Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des lois.
M. Philippe Bas, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. Monsieur le secrétaire d’État, je me réjouis que, à l’occasion de l’examen du présent projet de loi, nous puissions nouer un dialogue sur cette question très importante. Je dois vous dire très sincèrement que nous considérons, à la commission des lois, que le compte n’y est pas et que nous ne pouvons nous contenter de vous faire crédit de vos bonnes intentions.
Vous connaissez les chiffres comme nous les connaissons. En 2014, le fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique avait un budget de 181 millions d’euros. Il est tombé à 126 millions d’euros. On compte certes davantage de personnes handicapées dans les fonctions publiques qu’il y a cinq ans, mais précisément, il y a davantage de besoins, car le FIPHFP contribue non pas simplement à l’intégration de personnes handicapées au sein de la fonction publique, mais à l’accompagnement de leurs carrières, pour qu’elles puissent y trouver toute leur place et apporter toute leur contribution au fonctionnement des services publics.
Cela démontre à quel point le système actuel a atteint ses limites. Je ne le critique pas pour un vice de fabrication, car je me permets de vous rappeler que, avec Christian Jacob, alors ministre de la fonction publique – votre prédécesseur –, j’en ai été le coauteur lorsque j’étais chargé des solidarités au sein du gouvernement d’alors, et que c’est nous qui avons créé ce fonds.
Vous nous dites : « Il faut attendre. » Non, n’attendons surtout pas, ne ratons pas l’occasion du prochain budget de l’État pour amorcer un redressement ! Vous proposez 130 millions ; nous vous disons que 150 millions d’euros, c’est encore beaucoup moins qu’il y a cinq ans et c’est nécessaire.
Cette évaluation n’est pas sortie de notre chapeau, elle résulte d’un travail pluraliste mené par M. Marie et Mme Di Folco, dont chacun, y compris vous-même, a salué le sérieux.
Pour assurer la pérennité des financements à un haut niveau, il est absolument indispensable de modifier le système de prélèvement. C’est la raison pour laquelle nous vous proposons ce système de bonus-malus.
Je veux croire que toute proposition émanant du Parlement est prise au sérieux par le Gouvernement sans que celui-ci nous oppose sa propre réflexion et son propre calendrier. On ne va pas perdre un an pour mettre en œuvre un dispositif qui sera plus efficace pour les personnes handicapées !
C’est la raison pour laquelle, au moment d’aborder l’examen de ces amendements, je tiens à vous dire très solennellement que nous ne souhaitons pas que notre attente soit déçue. Du temps va s’écouler entre la position que vous adopterez aujourd’hui et la commission mixte paritaire, avant le vote final du texte. Ce que nous proposons n’a rien d’un bouleversement révolutionnaire.
Par ailleurs, l’argument selon lequel vous voudriez rapprocher, sans les fusionner, le fonds pour le secteur privé et le fonds pour le secteur public ne nous paraît pas recevable, et ce pour une raison très simple : les modalités de recrutement, le déroulement des carrières et même les métiers sont différents entre le secteur privé et le secteur public.
L’Agefiph, créée par une loi qu’avait fait voter Philippe Séguin, voulue par Jacques Chirac, à l’époque Premier ministre, a été mise en place en 1988 par le gouvernement de Michel Rocard, Jean-Pierre Soissons étant ministre du travail, sous forme de gestion paritaire avec les partenaires sociaux : vous ne voulez pas abandonner cela ?
Le système en vigueur dans la fonction publique est différent parce que le paritarisme y a pris énormément de retard. Vous ne pouvez donc pas fusionner les deux systèmes. Vous pouvez d’autant moins le faire qu’alors un effet de masse jouerait en défaveur des financements spécifiques pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique.
Cet argument ne saurait retarder ce travail devant nous permettre de franchir un palier dans l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique. C’est ce que le Sénat vous demande. Vous dites que nous sommes d’accord sur les objectifs ; eh bien, je souhaite maintenant que nous soyons aussi d’accord sur les moyens ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Jean-Pierre Decool applaudit également.)
