Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. Dans le cadre de la modification des règles de publicité du privilège du Trésor prévue à l’article 17 de ce projet de loi, qui est au moins aussi utile pour l’administration fiscale que pour les entreprises, l’étude d’impact évoque un relèvement du seuil d’inscription de 15 000 à 200 000 euros par décret.
Il s’agit d’un élément aussi important, voire davantage, que ce qui est prévu dans le projet de loi lui-même, car les conséquences de l’inscription peuvent être très lourdes pour les partenaires des entreprises.
Quand ce décret doit-il être pris, monsieur le ministre ? Par ailleurs, un relèvement similaire est-il prévu pour le privilège de la sécurité sociale, tel qu’évoqué à l’article 17 bis du projet de loi, sachant que les seuils sont aujourd’hui de 10 000, 15 000 et 20 000 euros, selon la taille et la catégorie de l’employeur ? Un tel relèvement serait cohérent.
Mme la présidente. La parole est à M. Fabien Gay, sur l’article.
M. Fabien Gay. Nous prenons encore une fois la parole sur l’article, nos amendements ayant été déclarés irrecevables. Pourtant, ils portaient sur la fraude fiscale et sur les sanctions applicables aux entreprises, notamment en matière de transparence et de publicité. Il me semble que nous aurions pu consacrer quelques minutes à ces questions, sachant que nous avons passé deux heures, hier, sur celle du plastique…
Les deux premiers amendements du groupe communiste républicain citoyen et écologiste visaient à renforcer l’obligation de communication des données fiscales au sein de l’entreprise, notamment pour permettre aux représentants du conseil social et économique, le CSE, de remplir correctement leur mission.
Un outil existe pour informer les salariés dans toute entreprise : la banque de données économiques et sociales, définie par l’article L. 2312-36 du code du travail. Dans cette banque de données, qui avait fait l’objet, je le rappelle, d’une discussion relativement âpre et longue lors de l’examen, par la Haute Assemblée, de la loi du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi, figurent certains dispositifs et informations qui peuvent toujours s’avérer utiles pour le comité social et économique de l’entreprise. Toutefois, il manque des données essentielles en matière de fiscalité.
En outre, le seuil pour l’obligation d’information, aujourd’hui fixé à 300 salariés, ne nous paraît pas être le bon. C’est pourquoi nous proposions de l’abaisser à 50 salariés, sachant que l’abaissement des seuils semble être une marque de fabrique de ce texte…
Notre dernier amendement reprenait une proposition d’une commission d’enquête du Sénat, présidée par notre collègue Philippe Dominati, qui préconisait de créer un délit d’incitation à la fraude fiscale.
Mme Nathalie Goulet. Absolument !
M. Fabien Gay. Pourquoi avoir déposé ces amendements ? Tout simplement parce que la lutte contre la fraude fiscale est l’affaire de tous,…
Mme Nathalie Goulet. Eh oui !
M. Fabien Gay. … notamment des salariés, ne serait-ce qu’en raison de l’obligation de dénoncer tout fait délictueux.
Par ailleurs, alors que l’on entend, au travers de la section 2 du chapitre III de ce projet de loi, « repenser la place des entreprises dans la société », il est essentiel de travailler à accroître la confiance à l’égard des entreprises, mais aussi à conforter leur développement. Or la fraude fiscale de quelques entreprises malhonnêtes freine le développement de toutes, d’une part parce que cela contribue au dumping et à la concurrence déloyale, d’autre part parce que cela réduit les rentrées fiscales, donc nos marges de manœuvre pour accompagner les entreprises, de leur création à leur développement.
Mme Nathalie Goulet. Très bien !
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 17.
(L’article 17 est adopté.)
