M. Philippe Dallier. Eh oui !
Mme Françoise Cartron. Dans cette perspective, j’accepte de retirer mon amendement, si cet approfondissement de la réflexion doit permettre de construire une réponse pertinente, non pas unique, mais adaptée à chaque territoire.
M. le président. L’amendement n° 265 est retiré.
La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. Monsieur le ministre, en prenant vos fonctions, vous affirmiez qu’il n’y aurait pas de loi portant votre nom. Aujourd’hui, le Parlement vous en réclame une deuxième : c’est le succès ! (Sourires.)
M. Roger Karoutchi. Au contraire, c’est l’échec.
M. David Assouline. M. Dallier a bien résumé les choses. Le débat de fond sur l’organisation de l’école est intéressant, légitime, et il se poursuivra. Cependant, ce n’est pas au détour d’un amendement de l’Assemblée nationale que l’on peut aborder un sujet aussi fondamental. Une telle façon de procéder relève d’une forme d’amateurisme.
Cela étant, les efforts accomplis par M. Grosperrin montrent qu’il est possible de construire un compromis, même s’il a voulu le faire de façon un peu précipitée. On ne peut que saluer sa tentative, mais j’espère qu’il entendra les appels à retirer son amendement, afin que le Sénat puisse en rester à un consensus qui renforcera sa position face à l’Assemblée nationale.
Le Gouvernement doit avoir une vision stratégique sur la question des écoles rurales. Quand il ne reste que cinq élèves dans un village, on ferme l’école, mais la fermeture de l’école entraîne le départ des familles, et c’est alors le village qui ferme ! C’est l’histoire de la poule et de l’œuf… Il faut sortir de cette spirale du déclin. Le Président de la République a déclaré avec force qu’aucune école ne fermera en milieu rural sans l’accord du maire : cela impose de redoubler les moyens pour maintenir les écoles dans les communes, plutôt que de maquiller des fermetures d’écoles par le biais d’un regroupement avec un collège.
Une dernière fois, monsieur Grosperrin, retirez votre amendement !
M. le président. La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour explication de vote.
Mme Sophie Taillé-Polian. Mon intervention sera en quelque sorte en miroir de celle de ma collègue Laurence Cohen, qui s’exprimait à travers le prisme de son expérience de membre de la commission des affaires sociales. Pour ma part, en tant que commissaire aux finances, je ne puis m’empêcher de replacer ce débat dans le cadre de la situation financière globale de notre pays.
Monsieur le ministre, vous déplorez des procès d’intention et affirmez que vous n’avez pas d’autres objectifs que ceux que vous affichez, notamment la mise en place du continuum éducatif, sur lequel nous nous rejoignons tous. Certes, mais la pratique quotidienne du Gouvernement, c’est l’application cohérente et constante d’une sorte de dogme de la mutualisation : il faut faire plus gros pour faire moins cher. Dans ce contexte, on ne peut pas nous reprocher de nourrir des craintes : trop d’engagements pris ne sont pas financés. Il n’est donc pas illégitime, pour les citoyens comme pour les parlementaires, de s’interroger sur certaines annonces non accompagnées de moyens.
Instaurer la confiance demande du temps, monsieur le ministre. Que vous vous en soyez remis à la sagesse du Sénat sur l’amendement n° 264 rectifié quater ne peut qu’inquiéter : sur un tel sujet, que vous qualifiez vous-même d’essentiel, on aurait pu attendre de votre part soit une adhésion franche à cette proposition de réécriture de l’article, soit la présentation d’une autre rédaction, fût-ce par le biais de sous-amendements. Prenez le temps d’une véritable concertation, en partant de principes qui font l’unanimité, notamment la nécessité d’un continuum entre le CM2 et la sixième.
Confirmons la suppression de l’article 6 quater et prenons le temps nécessaire à un débat en profondeur, pour parvenir à une solution satisfaisante, dans l’intérêt des enfants.
M. le président. La parole est à Mme Dominique Vérien, pour explication de vote.
Mme Dominique Vérien. Monsieur le ministre, je suis d’accord avec vous : il est important de construire le lien entre l’école élémentaire et le collège. Je vous suis encore lorsque vous dites qu’il faut sauver des collèges ; un collège est menacé dans ma commune. Regrouper des classes et travailler de manière innovante : pourquoi pas, si cela concerne les classes de CM1 et de CM2, mais le projet d’EPLSF inclut aussi les classes de maternelle. Or, certains élèves doivent faire près d’une heure de trajet pour se rendre au collège : on ne saurait imposer cela à des enfants de maternelle !