Mme la présidente. L’amendement n° 495, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
L’article L. 323-8-6-1 du code du travail est ainsi modifié :
1° Le I est ainsi modifié :
a) La seconde phrase du premier alinéa est supprimée ;
b) Les 1° et 3° sont abrogés ;
c) À la première phrase du dernier alinéa, les mots : « et des personnes handicapées », sont remplacés par les mots : « , du service public de l’emploi et des personnes handicapées » ;
3° Les deuxième à dernier alinéas du II sont supprimés ;
4° Le III est ainsi rédigé :
« III. – Les crédits du fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique servent à financer des actions réalisées soit à l’initiative des employeurs mentionnés à l’article L. 323-2, soit, à l’initiative du fonds, en vue de favoriser l’insertion professionnelle des personnes handicapées au sein de la fonction publique, ainsi que la formation et l’information des agents participant à la réalisation de cet objectif. »
La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. La présentation brève de cet amendement sera l’occasion pour moi de souligner, comme je viens de le faire dans mon propos préalable, à l’attention de M. le président de la commission des lois, que le Gouvernement n’a surtout pas l’intention de fusionner les deux fonds, pour les raisons qu’il a invoquées, notamment parce qu’il existe des différences dans leur mode de gouvernance. Je le répéterai une troisième fois si cela est nécessaire.
Nous parlons à dessein de convergence, notamment avec la volonté de garantir l’équité sur les niveaux et les modalités de prise en charge.
Cet amendement n° 495 a un seul objet, à savoir inscrire dans la loi le principe de fongibilité des sections du FIPHFP, qui correspond à la pratique d’aujourd’hui, de manière à offrir de la souplesse dans la gestion des missions du fonds.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Loïc Hervé, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. Le texte de la commission a mis en œuvre le rapport Donner un nouveau souffle au handicap dans la fonction publique, adopté une semaine auparavant.
Avec plusieurs de ses amendements, le Gouvernement revient sur diverses propositions du rapport. En l’occurrence, s’il était adopté, l’amendement n° 495 supprimerait : la clarification du droit applicable aux agents en situation de handicap et leur insertion dans le statut général de la fonction publique, règles qui sont aujourd’hui, je le rappelle, « cachées » dans une partie non abrogée du code du travail de 2007, ce qui n’est pas acceptable, même si l’on annonce une nouvelle fois un code de la fonction publique ; la limitation à cinq ans de la prise en compte des maintiens dans l’emploi dans le calcul du taux d’emploi des travailleurs handicapés, notamment pour ne pas avantager les employeurs qui « fabriquent » du handicap ; la règle de l’arrondi à l’inférieur, qui permettrait d’augmenter les contributions au FIPHFP de 13 millions d’euros ; la modernisation du conventionnement entre le FIPHFP et les employeurs publics, la commission ayant notamment permis la publication des objectifs retenus et des résultats obtenus.
Le Gouvernement accepte simplement de revoir la « tripartition » du FIPHFP entre les trois versants de la fonction publique, ce qui n’a jamais été appliqué.
L’ambition du Gouvernement, au travers de cet amendement, est donc bien plus limitée que le rapport du Sénat, alors qu’il y a urgence à donner un nouveau souffle à la politique du handicap dans la fonction publique.
Retrait ; à défaut, avis défavorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 34 A.
(L’article 34 A est adopté.)
Article 34 B (priorité) (nouveau)
À compter du 1er janvier 2020 et pour une durée de trois ans, l’État conduit une expérimentation destinée à refonder le modèle financier du fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique et à assurer sa pérennité.
L’expérimentation déroge à l’article 38 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, tel qu’il résulte de la présente loi.
L’État sélectionne un nombre représentatif de départements dans lesquels les employeurs mentionnés à l’article 33 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 précitée, tel qu’il résulte de la présente loi, versent une cotisation universelle de 0,1 % de leur masse des rémunérations au fonds.
