M. le président. Monsieur Féraud, l’amendement n° 14 est-il maintenu ?
M. Rémi Féraud. Non, je le retire, monsieur le président.
Je remercie le rapporteur de sa réponse, qui montre bien la difficulté d’application des dispositions que nous sommes en train d’adopter.
M. le président. L’amendement n° 14 est retiré.
Je suis saisi de six amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 33 rectifié quater, présenté par M. Bazin, Mme Eustache-Brinio, M. Bascher, Mmes L. Darcos et Morhet-Richaud et MM. Paccaud, Charon, Brisson, Mandelli, Houpert et Karoutchi, est ainsi libellé :
Alinéa 27
Supprimer les mots :
et n’en permet pas une utilisation dans de meilleures conditions
La parole est à M. Arnaud Bazin.
M. Arnaud Bazin. Il est de plus en plus fréquent qu’une multitude de services soient offerts sur une même plateforme, certains d’entre eux entrant dans le champ des services taxables – intermédiation – et d’autres non – communication et contenu éditorial. La taxe sur les services numériques créée par ce projet de loi s’appliquera pour les plateformes proposant une multitude de services uniquement à la part de leur chiffre d’affaires résultant des sommes encaissées au titre de la fourniture des services taxables.
Cet amendement vise donc à préciser le mode de calcul du montant de la taxe pour les entreprises proposant sur leur plateforme plusieurs types de services. Ainsi, tout abonnement payé dans le but de pouvoir accéder à un service de communication entre utilisateurs, sans que ses communications soient publiques, ne doit pas entrer dans le champ des activités taxables.
M. le président. Les trois amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 39 est présenté par M. Frassa.
L’amendement n° 46 rectifié est présenté par MM. Bizet, Brisson, Cambon, Charon, Danesi et del Picchia, Mmes Duranton et Garriaud-Maylam, M. Grand, Mme Gruny, MM. Kennel, Laménie et Lefèvre, Mme M. Mercier, M. Milon, Mme Morhet-Richaud, M. Poniatowski, Mme Ramond et MM. Savary et Vaspart.
L’amendement n° 55 rectifié bis est présenté par MM. Kern, Longeot et Cigolotti.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
I. – Alinéa 27
Remplacer les mots :
n’en permet pas une utilisation dans de
par les mots :
n’a pas pour unique objet de permettre à l’utilisateur de bénéficier de l’interface dans les
II. – Alinéa 28
Remplacer les mots :
permettant de réaliser un tel placement dans de
par les mots :
d’un service dont l’unique objet est de réaliser un tel placement dans les
L’amendement n° 39 n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Patricia Morhet-Richaud, pour présenter l’amendement n° 46 rectifié.
Mme Patricia Morhet-Richaud. Il est défendu.
M. le président. L’amendement n° 55 rectifié bis n’est pas soutenu.
Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 25 rectifié bis est présenté par M. P. Dominati, Mme Boulay-Espéronnier, MM. Darnaud, Houpert et Laménie, Mme Lavarde, MM. de Nicolaÿ, Panunzi et del Picchia, Mme Puissat et MM. Savary et Vogel.
L’amendement n° 59 rectifié bis est présenté par M. Capus, Mme Mélot et MM. Lagourgue et Guerriau.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. – Alinéa 27
Remplacer les mots :
n’en permet pas une utilisation dans de
par les mots :
ne constitue pas uniquement le moyen de bénéficier de l’interface dans les
II. – Alinéa 28
Remplacer les mots :
de réaliser un tel placement dans de
par les mots :
uniquement de réaliser un tel placement dans les
La parole est à Mme Christine Lavarde, pour présenter l’amendement n° 25 rectifié bis.
Mme Christine Lavarde. Il est défendu.
M. le président. La parole est à M. Emmanuel Capus, pour présenter l’amendement n° 59 rectifié bis.
M. Emmanuel Capus. Il s’agit d’un amendement de clarification. Il vise à préciser la nature des sommes qui sont incluses dans l’assiette de la taxe.
