M. Didier Marie. En vertu de la rédaction actuelle de l’article 8, le recours au nouveau contrat est possible « pour mener à bien un projet ou une opération identifié ». Cette formulation, aussi large que floue, permettra de faire entrer dans le champ de ce nouveau contrat l’essentiel des contrats à durée déterminée actuels. De ce fait, les CDD aujourd’hui conclus pourraient demain être remplacés par ces contrats dits « de projet », qui, à leur terme, échappent au versement d’une prime de précarité et à la possibilité de transformation en CDI.
De ce point de vue, la rédaction de l’article 8 n’est pas conforme à l’étude d’impact, en vertu de laquelle ce nouveau contrat vise à répondre aux « besoins temporaires » des employeurs qui nécessitent des « compétences spécifiques ». Il convient donc de la corriger, afin de clarifier le périmètre du recours à ce type de contrats. Tel est l’objet de cet amendement de repli.
M. le président. L’amendement n° 298 rectifié, présenté par MM. Canevet, Delcros, Moga et Médevielle, Mme Goy-Chavent et M. Longeot, est ainsi libellé :
Alinéas 2, 11 et 19
Après les mots :
recruter un agent
insérer les mots :
pour les emplois du niveau des catégories A et B
La parole est à M. Michel Canevet.
M. Michel Canevet. Contrairement aux auteurs des amendements précédents, je suis favorable aux contrats de projet. En effet, il faut apporter un peu de souplesse aux collectivités et, plus largement, à l’ensemble de la fonction publique, pour pouvoir mener à bien un certain nombre de missions.
Cela étant, il s’agit essentiellement de missions qui requièrent des qualifications. C’est pourquoi les recrutements par contrats de projet doivent être limités aux emplois de catégories A et B.
M. le président. L’amendement n° 119 rectifié bis, présenté par MM. Durain, Marie, Kanner et Jacques Bigot, Mme de la Gontrie, M. Fichet, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Sueur, Sutour, Tourenne, Antiste, Bérit-Débat, Montaugé, Temal et Raynal, Mme Monier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéas 2, 11 et 19
Après le mot :
agent
insérer les mots :
sur un emploi de catégorie A
La parole est à M. Jérôme Durain.
M. Jérôme Durain. J’ai écouté avec beaucoup d’attention les précédents avis de la commission et du Gouvernement.
Madame la rapporteur, vous défendez les contrats de projet en disant qu’ils répondent à un besoin d’expertise dans la fonction publique.
Monsieur le secrétaire d’État, vous dites qu’ils répondent à un besoin de compétences particulières, qu’il s’agisse des systèmes d’information, des PLUIH ou du recrutement d’un chef de projet en matière de rénovation urbaine.
En somme, on aurait besoin de cette expertise pour des agents de catégorie A. C’est d’ailleurs ce que souligne l’étude d’impact : ce contrat vise à répondre à la conduite de projets nécessitant des compétences spécifiques. À cet égard, l’étude d’impact donne plusieurs exemples d’application de contrats dits « de projet », comme la réorganisation des outils en matière de ressources humaines ou la maîtrise d’ouvrage dans un chantier complexe, qui correspondent bel et bien à des missions de conception.
Voilà pourquoi, en allant un peu plus loin que M. Canevet, il nous semble opportun de limiter les contrats de projet aux agents de catégorie A.
M. le président. L’amendement n° 120 rectifié bis, présenté par MM. Durain, Marie, Kanner et Jacques Bigot, Mme de la Gontrie, M. Fichet, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Sueur, Sutour, Tourenne, Montaugé, Temal et Raynal, Mme Monier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéas 3, 12 et 20, premières phrases
Remplacer les mots :
d’un an
par les mots :
de dix-huit mois
La parole est à M. Didier Marie.
M. Didier Marie. Cet amendement tend à aligner la durée minimale du contrat de projet du secteur public sur celle prévue en droit du travail pour le secteur privé, soit dix-huit mois.
À nos yeux, la fonction publique n’a pas vocation à se voir appliquer des outils du droit du travail selon des modalités moins favorables que dans le privé. D’ailleurs, si tel était le cas, quelle serait la prochaine étape ? Un alignement vers le bas des contrats de projet en vigueur dans le privé, par parallélisme avec le public ? Dans ces conditions, on risque de dégringoler assez vite !