Cette cotisation universelle peut être modulée afin tenir compte, pour chaque employeur :
1° Du taux d’emploi mentionné à l’article 34 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 précitée, tel qu’il résulte de la présente loi ;
2° Du nombre de travailleurs handicapés recrutés ;
3° Du nombre de disponibilités d’office pour raison de santé, de licenciements pour inaptitude et de mises à la retraite d’office.
Un décret en Conseil d’État définit les modalités de cette expérimentation. Il précise les règles de modulation de la cotisation universelle.
Le Gouvernement présente au Parlement une évaluation de cette expérimentation un an avant son terme. Le fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique, le Conseil commun de la fonction publique et le Conseil national consultatif des personnes handicapées adressent également leurs observations.
Mme la présidente. L’amendement n° 404, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Cet amendement vise à supprimer les dispositions adoptées par la commission des lois visant à expérimenter un nouveau système de financement du FIPHFP.
À l’ouverture de nos débats, je vous ai assuré qu’un décret d’application de la loi du 5 septembre 2018, portant modification des modalités de calcul des contributions des différents employeurs publics au FIPHFP, serait pris rapidement. Le décret a été soumis au conseil commun de la fonction publique il y a un peu plus de quinze jours. Pour des raisons pratiques, et par un hasard du calendrier, l’ensemble des membres du Gouvernement compétents en la matière l’ont contresigné ce matin même, en marge du conseil des ministres.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Loïc Hervé, rapporteur. Avec cet amendement, le Gouvernement souhaite supprimer une proposition du Sénat relative au handicap dans la fonction publique.
Le système actuel du financement du FIPHFP connaît deux difficultés principales.
Premièrement, ce fonds subit un effet de ciseaux : avec la progression du nombre d’agents handicapés, les ressources du fonds s’amenuisent alors que les besoins de financement augmentent. Ces dernières années, le fonds a réduit de 40 % le montant de ses conventions avec les employeurs publics, au détriment des agents en situation de handicap.
Deuxièmement, le système actuel favorise les employeurs publics qui « créent » du handicap. Plus les agents sont exposés à des risques professionnels, plus ils sont reclassés, ce qui permet de réduire d’autant les contributions de leur employeur. C’est un véritable effet pervers.
Face à ces difficultés structurelles, le Gouvernement a prévu un « sparadrap », c’est-à-dire des mesures ponctuelles pour stabiliser les ressources du fonds à 130 millions d’euros. Certaines mesures sont courageuses, comme la réduction des dérogations accordées par l’Assemblée nationale. Toutefois, ces dispositions sont insuffisantes pour régler l’effet de ciseaux constaté. Pis, elles ne répondent pas aux besoins du FIPHFP, que le Sénat a estimés à 150 millions d’euros.
Dès lors, il est important de lancer une expérimentation pour refonder le modèle de financement du fonds. Cette expérimentation pourrait être entreprise dès janvier 2020, en prenant en compte les propositions de Mme Lecocq. La mission qui lui est confiée dépasse d’ailleurs largement le champ du handicap.
Ce nouveau modèle se fonde sur une idée simple et juste : partons d’une cotisation universelle pour tous les employeurs et appliquons un bonus-malus pour valoriser les employeurs vertueux.
Ce bonus-malus est également la seule manière de pénaliser les employeurs qui multiplient les retraites ou les licenciements pour inaptitude. Comment être contre cette solution de bon sens ?
Pour garantir la faisabilité technique du dispositif, le Gouvernement pourra s’appuyer, non seulement sur le rapport d’information du Sénat, mais aussi sur le rapport de l’inspection générale des finances et de l’inspection générale des affaires sociales, publié en 2017, qu’il a lui-même commandé.
Pour ces raisons, la commission demande, comme précédemment, le retrait de l’amendement gouvernemental. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Mouiller, pour explication de vote.
M. Philippe Mouiller. Monsieur le secrétaire d’État, je ne reviendrai pas sur les arguments que M. le rapporteur a détaillés, et que j’approuve ; j’insisterai simplement sur deux points.