Article 17 bis
I. – Le premier alinéa de l’article L. 243-5 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« Les créances privilégiées en application du premier alinéa de l’article L. 243-4 dues par un commerçant, une personne immatriculée au répertoire des métiers, une personne physique exerçant une activité professionnelle indépendante, y compris une profession libérale, ou une personne morale de droit privé doivent être inscrites à un registre public tenu au greffe du tribunal de commerce ou du tribunal de grande instance dès lors qu’elles dépassent, au terme d’un semestre civil, un seuil fixé par décret ou, le cas échéant, dans le délai de neuf mois suivant la date de notification de l’avertissement ou de la mise en demeure prévus à l’article L. 244-2, lorsque la créance est constatée lors d’un contrôle organisé en application de l’article L. 243-7. Le montant mentionné au présent alinéa est fixé en fonction de la catégorie à laquelle appartient le cotisant et de l’effectif de son entreprise. »
II (nouveau). – Le présent article s’applique aux créances exigibles à compter d’une date fixée par décret, et au plus tard à compter du 1er janvier 2020.
Mme la présidente. L’amendement n° 963, présenté par Mme Lamure, au nom de la commission spéciale, est ainsi libellé :
Alinéas 1 et 2
Remplacer ces alinéas par cinq alinéas ainsi rédigés :
I. – La première phrase du premier alinéa de l’article L. 243-5 du code de la sécurité sociale est ainsi modifiée :
1° Les mots : « qu’elles dépassent un montant fixé par décret, les créances privilégiées » sont remplacés par les mots : « qu’elle dépasse un montant fixé par décret, toute créance privilégiée » ;
2° Le mot : « dues » est remplacé par le mot : « due » ;
3° Les mots : « doivent être inscrites » sont remplacés par les mots : « doit être inscrite » ;
4° Les mots : « dans le délai de neuf mois suivant leur » sont remplacés par les mots : « au terme du semestre civil suivant sa ».
La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. Le présent amendement vise à remédier à certaines difficultés relatives à la modification des règles de publicité du privilège de la sécurité sociale, en conservant la notion de la date limite de paiement à partir de laquelle s’apprécie la fin du semestre civil et en précisant que le montant au-delà duquel l’inscription doit être prise s’apprécie créance par créance à l’issue du semestre civil, et non de façon cumulée.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 17 bis, modifié.
(L’article 17 bis est adopté.)
Article 18
I. – Le quatrième alinéa de l’article L. 622-24 du code de commerce est ainsi modifié :
1° A (nouveau) Après la cinquième phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Si la détermination de l’assiette et du calcul de l’impôt est en cours, l’établissement définitif des créances admises à titre provisionnel doit être effectué par l’émission du titre exécutoire dans un délai de douze mois à compter de la publication du jugement d’ouverture. » ;
1° L’avant-dernière phrase est ainsi modifiée :
a) Les mots : « administrative d’établissement de l’impôt a été mise en œuvre » sont remplacés par les mots : « de contrôle ou de rectification de l’impôt a été engagée » ;
b) Le mot : « effectué » est remplacé par le mot : « réalisé » ;
2° (Supprimé)
I bis (nouveau). – Le dernier alinéa de l’article L. 641-3 est ainsi modifié :
1° Après la première phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Si la détermination de l’assiette et du calcul de l’impôt est en cours, l’établissement définitif des créances du Trésor public admises à titre provisionnel doit être effectué par l’émission du titre exécutoire dans le délai prévu à l’article L. 624-1. » ;
2° La deuxième phrase est ainsi modifiée :
a) Le début est ainsi rédigé : « Toutefois, si une procédure de contrôle ou de rectification de l’impôt a été engagée, l’établissement définitif…(le reste sans changement) » ;
b) Le mot : « effectué » est remplacé par le mot : « réalisé ».
II. – (Non modifié) Le présent article s’applique aux procédures collectives ouvertes à compter du 1er janvier de l’année suivant la publication de la présente loi.
Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Cadic, sur l’article.