M. le président. L’amendement n° 130 rectifié bis, présenté par MM. Durain, Marie, Kanner et Jacques Bigot, Mme de la Gontrie, M. Fichet, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Sueur, Sutour, Tourenne, Antiste, Bérit-Débat, Montaugé, Temal et Raynal, Mme Monier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéas 3, 12 et 20, premières phrases
Remplacer le mot :
six
par le mot :
trois
La parole est à M. Jérôme Durain.
M. Jérôme Durain. Cet amendement vise à aligner la durée maximale du contrat de projet du secteur public sur celle prévue en droit du travail pour le secteur privé, soit trente-six mois.
Didier Marie vient de le rappeler : la fonction publique n’a pas vocation à se voir appliquer les outils du droit du travail selon des modalités moins favorables.
Par ailleurs, le contrat de projet a vocation à répondre à un « besoin temporaire » de l’employeur. Or un projet d’une durée équivalente à un mandat n’entre pas dans le champ des besoins temporaires.
Nous avons eu un débat qui a suscité un peu d’émotion sur les procès qui pourraient être intentés à des employeurs recourant de manière excessive à des emplois contractuels. Le risque existe de favoriser des pratiques qui s’apparentent à du clientélisme, avec des contrats qui dureraient le temps d’un mandat. Il ne nous semble pas opportun de prêter le flanc à cela.
Trop allonger la durée de ces contrats de projet serait injuste au regard de ce qui se fait dans le secteur privé et pourrait fragiliser le principe de neutralité des agents publics.
M. le président. L’amendement n° 206 rectifié, présenté par Mmes N. Delattre et Costes, MM. Collin, Gabouty et Guérini, Mmes Guillotin et Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et MM. Léonhardt, Requier, Roux, Vall, Castelli et Gold, est ainsi libellé :
Alinéas 5, 14 et 21, premières phrases
Après les mots :
avec la réalisation de l’objet pour lequel il a été conclu
insérer les mots :
et en l’absence de l’ouverture d’une offre pour un projet ou une opération comparable dans le délai de deux mois
La parole est à M. Jean-Claude Requier.
M. Jean-Claude Requier. Le contrat de projet, qu’il est proposé de créer à l’article 8, revêt un intérêt évident pour l’ensemble des employeurs publics. Nous ne remettons pas en cause sa création. Toutefois, afin d’assurer l’équilibre entre le besoin de flexibilité de ces employeurs et la nécessité d’accorder une sécurité minimale aux personnes recrutées par cette voie, nous proposons de mieux encadrer les conditions de résiliation prématurée de ce contrat, telles qu’elles ont été clarifiées par la commission des lois.
Dans cette optique, le présent amendement tend à créer un droit de reclassement pour les agents recrutés par voie de contrat de projet lorsque ce dernier est mené à bien avant la fin de la durée initialement prévue. Il s’agit également d’une garantie pour les employeurs, dès lors que la perspective de bénéficier d’un avenant pour travailler sur un nouveau projet permettra de s’assurer que l’agent concerné réalisera ce projet de la manière la plus efficace possible.
M. le président. L’amendement n° 69 rectifié, présenté par Mmes N. Delattre, M. Carrère et Costes, MM. Collin et Guérini, Mme Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et MM. Léonhardt, Requier, Roux, Vall, Castelli et Gold, est ainsi libellé :
Alinéas 5, 14 et 21, secondes phrases
Après les mots :
ne peut pas se réaliser
insérer les mots
du fait d’un évènement étranger à la volonté des parties
La parole est à M. Jean-Yves Roux.
M. Jean-Yves Roux. Le présent amendement vise à préciser la rédaction de nos rapporteurs quant aux causes possibles de résiliation anticipée d’un contrat de projet, en spécifiant que celle-ci ne pourra intervenir, outre la réalisation de ce projet, que lorsqu’un évènement étranger à la volonté des parties le justifiera.
La rédaction proposée ici pour encadrer les circonstances de résiliation s’inspire de la théorie jurisprudentielle de l’imprévision développée par le juge administratif.
Il s’agit de s’assurer que l’employeur agira en responsabilité au moment du recrutement et de la résiliation d’un tel contrat, afin d’éviter des dépenses publiques inutiles provoquées par le fait du prince.
