compte rendu intégral
Présidence de M. Thani Mohamed Soilihi
vice-président
Secrétaires :
M. Daniel Dubois,
Mme Annie Guillemot.
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Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu intégral de la séance du jeudi 9 mai 2019 a été publié sur le site internet du Sénat.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté.
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Questions orales
M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.
supplétifs de statut civil de droit commun
M. le président. La parole est à Mme Marta de Cidrac, auteure de la question n° 747, adressée à Mme la secrétaire d’État auprès de la ministre des armées.
Mme Marta de Cidrac. Madame la secrétaire d’État, je souhaite porter à votre connaissance la situation ubuesque que connaissent actuellement les supplétifs de statut civil de droit commun.
Consécutivement à l’adoption de plusieurs amendements à l’Assemblée nationale et à la publication de la loi de finances pour 2019, un certain nombre de ces supplétifs vous ont écrit dans le courant du mois de janvier 2019, afin de connaître les modalités pratiques de mise en œuvre de la mesure adoptée.
Ceux qui ont reçu une réponse en ont été étonnés. En effet, il leur était indiqué qu’ils devaient prendre contact avec le service de l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre de leur département de résidence. Ils l’ont évidemment fait aussitôt, mais les services départementaux de l’ONACVG leur ont indiqué qu’ils n’avaient reçu aucune instruction de la part du secrétariat d’État pour traiter les demandes d’allocation de reconnaissance effectuées par les supplétifs de statut civil de droit commun entre le 4 février 2011 et le 19 décembre 2013.
L’ensemble des associations de rapatriés s’interrogent sur cette situation et se demandent s’il y aurait une volonté délibérée de la part de l’administration de temporiser, voire de ne pas appliquer la mesure adoptée par le Parlement. Il est regrettable que ces mesures votées ne soient pas suivies d’effet, d’autant que les personnes concernées ont plus de 80 ans et sont pour la plupart de santé précaire.
Dès lors, je souhaiterais savoir si vous comptez agir, afin que des instructions claires et rapides soient données aux services départementaux de l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre et au bureau central des rapatriés et que le versement de l’allocation de reconnaissance sous forme de rente annuelle soit effectif le plus rapidement possible pour les vingt-six personnes concernées.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Geneviève Darrieussecq, secrétaire d’État auprès de la ministre des armées. Madame la sénatrice, vous le savez, le législateur a réservé de manière constante un traitement différent aux supplétifs de droit commun et aux supplétifs de droit local, du fait des conditions d’accueil particulièrement difficiles de ces derniers. Toutefois, le Conseil constitutionnel a reconnu la possibilité pour les harkis de droit commun de bénéficier de l’allocation de reconnaissance sous réserve qu’ils en aient fait la demande entre le 5 février 2011 et le 19 décembre 2013 – vous l’avez rappelé – et qu’ils aient engagé une procédure contentieuse en cas de rejet.
Dès l’adoption de la loi de finances pour 2019, qui prévoit le transfert de 106 000 euros pour le traitement de la situation des supplétifs de droit commun, j’ai demandé à l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre d’examiner l’ensemble des situations individuelles qui nous ont été rapportées.
En l’occurrence, soixante-quatorze personnes nous ont été signalées par une association. Sur ce nombre, seules vingt-cinq personnes, et non vingt-six, correspondent réellement à des supplétifs de droit commun. Trois d’entre elles sont décédées depuis lors. Les vingt-deux autres ne peuvent pas prétendre juridiquement à une allocation de reconnaissance, car elles n’ont pas fait leur demande dans la fenêtre qui leur était ouverte entre 2011 et 2013. Bien sûr, la plupart de ces personnes n’ont pas fait de recours en contentieux. Seules sept d’entre elles sont en effet allées en justice : elles ont toutes été déboutées.
Compte tenu de la volonté des parlementaires, comme de la nôtre, de soutenir ces harkis de droit commun, j’ai demandé à l’ONACVG de contacter chacune des personnes concernées, afin qu’elles soient intégrées aux dispositifs d’aide sociale de l’Office. Six personnes n’ont pas souhaité donner suite à cette démarche ; sept personnes n’ont pas exprimé de besoin particulier ; six personnes sont déjà accompagnées par le service d’action sociale de l’ONACVG – nous poursuivrons ce soutien actif – ; enfin, une personne sera reçue cet après-midi pour l’étude de son dossier et deux personnes se sont déjà vu attribuer 3 000 euros.
