M. Loïc Hervé. Je voudrais ce soir vous parler d’un territoire qui, comme l’Alsace, se situe dans la Lotharingie, cette colonne vertébrale économique et culturelle de l’Europe qui comprend de nombreux territoires allant de la mer du Nord jusqu’à Gênes. Tous méritent de voir leurs spécificités reconnues, d’autant qu’ils sont traversés par nombre de frontières européennes.
Au sein de cette Lotharingie, la Haute-Savoie trouve une place tout à fait particulière. Si les Alsaciens ont été précurseurs, il est nécessaire que, dans plusieurs domaines, la coopération transfrontalière puisse être confiée à un interlocuteur précis et crédible, à savoir le conseil départemental. C’est la raison pour laquelle, avec mes collègues de Haute-Savoie Sylviane Noël et Cyril Pellevat, ainsi que Mme Berthet, sénatrice de la Savoie, et d’autres collègues, j’ai déposé cet amendement pour que la Haute-Savoie soit pleinement reconnue pour ce qu’elle est, notamment à l’égard de la Suisse, de la métropole internationale de Genève et de l’Italie, en particulier de la région autonome du Val d’Aoste, collectivité à statut spécifique.
Nous avons besoin de discuter avec ces territoires, nous le faisons déjà, mais il serait nécessaire que le département, en tant que collectivité territoriale, soit reconnu comme acteur de premier plan et chef de file dans tous les domaines, en particulier pour les transports et l’économie.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. La commission sollicite le retrait de cet amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
Votre proposition, monsieur Hervé, est déjà satisfaite par l’amendement de notre collègue Grosdidier, précédemment adopté, qui étend la possibilité à tous les départements de solliciter l’application de l’article 1er du projet de loi.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Hervé, l’amendement n° 135 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Loïc Hervé. La Haute-Savoie, contrairement au Loir-et-Cher, madame la ministre, est un département frontalier non seulement de l’Italie, mais aussi de la Suisse, un État avec lequel l’Union européenne a conclu des accords spécifiques. J’entends toutefois votre avis défavorable, et je vais accéder à la demande de retrait formulée par Mme la rapporteur.
Je proposerai à M. le président du conseil départemental de Haute-Savoie, si l’assemblée départementale le souhaite, de saisir le Gouvernement sur la base de ce texte pour que, dans un avenir que j’imagine très proche, conformément à votre engagement, nous puissions avancer sur la reconnaissance par la loi du caractère transfrontalier de notre département et du rôle spécifique que peut jouer le conseil départemental dans ses relations avec les différents territoires et États étrangers qui nous entourent et avec lesquels nous vivons au quotidien.
M. le président. L’amendement n° 135 rectifié bis est retiré.
Article 1er bis (nouveau)
Au premier alinéa de l’article L. 1426-1 du code général des collectivités territoriales, après le mot : « locale », sont insérés les mots : « ou à la promotion des langues régionales ».
M. le président. Les amendements nos 46 et 42 ne sont pas soutenus.
Je mets aux voix l’article 1er bis.
(L’article 1er bis est adopté.)
Article 2
I. – L’article L. 132-1 du code du tourisme est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Sur le territoire du département d’Alsace, l’organisme mentionné à l’article L. 132-2 est chargé d’animer et de coordonner l’action des collectivités et des autres acteurs concernés, en cohérence avec le schéma régional de développement du tourisme et des loisirs. »
II (nouveau). – Le chapitre unique du titre III du livre IV de la troisième partie du code général des collectivités territoriales, tel qu’il résulte du I de l’article 1er de la présente loi, est complété par un article L. 3431-7 ainsi rédigé :
« Art. L. 3431-7. – Sans préjudice de l’article L. 1511-2, le département d’Alsace est compétent pour promouvoir l’attractivité de son territoire en France et à l’étranger. »
M. le président. La parole est à M. André Reichardt, sur l’article.
M. André Reichardt. Comme vous le savez, le projet de loi que nous examinons aujourd’hui est censé décliner sur le plan législatif la déclaration de Matignon du 29 octobre dernier.