M. Olivier Cadic. Au travers de ce projet de loi, le Gouvernement manifeste la volonté de soutenir les entreprises et entrepreneurs éprouvant des difficultés, en essayant de favoriser leur rebond. Si l’intention est bonne, il est en revanche regrettable de devoir constater que ce texte ne va pas toujours assez loin.
Quand une entreprise connaît des difficultés, elle reste soumise à ses obligations fiscales. Pour l’accompagner, il existe divers mécanismes de report, d’aménagement, de conciliation. Or ces derniers ne fonctionnent pas toujours, ce qui peut amplifier les difficultés, les pénalités et majorations étant dues dès le premier jour de retard.
Actuellement, la prise en considération des difficultés de l’entreprise relève majoritairement du pouvoir discrétionnaire de l’administration et du comptable public. Pour l’entrepreneur connaissant des difficultés, la sécurité juridique afférente à ces dispositifs est donc relativement faible, et le refus d’octroi d’un avantage qui lui semblait légitime peut mener à la mise en péril de son activité. Il y va pourtant de l’intérêt de l’entrepreneur comme de celui de l’administration fiscale : une entreprise qui dépose le bilan est une entreprise qui ne concourt plus à la bonne santé économique du pays ni à celle de ses finances publiques.
C’est la raison pour laquelle, dans mon rapport d’information relatif à l’accompagnement du cycle de vie des entreprises, j’avais proposé de réviser les mécanismes de modulation des pénalités et majorations de retard, notamment en instaurant leur progressivité en lieu et place de la linéarité actuelle. Aujourd’hui, quand on a un seul jour de retard dans le paiement d’une échéance fiscale, on supporte une majoration de 10 %.
La logique d’accompagnement des entreprises par les services collecteurs a déjà pu être enclenchée l’année dernière par l’instauration du droit à l’erreur via la loi du 10 août 2018 pour un État au service d’une société de confiance. Pourquoi, monsieur le ministre, ne pas l’avoir davantage développée à l’occasion de l’élaboration du présent projet de loi ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 18.
(L’article 18 est adopté.)
Article 19
(Non modifié)
I. – Le troisième alinéa de l’article L. 642-7 du code de commerce est complété par une phrase ainsi rédigée : « Par dérogation, toute clause imposant au cessionnaire d’un bail des dispositions solidaires avec le cédant est réputée non écrite. »
II. – Les dispositions du I du présent article ne sont pas applicables aux procédures en cours au jour de la publication de la présente loi. – (Adopté.)
Article 19 bis
(Non modifié)
Le chapitre II du titre III du livre III de la troisième partie du code du travail est ainsi modifié :
1° L’article L. 3332-10 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ces versements ne peuvent excéder une fois la rémunération annuelle ou le revenu professionnel imposé à l’impôt sur le revenu au titre de l’année précédente lorsqu’ils sont effectués à destination du fonds commun de placement mentionné à l’article L. 3332-16. » ;
b) Le deuxième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ces versements ne peuvent excéder une fois le montant annuel du plafond prévu au même article L. 241-3 lorsqu’ils sont effectués à destination du fonds commun de placement régi par l’article L. 3332-16 du présent code. » ;
2° L’article L. 3332-16 est ainsi modifié :
a) À la première phrase du deuxième alinéa, le mot : « cinq » est remplacé par le mot : « trois » ;
b) Au 1°, le mot : « quinze » est remplacé par le mot : « dix » et le taux : « 30 % » est remplacé par le taux : « 20 % ».
Mme la présidente. La parole est à M. Fabien Gay, sur l’article.
M. Fabien Gay. Cet article assouplit les conditions de constitution et d’abondement du fonds commun de placement d’entreprise de reprise. Ce dispositif, adossé à l’épargne salariale, permet au salarié d’utiliser l’argent dont il dispose sur le plan d’épargne d’entreprise pour abonder un fonds de reprise, lequel rachètera des parts de l’entreprise en question, faisant ainsi du salarié un actionnaire.