M. le président. L’amendement n° 557 n’est pas soutenu.
L’amendement n° 338 rectifié bis, présenté par Mme Noël, M. D. Laurent, Mme Deromedi, M. Bonhomme, Mme Duranton et M. Mandelli, est ainsi libellé :
Alinéa 11
Après le mot :
agent
insérer les mots :
, pour les emplois du niveau des catégories A et B,
La parole est à Mme Nicole Duranton.
Mme Nicole Duranton. L’article 8 du projet de loi instaure des contrats de projet pour une durée maximale de six années. Ces contrats doivent avoir pour but de mener à bien un projet ou une opération spécifique et leur échéance est la réalisation dudit projet ou de ladite opération.
L’objet de l’amendement est d’exclure le recours à ces contrats de projet pour des emplois du niveau de la catégorie C, dans la mesure où, à nos yeux, le recours au contrat de projet ne doit pouvoir intervenir que pour l’exercice d’une fonction requérant des qualifications spécialisées et ne pas entraîner la précarisation des agents les moins qualifiés.
M. le président. Les trois amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 297 rectifié est présenté par MM. Canevet, Delcros et Moga, Mmes Saint-Pé et Férat, MM. Bonnecarrère, Médevielle et Longeot, Mme Goy-Chavent et MM. Kern et Laugier.
L’amendement n° 339 rectifié bis est présenté par Mme Noël, M. D. Laurent, Mme Deromedi, M. Bonhomme, Mmes Duranton et Morhet-Richaud et M. Mandelli.
L’amendement n° 545 est présenté par M. Lafon.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 11
Après le mot :
déterminée
insérer les mots :
ou par un détachement
La parole est à M. Michel Canevet, pour présenter l’amendement n° 297 rectifié.
M. Michel Canevet. L’objet de cet amendement est d’ouvrir le bénéfice du contrat de projet, dont j’ai déjà dit combien il me semblait fondé, aux fonctionnaires en situation de détachement.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Duranton, pour présenter l’amendement n° 339 rectifié bis.
Mme Nicole Duranton. Il est défendu.
M. le président. L’amendement n° 545 n’est pas soutenu.
L’amendement n° 381, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 16
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Il s’agit, par cet amendement, de supprimer le relèvement de la durée maximale du contrat à trois ans en cas de vacance temporaire d’emploi dans la fonction publique territoriale qu’a décidé votre commission.
Nous considérons que la fixation à deux ans, au maximum, des contrats de vacance temporaire institués par la loi Sauvadet de 2012 ménage un équilibre entre la nécessité de souplesse dont doit disposer l’employeur et la prévention de la précarité des agents contractuels.
De plus, l’ouverture de la possibilité de recruter par voie de contrat sur des emplois à tous les niveaux, prévue dans le présent projet de loi, offre des souplesses qui nous paraissent satisfaisantes.
Pour la clarté du propos, je précise que, même si cet amendement fait partie d’une discussion commune, il ne concerne pas le contrat de projet, mais des contrats liés à des vacances spécifiques.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Di Folco, rapporteur. L’amendement n° 129 rectifié bis vise à préciser que le projet ou l’opération pour lequel serait conclu un contrat de projet doit « répondre à un besoin temporaire » et « nécessiter des compétences spécifiques ».
Cet ajout me semble malvenu. Le projet lui-même peut répondre à un besoin qui n’a rien de temporaire. Sa mise en place peut être ponctuelle, mais le projet peut perdurer, par exemple lorsqu’il s’agit de créer un nouveau service public ou de développer un nouveau système informatique. La mise en place de ces projets est limitée dans le temps, mais pas les projets eux-mêmes.
Les termes de cet amendement me semblant inappropriés, l’avis est défavorable.
L’amendement n° 298 rectifié vise à restreindre le contrat de projet aux emplois du niveau des catégories A et B. La commission ayant étendu ce contrat à la catégorie C, elle n’y est pas favorable. Il lui semble en effet nécessaire de faire appel à toutes sortes de compétences, de tous niveaux, pour monter une « équipe projet ». Il serait regrettable de devoir se priver d’une compétence de niveau dit « inférieur », ce qui n’est pas péjoratif dans ma bouche.