En matière de développement économique, cette déclaration précise que l’Agence pour le développement et l’industrialisation de la région Alsace, l’Adira, pourra se voir confier cinq blocs de compétences : le développement économique – 55 % du budget –, l’attractivité et le marketing territorial – 25 % du budget –, l’insertion par l’activité économique – 5 % du budget –, la solidarité territoriale – 10 % du budget – et l’accès aux services départementaux – 5 % du budget.
Or l’article 2 de ce projet de loi se contentait initialement de préciser que l’organisme mentionné à l’article L. 132-2 du code du tourisme, à savoir le comité départemental du tourisme, est chargé d’animer et de coordonner l’action des collectivités et des autres acteurs concernés, en cohérence avec le schéma régional de développement du tourisme et des loisirs.
Ma question est simple : où est passé le développement économique dans ce texte ?
Devant le silence du projet de loi à cet égard, la commission des lois a bien voulu intégrer un de mes amendements visant à rendre cette nouvelle collectivité d’Alsace compétente « pour promouvoir l’attractivité de son territoire en France et à l’étranger ». Elle n’a cependant pas pu examiner mon amendement n° 89, qui aurait permis à la collectivité d’Alsace de « favoriser l’activité économique sur son territoire par l’organisation et le financement d’organismes de développement ou par des conventions passées avec des organismes existants ». En effet, une nouvelle fois, cet amendement a été déclaré irrecevable au titre de l’article 40 de la Constitution par la commission des finances.
Je me dois donc de faire ici le même constat que précédemment. Alors que la question essentielle de ce texte est celle des compétences que l’on souhaite attribuer à la Collectivité européenne d’Alsace, le législateur est empêché de débattre à cet égard à cause d’une interprétation de l’article 40 de la Constitution par la commission des finances. Je ne peux être d’accord avec cela, et je souhaitais le dire explicitement ce soir.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 11 est présenté par M. Masson et Mme Kauffmann.
L’amendement n° 140 est présenté par M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
L’amendement n° 11 n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour présenter l’amendement n° 140.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Il est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Madame la ministre, mes chers collègues, nous en arrivons à deux amendements identiques sur la dénomination de la collectivité créée par le projet de loi. Ce sont des amendements de conséquence avec les amendements que nous avons adoptés à l’article 1er.
L’amendement n° 63 rectifié est présenté par MM. Danesi et Kern, Mme Keller et MM. Brisson, Laménie et Sido.
L’amendement n° 114 est présenté par Mme Schillinger et les membres du groupe La République En Marche.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. – Alinéa 2
Remplacer les mots :
du département
par les mots :
de la Collectivité européenne
II. – Alinéa 4
Remplacer les mots :
le département d’Alsace est compétent
par les mots :
la Collectivité européenne d’Alsace est compétente
Si vous en êtes d’accord, je vous propose de considérer que ces amendements identiques sont défendus et que l’avis de la commission est favorable, de même que l’avis du Gouvernement.
Puis-je considérer que ces amendements sont adoptés ?…
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 99 rectifié bis, présenté par MM. Gremillet et Sido, Mmes Joissains, Morhet-Richaud, Lassarade et Deromedi, M. Paccaud, Mmes Gruny et Micouleau, MM. Laménie et Pierre, Mmes Lanfranchi Dorgal et Guillotin, M. Charon, Mmes Noël et Férat et MM. Grosdidier, Husson, Menonville et Longuet, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Compléter cet alinéa par les mots :
et dans le respect de l’attractivité touristique et économique régionale et de la définition d’une image touristique de la région Grand Est
La parole est à M. Daniel Gremillet.
M. Daniel Gremillet. Cet amendement vise à créer une cohérence dans la promotion des destinations touristiques du Grand Est, qu’il s’agisse de l’Alsace, des Ardennes, de la Lorraine ou des Vosges.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. La commission sollicite le retrait de cet amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
Une telle précision ne nous paraît pas opportune, l’alinéa de l’article visé par l’amendement précisant déjà que cette action s’effectue en cohérence avec le schéma régional de développement du tourisme et des loisirs. On perçoit mal en outre ce que pourraient être « l’attractivité touristique et économique régionale » et la « définition d’une image touristique de la région Grand Est ».