En somme, nous ne pouvons traiter ces dossiers sur le plan juridique et légal que par le biais de l’action sociale de l’ONACVG. Les traitements sont individualisés, et je peux vous assurer qu’une attention toute particulière sera portée à tous les dossiers.
baisse des dotations horaires globales et impact dans les collèges ruraux
M. le président. La parole est à M. Bernard Delcros, auteur de la question n° 730, adressée à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.
M. Bernard Delcros. Monsieur le ministre, je souhaite vous alerter sur l’avenir des collèges ruraux.
Dans le département du Cantal, la dotation en heures d’enseignement prévue pour la rentrée de 2019 diminue de deux cents heures, alors que le nombre d’élèves, lui, ne diminue pas.
Le nouveau mode de calcul des dotations est pénalisant pour les collèges ruraux. Par exemple, au collège d’Allanche, alors que la forte mobilisation de l’équipe éducative autour d’un projet adapté à ce territoire a permis d’augmenter les effectifs de 50 % en trois ans, la dotation en heures d’enseignement baisse de 9 % entre 2018 et 2019, et ce malgré une nouvelle augmentation des effectifs pour la rentrée prochaine.
L’explication donnée est plus qu’inquiétante : alors que ce collège compte quatre divisions, la dotation pour 2019 n’est calculée que sur la base de trois divisions, puis complétée par un ajustement horaire.
Ce nouveau mode de calcul appliqué aux petits collèges les affaiblit considérablement. On observe que des élèves de deux niveaux différents sont regroupés dans un même cours, que certaines équipes pédagogiques sont déstructurées, éclatées sur deux ou trois établissements et que la qualité de service est parfois dégradée. On constate aussi le découragement des enseignants et l’incompréhension des parents.
Les collèges ruraux mettent concrètement en œuvre une offre éducative d’excellence, ce que les résultats au brevet, bien supérieurs à la moyenne nationale, démontrent. Aussi, ces petits collèges doivent conserver leurs moyens pour maintenir la qualité de l’offre éducative et continuer à remplir leur mission essentielle au cœur des territoires hyper-ruraux. Pouvez-vous assurer aux élus et habitants du monde rural que vous maintiendrez les heures d’enseignement des collèges ruraux, dès lors que les effectifs ou le nombre de divisions resteront stables ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse. Monsieur le sénateur Bernard Delcros, le sujet est évidemment très important et s’inscrit dans le cadre du soutien que nous devons à l’éducation nationale en milieu rural. Comme vous le savez, le Président de la République s’est prononcé de manière très claire en faveur du soutien à l’école primaire rurale. C’est une raison supplémentaire d’évoquer cette question aujourd’hui.
L’école primaire rurale, non seulement contribue à la vitalité du monde rural, mais réussit également mieux que la moyenne des écoles primaires. En ce qui concerne les collèges, c’est un peu différent, car les collèges ruraux ne réussissent pas toujours aussi bien que les écoles primaires.
Nous devons nous préoccuper à la fois de la vitalité du monde rural et de l’intérêt des élèves. Vous avez raison de l’évoquer, l’intérêt des élèves passe par le taux d’encadrement. Or, dans le Cantal, le taux d’encadrement dans les collèges est parmi les plus favorables de France.
Malgré les chiffres que vous avez cités, le collège d’Allanche a un taux d’encadrement – ce qu’on appelle le H/E ou nombre d’heures d’enseignement par élève – qui atteint 1,81. Pour vous donner une idée, en REP+, dans les établissements les plus favorisés de notre système, ce taux n’est que de 1,45.
Le collège d’Allanche, qui accueille autour de soixante-cinq élèves, à ma connaissance, fait donc l’objet d’une attention toute particulière de l’éducation nationale et représente un coût par élève, assumé par la collectivité publique, beaucoup plus élevé en moyenne que dans la majeure partie du pays. Il faut poursuivre la stratégie qui y est menée, celle des équipes éducatives. Je salue cette stratégie, car elle favorise l’attractivité et permet d’accroître le nombre des élèves dans les établissements. Bien entendu, tant que l’existence d’un tel collège se justifiera par l’hyper-ruralité que vous avez évoquée, il faudra le maintenir et le soutenir.
Cependant, le soutenir signifie que l’on ne doit pas avoir une approche de la situation uniquement en termes de taux d’encadrement, d’autant que ce taux est très généreux aujourd’hui dans votre département, comme je viens de le dire, et que l’on doit aussi développer une approche qualitative, c’est-à-dire conduire des projets. De ce point de vue, encourager l’innovation et être capable de travailler autrement peuvent constituer des pistes à suivre.