Un tel dispositif ne peut donc être mis en place que dans la concertation et en prenant l’avis des élus. En cela, l’amendement de Jacques Grosperrin améliore grandement le texte issu de l’Assemblée nationale. Je serais même tentée de le voter, pour éviter que le texte de l’Assemblée nationale ne soit rétabli ultérieurement, mais l’article 6 quater tel que rédigé par les députés a fait tellement de dégâts que l’on ne comprendrait même pas que nous en proposions une nouvelle rédaction. Dans l’Yonne, autour de Tonnerre, les professeurs et les parents d’élèves sont en train de bloquer des écoles, annoncent une grève des examens, à cause de cet article. Si nous le récrivions, ils entendraient que nous amendons simplement un texte qu’ils rejettent et qui n’a pas été suffisamment négocié avec eux.
Je vais donc me rallier à l’avis de notre collègue Philippe Dallier, qui demande du temps. Faut-il une loi « Blanquer II » ? Sans doute, au vu du travail qu’il reste à faire sur le statut du directeur d’école. Monsieur le ministre, il ne faudrait pas, en tout cas, que l’article soit rétabli dans sa version issue de l’Assemblée nationale : cela aurait vraiment des effets délétères dans nos territoires.
M. le président. La parole est à Mme Victoire Jasmin, pour explication de vote.
Mme Victoire Jasmin. Monsieur le ministre, cette semaine, le rectorat de la Guadeloupe a été bloqué, pour des raisons que vous connaissez sans doute, très liées à ce débat. Les syndicats d’enseignants sont unanimes et la grève continue. À Anse-Bertrand, dans le nord de la Grande-Terre, des écoles ont également été bloquées cette semaine, précisément en raison d’un projet de fermeture de classes. Ce n’est pas possible ! Le mouvement pourrait s’étendre à de nombreux territoires, notamment les plus démunis ! Je forme le vœu que nous soyons unanimes pour maintenir la suppression de cet article.
M. le président. La parole est à M. Claude Malhuret, pour explication de vote.
M. Claude Malhuret. Il me semble inutile de prolonger cette discussion, puisqu’il apparaît clairement que tout le monde s’accorde sur sa conclusion : nous allons en rester à la suppression de l’article 6 quater.
Je remercie néanmoins Jacques Grosperrin du patient travail qu’il a mené pour tenter de trouver une solution de compromis. Ce travail ne sera pas inutile, car il contribuera à la poursuite du débat dans les semaines et les mois qui viennent. Je vous remercie, monsieur le ministre, d’avoir dit que vous y étiez prêt. Cette discussion permettra d’apaiser les passions et d’approfondir la réflexion.
Notre groupe s’associe au consensus qui est en train de se dégager autour de la suppression pure et simple de l’article 6 quater.
M. le président. La parole est à M. Rachid Temal, pour explication de vote.
M. Rachid Temal. Monsieur le ministre, on ne peut que regretter l’introduction de ce dispositif dans le texte par voie d’amendement à l’Assemblée nationale, sans étude d’impact.
Cet article a fait couler beaucoup d’encre et a suscité une forte mobilisation. Nos échanges avec la communauté éducative indiquaient bien qu’il posait problème, au point, parfois, de masquer d’autres éléments de votre réforme.
Beaucoup de nos collègues ont évoqué le monde rural, qui tient également une place importante dans mon département du Val-d’Oise, mais les maires de la partie très urbaine du département avec lesquels j’ai échangé ont attiré mon attention sur les problèmes qu’ils rencontraient avec des établissements XXL, en matière tant de proximité que de lien avec les parents d’élèves.
Je salue la création d’une mission d’information qui travaillera sur ces questions ; j’en remercie la présidente de la commission. J’espère que notre collègue Jacques Grosperrin va retirer son amendement ou que la sagesse qui caractérise la Haute Assemblée s’exprimera une fois encore en confirmant la suppression de cet article, afin que nous puissions poursuivre sereinement nos travaux.
M. le président. La parole est à Mme Laure Darcos, pour explication de vote.
Mme Laure Darcos. Je souscris pleinement aux propos de ma collègue Françoise Cartron concernant la dimension pédagogique : elle constitue vraiment la priorité.