Si l’idée de permettre à des salariés de participer à la reprise de leur entreprise est plutôt séduisante, la manière dont elle est mise en œuvre ici est peu satisfaisante : ce dispositif n’est finalement rien d’autre que le parent pauvre des coopératives. En effet, bien souvent, les salariés sont actionnaires minoritaires, et n’ont pas de réelle possibilité de participer à la gestion et à la prise de décision dans l’entreprise.
Prenons l’exemple du groupe Kering, cité dans le rapport : plus de 1 500 salariés de ce groupe ont participé au fonds commun de placement d’entreprise pour la reprise de La Redoute et de Relais Colis, mais ils ne détiennent que 16 % des parts de la holding possédant ces deux entreprises. Ainsi, les salariés, lorsqu’ils se regroupent, restent largement minoritaires, et de plus la voix des salariés considérés individuellement n’a aucun poids.
En fin de compte, les salariés financent l’entreprise qui les emploie sans vraiment avoir leur mot à dire ; au mieux, ils ont la possibilité de participer au noyau dur des actionnaires stables. Pour avoir un réel poids et prétendre être majoritaires, ils devraient rassembler une somme considérable au regard de leurs revenus, surtout quand il s’agit de grandes entreprises dont les parts valent cher.
D’ailleurs, ce dispositif est assez discriminant : tous les salariés ne disposent pas d’une épargne, et tous ne peuvent pas épargner à la même hauteur. Ceux qui pourront acheter des parts en grand nombre sont ceux qui ont les revenus les plus importants. Il est regrettable que tous les salariés ne puissent pas s’impliquer de manière égale dans la gestion de leur entreprise.
Ce dispositif, créé en 2006, semble être, malgré les modifications apportées par cet article, une mauvaise adaptation de la possibilité qu’ont toujours eue les salariés de se regrouper, quand une entreprise est en difficulté, pour la reprendre eux-mêmes.
Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à onze heures quarante-cinq, est reprise à onze heures cinquante.)
Mme la présidente. La séance est reprise.
Article 19 ter
I. – (Non modifié) L’article 22-2 de la loi n° 96-603 du 5 juillet 1996 relative au développement et à la promotion du commerce et de l’artisanat est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le présent article n’est pas applicable aux personnes mentionnées aux articles L. 241-1 et L. 241-2 du code des assurances. »
II (nouveau). – À l’article L. 243-2 du code des assurances, après les mots : « modèle d’attestation d’assurance comprenant des mentions minimales », sont insérés les mots : « , parmi lesquelles la justification du paiement de leurs primes ».
Mme la présidente. L’amendement n° 572, présenté par M. Gay, Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. – Le I bis de l’article 726 du code général des impôts est ainsi rétabli :
« I bis. – Le I du présent article n’est pas applicable lorsque la cession de droits sociaux consiste en l’attribution des parts sociales de l’entreprise à ses propres salariés. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. L’article 19 ter supprime l’obligation de rechercher un repreneur en cas de projet de fermeture d’un établissement dans les entreprises de plus de 1 000 salariés.
Cette obligation est issue de la loi du 29 mars 2014 visant à reconquérir l’économie réelle, dite « loi Florange ». À l’époque, notre groupe avait regretté que le texte ne concerne que les grosses entreprises, de plus de 1 000 salariés, mais cette loi obligeait les groupes voulant fermer un site rentable à rechercher un repreneur pendant trois mois, ce qui était tout à fait positif.
Aussi proposons-nous de récrire cet article régressif pour faciliter, au contraire, les opérations de reprise d’entreprise par les salariés.
Pour l’entrepreneur cédant, l’opération de reprise d’entreprise par les salariés représente la possibilité d’assurer une transmission en douceur et en confiance, avec des repreneurs qui connaissent déjà l’entreprise. Il y a moins de risques que l’opération soit abandonnée avant la signature ou que les données collectées pendant la transaction fuitent vers la concurrence, par exemple.