Je ne reviens pas sur les définitions extrêmement juridiques des prestations accessoires et des prestations principales. Cet amendement a pour objet de définir précisément ce qui est inclus et ce qui ne l’est pas, notamment les prestations accessoires, par exemple les services logistiques. En effet, certaines entreprises, tout en fournissant une interface numérique, assurent également des services de logistique pour la livraison des biens. Ces services sont implantés sur notre territoire, fournissent des salariés, des implantations physiques, des constructions de hangars, de bâtiments. Il convient de ne pas les inclure dans la taxe et, après les débats assez nourris à l’Assemblée nationale, d’apporter une nouvelle clarification pour lever tout doute.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur. Sur les prestations connexes, l’Assemblée nationale a souhaité apporter des précisions qui nous semblent utiles, car la question est complexe : ces prestations entrent-elles ou non dans l’assiette de la taxe ?
L’adoption de l’amendement n° 33 rectifié quater introduirait une incertitude pour les redevables.
Sur les amendements identiques nos 25 rectifié bis et 59 rectifié bis, la commission s’en remet à la sagesse du Sénat, même si la disposition qu’ils tendent à insérer est plus restrictive et entraînerait peut-être une perte d’assiette. Elle demande par conséquent le retrait des autres amendements à leur profit.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Cédric O, secrétaire d’État. Le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 33 rectifié quater, notre objectif étant de taxer l’ensemble des services connexes apportant une plus-value aux services déjà taxés, si je puis m’exprimer ainsi.
Le risque est de rendre possible un contournement et d’entraîner une baisse des recettes en permettant aux opérateurs de transférer l’intégralité de la valeur tirée des internautes dans le prix des services connexes. Il serait possible, par un système de noria, de passer de l’un à l’autre.
La mesure remet en cause le souhait du Gouvernement d’assurer une approche des offres multiservices qui soit pour la TSN cohérente avec l’approche retenue pour la TVA. Si elle était adoptée, cette mesure déboucherait sur un cadre juridique complexe et peu lisible. Elle n’est pas nécessaire, car la rédaction actuelle permet déjà d’exclure les services connexes, tels que les services de logistique, qui sont commercialisés séparément.
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’ensemble de ces amendements.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 33 rectifié quater.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 25 rectifié bis et 59 rectifié bis.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L’amendement n° 47 rectifié bis est présenté par MM. Bizet, Brisson, Cambon, Charon, Danesi et del Picchia, Mmes Duranton et Garriaud-Maylam, M. Grand, Mme Gruny, MM. Kennel et Laménie, Mme Lassarade, M. Lefèvre, Mme M. Mercier, M. Milon, Mme Morhet-Richaud, M. Poniatowski, Mme Ramond et MM. Savary et Vaspart.
L’amendement n° 65 est présenté par le Gouvernement.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéas 33 et 38
Remplacer les mots :
consultée par un utilisateur
par les mots :
en fonction de données relatives à un utilisateur qui consulte cette interface en étant
La parole est à Mme Patricia Morhet-Richaud, pour présenter l’amendement n° 47 rectifié bis.
Mme Patricia Morhet-Richaud. Cet amendement, qui correspond précisément à l’interprétation du texte telle qu’elle résulte de l’étude d’impact et du rapport de Joël Giraud à l’Assemblée nationale, vise à clarifier l’article 1er pour s’assurer que le numérateur de la proportion est calculé en fonction des seuls messages publicitaires affichés sur l’interface numérique lors de sa consultation par un utilisateur localisé en France, et non en fonction de l’ensemble des messages publicitaires placés sur cette interface dès lors que cette dernière a été consultée par un utilisateur localisé en France.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État, pour présenter l’amendement n° 65.
M. Cédric O, secrétaire d’État. Cet amendement a le même objet : il vise à clarifier la règle de territorialisation des services de publicité. Il tend à préciser que seuls sont pris en compte pour le calcul du coefficient de présence numérique les messages publicitaires ciblant des utilisateurs localisés en France au moment de la consultation de l’interface numérique.