Il faudrait fixer un cadre juridique permettant de conforter le cycle 3, en consolidant les relations entre les professeurs du premier, ceux du second degré, les directeurs d’école et les principaux de collège. J’aurais même souhaité qu’un directeur d’école, et non pas nécessairement le principal, puisse prendre la tête du conseil d’administration, les directeurs d’école craignant d’être placés sous la coupe d’un principal.
Monsieur le ministre, j’imagine que le dialogue va se poursuivre. Certaines expérimentations, comme à Besançon, donnent des résultats formidables. Il importe, à mon sens, de consolider ces initiatives pédagogiques sur le plan juridique et de garder à l’esprit qu’il s’agit avant tout d’un projet pédagogique pour le cycle 3, visant à ce que nos enfants arrivent au collège mieux armés, pourvus des acquis fondamentaux.
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication. Mes chers collègues, la teneur de ce débat est tout à l’honneur du Sénat.
Monsieur le ministre, vous avez indiqué à quel point vous avez été blessé par des soupçons, que vous avez qualifiés d’injustifiés, sur ce dispositif et sur vos intentions. Je vous crois sincère, mais le soupçon fleurit souvent sur le terrain de l’incompréhension et, parfois, d’une forme de désespérance.
Cela a été dit, ce qui doit primer, c’est la pédagogie et l’éducatif, l’intérêt de l’enfant, autour duquel nous devons tous nous retrouver. Il existe cependant d’autres enjeux, comme l’aménagement du territoire, qui est lié à la qualité de vie et à l’attractivité. Cela nous conduit à réfléchir sur la pérennité de l’école en milieu rural ; nous devons le faire avec lucidité et honnêteté intellectuelle, en concertation avec les élus.
J’ai parlé de désespérance ; il faut replacer ce débat dans le contexte des années très difficiles que les élus ont vécues, avec des baisses de dotations, des réformes territoriales à marche forcée, la fermeture de certains services publics. Pour eux, l’école est le dernier rempart de la République : ils y sont attachés et nous font part de leurs inquiétudes. Pour autant, ils ne sont pas hostiles aux évolutions. J’ai interrogé les maires de mon département au mois de janvier : ils veulent que l’école soit de nouveau considérée comme un projet de société.
Le grand débat a donné l’occasion au Président de la République de renouer le dialogue avec les maires sur ces sujets. À Grand Bourgtheroulde, les premières questions qui lui ont été posées concernaient précisément l’école. Cela nous incite à prolonger la réflexion. Le ministère de l’éducation nationale a engagé des travaux, avec la mission confiée à Pierre Mathiot et à Ariane Azéma, de même que le Sénat. J’ai en effet souhaité, avec le bureau du Sénat, que soit lancée une mission sur les nouveaux territoires de l’éducation. Cette mission travaille depuis six mois sous l’égide de nos collègues Jean-Yves Roux et Laurent Lafon et elle remettra ses conclusions avant l’été.
Le dispositif qui nous occupe ici serait sans doute mieux compris s’il était inscrit dans un contexte plus large, prenant en compte le maintien des classes à vingt-quatre élèves annoncé par le Président de la République.
Il faut remettre les enjeux en perspective et en cohérence, accomplir ensemble un travail très approfondi aux fins de fédérer les acteurs de la communauté éducative autour de l’intérêt de l’enfant et de garantir un aménagement du territoire équilibré et respectueux de la ruralité.
Je m’en remets à notre rapporteur et à l’auteur de l’amendement. Sans doute nos échanges auront-ils fait évoluer leur réflexion !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Max Brisson, rapporteur. Je me réjouis de la sérénité des débats. Ce matin, nous avons fait tomber la température.
Sur quelles pistes pourrait s’engager la concertation que le ministre a appelée de ses vœux ? Je retiens de nos échanges qu’une véritable réflexion pédagogique sur l’école du socle est nécessaire. Nous devons définir en quoi elle correspond à la réalité de ce que sont les jeunes à l’école primaire et au collège. Comme l’a fort bien dit la présidente de la commission, c’est en fonction d’eux que nous devons construire l’organisation pédagogique de notre école. C’est dans cet esprit que nous devons examiner comment mettre en place cette école du socle dans la continuité des orientations pédagogiques définies depuis 2005.