Tout d’abord, la mesure que nous proposons est de nature expérimentale. Elle permettra de cibler un certain nombre de départements.
Ensuite, elle complétera la politique menée, aujourd’hui, par votre gouvernement en matière d’inclusion. Je pense notamment à la démarche « Territoires 100 % inclusifs ». À ce titre, dans certains bassins de vie, l’ensemble des collectivités se sont engagées pour des mesures d’accompagnement spécifiques. À ce titre, elles ont besoin de souplesse et de moyens financiers dédiés : l’expérimentation d’une cotisation spécifique pourra constituer une réponse.
Je tenais simplement à mettre en parallèle votre politique et l’urgence de créer des territoires inclusifs, qui implique des financements spécifiques de la part des collectivités. Par cohérence avec la politique transversale que mène le Gouvernement face au handicap, notamment au sein de la fonction publique, je vous invite à retirer votre amendement de suppression.
Mme la présidente. La parole est à M. Didier Marie, pour explication de vote.
M. Didier Marie. À mon sens, ces dispositions sont centrales, et je regrette que le Gouvernement veuille les supprimer.
Lors de l’examen de notre rapport, puis au cours des débats, nous avons tous insisté sur les difficultés financières structurelles que subit le FIPHFP.
Je ne reviendrai pas sur l’effet de ciseaux, mais j’insisterai sur une autre dimension qui doit être prise en compte : la pratique du maintien dans l’emploi, que l’on considère à l’échelle de la carrière des agents dans son ensemble et qui aboutit à l’embolie du dispositif. Pour notre part, nous proposons de ne prendre en considération le maintien dans l’emploi que pendant cinq années. Ainsi, de nouveaux postes pourront être ouverts en faveur des travailleurs en situation de handicap.
En outre – cela a été dit et redit, mais, à l’évidence, il faut encore le répéter –, nous proposons une expérimentation. Mettez, en parallèle, la cotisation universelle fondée sur la masse salariale, de 0,1 %, et celle que la fonction publique territoriale verse au Centre national de la fonction publique territoriale, le CNFPT, de 0,9 % : vous verrez que la participation ici proposée n’est pas très lourde.
En effet, pour que les collectivités ou administrations les plus vertueuses ne soient pas pénalisées, nous avons souhaité instaurer un bonus permettant de tempérer leur participation. Inversement, un malus majorera les cotisations des structures qui n’ont pas fait les efforts nécessaires et qui, éventuellement, rechigneraient encore à le faire.
Pour ma part, je voterai contre cet amendement de suppression.
Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des lois.
M. Philippe Bas, président de la commission des lois. J’ai entre les mains le très bon rapport de Mme Di Folco et de M. Didier Marie. Il est on ne peut plus clair quant aux restrictions budgétaires que le fonds d’insertion pour les personnes handicapées dans la fonction publique est en train d’appliquer.
Monsieur le secrétaire d’État, je vous recommande en particulier de lire la page 66. Elle détaille les mesures qu’a prises le fonds, par obligation budgétaire, pour la réduction des dépenses d’intervention : réduction de 40 % du montant des conventions employeurs – ce sont les conventions que le fonds passe avec des employeurs publics pour obtenir de ceux-ci l’engagement de recruter des personnes handicapées et de les accompagner dans leur travail ; plafonnement des aides ponctuelles à 100 000 euros sur trois ans ; instauration d’un plancher de prise en charge, les dépenses de moins de 200 euros n’étant plus remboursées par le fonds ; réduction du montant de certaines aides – par exemple, le plafond de remboursement des prothèses auditives est abaissé de 3 000 à 1 600 euros ; connaissez-vous le prix des prothèses auditives ? ; suppression des aides accordées pour assurer l’accessibilité des bâtiments.
Il faut donner un coup d’arrêt à ce rétrécissement de la capacité d’action du FIPHFP.