Je rappelle en outre que, en droit, les catégories A, B et C s’appliquent non pas à des emplois, mais à des corps ou à des cadres d’emplois de fonctionnaires. Par analogie, on parle d’emplois du niveau de la catégorie A, B ou C pour désigner les emplois permanents qu’ont vocation à occuper les fonctionnaires appartenant aux corps ou aux cadres d’emplois de catégorie A, B ou C.
Surtout, par définition, les emplois créés pour mener à bien un projet ponctuel ne correspondent à aucun des emplois permanents qu’ont vocation à occuper des fonctionnaires. Il semble donc difficile d’ouvrir ces emplois à des agents de telle ou telle catégorie, alors même que ces emplois ne sont pas destinés à être occupés par des fonctionnaires. C’est la raison pour laquelle la commission a supprimé toute référence à ces niveaux d’emploi dans sa rédaction.
Cet argumentaire vaut également pour l’amendement n° 119 rectifié bis, qui tend à limiter le dispositif aux emplois de la catégorie A.
L’amendement n° 120 rectifié bis vise à porter de un an à dix-huit mois la durée minimale du contrat de projet, comme c’est le cas dans le secteur privé. Le contrat ne pourrait donc être rompu par anticipation, au motif que le projet ne peut pas se réaliser, qu’à l’expiration de cette durée. Cela ne me paraissant pas illégitime, je m’en remets à la sagesse du Sénat.
L’amendement n° 130 rectifié bis vise à ramener à trois ans, au lieu de six, la durée maximale du contrat de projet, par analogie avec le code du travail. Or cette modification serait, à mon sens, défavorable à l’agent. En effet, contrairement à un salarié de droit privé, un agent public en CDD peut toujours démissionner sans avoir à payer de dommages et intérêts à son employeur. Les conditions de licenciement sont également plus souples qu’en droit du travail, mais le licenciement doit tout de même être motivé par l’intérêt du service. C’est pourquoi j’invite nos collègues à retirer leur amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.
L’amendement n° 206 rectifié vise à interdire la rupture anticipée du contrat de projet fondée sur le motif que le projet ne peut pas se réaliser, dès lors qu’une « offre » d’emploi serait publiée dans un délai de deux mois pour un projet ou une opération « comparable ». J’en comprends l’intention, mais cette rédaction donnerait selon moi naissance à un nid à contentieux. Il est préférable de laisser le juge apprécier, en cas de litige portant sur la rupture anticipée du contrat, si le projet initial ne pouvait effectivement être mené à bien. L’amendement, que je vous inviterai à adopter, apporte une garantie supplémentaire afin d’éviter que la rupture anticipée ne résulte de la volonté arbitraire de l’employeur. L’avis est donc défavorable.
S’agissant de l’amendement n° 69 rectifié, l’article 8 prévoit que, à l’expiration de la durée minimale d’un an, le contrat de projet puisse être rompu de manière anticipée par l’employeur, dans le cas où le projet ou l’opération ne peut pas se réaliser.
Ce dispositif s’inspire du droit du travail, dans lequel le contrat à objet défini peut, à l’expiration de sa durée minimale de dix-huit mois, puis à la date anniversaire de sa conclusion, être rompu pour tout motif « réel et sérieux ». Il ne faut pas forcer l’analogie, cependant, car un CDD de droit public peut être rompu sur l’initiative de l’agent ou de l’employeur beaucoup plus facilement qu’en droit privé.
Cet amendement tend à préciser que la rupture anticipée du contrat n’est justifiée que si le projet ou l’opération ne peut pas se réaliser « du fait d’un évènement étranger à la volonté des parties ». J’y suis favorable, car cela correspond à l’intention de la commission. En dehors de ce cas, le contrat pourra toujours être rompu par anticipation, soit par la démission de l’agent, soit par son licenciement, dans les conditions du droit commun.
Concernant l’amendement n° 338 rectifié bis, qui vise à réserver le contrat de projet aux emplois de catégories A et B, je ne vais pas de nouveau développer les arguments : j’ai déjà expliqué pourquoi la commission est défavorable à une telle disposition.