Ensuite, nous devons réfléchir à l’organisation qui découle du choix pédagogique, à la gouvernance de l’école du socle, afin de l’adapter au continuum de ce cycle 3 dont parlait fort bien Laure Darcos.
Enfin, nous devons réfléchir à l’équité territoriale, cette promesse républicaine ancienne sur laquelle est fondée l’école. On mesure bien, à travers les cris de détresse des maires ruraux, qu’elle leur apparaît comme menacée. Nous avons besoin d’apaisement et de concertation.
À la différence de beaucoup d’entre vous, je ne demande pas une loi « Blanquer II ». J’appelle en revanche le ministre à construire du consensus autour de l’école du socle, aussi bien dans ses orientations pédagogiques que dans son organisation et sa gouvernance, et de rétablir la confiance quant à la volonté du Gouvernement de tenir cette promesse républicaine d’équité territoriale.
Je tiens à remercier Jacques Grosperrin, dont le remarquable travail a permis de recentrer le débat. Par respect pour ce travail, je ne lui demanderai pas de retirer son amendement, mais j’en appelle à sa sagesse, que je sais aussi grande que son attachement à l’école ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. Je me félicite, à mon tour, de la tenue – dans tous les sens du terme – de ce débat important, qui traduit la nécessité d’aller au fond des choses quand on aborde une telle question. C’est ce que nous avons fait ce matin, je crois, même si d’autres discussions seront bien sûr nécessaires.
Je ne suis pas certain de vouloir une loi « Blanquer II ». Non que je ne prenne pas du plaisir à être parmi vous, mais le processus législatif est dense… (Sourires.)
Encore une fois, je supplie les uns et les autres, dans cette enceinte mais surtout au-delà, de cesser d’introduire dans ce débat des questions qui n’ont pas de rapport avec son sujet : il n’y a, derrière cette proposition, aucun calcul économique ni aucun calcul politique.
C’est d’ailleurs très facile à comprendre.
Le calcul politique, s’il y en avait un, serait vraiment très mauvais : reconnaissez qu’il faut un certain masochisme pour mettre ce sujet sur la table… (Sourires.) Peut-être aurait-on pu mieux s’y prendre, mais nous recherchons l’intérêt général pour faire progresser le système scolaire ; je ne vois pas comment on pourrait prétendre le contraire.
Le calcul économique n’existe pas davantage, ni pour la direction d’école ni pour l’école du socle. En effet, toute évolution du statut des directeurs d’école entraînera des coûts supplémentaires. Du point de vue de la gestion, le système actuel est très économique ! Si j’avais les yeux rivés sur les économies à réaliser, je ne bougerais surtout pas d’un cil sur l’ensemble de ces sujets… Au contraire, je suis le premier à dire que la France dépense moins que la moyenne des pays de l’OCDE pour son école primaire, et qu’il y a donc un véritable investissement à faire pour l’école primaire. En plus de le dire, je le fais, puisque, rentrée après rentrée, nous consacrons plus de moyens à l’école primaire. C’est ainsi que, dans chaque département de France, nous aurons amélioré le taux d’encadrement à chaque rentrée entre 2017 et 2022. Le Président de la République l’a dit encore plus fortement, lorsque, dans sa conférence de presse, il a annoncé qu’il n’y aurait plus de fermetures d’école primaire rurale.
N’introduisons donc pas dans ce débat des sujets qui n’y ont pas leur place ! Cela ne fait que susciter des angoisses contre-productives. C’est une des douleurs de ce gouvernement d’avoir à assumer des angoisses dont les racines sont bien antérieures aux deux dernières années… Les fermetures d’école rurale en sont un bon exemple, madame Ghali, madame Préville, puisqu’elles ont été beaucoup plus nombreuses au cours du précédent quinquennat que depuis deux ans. Il faut être juste : nous fermons moins de classes, et encore moins d’écoles, qu’on en a fermées lors des deux quinquennats précédents, et nous avons l’intention d’en fermer moins encore à l’avenir.
La question première, une fois encore, c’est la démographie : moins d’enfants naissent, notamment dans les territoires ruraux. Je le répète aussi : je suis tout à fait disposé à mener une politique scolaire qui puisse contribuer à la renaissance démographique rurale. Territoire par territoire, il faut des projets en ce sens, l’école étant au cœur de cet enjeu.