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Nous partageons l’avis du rapporteur. Cet amendement est déjà satisfait, même si nous le comprenons au fond.
M. le président. Monsieur Gremillet, l’amendement n° 99 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Daniel Gremillet. Je prends acte que la cohérence régionale en matière touristique est satisfaite, et je retire cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 99 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 88 rectifié, présenté par Mme Troendlé, MM. Bockel et Danesi, Mme Keller, MM. Kennel, Kern et Reichardt et Mme Schillinger, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour ce faire, la Collectivité européenne d’Alsace coordonne sur son territoire la politique du tourisme en lien avec les autres collectivités et les acteurs du secteur.
La parole est à Mme Catherine Troendlé.
Mme Catherine Troendlé. La création de la Collectivité européenne d’Alsace va permettre de redonner une existence institutionnelle à l’Alsace.
L’Alsace est toujours restée une destination prisée et identifiée par les professionnels du tourisme, les acteurs économiques concernés et les visiteurs. Il est donc essentiel que la Collectivité européenne d’Alsace dispose de prérogatives suffisantes en matière de tourisme pour valoriser son potentiel et répondre aux attentes des différents acteurs.
Ainsi, elle doit pouvoir mettre en œuvre toutes les actions utiles et nécessaires à la valorisation et à la promotion de la destination Alsace, en cohérence avec le schéma régional de développement du tourisme et des loisirs. Elle doit pouvoir fixer, à l’échelle de l’Alsace, une stratégie globale de développement touristique afin de permettre à l’organisme mentionné à l’article L. 132-2 d’animer et de coordonner l’action des collectivités en ce domaine.
Il est en effet indispensable, alors que le projet de loi reconnaît désormais à la Collectivité européenne d’Alsace la compétence pour promouvoir l’attractivité de son territoire en France et à l’étranger, de permettre la lisibilité de son développement touristique.
Une telle promotion ne peut être pleinement efficace que si la Collectivité européenne d’Alsace est reconnue comme l’échelon adapté pour définir une stratégie globale en matière touristique.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. C’est un avis de sagesse bienveillante.
La portée de cet amendement n’est pas tout à fait claire : s’il ne s’agit pas d’attribuer la qualité de chef de file en matière de tourisme à la Collectivité européenne d’Alsace, il est difficile de comprendre ce que l’amendement apporte par rapport à la rédaction actuelle de l’article 2 ; à l’inverse, s’il s’agit d’attribuer à la Collectivité européenne d’Alsace le rôle de chef de file en matière touristique, cela pourrait porter préjudice aux compétences des communes alsaciennes qui sont très investies en la matière.
Il me semble toutefois que la question de la coordination de la politique touristique mérite d’être abordée. Je m’en remettrai donc, je l’ai dit, à la sagesse de notre assemblée.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Il me semble, madame Troendlé, que cet amendement est satisfait, puisque le projet de loi prévoit, au deuxième alinéa de l’article 2, que le comité départemental du tourisme est chargé d’animer et de coordonner l’action des collectivités et des autres acteurs concernés en la matière.
Le projet de loi traduit donc fidèlement en droit l’intention politique, en permettant à la future collectivité de mettre en œuvre la destination Alsace. Cette disposition ouvre des perspectives tout à fait intéressantes et respecte pleinement les compétences de la région.
C’est pourquoi je vous invite à retirer votre amendement, qui me semble complètement satisfait par la rédaction actuelle du texte.
M. le président. Madame Troendlé, l’amendement n° 88 rectifié est-il maintenu ?
Mme Catherine Troendlé. Oui, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. André Reichardt, pour explication de vote.