M. le président. Les amendements identiques nos 38 et 54 rectifié bis ne sont pas soutenus.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 47 rectifié bis et 65.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 41 n’est pas soutenu.
L’amendement n° 23, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 40
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Cédric O, secrétaire d’État. Les termes de la loi sont clairs. Il n’est donc pas nécessaire selon nous de renvoyer à un décret en Conseil d’État, comme le propose la commission.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur. Ce décret n’est pas nécessaire, il est indispensable !
Notre collègue socialiste vient de nous expliquer que les critères de localisation n’étaient pas simples. Ainsi, l’adresse IP n’est pas forcément le moyen le plus sûr de localiser un utilisateur. C’est ennuyeux, car la taxe dont nous discutons repose précisément sur le pourcentage d’utilisateurs situés en France. Il est donc important de les localiser.
Pour en revenir aux adresses IP, il faut savoir que, aujourd’hui, certaines d’entre elles sont communes à l’ensemble de la flotte de téléphones d’un opérateur. C’est la raison pour laquelle il est écrit dans la loi « ou tout autre moyen ». Avouez qu’il s’agit là d’une définition un peu vaste, qui nécessite a minima des précisions de nature réglementaire.
La commission a considéré que, pour localiser précisément l’internaute, puisque c’est la base de la taxation, un décret en Conseil d’État était indispensable. La commission est évidemment très opposée à l’amendement du Gouvernement, qui vise à supprimer cette excellente initiative.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Cédric O, secrétaire d’État. Monsieur le rapporteur, il s’agit d’une question d’adaptation. Nous faisons face à une économie et à des acteurs qui innovent et s’adaptent extrêmement vite, plus vite que la loi ou le décret. Les termes « tout autre moyen » signifient qu’il peut être recouru à une instruction fiscale, ce qui nous permettra de nous adapter plus rapidement et d’attraper ce qu’on veut attraper au fil des modifications effectuées par les acteurs.
M. le président. L’amendement n° 7 rectifié bis, présenté par Mme Lepage, M. Duran, Mme G. Jourda, M. P. Joly, Mmes Guillemot et Conway-Mouret, M. Antiste, Mme Blondin et MM. Manable, Jacquin et Daudigny, est ainsi libellé :
Alinéa 44
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Patrice Joly.
M. Patrice Joly. Cet amendement vise à inclure dans l’assiette de la taxe sur les services numériques les sommes versées en contrepartie de la mise à disposition d’une interface numérique qui facilite la vente de produits soumis à accises. Si tel n’était pas le cas, le produit de la vente de tabac, d’alcool et/ou de produits énergétiques par le biais d’une plateforme numérique ne serait pas soumis à cette taxe.
Selon le Gouvernement, leur inclusion « serait susceptible d’être contraire au droit européen ». Selon nous, cette disposition du projet de loi est contraire à l’esprit qui a animé le législateur jusqu’ici. Il est donc proposé de réintroduire dans l’assiette de la taxe tous ces produits dont la vente doit être taxée, dès lors qu’elle est effectuée par le biais d’une plateforme.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur. L’auteur de l’amendement a lui-même donné l’avis de la commission : cette proposition est contraire au droit européen, plus précisément à la directive européenne du 16 décembre 2008, qui encadre strictement le régime des accises, notamment pour les produits alcooliques.
La commission a donc émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 51 rectifié, présenté par MM. Bargeton, Yung et Adnot, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 44
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque le montant des sommes encaissées en contrepartie des services taxables dépasse le seuil fixé au 2° du III de l’article 299 et est inférieur à 50 millions d’euros, les sommes encaissées les trois premières années suivant celle au cours de laquelle la taxe devient exigible sont diminuées d’un abattement. Le taux de l’abattement est fixé à 100 % la première année, 60 % la deuxième année, 30 % la troisième année.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Julien Bargeton.