Le recteur de Clermont-Ferrand est très attentif au cas du collège d’Allanche comme à celui de l’ensemble des collèges de son académie, tout particulièrement les collèges de Condat, de Pierrefort et de Pleaux dans le Cantal, qui ont le point commun d’accueillir soixante-dix élèves, voire moins. Il s’agit de situations très particulières auxquelles nous devons prêter une attention, non seulement quantitative – ce qui est largement fait aujourd’hui –, mais aussi qualitative, car nous visons l’intérêt des élèves.
M. le président. La parole est à M. Bernard Delcros, pour la réplique.
M. Bernard Delcros. Je vous remercie, monsieur le ministre. Simplement, on ne peut pas comparer les dotations entre établissements avec le seul ratio du nombre d’heures par élève : ce n’est pas juste ! Qu’il y ait quinze, vingt ou vingt-cinq élèves dans une division, le besoin en heures d’enseignement reste évidemment le même pour chacune des classes. Traiter équitablement tous les collèges consiste à attribuer une base de vingt-neuf heures par division, quel que soit le nombre d’élèves dans la division.
Monsieur le ministre, nous comptons sur vous pour soutenir ces collèges ruraux et pour maintenir les dotations dont ils ont besoin pour continuer à offrir un service éducatif de qualité. Ces collèges jouent en effet un rôle extrêmement important en termes d’offre éducative de proximité et un rôle essentiel pour l’avenir de ces territoires. Je compte sur vous !
effectivité de la possibilité d’effectuer des stages d’observation pour les élèves de moins de 14 ans
M. le président. La parole est à Mme Françoise Férat, auteur de la question n° 732, adressée à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.
Mme Françoise Férat. Monsieur le ministre, je reviens vers vous pour évoquer la non-application de la disposition législative concernant les stages d’observation rendus possibles pour les élèves de moins de 14 ans.
Par la voie d’un amendement que j’avais déposé, l’article 19 de la loi du 5 septembre 2018 autorise désormais ces élèves à effectuer leur stage d’observation, lié aux objectifs de l’éducation nationale dans les entreprises, comme leurs camarades de classe âgés de plus de 14 ans. Auparavant, pour faire simple, seules les administrations pouvaient les accueillir.
Puisque ce stage d’observation vise à faire découvrir aux élèves le monde professionnel et économique, à explorer les métiers et les formations et à développer leurs connaissances, il me paraissait pertinent d’ouvrir le champ des possibilités et d’élargir la tenue de ces stages d’observation dans toute entreprise, qu’elle soit sociétaire, individuelle, artisanale ou associative, aux élèves inscrits en troisième et en quatrième, même lorsqu’ils sont âgés de moins de 14 ans.
Bien que cette disposition ait été votée à la rentrée de septembre 2018, de nombreux témoignages issus de toute la France m’ont été adressés : ils rapportent que les chefs d’établissement ne sont pas informés de cette évolution législative et, de fait, n’autorisent pas l’accueil de ces élèves dans les entreprises.
Les parents saluent pourtant cette mesure de bon sens, que vous aviez acceptée, tout comme l’avait fait Mme la ministre du travail. Il ne manque plus qu’une étape : informer les principaux de collège. Je souhaiterais donc savoir dans quel délai une circulaire ouvrant cette faculté aux élèves de moins de 14 ans sera adressée aux chefs d’établissement, aux Dasen, voire aux recteurs.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse. Madame la sénatrice Françoise Férat, je partage tous les tenants et aboutissants de votre question et pourrai y répondre très favorablement.
Comme vous le savez, la séquence d’observation de cinq jours en milieu professionnel est obligatoire pour tous les élèves des classes de troisième, en application des dispositions de l’article D. 332-14 du code de l’éducation. Celle-ci est intégrée au parcours individuel de formation, d’orientation et de découverte du monde économique et professionnel. Elle se déroule dans les entreprises, les associations, les administrations, les établissements publics ou les collectivités territoriales dans les conditions prévues par le code du travail.
Nous avons fait évoluer ces conditions concrètes, puisque, cette année, nous avons créé une base de données qui offre des milliers de stages, notamment aux élèves issus de milieux défavorisés qui n’ont pas le réseau familial pour trouver de tels stages. Nous constatons un premier grand succès à ce titre, et je remercie tous ceux qui y contribuent.