M. André Reichardt. Je soutiens sans réserve cet amendement. J’ai simplement une interrogation sur le positionnement de l’ajout qu’il prévoit au sein de l’article 2. Il vient compléter cet article, si bien que la phrase qui nous est proposée viendrait après un alinéa qui porte sur la promotion de l’attractivité du territoire alsacien en France et à l’étranger, ce qui à mon sens ne se limite pas au tourisme. J’aurais donc préféré, à titre personnel, placer cet ajout après l’alinéa 2 de l’article, qui traite effectivement du tourisme. Cela aurait peut-être été plus logique.
Indépendamment de cette question de forme, je soutiens totalement cet amendement, et je le voterai.
M. le président. Les amendements nos 47 et 32 ne sont pas soutenus.
Je mets aux voix l’article 2, modifié.
(L’article 2 est adopté.)
Article 2 bis (nouveau)
I. – À titre expérimental et pour une durée de cinq ans suivant l’entrée en vigueur de la présente loi, le département d’Alsace est autorisé à se voir déléguer par le conseil régional l’octroi de tout ou partie des aides mentionnées aux I et II de l’article L. 1511-2 du code général des collectivités territoriales.
II. – Tout autre département peut demander à bénéficier de l’expérimentation mentionnée au I du présent article, par une délibération motivée du conseil départemental, transmise au représentant de l’État avant le 30 septembre 2020. Le représentant de l’État adresse cette demande, accompagnée de ses observations, au ministre chargé des collectivités territoriales. Le Gouvernement vérifie que les conditions légales sont remplies et publie, par décret, la liste des départements autorisés à participer à l’expérimentation.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L’amendement n° 82 est présenté par Mme Harribey, M. Jacques Bigot, Mme de la Gontrie, MM. Durain, Fichet, Kanner, Kerrouche, Leconte, Marie, Sueur, Sutour et les membres du groupe socialiste et républicain.
L’amendement n° 141 est présenté par M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 150 est présenté par le Gouvernement.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Jacques Bigot, pour présenter l’amendement n° 82.
M. Jacques Bigot. L’article 2 bis, qui a été introduit par la commission des lois, participe du détricotage des compétences de la région Grand Est.
Il était important que la loi NOTRe attribue la compétence économique aux grandes régions, même si je sais bien que la démarche initiale des départements était d’obtenir une compétence en matière économique. Je rappelle qu’il existait une agence de développement dans le Bas-Rhin et une autre dans le Haut-Rhin. Pendant vingt-cinq ans, cette dualité a souvent été dénoncée, et il a fallu attendre que la loi NOTRe retire la compétence économique aux départements pour que, subitement, ces agences arrivent à fusionner.
Tout cela est à peu près sauvegardé dans l’accord. C’est pourquoi l’article 2 bis n’a pas lieu d’être.
M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour présenter l’amendement n° 141.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Nous ne comprenons vraiment pas la logique qui conduit à détruire les anciennes régions pour les reconstituer ensuite sous la forme d’un département, auquel les compétences régionales sont retransférées…
Si la région Alsace a une réalité historique, ce que nous ne nions évidemment pas, pourquoi ne pas, tout simplement, abolir les nouveaux découpages régionaux ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre, pour présenter l’amendement n° 150.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. L’article 2 bis autorise, à titre expérimental et pour une durée de cinq ans, la délégation par le conseil régional Grand Est à la Collectivité européenne d’Alsace de l’octroi de tout ou partie des aides aux entreprises. En application de cet article, tout département pourrait par ailleurs demander à bénéficier de la même expérimentation.
L’article introduit par la commission et relatif à la compétence économique n’est pas conforme à la loi NOTRe, et ce serait une erreur de le laisser dans le texte. Nous verrons bien si, ultérieurement et de manière générale, nous revenons sur cette disposition de la loi NOTRe, mais, à ce stade, j’aurais tendance à dire : la loi est la loi !
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Madame la ministre, je vous ferai observer très respectueusement que la loi NOTRe n’est pas encore constitutionnalisée…
M. Philippe Bas, président de la commission des lois. La fin de votre intervention montre que vous le savez parfaitement.