M. Julien Bargeton. Pour des raisons de sécurité juridique, cela a été dit, cette taxe ne contient qu’un taux, fixé à 3 % du chiffre d’affaires numérique. Comme c’est le cas pour beaucoup de dispositifs fiscaux, joue donc un effet de seuil : soit une entreprise est taxée, soit elle ne l’est pas, et ce quelle que soit sa taille. L’entrée dans l’impôt est une véritable question pour les entreprises.
Le code général des impôts retient plusieurs mécanismes permettant de lisser les effets de seuil de l’impôt. Pour la taxe Gafa, plusieurs dispositifs ont été proposés. À cet égard, j’ai voté l’amendement de M. Collin tendant à prévoir un calcul du chiffre d’affaires sur deux ans, mais il n’a pas été adopté. L’objet du présent amendement est de proposer un lissage différent, à savoir un abattement pour les entreprises dont le chiffre d’affaires numérique est supérieur à 25 millions d’euros, mais inférieur à 50 millions d’euros, le montant de 50 millions d’euros étant celui qui est retenu pour désigner traditionnellement les PME.
Cet amendement est conforme à l’objectif de ce texte, qui est de ne viser que les plus grandes entreprises du numérique. Il faut s’assurer que les jeunes pousses françaises, parfois appelées les licornes, ne seront pas empêchées de grossir par cette taxe ou qu’elles ne perdront pas leur attractivité. On le sait, le développement des start-up françaises passe parfois par l’adossement à d’autres entreprises. C’est le cas, par exemple, de l’entreprise Zen Ly, située dans le quartier de la Bastille à Paris.
Quand on examine les levées de fonds, on constate que les entreprises parviennent en quelques jours à lever des dizaines de millions d’euros. En 2018, les start-up françaises ont ainsi levé 3,62 milliards d’euros. De même, leurs chiffres d’affaires peuvent exploser très rapidement.
Notre amendement permettrait d’atténuer l’effet de seuil et d’envoyer un signal positif aux start-up françaises.
Au moment où le salon VivaTech connaissait un grand succès, et où étaient organisés en même temps le sommet Tech for Good et le G7 numérique, nous devons profiter de l’essor de notre économie. Je rappelle d’ailleurs, à la suite de M. le secrétaire d’État, que la France vient d’entrer pour la première fois dans le top 5 des pays qui attirent les investissements internationaux.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur. Cet amendement a été excellemment défendu. L’idée de lisser les effets de seuil afin de favoriser les PME en croissance, qui pourraient être victimes de seuils brutaux, me paraît assez intelligente.
La commission voit d’un très bon œil cet amendement, mais il n’est pas, semble-t-il, sans poser un certain nombre de problèmes juridiques. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement va dans un instant, je pense, vous demander de le retirer, cher collègue.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Cédric O, secrétaire d’État. Il s’agit d’un excellent amendement. Je le dis d’autant plus facilement que, dans une autre vie, alors que j’exerçais d’autres fonctions, j’ai été, à titre personnel, extrêmement favorable à cette approche, que j’ai beaucoup poussée auprès des différents étages de Bercy.
Malheureusement, un taux progressif introduirait une distorsion dans le taux effectif d’imposition entre les entreprises selon leur taille, ce qui serait contraire à la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne. Je suis donc contraint, à mon grand regret, de vous demander de retirer cet excellent amendement, monsieur le sénateur.
M. Jean-François Husson. Comment peut-on retirer un excellent amendement ? C’est de l’affichage !
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Gabouty, pour explication de vote.
M. Jean-Marc Gabouty. Je ne comprends pas, monsieur le secrétaire d’État, les positions contre le lissage des effets de seuil. Je pensais que le lissage faisait partie de la doctrine gouvernementale, puisqu’il a été mis en œuvre dans différents textes, notamment dans la loi Pacte.
Si vous êtes contre cet amendement pour des raisons purement techniques, vous auriez dû être pour celui qu’a défendu précédemment M. Collin, qui ne présentait pas les mêmes inconvénients, puisqu’il tendait à prévoir, comme ce fut le cas dans la loi Pacte, une durée pour franchir le seuil.