Même si nous voulons aller encore beaucoup plus loin en matière d’orientation et de connaissance du monde du travail, la séquence d’observation a changé beaucoup de choses pour les élèves des classes de troisième de notre pays. On ne saurait donc accepter que des limites, de quelque nature que ce soit, empêchent certains élèves d’en profiter. L’objectif de cette séquence, nous le savons tous, est de sensibiliser les élèves à l’environnement technologique, économique et professionnel en liaison avec les programmes d’enseignement.
Nous avons effectivement donné la possibilité à des élèves de moins de 14 ans d’effectuer leur séquence d’observation dans une entreprise régie par le droit privé avec l’entrée en vigueur le 1er janvier 2019 de l’article 19 de la loi du 5 septembre 2018, qui a modifié l’article L. 4153-1 du code du travail.
Le 4 avril 2019, nous avons transmis une note à ce sujet à l’attention des recteurs d’académie, des inspecteurs d’académie, des directeurs académiques des services de l’éducation nationale et des principaux de collège. Cette note rappelle la législation et la réglementation sur les séquences d’observation en milieu professionnel pour les élèves des classes de quatrième et de troisième. Celle-ci répond à votre attente, puisqu’elle a pour objet d’apporter des précisions sur les points ayant suscité des questionnements.
Il est également à noter qu’un projet de décret, en cours de publication, modifie certaines dispositions du code de l’éducation relatives à l’accueil d’élèves mineurs de moins de 16 ans en milieu professionnel, afin d’être en adéquation avec l’article 19 de la loi du 5 septembre 2018. Mais sachez que la note que je viens de mentionner permet d’ores et déjà d’ouvrir les séquences d’observation aux élèves de moins de 14 ans. Surtout, sachez que je sensibiliserai tout particulièrement les recteurs et les rectrices d’académie à la question que vous avez soulevée.
M. le président. La parole est à Mme Françoise Férat, pour la réplique.
Mme Françoise Férat. Je vous remercie infiniment, monsieur le ministre. Vos propos sont de nature à me rassurer pleinement.
Comme vous l’avez rappelé, il s’agit d’une parenthèse importante que ces stages d’observation qui permettent d’approcher au plus près les métiers, de voir s’ils conviennent aux élèves ou s’ils ne leur conviennent pas, ce qui est tout aussi important. Vous savez mieux que moi combien l’orientation à ce stade du parcours de l’élève est terriblement importante.
état de catastrophe naturelle et fissurations de maisons
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Decool, auteur de la question n° 715, adressée à M. le ministre de l’intérieur.
M. Jean-Pierre Decool. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur.
L’été approche et, avec lui, le retour probable d’épisodes de fortes chaleurs. Si celles-ci font le bonheur du plus grand nombre, leurs conséquences, a fortiori ces dernières années avec le dérèglement climatique, peuvent aussi être redoutées.
Les élus locaux, dont nous sommes les relais ici au Sénat, craignent l’arrivée de cette saison estivale. Je pense aux maires du Nord, qui ne sont pas encore remis de l’été dernier, lorsqu’ils ont reçu des dizaines de concitoyens dont l’habitation s’était fissurée. Ces mêmes élus locaux ont passé beaucoup de temps pour que leurs communes obtiennent la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle. Je pense aussi à tous ceux qui, partout en France, ont subi la sécheresse.
Ces maires et leurs concitoyens ont déposé des demandes auprès de leurs compagnies d’assurance. Ils n’auraient jamais imaginé devoir endurer une telle catastrophe et ses conséquences. Peu d’entre eux soupçonnaient en effet que les fortes chaleurs que nous connaissons parfois auraient de tels effets sur les bâtiments.
En parant au plus pressé, les occupants de ces édifices sinistrés ont dressé des poutres de soutènement pour consolider les façades et installé des bastings pour renforcer les murs. J’ai à l’esprit le montant d’un devis s’élevant à 57 000 euros pour remettre en état une maison de taille modeste dans une commune rurale.
Ne pas pouvoir bénéficier des assurances, c’est la certitude de devoir renoncer à un patrimoine constitué durant une vie de labeur. Certaines maisons devront être reconstruites, alors même que celles-ci n’ont pas été totalement payées. Or, pour bénéficier des assurances, la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle est nécessaire.
De fait, mes questions sont simples : les communes qui ont connu un épisode de sécheresse l’été dernier bénéficieront-elles de l’état de catastrophe naturelle ? Quand seront-elles fixées sur leur sort ?
Nos concitoyens et les élus locaux qui les accompagnent attendent beaucoup de cette procédure. Ils attendent d’autant plus qu’elle dure depuis trop longtemps et qu’elle est fondée sur des critères parfois nébuleux, qu’il conviendrait de rendre plus clairs et plus transparents.