Le projet de loi que nous sommes en train d’examiner n’a pas moins de valeur que la loi NOTRe. Nous devons donc, mes chers collègues, nous sentir très libres.
Mme Catherine Troendlé. Très bien !
M. André Reichardt. Bravo !
M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Nous le sommes d’autant plus qu’au mois de juin 2018 nous avons adopté ici même une proposition de loi qui permet de procéder de manière beaucoup plus générale à ce type de délégation. Nous sommes d’ailleurs impatients, madame la ministre, de voir ce texte discuté par l’Assemblée nationale…
En l’espèce, notre rapporteur a été extrêmement modeste, puisqu’elle a proposé de réintroduire, uniquement à titre expérimental et pour la nouvelle collectivité d’Alsace, le dispositif que nous avions arrêté de manière pérenne pour toute la France.
Si l’ambition peut paraître limitée, je dois dire que nous y sommes particulièrement attachés. En effet, nous estimons depuis le début que les compétences attribuées par votre projet de loi à l’Alsace ne sont pas suffisantes et nous avons souhaité les densifier. Tel est l’objet de l’article 2 bis que nous avons adopté en commission.
Il se trouve en outre que, dans le domaine économique, l’Alsace a déjà une forte expérience. Ce n’est pas notre collègue André Reichardt qui me dira le contraire, puisqu’il est en grande partie à l’origine de cette situation.
Évidemment, ce dispositif, qui permettra à l’Alsace de défendre son attractivité économique dans de bonnes conditions, suppose un bon accord entre la région Grand Est et l’Alsace. Je ne doute pas qu’il soit possible de l’obtenir.
Notre rapporteur, Agnès Canayer, défendra dans un instant la position de la commission : nous ne sommes pas en accord avec ces amendements de suppression.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Ces amendements visent en effet à supprimer une disposition introduite par la commission et, pour les – excellentes – raisons avancées à l’instant par le président Philippe Bas, nous y sommes défavorables.
Je me sens d’ailleurs complètement confortée par les propos prononcés aujourd’hui même par le Président de la République devant les maires bretons : il s’est dit tout à fait favorable aux expérimentations…
En tout cas, il est très important de s’opposer à ces amendements de suppression afin de maintenir l’expérimentation qui est prévue à cet article.
M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.
M. Daniel Gremillet. Il me semble que l’article 2 bis n’est pas sans conséquence sur la région Grand Est.
Monsieur le président de la commission, madame la rapporteur, dès lors que vous voulez procéder à une telle expérimentation pour la nouvelle collectivité d’Alsace, vous devez aussi ouvrir cette possibilité aux huit autres départements. Si ce n’est pas le cas, je soutiendrai complètement la position du Gouvernement, car une telle disposition remettrait tout en cause, ce qui n’est pas acceptable.
Il faut que nous soyons très clairs sur ce sujet : cette expérimentation relative à l’exercice de la compétence économique ne peut pas se limiter à la nouvelle collectivité d’Alsace.
M. le président. La parole est à M. André Reichardt, pour explication de vote.
M. André Reichardt. Quel bonheur d’entendre le président de la commission des lois tenir un discours aussi clair, surtout quand il est favorable à une thèse que je défends !
Je crois vraiment que le Sénat doit rejeter ces trois amendements. Je ne citerai que deux raisons justifiant une telle décision : tout d’abord, il s’agit d’une expérimentation pour cinq ans ; ensuite, il est uniquement prévu que la région puisse déléguer à la Collectivité européenne d’Alsace cette compétence, rien de plus.
Si nous souhaitons véritablement ouvrir de nouveaux champs à la décentralisation, ce qui me semble être le cas, en voilà un bel exemple !
Enfin, je remercie le président de la commission d’avoir rappelé que la loi NOTRe n’a pas encore été élevée au niveau de notre Constitution. C’est une loi comme les autres, et ce que le Parlement a fait, il peut le défaire.