Ainsi, il n’y a aucune volonté de fermer des écoles primaires. Le Président de la République l’a dit avec une netteté qui ne souffre pas de contestation. Nous mettons en œuvre ce qu’a dit le chef de l’État et que je dis moi-même depuis plusieurs mois. Cet engagement est très important, parce qu’il nous permet de considérer le sujet comme sanctuarisé : nous pouvons donc aborder les autres avec la sérénité qui convient, sans y introduire d’inquiétudes inutiles.
Je suis toujours un peu attristé quand, après avoir rappelé cent fois les garanties prévues, je vois les mêmes craintes revenir dans le débat. Non, l’école maternelle ne sera pas supprimée : vous avez voté voilà deux jours avant-hier l’instruction obligatoire à 3 ans. Non, il n’y a aucune volonté de fermer des écoles primaires,…
M. Rachid Temal. Et les classes ?
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. … ni d’économiser sur l’école primaire, à travers aucun projet, présent ou à venir : notre objectif est au contraire de renforcer l’école primaire au cours des prochaines années. Non, il n’y aura pas de remise en cause de la fonction de directeur d’école, ni de diminution du nombre de directeurs d’école ; je suis le premier à penser qu’ils sont extrêmement utiles, que leur fonction est fondamentale et que nous avons besoin de les renforcer.
Sur ces trois sujets, non seulement nous apportons des garanties en réponse aux inquiétudes, mais nous sommes volontaristes pour aller plus loin. Il serait sain que nous partions de ce socle pour mener toutes les autres discussions, d’un très grand intérêt, qui sont d’abord pédagogiques et éducatives, éventuellement organisationnelles.
En aucun cas le projet n’aboutissait à regrouper nécessairement écoles et collège sur un même site, ni même à obliger qui que ce soit à faire usage de l’outil proposé. Nous vivons malheureusement dans une société de défiance, depuis un grand nombre d’années, et il faut savoir en tenir compte dans la décision politique ; mais il faut savoir aussi mettre dans le débat public des thèmes importants et élargir au-delà du cercle des spécialistes des sujets d’intérêt général touchant à l’éducation.
Le travail très intéressant accompli par le sénateur Grosperrin nous a permis d’avancer d’un cran et de tenir ce débat ce matin. De même, je salue le travail des députées Cécile Rilhac et Valérie Bazin-Malgras. Toutes ces réflexions faisaient fond sur des travaux et des concertations assez importants. Que cela soit insuffisant pour habituer l’ensemble de la société française au thème, j’en ai conscience et le reconnais bien volontiers ; je souscris à la plupart des propos du sénateur Assouline à cet égard. Le sujet n’est pas pleinement mûr. Ce qui se passe depuis deux mois contribue-t-il à le faire mûrir ? À mes yeux, oui : nous devons nous réjouir que ce thème soit débattu, parce qu’ainsi certains entendent parler pour la première fois de l’école du socle et des enjeux qui lui sont liés. Devons-nous discuter davantage pour éventuellement aller plus loin ? Une grande partie d’entre vous répond oui. Je serais tenté de faire de même.
Cela étant, sur l’amendement, je maintiens mon avis de sagesse (Exclamations sur des travées du groupe socialiste et républicain.),…
M. Rachid Temal. Vous auriez pu faire un pas de plus !
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. … d’autant que les orateurs ont précisément fait preuve d’une grande sagesse dans leurs propos.
Il y a matière à un progrès pour l’éducation. Nous sentons bien dans nos débats, sur ce sujet comme sur d’autres, la possibilité d’un consensus sur l’éducation. Ainsi, on doit vous être reconnaissant d’avoir voté à l’unanimité pour l’instruction obligatoire à 3 ans : cela montre que les clivages peuvent être dépassés sur les sujets essentiels. Je vous prie de croire que mon désir le plus profond est d’aboutir à de tels consensus sur ces grands sujets d’intérêt général. Cela passe par le débat, qui est la marque d’une grande démocratie comme la nôtre !
M. le président. La parole est à M. Jacques Grosperrin. (Ah ! sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. Jacques Grosperrin. Tout l’intérêt de proposer une nouvelle rédaction pour cet article était que le ministre s’engage. Tout l’intérêt de supprimer en commission le texte introduit par nos collègues députées était de marquer notre opposition à cette forme d’école des savoirs fondamentaux.
Je vous remercie, monsieur le ministre, mes chers collègues, d’avoir fait vivre ce débat important et rendu hommage à mon travail, qui l’a rendu possible.