Nous vous invitons instamment à mener, avec nous, ce combat pour l’insertion des personnes handicapées dans les fonctions publiques. Les résultats se sont améliorés au fil des années : c’est une raison supplémentaire de conjurer le risque d’un recul.
Cette grande politique sociale est émancipatrice : donner du travail aux personnes handicapées, c’est leur faire prendre pleinement part à la vie de la société. Nous ne devons donc pas suivre, en la matière, une logique strictement budgétaire ; et nous ne pouvons pas laisser les choses en l’état. D’ailleurs, je ne crois pas qu’en dotant ce fonds décemment l’on expose le budget de l’État à une grande menace ! (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. Ladislas Poniatowski. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à M. Arnaud de Belenet, pour explication de vote.
M. Arnaud de Belenet. Mes chers collègues, ce que j’entends aujourd’hui, c’est un consensus portant à la fois sur le constat et sur les objectifs.
Le FIPHFP, inventé il y a quelques années, ne fonctionne plus. D’ailleurs, chacun de ceux qui l’ont créé et qui ont élaboré ses modalités de financement savait bien que sa durée de vie était limitée. Aujourd’hui, nous réitérons ce constat et nous faisons le bilan, plus ou moins larmoyant, de ses effets et de ses limites.
Pour ma part, je voterai l’amendement du Gouvernement,…
M. Laurent Duplomb. C’est un scoop !
M. Guy-Dominique Kennel. En effet !
M. Arnaud de Belenet. … non parce que ces dispositions sont contre l’insertion des personnes handicapées, non parce que je suis membre du groupe La République En Marche, mais parce qu’un travail approfondi est encore nécessaire. (M. le président de la commission des lois brandit le rapport d’information de Mme Di Folco et M. Marie.)
M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Le travail approfondi, il est là !
M. Arnaud de Belenet. Non seulement de nouveaux rapports vont arriver, mais je m’en remets à la navette : j’espère que nous pourrons avancer et que la commission mixte paritaire nous permettra de trouver un consensus.
De plus, un rapport qui, quoique pluraliste, n’est issu que de l’opposition nationale, ne peut pas produire tous ses effets. Or, quand on veut rassembler sur un sujet, il est bon de savoir s’ouvrir…
Enfin, de manière plus personnelle, le papa d’un jeune handicapé que je suis apprécie assez modérément l’instrumentalisation que certains échanges pourraient donner l’impression de développer.
Ces sujets concernent un certain nombre d’entre nous à titre personnel, et il serait bon qu’ils ne soient pas instrumentalisés. À l’inverse, nous devons grandir par la recherche du compromis et du consensus en commission mixte paritaire. Je l’espère très sincèrement ; et je ne doute pas une seconde que le secrétaire d’État et le Gouvernement tout entier visent, en la matière, les mêmes objectifs que la majorité sénatoriale !
M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Il leur suffit de le démontrer !
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 34 B.
(L’article 34 B est adopté.)
Article 34 C (priorité) (nouveau)
À titre expérimental et pour une durée de cinq ans à compter de la publication de la présente loi, les personnes mentionnées aux 1°, 2°, 3°, 4°, 9°, 10° et 11° de l’article L. 5212-13 du code du travail peuvent être titularisés, à l’issue de leur contrat d’apprentissage, dans le corps ou cadre d’emploi correspondant à l’emploi qu’elles occupaient.
Cette titularisation est conditionnée à la vérification de l’aptitude professionnelle de l’agent. Une commission de titularisation se prononce au vu du parcours professionnel de l’agent et après un entretien avec celui-ci.
Un décret en Conseil d’État définit les modalités de cette expérimentation. Il précise les conditions minimales de diplôme exigées et les conditions du renouvellement éventuel du contrat d’apprentissage.
Une évaluation de cette expérimentation est présentée au Parlement un an avant son terme. – (Adopté.)