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Monsieur Gremillet, la disposition que nous avons introduite à l’article 2 bis reprend ce que le Sénat a voté en juin dernier lors de l’examen de la proposition de loi qui avait été déposée par Bruno Retailleau et Mathieu Darnaud. Surtout, il s’agit d’une expérimentation limitée dans le temps – cinq ans –, qui est soumise à l’accord de la région : c’est elle qui peut déléguer au département l’octroi de tout ou partie des aides aux entreprises.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 82, 141 et 150.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Madame la ministre, mes chers collègues, comme précédemment, nous en arrivons à deux amendements identiques de conséquence avec les amendements que nous avons adoptés à l’article 1er.
L’amendement n° 65 rectifié est présenté par MM. Danesi et Kern, Mme Keller et MM. Brisson, Laménie et Sido.
L’amendement n° 116 est présenté par Mme Schillinger et les membres du groupe La République En Marche.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 1
Remplacer les mots :
le département d’Alsace est autorisé
par les mots :
la Collectivité européenne d’Alsace est autorisée
Si vous en êtes d’accord, je vous propose également de considérer que ces amendements identiques sont défendus et que l’avis de la commission est favorable, de même que l’avis du Gouvernement.
Puis-je considérer que ces amendements sont adoptés ?….
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. Les amendements nos 48 et 43 ne sont pas soutenus.
Je mets aux voix l’article 2 bis, modifié.
(L’article 2 bis est adopté.)
Article 3
I. – Les routes et autoroutes non concédées, classées dans le domaine public routier national et situées dans les départements du Bas-Rhin et du Haut-Rhin à la date de publication de la présente loi, sont transférées avec leurs dépendances et accessoires dans le domaine public routier du département d’Alsace.
Le domaine privé de l’État affecté à l’entretien, à l’exploitation et à la gestion du domaine public routier national est transféré au département d’Alsace.
Ces transferts sont constatés par arrêté conjoint des représentants de l’État dans les départements du Bas-Rhin et du Haut-Rhin au plus tard le 1er janvier 2020. Cette décision emporte transfert, au 1er janvier 2021, au département d’Alsace, des servitudes, droits et obligations correspondants, ainsi que le classement des routes transférées dans la voirie départementale. Ces routes transférées sont maintenues au sein du réseau transeuropéen de transport. Leur transfert s’effectue, le cas échéant, sans préjudice de leur caractère de route express ou de route à grande circulation.
Les terrains acquis par l’État en vue de l’aménagement des routes transférées sont cédés au département d’Alsace.
Par dérogation aux articles L. 121-1 et L. 131-1 du code de la voirie routière, les autoroutes non concédées dénommées A4, A35, A351, A352 et A36 situées sur le territoire du département d’Alsace ou, le cas échéant, les portions des mêmes autoroutes qui y sont situées conservent leur appellation et demeurent régies par les articles L. 122-1 à L. 122-3 du même code. Le président du conseil départemental exerce sur lesdites autoroutes ou portions d’autoroutes le pouvoir de police de la circulation, après avis du préfet coordonnateur des itinéraires routiers. Sous réserve du présent alinéa, sont applicables auxdites autoroutes ou portions d’autoroutes les dispositions légales applicables aux routes départementales.
Lorsque le maintien de leur statut autoroutier ne se justifie plus, les autoroutes ou portions d’autoroutes mentionnées à l’avant-dernier alinéa du présent I peuvent être déclassées par le conseil départemental, après avis du préfet coordonnateur des itinéraires routiers. Leur déclassement vaut reclassement dans la catégorie des routes départementales.
II. – Le département d’Alsace peut transférer à l’eurométropole de Strasbourg, à sa demande, des portions de voies mentionnées au I du présent article qui sont situées sur son territoire. Les portions d’autoroutes doivent avoir été préalablement déclassées dans les conditions prévues au dernier alinéa du même I.
Ce transfert est constaté par un procès-verbal établi contradictoirement entre les représentants des collectivités.
III. – Les transferts prévus aux I et II sont réalisés à titre gratuit et ne donnent lieu au paiement d’aucun droit, ni d’aucune indemnité ou taxe, ni de la contribution prévue à l’article 879 du code général des impôts.