Les amendements identiques nos 297 rectifié et 339 rectifié bis, qui visent à ouvrir le contrat de projet aux agents de la fonction publique territoriale par voie de détachement, répondent à une préoccupation tout à fait légitime. Néanmoins, ils sont satisfaits, car la réglementation applicable aux positions des fonctionnaires de l’État et des collectivités territoriales autorise déjà leur détachement sur contrat. Je vous renvoie, pour la fonction publique de l’État, à l’article 14 du décret du 16 septembre 1985 et, pour la fonction publique territoriale, à l’article 2 du décret du 13 janvier 1986. Les conditions du détachement mériteraient sans doute d’être assouplies dans la fonction publique hospitalière, mais cela relève du domaine réglementaire. Je sais les employeurs publics territoriaux très attentifs à cette question.
J’espère, monsieur le secrétaire d’État, que vous confirmerez cette analyse.
Je demande le retrait de ces amendements.
S’agissant de l’amendement n° 381 présenté par le Gouvernement, l’avis est défavorable.
Les employeurs publics locaux peuvent avoir recours à un agent contractuel pour faire face à une vacance d’emploi, dans l’attente du recrutement d’un fonctionnaire. Le contrat est conclu pour une durée maximale d’un an, mais sa durée peut être prolongée jusqu’à deux ans, lorsque la procédure de recrutement d’un fonctionnaire n’a pu aboutir. Sur l’initiative de plusieurs de nos collègues, la commission a porté cette durée maximale à trois ans, apportant ainsi un assouplissement qui nous semble bienvenu. Le renouvellement n’est possible, je le rappelle, que si la procédure de recrutement d’un fonctionnaire n’a pu aboutir, ce qui ajoute un garde-fou.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Pour les mêmes raisons que la commission, le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 129 rectifié bis présenté par M. Durain.
L’amendement n° 298 rectifié de M. Canevet vise à limiter le recours au contrat de projet aux agents des catégories A et B. Le projet de loi initial ouvrait ce contrat aux trois catégories. Or, comme vous le savez, les députés ont fait le choix d’en restreindre le bénéfice aux catégories A et B, contre l’avis de la rapporteur et celui du Gouvernement. De ce fait, nous ne pouvons que partager l’initiative de la commission des lois du Sénat d’avoir rétabli la catégorie C dans le texte. L’avis est donc défavorable.
L’amendement n° 119 rectifié bis de M. Durain tend à circonscrire le périmètre de ce contrat aux seuls agents de catégorie A. Par cohérence, l’avis est défavorable.
Concernant l’amendement n° 120 rectifié bis, qui vise à aligner la durée minimale du contrat de projet sur celle qui est en vigueur dans le secteur privé, soit dix-huit mois, Mme la rapporteur s’en est remise à la sagesse du Sénat. Il se trouve que la durée de douze mois prévue dans le projet de loi est le fruit d’une discussion intense entre les représentants des trois versants, surtout des employeurs publics territoriaux, et les organisations syndicales, à l’occasion du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale et du Conseil commun de la fonction publique. Elle correspond à un point d’accord auquel ceux-ci sont parvenus. Tout le monde n’en était pas satisfait, certains auraient préféré une durée moins longue, d’autres une durée plus longue, mais le Gouvernement s’est rangé à l’avis majoritaire issu du travail des instances. L’avis est donc défavorable.
L’avis est défavorable sur l’amendement n° 130 rectifié bis, pour les raisons qu’a indiquées Mme la rapporteur.
S’agissant de l’amendement n° 206 rectifié, nous craignons, comme Mme la rapporteur, que son adoption fasse naître des contentieux. L’avis est donc défavorable.
L’amendement n° 69 rectifié, portant sur la précision relative à un évènement étranger à la volonté des parties, a reçu un avis favorable de Mme la rapporteur. Cette question nous semble toutefois relever du champ réglementaire, et nous souhaitons y répondre par décret, en donnant suite à la volonté des auteurs de cet amendement. L’avis du Gouvernement est donc défavorable.
L’amendement n° 338 rectifié bis tend à limiter le champ du contrat de projet aux catégories A et B ; l’avis est défavorable.
S’agissant des amendements nos 297 et 339 rectifié bis, je confirme l’analyse de Mme la rapporteur : ils sont satisfaits. Je vous épargne les références qui ont été citées, je les aurais moi-même mentionnées si j’avais dû argumenter en premier.
