, pas plus tard qu’hier, je me suis rendue à l’inspection académique de la Gironde, où le directeur académique des services de l’éducation nationale, le Dasen, présentait, avec le recteur, le nouveau dispositif de l’école inclusive. Ils ont apporté un certain nombre de réponses et d’engagement très précis, dont je tiens à vous faire part.
En Gironde, tous les nouveaux AESH seront recrutés au 20 août prochain. Entre cette date et celle de la rentrée scolaire, ils bénéficieront de 60 heures de formation. Mme Assassi l’a dit avec raison : il faut des personnes formées pour accompagner les enfants en situation de handicap.
Ces AESH seront recrutés sur des temps pleins, qui pourront être fractionnés afin de leur permettre d’accompagner deux ou trois enfants. Ils disposeront d’un CDD de trois ans renouvelable ouvrant sur un CDI.
J’ajoute que, en Gironde, nous allons expérimenter une formation conjointe entre l’enseignant et l’AESH : tous deux doivent intervenir ensemble dans un même lieu, pour ces élèves qui sont en situation de fragilité particulière.
La situation actuelle est marquée à la fois par une précarité totale et par une faiblesse de formation, alors même que nous avons besoin, dans ce domaine, d’emplois très qualifiés. La Gironde est souvent exemplaire, et j’ose espérer que les mesures volontaristes mises en œuvre dans notre territoire pourront être déployées dans les autres départements !
Mme la présidente. Madame Assassi, l’amendement n° 263 rectifié est-il maintenu ?
Mme Éliane Assassi. Je me doutais qu’une demande de rapport ne serait pas bien accueillie, et j’ai conscience qu’une telle étude ne suffira pas pour répondre à cette grande question. Je vais donc retirer mon amendement. Cela étant, nous avons pointé la problématique des AESH et le manque de reconnaissance de leurs savoir-faire.
Madame Cartron, j’ai bien entendu les précisions que vous nous avez apportées à propos de la Gironde. Malheureusement, je crains que la Seine-Saint-Denis ne soit pas dans la même situation…
Je retire mon amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 263 rectifié est retiré.
Article 34 (priorité)
I. – L’article 6 sexies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est ainsi modifié :
a) Au début, est ajoutée la mention : « I. – » ;
b) Les mots : « de l’exercer et d’y progresser ou pour qu’une formation adaptée à leurs besoins leur soit dispensée » sont remplacés par les mots : « de développer un parcours professionnel et d’accéder à des fonctions de niveau supérieur ainsi que de bénéficier d’une formation adaptée à leurs besoins tout au long de leur vie professionnelle » ;
2° Sont ajoutés des II à IV ainsi rédigés :
« II. – Tout agent a le droit de consulter un référent handicap, chargé de l’accompagner tout au long de sa carrière et de coordonner les actions menées par son employeur en matière d’accueil, d’insertion et de maintien dans l’emploi des personnes handicapées.
« La fonction de référent handicap peut être mutualisée entre plusieurs employeurs publics.
« III. – Lorsqu’ils effectuent une mobilité, les agents mentionnés à l’article 34 de la présente loi ont le droit de conserver leur aménagement de poste pour exercer leurs nouvelles fonctions.
« Un décret en Conseil d’État définit les conditions dans lesquelles leur nouvel employeur participe financièrement à l’amortissement de leur aménagement de poste.
« IV. – Le Conseil national consultatif des personnes handicapées est saisi pour avis des projets de loi, d’ordonnance et de décret relatifs à l’accueil, à l’insertion et au maintien dans l’emploi des personnes handicapées dans la fonction publique. »
II. – L’article 27 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa du I, les mots : « ayant fait l’objet d’une orientation en milieu ordinaire de travail par la commission prévue à l’article L. 146-9 du code l’action sociale et des familles » sont supprimés ;
2° Le dernier alinéa du même I est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Des dérogations aux règles normales de déroulement des concours, des procédures de recrutement et des examens sont prévues afin d’adapter la durée et le fractionnement des épreuves en fonction de la nature du handicap des candidats mentionnés au premier alinéa du présent I ou de leur apporter les aides humaines et techniques nécessaires précisées par eux préalablement au déroulement des épreuves. Des temps de repos suffisants sont accordés à ces candidats entre deux épreuves successives, de manière à leur permettre de composer dans des conditions compatibles avec leur situation.
« Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’application de l’avant-dernier alinéa du présent I. » ;
3° Au III, les mots : « fonctionnaires handicapés » sont remplacés par les mots : « agents publics en situation de handicap ».