Pour les clients, les avantages tiennent au fait d’avoir des interlocuteurs inchangés et très motivés, qu’ils voient progressivement monter en responsabilité.
Si plusieurs salariés sont repreneurs et ont une vision solidaire de l’entrepreneuriat, avec des principes de gouvernance partagée, le recours à une société coopérative de production s’inscrira dans une démarche solidaire et responsable, que nous défendons par ailleurs. Je pense notamment aux anciens salariés de Fralib, qui ont créé la marque de thé « 1336 », que je vous recommande, mes chers collègues !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. Restreindre le bénéfice de cette exemption de droits sociaux aux seuls salariés de l’entreprise paraît contestable dans son principe, et conduirait par ailleurs à la création d’une taxe supplémentaire. La commission spéciale a donc émis un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Je constate que, chaque fois que l’on présente des amendements allant dans le sens des salariés, les avis sont défavorables.
Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. C’est faux ! Voyez pour les chambres de commerce et d’industrie, par exemple !
Mme Laurence Cohen. « C’est trop complexe », « cela ne va pas dans le bon sens », « cela entravera l’entreprise », nous dit-on… Or on a de nombreux exemples de reprise d’une entreprise par des salariés ayant permis de préserver l’outil de production et de garantir la qualité du produit. C’est une démarche intéressante, qui devrait être accompagnée. On voit bien qu’il y a là des présupposés qui sont toujours favorables aux grosses entreprises et défavorables aux salariés. Je dénonce cette attitude !
Mme la présidente. L’amendement n° 449 rectifié, présenté par M. Segouin, Mme de Cidrac, M. Panunzi, Mme Lavarde, MM. Brisson, Babary, de Nicolaÿ et Bonhomme, Mme Gruny, MM. Regnard, Vaspart et Laménie, Mme Ramond, M. Pellevat, Mme Deromedi et MM. D. Laurent, Lefèvre, Daubresse, Rapin et Poniatowski, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Vincent Segouin.
M. Vincent Segouin. L’alinéa 3 du présent article porte sur l’ajout parmi les mentions minimales des attestations d’assurance décennales de la justification du paiement de la prime. Cette exigence va à l’encontre de la demande des assurés que sont les professionnels du secteur du bâtiment et des travaux publics, le BTP.
En effet, les entreprises du BTP peuvent demander des souplesses dans le paiement de leur prime, qu’il soit mensuel, trimestriel, semestriel ou annuel, et les assureurs s’adaptent. Or exiger l’attestation du paiement total de la prime dès le début de l’année conduirait les assureurs à revoir les conditions de souplesse accordées aux assurés pour échelonner les paiements. Il en va de même pour les attestations de chantier, puisque la prime définitive est calculée à la fin du chantier.
Pour ces raisons, nous proposons de supprimer cet alinéa.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. Nous avons volontairement ajouté la mention du justificatif de paiement de la prime de manière à renforcer cette attestation désormais unique. La commission spéciale est donc défavorable à sa suppression.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 480 rectifié, présenté par MM. Bascher, J.M. Boyer, Vaspart et Chevrollier, Mme Lavarde, MM. Cardoux, Lefèvre et Houpert, Mme Ramond, M. Panunzi, Mme Gruny, M. Babary, Mme Deromedi, M. Brisson, Mmes Bonfanti-Dossat et Morhet-Richaud, MM. D. Laurent, Saury et Le Gleut, Mme Delmont-Koropoulis, MM. de Nicolaÿ, Vogel et Bazin, Mme Bories, MM. Raison, Perrin, Regnard et Laménie, Mme Bruguière, MM. Pellevat, Darnaud, Genest, Grand et Revet, Mmes Noël et Lherbier, MM. Rapin, de Legge et Poniatowski, Mme Keller, MM. Chatillon et Savary, Mme Garriaud-Maylam et M. Duplomb, est ainsi libellé :
Compéter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Au premier alinéa de l’article L. 329-1 du code des assurances, la référence : « à l’article L. 310-1 », est remplacée par les références : « aux articles L. 241-1, L. 242-1 et L. 310-1 ».