Article 34 D (priorité) (nouveau)
I. – Le dernier alinéa de l’article 41 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale est complété par une phrase ainsi rédigée : « Les informations recueillies dans cet espace numérique sont transmises au service public de l’emploi. »
II. – À titre expérimental et pour une durée de cinq ans à compter de la publication de la présente loi, les personnes mentionnées aux 1°, 2°, 3°, 4°, 9°, 10° et 11° de l’article L. 5212-13 du code du travail peuvent déposer leur curriculum vitae sur l’espace numérique mentionné au dernier alinéa de l’article 41 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale.
Les employeurs mentionnés à l’article 2 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires peuvent, après identification, consulter ces documents dans le seul objectif de recruter des agents en situation de handicap.
Un décret en Conseil d’État, pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, définit les modalités de cette expérimentation. Il précise la durée de conservation des données enregistrées et les conditions de leur mise à jour ainsi que les moyens à mettre en œuvre pour garantir la confidentialité du dispositif.
Une évaluation de cette expérimentation est présentée au Parlement un an avant son terme.
Mme la présidente. L’amendement n° 415, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Au-delà de mes précédents propos et de la convergence de vues que M. de Belenet a relevée avec raison, nous pouvons avoir quelques divergences quant au calcul des montants nécessaires en la matière, du fait de l’application d’autres politiques menées par le Gouvernement. Je pense, notamment, au « reste à charge zéro », pour reprendre l’un des exemples avancés.
À nos yeux, l’article 34 D est de nature plus réglementaire que législative. En outre, nous considérons que l’espace numérique commun « Place de l’emploi public », institué par un décret du 28 décembre 2018 et opérationnel depuis la mi-février 2019, permet de répondre aux attentes exprimées.
Nous devons encore améliorer le dispositif « Place de l’emploi public » : il s’agit de le mettre en interface avec un certain nombre de sites et de sources d’information, de manière à avoir une meilleure lecture de l’ensemble des données à la disposition des candidats, des agents et des employeurs publics.
Pour l’heure, je propose la suppression de cet article.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Loïc Hervé, rapporteur. Cet amendement vise à revenir sur une importante proposition du rapport de Mme Di Folco et de M. Marie.
Mes chers collègues, le Gouvernement a créé un site, « Place de l’emploi public », devant regrouper les offres d’emploi des employeurs publics. Toutefois, ce site n’est connecté ni à Pôle emploi ni à Cap emploi. En conséquence, les offres d’emploi dont il s’agit ne disposent, par ce biais, d’aucune visibilité.
En outre, le recours à la loi est nécessaire pour prévoir les conditions dans lesquelles des personnes handicapées pourraient déposer leur curriculum vitae dans un espace dédié de « Place de l’emploi public ». Il s’agit d’encadrer la diffusion de ces données sensibles avec l’aide de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, la CNIL.
Aussi, la commission est défavorable à cet amendement de suppression.
Je le rappelle d’autant plus volontiers que je n’en suis pas l’auteur : le rapport de Catherine Di Folco et Didier Marie, c’est 8 mois de travail, c’est 104 auditions, c’est une adoption à l’unanimité par la commission des lois du Sénat. C’est donc un travail sérieux, et c’est une approche du handicap dans la fonction publique qui se veut la plus universelle et la plus bienveillante possible.
En tant que rapporteur, je ne voudrais donc pas que le débat dérape s’agissant de sujets qui nous touchent tous, les uns et les autres, à divers degrés dans nos vies personnelles. On ne peut pas persister dans la procrastination au motif qu’il faudrait encore réfléchir davantage.
Nous débattons de l’inclusion des personnes handicapées dans l’emploi public. Nous voulons transformer la fonction publique – en tout cas, le Gouvernement prétend le faire, et de notre côté, nous nous efforçons de l’y aider. Il s’agit là d’un sujet important ; c’est précisément la raison pour laquelle nous avons appelé ces articles en priorité, aujourd’hui, à quatorze heures trente. Nous ne voulions pas le voir examiné dans la nuit, à une heure où les travées de cet hémicycle seraient moins fournies. Ce faisant, nous avons démontré l’importance que nous attachons à cette partie du texte !
M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Merci !
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.