Je déplore ces raisonnements quelque peu contradictoires et à géométrie variable en fonction de la manière dont sont présentés les amendements, alors que vous vous dites plutôt attaché aux principes qui y sont défendus.
M. Jean-François Husson. Il n’y a rien d’orthodoxe !
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. Notre collègue Bargeton propose un abattement particulier pour les entreprises du secteur du numérique dont le chiffre d’affaires est compris entre 25 millions et 50 millions d’euros.
Il y a quelque chose d’un peu troublant dans cet amendement, qui conduira notre groupe à voter contre. S’il était adopté, cet amendement viderait la disposition de son sens. Il tend en effet à proposer un abattement de 100 % la première année, puis de 60 % la deuxième année. Que se passera-t-il la troisième année, monsieur Bargeton ?
M. Julien Bargeton. Ce sera 30 % !
M. Pascal Savoldelli. Voilà ! Il y a donc là une contradiction.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Cédric O, secrétaire d’État. Monsieur le sénateur, sur l’amendement n° 53 rectifié, la loyauté m’oblige à m’en tenir à la position du Gouvernement.
Le secrétariat d’État chargé du numérique est assez sensible à l’idée d’épargner les jeunes pousses françaises afin de leur donner les capacités de se battre contre leurs rivales des autres pays. Si nous pouvons examiner ce sujet au cours de la navette parlementaire, nous le ferons.
M. le président. Monsieur Bargeton, l’amendement n° 51 rectifié est-il maintenu ?
M. Julien Bargeton. Oui, monsieur le président.
M. le président. Quel est maintenant l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur. Je laisse le débat interne vivre. Je m’en remets donc à la sagesse du Sénat.
M. le président. L’amendement n’ayant pas été retiré, l’avis du Gouvernement est-il défavorable ?
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 15, présenté par MM. Lurel et Carcenac, Mme Taillé-Polian, MM. Kanner, Raynal, Éblé et Botrel, Mme Espagnac, MM. Féraud, Jeansannetas, P. Joly et Lalande, Mme Artigalas, MM. Bérit-Débat et Jacquin, Mmes G. Jourda et Lepage, MM. Mazuir, Montaugé et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 45
Remplacer le taux :
3 %
par le taux :
5 %
La parole est à M. Victorin Lurel.
M. Victorin Lurel. Toujours dans un souci d’efficacité et de rendement, tout en préservant parfaitement l’équité, nous proposons de porter le taux de la taxe de 3 % à 5 %.
Ce taux avait été proposé pour la TSN par le député européen Paul Tang, rapporteur au Parlement européen de la proposition de directive du Conseil concernant le système commun de taxe sur les services numériques applicable aux produits tirés de la fourniture de certains services numériques. Selon lui, alors que le taux d’imposition moyen des entreprises dans l’Union européenne est de 23,2 %, contre seulement 9,5 % pour les entreprises du numérique, « fixer le taux de la TSN à 5 % créerait une concurrence équitable entre les entreprises traditionnelles et les entreprises numériques et permettrait une meilleure contribution à l’impôt de la part du secteur du numérique, qui a été jusqu’ici sous-imposé ».
Une telle augmentation ne serait en aucun cas confiscatoire ou abusive dans la mesure où le montant de la taxe constituerait une charge déductible de l’assiette de l’impôt sur les sociétés pour les entreprises redevables de l’impôt en France. En relevant le taux de la taxe, on incite les entreprises du numérique à déclarer leurs bénéfices en France. Je rappelle que le Conseil d’État autorise un tel dispositif, à condition de ne pas créer une rupture caractérisée de l’égalité devant les charges publiques.
En portant le taux de 3 % à 5 %, on accroîtrait le rendement de la taxe, on augmenterait l’équité, sans pour autant créer de rupture caractérisée de l’égalité. En outre, je le répète, la taxe est déductible de l’impôt sur les sociétés pour les entreprises redevables de l’impôt en France.