Emmanuelle Wargon, secrétaire d’État auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, répondait il y a quelques semaines à une question orale de notre collègue Serge Babary que la simplification de la procédure aboutirait dans les prochaines semaines et que l’un des objectifs était de rendre les critères de mise en œuvre plus lisibles. Ma troisième question est donc aussi simple : où en sommes-nous de cette réflexion ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Laurent Nunez, secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur. Un épisode de sécheresse-réhydratation des sols a touché le territoire métropolitain au cours du second semestre de 2018, notamment dans le nord-est du pays.
Au 1er mars 2019, plus de 3 300 demandes communales de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle au titre de la sécheresse 2018 ont été déposées dans soixante-huit préfectures de département, notamment dans le quart nord-est du pays.
Pour décider de la reconnaissance d’une commune en état de catastrophe naturelle, je rappelle que l’autorité administrative se prononce sur l’intensité anormale de l’agent naturel à l’origine des dégâts, et non sur l’ampleur des dégâts.
Compte tenu de la cinétique lente qui caractérise l’aléa sécheresse et des connaissances scientifiques disponibles à ce jour, deux critères cumulatifs sont mis en œuvre pour caractériser son intensité. Premièrement, une condition géotechnique : un sol d’assise des constructions constitué d’argile sensible aux phénomènes de retrait et/ou de gonflement. Deuxièmement, une condition de nature météorologique : une sécheresse du sol d’intensité anormale. Ce modèle permet à l’autorité administrative d’instruire l’ensemble des demandes sur le fondement de données techniques présentant les mêmes qualités et, ainsi, de s’assurer d’une égalité de traitement des dossiers.
L’instruction effective des dossiers déposés au titre de l’année 2018 interviendra au cours du printemps 2019, Météo-France et les services de l’État concernés ayant été tout particulièrement sensibilisés à la nécessité de traiter ces demandes dans des délais raisonnables.
S’agissant de la simplification de la procédure, elle aboutira dans les jours qui viennent. Les nouveaux critères seront utilisés dès cette année pour analyser les demandes au titre de l’épisode de sécheresse-réhydratation des sols de l’année 2018.
Ces travaux visent deux objectifs : d’abord, prendre en compte l’amélioration des connaissances scientifiques relatives au phénomène, notamment les modalités techniques de traitement des données météorologiques permettant d’établir le niveau d’humidité des sols superficiels par Météo-France ; ensuite, rendre plus lisibles pour les responsables communaux et les sinistrés les critères mis en œuvre. À cet égard, un effort de simplification de leur présentation sera réalisé.
Par cette réforme, nous améliorons la qualité des critères tout en rendant plus simple et compréhensible leur mise en œuvre.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Decool, pour la réplique.
M. Jean-Pierre Decool. Monsieur le secrétaire d’État, j’ai bien entendu que vous preniez en considération les attentes que j’évoquais, notamment en ce qui concerne la simplification de la procédure. Il convient d’assurer une plus grande transparence dans les critères retenus, voire de faire en sorte que les décisions soient prises davantage à l’échelon départemental que national.
attribution à saint-martin et à saint-barthélemy d’une préfecture de plein exercice
M. le président. La parole est à M. Guillaume Arnell, auteur de la question n° 716, adressée à M. le ministre de l’intérieur.
M. Guillaume Arnell. À la suite de la réforme de 2007 érigeant les collectivités de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy en collectivités d’outre-mer au sens de l’article 74 de la Constitution, la sous-préfecture de Saint-Martin et Saint-Barthélemy qui existait jusqu’alors est devenue une préfecture, placée depuis 2009 sous la responsabilité d’un préfet délégué, rattaché au préfet de la Guadeloupe.
Malgré cette transformation, les moyens humains, financiers et administratifs sont restés ceux de la sous-préfecture, voire ont régressé. Les services de l’État qui préexistaient ont été rattachés au préfet par le biais de conventions, sans augmentation de moyens, et la préfecture n’a bénéficié d’aucun des moyens budgétaires normalement affectés à son nouveau statut. Je pense en particulier aux budgets opérationnels de programme, les BOP.
Les préfets délégués successifs ont fait valoir à plusieurs reprises le manque de moyens mis à leur disposition et les risques encourus : pas de cabinet du préfet, pas de cellule de communication, un contrôle de légalité difficile à exercer, des services déconcentrés insuffisants, notamment dans les domaines de la santé, de l’urbanisme et de l’environnement.