Je ne ferai pas durer le suspense : je retire mon amendement. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste. – Mme Françoise Laborde applaudit également.) Le consensus nécessaire pour le faire adopter – comme M. le ministre l’a souligné, l’école doit être transpartisane – n’est à ce jour pas réuni.
Je le regrette toutefois, car nous avions l’occasion d’inscrire dans la loi une mesure dont on parle depuis fort longtemps, un cadre juridique attendu par les établissements, comme celui de Jussey, en cours d’expérimentation. En dépit de quelques crispations corporatistes de la part d’enseignants du premier degré, l’école du socle reste à construire dans les mentalités. (M. Julien Bargeton opine.)
Certains élus aussi se sont inquiétés. Avec ce projet de loi pour une école de la confiance, monsieur le ministre, vous contribuez véritablement à renouer la confiance avec les élus que nous sommes.
Je reste fidèle à mes convictions : un établissement de l’école du socle devra être envisagé à l’avenir. Sa création aurait permis de donner du corps à l’école du socle par la fusion de budgets, par la possibilité de travailler plus facilement ensemble pour les professeurs des écoles et ceux de collège et par l’amélioration des liaisons entre CE2 et CM1, d’une part, et CM2 et sixième, d’autre part. Elle aurait constitué une solution pour les élus locaux, qui vont devoir adapter l’offre scolaire aux territoires ruraux, notamment pour tenir compte de la baisse démographique. Elle aurait pu sauver nos petits collèges et nos écoles.
Il faudra bien y réfléchir. Pour ma part, je suis convaincu que nous y reviendrons un jour. Reste que, à l’heure actuelle, les conditions ne sont pas réunies. Il nous faut évaluer les expérimentations en cours et en tirer tous les enseignements avant l’élargissement de l’application de la mesure. Il nous faut l’avis du Conseil d’État. Il vous faut aussi, monsieur le ministre, comme vous l’avez souligné, organiser une véritable concertation avec les élus, les enseignants, les parents, les organisations syndicales, les organisations d’élus et les chefs d’établissement ; sur toutes les travées, nous y tenons.
Je vous remercie, monsieur le ministre, d’avoir entendu la parole du Sénat. Cet amendement nous a offert l’occasion d’échanger et vous a permis d’être clair et précis devant la représentation nationale pour dissiper les rumeurs. Je vous remercie d’avoir précisé que le calendrier de la concertation n’est pas celui de la loi.
Je forme le vœu que la disposition adoptée par l’Assemblée nationale ne soit pas rétablie en commission mixte paritaire ou en nouvelle lecture ! (Applaudissements.)
Mme Samia Ghali. Bravo !
M. le président. L’amendement n° 264 rectifié quater est retiré.
En conséquence, les sous-amendements nos 485 rectifié, 484 rectifié bis, 506 rectifié et 488 rectifié n’ont plus d’objet, et l’article 6 quater demeure supprimé.
Mme Maryvonne Blondin et M. David Assouline. Très bien !
Articles additionnels après l’article 6 quater
M. le président. L’amendement n° 208 rectifié quinquies, présenté par Mmes Berthet, A.M. Bertrand, Garriaud-Maylam et Gruny, MM. Laménie, H. Leroy et Pierre, Mmes Lamure, Lassarade, Morhet-Richaud, Puissat et Giudicelli, MM. Husson, Bonhomme, Bascher, Babary et Charon, Mmes Deromedi et Delmont-Koropoulis et MM. B. Fournier, Gremillet, Pellevat, Rapin et Bonne, est ainsi libellé :
Après l’article 6 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La détermination du maillage scolaire, qui associe étroitement les élus locaux, s’inscrit dans une politique globale d’aménagement équilibré du territoire.
De plus, elle prend en compte le temps de transport maximum des élèves du premier degré depuis leur lieu d’habitation jusqu’à leurs établissements scolaires sans jamais dépasser trente minutes de trajet.
Dans les territoires de montagne, une attention particulière est apportée à conserver un aménagement scolaire adapté aux spécificités du territoire.
La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. L’amendement est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Max Brisson, rapporteur. Nous avons déjà débattu de cette question hier, à la faveur de la discussion de l’amendement n° 255 rectifié bis de M. Luche, qui l’avait d’ailleurs retiré. Je souhaite que cet amendement soit également retiré, faute de quoi j’y serai défavorable.