La parole est à M. Jérôme Bascher.
M. Jérôme Bascher. Cet amendement a pour objet de traiter partiellement un sujet qui n’est pas médiocre, celui des assurances dites « garanties décennales ». Un véritable scandale organisé émerge, que la presse a déjà commencé à révéler. Aujourd’hui, les assureurs auprès desquels on peut souscrire une garantie décennale ne sont plus situés en France, mais dans des pays tels que Gibraltar, l’Irlande ou le Liechtenstein. Ils ne sont soumis ni au contrôle de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, l’ACPR, ni aux directives européennes. Plusieurs de ces assureurs étrangers ont fait faillite, et de ce fait de nombreux particuliers, mais aussi des offices d’HLM et des sociétés d’économie mixte que, les uns ou les autres, nous avons peut-être présidés, ne sont aujourd’hui plus couverts par la garantie décennale qu’ils avaient souscrite.
Cet amendement ne peut régler l’ensemble du problème, car il existe en la matière une directive européenne. Il faudrait que toutes les compagnies d’assurances qui interviennent en matière de garantie décennale soient soumises au contrôle de l’ACPR, mais la directive en question l’empêche. Il serait nécessaire que, à tout le moins, les compagnies d’assurances qui ne sont pas situées au sein de l’Espace économique européen soient soumises au contrôle de cette autorité.
Monsieur le ministre, la directive est à revoir. La France est le seul pays d’Europe à avoir instauré une garantie décennale. En Belgique, par exemple, la garantie ne porte que sur cinq ans. Comme par hasard, toutes ces compagnies d’assurances offshore font faillite au bout de quatre, cinq ou six ans. Cet amendement vise à régler, à tout le moins, le problème des assureurs implantés hors de l’Union européenne. (Marques d’approbation sur des travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe socialiste et républicain.)
M. Vincent Segouin. Très bien !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. L’amendement de notre collègue souligne une urgence réelle, celle qu’il y a à renforcer les actuelles garanties en matière de solvabilité des compagnies d’assurances étrangères, dont certaines ont connu, notamment au cours des deux dernières années, la faillite, et ont laissé sans aucune couverture de nombreux particuliers et collectivités.
C’est pourquoi je relaie cet amendement d’appel pour demander au Gouvernement quelles sont ses intentions à l’égard de cette directive européenne. C’est un problème très important, qui fragilise tant nos concitoyens que nos entreprises.
La commission spéciale s’en remet, sur cet amendement, à la sagesse du Sénat.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bruno Le Maire, ministre. À l’article 71, nous allons examiner un amendement, de M. Jean Bizet qui résout le problème. Dans cette attente, je vous propose de retirer le vôtre, monsieur le sénateur.
Mme la présidente. Monsieur Bascher, l’amendement n° 480 rectifié est-il maintenu ?
M. Jérôme Bascher. L’amendement de Jean Bizet ne concerne que les courtiers. Il répond en effet à une demande des entreprises de courtage, qui, elles, ne sont pas organisées, pour les garanties liées à la construction, en syndicat professionnel. Or on n’est pas obligé, pour contracter une garantie décennale, de passer par un courtier. Certaines entreprises de travaux ne s’en privent pas : elles ont leur assureur habituel pratiquant des primes moins élevées, ce qui leur permet de gagner en compétitivité et de remporter les marchés, notamment auprès des sociétés d’économie mixte et des offices d’HLM. Il y a notamment, je le dis à l’adresse de mes collègues d’outre-mer, une véritable filière ultramarine pour ces contrats.
Je voterai évidemment l’amendement de Jean Bizet, mais il ne répond que partiellement au sujet. C’est pourquoi je maintiens le mien.