III. – L’article 35 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, les mots : « ayant fait l’objet d’une orientation en milieu ordinaire de travail par la commission prévue à l’article L. 146-9 du code l’action sociale et des familles » sont supprimés ;
2° L’avant-dernier alinéa est ainsi rédigé :
« Des dérogations aux règles normales de déroulement des concours, des procédures de recrutement et des examens sont prévues afin d’adapter la durée et le fractionnement des épreuves en fonction de la nature du handicap des candidats mentionnés au premier alinéa du présent article ou de leur apporter les aides humaines et techniques nécessaires précisées par eux préalablement au déroulement des épreuves. Des temps de repos suffisants sont accordés à ces candidats entre deux épreuves successives, de manière à leur permettre de composer dans des conditions compatibles avec leur situation. Les conditions d’application de ces dérogations sont fixées par décret en Conseil d’État. » ;
3° Au dernier alinéa, les mots : « fonctionnaires handicapés » sont remplacés par les mots : « agents publics en situation de handicap ».
IV. – Le I de l’article 27 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 précitée est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, les mots : « ayant fait l’objet d’une orientation en milieu ordinaire de travail par la commission prévue à l’article L. 146-9 du code l’action sociale et des familles » sont supprimés ;
2° L’avant-dernier alinéa est ainsi rédigé :
« Des dérogations aux règles normales de déroulement des concours, des procédures de recrutement et des examens sont prévues afin d’adapter la durée et le fractionnement des épreuves en fonction de la nature du handicap des candidats mentionnés au premier alinéa du présent I ou de leur apporter les aides humaines et techniques nécessaires précisées par eux préalablement au déroulement des épreuves. Des temps de repos suffisants sont accordés à ces candidats entre deux épreuves successives, de manière à leur permettre de composer dans des conditions compatibles avec leur situation. Les conditions d’application de ces dérogations sont fixées par décret en Conseil d’État. » ;
3° Au dernier alinéa, les mots : « fonctionnaires handicapés » sont remplacés par les mots : « agents publics en situation de handicap ».
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, sur l’article.
Mme Laurence Cohen. Le taux de chômage des personnes en situation de handicap est de 19 % : son niveau est deux fois plus élevé que pour les personnes valides, et il faut reconnaître que la fonction publique a encore des progrès à effectuer pour intégrer ces salariés – nous en avons parlé.
Il est inacceptable que, en 2019, les personnes en situation de handicap soient encore victimes de discriminations lors de leur recrutement. Des efforts doivent être réalisés pour l’adaptation des épreuves des concours et des examens de la fonction publique, comme pour la sensibilisation des personnels chargés des ressources humaines. Surtout, le nombre de postes ouverts aux handicapés doit être étendu.
La mission d’information sur la politique de l’emploi des personnes handicapées dans la fonction publique, menée par Catherine Di Folco et Didier Marie, à laquelle notre rapporteur, Loïc Hervé, a d’ailleurs fait référence, a permis de chiffrer à 280 760 le nombre de travailleuses et de travailleurs handicapés dans la fonction publique. Le taux global de fonctionnaires handicapés s’élève à 5,61 %, pourcentage inférieur à l’obligation d’emploi, fixée à 6 %.
La fonction publique doit donc redoubler d’efforts pour employer davantage de personnes handicapées. L’État doit lancer un vrai plan en faveur de l’emploi des personnes victimes d’un handicap, dans l’ensemble des trois fonctions publiques. Je signale que cet effort, quoique insuffisant, est plus important dans les collectivités territoriales, puisque le taux de fonctionnaires handicapés y est de 6,76 %.
Avant de conclure, je tiens à exprimer une inquiétude du groupe CRCE en matière de sémantique – cette dernière a toute son importance. Pour la fonction publique d’État, les termes de « fonctionnaires handicapés » sont remplacés, dans le présent texte, par ceux d’« agents publics en situation de handicap ».
Monsieur le secrétaire d’État, cette évolution, loin d’être anecdotique, met en lumière le projet global de votre gouvernement : réduire le périmètre d’intervention de l’État et supprimer les spécificités protectrices des agents qui y concourent, au profit d’une contractualisation à outrance. Nous continuons de nous y opposer et de défendre l’ensemble des fonctionnaires, y compris, bien entendu, les fonctionnaires handicapés.
Mme la présidente. La parole est à Mme Esther Benbassa, sur l’article.
Mme Esther Benbassa. Cet article encourage le développement du parcours professionnel des personnes en situation de handicap engagées dans la fonction publique. Il entend, de plus, faciliter la mise en œuvre d’aménagements en leur faveur lors du déroulement des épreuves des concours et examens.
Si les intentions sont louables, le système d’aide aux travailleurs handicapés est à bout de souffle, comme le dénonce d’ailleurs un récent rapport de la commission des lois du Sénat.
Le fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique, destiné à financer des actions pour favoriser l’emploi de ces personnes et leur insertion professionnelle, est en grande difficulté financière ; ses aides ont ainsi baissé de 30 % entre 2014 et 2018.
Les personnes handicapées, souffrant déjà d’invisibilisation et de stigmatisation en France, sont pourtant des acteurs indispensables pour notre administration, qui doit refléter notre société dans toute sa diversité.
Aussi, nous aurions souhaité que le recrutement par voie contractuelle soit assoupli, afin de multiplier les titularisations de ces agents. Il n’en est rien dans ce projet de loi.
La loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées imposait au secteur public d’embaucher au moins 6 % de fonctionnaires handicapés. En 2019, nous sommes malheureusement toujours en deçà de cette obligation légale, notamment dans la fonction publique d’État, dans laquelle les personnes handicapées représentent seulement 4,65 % des effectifs.
Le Gouvernement n’a manifestement pas pris en compte ces appels à l’aide et a manqué, une fois de plus, de la volonté de mieux faire, prouvant ainsi que la protection des plus vulnérables n’était pas sa priorité.
Mme la présidente. L’amendement n° 522, présenté par MM. de Belenet, Mohamed Soilihi, Amiel, Bargeton et Buis, Mme Cartron, MM. Cazeau, Dennemont, Gattolin, Hassani, Haut, Karam, Lévrier, Marchand, Navarro, Patient, Patriat et Rambaud, Mme Rauscent, M. Richard, Mme Schillinger, MM. Théophile, Yung et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 6
Rédiger ainsi cet alinéa :
« II. – Tout agent a le droit de consulter un référent handicap, chargé d’orienter, d’informer et d’accompagner les personnes en situation de handicap afin que celles-ci puissent développer leur parcours professionnel, accéder à des fonctions de niveau supérieur et bénéficier d’une formation adaptée à leurs besoins tout au long de leur vie professionnelle.
II. – Après l’alinéa 7
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
« Le référent handicap œuvre concomitamment à la sensibilisation de l’ensemble des agents sur la nécessité de favoriser l’égalité professionnelle pour les travailleurs en situation de handicap.
« Cette fonction de conseil et de sensibilisation s’exerce sans préjudice de la responsabilité et des prérogatives du chef de service.
« Un décret en Conseil d’État détermine les modalités et critères de désignation des référents handicap.
La parole est à Mme Françoise Cartron.
Mme Françoise Cartron. Cet amendement vise à suggérer une nouvelle rédaction de la disposition permettant à tout agent public de consulter un référent handicap, en tendant à opérer quelques corrections qui nous semblent, en toute rigueur, formaliser cette faculté sous un jour plus positif.
Tel qu’il est actuellement rédigé, l’alinéa 6 se borne en effet à évoquer les seules conditions d’accueil, d’insertion et de maintien dans l’emploi des personnes handicapées. Or je persiste à croire que cette sobriété légistique n’est pas si raisonnable qu’il y paraît.
Mes chers collègues, décrire un handicap, c’est définir les moyens de l’appréhender et, par là même, organiser les conditions de son acceptabilité sociale. Parler de « maintien » et d’« insertion », c’est déjà imprimer dans la loi un présupposé inégalitaire.
Être traité en handicapé, voilà bien le premier des handicaps ! Nos textes de loi doivent être soucieux de ces formules de langage : en aucune façon, le « maintien » dans un emploi ne saurait être vécu comme une forme d’accomplissement professionnel.
Nous préférons, en ce sens, voir reconnaître au référent un rôle plus dynamique et plus positif, corrélé, par nature, à la possibilité pour l’agent en situation de handicap d’accéder à des fonctions de niveau supérieur.
Par ailleurs, il nous semblait opportun de préciser que le référent handicap devait œuvrer concomitamment à la sensibilisation de l’ensemble des agents à la nécessité de favoriser l’égalité professionnelle pour tous les travailleurs en situation de handicap.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Loïc Hervé, rapporteur. L’amendement n° 522 vise à réécrire les dispositions relatives au référent handicap.
La rédaction de la commission me semble préférable, car le référent handicap doit pouvoir être consulté pour tous les agents, sans aucune distinction. Il pourra, par exemple, aider à la reconversion des agents faisant face à des risques professionnels, avant la déclaration d’inaptitude et la reconnaissance du handicap.
La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, son avis serait défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Le Gouvernement demande le retrait de cet amendement, pour deux raisons.
Premièrement, la quasi-totalité des items qui y figurent nous paraît relever du niveau réglementaire et sera reprise dans les textes réglementaires d’application.
Deuxièmement, nous marquons une nuance d’interprétation sur la rédaction que vous proposez. Nous considérons en effet que, si chaque agent en situation de handicap doit avoir droit à un accompagnement personnalisé, celui-ci sera évidemment le fait du référent handicap, reconnu par la loi, à l’existence duquel les alinéas 6 et 7 donnent force de loi en lui conférant une reconnaissance formelle dont il ne bénéficiait pas précédemment. En revanche, on ne peut pas exclure, ainsi que le sous-tend la rédaction que vous proposez, que cet accompagnement puisse être effectué par autre agent de la collectivité, qui ne serait pas nécessairement le référent handicap, mais qui serait cependant capable de jouer ce rôle.
Dans la rédaction des textes réglementaires, nous reprendrons vos objectifs, tout en précisant que, outre un référent handicap qui a une mission de coordination et d’animation, tout agent en capacité de le faire et d’être utile auprès d’un collègue en situation de handicap peut se voir confier cet accompagnement.