Enfin, je maintiens l’amendement n° 381 du Gouvernement, qui vise à supprimer le relèvement de la durée maximale du contrat à trois ans en cas de vacance temporaire. Nous avons eu ce débat à l’Assemblée nationale, où nous nous étions engagés sur cette disposition.
M. le président. La parole est à M. Jérôme Durain, pour explication de vote.
M. Jérôme Durain. Vous l’avez compris, nous sommes résolument contre ce contrat de projet, dont nous considérons qu’il sera une trappe à précarité pour les agents qui en bénéficieront et qu’il enfonce un coin dans le statut.
Je viens de consulter le Guide des métiers territoriaux, dans lequel je cherchais des exemples : la fonction publique territoriale regroupe 1,812 million d’agents, 233 métiers, 35 familles professionnelles et 8 filières professionnelles.
Ces chiffres viennent d’abord contredire vos propos, madame la rapporteur, selon lesquels on ne pourrait pas assimiler les contrats de projet aux catégories A, B ou C, parce que ce serait incomparable. Si, dans une fonction publique riche de près de 2 millions d’agents, on est incapable de trouver des métiers suffisamment divers pour répondre aux besoins des collectivités, c’est que l’on s’y prend mal !
La même réflexion vaut pour vous répondre, monsieur le secrétaire d’État. Vous indiquez que, votre philosophie, c’est de permettre à des agents qui le souhaitent de passer quatre ou cinq ans dans la fonction publique, puis de repartir. Cela signifie que l’on renonce au statut, qu’on le met de côté pour ouvrir la porte à des contractuels, choisissant ainsi résolument d’affirmer que la fonction publique est incapable de répondre aux besoins des employeurs publics, que ses agents ne peuvent ni évoluer ni se diversifier et que l’on ne peut pas recruter de nouveaux profils et les former.
Pour toutes ces raisons, nous sommes opposés à cet article. Nous sommes contre les conditions de durée proposées, nous sommes contre l’absence de garanties apportées à ces agents, nous sommes contre la création d’un contrat dont les garanties sont moindres que celles qui s’attachent aux contrats de chantier qui existent dans le privé. Nous voterons donc pour les différents amendements qui tendent à amoindrir la portée de ce dispositif et contre ceux qui nous paraissent dangereux, notamment la possibilité de détachement, qui me paraît particulièrement scabreuse.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des lois.
M. Philippe Bas, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. Il est naturel, cher collègue, que nous ne soyons pas d’accord, car nous avons une philosophie différente. Vous avez exposé la vôtre, qui n’est pas celle de la majorité de la commission, et je constate que ce n’est pas non plus celle du Gouvernement.
Étant moi-même profondément attaché au service public et à la fonction publique, je me permets de rappeler que le statut des fonctionnaires n’a pas été créé par le général de Gaulle pour leur avantage, mais dans l’intérêt du service public.
M. Max Brisson. Bravo !
M. Jérôme Durain. Ai-je dit autre chose ?
Mme Laurence Cohen. Nous n’avons rien dit d’autre !
M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Par conséquent, si le Parlement et le Gouvernement estiment que l’intérêt du service public passe, très partiellement, par de nouvelles souplesses, vouloir leur opposer l’exigence que le statut soit la seule modalité d’emploi des agents qui concourent au service public me semble être une absurdité.
Vous dites que ce dispositif va créer de la précarité, mais je ne vois pas comment on créerait de la précarité en créant des emplois. C’est tout le contraire ! Ce qui crée de la précarité, c’est le manque de souplesse pour gérer en interne des projets, qui conduit à faire appel à un prestataire extérieur au lieu de recourir à des emplois directs. Cela se passe très souvent, aujourd’hui, parce que notre système est trop rigide.
Pour l’assouplir, il faut permettre à nos collectivités de renoncer à recourir à des marchés avec des prestataires, pour réaliser en interne des projets, par le moyen du contrat de projet. Je ne vois pas en quoi ce procédé pourrait créer de la précarité, alors qu’il crée, au contraire, de l’emploi public qui n’existait pas, et je ne vois pas en quoi il porterait atteinte aux Tables de la Loi d’un statut qui a été conçu, je le répète, dans l’intérêt du service public et qui peut donc être aménagé dans l’intérêt du service public. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 129 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l’amendement n° 298 rectifié.
M. Michel Canevet. Je le retire !
M. le président. L’amendement n° 298 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 119 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)