En réponse aux demandes réitérées des élus, certaines évolutions ont été mises en œuvre, comme la modification du poste de secrétaire général de la préfecture, assuré depuis 2016 par un membre du corps préfectoral. Pendant huit ans, le préfet était le seul membre du corps préfectoral.
La survenance de l’ouragan Irma a également démontré les limites de la préfecture déléguée de Saint-Martin et Saint-Barthélemy, tant en ce qui concerne la gestion de l’anticipation de la crise que dans la situation de post-crise.
Notre situation institutionnelle avec un préfet délégué à compétence territoriale est unique en France. À titre de comparaison, Saint-Pierre-et-Miquelon, qui compte 6 000 habitants, et les îles Wallis et Futuna, peuplées de 14 000 habitants, sont des préfectures de plein exercice et ont à leur tête un préfet de plein exercice depuis de nombreuses années.
Or Saint-Barthélemy et Saint-Martin, avec respectivement 10 000 et 35 000 habitants, reçoivent en haute saison plus de 100 000 touristes pour la première et plus de 250 000 pour la seconde.
J’ajoute que l’île de Saint-Martin étant binationale, le préfet est confronté à des problématiques qui ne sont pas exactement celles de la Guadeloupe, tels l’immigration clandestine, le travail clandestin et les multiples fraudes, alors même que les législations et réglementations de Sint Maarten rendent l’action des services de l’État chargés de la sécurité particulièrement délicate.
Pour toutes les raisons que je viens d’évoquer, l’État doit poursuivre son engagement en faveur d’une évolution de ses services. Il doit également modifier les décrets de 2009, afin que la préfecture de Saint-Martin et Saint-Barthélemy ne soit plus une préfecture dite « déléguée » et que le préfet délégué soit un préfet de plein exercice.
M. le président. Mon cher collègue, je vous remercie de veiller à respecter le temps qui vous est imparti.
La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Laurent Nunez, secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur. Monsieur le sénateur, vous m’interrogez sur l’opportunité d’instituer une préfecture de plein exercice dans les collectivités de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy.
À la suite des évolutions institutionnelles que ces collectivités ont connues en 2007, que vous avez rappelées, l’organisation administrative des services de l’État a fait l’objet d’une adaptation significative visant à renforcer leur autonomie vis-à-vis de la préfecture de Guadeloupe, sans pour autant renoncer à son appui précieux.
Cette adaptation s’est d’abord traduite sur le plan juridique par la transformation de la sous-préfecture des îles du Nord en une préfecture regroupant les antennes des services déconcentrés, administrée par un préfet agissant par délégation du préfet de la Guadeloupe.
Cette transformation et l’organisation actuelle résultent de deux décrets du 24 juillet 2009 : d’abord, le décret relatif aux pouvoirs du représentant de l’État, à l’organisation et à l’action des services de l’État à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin ; ensuite, le décret relatif aux services de la préfecture de Saint-Barthélemy et Saint-Martin. Dans ce cadre, j’y insiste, bien que le préfet délégué agisse par délégation du préfet de la Guadeloupe, il assure la direction effective des services.
L’organisation en place répond avant tout à une logique opérationnelle : le préfet délégué dispose des services de la préfecture de Saint-Barthélemy et Saint-Martin, conçue comme une structure souple et intégrée, disposant de moyens propres, mais surtout capable de mobiliser les services de l’État en Guadeloupe pour certaines missions exigeant une expertise ou une compétence rare.
Par ailleurs, la circulaire du Premier ministre du 24 juillet 2018 incite les préfets de région à développer la mutualisation et le regroupement de services. Le dédoublement des services à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin irait à l’encontre de l’objectif de rationalisation et serait peu opportun : la proximité des deux territoires avec la Guadeloupe ne plaide pas en ce sens.
Enfin, l’organisation actuelle pour l’accompagnement des populations et des collectivités prodigué par l’État donne satisfaction. Après le passage de l’ouragan Irma, celle-ci a permis de renforcer, non seulement les moyens dédiés à la reconstruction, mais aussi ceux qui sont consacrés à la prévention et la gestion d’une crise éventuelle. Elle a également permis la reconstruction des locaux hébergeant les services de la préfecture de Saint-Barthélemy et Saint-Martin.
Croyez bien, monsieur le sénateur, que nous serons très attentifs à la pérennité de ces moyens et à leur renforcement si le besoin s’en faisait sentir.
effectifs de police à aix-en-provence