M. le président. L’amendement n° 8 rectifié bis, présenté par Mme Lepage, M. Duran, Mme G. Jourda, M. P. Joly, Mmes Guillemot et Conway-Mouret, M. Antiste, Mme Blondin et MM. Manable et Daudigny, est ainsi libellé :
Alinéa 45
Remplacer le taux :
3 %
par le taux :
4 %
La parole est à M. Patrice Joly.
M. Patrice Joly. Je ne reviens pas sur l’argumentation qui a été développée par mon collègue précédemment.
Il s’agit là d’un amendement de repli. Si le taux de 5 % n’était pas adopté, il faudrait au moins le fixer à 4 %.
M. le président. L’amendement n° 62 rectifié, présenté par MM. Gabouty, Collin, Requier, Arnell, Artano, A. Bertrand et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Castelli et Corbisez, Mme Costes, M. Dantec, Mme N. Delattre, MM. Gold et Guérini, Mmes Guillotin et Laborde et MM. Roux et Vall, est ainsi libellé :
Alinéa 45
Remplacer le taux :
3 %
par le taux :
3,5 %
La parole est à M. Jean-Marc Gabouty.
M. Jean-Marc Gabouty. Pour ma part, je propose du dégressif raisonnable : après les taux de 5 % et 4 %, je suggère un taux de 3,5 %. (Sourires.)
Plus sérieusement, faute d’unanimité, la commission a proposé de fixer ce taux à 3 %. Or il nous faut anticiper une négociation internationale, avec l’OCDE ou la Commission européenne. Si l’objectif est de parvenir à un taux de 3 %, nous aurions tout intérêt à entamer les négociations sur la base d’un taux légèrement majoré, sinon nous n’aurons rien à négocier.
Mon raisonnement ne s’appuie pas sur le fond, sur le niveau d’imposition ou sur le chiffre d’affaires, il constitue uniquement une stratégie de négociation. Si on entame une négociation en étant déjà au taquet, je ne vois pas ce qu’on pourra négocier à l’échelon européen ou avec l’OCDE.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur. Monsieur le secrétaire d’État, tirez une carte ! Choisissez : 3 %, 3,5 %, 4 % ou 4,5 %… Il n’y a pas de raison particulière de choisir 3 % plutôt que 3,5 %, 4 % ou 4,5 %. On peut tirer à pile ou face, tirer au sort.
Plus sérieusement, si nous avons retenu le taux de 3 %, c’est simplement parce que c’est, en gros, l’équivalent d’un taux d’imposition de 20 %, soit à peu près la moyenne européenne basse des taux d’imposition sur les sociétés. C’est le taux qui avait été retenu dans le projet européen, sur lequel, d’ailleurs, le Sénat, je le rappelle pour la énième fois, s’était prononcé par une résolution.
Je pense donc qu’il vaut mieux en rester à cette solution équilibrée. Il n’y a aucune raison déterminante de considérer qu’un taux de 3,5 % serait mieux que 3 %, ou qu’un taux de 4 % serait mieux que 3,5 %, sauf à vouloir faire du rendement pur, mais tel n’est pas l’objectif. Ce que nous voulons, c’est une taxe équilibrée, qui tienne juridiquement.
La commission a donc émis un avis défavorable sur ces amendements, car elle souhaite en rester au taux de 3 %.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Cédric O, secrétaire d’État. Même avis que le rapporteur.
Si le passage de 3 % à 4 % est assez désagréable pour un géant du numérique, souvent américain, il est peu significatif au regard de ses résultats mondiaux. En revanche, le passage de 3 % à 4 % pour un acteur fortement exposé en France, souvent plus petit, et souvent français pour le dire franchement, peut, lui, avoir des conséquences assez dommageables sur sa pérennité.
Pour ces raisons, et pour des raisons de cohérence avec la directive européenne, il me semble préférable d’en rester à 3 %.